Règlement du budget et approbation des comptes des années 2021 et 2022 (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion des projets de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes des années 2021 et 2022, rejetés par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée.

Discussion générale commune

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics .  - Les projets de loi de règlement pour les années 2021 et 2022 ont été rejetés début juin par l'Assemblée nationale, et la semaine dernière par la commission des finances du Sénat. Notre pays risque de rester sans loi de règlement et d'approbation des comptes. Or ces textes ne sont pas un quitus donné au Gouvernement : ils ne font que traduire l'exécution budgétaire.

Ce rejet ne mettra pas nos comptes en péril ni ne nous empêchera de voter la prochaine loi de finances, mais aura des conséquences comptables. Ainsi, l'an dernier, la Cour des comptes a certifié le bilan. Qu'en sera-t-il cependant si les lois de règlement sont rejetées année après année ?

Le plus important reste ce que cela dit de notre débat politique. Je ne comprends pas le rejet d'un texte qui ne consiste qu'à acter une exécution budgétaire. Dans ma commune, où je siège dans l'opposition, je vote souvent contre les budgets, mais pas contre le compte administratif - c'était il y a quelques semaines. Il en va de même aujourd'hui.

Nous avons des désaccords, que nous exprimons lors de l'examen des projets de loi de finances. Ici, nous nous trompons d'exercice. Il ne s'agit pas de se rassembler sur le fond, mais pas non plus de trouver des prétextes pour nous diviser. On peut regretter le passé, mais pas le changer, simplement en tirer les conséquences pour l'avenir.

Dans les conseils municipaux, les élus le disent : cela n'a pas de sens de voter contre un compte administratif. Je ne comprends pas votre rejet pavlovien et le regrette, même si je n'arriverai sans doute pas à vous convaincre... (Marques d'ironie au banc des commissions)

Depuis la Monarchie de juillet, un tel rejet est inédit. Nous aurons le même débat pour le projet de loi de règlement et d'approbation des comptes de la sécurité sociale, pourtant une première consacrée au niveau organique en 2021... À nouveau, nous n'avons pas la DeLorean qui nous permettrait de changer le passé.

L'exécution budgétaire 2021 marque une bascule entre la crise covid et celle de l'inflation. Le déficit est passé de 8,9 % à 6,5 % du PIB, et la dette publique est revenue à 112,5 % du PIB, une baisse de deux points. Nous ne dévierons pas de notre trajectoire de réduction de la dépense publique, enjeu de souveraineté.

Nous ne proposons qu'un amendement à l'article liminaire, pour tenir compte des derniers chiffres de l'Insee sur la croissance.

Nous avons aussi actualisé l'article liminaire du projet de loi de règlement pour 2022 avec une croissance de 2,5 %, et non 2,6 %. Nous mettons à jour les composantes structurelle et conjoncturelle du déficit, qui est pour cette année de 4,7 % du PIB.

Pour l'exécution 2022, nous avons cassé la spirale inflationniste et préservé la croissance. Le dynamisme des recettes réduit le déficit, passé de 6,5 % en 2021 à 4,7 %. De plus, les recettes ont crû, avec 15,8 milliards d'euros supplémentaires au titre de l'impôt sur les sociétés, qui atteint un record de 62,1 milliards d'euros malgré la baisse du taux. De même, les recettes de l'impôt sur le revenu, portées par le prélèvement à la source et le prélèvement forfaitaire unique, ont crû de 10,3 milliards d'euros, et celles de la TVA de 5,3 milliards d'euros.

Comme pour le covid, nous avons fait le choix de la protection des Français, tout en redressant les comptes. L'extinction des mesures de soutien sanitaire et la montée en charge des mesures portant sur l'énergie et l'aide à l'Ukraine expliquent le niveau des reports de crédits : je pense au chèque énergie et aux aides aux entreprises notamment. Les reports, de 18,3 milliards d'euros en 2023, restent certes élevés, mais ils diminuent : ils étaient de 37,2 milliards d'euros en 2021. Nous voulons revenir à 3 milliards annuels, les montants d'avant la crise.

Le solde des administrations publiques demeure très dégradé. Pour 2021 et 2022, nous avons mis 34,5 milliards d'euros nets - contribution au service public de l'électricité (CSPE) et contribution sur les rentes inframarginales (CRI) comprises - sur la table pour casser la spirale inflationniste. Le coût des boucliers sera toujours moins élevé que celui de deux points d'inflation supplémentaires.

En 2027, nous visons un déficit de 2,7 % du PIB et une dette réduite de 4 points de PIB. Grâce à notre méthode éprouvée de la revue des dépenses publiques, nous pourrons agir dans les domaines de la santé, du logement et de l'emploi, mais aussi pas la chasse aux niches fiscales favorisant les énergies brunes.

Pas l'austérité, mais la responsabilité : nous avons besoin de tous pour réussir. Selon l'engagement de la Première ministre, nous ne choisissons pas la contrainte pour les collectivités territoriales, mais la confiance. Ainsi, le programme de stabilité prévoit désormais un effort de l'État de 0,8 % en volume contre 0,4 % auparavant, alors que nous restons sur une diminution de 0,5 % des dépenses de fonctionnement pour les collectivités.

Maîtriser nos finances, c'est maîtriser notre destin. L'an dernier, nous avons lancé les dialogues de Bercy. Cette année, je voudrais débuter ces travaux plus tôt encore.

M. le rapporteur général et les groupes politiques regretteront un niveau de déficit et des reports trop élevés...

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Ne répondez pas aux questions avant qu'elles n'arrivent !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Comme je l'ai dit, rejeter le texte ne fera que rendre des opérations comptables plus complexes et est incohérent avec ce qui se passe dans les collectivités, en tout cas pour les élus constructifs...

M. Jean-François Husson, rapporteur général - Que nous sommes !

M. le président. - Je ne doute pas que votre réponse sera constructive, monsieur le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances .  - Une fois n'est pas coutume, nous examinons deux projets de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes. C'est d'autant plus extraordinaire que le premier texte est en substance identique à celui déjà rejeté à l'été 2022 par les deux assemblées.

L'an dernier, les conséquences du rejet se sont limitées à de nouvelles procédures comptables.

L'article liminaire évolue légèrement pour tenir compte des chiffres à jour, mais les raisons du rejet demeurent : des comptes dégradés, des dépenses historiquement élevées et trop de reports de crédits. La commission des finances propose donc de rejeter les deux textes.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, j'avais souligné le caractère optimiste des prévisions du Gouvernement, avec une croissance de 4 %. Avec la guerre en Ukraine, la hausse des prix de l'énergie et une inflation à 5,2 %, la croissance s'est finalement élevée à 2,5 %. Les 38 milliards d'euros de dépenses ont certes limité la casse, mais la situation des finances publiques est inquiétante.

Pour 2022 le déficit s'élève à 4,7 % du PIB : c'est certes mieux que la prévision initiale, mais nous sommes bien loin du 0,3 % prévu par la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Les crises ne suffisent pas à expliquer cet écart : le Gouvernement a cessé de tenir ses promesses de maîtrise des finances publiques dès la crise des gilets jaunes. Les dépenses hors mesures de crise ont augmenté plus rapidement durant le quinquennat 2017-2022 que lors du précédent. La hausse de 16 milliards d'euros de la charge de la dette nous alerte.

En outre, la légère baisse de l'endettement public est uniquement due à la croissance. Notre dette comme notre déficit sont parmi les plus importants de l'Union européenne, ce n'est pas un motif de fierté.

Certes, les recettes fiscales sont bonnes, mais n'espérons pas trop que ces vents favorables se poursuivent.

Le déficit s'établit en 2022 à un niveau de 151,4 milliards d'euros. Certes, le Gouvernement relève une amélioration de 20 milliards d'euros par rapport à 2021, ce n'est pas un motif de satisfaction alors que cela ne s'explique que par l'extinction de mesures de relance et d'urgence. L'écart entre les recettes et les dépenses du budget général atteint désormais 55 %. Le déficit est proche de la prévision du fait de la surestimation des dépenses et de la sous-estimation des recettes. Les écarts de prévision existent depuis trois ans alors que les recettes sont connues : la Cour des comptes recommande d'en analyser les causes.

L'année 2022 marque une forte dégradation du compte de résultat, de 19 milliards d'euros : les décisions prises en 2022 ont des conséquences sur les dépenses futures et engagent l'avenir. Les restes à payer ont augmenté de 87 %, sans compter les 163 milliards d'euros au titre du programme d'amortissement de la dette. En outre, en euros constants, le niveau des recettes est comparable à celui de 2017.

Les recettes non fiscales augmentent depuis deux ans, en raison des versements européens et de la vente des quotas carbone : ces derniers représentent 1,4 milliard de rentrées en 2022, sans compter les 500 millions d'euros affectés à l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Ces montants devront contribuer à la transition écologique.

Les recettes augmentent, mais les dépenses aussi. La crise de 2020 amène un nouveau plancher de dépenses supérieur de 25 % à celui de 2019. En 2022, hors missions plan de relance et plan d'urgence qui baissent, les dépenses augmentent significativement.

Les effectifs sont en baisse, non par choix, mais en raison d'une pénurie de main-d'oeuvre, alors même que la masse salariale augmente en raison de la hausse du point d'indice.

Le budget exécuté apparaît de plus en plus éloigné de l'autorisation parlementaire. Mais cette année, vous avez innové : une partie des crédits de 2021 n'ont été reportés que pour équilibrer artificiellement le décret du 21 avril 2022 ! Il fallait y penser... De même, la création d'un programme de remboursement de la dette covid brouille la notion d'autorisation d'engagement.

En outre, certaines mesures votées au Sénat n'ont pas été exécutées : je pense à la carte Vitale biométrique, avec 4,3 millions d'euros dépensés sur 50 millions d'euros. Il en va de même pour 50 millions d'euros affectés au réseau routier des collectivités, affectés aux ouvrages d'art du réseau national. C'est scandaleux : les accords trouvés en CMP doivent être respectés. Vous ne nous y reprendrez pas.

Le budget est de plus en plus flou, les lois de finances ne donnent que des visions biaisées : c'est contraire à la loi organique relative aux lois de finances (Lolf). Voilà pourquoi nous avons appelé au rejet des deux textes, sans que cela constituât un réflexe pavlovien, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Question préalable sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022

M. le président.  - Motion n°1, présentée par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération du projet de loi, rejeté par l'Assemblée nationale, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022 (n° 684, 2022-2023).

M. Pascal Savoldelli .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) Malgré un refus argumenté du Parlement l'an dernier, le Gouvernement nous soumet de nouveau le projet de loi règlement pour 2021, faisant fi des 235 votes contre et des 68 abstentions exprimées l'an dernier. Vous persistez : nulle surprise au nouveau rejet par l'Assemblée en première lecture.

Monsieur le ministre, comment expliquez-vous le dépôt de votre projet de loi de règlement 2021 hors délai, alors que vous avez vous-même réduit ces délais ?

Le projet de loi de règlement pour 2022 a, lui, été déposé dans les temps. Mais, par constance politique, nous réitérons la même critique : c'est un budget exécuté de manière insincère.

Voilà quatre ans que nous rejetons les projets de loi de règlement les uns après les autres. Il faut un geste fort. Jusqu'ici, nous n'avions pas déposé de motion. Aujourd'hui, notre question préalable exprime un « plus jamais ça » du piétinement de l'autorisation budgétaire. Ce parking politique ne peut plus durer et l'art de l'anti-catastase doit cesser. Les finances publiques sont gérées à la petite semaine. Le déficit atteint 151,4 milliards, soit 4,7 % du PIB.

Nous ne nous trompons pas d'exercice : on n'arrêterait pas de se tromper. On se tromperait, à l'Assemblée nationale, on se tromperait au Sénat depuis des années d'ailleurs, on n'arrêterait pas de se tromper. (M. Julien Bargeton ironise.) Mais les recettes sont massivement sous-évaluées ! Plus 27,5 milliards d'euros par rapport à 2021, plus 35,7 milliards d'euros par rapport au projet de loi de finances initiale, plus 7,5 milliards par rapport au dernier collectif budgétaire : les rentrées fiscales sont bien supérieures à ce que vous escomptiez. Erreur ou tour de passe-passe ?

Selon l'exposé des motifs du texte, « les recettes d'impôt sur le revenu net sont en ressaut de 6,6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale, essentiellement en lien avec le dynamisme de la masse salariale et des dividendes ». Les recettes de l'impôt sur les sociétés augmentent de 45 % par rapport à 2019. La première insincérité est cette négation des profits, pour feindre de ne pouvoir les distinguer des superprofits. Selon le FMI, la hausse des bénéfices des entreprises a été le principal moteur de l'inflation au cours des deux dernières années. (M. Éric Bocquet acquiesce.)

Chers collègues, il faut parler de la cupidité de certains, qui s'enrichissent grâce à la guerre. Le bouclier tarifaire a représenté une dépense de 18,3 milliards : on n'aide que le capital, qui se gave. L'État providence est devenu l'État ambulance.

Les recettes et les dépenses supplémentaires représentent 59,8 % du déficit constaté pour l'année civile 2022. L'argent existe, mais nous sommes passés du « quoi qu'il en coûte » au « quoi qu'il advienne ». Pour quels progrès sociaux ? En 2022, les classes populaires ont eu droit à un chèque, qui laisse 1,3 million d'oubliés.

Le Gouvernement multiplie les affichages. Le plan de relance devient un plan de communication. La diminution de crédits de 7,3 milliards est imputable aux aides à France Compétences et à Pôle emploi : rien à voir avec la relance. C'est aussi le symbole d'annonces non suivies d'effets, avec 6 milliards d'euros de reports de crédits « en raison de dispositifs au financement plus complexe que prévu ou qui ne trouvent pas leur public », selon la Cour des comptes.

Monsieur le ministre, la comparaison avec les comptes administratifs des collectivités ne tient pas, parce qu'elles n'ont pas les moyens de l'État. En outre, rares sont celles qui mettent en avant des comptes administratifs insincères. Vous n'avez pas d'exemples...

Cette année encore, les reports de crédits, de 14,3 milliards d'euros, marquent votre politique de la cagnotte.

Cette motion de rejet est un outil pour envoyer un message clair : le Gouvernement est défaillant dans ses prévisions et ses conceptions de mesures, s'appuyant sur une volonté politique insincère. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST)

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable. Certes, nous pouvons partager quelques-uns des arguments qui viennent d'être développés, mais nous voulons débattre. En outre, monsieur le ministre, on ne peut pas tout comparer, comme vous le faites sur un ton gentiment professoral. (Sourires)

M. Éric Bocquet.  - Soyons sérieux !

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Les reports ne sont pas un sujet mineur. Pourquoi le Gouvernement souhaite-t-il conserver autant de réserves ? Cela manque de rigueur. Ces questions méritent d'être débattues.

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Avis défavorable. Monsieur le rapporteur général, je n'ai pas adopté un ton professoral. J'ai simplement établi un parallèle entre un compte administratif et un projet de loi de règlement. Cela vous dérange peut-être... (Marques d'ironie sur les travées du groupe CRCE)

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Aucunement !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Si les projets de loi de règlement étaient de véritables textes budgétaires, leur rejet aurait des conséquences concrètes. (M. Pascal Savoldelli proteste.) Or ce n'est pas le cas : le texte est une photographie de l'année précédente. Bien sûr, vous pouvez rejeter le texte. Assumez-le. Mais je vous le répète : je ne comprends pas une telle attitude.

M. le président.  - Je vais consulter le Sénat sur la motion tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du texte en discussion.

En application de l'article 59 du Règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Voici le résultat du scrutin n°322 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 279
Pour l'adoption   27
Contre 252

La motion n'est pas adoptée.

Discussion générale commune (Suite)

Mme Vanina Paoli-Gagin .  - Pierre Mauroy disait : « la rigueur, c'est l'austérité plus l'espoir ». En termes mathématiques, cela revient à : espoir = rigueur - austérité.

Chacun des textes financiers que nous examinons confirme cette équation. Ils suivent des procédures millimétrées et respectent un ensemble de règles, notamment liées au cadre européen. Tous ces textes « Canada dry » ont la couleur de la rigueur, sans le goût de l'austérité : ils entretiennent l'espoir d'une amélioration prochaine, mais en réalité, c'est plutôt l'ivresse des profondeurs...

Je connais l'énergie que vous déployez pour maîtriser nos comptes et la volonté de notre rapporteur général de diminuer les dépenses publiques. Mais nous devons prendre acte d'un échec collectif. Il nous faut changer de logiciel pour reprendre la maîtrise de nos comptes.

En 2022, la charge de la dette a augmenté de 12 milliards d'euros. Son montant dépasse les crédits du plan de relance. Ne pas réduire notre dette publique, c'est compromettre les investissements nécessaires dans nos services publics, les technologies du futur et la transition énergétique.

Nous devons baisser drastiquement certaines dépenses, c'est-à-dire opérer des arbitrages -  en d'autres termes, faire des choix. C'est l'objet du débat budgétaire annuel, qui se tient à l'automne.

Un projet de loi de règlement ne devrait pas faire l'objet de débats politiques : ce n'est pas un règlement de comptes politiques. Il s'agit de prendre acte des mesures passées, en responsabilité. J'ai exprimé les réserves de notre groupe quant à l'évolution des finances publiques, mais je doute que nous améliorions quoi que ce soit en rejetant les projets de loi de règlement.

Notre seule préoccupation doit être de faire repasser nos dépenses sous nos recettes, pour limiter nos prélèvements obligatoires et préserver la compétitivité du site France. J'espère que le Gouvernement concrétisera les économies récemment annoncées et que la commission aussi sera force de propositions. Le groupe INDEP, en tout cas, le sera. Nous voterons les deux projets de loi de règlement des comptes.

M. Daniel Breuiller .  - Monsieur le ministre, je vous donne raison : le rejet des projets de loi de règlement dit quelque chose de notre démocratie mal en point ; en revanche, il n'a rien de pavlovien.

Comme il n'est pas sûr que nous nous retrouvions pour la discussion budgétaire -  j'ai entendu parler d'un éventuel remaniement...  - , je vous dis ma conviction profonde : vos choix budgétaires ne permettent de relever ni les défis climatiques ni les défis sociaux.

L'accroissement de la charge de la dette n'est pas une bonne nouvelle, parce qu'il diminue la capacité d'agir de l'État. Les 13 milliards d'euros de hausse de la charge de la dette auraient suffi à éviter l'injuste réforme des retraites que vous avez imposée aux Français malgré leurs protestations constantes.

La dette n'est pas mauvaise en soi, dès lors qu'elle finance des investissements pour réduire notre dépendance au fossile, rénover nos logements ou décarboner les transports. Selon le rapport Pisani-Ferry et Mahfouz, il y a une bonne dette.

Vous nous privez de recettes, notamment par la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), sans contrepartie. Vous réduisez les moyens des services publics, puis faites dire à nos concitoyens, à travers la plateforme « En avoir pour mes impôts », que les services se dégradent...

Petits pas et demi-mesures sont de mise, alors que le dérèglement climatique avance à grands pas. Il nous faut entre 25 et 34 milliards d'euros par an d'ici à 2030 pour lutter contre le dérèglement climatique et nous y adapter. Vous avez balayé notre proposition d'ISF climatique, entendez celle de taxer les 10 % les plus aisés, qui sont aussi les principaux pollueurs. Il faut avancer vers un budget vert et sensible aux inégalités.

La Cour des comptes a qualifié le budget vert annexé au projet de loi de règlement de « démarche inaboutie ». C'est le moins qu'on puisse dire : le bouclier tarifaire n'a pas été intégré dans les dépenses défavorables au climat, alors qu'il constitue une aide à la consommation d'énergies fossiles. Donnons-nous les moyens d'évaluer réellement nos actions et de les infléchir. Nous demandons une loi de programmation et de financement de la transition écologique.

Notre groupe défend aussi nos services publics, le patrimoine de ceux qui n'en ont pas. Leur dégradation nourrit un sentiment d'abandon et de désespérance que les gilets jaunes et la crise actuelle révèlent avec violence. Il faut plus de solidarité quand l'inflation, en grande partie spéculative, attaque le pouvoir d'achat de nos concitoyens.

Dans un contexte d'urgence climatique et d'augmentation des inégalités, les budgets 2021 et 2022 sont des occasions manquées pour les services publics et la transition. Nous avons besoin d'une véritable bifurcation environnementale et sociale. La crise climatique ne repassera pas les plats, et nos insuffisances d'aujourd'hui se traduiront par des crises aggravées demain.

Le GEST votera contre les projets de loi de règlement.

M. Julien Bargeton .  - Je serai bref : le ministre n'ayant pas réussi à vous convaincre, j'aurai du mal à le faire... (M. le ministre sourit.)

Il n'y a jamais eu de rejet de la loi de règlement par l'Assemblée et le Sénat depuis 1833 -  il y a 190 ans, donc. Depuis lors, pourtant, la France a vécu des périodes politiques tendues...

Je ne puis donc voir qu'un acte politique dans le vote de ce soir. Cela se produit parfois dans nos collectivités territoriales, mais pas toujours. J'ai été adjoint aux finances d'une grande collectivité : certains opposants, parfois virulents, ont pu considérer que le compte administratif n'était pas leur affaire, qu'il s'agissait de la gestion de l'exécutif.

La majorité sénatoriale ne fait pas ce choix. C'est un parti pris politique : il est honorable, mais ne cherchez pas à le justifier par des raisons de fond.

Sur le fond, je soutiens le budget 2021, celui de la relance, et le budget 2022, celui de la lutte contre l'inflation. Je me réjouis des mesures prises par le Gouvernement dans les deux cas.

La baisse de l'impôt sur les sociétés a permis d'engranger 22 milliards d'euros de recettes supplémentaires : le moindre taux a donc accru le rendement, comme c'est souvent le cas. En 2022, la croissance a été de 2,6 %, preuve que les actions entreprises ont porté leurs fruits.

Nous voterons donc ces projets de loi. En ne prenant pas part au vote ou en s'abstenant, les oppositions permettraient au moins de régler les questions administratives. J'ai entendu le mot « insincérité » : je le récuse, car la Cour des comptes a certifié les comptes et aucune insincérité ne justifierait un rejet inédit depuis 1833.

Vous voulez en faire un moment d'opposition au Gouvernement, d'une manière peu pertinente, alors que la discussion budgétaire permettra le débat démocratique. Je regrette la position du Sénat et j'espère que le Gouvernement trouvera des solutions pour que le bilan des comptes soit dressé, comme il est nécessaire.

M. le président.  - En 1833, mon cher collègue, il y avait une Chambre des pairs et une Chambre des députés...

Mme Isabelle Briquet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le ministre, vous comparez les lois de règlement aux comptes administratifs de nos collectivités territoriales. Il est fréquent, en effet, que les oppositions adoptent les comptes administratifs, mais à une condition : que l'exécution corresponde aux prévisions. En l'espèce, tel n'est pas le cas.

Nous avons déjà rejeté le projet de loi de règlement pour 2021 l'année dernière : nous voterons à nouveau contre. La Cour des comptes a soulevé une atteinte aux principes d'annualité et de spécialité budgétaires. Les reports de crédits importants et la confusion des exercices nuisent à la lisibilité de ce texte : aurait-on voulu cacher l'échec de la politique menée ?

Les points de défaillance sont nombreux. La situation inédite sous la Ve République - rejet du texte par les deux chambres - aurait dû alerter le Gouvernement. Mais aucun enseignement n'a été tiré, puisque le projet de loi de règlement pour 2022 reproduit les mêmes pratiques budgétaires. Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, le groupe SER ne le votera pas.

Au désarmement fiscal s'ajoute le manque d'ambition réelle en matière de cohésion sociale et territoriale et de transition écologique. Le projet de loi de règlement pour 2022 entérine des montants disproportionnés d'annulations et de reports de crédits, au détriment de politiques publiques essentielles. Ainsi, la mission Écologie est amputée de 714 millions d'euros, qui manqueront à la transition écologique. Nos propositions d'équilibrage fiscal, comme l'ISF vert, permettraient d'assurer l'acceptabilité sociale de la transition ; nous ne manquerons pas d'y revenir.

La réduction du déficit public de 6,5 à 4,7 % est à noter, mais l'importance du déficit structurel, à 3,4 %, témoigne de l'impasse dans laquelle est engagé le Gouvernement du fait de son refus obstiné de rééquilibrer les recettes. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) alerte même sur un risque de dégradation supplémentaire du déficit structurel.

Vu l'état des finances publiques, la question des recettes ne pourra être indéfiniment occultée. Si l'on peut partager le souci de maîtriser les dépenses, le refus du Gouvernement de faire contribuer les entreprises et les plus aisés interroge, alors que, rapport après rapport, la théorie du ruissellement est démentie.

Ces dernières années, le Gouvernement a renoncé à 50 milliards d'euros de recettes. Et de nouveaux cadeaux fiscaux sont envisagés... Jusqu'à quand nos finances supporteront-elles cette vision idéologique, alors que notre dette atteint 3 000 milliards d'euros ?

S'agissant de la progression nette du produit de l'impôt sur les sociétés, il faut rappeler que ces recettes sont très sensibles à la conjoncture, donc fluctuantes. Ce qui est sûr, c'est que la poursuite du désarmement fiscal ne permettra ni de rétablir nos finances publiques, ni de renforcer nos services publics, ni de remédier aux inégalités qui fracturent notre société.

Comme l'an passé, la Cour des comptes souligne que l'ampleur des annulations et reports de crédits pose problème, notamment au regard du principe d'annualité budgétaire. Le projet de loi de règlement pour 2022, comme le précédent, marque une exécution éloignée de l'autorisation parlementaire et signe l'entêtement du Gouvernement dans une politique purement libérale.

Le groupe SER rejettera ces deux projets de loi.

M. Éric Bocquet .  - À l'heure où les associations d'élus ont refusé de participer à la grand-messe de l'austérité sous la bannière des « Assises des finances publiques », nous leur apportons tout notre soutien. Nous nous opposerons aux mesures non concertées, comme la revalorisation du point d'indice, indispensable mais décidée sans moyens nouveaux.

Le concept très « bercyen » d'auto-assurance vise les recettes des collectivités. En bref, on leur dit : vous ne pourrez compter que sur vous-mêmes...

Bruno Le Maire, dans une formule dont il a le secret, affirme que l'assureur en dernier ressort des collectivités territoriales serait l'État. C'est présumer l'irresponsabilité des élus. Les collectivités territoriales n'ont pas besoin d'un tel assureur, qui les a abandonnées face aux méandres des marchés de l'énergie et de l'inflation alimentaire, pour moitié liée à la course au profit.

Sous les acclamations de cet hémicycle, Bruno Le Maire avait annoncé que plus de la moitié des communes seraient éligibles au dispositif de protection. Mais sur les 430 millions d'euros du filet de sécurité, seuls 106 millions d'euros ont été versés.

La situation est pourtant très grave pour les collectivités territoriales, dont les dépenses de fonctionnement ont grandement augmenté : 15,1 % pour l'énergie. Près de 4 milliards d'euros supplémentaires ont été dépensés par les communes pour leur énergie, alors que la dotation globale de fonctionnement (DGF) baisse sous l'effet de l'inflation. Les dépenses de personnel bondissent également du fait de la revalorisation du point d'indice. Les collectivités territoriales outre-mer connaissent elles aussi une explosion de leurs charges, de plus de 11 % à La Réunion.

Les dépenses d'investissement ont augmenté de 10,7 %, du fait de l'envolée des prix des matériaux ; l'autofinancement des communes a été réduit à 0,5 milliard d'euros.

Il faut un moratoire sur les baisses de fiscalité locale et un nouveau pacte financier, respectueux des collectivités, sans injonction. Là serait la vraie sécurité financière !

Les mesures prises n'ont pas permis aux collectivités d'affronter les aléas des marchés mondiaux et une conjoncture défavorable dans un cadre de gel des dotations. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Michel Canévet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je n'aurai pas une lecture aussi négative de ces textes que les orateurs précédents...

Des éléments positifs existent. Ainsi, le déficit du budget de l'État est assez proche de celui qui était prévu en loi de finances initiale. De surcroît, l'inflation a été maîtrisée par rapport aux autres pays européens, notamment grâce à l'intervention de l'État.

La situation, toutefois, reste inquiétante. Le déficit - 170 milliards d'euros en 2021, 151 milliards en 2022 - est très important. Notre dette a atteint 3 000 milliards d'euros voilà peu. Dans le contexte de hausse des taux, la charge de la dette s'alourdit, pour atteindre 50 milliards d'euros. Elle est en passe de devenir le poste de dépense le plus important du budget de l'État, alors qu'il nous faut investir pour préparer l'avenir.

S'agissant des recettes, la trajectoire de réduction des impôts est souhaitée par tous, car la France a l'une des fiscalités les plus élevées au monde. La baisse du taux de l'impôt sur les sociétés a permis d'en accroître le rendement, dans une conjoncture certes favorable.

Nous aurions souhaité préserver en 2022 certaines recettes, comme la redevance audiovisuelle. Sa suppression avait été promise par le Président de la République, mais son report aurait permis de supprimer le décalage de deux ans dans la récupération de la TVA par les collectivités territoriales. Nous avions proposé aussi que la suppression de la CVAE soit décalée, pour retrouver des marges de manoeuvre. Il faudra trouver entre 8 et 10 milliards d'euros d'économies l'année prochaine -  la Cour des comptes évoque même 60 milliards d'ici à 2027 !

Nous avons des besoins importants à financer. Je pense à la loi de programmation militaire, à la justice, à la police ou à l'aide publique au développement, mais aussi à la politique de la ville pour répondre au mal-être ambiant. La transition écologique suppose des investissements considérables. Ce ne sera possible que si l'État préserve les recettes.

Dans sa très grande majorité, le groupe UC s'abstiendra sur ces textes ; nos collègues Vincent Delahaye et Jean-Marie Mizzon, partisans d'une réelle orthodoxie budgétaire, voteront contre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Christian Bilhac .  - Mercredi dernier commençaient les soldes : avec deux projets de loi pour le prix d'un, nous y sommes ! (Sourires)

En 2021, il a fallu payer le « quoi qu'il en coûte », nécessaire pour répondre à une situation exceptionnelle. Aujourd'hui, l'incertitude reste une certitude. Notre pays est tributaire d'aléas internationaux et est confronté à des soubresauts internes révélateurs d'une crise sociale profonde. Dans ce contexte, la responsabilité du législateur est d'assurer la continuité de nos institutions. Ce qui passe aussi par le vote du règlement des budgets 2021 et 2022.

Le budget 2022 se résume à 151 milliards d'euros de déficit et au non-respect des grands principes de la comptabilité publique.

Sur les 34 milliards d'euros du plan d'urgence sanitaire, une partie a été réinjectée vers la mission Écologie, développement et mobilité durables et le bouclier énergétique. L'objectif de redressement des finances publiques s'éloigne : entre 2019 et 2022, les dépenses du budget général ont crû de 23,7 %.

La hausse des concours aux collectivités territoriales est en trompe-l'oeil, car il ne s'agit que de compenser des suppressions d'impôt.

En matière de recettes, l'écart entre prévisions et réalisations est devenu une tradition.

Le budget 2022 se clôt sur une situation très dégradée des comptes publics. L'endettement atteint des sommets. Or la hausse des taux d'intérêt en alourdit le coût.

Les trois premiers postes de dépenses sont l'éducation nationale, puis la dette - 54,3 milliards d'euros - et la défense - 51,7 milliards. Il faut garder en tête l'objet de redressement des finances publiques. Nous en sommes loin.

Le RDSE, dans sa majorité, votera le projet de loi de règlement pour 2021 et s'abstiendra sur le projet de loi de règlement pour 2022. (Applaudissements sur des travées du groupe UC)

Mme Christine Lavarde .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Oui, monsieur le ministre, le projet de loi de règlement est une photographie de nos finances publiques : mais on voudrait que l'image soit plus belle à voir...

L'amélioration, relative, du déficit repose sur la dynamique très forte des recettes fiscales et la baisse des prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne et des collectivités territoriales. Ces dernières sont financées à 93,4 % par des impôts affectés et des prélèvements sur recettes.

Les prélèvements obligatoires atteignent 45,3 % du PIB, un niveau historique dont il n'y a pas lieu de se réjouir !

Le déficit structurel est de 4 %. Le déficit structurel attendu pour 2023 est du même montant. Il n'y aurait donc aucune amélioration du déficit structurel entre 2022 et 2023, à moins d'une très bonne surprise. Le HCFP tire la sonnette d'alarme sur la nécessité de réduire ce déficit structurel, alors que de nouvelles dépenses devront être financées, notamment en faveur de la transition énergétique et des investissements pour la croissance. Et je ne parle pas des annonces du Président de la République à Marseille ni des événements de ces derniers jours...

L'amélioration affichée du solde budgétaire ne résulte pas d'un effort en gestion, mais d'un effort en paiement. En effet, 25 milliards d'euros de crédits n'ont pas été consommés et 18,7 milliards ont été reportés. La Cour des comptes constate ainsi, en 2022 comme les années précédentes, une tendance marquée à la budgétisation d'enveloppes importantes, sous-consommées, reportées et parfois en partie redéployées. Elle considère que ce phénomène porte atteinte au principe d'annualité, pose question au regard du principe de spécialité et nuit à la lisibilité de l'autorisation parlementaire.

Les dépenses de fonctionnement ont augmenté de 15,6 milliards d'euros par rapport à 2021, dont 10 milliards pour la renationalisation d'EDF et 4 milliards de subventions à France compétences, dont le sous-financement est structurel. Ce ne sont pas des dépenses pour l'avenir, mais pour sauver des bateaux en train de couler.

Les dépenses de l'État en 2022 sont en hausse de 31,9 % par rapport à 2019, alors que l'inflation a été de 8,6 % sur cette période.

La hausse du service de sa dette n'est qu'un apéritif, compte tenu de l'évolution des taux. Une augmentation de 1 % nous coûte 31,4 milliards d'euros à 10 ans. Par ailleurs, la moitié de la dette à moyen et long termes devra avoir été remboursée en 2028.

Le schéma d'emplois est aussi une source d'inquiétude. La baisse constatée, plus forte qu'en 2021, est supportée par les ministères de l'éducation nationale et des armées, alors que leurs effectifs auraient dû augmenter. La situation devient critique dans l'éducation nationale, et les concours traduisent encore une aggravation.

Il est urgent d'avoir une trajectoire de référence, avec une loi de programmation des finances publiques qui engage l'État et l'ensemble des acteurs publics dans une stratégie de redressement.

Cette année encore, le groupe Les Républicains votera contre la loi de règlement, traduction d'un budget qu'il n'a pas soutenu. Nous dénonçons aussi le mépris du Parlement par la remise en cause des principes d'annualité et de spécificité.

Comme rapporteur spécial de la mission Écologie, je souligne la gestion opportuniste des charges de service public de l'électricité et le changement de programme en cours d'exécution du dispositif de soutien à la consommation de carburant. Par ailleurs, le rattachement à la mission des dispositifs visant à atténuer les conséquences de la hausse du prix des énergies est contestable.

La démarche de budget vert, sur laquelle nous avons émis des réserves méthodologiques, s'arrête au milieu du chemin, faute de cotation des crédits réellement dépensés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Très bien !

M. Stéphane Sautarel .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le projet de loi de règlement ne s'apparente pas au simple constat des comptes administratifs des collectivités territoriales : sa portée est bien plus grande.

Les députés ont à nouveau rejeté ceux de 2021 et de 2022. En ce 3 juillet, date de l'appel des maires - qui marquera sans doute davantage l'histoire -, il nous appartient de nous prononcer sur les deux.

Crise énergétique et inflation ont contribué à l'augmentation des dépenses de l'État, mais la dépense ordinaire aussi n'a cessé de croître. L'état de nos finances publiques est dégradé, et vous faites peu de cas, cette année encore, de l'autorisation parlementaire. Or la dette risque d'être insoutenable.

Les recettes sont exceptionnelles, ce qui limite le déficit du budget de l'État : on peut s'en réjouir, mais cela risque d'être ponctuel. En outre, l'effet recette est totalement gommé par les dépenses, en hausse de 24 % en euros constants entre 2019 et 2022. Les dépenses de presque tous les ministères augmentent. Les crédits de la mission Écologie ont plus que doublé depuis 2020, sans que la nécessaire transition écologique soit financée. Le choc d'offre en matière de mobilité demandera des efforts considérables, et nous n'avons rien amorcé.

La charge de la dette est en hausse de 13 milliards d'euros. Lors des assises des finances publiques, vous avez annoncé 10 milliards d'économies, mais la Cour des comptes préconise au moins 60 milliards d'euros de baisse. Il semble qu'on ne soit pas encore sorti du « quoi qu'il en coûte »...

Les collectivités territoriales ont mal vécu les 5,5 milliards d'euros annoncés par le Président de la République à Marseille, qui contrastent avec les quelques millions d'euros annoncés par la Première ministre au titre du nouvel agenda rural.

Annualité et spécialité budgétaires sont mises à mal. La Cour des comptes a certifié les comptes de l'État pour 2022, mais en relevant des anomalies.

Le besoin de financement de l'État s'élève à 280 milliards d'euros en 2022, ce n'est plus soutenable. Le poids de la dette nous plombe et l'effet taux va nous frapper en 2024. Le stock a dépassé 3 000 milliards d'euros, soit 112 % du PIB, ce qui ne semble plus effrayer personne. Ce n'est pas ainsi qu'on prépare l'avenir !

La Cour des comptes veut une réduction de la dépense. Nous ne cessons de vous proposer des pistes, à commencer par une revue des dépenses exigeantes. Pour des raisons de sincérité et de respect de l'autorisation parlementaire et en l'absence de mesure sérieuse de redressement, le groupe Les Républicains ne votera pas les projets de loi de règlement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021

ARTICLE LIMINAIRE

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

(en points de produit intérieur brut  -  PIB)

 

 

Loi de finances initiale 2021

Loi de finances initiale 2021 

Loi de programmation des finances publiques 2018-2022

Loi de programmation des finances publiques 2018-2022 

 

Exécution 2021

Soldes prévus

Écart

Soldes prévus

Écart

Solde structurel (1)

- 4,4

- 3,8

- 0,6

- 1,2

- 3,1

Solde conjoncturel (2)

- 2,0

- 4,5

2,5

0,3

- 2,3

Mesures ponctuelles et temporaires (3)

- 0,1

- 0,2

0,1

0,0

- 0,1

Solde effectif (1 + 2 + 3)

- 6,5

- 8,5

2,1

- 0,9

- 5,6

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Il s'agit d'actualiser l'article liminaire en fonction du chiffre du PIB publié par l'Insee le 31 mai dernier. Le déficit reste inchangé, mais le partage entre solde structurel et solde conjoncturel est modifié.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article liminaire n'est pas adopté.

L'article 1er n'est pas adopté, non plus que les articles 2, 3, 4, et 5.

M. le président.  - Nous en arrivons à l'article 6.

Je vous rappelle que, si cet article n'était pas adopté, il n'y aurait plus lieu de voter sur l'ensemble du projet de loi, dans la mesure où tous les articles qui le composent ont été supprimés.

Or, en application de l'article 59 du Règlement, le scrutin public est de droit sur l'ensemble du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021.

En conséquence, l'article 6 va être mis aux voix par scrutin public.

Voici le résultat du scrutin n°323 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 289
Pour l'adoption   54
Contre 235

L'article 6 n'est pas adopté. En conséquence, le projet de loi n'est pas adopté.

Discussion des articles du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022

ARTICLE LIMINAIRE

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

(en points de produit intérieur brut  -  PIB)

Loi de finances initiale 2022

Loi de finances initiale 2022

Loi de programmation des finances publiques 2018-2022

Loi de programmation des finances publiques 2018-2022

Exécution 2022

Soldes prévus

Écart

Soldes prévus

Écart

Solde structurel (1)

- 3,3

- 4,0

0,7

- 0,8

- 2,5

Solde conjoncturel (2)

- 1,4

- 0,8

- 0,6

0,6

- 1,9

Mesures ponctuelles et temporaires (3)

- 0,1

- 0,2

0,2

0,0

- 0,1

Solde effectif (1 + 2 + 3)

- 4,7

- 5,0

0,3

- 0,3

- 4,5

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Là encore, cet amendement actualise la croissance et les mouvements macroéconomiques constatés par l'Insee le 31 mai 2022.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable.

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

L'article liminaire n'est pas adopté, non plus que les articles 1er, 2 et 3.

ARTICLE 4

M. Marc Laménie .  - Le budget de l'État compte 33 missions et les crédits de paiement s'élèvent à 578 milliards d'euros pour 2022, contre 557 en 2021. Les principaux postes de dépense sont l'enseignement scolaire, avec 78 milliards d'euros, les engagements financiers de l'État - dont la charge de la dette -, avec 54 milliards, et la défense, à 51 milliards. Les collectivités territoriales souffrent d'un manque d'autonomie, même si l'État reste leur premier partenaire. Je m'abstiendrai sur cet article, comme sur l'ensemble du texte.

L'article 4 n'est pas adopté, non plus que les articles 5 et 6.

M. le président.  - Nous en arrivons à l'article 7.

Je vous rappelle que, si cet article n'était pas adopté, il n'y aurait plus lieu de voter sur l'ensemble du projet de loi, dans la mesure où tous les articles qui le composent ont été supprimés.

Or, en application de l'article 59 du Règlement, le scrutin public est de droit sur l'ensemble du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021.

En conséquence, l'article 7 va être mis aux voix par scrutin public.

Voici le résultat du scrutin n°324 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 275
Pour l'adoption   41
Contre 234

L'article 7 n'est pas adopté. En conséquence, le projet de loi n'est pas adopté.

La séance est suspendue quelques instants.

Présidence de Mme Laurence Rossignol, vice-présidente