Génocide ukrainien de 1932-1933

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de résolution relative à la reconnaissance du génocide ukrainien de 1932-1933, présentée, en application de l'article 34-1 de la Constitution, par Mme Joëlle Garriaud-Maylam et plusieurs de ses collègues.

Discussion générale

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, auteur de la proposition de résolution .  - Je salue la présence en tribune de M. Vadim Omelchenko, ambassadeur d'Ukraine en France, et de son conseiller Oleksander Shuitsy. (M. Claude Malhuret applaudit.) Je les remercie pour leur engagement au service de leur pays et de ses relations avec le nôtre. Je salue, à travers eux, le peuple ukrainien si vaillant, qui nous donne une leçon pour la défense de nos valeurs de démocratie et de souveraineté. Je salue également notre ambassadeur, ainsi que les Français qui ont choisi de rester en Ukraine malgré le danger, pour aider ce pays ami.

Nous sommes réunis pour débattre d'une proposition de résolution sur l'Holodomor, déposée dès le 9 décembre dernier et cosignée par nombre de nos collègues, dont Nadia Sollogoub, présidente du groupe d'amitié France-Ukraine.

Il nous aura fallu du temps : nous espérions que la France soit le premier pays à adopter une résolution condamnant le génocide perpétré contre le peuple ukrainien en 1932-1933. L'Assemblée nationale nous a devancés, en mars dernier, quoique son texte ait été déposé après le nôtre. Qu'importe, l'essentiel est d'avancer.

Cette résolution est très attendue par nos amis ukrainiens. À cette même tribune, le président de la Rada, Ruslan Stefanchuk, avait insisté sur l'importance de la voter. Après le Parlement européen, l'Assemblée nationale et les parlements irlandais, belge, allemand, polonais ou islandais, c'est au tour du Sénat d'en débattre.

L'Histoire nous éclaire toujours sur le présent, et des parallèles peuvent être faits avec la situation actuelle en Ukraine.

« Holodomor » signifie extermination par la faim. Avec méthode et cynisme, le pouvoir stalinien a organisé la famine, en 1932-1933, en rétorsion contre la résistance des Ukrainiens face à la dictature du prolétariat voulue par la Russie bolchévique. C'est le peuple ukrainien, sa culture, sa langue, que l'on a cherché à détruire, pour marquer la victoire du totalitarisme soviétique.

Les millions d'hommes, de femmes, d'enfants immolés au nom d'une idéologie mortifère - certains historiens évoquent neuf millions de victimes - témoignent de l'horreur qui peut être déchaînée par un pouvoir sanguinaire convaincu de son impunité.

« Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde », disait Camus. Outre la famine organisée dans les campagnes, les exécutions systématiques, la déportation de centaines de milliers d'enfants vers la Russie est clairement constitutive de génocide.

Raphael Lemkin, le juriste qui a défini le terme de génocide, qualifiait l'Holodomor d' « exemple classique de génocide soviétique ». Évidemment, la Russie refuse une telle qualification.

Cette résolution ne changera rien aux malheurs des Ukrainiens, mais elle les assurera de notre indéfectible soutien, et montrera à la Russie que nous ne sommes ni naïfs, ni ignorants.

Commémorant les 90 ans de l'Holomodor, le président Zelensky, déclarait, le 26 novembre 2022 : « Autrefois ils voulaient nous détruire par la faim, aujourd'hui par l'obscurité et le froid », et incitait les nations à reconnaître ce génocide.

Nous ne saurions tolérer l'impunité : je me réjouis du soutien de la France à la mise en place d'un tribunal ad hoc pour poursuivre les auteurs des crimes d'agression en Ukraine, comme l'assemblée parlementaire de l'Otan le demandait dès mai 2022. Les auteurs de ces crimes ignobles, terroristes, devront répondre de leurs actes, comme ceux que nous assignons aujourd'hui devant l'Histoire.

Au-delà des partis et des différences, j'en appelle à votre sens de la responsabilité : soutenons unanimement cette résolution, pour s'opposer aux forces du déni, de l'indifférence et de l'injustice, en une déclaration de solidarité avec le peuple ukrainien, qui mérite toute notre reconnaissance pour sa résilience face à tant de tragédies.

Les décideurs terrés dans les alcôves du Kremlin organisent l'agression de tout un peuple : tortures, viols, actes de cruauté commis par les troupes russes ou les mercenaires de Wagner nous rappellent les méthodes barbares des Soviétiques.

Il faut faire face à la vérité et qualifier les faits aussi précisément que possible. L'Holodomor est un génocide, et présente toutes les caractéristiques détaillées à l'article 2 de la Convention de 1948.

Le 17 avril dernier, nous votions à l'unanimité la résolution déposée par André Gattolin pour condamner les transferts forcés d'enfants ukrainiens. Avec une même unanimité, rappelons avec force que jamais, hier comme aujourd'hui, nous n'accepterons l'intolérable et que la France, patrie des droits de l'homme, défendra toujours la liberté et les valeurs démocratiques partout dans le monde.

Sur une affiche ukrainienne de 1918, une jeune paysanne ukrainienne protégeant son bébé d'un vautour dit : « Je ne veux pas de ce qui ne m'appartient pas, mais je ne vous laisserai jamais me voler ce qui est à moi ».

Par respect pour le peuple ukrainien, nous avons le devoir moral de voter cette résolution pour l'Ukraine et pour nos valeurs. Il y va de notre honneur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI, SER et INDEP)

M. Christian Bilhac .  - Alors que la guerre fait rage en Ukraine, la résolution de Mme Garriaud-Maylam propose de reconnaître comme génocide l'Holodomor, l'extermination par la famine conduite par Staline qui a fait plus de quatre millions de morts en Ukraine entre l'été 1932 et l'hiver 1933.

La méthode employée fut la terreur : collectivisation forcée, réquisition des récoltes, russification, enfants déplacés - déjà !, déportations, exécutions sommaires. Il s'agissait pour le régime d'accaparer les richesses agricoles ukrainiennes pour financer l'industrialisation rapide, tout en anéantissant toute velléité d'indépendance de l'Ukraine, en brisant les paysans réfractaires. La population affamée fut poussée jusqu'au cannibalisme ; dans le même temps, le régime exportait des tonnes de céréales ukrainiennes.

Ces crimes additionnés constituent un génocide selon le droit international. Le génocide est un processus graduel, la déshumanisation et la violation récurrente des droits étant précurseurs d'atrocités de masse, rappelle le président de l'Assemblée générale des Nations unies.

Staline a organisé l'extermination de la population ukrainienne, entretenant méthodiquement la terreur, comme d'autres l'ont fait contre les Arméniens, contre les juifs, ou encore contre les Tutsis.

Cette page sombre de l'histoire ukrainienne résonne de manière glaçante depuis l'invasion russe, le 24 février 2022. La guerre se joue aussi sur le terrain de l'information, et de la désinformation. Le régime russe n'a de cesse de réviser l'histoire, qualifiant les dirigeants ukrainiens de nazis. C'est aussi sur le terrain symbolique que les batailles se mènent. En témoignent les attaques émanant de hackers russes subies par le site internet de l'Assemblée nationale à la veille du débat sur la reconnaissance de l'Holodomor, ou celles subies par le site du Sénat la semaine dernière.

Aucune forme de révisionnisme ne doit effacer l'histoire des crimes staliniens. Reconnaître les crimes du passé contribue à ce qu'ils ne se répètent pas. André Guiol le disait lors du vote de la proposition de résolution sur les transferts d'enfants : dans la guerre informationnelle qui se joue, il est impératif de qualifier avec justesse les crimes commis.

Suivons l'exemple du Bundestag, du Parlement européen, de nos collègues belges, et d'autres : votons cette résolution visant à qualifier les crimes barbares de l'Holodomor de génocide. Il y va de notre devoir d'humanité. (Applaudissements sur les travées du RDSE, des groupes INDEP, Les Républicains et UC)

M. Olivier Paccaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est un abîme infernal, une question diabolique que l'humanité aurait souhaité ne jamais se poser : jusqu'où l'homme peut-il perdre son âme ? Le XXe siècle fut une sorte d'apothéose du mal : massacres de masse, martyr arménien, folie des Khmers rouges, génocide des Tutsis, Shoah. Sans oublier l'Holodomor.

Auparavant, nous avions certes connu la Saint-Barthélemy, la terreur révolutionnaire et les colonnes infernales de Turreau. Mais la spécificité du XXe siècle, c'est l'organisation, l'horlogerie du crime, jusque dans la mise en scène de sa négation.

Levons le voile obscène qui recouvre cette page du passé de l'Ukraine. Alors que certains refusent de reconnaître l'intentionnalité de ces atrocités, rétablissons cette vérité glaçante : en 1932 et 1933, des millions de paysans ukrainiens ont été condamnés à la mort par la faim. Si l'oubli est une seconde mort, le déni est un second crime. Oui, Staline savait ; oui, il voulait éradiquer ces paysans. Il a eu beau nier, ciseler une contre-propagande grossière avec des tournées où un Édouard Herriot constatait que tout allait bien - la guillotine sèche, celle du bourreau tartuffe qui ne veut pas de sang sur ses mains, tombait sur l'Ukraine.

Aucune ambiguïté : la loi des épis du 7 août 1932, qui punit de déportation ou de mort tout vol ou dilapidation de la propriété socialiste, ne serait-ce que le vol de quelques épis de blé, conduit à condamner 125 000 malheureux, dont 5 400 à la peine capitale. Les circulaires du 27 décembre 1932 et du 22 janvier 1933 assignent les paysans ukrainiens à résidence, les empêchant de fuir la famine. Pendant ce temps, l'URSS exportait des millions de tonnes de céréales ukrainiennes pour financer son industrialisation à marche forcée.

Les négationnistes, parmi lesquels de prétendus historiens idéologiquement marqués, parlent d'une famine générale. Mais la volonté délibérée d'extermination, de dékoulakisation de l'Ukraine apparaît clairement à travers le témoignage du journaliste gallois Gareth Jones, ressuscité par le film L'Ombre de Staline, et les photographies d'Alexander Wienerberger.

L'Holodomor, comme la Shoah, c'est le mal absolu, le refus même de la civilisation. Souvenons-nous du cinquième commandement du Décalogue : « Tu ne tueras point ». Et du huitième : « Tu ne témoigneras pas faussement contre ton prochain ».

« Quand la nuit essaie de revenir, il faut allumer les flambeaux » écrit Victor Hugo. À nous de servir, non pas le devoir mais l'impératif de mémoire et de vérité. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, SER et INDEP)

M. Claude Malhuret .  - Nous ne savions pas. Combien de fois cette excuse a-t-elle servi pour ceux qui ont choisi de fermer les yeux ? La Shoah, dans le secret des camps. Le génocide khmer, dans un pays cadenassé, l'Holodomor dans l'Ukraine impénétrable, le goulag dans l'inaccessible Kolyma, le laogai au fin fond de la Chine interdite. Cette excuse, je n'y crois pas. La vérité ne se dérobe qu'à ceux qui ne veulent pas voir.

Ces crimes ont leurs bourreaux, bien connus, mais aussi leurs complices. Les complices actifs, d'abord : les fascistes français et les collabos, les partis communistes occidentaux et leurs compagnons de route, les sectes maoïstes qui accueillaient la fine fleur de l'intelligentsia.

Les idiots utiles aussi, comme Édouard Herriot, qui revient de l'Ukraine à l'été 1933 en décrivant un jardin aux récoltes admirables. Romain Rolland, Langevin, Malraux ont fait autant de visites Potemkine, alors que derrière les décors, des parents mangeaient leurs enfants morts, que la loi des épis condamnait à dix ans de camp, ou à mort, ceux qui avaient glané quelques épis pour se nourrir.

Les bourreaux qui ont perdu ont été condamnés : les nazis à Nuremberg, les Khmers rouges à Phnom Penh, les génocidaires hutus à La Haye. Mais pas de Nuremberg pour ceux qui n'ont pas perdu la guerre : Staline et Mao sont morts dans leur lit. Difficile de juger leurs crimes quand les preuves ont été effacées.

Combien d'années pour attribuer à Staline l'Holodomor, Katyn, le goulag, ou pour connaître le bilan du grand bond en avant en Chine ? Nous devons condamner ces forfaits pour la mémoire des victimes, mais aussi pour tenter d'éviter de nouvelles atrocités, car l'histoire se répète, et l'Ukraine perd des centaines de milliers de ses enfants par le crime d'un colonel du KGB devenu maître du Kremlin. Avec toujours les mêmes complices, les mêmes idiots utiles.

J'en parle, car je les connais. En 1980, lorsque Médecins sans frontières a dénoncé la famine organisée par les Vietnamiens au Cambodge, nous avons été accusés d'être des agents de la CIA. En 1984, lorsque nous avons dénoncé les déportations de masse en Éthiopie, nous avons été traités de menteurs par des ONG, par l'ONU et même par le misérable ambassadeur de France. Des années plus tard, une fois renversé, Mengistu sera condamné pour crimes de guerre. Abrité par son ami Mugabe, il coule des jours paisibles au Zimbabwe.

Les Ouïghours, les Rohingyas, les massacres menés au Congo ou en République centrafricaine avec l'aide de Wagner, se heurtent encore au négationnisme des complices et des idiots utiles.

Aujourd'hui, l'Ukraine est victime de nouveaux crimes contre l'humanité, mais aucune des résolutions prises à l'Assemblée, au Sénat ou au Parlement européen pour condamner la guerre de Poutine n'a été votée ni par le Rassemblement national, ni par les Insoumis, ni par le Parti communiste.

Le 28 mars, l'Assemblée nationale a voté comme nous une résolution sur l'Holodomor. LFI a refusé de participer au vote, le Parti communiste a voté contre. C'est une insulte à la mémoire des victimes de Staline, mais aussi de Poutine. Demain, après la victoire de l'Ukraine, il faudra que se tienne le Nuremberg du poutinisme et de ses complices. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. Guillaume Gontard .  - (M. Patrick Kanner applaudit.) Le 26 novembre dernier, l'Ukraine commémorait le 90e anniversaire de la grande famine, qui a entraîné la mort de plusieurs millions de personnes en 1932-1933. En 1920, Staline décide la collectivisation forcée des terres. Les fermes sont réquisitionnées, les prélèvements sur récolte explosent ; des famines éclatent dans plusieurs pays, comme au Kazakhstan.

Pour briser la résistance des paysans ukrainiens, Staline durcit les mesures. Les villages sont affamés et les paysans interdits de gagner les villes. Entre 3,5 et 5,5 millions de personnes mourront dans des conditions atroces. Cet épisode porte un nom : l'Holodomor, l'extermination par la faim.

Aujourd'hui, la Rada nous demande de reconnaître la grande famine comme un génocide du peuple ukrainien. Cet épisode de son histoire fait partie intégrante de l'identité ukrainienne. C'est en 2004, après l'élection de Viktor Iouchtchenko, que l'Ukraine dénonce les atrocités de Staline et élève l'Holodomor au rang de tragédie nationale. De nombreux États ont depuis reconnu ce génocide, l'Allemagne dernièrement ; le Parlement européen également, en décembre.

Les Ukrainiens, eux, n'ont pas eu le loisir de commémorer ce 90e anniversaire, car depuis février 2022, ils sont de nouveau attaqués. Si le régime a changé, l'agresseur est le même. Les velléités impérialistes de Poutine l'ont conduit à bombarder des civils, des hôpitaux, à déporter des milliers d'enfants dans des camps de rééducation afin de les endoctriner puis les faire adopter par des familles russes. Boutcha porte encore les stigmates de ces atrocités. Mais Poutine commet, comme Staline avant lui, une erreur fondamentale : nier la construction nationale ukrainienne qui s'est affirmée depuis deux siècles. En la menaçant, Poutine ne fait que renforcer cette identité et, plus que jamais, pousse l'Ukraine vers l'ouest du continent.

Il est de notre devoir d'accompagner le droit du peuple ukrainien à décider de son destin. La reconnaissance du génocide ukrainien revêt une importance symbolique qu'il ne faut pas négliger. Renouvelons notre solidarité sans faille envers le peuple ukrainien en votant cette résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, UC et Les Républicains)

Mme Nadège Havet .  - « Reconnaissance envers l'Assemblée nationale pour cette décision historique » : c'est ainsi que Volodymyr Zelensky remerciait les députés après le vote, le 28 mars, de la résolution reconnaissant le caractère génocidaire des crimes de masses commis à l'encontre du peuple ukrainien il y a 90 ans.

À l'initiative de notre collègue Garriaud-Maylam, notre Haute Assemblée s'apprête à faire de même.

Le groupe RDPI votera ce texte, qui fait suite à deux autres textes : celui de Claude Malhuret affirmant notre soutien à l'Ukraine et condamnant l'agression russe et celui d'André Gattolin condamnant la déportation d'enfants ukrainiens vers la Russie.

Les souffrances d'hier font écho à celles d'aujourd'hui. Cette résolution répond à l'appel fait par le ministre des affaires étrangères Dmytro Kuleba aux Parlements du monde entier.

L'Holodomor, extermination par la faim, a été orchestrée par Staline entre 1932 et 1933, dans plusieurs régions de l'URSS, en particulier en Ukraine. Dès 1929 a commencé la collectivisation forcée des terres, accompagnée de déportations et d'exécutions massives des koulaks. La répression brutale contre les velléités de résistance de la paysannerie ukrainienne et la confiscation des récoltes a provoqué un exode rural de masse. En réaction, un blocus interdisant l'entrée dans les villes, et de nouvelles mesures confiscatoires.

La loi des épis rendait le vol du moindre épi de blé passible de la peine de mort. Dans le même temps, plusieurs millions de tonnes de céréales ukrainiennes étaient exportées.

Ces atrocités, révélées depuis la chute de l'URSS, sont pourtant toujours niées par Vladimir Poutine.

Le 15 décembre dernier, le Parlement européen a reconnu le caractère génocidaire de l'Holodomor. Nous soutenons cette initiative. Il s'agit pour nous de proclamer l'indéfectible attachement de la France au respect de la dignité humaine et d'exprimer notre soutien à ce peuple.

Voter cette résolution, c'est aussi confirmer au monde que, lorsque les valeurs universelles sont en jeu, il n'y a ni droite ni gauche, mais une représentation nationale qui vote en conscience. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, du RDSE et du groupe Les Républicains)

M. Patrick Kanner .  - La famine organisée par le régime stalinien entre 1932 et 1933 est une abomination qui a fait plusieurs millions de morts. Le chiffre exact a été soigneusement dissimulé, mais, selon les estimations, 5 à 7 millions de paysans, Ukrainiens pour la plupart, auraient péri. Le grenier à blé de l'URSS était devenu sa fosse commune. Le pouvoir avait réquisitionné les récoltes, et jusqu'aux moyens de production afin de créer une famine artificielle.

En ciblant les paysans ukrainiens, Staline voulait éradiquer l'identité ukrainienne et contenir toute velléité de contestation du joug soviétique. Certes l'Histoire ne se répète pas, mais elle éclaire le présent.

L'Ukraine s'est émancipée de la sphère culturelle des Slaves de l'est dans lequel Moscou voulait la contenir. Victime de l'oppresseur soviétique, le peuple ukrainien s'affirmait comme intrinsèquement autre.

La Russie, elle, reste assise sur une identité empreinte des prouesses passées, dont l'industrialisation à marche forcée des années 1930 qui permit sa victoire contre l'Allemagne nazie. Elle ne peut donc accepter le terme de génocide, qui dresse un parallèle avec Hitler.

L'Holodomor doit être dénoncé comme l'un des pires crimes staliniens. La résonnance avec la guerre qui sévit en Ukraine est saisissante.

La montée du nationalisme en France, ainsi que des violences et de la vision suprémaciste qui l'accompagnent, est pour nous une source de vive inquiétude. Le danger n'a jamais aussi été prégnant. Le déferlement de violence de l'extrême droite témoigne de sa totale désinhibition. Soyons vigilants à ce que le nationalisme ne gagne plus notre continent.

L'Holodomor doit être reconnue comme l'un des trois pires génocides du XXe siècle avec le génocide arménien et l'Holocauste. La proposition de résolution fait appel à notre devoir de mémoire. Ce devoir doit se muer en devoir de vigilance, car les heures sombres ne sont jamais loin lorsque le nationalisme exacerbé et le populisme s'entremêlent.

Ce rappel d'un douloureux passé doit nous inciter à ouvrir dès que possible les portes de l'Europe au peuple ukrainien. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. Pierre Laurent .  - À la fin des années 1920, Staline rompt avec la Nouvelle politique économique. Il engage une collectivisation forcée des terres agricoles, d'une brutalité inouïe. Le coût humain fut terrible, en particulier en 1932-1933, après deux terribles récoltes, engendrant des famines historiques.

Le pouvoir soviétique alla jusqu'à mettre en place des blocus, pour éviter que les paysans ne désertent les fermes. Cette politique fit des millions de morts, ukrainiens mais aussi kazakhs et russes. L'historien Stanislas Kul'chitskii estime entre 3 et 3,5 millions le nombre de victimes en Ukraine - plus que pendant la grande famine russe de 1891-1892 et que celles de 1918 à 1922.

Avec l'ouverture des archives de l'URSS, les travaux de plusieurs chercheurs, dont Hiroki Kuriyama et Roland Davies, ont rouvert le débat sur la théorie intentionnaliste, selon laquelle Staline aurait volontairement tué par la faim les paysans ukrainiens parce qu'ukrainiens.

En 2022, le Parlement belge a sollicité l'avis de trois historiens, qui ont jugé le terme de génocide inapproprié. L'historien Nicolas Werth, qui, lui, assume ce terme, a exposé dans une tribune récente les enjeux de ce débat terminologique. Cela n'atténue en rien les crimes staliniens, dont furent d'ailleurs victimes des opposants communistes.

Les sénateurs communistes tiennent à interroger les motivations politiques de cette résolution. Nous avons voté la proposition de résolution sur les déportations d'enfants, preuve que nous n'avons pas la main qui tremble.

La guerre des récits nationaux est depuis dix ans au coeur du conflit russo-ukrainien. Poutine ne cesse de réécrire l'Histoire pour justifier sa croisade au nom de la dénazification, tandis que les nationalistes ukrainiens réhabilitent Stepan Bandera. Trente ans après la chute de l'URSS, les frontières sont physiques mais aussi mémorielles. L'Ukraine devra les dépasser pour faire vivre ensemble sa population. Est-ce de notre responsabilité que d'alimenter ces conflits mémoriels ?

Cette résolution nous semble surtout servir à justifier l'amplification de l'effort de guerre réclamée par les dirigeants ukrainiens, au détriment de la recherche de la paix.

Pour toutes ces raisons, et aussi pour exprimer notre malaise face à l'inflation du qualificatif de génocide, par définition exceptionnel, dans les résolutions parlementaires, le groupe CRCE votera contre cette résolution. (Mme Éliane Assassi applaudit.)

M. Claude Malhuret.  - Une fois de plus ! C'est honteux.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Décevant...

Mme Éliane Assassi.  - Laissons l'histoire aux historiens !

M. Olivier Paccaud.  - Le déni est un second crime !

M. Claude Malhuret.  - Vous êtes complices !

M. François Bonneau .  - La famine orchestrée par l'URSS en 1932-1933 nous rappelle la difficile construction de l'identité ukrainienne, aujourd'hui menacée par la Russie.

Le plan de collecte des récoltes élaboré par Staline s'est fait au détriment de la population : les réquisitions atteignaient 55 % en 1932. Le pouvoir a utilisé l'arme de la faim pour briser le mouvement paysan. Ce châtiment par la faim visait en réalité à éteindre l'identité nationale des Ukrainiens, qui revendiquaient déjà leur indépendance en 1919.

Des preuves d'intentionnalité de la famine ont été découvertes à la chute de l'URSS. Les réserves de nourriture des paysans ont été confisquées et ils ont été exécutés ou déportés. Le régime stalinien a tenté d'empêcher l'exode de ceux qui tentaient de fuir. Ces preuves plaident pour le qualificatif de génocide, au sens de la Convention de 1948. Ce grenier à blé est devenu un charnier.

L'Holodomor est un des socles de la reconstruction étatique, nationale et identitaire de l'Ukraine post-soviétique. Les crimes de Staline ont été retracés dans l'ouvrage Sanglantes Moissons de Robert Conquest, qui a ancré ce drame occulté dans la mémoire collective.

En novembre 2006, le Parlement ukrainien a reconnu la famine comme un génocide. À ce jour, 31 pays reconnaissent l'Holodomor comme tel. Le Parlement européen et l'Assemblée nationale ont suivi.

Nous ne pouvons rester insensibles. La reconnaissance de ce génocide par la France s'impose afin de mettre en lumière la politique d'assimilation et de destruction menée contre des populations civiles.

« L'humanité ne peut pas vivre éternellement avec, dans sa cave, le cadavre d'un peuple assassiné », disait Jean Jaurès. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER)

M. Jean Louis Masson .  - Je ne voterai pas cette proposition. D'abord, les faits ne correspondent pas à la définition juridique d'un génocide. Ensuite, cette proposition de résolution a surtout pour but de nuire à la Russie.

Les vrais responsables sont les dirigeants communistes, aussi bien ukrainiens que russes ou autres. Staline était géorgien, Khrouchtchev ukrainien. D'ailleurs, au prorata de la population, Staline a fait plus de morts au Kazakhstan qu'en Ukraine. Il faut une certaine mauvaise foi pour reporter les accusations sur la Russie d'aujourd'hui. Comme pour désigner Guillaume II seul responsable de la Première Guerre mondiale, en occultant la responsabilité des pays qui soutenaient les terroristes serbes et bosniaques qui assassinèrent l'archiduc !

De même pour le conflit russo-ukrainien, dont le vrai responsable est le trio des provocateurs : Otan, États-Unis, Union européenne.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - N'importe quoi !

M. Jean Louis Masson.  - La disparition du pacte de Varsovie aurait dû avoir pour corollaire la dissolution de l'Otan. Or, en violation des engagements pris, celle-ci s'est étendue vers l'est, sur des territoires appartenant à la Russie historique. Celle-ci, à juste titre, s'est sentie encerclée. Quand l'URSS a voulu installer quelques fusées à Cuba, les États-Unis étaient prêts à engager une guerre nucléaire. L'encerclement de la Russie par le trio des provocateurs est bien pire ! C'est pourquoi je suis hostile à l'adhésion de pays de l'ex-URSS à l'Otan et à l'Union européenne, qui est son cheval de Troie.

Si la guerre reste conventionnelle, la Russie finira par s'effondrer face aux énormes moyens mis en oeuvre par les pays de l'Otan. Le président Poutine acceptera-t-il une humiliation et un asservissement par l'Otan ? Son seul choix serait entre se laisser écraser et l'escalade nucléaire. (Mme Joëlle Garriaud-Maylam proteste.)

Les États-Unis ont utilisé la bombe atomique alors qu'ils gagnaient la guerre. La Russie, acculée, pourrait utiliser tous les moyens à sa disposition pour se défendre. Les États-Unis seraient alors mal placés pour lui donner des leçons.

M. Bruno Belin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDPI) Je salue l'auteur de cette résolution, Joëlle Garriaud-Maylam, et manifeste ma gratitude à la présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, Nadia Sollogoub, dont l'action honore le Sénat. Je salue aussi l'ambassadeur d'Ukraine, présent dans la tribune d'honneur, et lui exprime notre solidarité.

Nous ne devons pas nous placer sur le terrain de l'affect, mais nous fonder sur le droit international, qui, depuis 1948, définit le génocide par l'intention, la tentative de destruction et la notion de groupe national, religieux, ethnique ou racial.

Bien sûr, il y a eu intention de détruire. L'Holodomor fut une barbarie organisée par le leader de l'Union soviétique, consistant à user de l'arme de la faim contre le peuple ukrainien.

Si Mme Assassi était restée, je l'aurais mise au défi de voir deux fois de suite le film L'Ombre de Staline. Pour ma part, je n'y suis pas parvenu. Le régime avait dû inscrire sur des affiches : « Manger son enfant est un acte barbare ».

Toutes les victimes n'étaient pas ukrainiennes, mais il y a eu volonté d'anéantir la résistance des paysans ukrainiens, dont 6 à 7 millions ont péri.

Trente et un pays reconnaissent déjà ce génocide. Nier, c'est tuer une seconde fois. Ce sera l'honneur du Sénat de voter cette résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDPI ; Mme Hélène Conway-Mouret applaudit également.)

Mme Hélène Conway-Mouret .  - (Applaudissements sur de nombreuses travées) La mémoire d'une douleur est toujours intime. Pour avoir vécu trente ans en Irlande, j'ai le souvenir d'une vallée rousse et vide où le regard ne s'accroche qu'à la croix de granit commémorant la tragédie de Doolough. On peut y lire : Erected to the memory of those who died in the famine of 1845-1849.

Celui qui s'y recueille songe à ce poème de Desmond Egan : In Ireland also / there are places where no birds sing / where the past overgrows the present / where centuries quiver in a leaf / who had our own holocaust in medieval 1847.

Un jour de mars 1849, plus de 400 personnes sont mortes de faim dans ce comté de Mayo, lors d'une dernière marche imposée par l'administration coloniale. Au total, la Grande famine fit un million de morts.

Il ne s'agit pas de relativiser la dimension exceptionnelle de la famine qui entraîna la mort de 3,5 millions d'Ukrainiens. Nous pourrions débattre de la qualification de génocide inscrite dans ce texte - que nous voterons. Mais il ne nous revient pas de qualifier des faits, alors que les Nations unies s'y sont refusées et que le débat entre historiens n'est pas clos. La question n'est pas là.

Une famine provoquée et le refus de tout secours aux populations abandonnées conduisent à la mort d'une multitude de personnes et à l'effondrement durable de la natalité. Je ne sais si l'Holodomor a été un génocide. Mais cette extermination par la faim est, dans tous les cas, un événement tragique de l'histoire universelle.

Je pense à la plage lettone de Liepaja, où furent massacrés 10 000 juifs du ghetto de Riga, au collège de Tuol Sleng à Bangkok, au musée de la mémoire et des droits humains à Santiago du Chili. Je pense aussi au génocide arménien de 1915, dont l'Europe s'est détournée.

Un massacre de masse vise à faire disparaître une population non seulement de sa terre, mais de la Terre, comme le dit Hannah Arendt. La discrimination et la persécution d'une communauté sont des phénomènes communs à tous ces événements. Soyons-y attentifs, car ce processus n'a pas disparu.

C'est pourquoi la mémoire de l'Holodomor doit être rappelée, et c'est pourquoi le vote de cette résolution s'impose. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDPI ; Mme Joëlle Garriaud-Maylam applaudit également.)

Mme Nadia Sollogoub .  - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains) Dans les années trente, une épouvantable famine a fait sept millions de victimes. Elle était organisée par l'homme. Les victimes étaient surtout ukrainiennes, mais aussi kazakhes et russes.

Comment qualifier ce drame ? C'est la question que nous nous posons. Avons-nous le droit, par respect pour les générations passées, par souci des générations futures, de fermer encore les yeux ? Ce que l'on a appelé l'Holodomor a laissé peu de traces dans nos mémoires : le pouvoir soviétique a réussi à camoufler l'horreur.

En 1932, la loi des épis punissait de mort qui cachait les semences. La population, affamée, commença par manger les animaux d'élevage, puis les animaux domestiques, les rats, jusqu'à l'anthropophagie dans certains cas. Lénine avait été prophétique : « Pour soumettre un peuple, il suffit de l'affamer ».

Aujourd'hui, nous sortons d'un hiver glacial qui fait écho à cette époque : confiscations, victimes civiles, déportations d'enfants. Notre collègue Garriaud-Maylam nous propose une excellente résolution, appelant le Gouvernement français à reconnaître l'Holodomor comme un génocide.

Nous avons reçu Oleksandra Matviichuk, avocate ukrainienne, prix Nobel de la paix 2022. Elle a recensé les témoignages qui documentent les crimes de guerre actuellement perpétrés sur le sol ukrainien. Au sujet de l'Holodomor, elle dit : « Ceux qui ne connaissent pas leur histoire sont obligés de la répéter ».

Cette femme tient, comme tout le peuple ukrainien, grâce à un immense courage, mais aussi la certitude que la paix ne viendra pas sans la justice. Elle nous a fait comprendre combien il est important pour le peuple ukrainien d'obtenir l'assurance qu'aucun crime ne restera impuni.

L'Holodomor était bien une intention délibérée de détruire un groupe de personne. Nier son caractère génocidaire, c'est grimer la mémoire des peuples.

Le 26 novembre 2022, Oleksandra Matviichuk écrivait : « La Russie démolit le mémorial aux victimes dans Marioupol occupé, mais la mémoire survit. » Son propos fait écho au grand poète ukrainien Taras Chevtchenko : « Notre âme ne peut pas mourir. » Faisons en sorte que notre humanité ne puisse pas non plus mourir. (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Bravo !

M. Édouard Courtial .  - « Le droit est l'espoir de l'humanité, pas la guerre ». Ainsi parlait le dernier procureur survivant des tribunaux de Nuremberg, Benjamin Berell Ferencz, qui nous a quittés le 7 avril.

Depuis 1948, les États se sont engagés à prévenir et punir le crime des crimes : le génocide, défini comme la volonté de faire disparaître de la surface de la Terre un groupe national, ethnique, racial ou religieux.

Cette définition est due à Raphael Lemkin, choqué par l'impunité accordée aux crimes ottomans contre les Arméniens. Vingt ans après l'Holodomor, ce juriste polonais avait lui-même parlé de génocide soviétique et de tentative de destruction de la nation ukrainienne. Cette famine organisée a entraîné la mort de 4,5 à 9 millions de personnes en Ukraine. Après la collectivisation forcée à partir de 1932, la réquisition d'un tiers des récoltes créa une famine ; malgré les alertes, les directives du pouvoir central n'ont fait que se durcir, s'apparentant à une soumission intentionnelle du groupe dans des conditions pouvant mener à son anéantissement. Cela répond à la définition du génocide.

Le Parlement ukrainien en 2006, celui du Brésil en 2007, les parlements européen et allemand en 2022 ont reconnu l'Holodomor comme génocide. Certaines critiques pourraient parler aujourd'hui d'une reconnaissance de circonstance ; je préfère dire qu'elle est nécessaire au vu de la situation actuelle de l'Ukraine. Ce serait un signal fort de solidarité contre l'impunité des criminels internationaux.

Comme le génocide arménien est nié par la Turquie, l'Holodomor reste nié par la Russie. Face au silence et au révisionnisme, cette résolution nous invite à un travail mémoriel indispensable.

Je salue donc l'initiative de Joëlle Garriaud-Maylam, que je voterai. Qualifier l'Holodomor de génocide, c'est reconnaître une réalité immuable. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

M. Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger .  - Cette résolution revêt une importance particulière, non seulement parce que la mémoire de l'Holodomor est devenue un élément central de l'identité ukrainienne, mais aussi en raison de l'écho entre les souffrances du peuple ukrainien d'hier et d'aujourd'hui - alors que Kiev était visée hier par les missiles hypersoniques russes.

Les autorités soviétiques ont longtemps dissimulé les preuves de leur implication ; il a fallu attendre Gorbatchev pour que les historiens mettent en lumière, grâce aux archives, la réalité du projet soviétique. Face à un ennemi intérieur fantasmé, le koulak, paysan possédant incarnant le nationalisme ukrainien, le régime eut recours aux confiscations, au blocus, aux déportations collectives - qui firent plusieurs millions de morts.

Votre résolution est en résonance évidente avec l'actualité. La Russie cherche à nourrir un récit national justifiant son agression impérialiste, allant jusqu'à nier la réalité de l'Ukraine comme peuple et comme nation.

La France poursuit son soutien au travail indispensable des historiens, avec des unités mixtes de recherche franco-ukrainiennes en histoire et en sciences sociales. L'attachement à la vérité historique est la marque des sociétés démocratiques.

Le 26 novembre, la dernière commémoration de l'Holodomor nous rappelait combien la Russie aggrave, par son invasion, l'insécurité alimentaire mondiale. Une fois encore, la France a mené une action résolue. Le Président de la République annonçait alors le soutien français à l'initiative Grain for Ukraine, avec six millions d'euros apportés au programme de distribution au Yémen et au Soudan par le programme alimentaire mondial (PAM).

Comme l'Assemblée nationale il y a peu et d'autres parlements dans le monde, vous vous inscrivez dans ce travail de reconnaissance. Il n'est pas dans les habitudes du Gouvernement de reconnaître comme génocide des faits qui n'ont pas été reconnus comme tels, au préalable, par une juridiction française ou internationale. Mais la réalité des crimes commis ne fait pas de doute ; c'est pourquoi le Gouvernement soutient ce texte.

Je tiens à réaffirmer (M. le ministre lève son regard vers la tribune), monsieur l'ambassadeur d'Ukraine, notre soutien ferme à votre pays.

M. Bruno Belin.  - Très bien !

M. Olivier Becht, ministre délégué.  - Le Président de la République l'a rappelé ce week-end au président Zelensky.

Aide économique et financière, aide humanitaire et matérielle, lutte contre l'impunité : le soutien de l'Union européenne dépasse les 67 milliards d'euros. La France et l'Union européenne défendent à travers ce soutien un ordre international basé sur le droit et les règles, face à un président russe visé par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI).

Aider l'Ukraine à reprendre l'ascendant est la meilleure manière de mettre un terme au conflit. La France ne tolère par l'impunité des criminels soutenus par la Russie sur le sol ukrainien.

Notre appui est continu aux autorités ukrainiennes. Le 9 mai, nous leur avons remis un deuxième laboratoire d'analyses ADN pour documenter les crimes connus. Nous continuerons à agir en ce sens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du RDPI, du RDSE, des groupes INDEP, UC et Les Républicains)

À la demande du groupe Les Républicains, la proposition de résolution est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°290 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 327
Contre   16

La proposition de résolution est adoptée.

(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

Prochaine séance, mardi 23 mai 2023, à 14 h 30.

La séance est levée à 18 heures.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mardi 23 mai 2023

Séance publique

À 14 h 30 et le soir

Présidence : Mme Nathalie Delattre, vice-présidente, Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

Secrétaires :M. Dominique Théophile - Mme Corinne Imbert

1. Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur la proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, présentée par MM. Laurent Duplomb, Pierre Louault, Serge Mérillou et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission, n°590, 2022-2023)

2. Projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 (procédure accélérée) (texte de la commission, n°612, 2022-2023)

3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne (texte de la commission, n°588, 2022-2023)