Accessibilité et inclusion bancaires

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à renforcer l'accessibilité et l'inclusion bancaires, présentée par MM. Rémi Féraud, Jean-Claude Tissot, Patrick Kanner, Rémi Cardon, Mmes Florence Blatrix Contat, Laurence Rossignol et plusieurs de leurs collègues.

Discussion générale

M. Rémi Féraud, auteur de la proposition de loi .  - Nous présentons une proposition de loi de progrès social, qui s'inscrit dans la lignée d'autres travaux sur l'accessibilité bancaire ayant permis de réels progrès, notamment en matière d'accession à l'assurance emprunteur.

Nous sortons de la crise sanitaire et sommes entrés dans une période inflationniste dont les conséquences se font gravement sentir chez les plus modestes ; en parallèle, le secteur bancaire a affiché des bénéfices records que conforte la hausse des taux directeurs.

L'association UFC-Que Choisir alerte régulièrement sur les frais bancaires : 20 euros pour un prélèvement refusé, c'est dix-sept fois plus qu'en Allemagne et huit fois plus qu'en Italie.

Le bouclier tarifaire permet de limiter la hausse des frais bancaires, mais ne suffira pas à protéger les plus fragiles, qui sont aussi ceux qui se voient infliger le plus de pénalités.

La désertification rurale s'accentue également, et le problème d'accès aux liquidités en fait partie.

Ce texte repose sur deux volets : l'accessibilité bancaire, avec pour objectif le maintien sur l'ensemble du territoire de systèmes de retrait d'argent permettant les achats quotidiens en liquide ; l'inclusion bancaire pour améliorer les dispositifs actuels en direction des publics fragiles, qui représentent une part trop importante des frais bancaires générés.

Les articles 1er et 2 ajoutent une composante territoriale à la mission de service public de La Poste. Face à la tendance de fermeture des distributeurs automatiques de billets (DAB), nous devons agir maintenant. Dans certains territoires, il est de plus en plus difficile de retirer de l'argent, témoignent les élus locaux. Les méthodes de retrait d'argent expérimentées chez les commerçants ne suffisent pas.

Certes, selon la Banque de France, 99 % des Français seraient à moins de quinze minutes d'un DAB, mais tout le monde n'a pas de voiture et l'essence coûte cher. Et il faut anticiper.

Avec la forte réduction de la circulation des espèces, nous sommes proches d'un point de bascule. Conservons un accès aisé et égal au retrait de liquidités à travers un dispositif qui ne repose pas sur l'État mais répartit le coût sur l'ensemble du système bancaire.

L'article 7 rend obligatoires les sanctions pécuniaires en cas de carence des banques dans le droit au compte ou à l'offre spécifique. Nous renforçons le principe de responsabilité.

Sur l'accessibilité sociale, nous voulons, aux articles 3 et 4, renforcer l'information dans le secteur bancaire et rendre proportionnels les plafonds des frais pour les personnes fragiles.

À l'article 5, nous limitons le montant des découverts.

L'objectif de l'article 6 est de réduire le niveau à hauteur duquel les Français les plus fragiles contribuent au système bancaire. Nous voulons des tarifs adaptés afin d'éviter une spirale infernale.

Le Sénat doit faire évoluer la législation pour plus de protection et d'équité.

Je salue l'esprit constructif du rapporteur dans son travail préparatoire. Nous souhaitons conserver cet état d'esprit : tout ce qui améliorera l'accessibilité bancaire est utile.

Nous espérons que notre proposition sera ensuite adoptée par le Sénat sans être trop dénaturée ni réduite dans sa portée. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Pascal Savoldelli applaudit également.)

M. Stéphane Sautarel, rapporteur de la commission des finances .  - (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Dans un contexte marqué par l'inflation et la renonciation aux espèces, nous examinons cette proposition de loi de Rémi Féraud et Jean-Claude Tissot visant à faciliter l'accès aux DAB et à redéfinir le plafonnement de certains frais bancaires pour les plus fragiles. L'examen s'est fait dans les conditions du gentleman's agreement : les divergences avec les auteurs étant trop importantes, la commission a rejeté la proposition de loi et examine donc le texte initial.

La commission des finances propose de supprimer l'article 1er, sachant que 99 % de la population vit à moins de quinze minutes en voiture d'un DAB. La nouvelle mission confiée à La Poste pourrait entraîner un effet d'aubaine conduisant au désengagement des banques. Le rapport de 2021 des sénateurs Chaize, Louault et Cardon excluait tout nouvel engagement. Le cash in shop compte déjà 25 000 entrées dans notre pays mais gagnerait à être interopérable.

L'article 2, qui prévoit un fonds spécifique pour financer cette mission, n'aurait plus d'objet si nous la supprimons. Son financement pose problème, avec une taxe spécifique sur les bénéfices des établissements bancaires, sans taux précis ni prise en compte des néobanques. De plus, la contribution frapperait les banques sans tenir compte de l'endroit de la fermeture ; enfin, elle serait injuste, car elle ne tiendrait pas compte des banques qui ont abandonné les territoires depuis longtemps.

Dernier point de divergence, l'article 7, qui prévoit d'imposer des sanctions pécuniaires de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) aux banques ne respectant pas les règles du droit au compte ou à l'offre spécifique. L'ACPR, autorité indépendante, doit rester souveraine dans ses décisions. Elle dispose déjà d'un pouvoir de sanction pécuniaire dont elle a déjà fait usage.

Les articles 3 à 6 enrichissent l'information sur le droit au compte et l'offre spécifique. La commission des finances propose de les modifier.

L'article 3 prévoit un meilleur affichage de la charte sur l'inclusion bancaire et la prévention du surendettement. Ce renforcement de l'information serait bénéfique pour nos concitoyens qui en ont besoin. Je propose d'élargir le champ des informations que les banques seront tenues de donner au public, notamment sur le traitement du surendettement, le microcrédit et l'accès aux fichiers de la Banque de France. La charte préciserait les modalités d'information - affichage ou autre - et définirait les conditions de formation de certains professionnels d'accompagnement social.

L'article 4 rend les plafonds proportionnels au revenu. Ce serait disproportionné et contraire à la confidentialité des données fiscales. Nous proposons plutôt des sous-plafonds pour les publics fragiles.

L'article 5 prévoit un découvert sans frais, proportionnel au revenu. Outre le problème de la proportionnalité, une telle disposition risque d'alimenter des spirales d'endettement et de créer un droit au crédit inexistant en droit français. Cependant, certains craignent de perdre leur droit à découvert s'ils souscrivent l'offre spécifique : nous proposons donc d'inscrire que ces deux phénomènes sont indépendants.

L'article 6 limite les frais au tiers des facturations de l'établissement de crédit et les plafonne en fonction du revenu. C'est une atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle, qui plus est redondante avec le plafonnement mensuel. Un simple plafonnement des frais par opération pour les bénéficiaires du droit au compte et de l'offre spécifique, en revanche, serait utile.

Ce texte comporte des objectifs louables mais mérite d'être modifié pour être opérant. Si les amendements de la commission des finances sont retenus, elle appellera à son adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Le Gouvernement partage l'objectif d'assurer à l'ensemble de la population l'accès à des services bancaires de qualité à des tarifs appropriés. Mais cette proposition de loi ne permet pas de l'atteindre.

Nos concitoyens sont attachés à la proximité et à la vitalité de leurs territoires. Nous partageons la nécessité de lutter contre l'enclavement, à l'heure où l'inflation touche tous les territoires et où certains voient leur attractivité baisser. Chacun doit pouvoir accéder aux espèces. Mais le maillage des DAB est très bon et la légère diminution de leur nombre concerne surtout les zones urbaines, les mieux équipées.

La robustesse de la filière fiduciaire est globalement garantie, nous l'avons vu durant le confinement. Ce maillage permet à plus de 99 % de la population d'être située à moins de quinze minutes d'un DAB. La France est le second pays pour son maillage bancaire : 549 agences par million d'habitants, contre 255 dans l'Union européenne.

Des territoires isolés bénéficient de 30 000 points de retraits privatifs. Le retrait simple chez un commerçant renforce l'attractivité des commerces locaux et renforce le lien social.

Depuis la loi de 1990, La Poste est chargée d'une mission d'accès aux espèces et conserve à ce titre 17 000 points de contacts dans les territoires isolés, les quartiers Politique de la ville et outre-mer. L'accès aux espèces est donc préservé.

Sur l'inclusion bancaire, il est économiquement justifié que les banques facturent leurs prestations de services et des frais en cas d'incident bancaire, en raison de coûts de gestion supplémentaires.

Les Français bénéficient d'un niveau de facturation des services bancaires satisfaisant. Depuis 2017, les frais bancaires sont globalement à la baisse, en raison de la concurrence et de la digitalisation.

Enfin, le secteur limite les abus. Certains services bancaires sont gratuits, comme le relevé mensuel ou la clôture de compte.

Certains types de frais sont plafonnés pour l'ensemble de la population, comme le rejet de chèque - 30 ou 50 euros selon le montant - ou le rejet de prélèvement - 20 euros.

La proposition de loi vise à diviser par deux les plafonds de frais d'incidents pour l'ensemble de la population, et à prévoir des plafonds plus bas pour les clients les plus fragiles.

Aider les plus aisés enverrait un signal négatif. Il faut concentrer les mesures sur ceux qui en ont le plus besoin pour éviter la suraccumulation de frais et une spirale de surendettement.

Le Gouvernement a mis en place un nouveau cadre depuis 2018 selon une méthode partenariale avec les banques inédite. Désormais, les personnes fragiles ne sont exposées qu'à des frais limités à 25 ou 20 euros par mois. Ce dispositif est contrôlé par l'ACPR.

L'observatoire de l'inclusion bancaire a dressé un bilan positif de ces actions. Quatre millions de clients sont fragiles financièrement et bénéficient du plafonnement des frais, soit 20 % de plus qu'en 2018. Le montant moyen des frais facturés par les banques à leurs clients considérés comme fragiles est en diminution : 221 euros en 2021, 10 % de moins qu'en 2020. Enfin, l'offre spécifique bénéficie à 700 000 personnes, soit 56 % de plus par rapport à 2018.

Les Français peuvent compter sur un système bancaire robuste, qui applique des frais raisonnables. Le Gouvernement a agi pour renforcer l'inclusion bancaire en partenariat avec le secteur. Il restera vigilant, mais les réformes ont permis d'atteindre un point d'équilibre. Le Gouvernement présentera des amendements et s'opposera à la proposition de loi.

M. Bernard Buis .  - Plus de 4 millions de titulaires d'un compte bancaire sont considérés comme fragiles. Selon quels critères ? Le code monétaire et financier présente trois conditions : avoir déposé un dossier de surendettement recevable, avoir été inscrit pendant trois mois consécutifs au fichier central des chèques et avoir été identifié par la banque comme étant en situation de fragilité financière au titre des revenus.

Autant d'éléments qui nous rappellent que nombre de nos concitoyens sont dans une situation financière fragile. Mais les mesures proposées par nos collègues nous semblent inefficientes et disproportionnées.

La mission de couverture territoriale attribuée à La Banque Postale ajouterait une charge supplémentaire non financée par l'article 2.

L'article 3 n'est qu'une redondance de la législation établie par la charte d'inclusion bancaire et de prévention du surendettement.

L'article 4, qui impose une tarification proportionnelle aux revenus, entraînerait des difficultés d'application et ses dispositions induiraient un risque de surendettement pour les plus précaires.

D'autres mesures sont disproportionnées, comme le double plafonnement des frais de services bancaires à l'article 6, ou l'imposition d'une sanction pécuniaire aux établissements bancaires qui ne rempliraient pas leurs obligations. Imposer des sanctions sans l'intervention d'un juge pose problème au regard de l'État de droit.

Notre groupe adaptera sa position en fonction des amendements adoptés.

M. Jean-Claude Tissot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Ce texte apporte une réponse cohérente et concrète aux inégalités territoriales et sociales qui frappent de nombreux territoires ruraux, comme la Loire. Je m'étonne que la droite sénatoriale, qui se veut la grande défenseure de la ruralité, ne soit pas plus favorable aux mesures que nous proposons ! La désertification rurale vient encore et toujours frapper les mêmes publics, déjà touchés par le terrible recul des services publics dans les territoires et la fermeture des commerces. Ce cumul d'inégalités d'accès crée un sentiment d'abandon. Il est urgent d'y répondre.

M. le rapporteur argue que 99 % des Français se trouvent à moins de 15 minutes d'un DAB. Mais, venant d'un département qui n'est pas si éloigné du mien, il reconnaîtra qu'à certaines périodes de l'année, cela peut prendre plus de temps. De plus, certaines personnes n'ont pas les moyens de se déplacer, pour des raisons de santé ou faute d'un moyen de transport.

La réalité de nos territoires doit guider nos actions. Les paiements en liquide sont au coeur de la vie locale, notamment pour les associations.

Les points relais commerçants et le dispositif « Allô facteur » sont intéressants, mais restent sous-utilisés. Nous proposons la création d'un fonds dédié. Le principe est clair : si une banque quitte un territoire, elle devra contribuer au financement du fonds.

Le deuxième axe concerne l'accompagnement des populations les plus précaires. Face à la complexité des démarches administratives, le renforcement de l'inclusion bancaire est nécessaire.

La Banque de France a relevé une hausse de 20 % des inscriptions au fichier des incidents de remboursements de crédit.

Le renforcement de l'information en agence est indispensable. Nous le proposons à l'article 3. La Banque Postale prend déjà en charge près de 1,6 million de clients jugés fragiles, soit 47 % de ce public. Seules des sanctions pécuniaires permettront d'impliquer les autres banques.

Je salue une nouvelle fois Rémi Féraud pour le travail réalisé en commun sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Pascal Savoldelli .  - Accéder à la monnaie fiduciaire et aux espèces est-il un droit que la loi doit consacrer ? Non, pour la droite, qui fait barrage à toute garantie d'un nouveau droit.

Nous remercions nos collègues socialistes pour cette proposition de loi, avant l'opération de démantèlement que s'apprête à mener la droite sénatoriale.

Le rapporteur se cache derrière des statistiques qu'il veut implacables - 99 % des Français à moins de quinze minutes d'un DAB - mais qui cachent des réalités différentes. Sans vous faire l'offense de vous rappeler la différence entre moyenne et médiane, il faut prendre en compte les 3,6 % de la population qui habite les 12 000 communes très peu denses, et qui doivent faire 30 minutes de route, ou plus si leur distributeur est en panne.

Opportunément, cette proposition de loi propose de mettre les banques à contribution au travers d'une taxe pour financer l'implantation des DAB. Encore un impôt, s'offusque la droite - qui a peut-être d'autres idées pour financer les services publics ? Attention, entend-on, les banques vont retirer leurs DAB avant la mise en oeuvre de la loi. Arguments fallacieux ! Si 8,77 % des DAB ont disparu, ne faut-il pas y voir une stratégie des banques pour faire disparaître les espèces ?

Il existerait de nombreuses solutions alternatives, comme le dispositif « Allô facteur » par exemple. Le cash in shop permet à des commerçants de distribuer des espèces. Mais la livraison des colis dans les points relais a-t-elle bénéficié aux commerçants de proximité ? Non ! Le magasin de vêtements de centre-ville concurrencé par la vente en ligne connaîtra-t-il un élargissement de sa clientèle grâce à ce nouveau service ? Bien sûr que non ! Pis, ces commerçants exposeront leur sécurité en détenant de nombreuses espèces.

Sur le volet inclusion bancaire, nos amendements portent une triple volonté d'empêcher les banques de rémunérer sur les clients financièrement en difficulté, de sortir certaines opérations d'un objectif de rentabilité économique, et de garantir des offres de justice sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Sylvie Vermeillet .  - Au nom du groupe UC, je salue l'initiative de Rémi Féraud, qui a raison de souligner l'inégale répartition des DAB.

Depuis 2018, plus de 8 000 DAB ont disparu, soit près de 15 %. Il faudrait surtout en connaître la répartition.

Un groupe de travail avait été créé sous l'égide de la Banque de France, et une cartographie devait nous être présentée en janvier 2019. En mars de cette même année, selon Erick Lacourrège, alors directeur général des services à l'économie et du réseau de la Banque de France, elle n'était pas terminée, mais aurait dû l'être d'ici la fin du printemps. Il n'avait pas précisé de quelle année... Je le dis avec force : c'est inadmissible. Nous devons absolument disposer de cette cartographie !

En janvier 2018, le gouverneur de la Banque de France avait promis de ne jamais abandonner les espèces. Il serait heureux que le Parlement dispose des éléments nécessaires à l'appréciation du nombre et de l'emplacement des DAB.

En l'absence de documents précis, notre groupe partage l'avis de notre rapporteur. Gare à l'engrenage qui rendrait un fonds pérenne et indispensable. Quel en serait le montant ? Comment le distribuer et respecter la concurrence entre les banques ? Nous n'avons pas la réponse.

Nous validons les améliorations pertinentes de notre rapporteur aux articles 3 à 6, car en matière d'information la qualité doit primer sur la quantité. De même, nous approuvons la suppression de l'article 7: l'ACPR doit rester souveraine.

Notre groupe votera la proposition de loi telle qu'amendée par le rapporteur.

M. Christian Bilhac .  - Les problèmes de désertification bancaire que connaissent nos territoires ruraux participent au sentiment d'abandon des populations rurales.

Contrairement à ce qu'on veut nous faire croire, le problème est réel. Qui n'a pas d'exemple dans son département ? En dix ans, le nombre de DAB a baissé de 10 %.

Médecins, transports collectifs, couverture téléphonique, commerces de proximité : une partie de la population vit mal la disparition des services publics, mais aussi des services au public, ce qui la conduit à la colère et aux extrêmes. Il n'y a pourtant pas de citoyens ni de territoires de seconde zone. Or les plus fragiles sont souvent les moins mobiles et les plus dépendants des espèces pour les dépenses du quotidien. Faire des kilomètres pour retirer de l'argent n'est pas possible pour des personnes âgées ou à mobilité réduite.

Les territoires ruraux sont aussi les moins dotés en outils numériques. Considérer que la dématérialisation est bien vécue est une erreur fondamentale.

La proposition de loi d'Eric Gold de 2018 prévoyait également la création d'un fonds finançant la lutte contre la désertification rurale.

Certaines dispositions du présent texte vont dans le bon sens. Je le voterai, comme une majorité des membres du RDSE.

Mme Véronique Del Fabro .  - (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Impossible aujourd'hui de vivre sans compte bancaire, car nombre de transactions n'ont lieu que par chèque, par carte ou par virement. Posséder un compte est un droit. Seulement 1 % de la population n'est pas bancarisée, grâce au dispositif du droit au compte. Malgré des carences, l'information est disponible. Il convient d'encourager la filière bancaire à fluidifier ce dispositif.

En matière de comportement bancaire, il faut distinguer la cigale et la fourmi. Certains ont des difficultés en raison de petits revenus, mais d'autres ne savent tout simplement pas gérer leur argent. En privilégiant une approche client au détriment d'une approche produit, le conseiller bancaire pourrait mieux accompagner ses clients et adapter ses offres.

Une autorisation de découvert sans frais, proportionnelle au revenu, n'est pas adéquate. Elle introduirait un « droit au crédit » qui n'existe pas.

L'offre spécifique doit rester une offre transitoire.

L'accès aux services bancaires est certes une question de justice sociale. Il faut travailler le maillage territorial. Mieux vaut un DAB qui fonctionne que plusieurs qui ne sont pas utilisés.

En termes de maillage, d'autres solutions existent comme le cash back. Avec le cash in shop, le Crédit Agricole offre à ses clients un retrait sans achat dans les commerces. Cela pourrait être généralisé.

Le fonds de garantie proposé repose sur une taxation des bénéfices des banques, mais quid des banques en ligne ?

Si certaines mesures de cette proposition de loi vont dans le bon sens, d'autres doivent être améliorées. C'est pourquoi le groupe Les Républicains est favorable au texte tel qu'amendé par notre rapporteur. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Dany Wattebled .  - Les DAB sont en voie de disparition dans les campagnes, ce qui participe du cercle vicieux de la désertification : moins d'habitants, c'est moins de commerces, donc moins de transactions, donc moins de retraits, moins de distributeurs, et moins de services.

Le Sénat, chambre des territoires, doit apporter des solutions aux problèmes constatés sur les territoires.

Les espèces restent le moyen privilégié de paiement des Français : 55 % des paiements effectués en 2019, contre 35 % pour la carte. On comprend mieux pourquoi les Français s'inquiètent... Depuis la pandémie, le paiement sans contact a été favorisé par les banques et les commerçants, mais les paiements en espèces restent majoritaires.

Il ne s'agit pas de prendre parti pour les espèces ou les paiements par carte, même si la question a son intérêt : il y a beaucoup de raisons de se méfier des espèces.

Mais faut-il légiférer pour assurer le maillage du territoire ? L'objectif de la proposition de loi - un DAB à moins de quinze minutes en voiture - est déjà atteint pour 99 % des Français. L'intérêt de légiférer n'est pas réel.

En revanche, la taxe envisagée, elle, est bien réelle, et finirait par renchérir les services bancaires. Si la qualité de nos services publics était proportionnelle au nombre de taxes les finançant, la France serait championne du monde ! Une telle taxe pénaliserait le pouvoir d'achat des Français.

En revanche, la proposition de loi comporte des dispositions intéressantes pour renforcer l'information des clients et sanctionner les banques pratiquant des frais abusifs : nous les soutenons.

Il en va de même pour l'accès au crédit qui s'est durci, alors qu'il faut en faciliter l'accès. Le groupe Les indépendants votera ce texte, sous réserve de l'adoption de ses amendements.

M. Paul Toussaint Parigi .  - Le développement économique de ces dernières décennies s'est accompagné d'une dématérialisation croissante des échanges financiers. Plus que jamais, posséder un compte est la condition nécessaire de l'inclusion dans la vie économique et sociale.

Or dans le contexte de crise aiguë que nous connaissons depuis 2020, les cas de personnes privées de compte pourraient se multiplier, à l'instar de ce qui a été observé après la crise de 2008.

Le texte a le mérite d'accentuer la vigilance en direction des plus fragiles. La renonciation aux espèces contreviendrait, à terme, à la liberté dans le choix du moyen de paiement.

Même si 99 % de la population possède un compte en banque, il est de notre devoir de prévenir le basculement dans la fragilité financière et la spirale du surendettement.

Certes, l'accompagnement par les pouvoirs publics, les banques et les acteurs associatifs s'est développé, mais aucune sanction pénale n'est prévue si les frais bancaires pratiqués sont supérieurs au plafond légal. Il n'est pas acceptable qu'ils soient décorrélés du coût réel des prestations qu'ils rémunèrent ; nous avons donc déposé des amendements modulant le plafonnement en fonction des ressources.

L'inclusion territoriale est tout aussi essentielle que l'inclusion sociale. En la matière, les chiffres ne correspondent parfois pas à la réalité que nous connaissons : la répartition des agences bancaires et postales n'est pas uniforme. Une fermeture en milieu dense passe inaperçue, une fermeture dans un village rural est catastrophique.

En 2019, la Fédération bancaire française (FBF) rapportait que les communes dépourvues de distributeur étaient, à 97 %, des communes de moins de 2 000 habitants ; et 76 % de ces communes sans distributeur sont en zone rurale.

Mme le président.  - La commission n'ayant pas élaboré de texte, nous passons à l'examen de la version initiale du texte.

Discussion des articles

ARTICLE 1er

M. Marc Laménie .  - Je salue l'initiative de nos collègues Féraud, Tissot et du groupe SER : cette proposition de loi pose le problème de l'accessibilité bancaire, et montre le rôle essentiel de La Poste.

L'article 1er porte sur l'aménagement du territoire. Au 31 décembre 2022, on compte 17 013 points de contact et 6 915 agences postales communales et intercommunales : nous regrettons la baisse des moyens humains. Certes, 99 % des Français vivent à moins de quinze minutes d'un DAB, mais dans huit départements, dont les Ardennes, c'est moins de 90 %. Je me rallierai néanmoins à la position du rapporteur, au vu des charges supplémentaires que l'article impliquerait pour La Poste.

Mme le président.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Wattebled et Guerriau, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Verzelen, Decool et Grand.

Supprimer cet article.

M. Dany Wattebled.  - Cet article crée un service public de la distribution des billets, confié à La Banque Postale. Cela pose un problème de concurrence vis-à-vis des autres banques.

De plus, la France dispose déjà d'un bon maillage en la matière. Il convient donc de supprimer cet article.

Mme le président.  - Amendement identique n°18, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - L'accès aux espèces doit être garanti, en particulier pour les moins aisés, et chacun doit pouvoir choisir son moyen de paiement, mais cet article ne peut être adopté pour trois raisons.

D'abord, ce dispositif pourrait conduire à un désengagement territorial des banques, et le rapport sénatorial de mars 2021 excluait la création de ce nouveau service public.

Ensuite, l'objectif d'accessibilité est largement satisfait : en moyenne, 99 % de la population a accès à un DAB en moins de quinze minutes - même si, en tant qu'élu d'un département rural, je sais qu'il faut se méfier des moyennes.

Enfin, le dispositif se concentre sur le maillage des DAB, alors qu'il faut prendre en compte les autres moyens d'accès aux espèces. Le Gouvernement peut-il nous éclairer sur la modification du droit européen qui universaliserait l'accès au cash in shop, c'est-à-dire le retrait de liquide dans les commerces sans mouvement commercial ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Avis favorable. Des travaux sont engagés sur le cash in shop pour assurer l'interopérabilité avec les banques.

M. Rémi Féraud.  - Je regrette évidemment les amendements de suppression des articles 1er et 2.

Je comprends qu'une réglementation et une taxe supplémentaires  ne vous enchantent pas. Néanmoins, plusieurs collègues, et pas seulement à gauche, ont évoqué le problème de la désertification bancaire ; le pire est peut-être devant nous.

Notre proposition, même si elle n'est peut-être pas parfaite, a le mérite d'exister. Nous avons au moins posé le débat... Le cash in shop n'est pas une réponse suffisante.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos15 rectifié et 18 sont mis aux voix par scrutin public.

Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°275 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 238
Contre 104

Les amendements identiques nos15 rectifié et 18 sont adoptés et l'article 1er est supprimé.

ARTICLE 2

Mme le président.  - Amendement n°16 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Wattebled et Guerriau, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Verzelen, Decool et Grand.

Supprimer cet article.

M. Dany Wattebled.  - Le fonds de garantie de la présence bancaire territoriale, qui serait financé par une taxe sur les bénéfices des banques, nous semble injustifié puisque l'objectif est pratiquement atteint. L'accès n'est pas proportionnel à la taxe...

Mme le président.  - Amendement identique n°19, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Le fonds de garantie permettrait au groupe La Poste d'assurer ses missions prévues à l'article 1er. Il serait financé par une taxation des bénéfices des banques, une contribution versée par ces banques au moment de la fermeture d'un DAB, et une contribution volontaire des collectivités territoriales.

Un tel fonds serait inutile car l'objectif d'accessibilité est déjà atteint et le mécanisme retenu pose plusieurs problèmes : le taux de la taxe n'est pas fixé, elle ne concernerait pas les néobanques et elle s'appliquerait de manière indifférenciée, quel que soit le territoire concerné.

En cohérence avec la suppression de l'article 1er, nous demandons donc la suppression de l'article 2.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Avis favorable.

M. Pascal Savoldelli.  - Cette explication de vote vaut pour l'amendement suivant, qui deviendra sans objet si celui-ci est voté. Il ne réglait pas tout, mais la sagesse aurait été plus constructive que des amendements de suppression.

Avec une hausse de 150 % du bénéfice net de BNP Paribas au premier trimestre - 4,4 milliards d'euros ! - croyez-vous qu'il n'y ait pas assez d'argent pour installer des distributeurs ?

Nous allons banaliser la fin des paiements en espèces et des DAB.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances.  - Il faut dire les choses jusqu'au bout : il y a moins de DAB, mais il y a matière à optimisation. En milieu urbain, l'offre est parfois pléthorique : les banques prétendent que les DAB coûtent cher, mais leur installation et leur entretien coûtent à peu près le même prix partout...

Le maillage doit donc être équilibré, avec une résorption des zones blanches et la mise en place de nouvelles formes de retrait d'espèces. Il nous faut aussi une cartographie en temps réel des évolutions, au-delà des chiffres bruts.

Mme Sylvie Vermeillet.  - Je voterai la suppression de l'article 2, car nous ne sommes pas prêts pour une telle taxe. Nous n'avons pas la cartographie des DAB, pourtant promise pour début 2019...

Les DAB ne manquent pas tant dans le monde rural qu'à la périphérie des zones urbaines ou dans les communes touristiques, dont la population est parfois multipliée par dix en été.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos16 rectifié et 19 sont mis aux voix par scrutin public.

Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°276 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 238
Contre 104

Les amendements identiques nos16 rectifié et 19 sont adoptés et l'article 2 est supprimé.

L'amendement n°8 n'a plus d'objet.

ARTICLE 3

M. Alain Cadec .  - Dans le deuxième chapitre de ce texte, qui fait référence à « l'accessibilité sociale bancaire », j'avais déposé un amendement pour obliger les banques à justifier par écrit les refus de crédits ; mais il a été déclaré irrecevable au titre de l'article 45. Il faudrait peut-être que je dépose une proposition de loi pour y échapper...

Je tiens à remercier les 55 collègues qui ont cosigné cet amendement de bon sens.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Cet amendement a été déclaré irrecevable car cette proposition de loi vise les publics fragiles, et non l'ensemble de la population. J'ai moi-même renoncé à déposer un amendement sur les saisies-attributions pour cette raison.

Mme le président.  - Amendement n°20, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

Le troisième alinéa de l'article L. 312-1-1-A du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° A la deuxième phrase, après le mot : « crédit », sont insérés les mots : « , notamment à destination des associations de consommateurs agréées et des associations et fondations à but non-lucratif dont l'objet est d'accompagner les personnes en difficulté ou de défendre les intérêts des familles, » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Elle définit enfin les informations relatives au droit au compte, à la procédure de traitement du surendettement, au microcrédit, à l'exercice du droit d'accès aux fichiers gérés par la Banque de France, aux moyens de contacter celle-ci sur les sujets qui précèdent ainsi qu'à l'existence des offres mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 312-1-3, que les établissements de crédit portent à la connaissance de leur clientèle et du public, et précise les modalités de diffusion de ces informations. »

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - L'article 3 inclut dans la charte d'inclusion bancaire l'affichage des informations relatives au droit au compte et à l'offre spécifique dans les agences.

On ne peut que partager cet objectif ; c'est pourquoi cet amendement modifie l'article en en préservant l'esprit, et même en allant plus loin. Il inclut en effet dans la charte des précisions sur l'information à apporter aux associations accompagnant les personnes fragiles, ainsi qu'à la clientèle et au public  - sur le traitement du surendettement et le microcrédit notamment.

Enfin, la charte préciserait les conditions de diffusion de ces informations avec l'affichage en agence, mais pas uniquement.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Avis favorable.

M. Rémi Féraud.  - Je remercie le rapporteur pour son amendement, qui poursuit le même objectif que nous, sans doute avec plus de subtilité...

L'amendement n°20 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 3

Mme le président.  - Amendement n°11, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 312-1-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 312-1-3-.... -  Les bénéficiaires des aides mentionnées aux articles L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, L. 821-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 821-1 du code de la sécurité sociale, les personnes bénéficiant des bourses sur critères sociaux des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires ainsi que les personnes en situation de fragilité financière définies au deuxième alinéa de l'article L. 312-1-3 du présent code sont exonérées des commissions perçues par un établissement de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d'un compte bancaire. »

II. - Cet article s'applique à compter du 1er janvier 2024.

M. Pascal Savoldelli.  - N'ajoutons pas de la misère à la misère. Il faut supprimer les frais d'incident pour les 4,1 millions de personnes en situation de fragilité financière - chiffre en augmentation de 300 000 entre 2020 et 2021.

Depuis 2014, les commissions d'intervention sont plafonnées à 25 euros par mois pour les clients fragiles et 20 euros par mois et 200 euros par an pour les personnes qui ont souscrit une offre spécifique clients fragiles : c'est un premier pas, mais pas un solde de tout compte. Par exemple, pour une personne seule allocataire du RSA, le plafond des frais bancaires pour incident représente 3,34 % de ses ressources mensuelles.

Je rappelle que les banques ont fait 6 milliards d'euros de bénéfice net sur les six premiers mois de l'année 2022...

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Une exonération totale est excessive, d'autant que certaines commissions d'intervention sont hybrides : elles comprennent non seulement les frais d'incident mais aussi les frais imputés contre service rendu. Un plafonnement est préférable : c'est ce que la commission a prévu dans ses amendements aux articles 4 et 6.

En outre, la liste des critères retenus est dénuée de lien avec les objectifs poursuivis.

Enfin, votre amendement impliquerait que les banques aient accès à des données confidentielles sur leurs clients, notamment le fait qu'ils sont bénéficiaires de minima sociaux.

Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°26, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - La protection des consommateurs les plus vulnérables est une priorité pour le Gouvernement. Selon le dernier rapport de l'Observatoire de l'inclusion bancaire, les frais facturés aux clients sont en baisse - moins 17 % sur un an pour les frais liés aux incidents.

Proportionner le plafonnement d'une commission d'intervention aux revenus complexifierait le dispositif, au détriment des utilisateurs, et serait difficile à mettre en oeuvre.

Nous proposons donc de conserver le régime législatif en vigueur, avec la flexibilité qu'offrent les dispositions réglementaires.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - J'émettrai un avis personnel sur cet amendement, arrivé trop tardivement pour être examiné par la commission.

Je souscris aux préoccupations du Gouvernement sur la complexité de l'article 4. Toutefois, il convient d'en préserver l'ambition sociale. Un plafond de 20 euros, cela peut sembler peu, mais c'est beaucoup pour les plus modestes.

Je proposerai dans l'amendement n°21 une réécriture de l'article, avec un sous-plafond pour les bénéficiaires de l'offre spécifique et du droit au compte. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Rémi Féraud.  - Je regrette l'amendement de suppression du Gouvernement, qui est de toute façon défavorable à l'ensemble du texte.

En matière de frais bancaires, nous sommes loin du conte de fées décrit par le ministre dans la discussion générale. Le Gouvernement devrait davantage écouter les associations de consommateurs qui accompagnent les publics les plus fragiles.

M. Jérôme Bascher.  - Un point de méthode : pourquoi le Gouvernement dépose-t-il un amendement de suppression quelques minutes avant l'examen en séance publique ? Quelle conception du travail parlementaire cela reflète-t-il ?

Monsieur le ministre, je sais que vous représentez ici le Gouvernement par défaut. Mais la méthode est brutale : on supprime, car on n'a pas grand-chose à dire. Et passez muscade...

Il est vrai que vous n'avez pas le temps, il y a trop de textes, d'ailleurs le Sénat est débordé ! (Sourires) Non, ce n'est pas sérieux.

M. Pascal Savoldelli.  - Le groupe CRCE votera les deux amendements, car il faut apporter des réponses aux Français, notamment les 46 % d'entre eux qui sont à découvert au moins une fois par an, pour un coût moyen annuel de 232 euros. Quelque huit millions de Français doivent acquitter des frais pour incident bancaire, alors que les banques réalisent 6,5 milliards d'euros de bénéfices.

M. Jérôme Bascher.  - Cela fait des impôts !

M. Pascal Savoldelli.  - Toute avancée en matière de justice sociale est bonne à prendre : c'est pourquoi nous voterons les amendements nos4 et 21.

L'amendement n°26 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°4, présenté par MM. Parigi, Breuiller, Gontard, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Rédiger ainsi cet article :

Le premier alinéa de l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier est ainsi modifié : 

1° Au début de la première phrase, le mot : « Les » est remplacé par les mots : « L'ensemble des » ;

2° À la première phrase, les mots : « et par opération » sont remplacés par les mots : « , par an et par opération dans les limites respectives de 40 euros, de 300 euros et de 4 euros » ;

3° Sont ajoutés les mots : « proportionnels à leurs revenus fixés par mois, par an et par opération dans les limites respectives de 10 euros, 75 euros et 1 euro ».

M. Paul Toussaint Parigi.  - Cet amendement encadre l'ensemble des commissions d'intervention, indépendamment de leur appellation, car certaines banques utilisent des méthodologies internes pour échapper au plafonnement.

Il divise également les plafonds par deux pour l'ensemble des clients, et prévoit des plafonds spécifiques pour les plus précaires, dont le montant est fixé au quart de celui des plafonds généraux.

Mme le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

Le premier alinéa de l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces plafonds spécifiques sont réduits de moitié lorsque la moyenne semestrielle des sommes portées chaque mois au crédit du compte est inférieure à un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie ».

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - L'article 4 prévoit un plafond spécifique proportionné au revenu. C'est peu lisible et difficile à mettre en oeuvre.

Cet amendement y substitue donc un sous-plafond pour les bénéficiaires de l'offre spécifique et du droit au compte, dont la situation financière est la plus délicate - lorsque le flux créditeur est inférieur à un seuil fixé par arrêté. C'est immédiatement opérationnel : La Banque Postale utilise déjà cet indicateur pour évaluer la fragilité financière de ses clients.

Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°4, au profit de l'amendement n°21 : son dispositif vise les commissions d'intervention, alors que son objet vise les frais d'incident. Par ailleurs, il méconnaît la liberté tarifaire des établissements de crédit et donc la liberté d'entreprendre.

L'amendement de la commission est plus large et plus opérationnel : j'invite mes collègues souhaitant plafonner les frais bancaires avec efficacité mais sans excès à voter l'amendement de la commission.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Avis défavorable aux deux amendements, dans la mesure où nous sommes défavorables à cet article.

M. Christian Bilhac.  - Bien sûr, je suis favorable aux plafonnements. Ces frais bancaires pèsent beaucoup sur les ménages modestes.

Mais n'oublions pas les travailleurs pauvres, ceux qui se lèvent tôt. Souvent, à la fin du mois, ils sont à découvert ; et un chèque émis le 12 pour un commerçant, encaissé le 22, est refusé, ce qui occasionne 50 euros de frais d'incident... C'est inadmissible.

M. Paul Toussaint Parigi.  - Je retire mon amendement, puisqu'il est satisfait.

L'amendement n°4 est retiré.

L'amendement n°21 est adopté et l'article 4 est ainsi rédigé.

ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°17 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Wattebled et Guerriau, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Verzelen, Decool, Grand et Chasseing.

Supprimer cet article.

M. Dany Wattebled.  - Nous voulons supprimer cet article, qui crée une autorisation de découvert sans frais proportionnée aux revenus des clients bénéficiant d'une offre spécifique. C'est contre-productif.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - En effet, évitons de créer un droit au crédit gratuit ; mais l'adoption de cet amendement ferait tomber celui de la commission. Retrait à son profit, sinon avis défavorable.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°17 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

Le deuxième alinéa de l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier est complété par une phrase ainsi rédigée : « La souscription de l'offre spécifique ne peut seule faire obstacle à l'ouverture ou au maintien d'une autorisation de découvert. »

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Le code monétaire et financier prévoit une offre spécifique pour les personnes identifiées comme fragiles, afin de prévenir les incidents bancaires. Avec cet amendement, nous proposons de préciser explicitement qu'elle ne fait pas obstacle à l'autorisation de découvert.

Nous ne pouvons retenir en l'état l'article 5, qui crée un droit au crédit gratuit à travers l'autorisation de découvert sans frais. Ne déstabilisons pas les publics déjà fragiles. Nous préférons inscrire explicitement dans la loi le maintien de l'autorisation de découvert.

Mme le président.  - Sous-amendement n°27 à l'amendement n°22 de M. Sautarel, au nom de la commission, présenté par MM. Parigi, Breuiller, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Amendement n° 22

I.- Avant l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

II.- Alinéa 2

Supprimer les mots :

de l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier

III.- Compléter cet amendement par trois alinéas ainsi rédigés :

2° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les critères pris en compte par les établissements de crédit pour caractériser une situation de fragilité au sens du deuxième alinéa sont transmis, chaque année, à l'observatoire mentionné à l'article L. 312-1-1-B. 

« Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article et établit une liste exhaustive des critères susceptibles d'être retenus par les établissements de crédit pour caractériser une situation de fragilité au sens du deuxième alinéa. »

M. Paul Toussaint Parigi.  - Nous proposons que le Conseil d'État encadre strictement les critères d'identification des clients en situation de fragilité financière, qui sont aujourd'hui laissés à la discrétion des banques. Il faut veiller à l'égalité entre tous les citoyens.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Je remercie M. Parigi d'avoir accepté de modifier son sous-amendement dans le sens suggéré par la commission. Nous sommes parvenus à un bon compromis : avis favorable.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Nous étions favorables à l'amendement du rapporteur, mais sommes défavorables au sous-amendement. D'où notre avis défavorable global.

M. Jean-François Husson.  - Dommage !

M. Rémi Féraud.  - Le groupe SER votera le sous-amendement. Que le Gouvernement soit défavorable à la fixation de critères plus objectifs, quel aveu !

Quant à l'amendement n°21, nous voterons contre : la banque trouvera toujours d'autres arguments pour interdire le découvert. Notre proposition est pragmatique, et répond aux situations dénoncées par M. Bilhac.

Le sous-amendement n°27 est adopté.

L'amendement n°22, sous-amendé, est adopté et l'article 5 est ainsi rédigé.

ARTICLE 6

Mme le président.  - Amendement n°25, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Le Gouvernement a déposé des amendements ce matin, car nous attendions le dépôt des derniers amendements du rapporteur. (M. Jérôme Bascher s'insurge.)

Le dispositif de plafonnement en vigueur peut encore être amélioré, mais il a l'avantage de concilier efficacité et simplicité.

À l'inverse, l'article 6 de la proposition de loi irait à l'encontre de l'objectif de protection des clients les plus fragiles, car les grilles tarifaires varient grandement d'une banque à l'autre. La différence serait donc très grande en fonction des clients.

Cette mesure serait en outre très complexe à mettre en oeuvre.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Là encore, il s'agit d'un avis personnel. Retrait au profit de l'amendement n°23 de la commission.

Le dispositif de l'article 6 est peut-être trop ambitieux, mais sa logique est la bonne : éviter que les banques ne compensent le plafonnement introduit à l'article 4 en augmentant d'autres frais.

M. Jérôme Bascher.  - Monsieur le ministre, attendre le dernier moment pour proposer un amendement de suppression de l'article n'est pas justifiable. Vous n'avez sans doute pas assez d'expérience parlementaire... (Le ministre se récrie.) Historiquement, le Gouvernement n'attend pas le texte de la commission pour déposer des amendements. Cela fonctionne ainsi depuis plusieurs décennies !

Je suis désolé de le dire, mais vous n'avez pas travaillé, puisque vous ne proposez pas d'autre solution. En somme, tout va bien... Une fois de plus, vous méprisez la procédure parlementaire.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°23, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Sans préjudice du premier alinéa du présent article et des articles L. 131-73 et L. 133-26, ainsi que de l'article L. 262 du livre des procédures fiscales, pour les personnes qui bénéficient du compte assorti des services bancaires de base ouvert en application de la procédure mentionnée au III de l'article L. 312-1 du présent code et celles qui souscrivent l'offre mentionnée au deuxième alinéa du présent article, les tarifs applicables aux frais et services bancaires faisant l'objet de la dénomination commune mentionnée au V de l'article L. 314-7 sont plafonnés par opération dans des conditions fixées par décret. »

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Limiter l'ensemble des frais de gestion et des frais d'incident à un tiers des frais totaux serait difficile à mettre en oeuvre. Nous partageons cependant l'objectif d'éviter une compensation sur d'autres frais : d'où cet amendement qui instaure un plafonnement par opération des principaux frais bancaires, qu'il s'agisse des frais d'incident ou des frais de gestion.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Le cadre en vigueur permet d'atteindre les objectifs poursuivis par ces amendements : avis défavorable.

M. Rémi Féraud.  - L'amendement du rapporteur va dans le même sens que notre proposition, mais renvoie à un décret. Espérons donc un peu de volontarisme de la part du Gouvernement ! (M. Jean-François Husson renchérit.)

L'amendement n°23 est adopté.

L'article 6, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 6

Mme le président.  - Amendement n°6, présenté par MM. Parigi, Breuiller, Gontard, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre III du livre Ier du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° L'article L. 131-73 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « ne peuvent excéder un montant fixé par décret » sont remplacés par les mots : « sont plafonnés, dans des conditions fixées par décret, à 15 euros pour les chèques d'un montant inférieur ou égal à 50 euros et à 25 euros pour les chèques d'un montant supérieur à 50 euros » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les personnes physiques en situation de fragilité au sens de l'article L. 312-1-3, les frais mentionnés au sixième alinéa du présent article sont plafonnés, dans des conditions fixées par décret, à 4 euros pour les chèques d'un montant inférieur ou égal à 50 euros et à 6 euros pour les chèques d'un montant supérieur à 50 euros. » ;

2° L'article L. 133-26 est ainsi modifié :

a) Au II, après le mot : « décret » sont insérés les mots : « , par incident, par mois et par an dans les limites respectives de 10 euros, de 100 euros et de 500 euros » ;

b) Après le même II, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Pour les personnes en situation de fragilité au sens de l'article L. 312-1-3, les frais mentionnés au II sont plafonnés dans des conditions fixées par décret par incident, par mois et par an dans les limites respectives de 2,50 euros, de 25 euros et de 125 euros. »

M. Paul Toussaint Parigi.  - La prolifération des frais pour différents incidents pèse lourdement sur les plus modestes. Nous divisons par deux les frais pour rejet de chèque et autre incident de paiement pour l'ensemble des clients, et créons des plafonds spécifiques contraignants pour les clients les plus fragiles.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Retrait, sinon avis défavorable. Les frais pour l'ensemble des Français sont déjà plafonnés par décret.

S'agissant des personnes fragiles, cet amendement est redondant avec mon amendement n°23, plus ambitieux et mieux ciblé sur les bénéficiaires du droit au compte ou de l'offre spécifique.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°6 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 221-13 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les établissements de crédits proposent l'ouverture du compte sur livret d'épargne populaire aux clients en situation de difficulté financière mentionnés à l'article L. 312-1-3-1 qui satisfont aux conditions définies à l'article L. 221-15. »

M. Éric Bocquet.  - Pas plus que le texte relatif à la protection des épargnants, celui-ci ne traite des livrets d'épargne réglementée. Pourtant, 87 millions de livrets de type livret A, livret de développement durable et solidaire (LDDS) ou livret d'épargne populaire (LEP) sont ouverts, pour 486 milliards d'euros d'encours.

L'épargne réglementée est une particularité française : c'est une ressource stable pour le système financier, qui contribue à transformer les dépôts en emplois d'intérêt général, nous dit la Cour des comptes.

Nous proposons de rendre obligatoire la présentation du LEP aux épargnants éligibles. C'est un produit d'épargne protecteur, rémunérateur et sécurisant, liquide et fiscalement avantageux. Le non-recours est pourtant massif. En juin 2019, l'Observatoire de l'épargne réglementée estimait que seuls 21 % des personnes éligibles au LEP en bénéficiaient, alors que ce taux est de 50 % pour le livret A.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Cet amendement a déjà été déposé dans le cadre de la proposition de loi Protection des épargnants. La commission en avait demandé le retrait. En effet, l'ouverture d'un LEP est réservée aux épargnants dont le revenu fiscal de référence est inférieur à un certain seuil : difficile de donner à la banque l'accès à cette information. C'est plutôt à l'administration fiscale d'informer le contribuable de son éligibilité à l'épargne populaire, peut-être sur l'avis d'imposition ? Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par MM. Canévet et Bonneau, Mme Guidez, MM. Longeot, Kern et Le Nay, Mmes Vermeillet et Gacquerre, M. Moga, Mmes Billon et Saint-Pé, M. Delahaye, Mme Perrot, M. Duffourg, Mme Sollogoub, MM. P. Martin et Capo-Canellas, Mme Jacquemet, M. J.M. Arnaud, Mme Doineau, MM. Détraigne et Chauvet, Mme de La Provôté et M. Cigolotti.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes concernées par le compte assorti des services bancaires de base ouvert en application de la procédure mentionnée au III de l'article L. 312-1 se voient appliquer des taux d'intérêts débiteurs ne pouvant dépasser le taux de l'usure, tel que défini par les articles L. 314-6 à L. 314-9 du code de la consommation. »

Mme Sylvie Vermeillet.  - Pour protéger les plus fragiles et leur éviter des solutions coûteuses, cet amendement précise que les taux d'intérêt débiteurs ne peuvent dépasser le taux d'usure.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Il est satisfait : le taux d'usure est un maximum légal. Il est vrai néanmoins que ce taux d'usure est parfois élevé, surtout sur les prêts de faible montant.

L'amendement de la commission à l'article 6 répond à l'objectif de protection des plus fragiles en plafonnant de nombreux frais bancaires. Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°2 rectifié bis est retiré.

ARTICLE 7

Mme le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Sautarel, au nom de la commission.

Supprimer cet article.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - L'article 7 oblige la commission des sanctions de l'ACPR à imposer une sanction pécuniaire aux banques qui ne respecteraient pas leurs obligations en matière d'accessibilité et d'inclusion bancaire. Or celle-ci dispose déjà d'un pouvoir de sanction, y compris pécuniaire, en matière de droit au compte. L'ACPR doit rester souveraine dans le choix de la mesure la plus appropriée et a d'ailleurs déjà appliqué une sanction pécuniaire à trois reprises. D'où cet amendement de suppression.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Avis favorable

L'amendement n°24 est adopté et l'article 7 est supprimé.

APRÈS L'ARTICLE 7

Mme le président.  - Amendement n°7 rectifié ter, présenté par MM. Parigi, Breuiller, Gontard, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À la fin de la deuxième phrase du quatrième alinéa, les mots : « de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet » sont remplacés par les mots : « des pièces requises mentionnées au premier alinéa du présent III » ;

2° Après la deuxième phrase du même alinéa, sont insérées trois phrases ainsi rédigées : « Le défaut de transmission des pièces complémentaires requises par l'établissement de crédit dans le cadre des obligations mentionnées à la section 3 du chapitre 1er du titre IV du livre V du présent code ne saurait faire obstacle à l'ouverture du compte. Dans ce cas, conformément au II de l'article L. 561-8, l'ouverture de ce compte ne peut être considérée comme constitutive de l'établissement d'une relation d'affaires avant la réalisation de la première opération sur le compte. Les pièces mentionnées sont transmises à l'établissement de crédit au plus tard avant la réalisation de cette première opération. »

M. Paul Toussaint Parigi.  - Pour accompagner les clients les plus précaires, cet amendement prévoit une ouverture de compte en deux temps : d'abord, la banque ne demanderait que les documents strictement nécessaires puis, une fois le compte ouvert, elle pourrait demander des informations complémentaires pour respecter ses obligations.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - Je remercie M. Parigi d'avoir rectifié son amendement à la suite du débat en commission. Il s'agit de trouver un juste équilibre entre les obligations contradictoires qui pèsent sur les banques en matière de droit au compte d'une part et de vigilance sur le blanchiment des capitaux d'autre part.

Afin de ne pas retarder l'ouverture du compte, l'amendement décale la remise des documents complémentaires après l'ouverture du compte, mais avant la première opération.

Avis favorable à l'amendement rectifié.

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - La réglementation européenne en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme impose aux établissements de crédit de demander certaines informations. Si certaines modulations sont possibles, un aménagement de la procédure de droit au compte dans une situation de faible risque de blanchiment ne serait pas conforme à l'esprit du droit européen ni des recommandations du Groupe d'action financière.

La loi Rixain du 24 décembre 2021 permet à une personne victime de violences conjugales d'activer un droit au compte dans une perspective d'émancipation. Avis défavorable.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur.  - L'amendement a été rectifié et ne traite plus des victimes de violences conjugales : ce volet était effectivement satisfait.

L'amendement est sans doute perfectible mais il a le mérite d'engager la discussion. Je fais confiance à la navette pour le rendre totalement opérant.

L'amendement n°7 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

Interventions sur l'ensemble

M. Rémi Féraud .  - Nous regrettons la suppression des articles 1 et 2 sur l'accessibilité bancaire et territoriale. Au moins aurons-nous lancé le débat. La réflexion a besoin d'avancer.

Le groupe SER votera le texte issu de nos travaux. J'espère qu'il poursuivra son chemin parlementaire, car les plus fragiles doivent être mieux protégés. Les pratiques se sont certes améliorées, mais trop peu et trop lentement. L'illisibilité des frais bancaires s'accroît. Une participation aussi importante des plus modestes aux 25 milliards d'euros de frais de gestion et frais bancaires est inacceptable. Je remercie le rapporteur pour son travail. (M. Patrick Kanner applaudit.)

M. Jean-François Husson .  - Je salue le travail collectif et remercie le rapporteur qui a recherché des convergences sur un texte important en ces temps de tension sociale.

Nous obtiendrons rapidement de la Banque de France un porter à connaissance national avec des cartes départementales sur les points d'accès aux DAB. Cela nous permettra de travailler à l'élimination des zones blanches d'accessibilité aux espèces.

Sur l'inclusion bancaire, le travail réalisé permet d'avancer. Je crois que le ministre partage nos orientations, malgré ses avis défavorables. Au Gouvernement de s'emparer de ce texte pour le faire prospérer. Ce serait reconnaître l'utilité des semaines d'initiative parlementaire !

M. Pascal Savoldelli .  - Nous étions très favorables à la proposition de loi initiale. Le fonds de garantie aurait aidé à disposer de la véritable cartographie. On le sait, si le DAB n'est pas celui de votre banque de dépôt, vous payez des frais après plusieurs retraits. Rien n'est gratuit ! J'aurais souhaité que le Gouvernement amende et enrichisse le texte...

Nous souhaitions ouvrir davantage le livret d'épargne populaire aux salariés pauvres, et mettre les banques à contribution plutôt que les collectivités territoriales : quand elles ramassent 6,5 milliards d'euros de frais d'incidents, elles peuvent bien participer à l'effort d'accessibilité et d'inclusion bancaire ! Le groupe CRCE s'abstiendra.

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

(Applaudissements sur les travées du groupe SER)

La séance est suspendue quelques instants.