Plein emploi (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi pour le plein emploi. La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion .  - Notre débat sera l'occasion de tordre le cou à trois idées reçues. La première est que contre le chômage, nous aurions tout essayé. Or non, nous pouvons mieux accompagner. La deuxième : le chômage de masse est une fatalité pour notre pays. Nous constatons qu'il baisse. Enfin, la troisième est que le plein emploi serait une utopie en France : nous pouvons l'atteindre si les bonnes mesures sont prises.

Ce projet de loi plein emploi prouvera que personne n'est inemployable. Il inclura les plus éloignés du marché du travail, touchés par la fatalité du chômage de masse. Enfin, il sera l'occasion de lutter contre les assignations à résidence, dans des logiques de parcours.

Ce texte complète les réformes menées depuis 2017 pour libérer notre potentiel de croissance et faciliter l'accès des jeunes à l'emploi, avec l'apprentissage par exemple. La réforme de l'assurance chômage incitait au retour à l'emploi et la réforme des retraites améliore l'emploi des seniors. Notre taux de chômage est le plus faible depuis quarante ans, et notre taux d'emploi atteint 68 %, un record, particulièrement pour les jeunes et les seniors, grâce notamment aux politiques d'inclusion des personnes en situation de handicap, dont le taux de chômage est passé de 15 à 12 % en un an. Oui, nous visons un taux global de 5 %.

Nous voulons sortir de l'inaction. Les résultats nous réjouissent et nous obligent. Le plein emploi est atteignable, il faut créer 700 000 emplois, qui s'ajouteraient au 1,7 million d'emplois déjà créés par l'économie française. Il ne faut plus seulement baisser le chômage, mais permettre aux plus fragiles de trouver ou retrouver un emploi. Le plein emploi, c'est pour tous et partout. Ensuite, les entreprises ne doivent plus peiner à recruter alors qu'il reste des demandeurs d'emploi. Cela passe par la rénovation du service public de l'emploi et notamment la création de France Travail.

Ce projet part du constat de l'inefficacité de notre service public de l'emploi, lié non à l'engagement des personnes mais à sa complexité et à son atomisation. Les parcours demeurent impersonnels, ce qui est source d'incompréhension. Il faut améliorer l'accompagnement, qui ne répond pas non plus aux besoins des entreprises.

Ce projet est avant tout le fruit d'une méthode de concertation. Thibault Guilluy m'a rendu en avril dernier le rapport de sa mission de concertation et de préfiguration. La concertation est aussi à l'oeuvre pour l'emploi des personnes en situation de handicap, avec la conférence nationale du handicap du 26 avril dernier. Chacune des mesures que je défendrai a été présentée devant les 25 groupes de travail réunis.

Le premier chantier du projet de loi est l'amélioration de la gouvernance du service public de l'emploi. Les acteurs ne se parlent pas assez. Tout d'abord, pour plus de cohérence, nous créons le réseau France Travail, regroupant l'État, les collectivités et les opérateurs. Le projet de loi définit donc un patrimoine commun, des méthodes et référentiels, pour un meilleur partage au sein du réseau. On ne fusionne pas tout en tout, mais nous élaborons des méthodes communes.

La mise en réseau des systèmes d'information sera l'un des moyens. Celui de Pôle emploi évoluera vers la plateforme France Travail. Les collectivités bénéficieront de données agrégées, car sans partage de données, pas de coordination.

Ensuite, la gouvernance sera territorialisée, avec un copilotage État-collectivités. Nous créons ainsi une nouvelle instance de gouvernance nationale, le comité national France Travail, tout en augmentant la visibilité et le pouvoir d'orientation des collectivités : régions, départements, communes gardent leurs prérogatives, sans tutelle de l'État. Le texte ne modifie pas la répartition des compétences.

Pôle emploi prendra en charge de nouvelles missions, dont la coordination des méthodologies. Ce n'est donc pas une recentralisation, mais la mise à disposition de tous d'un soutien opérationnel.

Le changement de nom de Pôle emploi en France Travail ne doit pas être considéré comme une marque de domination, madame la rapporteure - nous modifierons le schéma de présentation. Il s'agit de marquer, d'abord, son changement de positionnement, territorialisé, partenarial et, ensuite, de le rendre plus visible pour les usagers. Nous en débattrons.

Les initiatives locales seront au coeur de ce nouveau service public de l'emploi. Il est hors de question de supprimer ce qui fonctionne : les missions locales continueront de jouer leur rôle central auprès des jeunes en difficulté. L'État continuera à les financer, les collectivités les coordonneront toujours. J'entends les inquiétudes des missions locales : le projet de fusion d'il y a quelques années n'a pas été repris, et c'est heureux. Il est cependant essentiel de mieux coordonner les acteurs.

Le deuxième grand objectif est un meilleur accompagnement des demandeurs d'emploi, notamment des plus fragiles. Ainsi, 16 % des allocataires du revenu de solidarité active (RSA) le sont depuis dix ans. Après sept ans, 42 % des allocataires le sont encore, alors que cette situation précarise et éloigne du travail. Nous voulons étayer la promesse du RSA, en garantissant l'accompagnement de chacun et la reconnaissance d'une nouvelle catégorie d'organismes, souvent associatifs, auprès des « invisibles ».

Le contrat d'engagement doit formaliser le parcours d'accompagnement, détaillant les engagements réciproques de l'organisme et de la personne accompagnée, avec un plan d'action. Nous lèverons les freins liés au logement ou à la garde d'enfants. Les parcours d'insertion sociale et professionnelle seront juxtaposés. Les modifications qu'a apportées votre commission sur les proches aidants sont bienvenues.

Un nouveau premier niveau de sanction, la suspension-remobilisation, sera créé. Il permettra de suspendre temporairement l'allocation au premier manquement sans interrompre l'accompagnement. Si la personne respecte ses engagements, elle bénéficiera d'un versement rétroactif de ses droits. À défaut, le RSA pourrait être supprimé comme c'est le cas aujourd'hui. Nous ne touchons pas à la radiation dans les conditions prévues par la loi de 1988.

Les allocataires du RSA les plus éloignés de l'emploi bénéficieront de 15 à 20 heures hebdomadaires d'ateliers et d'activités pour les aider à revenir à l'emploi. Nous conforterons la contractualisation pluriannuelle entre l'État et les régions sur la formation. Le plein emploi passe par la formation : priorité aux plus fragiles, aux métiers en tension et aux formations à distance.

Le troisième chantier est la poursuite de l'engagement pour l'emploi des personnes en situation de handicap. Nous prolongerons la politique des dernières années autour de l'amélioration de l'orientation professionnelle, tout d'abord. L'orientation est un droit : le service public de l'emploi accompagnera tous ceux qui le souhaitent, avec immersion dans différents environnements, des établissements et services d'aide par le travail (Ésat) aux entreprises ordinaires. Désormais, le demandeur d'emploi en situation de handicap est d'abord un demandeur d'emploi, avec ses capacités et ses volontés. Le pilotage de la politique est confié au ministère du travail jusqu'en 2027, au sein du réseau France Travail.

Ensuite, les personnes reconnues handicapées bénéficiant d'une pension d'invalidité ou d'une rente d'incapacité auront les mêmes droits prévus dans le code du travail que les personnes titulaires d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), sans besoin de passer par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ou de formaliser la demande. Ils pourront bénéficier d'une rémunération majorée, d'une prise en charge de leur mutuelle, de la reconnaissance du droit de grève ou du droit syndical. Leur emploi se rapprochera du reste de la population, sans remettre en cause la protection contre le licenciement.

Enfin, pour accompagner les employeurs, les contrats « tremplin » entreront dans le code du travail. Je proposerai de compléter le passeport numérique pour assurer une traçabilité des aménagements effectués, afin que l'ancien employeur puisse donner sans difficulté sociale ou fiscale au nouvel employeur les aménagements nécessaires à l'emploi d'une personne en situation de handicap qui serait amenée à les quitter.

Ce texte a été enrichi en commission avec la prise en compte des proches aidants, la représentation des usagers, les besoins de recrutement des entreprises, le recrutement de personnes en situation de handicap, le lien avec l'éducation nationale, la pérennisation de l'emploi accompagné et les compétences du comité national France Travail. Sur les points de divergence, j'espère trouver un consensus.

Tout ne relève pas de la loi : les 18 expérimentations départementales sur le RSA seront l'occasion d'échanger. Nous avons signé des protocoles de préfiguration avec cinq régions - un sixième est en cours avec la région Bourgogne-Franche Comté. Nous allons aussi améliorer l'offre de service pour les entreprises.

Je suis convaincu que nous nous doterons des outils nécessaires au plein emploi. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe UC)

M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées .  - J'ai une pensée pour les familles partant en vacances avec leurs enfants, mais aussi pour celles qui ne le pourront pas : je ne m'y résignerai jamais. Nous aiderons autant d'enfants que possible à profiter de ces moments d'épanouissement et de découverte.

Je referme ce qui est plus qu'une parenthèse : il s'agit de l'équilibre entre la vie professionnelle et familiale et de la socialisation des enfants, en résonance avec l'article 10, relatif au service public de la petite enfance, précisé le 1er juin par la Première ministre.

J'ai aussi une pensée particulière pour les familles n'ayant pas de solution d'accueil pour leurs enfants, avec les inquiétudes relatives à la rentrée et à l'accès au marché du travail. Nous y répondons en augmentant les places d'accueil disponibles et en fournissant un accueil de qualité adapté à chaque famille. Le Gouvernement a donc pris le temps, sur dix mois, de la concertation, menée par Élisabeth Laithier, maire adjointe de Nancy et présidente du comité de filière petite enfance, dont l'expérience n'est plus à démontrer.

Nous sommes partis de quatre fondamentaux : les besoins des enfants et des parents, les attentes des professionnels, les attentes du bloc communal, en première ligne, et l'organisation, perfectible, des compétences des acteurs publics. L'enquête « Parents », d'Ipsos, est éclairante : 61 % des parents déclarent du stress lié à l'accueil de leurs enfants, qui est souvent un parcours du combattant. Répondre aux besoins de ces parents en galère est une priorité sociale : il faut soutenir les professionnels, dévoués.

Ainsi, il manque 10 000 professionnels dans les crèches, et 120 000 assistantes maternelles cesseront leur activité d'ici à 2030 - tandis que 40 000 l'ont déjà fait entre 2017 et 2021. Il faut donc restaurer l'attractivité de ces métiers : salaires, sens du travail, qualité de vie, perspectives. L'État sera présent.

La convention d'objectifs et de gestion (COG) avec la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf), que j'ai signée ce matin même après son adoption le 4 juillet par le conseil d'administration de la Cnaf, prévoit ainsi 200 millions d'euros, conditionnée à l'amélioration du socle de droits sociaux.

Au-delà de ce soutien aux professionnels, l'ampleur du défi appelle une action résolue, avec l'ensemble des acteurs et des collectivités locales. C'est une politique partenariale : il était indispensable de créer un espace de coconstruction. On estime que plus de 150 000 personnes, principalement des femmes, sont empêchées de prendre ou reprendre un emploi faute de solution de garde pour leur enfant.

Les communes seront les autorités organisatrices en matière d'accueil du jeune enfant. Ce sont les chefs de file naturels.

Pour exercer leurs responsabilités, les communes pourront compter sur un soutien approfondi. La nouvelle COG prévoit 6 milliards d'euros supplémentaires d'ici la fin du quinquennat pour assurer ce service public de la petite enfance.

Les aides au fonctionnement seront massivement renforcées. De nouveaux soutiens en ingénierie accompagneront les communes qui le souhaitent, avec plus de 100 ETP dédiés.

Nous devons avoir une vision globale de ces enjeux. L'article 10 conforte le rôle central des communes et clarifie leurs relations avec les autres collectivités territoriales et la branche famille de la sécurité sociale.

Nous donnerons une plus grande place aux collectivités territoriales dans le cadre de la formalisation de la stratégie nationale. Nous veillerons aussi au renforcement de la qualité d'accueil du jeune enfant.

Nous devons restaurer l'attractivité du secteur, améliorer l'accueil. Pour prévenir la maltraitance et renforcer le système d'alerte, j'ai confié une mission à la présidente du conseil départemental de Maine-et-Loire, Florence Dabin.

Qualité, quantité, moyens, c'est ainsi que nous répondrons aux défis du service public de la petite enfance : défis du soutien aux parents et aux professionnels, défi du développement de l'enfant avec la réforme de la politique des 1 000 premiers jours, défi de la natalité en mettant fin au parcours du combattant des familles. Le service public de la petite enfance est un levier de confiance, comme le disait la présidente de l'Unaf, Marie-Andrée Blanc, corapporteure de l'avis du Conseil économique, social et environnemental (Cese).

Les évolutions de gouvernance de l'article 10 permettront d'être lus efficaces et de répondre aux attentes des familles. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe UC ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Daniel Chasseing et Mme Véronique Guillotin applaudissent également.) Ce projet de loi, qui vise à réduire le chômage, présente deux objectifs principaux : unifier et renforcer l'accompagnement des personnes dépourvues d'emploi en donnant une portée plus effective à leurs engagements, et améliorer la coordination du service public au travers du réseau France Travail.

Toutefois, sans moyens, ce projet est illusoire. Les financements ne sont pas à la hauteur. La coordination des acteurs et l'uniformisation des pratiques ne sauraient être contraignantes. Les acteurs de terrain doivent préserver leurs prérogatives - je pense aux missions locales.

Lutter contre le chômage suppose d'agir sur de nouveaux leviers. La garde d'enfant n'est pas le seul frein : il y a aussi le logement, la santé, l'éducation ou l'accès à la médecine du travail...

La commission a approuvé la création du réseau France Travail à l'article 4. Nous avons précisé que les acteurs du réseau doivent répondre aux besoins des employeurs, et renforcé les prérogatives des comités de pilotage nationaux et territoriaux. Nous avons renforcé le comité national France Travail, qui définira les besoins pluriannuels de financement.

L'ensemble des référentiels et cahiers des charges devra être défini par ce comité plutôt que par arrêté ministériel.

Localement, nous avons voulu mieux associer les associations d'élus, sans figer dans la loi la composition des instances de gouvernance. Nous avons approuvé le rôle de Pôle emploi dans le nouveau réseau, à condition qu'il respecte les décisions des différentes instances de gouvernance.

La commission n'a pas souhaité que Pôle emploi prenne le nom d'opérateur France Travail. L'opérateur ne saurait avoir le même nom que le réseau : cela serait source de confusion. Le projet de loi ne modifie pas le nom des missions locales ou de Cap emploi. Pourquoi Pôle emploi changerait-il de nom, alors qu'il est désormais bien identifié ? De plus, cela serait une procédure coûteuse.

Pour que toutes les personnes sans emploi bénéficient d'un accompagnement adéquat, la commission a approuvé à l'article 1er le principe de l'inscription automatique de toutes les personnes sans emploi sur la liste des demandeurs d'emploi, y compris les bénéficiaires du RSA.

À l'article 2, la commission a approuvé le contrat d'engagement, mais l'a complété par une précision sur le nombre d'heures d'activité exigées.

La commission a validé la suspension-remobilisation à l'article 3.

En revanche, elle a limité les sommes pouvant être versées rétroactivement à trois mois de RSA, et souhaité que le président du conseil départemental reste décisionnaire en matière de suspension du RSA.

L'article 7 donne compétence à l'État pour organiser des marchés nationaux en matière de formations ouvertes et à distance (Foad) et les pactes régionaux d'investissement dans les compétences (Pric) devront mieux prendre en compte les besoins des entreprises et des secteurs en tension.

La commission n'a pas souhaité conserver la possibilité de marchés nationaux pour la formation ouverte et à distance : l'offre de formation des demandeurs d'emploi proposée par l'État doit prendre en compte les besoins identifiés par les acteurs régionaux par le biais des comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop).

L'article 8 permettra de faciliter les démarches des personnes en situation de handicap en étendant à toutes les catégories de demandeurs d'emploi les droits associés à la RQTH. Nous avons rétabli la prise en compte de la lourdeur du handicap pour moduler la contribution de l'employeur à l'Association nationale de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph).

L'article 9 fait évoluer les droits des travailleurs en Ésat dans le sens d'une convergence avec les droits des salariés. La commission salue cette mesure d'équité, mais s'inquiète de la capacité des Ésat à prendre en charge ces nouveaux droits. Il faut un soutien de l'État.

Les communes assurent déjà la compétence relative à la petite enfance. Il faut des compensations financières. Nous avons en revanche supprimé à l'article 10 la création d'une stratégie nationale d'accueil du jeune enfant, inutile : le Gouvernement peut déjà agir sans elle.

Nous avons supprimé la possibilité donnée au préfet de se substituer à la commune en cas de manquement. Faisons confiance aux maires. La commission a modifié le texte pour le rendre plus effectif et mieux adapté aux besoins locaux. Je vous invite à l'adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC et INDEP)

Exception d'irrecevabilité

M. le président.  - Motion n°457 rectifiée, présentée par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi pour le plein emploi (n° 802, 2022-2023).

Mme Éliane Assassi .  - Ce projet de loi, débattu dans la précipitation, poursuit un premier objectif : renforcer les sanctions à l'égard des chômeurs. Ce n'est pas vraiment l'apaisement prétendument recherché par le Président de la République. Le Gouvernement fait comme si la flambée de violence suivant la mort d'un jeune de 17 ans n'avait jamais eu lieu.

Les propositions sont indécentes. La réponse politique devrait être une réponse égalitaire. Comment voulez-vous que la jeunesse retrouve confiance dans ses représentants avec un tel texte ? Il faut des dispositions pour réduire le chômage et limiter l'ubérisation du travail, en particulier dans les territoires ultramarins et dans les quartiers. Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), le taux de chômage atteint 18 %, contre 7 % en moyenne nationale.

Les jeunes de moins de 30 ans subissent un taux de chômage de 30 %, et lorsqu'ils ont un emploi, il est souvent précaire. En quoi votre projet de « plein emploi » répond-il à cette situation ?

La charge de travail des conseillers de Pôle emploi s'est accrue. Le nombre de demandeurs d'emploi à suivre par conseiller en Seine-Saint-Denis a doublé, passant de 250 à 500, tandis que le nombre de professionnels suivant les allocataires du RSA a été divisé par trois. Désormais, un professionnel doit suivre 100 allocataires.

Les discriminations à l'embauche perdurent. Plutôt que de déclarer, comme l'ancien président du Medef, que le premier employeur de Seine-Saint-Denis est le trafic de drogue, on ferait mieux d'agir pour dépasser les stéréotypes.

La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) dispose que la loi doit être la même pour tous. Ce projet de loi comporte des dispositions non conformes à la Constitution. Le contrat d'engagement est contraire à l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Le texte prévoit l'obligation d'assiduité à des activités sociales ou professionnelles et la suspension voire la suppression du versement du RSA. On remet en cause le filet de sécurité et les droits sociaux.

Il est grand temps de rétablir le préambule de 1946 dans sa plénitude. Selon l'économiste Lucas Chancel, la politique du Gouvernement s'inscrit dans la lignée de la culpabilisation des pauvres. La recherche constante d'économies sur le dos des plus précaires est d'autant plus inacceptable que les plus riches sont épargnés. C'est une étincelle pour la reprise de la violence sociale, après les retraites et les émeutes.

Premièrement, les sanctions envisagées par le Gouvernement n'ont que faire de l'étude d'impact selon laquelle on doit tenir compte de l'exigence constitutionnelle : le RSA est le dernier filet de sécurité.

Deuxièmement, la conditionnalité de la signature des collectivités territoriales pour la charte d'engagement de France Travail est également contraire à la Constitution. La commission ne s'y est d'ailleurs pas trompée : elle a supprimé cette disposition. Mais le Gouvernement souhaite la réintroduire par voie d'amendement.

Nous craignons que cette conditionnalité revienne dans la navette.

Troisièmement, le texte refuse d'accorder le statut de salarié aux personnes en situation de handicap, méconnaissant l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Certes, le Gouvernement argue qu'il apporte des progrès aux personnes en situation de handicap, puisque ces derniers pourront bénéficier de nouveaux droits : droit d'adhérer à un syndicat, droit de grève, complémentaire santé. Il s'agit de droits minima. Ils sont toujours considérés comme des travailleurs handicapés, avant d'être des travailleurs. Rien ne justifie cette rupture d'égalité.

Ce projet de loi est enfin un recul pour le service public de l'emploi. Le passage de France Travail au tout numérique aggraverait l'éloignement de l'emploi. Nous craignons que ce texte ne renforce les inégalités. J'appelle l'ensemble du Sénat à voter cette motion et à rejeter ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Nous émettrons bien sûr un avis défavorable. Les doutes présentés par le groupe CRCE sur la conformité à la Constitution nous semblent artificiels. Les droits et devoirs existent depuis la création des minima sociaux : telle est la philosophie du revenu minimum d'insertion (RMI) puis du RSA. La concrétisation de cette notion d'engagement a été souvent plus formelle que réelle : nous sommes conscients que l'accompagnement social doit être meilleur, d'où nos questionnements sur le financement. Pour nous, le travail, c'est l'émancipation, l'insertion dans la vie sociale. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Par définition, avis défavorable du Gouvernement à cette motion. Il n'y a aucun doute sur la constitutionnalité. Aucune des dispositions du texte ne remet en cause les compétences des collectivités territoriales. Au contraire, la coprésidence leur offre plus de possibilités.

Le texte ne conditionne pas le versement du RSA à des heures d'activité. En revanche, nous prévoyons la signature obligatoire d'un contrat d'engagement, conformément à la philosophie de la loi de 1988. C'est le non-respect du contrat qui entraîne une possibilité de sanction.

Enfin, vous avez évoqué le risque de stigmatisation. C'est tout l'inverse. Nous ne sommes quittes de notre devoir de solidarité que lorsque nous avons aidé à retrouver le chemin vers l'emploi, et non lorsque nous nous sommes contentés de verser 534 euros à un individu. Les crédits consacrés à l'insertion ont effectivement baissé : selon la loi de 1988, 20 % des crédits devaient être consacrés à l'accompagnement - l'histoire montre que cela n'est pas le cas. Depuis 2004, aucune des majorités qui se sont succédé n'a tenu ses engagements en la matière. Une part des financements en direction de France Travail doivent bénéficier aux départements.

À la demande du groupe Les Républicains, la motion 457 rectifiée est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°326 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 279
Pour l'adoption   27
Contre 252

La motion n°457 rectifiée n'est pas adoptée.

Question préalable

M. le président.  - Motion n°1, présentée par Mme Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi pour le plein emploi (n° 802, 2022-2023).

Mme Raymonde Poncet Monge .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mmes Esther Benbassa et Émilienne Poumirol applaudissent également.) Nous y voilà : le troisième acte du plan Objectif plein emploi - après la réforme de l'assurance chômage et la réforme des retraites - vers la précarisation généralisée. Aucun état des lieux sur la fusion ANPE-Unédic, aucune interrogation sur l'état du travail en France... Après quarante ans de lois ciblées sur l'emploi, reste un point aveugle : le travail.

Comme pour la réforme des retraites, le Gouvernement parle d'emploi, mais maltraite le monde du travail et élude des questions primordiales : exposition aux risques chimiques et physiques, intensité du travail, autonomie.

Les indicateurs sont désastreux. Ainsi, 34 % des travailleurs français souffrent de postures douloureuses, contre 22 % en Allemagne ; 49 % souffrent d'anxiété, contre 30 % en Europe ; 49 % estiment être correctement payés, contre 58 % en Europe et deux tiers des Allemands ; 39 % considèrent que leur santé est en danger - six points de plus que pour l'ensemble des Européens.

Depuis quarante ans, les conditions de travail se dégradent : en 2016, un tiers des salariés étaient exposés à au moins trois contraintes physiques, soit trois fois plus qu'en 1984. Troubles psychologiques et épuisement entraînent 20 % des arrêts.

Malgré ces alertes, le Gouvernement ne se préoccupe que des postes vacants, sans s'interroger sur leur attractivité. Cette politique réduit les capacités de négociation des travailleurs et promeut la société du précariat. Certes, les sanctions améliorent le retour à l'emploi, mais à quel prix ! Une méta-analyse de Cambridge pointe les externalités négatives : augmentation du non-recours, de la maltraitance, précarité des demandeurs d'emploi... Avec vingt ans de retard, le Gouvernement copie les lois Hartz en Allemagne.

Le bilan de ces politiques agressives d'activation des chômeurs est éloquent : 2,5 millions d'emplois ont été créés en Allemagne, mais surtout des emplois à temps partiel, des contrats courts ou intérimaires. Résultat : une augmentation du taux de pauvreté global.

L'appariement entre l'emploi et les chômeurs a été amélioré, mais au détriment des travailleurs. Emplois dégradés, peu productifs : des générations entières sont enfermées dans la précarité. Telle est la politique du Gouvernement, car les 6 % d'emplois vacants en France ne sont pas attractifs. Les employeurs le reconnaissent : pour 75 % des postes, les conditions de travail sont décourageantes, ce que confirme la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques).

Le Gouvernement feint de découvrir que l'accompagnement est insuffisant, quand des conseillers accompagnent jusqu'à mille personnes ! Le simple fait d'évoquer des ratios accompagnant-accompagnés est frappé d'irrecevabilité.

Si 60 % des allocataires du RSA ne sont pas inscrits à Pôle emploi, c'est souvent qu'ils sont prisonniers de la précarité. Multiplier les réformes antisociales, considérer les travailleurs comme des bouche-trous est une rupture avec notre modèle républicain de protection sociale. Les humains seront transformés en animal laborans, selon la formule d'Hannah Arendt, prisonniers de métiers pénibles.

Les travailleurs se questionnent sur le sens du travail. L'urgence est à la société du soin, à la solidarité. Contre la société du plein emploi des bullshit jobs, nous défendons le plein emploi solidaire.

Nous plaidons pour un revenu minimum garanti, car la pauvreté est la première trappe à l'emploi : c'est le revenu qui insère. La pauvreté structurelle convoque la responsabilité de toute la société. L'emploi durable, c'est d'abord miser sur l'accompagnement des entreprises en difficulté, mais aussi des personnes qui doivent être aidées.

Encore une fois, vous renvoyez à plus tard le débat sur le travail, sur la crise d'attractivité de l'emploi. Les questions de fond sont escamotées. Le GEST vous propose d'inverser les priorités : votez notre motion. (Applaudissements à gauche)

M. Xavier Iacovelli.  - Cette motion dénonce la politique sociale du Gouvernement et sa politique du plein emploi. Or, comment protéger notre modèle social, si ce n'est par le travail ? Quelque 337 000 emplois ont été créés en 2022 (Mme Éliane Assassi et M. Pascal Savoldelli protestent), soit 5 milliards d'euros de recettes pour la sécurité sociale. On ne crée pas un système social redistributif par la décroissance.

Le travail est facteur d'égalité sociale et d'apaisement. Notre modèle est fragilisé par la montée des individualités et la peur de l'autre. Le ferment de division réside dans la croyance que certains travaillent pour les autres, et que d'autres sont exclus du travail. (Mme Éliane Assassi proteste.) Nous assumons de remettre le travail au centre du jeu, alors que 18 % des allocataires du RSA ne bénéficient pas d'accompagnement et que 16 % d'entre eux perçoivent toujours l'allocation dix ans après leur première inscription. Il faut agir : le maintien au RSA ne peut être une solution pérenne, la société n'est pas quitte lorsqu'elle donne 600 euros à des allocataires.

Ce texte promeut aussi un meilleur accompagnement des travailleurs en situation de handicap.

Enfin, ce n'est pas un texte de recentralisation. L'article 10 confie à la commune la qualité d'autorité organisatrice de la politique d'accueil du jeune enfant. Nous voulons lutter contre les inégalités de naissance et de destin : c'est pourquoi nous voterons contre la motion. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable, car nous souscrivons à l'objectif du projet de loi. Certes, le taux de chômage est bas, mais certains sont durablement éloignés de l'emploi. Il faut agir.

Ma chère collègue, à vous écouter, si j'avais 18 ans, je me dis que je ne travaillerais pas, tant les conditions que vous décrivez sont horribles !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Écoutez les chiffres !

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - J'ai du mal à vous suivre : est-ce mieux ou moins bien en Allemagne ? Au Danemark, pays du bonheur, le niveau des risques psychosociaux est le même que le nôtre.

Les entreprises s'améliorent. Il n'y a pas que le CAC 40 ! Je rencontre des PME qui font beaucoup d'efforts, car elles sont attachées à leur personnel : elles ne veulent pas les voir partir, et surtout pas en mauvaise santé. Nous devons améliorer ce texte, mais nous rejetons la motion.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

Non, l'emploi ne s'est pas précarisé depuis 2017. En 2022, les CDI représentent 52 % des nouveaux contrats d'un an et plus, contre 43 à 47 % entre 2010 et 2019, bien loin d'une prétendue précarisation. Et nous allons continuer à agir, car nous ne partageons pas votre fatalisme.

À la demande du groupe Les Républicains, la motion 1 est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°327 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 279
Pour l'adoption   27
Contre 252

La motion n°1 n'est pas adoptée.

Discussion générale (Suite)

M. Olivier Henno .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Je salue le travail de la commission des affaires sociales, de sa présidente et de son rapporteur. J'ai une pensée pour Mme Deroche, dont c'est le dernier texte : elle aura été une grande présidente de commission. (Murmures approbateurs à droite)

Notre pays a besoin d'apaisement, de calme et de confiance. Le groupe UC et la majorité sénatoriale ne seront jamais aux côtés de ceux qui défendent la verticalité : nous prônons une gestion paritaire, au plus près du terrain, avec les élus. Voilà notre cap.

Nous saluons le travail remarquable des missions locales et des maisons de l'emploi, et resterons vigilants sur ce point.

Ce texte tend à rénover la gouvernance du service public de l'emploi et de l'insertion, car le suivi des bénéficiaires est insuffisant. Le défi du plein emploi est avant tout un problème d'adaptation et d'incitation au travail, qui doit aussi mieux payer.

Certes, l'accompagnement est inégal : 60 % d'allocataires du RSA ne bénéficient pas de contrat d'accompagnement et seuls 40 % sont inscrits à Pôle emploi - c'est inacceptable. Mais les conseils départementaux font ce qu'ils peuvent, avec les moyens dont ils disposent.

Les opportunités sont nombreuses. Les trois branches de la formation - initiale, continue, VAE - aideront à mieux articuler les parcours avec les besoins du marché de l'emploi.

La garde d'enfants est l'un des principaux freins à l'emploi. Une offre de garde formelle importante doit être proposée aux parents ; or elle a décru entre 2014 et 2020, et la pénurie de professionnels inquiète.

L'article 4 prévoit la création du réseau France Travail. Le groupe UC souhaite préserver la dénomination de Pôle emploi. Le renommer France Travail créerait une confusion, voire une hiérarchisation non souhaitable.

Pôle emploi doit répondre aux besoins des employeurs. Je proposerai que le comité national évalue les besoins de financement dans une logique pluriannuelle.

Chaque acteur doit conserver ses prérogatives : pas question de recentralisation. Les moyens doivent suivre, mais sur ce point, le texte est muet.

Nous saluons l'amendement visant à ce que les critères d'orientation du demandeur d'emploi vers l'organisme compétent soient définis par le comité national France Travail plutôt que par arrêté ministériel. Nous saluons aussi la suppression de la charte d'engagements, car les collectivités territoriales disposent de compétences propres en matière d'emploi et d'insertion.

Ce texte prévoit que les bénéficiaires du RSA s'engagent dans une durée hebdomadaire d'activité. Hélas, les dispositions de l'article 2 ne sont guère solides. Le président du conseil départemental doit rester seul décisionnaire - je salue l'amendement de Mme Gruny à ce sujet.

Sur l'article 10 et la petite enfance, il est contradictoire de confier davantage de compétences aux collectivités tout en prévoyant une stratégie nationale définie par arrêté. Nous réfutons l'idée que le préfet puisse se substituer aux communes, qui se verraient imposer un contrôle renforcé ; quand elles ont les moyens financiers de leur action, il faut savoir leur faire confiance.

Sous ces réserves, le groupe UC votera le texte, même si la question des moyens demeure. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Mme Véronique Guillotin .  - Lors du débat sur la difficile réforme des retraites, on a parfois parlé du travail de manière philosophique, entre droit à la paresse et travail émancipateur, porteur d'avenir et de progrès - ce que je pense.

Les 370 000 emplois vacants et les 6 millions de chômeurs ne nous dispensent pas d'un véritable débat sur le travail, sur les besoins des recruteurs comme sur les aspirations des jeunes. En attendant, ce texte a pour objet de faire converger offre et demande, avec le plein emploi en ligne de mire. Le réseau France Travail fédérera État, collectivités et opérateurs. Les comités France Travail coordonneront les acteurs, sans remettre leurs compétences en cause : c'est heureux.

Veillons à éviter une forme de recentralisation, au détriment de la connaissance du terrain qu'ont les collectivités territoriales. Nous saluons les modifications de la commission, sans nous crisper sur les questions de dénomination.

Chacun sera accompagné par l'organisme le plus adapté. Un contrat engagera le demandeur d'emploi et l'organisme, avec suspension du RSA en cas de non-respect : je salue la régularisation rétroactive.

Je souscris à une définition large des activités hebdomadaires accompagnées. L'objectif minimum de 14 heures, fixé par la commission, est inopportun. Il faut un cadre juste et contraignant pour ceux qui pourraient mais ne font pas, mais adapté pour ceux qui voudraient mais ne peuvent pas. Certains bénéficiaires du RSA sont sans-abri : parfois, la marche est très haute.

Je souhaite conforter le rôle des régions dans la formation professionnelle. Concernant les travailleurs handicapés, le texte va dans le bon sens, avec la convergence des Ésat vers le droit commun.

La garde d'enfants est l'un des principaux freins du retour à l'emploi. Nous sommes favorables à ce que les communes soient autorités organisatrices, sous réserve de l'accompagnement auquel s'est engagé le ministre. La qualité de l'accueil et la revalorisation des métiers en sont indissociables : il manque 10 000 postes en crèche.

Cette réforme est importante. Nous voterons pour ce texte, en restant vigilants sur sa mise en oeuvre. (Mme Nassimah Dindar applaudit.)

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pour atteindre l'objectif du plein emploi, le texte mise sur une meilleure coordination du service public de l'emploi et sur un meilleur accompagnement des plus éloignés du monde du travail, bénéficiaires du RSA et personnes en situation de handicap.

En effet, il faut un accompagnement sur mesure. Je regrette toutefois un projet initial trop centralisateur, et remercie la rapporteure de ses amendements, qui répondent aux inquiétudes des élus territoriaux.

Le titre III porte sur l'emploi des personnes en situation de handicap, dont le taux de chômage atteint 14 %, contre 7,3 % en moyenne. Les avancées étaient attendues : amélioration des droits sociaux en milieu protégé, extension de la qualité de travailleur handicapé à toute personne relevant de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH), y compris aux 18-25 ans et aux étudiants hors RQTH. Je salue aussi la modulation des contributions des employeurs à l'Agefiph selon la lourdeur du handicap.

L'emploi accompagné demeure piloté par l'État et s'étend hors du secteur médico-social, avec le CDD tremplin et la pérennisation des Ésat. Les droits des personnes en Ésat sont alignés sur ceux du code du travail - complémentaire santé, chèques vacances, tickets restaurant, frais de mobilité, reconnaissance de droits syndicaux... Nous soutenons ces mesures, mais leur traduction dans la loi devance la fin des travaux sur les Ésat et aucun soutien financier n'est prévu dans le texte.

Enfin, reste une anomalie pour les titulaires de l'AAH-2 travaillant plus de 17 h 30 par semaine : ils perdent toute leur allocation, sans dégressivité. Idem pour la prime d'invalidité. J'en appelle au Gouvernement pour mettre fin à cette incohérence. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. Daniel Chasseing .  - En six ans, le taux de chômage est passé de 9,4 % à 7,1 %, mais la bataille du plein emploi n'est pas gagnée. Le travail est une valeur fondamentale de toute société, source d'épanouissement, de valorisation et d'insertion.

Ce projet de loi ne stigmatise pas les bénéficiaires du RSA mais les accompagne et les valorise. Seuls 40 % des allocataires du RSA sont inscrits à Pôle emploi : il faut donc aller chercher les 60 % restants.

L'inscription ne suffira pas. Il faut un accompagnement, et donc des moyens, monsieur le ministre, car les conseils départementaux ne pourront augmenter leur budget. Notre amendement ouvrant le cumul pour neuf mois du RSA et d'un salaire, issu de la proposition de loi Malhuret, est une bonne réponse. Les difficultés liées au logement ou à la garde d'enfants seront prises en compte.

Nous regrettons que le texte ne précise pas le type d'activité hebdomadaire envisagée : cela dissiperait l'idée d'un travail gratuit. J'ai déposé un amendement en ce sens.

Plus largement, réorganiser les acteurs en un grand réseau fera gagner en efficacité. L'amendement de la commission précisant la mission d'appui aux entreprises en matière de recrutement est bienvenu, tout comme la prise en compte du marché du travail.

Les missions locales redoutent une remise en cause de leur expertise. J'ai déposé des amendements pour assurer leur pérennité.

Ce projet de loi concerne aussi les personnes en situation de handicap et leur insertion professionnelle en milieu ordinaire. Il étend les droits des salariés des Ésat et assouplit le travail temporaire. Mes amendements ont pour objet d'aller plus loin.

Enfin, l'article 10 traite de la garde d'enfants, qui est un frein à l'emploi. Les nouvelles compétences des communes devront être compensées à hauteur des engagements pris.

Ce texte va dans le bon sens, si les moyens de l'accompagnement suivent. Nous y veillerons, notamment lors du projet de loi de finances. Les Indépendants soutiennent l'esprit du projet de loi.

Mme Raymonde Poncet Monge .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; MmeEsther Benbassa, Émilienne Poumirol et Laurence Cohen applaudissent également.) À peine les expérimentations démarrent-elles que le Gouvernement présente un projet de réforme France Travail, qui, comme le texte sur les retraites, escamote la question du travail. France Emploi aura pour seule finalité un taux de chômage à 5 % et la baisse des allocations. La boucle se referme.

Laurent Wauquiez proposait le même scénario, sous Nicolas Sarkozy : réforme de l'assurance chômage, plan pour l'emploi des seniors, fusion de l'ANPE (Agence nationale pour l'emploi) et de l'Unédic. Il s'agissait de constituer le service public de l'emploi le plus performant d'Europe... Résultat : 17 suicides d'origine professionnelle ; 56 000 agents seulement en 2022 - la moitié de l'Allemagne ; des portefeuilles surdimensionnés.

La mission flash de l'Assemblée nationale sur Pôle emploi souligne la pénurie d'effectifs, à l'exception des agents chargés des contrôles, passés de 200 à 1 000 - cela en dit long sur les priorités... Ce sont celles de ce projet de loi, qui accroît les pouvoirs de sanction.

Le texte part d'un diagnostic erroné : certes 60 % des allocataires du RSA ne sont pas inscrits à Pôle emploi, mais 40 % d'entre eux ont des problèmes de santé, et un sur quatre a des difficultés de logement. La première étape est nécessairement une inclusion sociale, rendue difficile par le décrochage du montant du RSA par rapport au seuil de pauvreté.

Lever les freins à l'emploi suppose des politiques sociales, non des sanctions qui ne feront qu'augmenter le non-recours. Madame la rapporteure, vous ignorez les études et statistiques qui étayent nos arguments et préparez une amplification de la précarisation. Le risque d'une mise sous tutelle des missions locales, placées en concurrence avec Pôle emploi, s'aggrave via le contrat d'engagement jeune (CEJ).

Sans syndicat dans les comités locaux, la gouvernance écrasera les discours alternatifs et dépossédera les collectivités de leurs compétences. Derrière les référentiels communs se profilent l'uniformisation de l'accompagnement et le retour à l?emploi coûte que coûte, ignorant les activités de survie des allocataires du RSA : car cela représente un « boulot de dingue » d'en vivre, bien plus que cela ne coûte « un pognon de dingue », pour détourner une expression présidentielle. (M. Gérard Longuet s'exclame.)

À l'heure des urgences sociales et climatiques, il faut un plein emploi solidaire. Le GEST votera contre le texte. (Applaudissements à gauche)

M. Xavier Iacovelli .  - S'il y a bien un combat mené et remporté par le Président de la République, c'est celui du travail, avec 1,7 million d'emplois créés depuis 2017. Ma génération avait appris à vivre avec un chômage systémique, mais la courbe s'est inversée, avec un chômage passé de 9,5 à 7,1 % et 52 % des créations d'emplois en CDI. Le chômage de masse n'est plus une fatalité.

La dynamique économique entraîne cependant une tension sur le vivier de talents, dont souffrent deux tiers des PME ; 60 % des entreprises industrielles renoncent à des opportunités de croissance, faute de pouvoir recruter.

Personne n'est inemployable. L'objectif d'atteindre le plein emploi - soit un chômage à 5 % - à la fin du quinquennat est exigeant, mais pas impossible : il faudra créer 700 000 emplois en quatre ans.

Le Gouvernement travaille sur trois axes. En premier lieu, les besoins des entreprises, grâce aux plans d'investissement pour les compétences avec les régions. Ensuite, les règles du marché du travail : les réformes de 2019 et 2022 portent déjà leurs résultats, mais il faut aller plus loin. Enfin, l'accompagnement : non pas en changeant ce qui fonctionne, comme les missions locales, mais en restructurant le service public de l'emploi. France Travail offrira son soutien technique, sans recentralisation, grâce à une gouvernance partagée avec les territoires et les opérateurs. Ce projet de loi s'inscrit dans la continuité de la réforme de l'assurance chômage, devant laquelle tant de majorités ont reculé, comme devant celles des retraites et de la formation.

Aujourd'hui, ceux qui ont le plus besoin d'accompagnement sont trop peu suivis et font face à une multiplicité d'acteurs. C'est le cas des allocataires du RSA, dont 40 % seulement sont inscrits à Pôle emploi.

Je salue les mesures d'équité en faveur des travailleurs en situation de handicap, notamment ceux en Ésat, dont 80 % n'ont pas de mutuelle à ce jour. L'État doit prendre en charge ces nouvelles dépenses. Le droit au retour, c'est faciliter le passage de l'Ésat à l'entreprise adaptée ou au milieu ordinaire, mais aussi le retour en cas d'échec.

Enfin, le texte aborde la garde d'enfants, principal frein à l'accès à l'emploi, en particulier pour les femmes. Nous connaissons l'engagement des municipalités, qu'il faut conforter. La réforme du service public de la petite enfance va dans ce sens : il s'agit d'ouvrir 100 000 places d'accueil d'ici 2027, 200 000 d'ici 2030. L'État est aux côtés des communes, en mobilisant 7 milliards d'euros sur cinq ans. Ce sera la fin du parcours du combattant pour les familles, un levier pour la natalité et pour l'emploi.

Le plein emploi, c'est donner à plus de Français un travail, mais aussi lutter contre les assignations sociales. Si l'examen en commission a révélé des désaccords, le RDPI votera ce texte.

Mme Émilienne Poumirol .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.) Quelle année éprouvante pour nos droits sociaux ! Après une réforme régressive de l'assurance chômage et une réforme brutale des retraites, voici une nouvelle casse sociale : le plein emploi au prix de la précarisation et de la paupérisation. Ce texte porte une vision adéquationniste de l'emploi : d'un côté, ceux qui ne travaillent pas, de l'autre, les entreprises qui peinent à recruter, qu'il suffirait de mettre en relation, en sanctionnant les travailleurs. Cette idée simpliste aura des conséquences dramatiques.

Vous éloignez le RSA, qui est un droit social, de la logique de subsistance et de sortie de la pauvreté qui était celle du RMI. L'accroissement du conditionnement et des sanctions supplante l'accompagnement, alors que le quotidien des allocataires est la survie.

Vous recentralisez le service public de l'emploi.

Enfin, les moyens de l'accompagnement ne sont pas au rendez-vous : les annonces sont bien en deçà des besoins. À l'oeuvre, le dogme néolibéral de la réduction des déficits par celle de la dépense et la multiplication des exonérations, sans jamais envisager de nouvelles recettes...

Il y a enfin de grands absents dans votre texte, monsieur le ministre : vous prônez la valeur travail, mais quelle valeur accordez-vous au travail ? Où traitez-vous des conditions de travail et de sa juste rémunération ?

Le plein emploi, quoi qu'il en coûte, mais lequel ? Le temps partiel, les contrats courts ? La qualité du travail est absente, de même que la question de la pauvreté ou celle du non-recours. Rien non plus sur le reste à vivre. Le texte ne traite pas des leviers pour lever les freins à la reprise de l'emploi, à l'exception de la garde d'enfants, je le reconnais.

Nous défendrons des propositions pour un accompagnement juste et efficace et voterons contre ce texte. (Applaudissements à gauche)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Après la réforme de l'assurance chômage, après celle des retraites qui vole deux ans aux salariés, après celle des lycées professionnels, voici un projet de loi pour le plein emploi qui vise non pas à éradiquer le chômage, mais à atteindre un taux de chômage de 5 %. Le titre est alléchant et nous y souscrivons, mais votre projet de loi est en réalité bien éloigné de cette vision. Il s'agit en réalité de répondre aux pénuries de main-d'oeuvre. Or il ne suffit pas de traverser la rue pour trouver un emploi...

Le rapport 2022 de France stratégie le montre : l'inadéquation entre la situation des chômeurs et les offres d'emploi est à mettre en lien avec des conditions de travail difficiles et des salaires dégradés. Plutôt qu'un plein emploi précaire et sous-qualifié, nous avons besoin d'un bon emploi, choisi, dans des conditions acceptables.

Le ministre du travail a annoncé son intention de faire payer la création de France Travail aux assurés de l'Unédic. En durcissant les conditions de maintien du RSA, le Gouvernement choisit de ne pas s'attaquer à la question du non-recours, qui atteint pourtant 30 %. Avec la majorité sénatoriale, le Gouvernement joue la surenchère, répondant aux propos d'Éric Ciotti du 22 juin dernier. La commission a limité le versement rétroactif du RSA à trois mensualités.

Les mesures en faveur du handicap sont bienvenues, mais insuffisantes.

Idem pour la petite enfance. Donnez aux communes les moyens d'assumer cette mission !

M. Xavier Iacovelli.  - C'est ce que l'on fait !

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Sur les 30 000 places de crèches promises par le Président de la République, seules 8 927 ont été créées.

Nous défendons un projet de sécurisation de l'emploi et de la formation pour éradiquer le chômage et la précarité en mettant à contribution le capital. Former, créer des emplois de qualité, conditionner les aides publiques, créer des instances locales et nationales : autant de pistes à explorer pour assurer à chacun une formation ou un emploi sans passer par la case chômage. Certes, il faut tenir compte des besoins des entreprises, mais n'oublions pas ceux des chômeurs ! Face aux mesures cosmétiques sur le handicap, nous prônons un véritable accompagnement, y compris des aidants. Ce projet est à l'opposé du nôtre. Nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

Mme Martine Berthet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce texte a une ambition majeure : réorganiser le service public de l'emploi à tous les échelons et améliorer l'accueil et l'accompagnement des personnes éloignées de l'emploi. L'enjeu est de taille, avec trois millions de chômeurs et 13 % de notre jeunesse qui n'est ni en formation ni en emploi.

J'insiste sur l'amélioration du service public de l'emploi pour nos entreprises, en liaison avec les conclusions du rapport Former pour aujourd'hui et pour demain : les compétences, enjeu de croissance et de société, que j'ai cosigné avec Michel Canévet et Florence Blatrix Contat.

En 2022, les tensions de recrutement ont atteint de nouveaux sommets : deux entreprises sur trois y sont confrontées. Le taux de vacance est plus élevé qu'ailleurs en Europe, alors que le taux de chômage est plus élevé. La loi confie à Pôle emploi la mission d'accompagner les entreprises, mais, sauf quelques exceptions localement, la majorité d'entre elles juge cet accompagnement insuffisant... Je suis heureuse qu'un amendement de la commission renforce cette mission. Je remercie au passage la rapporteure et la présidente de la commission. Nous proposons d'aller plus loin en instaurant un guichet PME dans chaque territoire au sein du réseau France Travail, à l'instar de ce qui existe pour la team France Export.

Quelque 120 métiers sont aujourd'hui en tension, contre 50 en 2015. Si le Gouvernement a déjà constitué des viviers, il faut passer à l'échelle supérieure. Nous proposons d'inclure systématiquement dans l'accompagnement des demandeurs d'emploi une sensibilisation aux métiers en tension.

Par ailleurs, nous soutenons l'amendement de la rapporteure visant à mieux associer les acteurs locaux aux travaux du réseau France Travail : ils sont agiles et comblent avantageusement les lacunes de l'approche de masse de Pôle emploi.

La commission a également introduit une plus grande coopération entre services publics de l'emploi et de l'éducation. Le dialogue entre école et entreprise, entre système éducatif et service public de l'emploi est fondamental. Nous proposons un suivi renforcé des jeunes diplômés de lycées professionnels par Pôle emploi. Il faut mieux prévenir le décrochage.

Enfin, prenons garde à ne pas ponctionner les ressources dédiées à la formation professionnelle au profit de la formation des demandeurs d'emploi, notamment sur les plans d'investissements dans les compétences (PIC). Nous proposerons un amendement plafonnant les prélèvements sur les ressources de France Compétences au profit du PIC. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Annick Billon applaudit également.)

Mme Corinne Féret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.) Si nous partageons l'ambition du plein emploi, nous n'en avons pas la même vision. Celle du Gouvernement est trop brutale et stigmatisante. En 1988, le RMI, adopté à l'unanimité et devenu entre-temps le RSA, était conçu comme un moyen de survie, en même temps que d'insertion sociale.

Aujourd'hui, on assiste à un changement de logique : ce n'est plus la société qui a des devoirs envers les exclus, ce sont eux. Rien dans ce texte ne lutte contre le non-recours. Injuste et violent, ce texte est aussi flou, car il renvoie à des décrets dont on ne sait rien. Où sont les milliards promis en faveur de l'emploi durable ?

C'est aussi un texte recentralisateur. Demain, le conseil régional sera réduit à un rôle d'opérateur de l'État, ce qui est inacceptable. Alors que notre assemblée a fait quinze propositions pour la décentralisation, les collectivités et les élus attendent des transferts de compétences effectifs.

Nous nous inquiétons également pour notre jeunesse. Les jeunes accompagnés par les missions locales ne répondent pas forcément à la définition du demandeur d'emploi. Nous veillerons à préserver ce service public global et territorialisé de l'insertion des jeunes.

Nous sommes opposés à ce texte qui prétend remettre chacun au travail à marche forcée. Nous n'acceptons pas les petites phrases : non, il ne suffit pas de traverser la rue ou de faire le tour du Vieux-Port pour trouver un emploi. Le travail est un vecteur d'émancipation et d'intégration s'il est librement choisi et s'exerce dans des conditions décentes. Le service public de l'emploi doit organiser un droit à l'emploi et de qualité pour tous.

Le Gouvernement nous avait promis une loi en faveur de la petite enfance. Or le compte n'y est pas avec l'article 10, sorte de cavalier législatif qui ne dit rien sur la pénurie de personnel et la compensation des charges des collectivités. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; MmeEsther Benbassa et Cathy Apourceau-Poly applaudissent également.)

M. Bruno Belin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Annick Billon applaudit également.) Plein emploi : deux mots dont la France rêve depuis cinquante ans. À écouter les précédents orateurs, la copie du Gouvernement serait incomplète, superficielle, voire à contresens de l'histoire, malgré la combativité des sympathiques ministres présents.

Envie louable, mais grandes questions : quels moyens, quelle stratégie ?

Il reste des zones d'ombre, comme l'a rappelé la rapporteure : vous avez manqué de courage en n'annonçant pas la couleur sur les contours du contrat d'engagement.

Quels moyens donnerez-vous demain aux conseils départementaux quand il faudra inscrire 100 % des bénéficiaires du RSA à Pôle emploi, alors qu'aujourd'hui, seuls 40 % le sont ? Je rejoins la question de Philippe Mouiller : demain, le bénéficiaire d'une RQTH perdra-t-il une partie de ses allocations s'il trouve un travail ? Quid des Ésat, dont chacun sait qu'ils manquent de places ? Manque une grande loi Travail.

La question des responsabilités se pose s'agissant de la compétence petite enfance. Vous avez annoncé 6 milliards d'euros, mais cela ne fait que 15 000 euros par collectivité ; vous conviendrez que c'est insuffisant.

Comment diminuer le nombre d'offres non pourvues ? Que fait-on en matière d'accompagnement, de formation ? Il faudra avoir un débat sur Parcoursup, mais aussi sur le logement des saisonniers, sur la question de la mobilité - sur laquelle travaillent sans soutien financier de l'État des associations que je salue.

Cette loi Plein emploi est un petit pas. Nous serons nombreux à la voter. Pour le bond de géant, il faudrait davantage de moyens et d'ambition. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - S'agissant des activités des bénéficiaires du RSA, l'intensité du contrat d'engagement réciproque tiendra compte de l'âge, des freins à l'emploi comme les problématiques de garde d'enfant et de la réalité des différents bassins d'emploi. J'ai noté la volonté de la commission d'introduire un minimum de 15 heures. Songeons que de nombreux allocataires ont été abîmés par la vie. Nous avons prévu à l'article 6 que les personnes les plus éloignées de l'emploi feraient l'objet uniquement d'un suivi social, avec un bilan régulier tous les six ou douze mois.

Nous ne remettons pas en cause l'autonomie et le statut des missions locales : à la demande de l'Union nationale des missions locales, nous avons supprimé l'expression « par délégation de France Travail » du texte initial. Elles seront toujours conventionnées avec l'État, France Travail n'ayant pas cette compétence : il n'y aura donc pas de lien de subordination par le financement. Les missions locales participeront aux comités France Travail et pourront peser sur les orientations.

Ce projet de loi n'est pas un texte financier. Nous devrons le compléter dans le projet de loi de finances pour 2024, en particulier concernant l'accompagnement des 32 % d'allocataires du RSA qui sont des parents seuls - souvent des mères - et pour qui le retour à l'emploi est forcément progressif.

Autre canal de financement : la convention tripartite entre l'État, Pôle emploi et l'Unédic, qui affectera 11 % de ses recettes au service public de l'emploi. C'est une dépense active : s'il y a moins de demandeurs d'emploi, l'Unédic réduit ses dépenses d'indemnisation.

Nous devons mener la réflexion sur le modèle économique des Ésat. Les tensions sur le marché du travail ont en effet incité les entreprises à employer les travailleurs handicapés les moins éloignés de l'emploi. Nous comptons déplafonner par décret le nombre d'heures travaillées par les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Le Gouvernement considère que les trois quarts des amendements adoptés en commission ont permis d'améliorer et d'enrichir le texte. Nous n'y reviendrons pas.

M. Jean-Christophe Combe, ministre.  - Je me réjouis que les engagements pris à l'occasion de la conférence nationale du handicap aient été inscrits aussi rapidement dans un texte, mais aussi que vous ayez appuyé nos propositions en matière de politique d'accueil du jeune enfant - même si j'ai entendu vos inquiétudes.

Ce matin, j'ai signé la COG avec la Cnaf : les moyens sont là, ils sont exceptionnels, et tous les acteurs présents étaient ravis.

Avec la branche famille, nous veillerons à répondre aux préoccupations des maires, notamment un financement en fonctionnement plus qu'en investissement et une juste compensation des charges des collectivités.

Ce projet de loi ne contient pas de mesures directement en lien avec la lutte contre la pauvreté, mais la meilleure politique sociale dans ce domaine, c'est l'emploi. Nous présenterons prochainement avec la Première ministre un projet de pacte de solidarité qui prendra le relais de la stratégie de lutte contre la pauvreté, et que nous avons élaboré avec l'ensemble des acteurs de la solidarité. Un axe majeur est d'aller chercher les personnes les plus éloignées de l'emploi.

J'ai aussi fait de la lutte contre le non-recours une priorité, comme en témoigne le lancement du comité de coordination de l'accès aux droits. Trente-neuf bassins de vie se sont engagés.

Le Gouvernement agit, pour une politique sociale volontariste.

Discussion des articles

M. le président.  - Amendement n°389, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

À l'intitulé

Remplacer les mots :

contrat d'engagement

par les mots :

contrat d'engagement réciproque

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Il existe déjà un contrat d'engagement réciproque, qui ne concerne que 50 % des bénéficiaires du RSA. La suppression du qualificatif « réciproque » est révélatrice de la volonté de conditionner encore plus le droit au RSA - revenu minimum qui devrait être garanti - à des devoirs « d'activation » de la part d'allocataires présumés passifs, assortis de contrôles et de sanctions.

Le contrat est manifestement déséquilibré : pour contracter, il faut être deux, monsieur le ministre !

Nous nous inquiétons de ces changements sémantiques : du droit aux devoirs, du projet au contrat... Réaffirmons la réciprocité !

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable. Le nouveau contrat d'engagement unique remplacera le contrat d'engagement réciproque pour les bénéficiaires du RSA, mais aussi le projet personnalisé d'accès à l'emploi (PPAE) pour les demandeurs d'emploi, ainsi que le CEJ pour les jeunes.

Nous n'oublions ni les droits ni les devoirs : c'est bien un contrat.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis pour les mêmes raisons. Cet article obéit à une logique de simplification.

Mme Émilienne Poumirol.  - Dans ce cas, pourquoi refuser d'inscrire le terme « réciproque » ? Cela donne l'impression que le contrat n'engage que l'allocataire. Or Pôle emploi a aussi des devoirs !

L'amendement n°389 n'est pas adopté.

ARTICLE 1er

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Avec l'inscription automatique comme demandeur d'emploi du conjoint ou partenaire de l'allocataire du RSA, on n'envisage plus la personne, mais le ménage dans son ensemble. Avez-vous oublié le débat sur la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ?

Quels moyens humains pour l'accueil et l'accompagnement, à l'heure de la dématérialisation ? À moins que ce projet de loi n'ait qu'une visée statistique... Depuis 2017, la dématérialisation des services publics se traduit par un parcours du combattant pour les plus précaires ; nous rencontrons souvent des personnes démunies, dans des situations ubuesques. Oui aux droits automatiques, non aux algorithmes !

Mme Victoire Jasmin .  - Le plein emploi suscite de l'espoir, mais doit s'adapter à la réalité de nos territoires d'outre-mer, où le taux de chômage est particulièrement élevé. Ce texte ne répond pas à leurs besoins. Je déplore l'absence d'ambition réelle pour ces territoires, confrontés à de nombreuses difficultés. Difficile de se déplacer dans un archipel comme la Guadeloupe ; en Guyane, c'est en pirogue ! Pour les personnes en situation de handicap, c'est pire encore. Les difficultés de transport, de logement, de garde d'enfant sont légion.

Il faudrait adapter ce texte à la réalité de nos territoires, avec les élus et les collectivités, prévoir des mesures de différenciation. Il y a urgence !

Mme Corinne Féret .  - La recherche d'emploi doit rester une démarche volontaire, dans le respect des libertés fondamentales. Cette inscription obligatoire, étendue au conjoint, fait fi des difficultés de ceux qui sont le plus éloignés de l'emploi. On ne peut accepter que la demande de RSA entraîne automatiquement l'inscription comme demandeur d'emploi, avant même de tenir compte d'un éventuel besoin d'accompagnement social. Tous les demandeurs d'emploi ne sont pas en capacité de reprendre une activité rapidement. Et on ne vit pas confortablement avec 600 euros par mois...

Mme Émilienne Poumirol .  - Nous aurions voulu débattre du non-recours, du revenu de base ou du RSA jeunes, mais nos amendements ont été déclarés irrecevables. Votre texte va aggraver le non-recours, alors qu'il y a urgence à instaurer une automaticité des droits -  telle que l'envisage la proposition de loi de Rachid Temal.

Nous proposons également, à titre expérimental, d'accorder le RSA dès 18 ans - c'est l'objet de la proposition de loi de Rémi Cardon.

Nous proposons enfin d'expérimenter un revenu de base, comme l'a fait le département de la Haute-Garonne pour les 18-25 ans : c'est un filet de sécurité, pour mettre fin aux situations de pauvreté.

J'espère que nous pourrons en débattre lors d'une vraie loi Travail.

M. le président.  - Amendement n°243 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Émilienne Poumirol.  - L'article 1er prévoit l'inscription obligatoire et généralisée auprès de Pôle emploi de tous les bénéficiaires du RSA, ainsi que leur conjoint, des personnes en situation de handicap.

Cette mesure va à l'encontre du principe selon lequel la recherche d'emploi est un acte volontaire. En outre, cette logique de retour obligatoire à l'emploi n'est pas adaptable à tous. L'allocataire est considéré comme employable à n'importe quel prix ; le RSA n'est plus une allocation de subsistance mais de retour à l'emploi, alors qu'il faudrait privilégier l'accompagnement et « l'aller vers ».

Il faudrait un diagnostic global, sur la base d'un référentiel national, mais le texte n'en définit pas les éléments. Nous récusons cette logique.

M. le président.  - Amendement identique n°355, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cet article est en rupture avec les principes fondamentaux de notre protection sociale.

Les « devoirs » de l'allocataire n'ont jamais compris la recherche d'emploi, avec radiation en cas de refus d'une offre d'emploi. Rien n'est dit des conséquences d'une éventuelle radiation sur l'allocation...

Cet article éloigne le RSA de son objectif premier : offrir une assistance pour survivre. Si tous les allocataires sont d'abord demandeurs d'emploi, le RSA devient une prestation de chômage.

On crée une confusion entre un droit à un revenu minimum d'existence et une prestation à la conditionnalité renforcée, assortie de sanctions, ne reconnaissant comme activité que l'emploi. C'est là une rupture inédite dans le droit social français, et une pression accrue sur les plus précaires.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - La commission a adopté l'article 1er : avis défavorable à sa suppression. L'inscription obligatoire permettra une meilleure orientation des personnes ; chaque situation sera étudiée, en vue d'un accompagnement renforcé en matière sociale ou professionnelle. Nous sommes bien loin d'un contrôle généralisé. Il s'agit d'assurer une meilleure visibilité de l'ensemble du public sans emploi, dans l'objectif de ramener le plus grand nombre vers l'emploi.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos243 rectifié et 355 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°611 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol et Requier.

Alinéa 4

Supprimer les mots :

auprès de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1

Mme Véronique Guillotin.  - Selon l'étude d'impact, l'inscription sera possible à travers un réseau physique renforcé pour accompagner les publics en difficulté qui ne sollicitent pas spontanément un service public d'accompagnement. Dans cet esprit, cet amendement précise que toutes les inscriptions ne se font pas obligatoirement auprès de France travail.

M. le président.  - Amendement n°594, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéas 4, 19 et 20

Remplacer les mots :

l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1

par les mots :

l'opérateur France Travail

II. - Alinéa 24

Remplacer les mots :

L'institution mentionnée à l'article L. 5312-1

par les mots :

L'opérateur France Travail

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cet amendement vise à rétablir le changement de nom de Pôle emploi en France Travail. Ce changement contribue à l'identification de l'opérateur, et n'entraîne aucune volonté hégémonique sur le réseau. Il n'est pas doté de nouvelles compétences, sinon celle de mettre en oeuvre des outils au service de l'ensemble du réseau, ce que j'ai appelé le patrimoine commun.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°611 rectifié. Pôle emploi est déjà responsable de la liste des demandeurs d'emploi : il est logique que cela perdure. Les échanges d'information et systèmes interopérables faciliteront les partenariats entre les opérateurs. Cela ne remet pas en cause le rôle de chacun : les départements restent responsables des bénéficiaires du RSA, les missions locales, de l'orientation et du suivi des jeunes.

Avis défavorable à l'amendement n°594 du Gouvernement, sans surprise. Utiliser le même nom pour l'opérateur et le réseau est source de confusion, le Conseil d'État l'a dit. Cela créerait une hiérarchie avec les autres opérateurs, dont les missions locales. Sans parler du coût...

Pôle emploi est désormais bien identifié - même si on entend encore « ANPE ». Cap Emploi, les missions locales ne changent pas de nom : pourquoi en irait-il différemment ? Le travail partenarial demeurera.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Retrait ou avis défavorable sur l'amendement n°611 rectifié, pour les mêmes raisons que Mme le rapporteur. Avec l'inscription auprès de France Travail, l'accompagnement sera tant social que professionnel. Les allocataires du RSA continueront d'être suivis par le département.

L'avis sur l'amendement du Gouvernement ne me surprend pas, même s'il m'attriste : c'est un point de désaccord entre nous.

M. Hervé Gillé.  - Pourquoi les amendements nos611 rectifié et 594 sont-ils en discussion commune ? Nous serons favorables à l'amendement n°611 rectifié, mais pas à l'amendement n°594. Il y aura forcément, à terme, un lien de subordination entre France Travail et les autres opérateurs : c'est ce que recherche le Gouvernement !

L'amendement n°611 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°594.

M. le président.  - Amendement n°238 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Émilienne Poumirol.  - Percevoir le RSA traduit souvent l'échec de l'accompagnement par Pôle emploi, qui n'a pas abouti à une insertion durable dans l'emploi. Il faut aider ces personnes à résoudre leurs problèmes sur le temps long, par un accompagnement social bienveillant : leur inscription automatique à Pôle emploi n'a pas de sens.

M. le président.  - Amendement identique n°356, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'inscription automatique des allocataires du RSA et de leur conjoint sous-entend que ceux-ci sont avant tout des demandeurs d'emploi.

La suppression de l'allocation du RSA a toujours été possible, mais très rare, et cantonnée aux cas de fraude.

Selon les sociologues Bernard Gomel et Dominique Méda, « on oblige les allocataires à singer la recherche frénétique d'emploi alors qu'il n'y a pas d'emplois, ou d'emplois dignes de ce nom. La mécanique des droits et devoirs se transforme alors en instrument de torture morale ». (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) Il faut partir des besoins des personnes, et non imposer des emplois difficiles à des personnes en difficulté.

M. le président.  - Amendement n°258 rectifié, présenté par M. Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 6, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La personne mentionnée à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles qui demande son inscription.

M. Hervé Gillé.  - Le travail est-il obligatoire ? Doit-on être obligé de s'inscrire à Pôle emploi ? Cet amendement supprime l'inscription automatique du conjoint de l'allocataire et conditionne celle de l'allocataire à une demande de sa part. La recherche d'emploi doit rester un acte volontaire. Le conjoint doit être respecté en tant qu'individu.

M. le président.  - Amendement n°64 rectifié ter, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère et N. Delattre et MM. Artano, Gold, Guérini, Guiol et Requier.

Alinéa 6, première phrase

Supprimer les mots :

, ainsi que son conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité

Mme Véronique Guillotin.  - Nous voulons supprimer l'inscription automatique des conjoints auprès de France Travail. Cette mesure nous paraît contraire à l'article L. 5411-1 du code du travail.

M. le président.  - Amendement identique n°357, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'inscription automatique est une illusion statistique et une violence symbolique, qui ne fera qu'aggraver le non-recours. Sous prétexte que la prestation est familiarisée, le partenaire rentrera contre son gré dans une base de données de demandeurs d'emploi. Bref, on surveille toujours plus les plus précaires. L'actualisation mensuelle les conduira à renoncer à ce droit fondamental.

Alors que l'efficacité des politiques d'activation sur la reprise d'emploi n'est pas démontrée, le Gouvernement poursuit sa fuite en avant, alors que ces droits devraient être garantis sans condition.

M. le président.  - Amendement identique n°384 rectifié ter, présenté par Mme Gacquerre, MM. Henno et Capo-Canellas, Mmes F. Gerbaud et Saint-Pé, M. Mizzon, Mme de La Provôté, MM. Canévet, Kern, S. Demilly, Cadec et Chauvet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Lurel, Hingray, Joyandet et Levi et Mme Létard.

M. Olivier Henno.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°458, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - L'inscription automatique inverse la logique de l'insertion sociale. C'est une bascule idéologique : l'allocataire passe du statut de personne au foyer dépourvue de revenus à personne dépourvue d'emploi. Si le Gouvernement voulait réellement réduire le non-recours, il faudrait maintenir le guichet physique et ne pas ajouter de sanction. Surtout, les questionnaires sont très intrusifs : en quoi le nom des conjoints et concubins successifs est-il utile à l'administration ? C'est une atteinte disproportionnée. Pour les missions locales, l'inscription automatique est un facteur répulsif. Vous allez renforcer le non-recours !

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable à tous ces amendements. L'inscription automatique est utile pour une vision exhaustive et un meilleur suivi de ce public, ainsi qu'une prise en charge harmonisée. Elle ne fera pas obstacle au parcours d'accompagnement social en cas d'incapacité à accéder immédiatement à l'emploi.

On oublie que le RSA étant une prestation familiarisée, le conjoint est déjà soumis aux mêmes droits et devoirs que l'allocataire. Il n'a pas vocation à être suivi s'il n'en a pas besoin, mais certains pourront être amenés vers l'emploi.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable également. Le RSA était familiarisé depuis la création du RMI. Si le conjoint justifie de 500 euros mensuels de revenu d'activité, il est exonéré de toutes les contreparties demandées aux allocataires du RSA.

J'entends parler de revenu minimum, de revenu de solidarité, comme si on oubliait le « i » d'insertion et le « a » d'activité. L'octroi du RMI a toujours été accompagné de contreparties pour l'insertion et le retour à l'emploi. Ce que nous proposons n'est pas une nouveauté.

M. René-Paul Savary.  - Le terme de « torture morale » pour qualifier l'inscription à Pôle emploi me surprend. Je pense au contraire qu'on rend service à ces personnes : rien de pire que de les laisser chez elles ! Mais il faut des moyens - nous verrons lesquels, monsieur le ministre.

Je suis Marnais, de la terre de Léon Bourgeois, adepte du solidarisme. Le solidarisme, c'est des droits et des devoirs, clé du consentement à l'impôt. Quand on reçoit quelque chose de la société, il y a des contreparties. Cela se perd, d'où nos problèmes de cohésion sociétale. Je n'étais pas un adepte de l'inscription automatique, mais c'est un service à rendre à ces personnes, qui peuvent espérer un travail. Je voterai contre les amendements.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - M. Savary n'aime pas les mots des sociologues, cela s'entend, mais qu'il écoute donc le Secours Catholique, qui propose un revenu minimum garanti sans contrepartie. Les contrôles incessants sur les allocataires du RSA - qui ont pourtant des activités ! - sont vécus comme infantilisants et humiliants. Si vous aviez assisté aux rencontres parlementaires du Secours catholique avec ces personnes, peut-être auriez-vous revu votre appréciation. Ils sont contrôlés comme des enfants qui n'auraient pas fait leurs devoirs, comme si on voulait les pousser à ne pas demander le RSA ! (Murmures à droite) Écoutez le Secours catholique, ATD Quart Monde ! Ce sociologue exprime une réalité.

M. Olivier Henno.  - Préférant l'éloquence de la rapporteure et de M. Savary à celle des disciples de Bourdieu, nous retirons l'amendement n°384 rectifié ter. (Sourires à droite et au centre)

Mme Véronique Guillotin.  - Je retire également mon amendement.

Les amendements identiques nos64 rectifié ter et 384 rectifié ter sont retirés.

Les amendements identiques nos238 rectifié et 356 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°258 rectifié et les amendements identiques nos357 et 458.

M. le président.  - Amendement n°118 rectifié, présenté par MM. Chasseing et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Menonville, A. Marc, Grand et Wattebled, Mme F. Gerbaud et M. Levi.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

M. Daniel Chasseing.  - Certains jeunes de moins de 25 ans présentent des enjeux spécifiques, qu'ils soient en formation ou sous-main de justice. Ils doivent pouvoir s'inscrire à leur mission locale pour être accompagnés, sans avoir à s'engager dans un parcours de recherche d'emploi.

M. le président.  - Amendement identique n°239 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Émilienne Poumirol.  - Même les jeunes inscrits auprès des missions locales seront automatiquement enregistrés auprès de l'opérateur unique, faisant fi de l'accompagnement spécialisé qu'offrent les missions, dans tous les domaines. Selon ses besoins et ses difficultés, chaque jeune y trouve des réponses individualisées.

Le Gouvernement dit vouloir orienter les demandeurs d'emploi vers les métiers qui recrutent, mais l'idée sous-jacente est que les personnes en situation de handicap, les jeunes et les bénéficiaires du RSA seraient une manne mobilisable à merci pour atteindre les 5 % de chômage. Nous nous opposons à cette vision du retour à l'emploi à tout prix.

M. le président.  - Amendement identique n°365, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Depuis quarante ans, les missions locales accompagnent les jeunes vers l'autonomie. Elles sont connues dans les territoires, et les jeunes franchissent leur porte avec confiance. L'inscription automatique comme demandeurs d'emploi de ces jeunes n'a pas de sens, car ils ne sont pas tous dans une démarche de recherche d'emploi. Leur accompagnement ne peut correspondre à un modèle unique. L'emploi à tout prix est incompatible avec l'accompagnement social et professionnel bienveillant vers l'autonomie. Nous craignons un effet de retrait des jeunes et l'accroissement du phénomène des invisibles.

M. le président.  - Amendement n°382 rectifié ter, présenté par MM. Gillé, Antiste, Bourgi et Cardon, Mme Carlotti, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret, Harribey et G. Jourda et MM. Lurel, Marie, Redon-Sarrazy et Tissot.

Alinéa 7

Après le mot :

personne

insérer les mots :

en recherche d'emploi

M. Hervé Gillé.  - Les missions locales luttent aussi contre le décrochage scolaire. Les jeunes concernés ne cherchent pas immédiatement un emploi, ils ont besoin d'une formation. Ne pas les inscrire à Pôle emploi tombe sous le sens !

L'insertion, c'est aussi le logement. Or certaines personnes ont un emploi, mais pas de logement : pas besoin non plus de les inscrire.

Les situations des personnes accompagnées par les missions locales sont diverses : évitons une logique administrative contre-productive !

M. le président.  - Amendement n°185 rectifié bis, présenté par MM. J.B. Blanc, Cadec, Chatillon, Joyandet et A. Marc, Mme Petrus, M. Lefèvre, Mme Gosselin, MM. B. Fournier, Belin et Sido, Mme Boulay-Espéronnier, M. Cambon, Mme Lavarde, MM. Gremillet et D. Laurent, Mmes Ract-Madoux et Joseph, M. Genet, Mme F. Gerbaud, MM. Bouchet, Favreau, Hingray, Anglars, Longeot, Panunzi et J.M. Arnaud, Mmes Guidez et Garriaud-Maylam, MM. Burgoa et Somon, Mme Estrosi Sassone, MM. Daubresse et Brisson, Mme Demas, MM. Tabarot, Pointereau et Savary, Mmes Drexler, Bourrat et Del Fabro, M. Klinger, Mme Raimond-Pavero, M. Levi et Mmes de La Provôté et Létard.

Alinéa 7

Après le mot :

accompagnement

insérer les mots :

pour accéder à un emploi

M. Bruno Belin.  - Les missions locales accompagnent vers l'emploi, mais aussi en matière de logement, de culture ou de santé. L'inscription obligatoire à France Travail ne doit concerner que les demandeurs d'emploi.

M. le président.  - Amendement n°496 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

et qui est en recherche d'un emploi

M. Gérard Lahellec.  - Les jeunes accompagnés dans les missions locales doivent être libres de s'inscrire à Pôle emploi. Le lien de confiance qu'ils établissent avec les missions locales est souvent le préalable à leur insertion professionnelle. L'inscription automatique risque d'en éloigner certains des structures d'accueil. Le travail est un engagement fort qui doit être consenti, et la coercition n'est jamais la bonne méthode.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable. Un jeune qui franchira la porte d'une mission locale pour demander un accompagnement sera inscrit à Pôle emploi, mais évidemment pas celui qui demandera une simple information. Cette mesure s'inscrit dans le cadre de l' « aller vers », pour accompagner au mieux.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis, pour des raisons légèrement différentes.

Les amendements identiques nos118 rectifié, 239 rectifié et 365 sont contraires au renforcement de l'accompagnement que nous souhaitons. L'inscription automatique est un gain de temps et source de simplicité.

Le texte prévoit l'inscription automatique des jeunes en CEJ ou en parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (Pacea), deux dispositifs relevant d'une logique d'insertion professionnelle. Les amendements nos382 rectifié ter, 185 rectifié bis et 496 rectifié sont donc, d'une certaine manière, satisfaits.

M. Hervé Gillé.  - Nous entendons cet argument, mais le Pacea est un contrat chapeau : les situations couvertes sont diverses. Un jeune souffrant de graves problèmes de santé ne sera pas automatiquement inscrit, sommes-nous bien d'accord ? (M. le ministre le confirme.) Ce dispositif étant global, je ne pense pas qu'il soit adapté d'inscrire tous les jeunes à Pôle emploi dès le démarrage.

Mme Nassimah Dindar.  - On voit bien, quand on connaît les dispositifs d'insertion pour les 16-25 ans dans les départements, que les jeunes n'aiment pas passer d'un bureau à l'autre. Il faut simplifier, mutualiser, coordonner. Je suis favorable à l'inscription automatique, qui va dans le sens de la coordination. (M. Philippe Mouiller renchérit.)

Les amendements identiques nos118 rectifié, 239 rectifié et 365 ne sont pas adoptés, non plus que les amendements nos382 rectifié ter, 185 rectifié bis et 496.

M. le président.  - Amendement n°240 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

Mme Émilienne Poumirol.  - Dans le même esprit, nous voulons supprimer l'inscription automatique des personnes en situation de handicap auprès de l'opérateur unique. Le chômage de ces personnes dépasse 14 %, sa durée moyenne est de 910 jours. Leur situation particulière suppose un accompagnement global. Or les services de Pôle emploi ne peuvent l'assurer avec leurs moyens actuels, dont la revalorisation n'est pas prévue.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable. J'entends le besoin d'accompagnement renforcé en fonction du handicap, mais, s'agissant de personnes suivies par Cap emploi, l'objectif est bien leur insertion dans l'emploi.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable. L'orientation des personnes en situation de handicap en milieu ordinaire doit être un droit. En outre, Cap emploi se coordonne avec Pôle emploi depuis des années, notamment via le réseau Cheops.

M. Philippe Mouiller.  - Dans le cadre de sa demande de RQTH, la personne coche une case indiquant si elle est ou non dans une démarche de recherche d'emploi. Cette question est donc déjà traitée.

Lorsqu'on fait le bilan du rapprochement Pôle emploi-Cap emploi, les retours sont plutôt favorables. (M. le ministre le confirme.) Les associations sont plutôt favorables à cette démarche. Reste, en effet, la question des moyens. (Mme Émilienne Poumirol abonde.)

Je voterai contre cet amendement.

L'amendement n°240 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°358, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéas 10 et 11

Supprimer ces alinéas.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Une partie de la diminution du chômage intervenue entre 2021 et 2023 est en trompe-l'oeil, car les catégories B et C ont augmenté. Si l'on prend en compte les allocataires du RSA, on arrive à plus de 7 millions de personnes directement touchées par la précarité.

Alors que le débat se focalise souvent sur la catégorie A, gare à ne pas invisibiliser les allocataires du RSA et les chômeurs des catégories peu prises en compte. Avec l'inscription d'office, la liste des demandeurs d'emploi change de nature pour devenir, au mieux, la liste des sans-emploi ou des mal-employés.

Supprimons les alinéas 10 et 11, qui permettent de remodeler les catégories de demandeurs d'emploi.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable. Le renouvellement périodique est important : le cas échéant, il permet de revoir l'accompagnement, au profit du demandeur d'emploi.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Mon amendement supprime la possibilité de transformer les catégories, pour éviter les manipulations.

L'amendement n°358 n'est pas adopté.

L'amendement n°70 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°260 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 17

Après les mots :

conditions de logement

insérer les mots :

, à sa mobilité, à son isolement en particulier si elle assure la charge d'enfant

Mme Émilienne Poumirol.  - Cet amendement précise les freins qui peuvent empêcher des personnes de s'engager dans une recherche d'emploi. Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) appelle le Gouvernement à mieux articuler les dimensions professionnelle et sociale de l'insertion, pour prendre en compte les situations personnelles. En fonction notamment de leurs possibilités de mobilité, les personnes ne sont pas forcément aptes à un retour à l'emploi. Un accompagnement social est alors nécessaire.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Nous avons conscience des divers freins à l'accès à l'emploi ; les crèches, notamment, doivent être adaptées aux besoins. Mais il n'est pas nécessaire d'énumérer dans la loi tous les types de difficultés, au risque d'en oublier.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Certes, on ne peut être exhaustif. Mais je suis étonnée que la mobilité ne soit pas mentionnée : c'est un facteur essentiel !

L'amendement n°260 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°16 rectifié, présenté par Mme Guidez, MM. Henno et Vanlerenberghe, Mmes Devésa, Jacquemet, Doineau et Sollogoub et M. Duffourg.

Alinéa 17

Après le mot :

aidant

insérer les mots :

d'une personne atteinte d'une maladie d'une particulière gravité, en situation de handicap ou en perte d'autonomie en raison de son âge,

M. Olivier Henno.  - Nous voulons étendre la notion de proche aidant pour inclure celles et ceux qui consacrent du temps aux personnes malades, notamment du cancer.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Nous avons déjà précisé la définition du proche aidant. L'amendement est satisfait, inutile d'aller plus loin. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable, car la définition prévue couvre les différentes situations possibles. Le même argument vaudra pour les amendements suivants.

L'amendement n°16 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°547, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

I.  -  Alinéa 17

Après les mots :

état de santé

insérer les mots :

ou celui du proche dont elle est l'aidant

II.  -  Alinéa 22, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et du rôle d'aidant d'une personne handicapée, âgée ou malade

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'accompagnement et l'orientation prévus ne tiennent pas compte de la situation particulière des aidants. Ils sont plus de 8 millions à accompagner de façon régulière un proche à domicile. Or seuls 47 % d'entre eux sont en emploi, et ils occupent plus souvent des temps partiels. Dans près de six cas sur dix, ces aidants sont des femmes. Il serait logique de tenir compte de leurs difficultés spécifiques pour leur apporter un accompagnement adapté.

M. le président.  - Amendement n°99 rectifié bis, présenté par MM. S. Demilly, Henno et Canévet, Mme Gacquerre, M. Détraigne, Mme Billon, M. Le Nay, Mmes Guidez, Morin-Desailly et Saint-Pé, M. Levi, Mme Sollogoub, MM. Folliot, Reichardt et Cadec, Mmes Muller-Bronn, F. Gerbaud, Garriaud-Maylam et Perrot, MM. Duffourg et Maurey et Mme Létard.

Alinéa 22, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et du rôle d'aidant d'une personne en situation de handicap, âgée ou malade

Mme Annick Billon.  - M. Demilly entend mieux prendre en compte la situation des 9 millions de proches aidants, à travers un diagnostic approfondi de leurs besoins sociaux et professionnels.

L'amendement n°10 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°202 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol et Requier.

Alinéa 22

Compléter cet alinéa par les mots :

et du rôle d'aidant d'une personne handicapée, âgée ou malade

Mme Véronique Guillotin.  - L'inscription automatique doit permettre l'orientation la mieux adaptée. Or les critères prévus ne tiennent pas compte de la situation d'une personne éloignée de l'emploi en raison de l'aide qu'elle apporte à un proche. Cet amendement prévoit que les aidants souhaitant être inscrits comme demandeurs d'emploi bénéficient d'un diagnostic approfondi de leurs besoins sociaux et professionnels.

M. le président.  - Amendement identique n°266 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Émilienne Poumirol.  - Il a été fort bien défendu.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - La commission a déjà prévu la prise en compte de la situation des aidants : ces amendements sont satisfaits. Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°547 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°99 rectifié bis et les amendements identiques nos202 rectifié et 266 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié, présenté par MM. E. Blanc, Bascher et Belin, Mme Belrhiti, MM. J.B. Blanc, Bouchet, Charon et Darnaud, Mmes Dumont, Garnier, Garriaud-Maylam et Gosselin, MM. D. Laurent et Meignen, Mme Noël et MM. Pellevat, Pointereau, Sautarel et Tabarot.

Alinéa 18

Compléter cet alinéa par les mots :

, en coordination avec le service public régional de l'orientation

M. Étienne Blanc.  - Nous soulignons le rôle pivot du service public régional de l'orientation (SPRO) en matière d'orientation professionnelle. Les politiques menées en la matière doivent l'être en coordination avec les régions.

M. le président.  - Amendement identique n°191 rectifié, présenté par Mme Guillotin et MM. Artano, Guérini, Guiol et Requier.

Mme Véronique Guillotin.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°231 rectifié bis, présenté par Mme Gatel, M. Chauvet, Mmes Canayer, Morin-Desailly, Vermeillet, Guidez et Férat, M. Le Nay, Mme Dindar, MM. Laugier, Canévet, Kern, J.M. Arnaud et Longeot, Mme Billon et MM. S. Demilly et Duffourg.

Mme Françoise Gatel.  - Faire et défaire, c'est toujours travailler... (Sourires) L'État et les régions assurent le service public de l'orientation tout au long de la vie : le code du travail en dispose ainsi. Il est donc indispensable de préciser la nécessité d'une coordination avec le SRPO, pour assurer la cohérence et l'efficacité des politiques. Il ne sert à rien de donner des compétences aux collectivités territoriales pour les leur reprendre de façon détournée au gré de textes thématiques !

M. le président.  - Amendement identique n°335 rectifié quater, présenté par Mme Gacquerre, MM. Henno et Capo-Canellas, Mme de La Provôté, MM. Mizzon, Cadec, Lurel, Hingray, Levi et Maurey et Mme Létard.

M. Olivier Henno.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°261 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 19

Compléter cet alinéa par les mots :

, en coordination avec le service public régional de l'orientation

Mme Émilienne Poumirol.  - Défendu.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Avis défavorable. Vous confondez deux types d'orientation : l'article 1er vise l'orientation professionnelle du demandeur d'emploi, alors que le SRPO est compétent en matière d'orientation scolaire. Par ailleurs, les conseils régionaux ont toute leur place dans la gouvernance de France Travail - vous n'avez donc pas d'inquiétudes à avoir.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Les amendements de la commission à l'article 4 prévoient une coordination avec le service public de l'éducation. Par ailleurs, il est prévu que les comités France Travail intègrent les Crefop. Le Gouvernement soutient ces dispositions. Retrait, sinon avis défavorable.

Les amendements identiques nos22 rectifié, 191 rectifié, 231 rectifié bis et 335 rectifié quater ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°261 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°48 rectifié ter, présenté par M. Levi, Mme Billon, MM. Bonneau, Capo-Canellas, Chasseing, Chatillon et Détraigne, Mme Guidez, MM. Hingray, Kern, Laugier, Le Nay, A. Marc, Sautarel, Wattebled, Bonhomme, Moga, Canévet, J.M. Arnaud et Cadec, Mme Garriaud-Maylam et MM. Panunzi, Duffourg et Klinger.

I.  -  Alinéa 19

Compléter cet alinéa par les mots :

ou tout autre opérateur, acteur ou personne morale désignée par conventionnement

II.  -  Alinéa 20

Compléter cet alinéa par les mots :

ou à tout autre opérateur, acteur ou personne morale désigné à cet effet par conventionnement

Mme Annick Billon.  - M. Levi propose d'améliorer la coordination des services d'aide et d'orientation pour les demandeurs d'emploi, quel que soit leur statut. Il s'agit de permettre à d'autres opérateurs ou entités désignées par convention de prendre en charge ces responsabilités. Cet amendement, soutenu par France Urbaine et Alliance Villes Emploi, vise à leur donner la possibilité de guider les demandeurs d'emploi.

M. le président.  - Amendement identique n°60 rectifié ter, présenté par MM. Longeot et Folliot, Mmes Vermeillet et Devésa, MM. S. Demilly et Henno et Mmes Jacquemet et Perrot.

M. Olivier Henno.  - Défendu.

L'amendement identique n°84 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°262 rectifié, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 20, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Émilienne Poumirol.  - Cet amendement vise à supprimer la possibilité pour les départements de déléguer à Pôle emploi une de leurs compétences en matière d'insertion sociale et professionnelle des allocataires du RSA, l'orientation vers un organisme référent. Les départements et leurs agents doivent conserver l'ensemble de leurs prérogatives en la matière, car ils ont la connaissance du terrain nécessaire. Pôle emploi n'a ni l'expertise ni les moyens qui conviennent.

M. le président.  - Amendement identique n°359, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Nous proposons de supprimer la possibilité offerte au président d'un conseil départemental de déléguer sa compétence d'orientation des allocataires du RSA à France Travail. Nous invitons le Gouvernement à rétablir les marges financières des conseils départementaux au lieu de les inciter à se déposséder de leurs compétences...

À la création du RMI, le législateur avait fixé à 20 % la part des dépenses d'allocation des départements qui devaient être consacrées à l'insertion. Cette règle a été supprimée, et l'insertion ne représente plus que 15 % des dépenses d'allocation dans neuf départements sur dix - selon certains, cette proportion tendrait même vers 8 %. La question centrale, c'est la faiblesse des moyens accordés aux départements !

En outre, rien ne garantit que France Travail disposera de meilleurs moyens et que les demandeurs d'emploi seront donc mieux accompagnés.

Mme Pascale Gruny, rapporteur.  - Les amendements identiques nos48 rectifié ter, 60 rectifié ter et 84 rectifié prévoient que les décisions d'orientation des bénéficiaires du RSA pourraient être prises par tous les opérateurs. Le texte précise déjà que les organismes référents pourront être des acteurs de l'emploi et de l'insertion, par conventionnement. Avis défavorable.

Avis défavorable également aux amendements identiques nos262 rectifié et 359, qui veulent supprimer la délégation, car il nous paraît utile de laisser aux départements cette possibilité d'organisation.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

Les amendements identiques nos48 rectifié ter et 60 rectifié ter sont retirés.

Mme Françoise Gatel.  - Je trouve la démonstration de Mme Poncet Monge quelque peu erratique en matière de décentralisation. Une collectivité a la possibilité de déléguer sa compétence : sinon, on refait de la centralisation et de l'étatisation ! Si le département délègue une compétence, il donne aussi les moyens de l'exercer.

M. René-Paul Savary.  - La délégation est un acte indispensable. En revanche, il est intéressant que Mme Poncet Monge ait rappelé que, naguère, les départements consacraient 20 % de leur budget à l'insertion, contre 8 % aujourd'hui. D'où vient cet écart ? Des moyens que l'État accorde aux conseils départementaux ! Prendre en main ces personnes est un travail considérable. Si les départements n'ont pas les moyens suffisants, monsieur le ministre, ils ne pourront aller au-delà de 8 %.

Les amendements identiques nos262 rectifié et 359 ne sont pas adoptés.