SÉANCE

du mardi 31 octobre 2023

15e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de M. Pierre Ouzoulias, vice-président

Secrétaires : M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Précarité des étudiants

Mme Antoinette Guhl .  - La précarité explose à un tel niveau que nous appelons à la protection de la jeunesse. Une société qui ne prend pas soin de sa jeunesse n'a pas d'avenir. Selon Linkee, 76 % des étudiants ont un reste à vivre de moins de 100 euros par mois, soit 3,33 euros par jour, une fois leurs factures payées. Quel pays laisse sa jeunesse s'interroger sur comment se loger, se soigner, voire se nourrir ? La France.

Cette précarité était prévisible : la revalorisation des bourses sur critères sociaux à la rentrée 2022 a été maintenue à 4% dans la loi de finances initiale pour 2023, alors que selon les rapporteurs, cela ne suffisait pas à couvrir l'érosion du pouvoir d'achat découlant de l'inflation en 2022 et 2023.

Face à l'urgence d'agir face à l'atteinte portée à l'égalité d'accès à l'enseignement supérieur, quand et comment mettre en oeuvre une réforme structurelle des bourses ? Quelle suite donnerez-vous à l'appel des présidents d'université pour une allocation d'étude pour tous ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Le Gouvernement n'a pas attendu pour protéger le pouvoir d'achat des étudiants. Dès la crise sanitaire, il a instauré le repas à 1 euro. À la rentrée 2022, nous avons présenté des mesures d'urgence, dont une première revalorisation des bourses de 4 %. À la rentrée 2023, nous avons augmenté les bourses sur critères sociaux, et le budget dédié aux bourses de 20 %. Nous allons revaloriser tous les niveaux de bourses, réintégrer 35 000 boursiers auparavant non éligibles, reclasser 140 000 boursiers à un échelon supérieur et neutraliser les effets de seuil. Nous avons gelé la tarification des repas au Crous : j'ai pérennisé le repas à 1 euro pour les boursiers et non-boursiers précaires et celui à 3,30 euros pour tous les étudiants, sans condition de ressources. Nous avons gelé les loyers en résidence Crous et les frais d'inscription.

Nous agissons en responsabilité, avec des mesures mises en oeuvre dès la rentrée 2023, et pour la justice, avec un système redistributif.

Les Crous ont recruté 70 travailleurs sociaux, et nous oeuvrons pour la santé mentale des étudiants. Nous prévoyons un demi-milliard d'euros supplémentaires.

Mme Antoinette Guhl.  - Je ne souhaite pas que le titre du livre de Salomé Saqué, Sois jeune et tais-toi  (l'oratrice brandit l'ouvrage), reste une réalité. Je vous invite, madame la ministre et chers collègues, au séminaire jeunesse intitulé « Pour une fois, écoutons-les ! » que j'organiserai au Sénat avec mes collègues Monique de Marco et Mathilde Ollivier.

Formation des enseignants et calcul du droit à pension de retraite

M. Olivier Rietmann .  - Vous avez le mérite, madame la ministre, de répondre à une question qui ne relève pas de votre portefeuille... J'espère que la note fournie par le cabinet de M. Guerini apportera des réponses.

J'ai adressé au Gouvernement plusieurs courriers et questions écrites ; c'est ma seconde question orale en moins de six mois. Je vous l'avais dit : « s'il le faut, nous reviendrons à la charge ». Nous y voilà.

Le décret d'application de la loi du 26 juillet 1991 n'a toujours pas été publié. Vous laissez 30 000 enseignants dans l'expectative. La parole de l'État sera-t-elle respectée, les trimestres acquis au cours de leur formation seront-ils comptabilisés ?

En mars 2023, Olivier Dussopt promettait une réponse avant l'été ; le 17 mai, Sarah El Haïry affirmait que le décret était en cours de finalisation ; le 22 juin, le cabinet de Stanislas Guerini annonçait une solution avant la fin de l'année. Certes, il reste deux mois, mais l'inquiétude et les rumeurs grandissent, comme celle d'un plafonnement du nombre de trimestres accordés par année d'allocation.

Madame la ministre, tuez dans l'oeuf ces bruits de couloir. Quand le Gouvernement publiera-t-il ce décret, et comment assurer une application uniforme sur tout le territoire ? Comment régulariser la situation d'individus pour lesquels les bonifications sont incomplètes ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Ce sujet est une priorité pour les services ministériels compétents.

Selon l'article 14 de la loi du 26 juillet 1991, sont prises en compte, pour la constitution et la liquidation de la pension, les périodes pendant lesquelles ont été perçues les allocations d'enseignement créées en 1989, ainsi que l'année passée en IUFM en qualité d'allocataire.

Toutefois, le décret en Conseil d'État n'a jamais été pris et je le regrette. Cela a empêché le personnel de faire valoir ses droits dans de bonnes conditions, même si certaines démarches individuelles ont pu aboutir devant les juridictions administratives. Le Gouvernement veut tenir la promesse faite dans les années 1980. Nous allons faire aboutir un projet de décret correctif avant la fin de l'année. Des travaux interministériels sont engagés en ce sens.

Filet inflation et reversement des communes

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - En 2002, lors de la crise énergétique, vous n'avez pas voulu de nos propositions : sortie du marché européen de l'énergie, indexation de la DGF sur l'inflation, bouclier tarifaire... Vous débordiez d'enthousiasme, promettiez que 22 000 communes bénéficieraient du filet de sécurité. Elles sont aujourd'hui 2 930, tandis que 3 425 communes devront rembourser plus de 69,7 millions d'euros. Dans le Pas-de-Calais, 133 collectivités en ont bénéficié, mais 93 d'entre elles doivent rembourser 2,6 millions d'euros. La colère gronde chez les élus.

Et quel mépris du Gouvernement ! Aucun courrier, aucune information : certains maires ont appris par voie de presse qu'ils devraient rembourser.

Dès le 23 octobre 2022, à Arras, nous défendions nos propositions, avec plusieurs élus. J'avais évoqué le risque que l'on demande aux maires de rembourser l'acompte : nous y sommes. Vous avez préféré vendre du rêve plutôt que de prendre de vraies mesures. Les maires ont deux mois pour rendre l'argent. Pourquoi un tel taux d'erreur ? Sont concernées 54 % des collectivités, 70 % dans le Pas-de-Calais !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - La loi de finances rectificative du 16 août 2022 a instauré une dotation budgétaire au profit des communes : 2 011 communes et 930 syndicats ont été soutenus à hauteur de 406 millions d'euros. Les communes et leurs groupements qui anticipaient une baisse de leur épargne brute de plus de 25 % pouvaient demander un acompte : 4 177 communes et groupements en ont bénéficié fin 2022, pour un montant de 106 millions d'euros.

Finalement, la situation est plus favorable qu'envisagée, ce qui justifie un reversement de l'acompte pour 82 % des bénéficiaires. Les montants sont souvent modestes : moins de 10 000 euros pour 75 % d'entre eux, moins de 5 000 euros pour 61 %, soit moins de 1 % de leurs recettes de fonctionnement.

Le Gouvernement a néanmoins prévu un étalement de la charge sur les deux derniers mois de 2023, voire sur 2024. Les services locaux de la DGFiP sont à votre disposition pour réaliser ce lissage en cas d'insuffisance de trésorerie.

Éligibilité au FCTVA

M. Cyril Pellevat .  - En 2021, à la suite de l'automatisation, certaines dépenses des collectivités ne sont plus éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). C'est le cas du compte « Agencement et aménagement de terrains ». Les projets d'aménagement sont pourtant essentiels pour atteindre l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) ou oeuvrer en faveur de la transition écologique.

La Première ministre a annoncé que le projet de loi de finances pour 2024 rétablirait l'éligibilité des dépenses d'aménagement de terrains. Cependant, il serait injuste de pénaliser les collectivités ayant investi dans l'intervalle où ces dépenses étaient inéligibles.

Les dépenses engagées en 2021 et 2022 seront-elles éligibles rétroactivement ? La compensation étant versée à N+1, les aménagements réalisés en 2023 seront-ils éligibles, puisque des crédits sont prévus au projet de loi de finances pour 2024 ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - L'automatisation du FCTVA a conduit à réviser l'assiette des dépenses d'investissement éligibles. Le périmètre des comptes du plan comptable des collectivités ne permet pas de faire coïncider exactement l'assiette automatisée et l'assiette réglementaire précédant la réforme. La réforme se veut neutre : si certaines dépenses n'ont pas été retenues dans l'assiette automatisée, d'autres ont été rendues éligibles, comme les dépenses relatives à des biens mis à disposition de tiers. Les simulations montrent que la réforme coûte davantage à l'État et qu'elle est donc favorable aux collectivités.

Le Gouvernement a décidé qu'à partir du 1er janvier 2023, les dépenses d'aménagement de terrains seraient réintégrées dans l'assiette. Elles ne peuvent faire l'objet de versements rétroactifs - cela coûterait 750 millions d'euros pour 2021, 2022 et 2023.

En réintégrant ces dépenses d'aménagement, le Gouvernement majore de 250 millions d'euros le soutien apporté chaque année à l'investissement des collectivités locales. C'est une mesure d'avenir.

M. Cyril Pellevat.  - La non-rétroactivité pénalise des communes, notamment en Haute-Savoie, et bloquera des investissements futurs. Il faudrait trouver des compensations, sinon les pertes d'investissement seront énormes.

Gestion du FCTVA

Mme Maryse Carrère .  - Les changements de règles d'éligibilité au FCTVA sont incompréhensibles. Jusqu'ici, les investissements du syndicat mixte du pays de Lourdes et des Vallées des Gaves y étaient éligibles ; cette année, seuls 18 000 euros sur les 120 000 attendus lui ont été reversés. Les commissions syndicales découvrent qu'elles ne sont plus éligibles au FCTVA pour l'intégralité de leurs investissements, non plus que de nombreuses communes qui ont investi dans des city stades.

Il est urgent d'harmoniser, de clarifier et d'expliquer la liste des comptes déterminant l'assiette éligible au FCTVA. Est-il prévu d'accompagner les collectivités surprises par ce changement de règles, qui risquent de se retrouver dans une situation financière délicate ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Avec l'automatisation du FCTVA, l'éligibilité des dépenses se constate lorsqu'elles sont régulièrement imputées sur un compte éligible.

L'utilisation des comptes est encadrée par des instructions budgétaires et comptables. Plus de déclaration papier, il suffit d'imputer correctement ses dépenses : c'est moins de charges déclaratives et un remboursement plus rapide. Toutefois, cette réforme a provoqué des problèmes d'assiette, auxquels nous sommes attentifs.

Pour les groupements exerçant la compétence Gemapi, l'assiette des dépenses éligibles au FCTVA va être clarifiée. La réforme de l'automatisation n'a pas modifié l'éligibilité des dépenses d'investissement exposées sur des biens dont ils n'ont pas la propriété - travaux de lutte contre les avalanches, glissements de terrain, inondations, incendies, défense contre la mer, etc.

Le Gouvernement a intégré les dépenses d'aménagement de terrain, notamment concernant la Gemapi, dans l'assiette automatisée à partir du 1er janvier 2024, pour renforcer sa lisibilité et sa cohérence.

Mme Maryse Carrère.  - Merci de cette dérogation offerte aux syndicats exerçant de lourdes compétences comme la Gemapi. Actuellement, les collectivités bénéficient de subventions calculées sur le prix hors taxe. Demain, pourrait-on les calculer sur le prix TTC, notamment au travers de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), puisqu'elles ne sont plus éligibles au FCTVA ?

Fraudes à la taxe soda

M. Dany Wattebled .  - Pour protéger la santé de la population, la loi de finances pour 2012 a instauré une taxe sur les boissons sucrées, dite taxe soda, de 7,55 euros par hectolitre. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 l'a rendue progressive en fonction de la teneur en sucre. En dix ans, son produit a fortement augmenté, jusqu'à représenter 4 000 euros par camion.

Depuis 2019, cette taxe est perçue non plus par les douanes, mais par l'administration fiscale, par le biais d'une déclaration mensuelle de TVA. Le contrôle du bon niveau de taxe est quasiment impossible, d'autant qu'il intervient longtemps après l'échéance des biens. De ce fait, des importateurs de sodas d'origine européenne se sont développés qui règlent rarement la taxe due et disparaissent rapidement pour échapper aux poursuites. Leurs clients grossistes et les distributeurs ne la paient pas davantage : tous participent à ce carrousel dans la plus grande impunité.

Résultat : dans la grande distribution, des sodas fortement sucrés sont vendus moins cher que des boissons « zéro », induisant une inégalité concurrentielle au détriment des entreprises qui respectent la loi et un manque à gagner d'au moins 10 millions d'euros chaque mois pour les finances publiques.

Entendez-vous renforcer les contrôles ? Prévoyez-vous une solidarité de paiement entre les acteurs de la chaîne ainsi que des sanctions ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales est l'une de nos priorités. Le transfert à la direction générale des finances publiques (DGFip) de la contribution sur les boissons sucrées, dans un souci de rationalisation et d'homogénéisation des circuits de recouvrement et de contrôle, s'inscrit dans cet objectif. Les recettes perçues ont augmenté : 581,8 millions d'euros en moyenne ces deux dernières années, contre 497 millions en moyenne les deux années précédant le transfert. Le nombre de déclarants a augmenté l'année dernière.

La DGFip est en mesure de lutter efficacement contre les différents types de fraude. Elle possède une sérieuse expérience dans la lutte contre les schémas de fraude complexes et met en oeuvre une stratégie offensive de contrôle fiscal, notamment face aux sociétés éphémères.

Le recouvrement de la contribution sur les boissons sucrées a été modernisé par son intégration au processus déclaratif de la TVA, lui-même allégé. Ce gain d'efficacité permet à l'administration de se recentrer sur la lutte contre la fraude à enjeu.

L'ensemble des taxes transférées à la DGFip bénéficient des moyens modernes de détection de la fraude. Des travaux informatiques spécifiques ont été menés sur cette contribution, avec des résultats encourageants.

Le temps me manque pour achever ma réponse, mais je sais que vous me pardonnerez...

M. Dany Wattebled.  - La fraude n'a pas disparu : il faut donc poursuivre l'effort !

Indemnisation des agents territoriaux démissionnaires

M. Jean-François Longeot .  - Les employeurs territoriaux assument la charge et la gestion de l'allocation chômage de leurs anciens agents démissionnaires. En effet, c'est l'employeur pour lequel l'intéressé a travaillé le plus longtemps qui est responsable de son indemnisation, même si ce dernier a retrouvé un emploi puis a été licencié.

Il peut en résulter des difficultés financières pour de petits employeurs territoriaux : les cas sont rares mais de plus en plus nombreux, avec le développement des mobilités.

L'affiliation des agents territoriaux au régime géré par Pôle emploi ne paraît pas être la bonne solution. La gestion de ce risque pourrait-elle être confiée aux centres de gestion de la fonction publique, qui pratiquent déjà la mutualisation dans différents domaines, à travers une cotisation spécifique ou une hausse du taux de cotisation ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Les employeurs territoriaux assurent la charge de l'allocation chômage de leurs anciens agents selon le système de l'auto-assurance. Ils peuvent adhérer au régime géré par Pôle emploi.

Un décret du 16 juin 2020 réserve le droit à indemnisation aux agents démissionnant pour un motif légitime : suivi de conjoint ou changement de résidence à la suite de violences conjugales, par exemple.

Par ailleurs, le code général des collectivités territoriales prévoit que les collectivités peuvent, lors de l'élaboration de leur budget, constater la probabilité de survenance de certains risques et prévoir une dotation correspondante. Le risque lié au financement des allocations chômage est inclus dans ce dispositif.

Confier la gestion de ce risque aux centres de gestion aurait un coût financier non négligeable pour les collectivités. Sur les 74 000 anciens agents territoriaux indemnisés au titre du chômage par leurs anciens employeurs en 2019, seuls 1 155 étaient d'anciens agents titulaires. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à votre proposition.

M. Jean-François Longeot.  - Je pense à un syndicat à vocation unique dont un agent a demandé à suivre une formation, motif légitime. Mais cette personne n'a ni suivi la formation, ni réintégré son service... Son indemnisation pèse sur le budget du syndicat, qui a dû embaucher un nouvel agent.

Travailleurs sans-papiers de La Poste dans le Val-de-Marne

M. Pascal Savoldelli .  - L'injustice subie par les travailleurs sans-papiers de La Poste dans le Val-de-Marne, en grève depuis deux ans, se poursuit. Après avoir travaillé avec abnégation pendant les confinements, avoir été applaudis, ils demandent légitimement leur régularisation.

Le 5 mai 2022, La Poste a reconnu la sous-traitance en cascade. Mais ce groupe n'assume pas ses responsabilités de donneur d'ordres. Au contraire, il rompt le contrat de sous-traitance de Chronopost avec Derichebourg : c'est se dédouaner de la situation des travailleurs concernés.

La Poste est détenue à 100 % par l'État et la Caisse des dépôts, et le code du travail dispose que « nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit une personne non munie du titre l'autorisant à exercer une activité salariée ». Cette situation est donc illégale, en plus d'être inhumaine. Les salariés méritent réparation.

Que comptez-vous faire avec le groupe La Poste pour régulariser ces travailleurs ? (M. Ian Brossat abonde en ce sens.)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Depuis décembre 2021, le collectif des travailleurs sans-papiers de Vitry-sur-Seine campe aux abords de la société Chronopost à Alfortville, afin d'obtenir la régularisation de personnes en situation irrégulière qui auraient été employées par cette entreprise ou ses sous-traitants.

Une délégation a été reçue par la direction générale des étrangers à deux reprises, en février et juillet 2022. Il a été demandé au collectif d'adresser les éléments utiles aux préfectures, qui étudieront les situations au cas par cas au regard des critères de l'admission exceptionnelle au séjour. Celle-ci peut être appréciée favorablement si l'étranger justifie d'anciennetés de séjour et de travail significatives, ainsi que d'un contrat de travail ou d'une promesse d'embauche. En l'état actuel des textes, l'admission au séjour de ces travailleurs requiert une action positive de l'employeur.

L'examen des situations est individuel et doit être opéré par la préfecture du domicile du demandeur. Les personnes concernées ont été invitées à former une demande de régularisation auprès de la préfecture de leur lieu de résidence. Trente-deux l'ont fait dans le Val-de-Marne, dont la majorité n'a aucun lien avec le groupe La Poste.

La lutte contre l'emploi de ressortissants de pays tiers en situation irrégulière est une de nos priorités. À la demande de la préfecture du Val-de-Marne, l'inspection du travail mène les investigations nécessaires s'agissant du site d'Alfortville.

M. Pascal Savoldelli.  - C'est à mes amis travailleurs de Chronopost, dont certains sont présents en tribune, que vous devez une réponse. Vous n'avez pas dit un mot sur la responsabilité de La Poste ni sur Derichebourg ! Trente et un dossiers ont été reçus : onze réponses, et pas la moindre avancée... L'attente pour ces travailleurs est inhumaine.

Personne n'est de trop dans notre société.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Bien sûr.

M. Pascal Savoldelli.  - Seriez-vous d'accord pour organiser une table ronde au ministère du travail ?

Reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour cause de sécheresse

M. Daniel Laurent .  - La reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à la suite de mouvements de terrain différentiels liés à la sécheresse et à la réhydratation des sols est soumise à une procédure complexe. Or ce phénomène concernerait 10,4 millions de maisons individuelles, d'après le rapport de notre commission des finances sur le financement du risque de retrait-gonflement des argiles (RGA).

En Charente-Maritime, 221 communes sur 463 ont déposé une demande à la suite de la sécheresse de l'année dernière ; si 86 ont obtenu une réponse favorable, 74 n'ont pas satisfait aux critères fixés par la circulaire du 10 mai 2019 et 61 attendent encore une réponse.

Le document de notification des motivations adressé aux élus des communes non retenues est totalement abscons : il est question de proportion des sols où la présence d'argile sensible au RGA est avérée, d'indicateurs d'humidité des sols superficiels, de durées de retour... Les élus ne sont pas en mesure d'expliquer de manière compréhensible à leurs administrés les raisons des disparités de reconnaissance entre communes voisines, parfois contiguës. Nombre de communes envisagent de former des recours, malgré la complexité de la démarche.

La loi du 28 décembre 2021 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles n'a pas atteint ses objectifs de simplification et de transparence. Envisagez-vous une évaluation et une évolution des procédures ? Allez-vous expérimenter des techniques de prévention, comme le recommande le rapport du Sénat, et réviser les critères de la circulaire de 2019 ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - L'épisode de sécheresse et réhydratation des sols survenu l'année dernière a donné lieu à un nombre record de demandes : 8 832 communes ont sollicité la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, et 6 415 sont satisfaites, soit 73 %.

La motivation des décisions est désormais précisée dans les arrêtés interministériels, et des documents explicatifs sont transmis à chaque municipalité. La transparence est donc assurée. Le Gouvernement l'a renforcée, conformément à la volonté du législateur exprimée dans la loi que vous avez citée.

Le financement d'expérimentations techniques visant à améliorer la prévention des risques ne relève pas du ministère de l'intérieur. Plusieurs initiatives ont été engagées par les pouvoirs publics en ce sens. Ainsi, la Caisse centrale de réassurance et France Assureurs ont lancé le projet Initiative sécheresse pour améliorer la protection des maisons individuelles ; il fait l'objet d'une candidature dans le cadre de l'appel à projets « Prévention et remédiation des désordres bâtimentaires dus au phénomène RGA » de France 2030, qui vise à renforcer notre résilience.

Effectifs de police à Allauch et Plan-de-Cuques

Mme Valérie Boyer .  - Le Président de la République a annoncé la création de 238 brigades de gendarmerie supplémentaires en zone rurale. Malheureusement, Allauch et Plan-de-Cuques, dans les Bouches-du-Rhône, ne répondent pas aux critères pour intégrer une zone gendarmerie. Leurs maires réclament depuis trois longues années des effectifs supplémentaires de police nationale, en vain.

Ces communes ne sont pas assez rurales pour être en zone gendarmerie - alors qu'elles l'étaient avant 2003 - et pas assez urbaines pour bénéficier de renforts de police... Les renforts annuels des commissariats marseillais ne bénéficient pas à ces communes, dans lesquelles il n'y a plus que dix policiers nationaux pour 35 000 habitants !

Même si les polices municipales sont remarquables, cette situation n'est pas acceptable. La sécurité doit rester une compétence régalienne. Quand le Gouvernement créera-t-il pour ces deux communes une circonscription de sécurité publique distincte de la division sud de Marseille ? Les délais d'intervention depuis Marseille sont bien trop longs, alors que, en matière de sécurité, chaque seconde compte.

Vivre en sécurité est l'une des premières libertés. Toutes les communes de France doivent bénéficier de la même présence des forces de l'ordre !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - La sécurité est pour nous une question absolument prioritaire. Nous avons dégagé des moyens sans précédent -  15 milliards d'euros supplémentaires - dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur. Nous amplifierons encore cet effort.

Marseille est au coeur de nos préoccupations, notamment dans le cadre de la stratégie « Marseille en grand », impulsée par le Président de la République. La circonscription de sécurité publique de Marseille, qui inclut Allauch et Plan-de-Cuques, dispose de 1 392 gradés et gardiens de la paix, contre 1 312 à la fin de 2020. S'y ajoutent 797 policiers des unités départementales, contre 730 il y a trois ans.

Le commissariat de secteur, qui compte dix agents, remplit une mission essentielle mais réduite : prendre les plaintes et assurer le traitement judiciaire de proximité. Les missions de voie publique sont désormais assurées par les policiers de la circonscription.

Dans chaque département, une direction unique de police sera prochainement mise en place, pour un déploiement plus rapide d'un plus grand nombre de policiers sur le terrain.

Mme Valérie Boyer.  - Après le « en même temps », l'« entre-deux »... Ces communes sont oubliées. Il faut créer une circonscription de sécurité publique !

Cyberattaques contre les hôpitaux

M. Jean Hingray .  - Le 7 octobre dernier, les hôpitaux de Vittel et Neufchâteau ont été victimes d'une cyberattaque. L'hôpital paie le prix très élevé de sa numérisation accélérée : en 2021, 730 établissements ont été visés. Les hackers cherchent à collecter des données très lucratives mais aussi à déstabiliser notre système de santé.

À Vittel et Neufchâteau, des actes chirurgicaux ont dû être déprogrammés ; certains services ne sont pas encore rétablis et les équipes fonctionnent au tout papier. Comment bien soigner un patient dont les antécédents médicaux sont stockés dans des machines inaccessibles ?

En 2021, la stratégie de cybersécurité pour les établissements de santé et médico-sociaux a prévu une enveloppe de 350 millions d'euros ; cela reste insuffisant.

Les hackers se faufilent sans peine dans des systèmes d'information morcelés. La plateforme d'assistance des victimes, le commandant de la gendarmerie dans le cyberespace et l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) pilotent la stratégie de défense et de sécurité des systèmes de sécurité et d'information. Comme dans le sport, ce n'est pas forcément à trois que l'on défend le mieux ses buts !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Ces cyberattaques sont souvent liées à des rançongiciels. L'Anssi et les gendarmeries proposent des actions de prévention, à l'instar du diagnostic opérationnel national cyber, dit Diagonal. Un questionnaire permet aux hôpitaux de mieux connaître leur niveau de protection et d'agir. Sécuriser les systèmes d'information coûte cher, mais toujours moins que les attaques réussies.

En matière de répression, les investigations sont très longues, car il faut coopérer à l'échelon international. Dans l'affaire Ragnar Locker, il a fallu 150 personnes, à l'international, pour finalement mettre en examen quatre personnes en 2023, trois ans après les faits. Les peines sont lourdes : les hackers risquent jusqu'à dix ans d'emprisonnement et 500 000 euros d'amende.

Naturalisation des réfugiés hmongs de Guyane

M. Georges Patient .  - D'anciens réfugiés hmongs se voient refuser leur naturalisation au motif d'une maîtrise insuffisante de la langue française. Ils ont fui le Laos, pour avoir pris le parti de la France durant la guerre d'Indochine. La France les a installés en Guyane, de 1977 à 1988. Ils sont parfaitement intégrés et participent à l'activité économique. Le retour au Laos est inenvisageable, leurs descendants sont profondément ancrés dans la société et sont tous de nationalité française.

Ces personnes sont âgées. L'article 413-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) stipule que toute personne âgée de plus de 65 ans n'est pas soumise à la condition relative à la connaissance de la langue française. Le projet de loi immigration va encore durcir les conditions de maîtrise de la langue. Ces personnes resteront-elles toujours des réfugiées, elles qui ont combattu pour la France ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Cette population de 2 000 membres vit de manière communautaire, isolée dans la forêt amazonienne. Le niveau de compétences attendu en langue française pour être naturalisé est le niveau B1. C'est un obstacle pour ces personnes, notamment pour celles arrivées en France en 1977, qui maîtrisent mal le français, en raison de leur isolement au sein de la structure communautaire.

Toutefois, sont susceptibles d'être exemptées, sur le fondement de l'article 21-24-1 du code civil, les personnes âgées de plus de 70 ans et réfugiées depuis plus de quinze ans. D'autres entrent dans le champ de l'article 21-13-1 du code civil, qui prévoit l'acquisition de la nationalité française par simple déclaration et sans condition d'assimilation linguistique : il s'agit des ascendants directs d'un ressortissant français qui résident en France depuis plus de 25 ans et ont plus de 65 ans.

M. Georges Patient.  - Il faudrait donner des instructions aux autorités locales pour qu'elles appliquent ces dispositions.

Familles à la rue à Paris

M. Ian Brossat .  - Je vais vous parler d'enfants qui ont les mêmes aspirations que leurs camarades - l'école, les vacances -mais qui dorment dehors, dans des abris de fortune ; parfois à l'école, car certains directeurs d'école pallient les déficiences de l'État.

Il y a 3 000 enfants à la rue en France, 42 % de plus en un an. Dans le XVIIIe arrondissement de Paris, ils sont soixante.

Ces enfants comptent beaucoup sur l'école pour s'intégrer et s'émanciper. Mais comment suivre une scolarité convenable dans ces conditions ? Le Conseil d'État a souvent rappelé qu'il revient à l'État de proposer un hébergement à ces familles.

Que compte faire le Gouvernement pour que ces enfants aient un toit et vivent dignement dans la septième économie mondiale ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Vos préoccupations sont partagées. Les efforts déployés pour la mise à l'abri sont sans précédent. Plus de 200 000 places d'hébergement d'urgence, dont 47 000 places à Paris, permettent de mettre à l'abri 70 000 enfants. En intermédiation locative, 25 000 mineurs sont logés. Environ 122 000 logements sociaux ont été attribués à des ménages sans domicile, ce qui concerne 240 000 personnes, dont 100 000 enfants, 40 % de plus que sur la période 2013-2017. L'État prend donc directement en charge 100 000 enfants.

Le territoire parisien dispose d'un système de veille sociale qui travaille en collaboration avec l'État et la Ville de Paris. Dans le XVIIIe, les demandes sont prises en compte par le service intégré d'accueil et d'orientation (SIAO) parisien et par l'État. Mais le contexte est difficile, le parc est saturé.

M. Ian Brossat.  - Nous n'avons pas une obligation de moyens mais de résultats ! Des enfants à la rue, c'est indigne d'une puissance économique comme la nôtre.

Financement du déneigement

Mme Annick Jacquemet .  - Chaque hiver, les communes de montagne doivent assumer des opérations importantes de déneigement. C'est une obligation légale pour les maires. Le FCTVA vise à soutenir l'investissement public local mais, à titre exceptionnel, des dépenses d'entretien, par exemple de voirie, comme l'élagage et le débroussaillage, sont incluses dans son assiette.

Le déneigement, lui, est inclus dans les dépenses de fonctionnement. Or il participe tout autant aux bonnes conditions d'utilisation de la voirie, évitant par exemple une détérioration rapide de la voirie, et donc des investissements plus fréquents.

Dans le Doubs, de nombreux maires me sollicitent. Je salue l'ouverture du FCTVA aux dépenses d'agencement et d'aménagement des terrains, mais son ouverture aux dépenses de déneigement serait salutaire. Le Gouvernement l'envisage-t-il ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Le FCTVA représentera 7,1 milliards d'euros d'investissement en 2024. Les dépenses liées au déneigement sont des dépenses de fonctionnement. À titre d'exception, certaines dépenses d'entretien sont éligibles au fonds - entretien de bâtiments, de voirie ou de réseaux - pour assurer des conditions normales de circulation.

Il n'est pas prévu d'ouvrir le FCTVA à d'autres dépenses de fonctionnement. Le déneigement bénéficie d'une TVA à taux réduit, de 10 %. Un remboursement au taux de 16,4 % serait supérieur au taux acquitté. Enfin, les exceptions doivent rester limitées.

L'ouverture aux dépenses d'aménagement des terrains, prévue dans le projet de loi de finances pour 2024, représente 250 millions d'euros supplémentaires pour les collectivités : c'est une avancée majeure.

Implantation des antennes relais

Mme Alexandra Borchio Fontimp .  - J'associe Mme Patricia Demas à ma question.

Les élus locaux sont en première ligne pour répondre aux enjeux de la transition écologique, mais leur parole n'est souvent pas écoutée, par exemple sur les implantations d'antennes relais, notamment sur les terrains privés.

À Saint-André-de-la-Roche ou à Falicon, dans les Alpes-Maritimes, ces implantations forcées génèrent incompréhension et colère. Les conséquences environnementales et les enjeux de santé publique inquiètent, mais surtout la prolifération anarchique et incontrôlée des antennes.

Les manifestations d'élus et riverains se suivent, mais les solutions pérennes manquent. La mutualisation des opérateurs est insuffisamment privilégiée. Il est urgent d'agir, tout en luttant contre les zones blanches. Avez-vous conscience de cet enjeu, et quelles sont vos pistes pour associer réellement les élus locaux ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - La couverture numérique des territoires, via le New Deal mobile, est une priorité du Gouvernement, qui a confié l'identification des zones prioritaires aux territoires - préfectures et collectivités. L'implication des élus est donc déterminante ; la concertation a été prévue dès le premier instant.

Les situations que vous évoquez ne relèvent pas de ce plan. L'implantation des antennes relais classiques est régie par le code des postes et des communications électroniques, le code de l'urbanisme et le code général des collectivités territoriales.

Le maire est compétent pour conclure une convention d'occupation temporaire du domaine public avec les opérateurs en vue d'une implantation. Il peut demander aux opérateurs un dossier d'état des lieux des installations, et ainsi informer le public sur tout projet. Le guide des relations entre opérateurs et communes rappelle l'obligation d'information des communes par les opérateurs. Ainsi, les maires sont bien parties prenantes, mais je reste ouverte à vos propositions.

Exceptions aux plans d'exposition au bruit (PEB)

Mme Frédérique Puissat .  - Bien des communes mettent en place un PEB. Celle d'Heyrieux, en Isère, est concernée par le PEB de l'aéroport de Lyon-Saint-Exupéry. J'associe Damien Michallet à ma question.

Le PEB empêche l'extension de l'urbanisation lorsque celle-ci expose de nouvelles populations aux nuisances, mais il faut combiner qualité de vie des habitants et développement de la commune. Or en zone C, il est possible de construire en cas de faible accroissement du nombre d'habitants ainsi exposés. Que cela signifie-t-il précisément ? Le plan de construction de dix logements prévu par la commune correspond-il bien à cette notion de faible accroissement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Le code de l'urbanisme prévoit déjà des dérogations, dont la commune bénéficie. Ainsi, des opérations de réhabilitation et de réaménagement urbain sont déjà possibles dans les secteurs de requalification prévus par l'arrêté préfectoral du 26 mars 2013.

En particulier, le projet de requalification du centre-ville d'Heyrieux identifie déjà trois secteurs de réaménagement, et le maire a de nouveau sollicité, fin 2018, une augmentation du nombre de constructions. La direction départementale des territoires (DDT) a confirmé que ces dérogations ne devaient pas excéder vingt logements pour mille habitants de la zone C. Les services compétents de l'État examinent tout nouveau projet localement, après concertation.

Mme Frédérique Puissat.  - Il y a donc bien une possibilité. Madame la ministre, nous vous proposons avec Damien Michallet une réunion avec la DDT et le préfet pour expertiser la construction de ces dix nouveaux logements.

Grillages dans les espaces naturels

M. François Bonneau .  - La loi du 2 février 2023 visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée ne s'applique pas aux clôtures nécessaires à la régénération forestière, déterminantes pour le contrôle des populations animales et la protection des jeunes arbres et des espèces végétales fragiles.

Les services préfectoraux reconnaissaient déjà ces nécessités. Dans un contexte de réchauffement climatique, il faut reconnaître les clôtures nécessaires à cette gestion durable des espaces. Pourriez-vous confirmer ces exemptions, madame la ministre ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - La loi que vous mentionnez prévoit la libre circulation des animaux sauvages en tout temps. Cependant, bien des zones présentent un déséquilibre entre gibier et forêts, avec par exemple des surpopulations de cervidés et de sangliers, à l'origine de dégâts. Un engrillagement de protection des zones en régénération est donc parfois nécessaire.

Je confirme les exceptions prévues par le législateur à cet effet, notamment à l'article L. 372-1 du code de l'environnement.

Forestiers et chasseurs doivent, plus globalement, travailler localement pour réduire les dégâts sur les jeunes arbres. C'est donc aussi à cette échelle et avec des indicateurs coconstruits qu'il faut rééquilibrer la régénération et les populations d'animaux sauvages.

M. François Bonneau.  - La forêt est cruciale pour absorber le carbone. Il faut la protéger.

Transfert de gestion des digues domaniales

Mme Martine Berthet .  - La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) prévoit, au 28 janvier 2024, le transfert de gestion de 80 km de digues domaniales au syndicat mixte de l'Isère et de l'Arc en Combe de Savoie (Sisarc). Or l'administration centrale reste silencieuse, malgré des enjeux énormes liés aux travaux conséquents requis sur les digues et au risque de remise en cause des engagements financiers de l'État. Nous parlons d'un héritage, intenable pour le Sisarc, de 50 millions d'euros sur un total de 100 millions.

Renvoyer aux impôts locaux est inacceptable. L'esprit d'étroite collaboration d'hier a disparu. Pis, le syndicat découvre dans la presse un projet de décret automatisant le transfert sans signature d'une convention, qui ferait reposer la responsabilité sur l'autorité gémapienne.

Alors que l'ouvrage protège des milliers de nos concitoyens, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) semble s'en laver les mains. Laisserez-vous votre administration crucifier ainsi le Sisarc, madame la ministre ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Depuis le 1er janvier 2018, les EPCI dits gémapiens sont responsables des systèmes d'endiguement, et ont reçu des moyens à cet effet. La loi de 2014 a bien prévu le transfert des digues domaniales de l'État, qui est sensible à la situation des ouvrages de l'Isère et de l'Arc.

Pendant cette période transitoire de dix ans, le Sisarc a déjà mené des travaux de consolidation des digues, financés à 100 % par l'État. Certes, ils n'ont pas suffi. C'est pourquoi, face aux inquiétudes des collectivités, l'État s'est engagé à apporter un soutien financier bonifié par le fonds Barnier, à hauteur du maximum de 80 % permis par la réglementation, jusqu'en 2028. Christophe Béchu a mandaté le préfet pour prévoir des compléments pour réduire le reste à charge, dont le fonds vert, porté de 500 millions à 2,5 milliards d'euros.

Mme Martine Berthet.  - Il serait bon d'en informer les élus : c'est le silence total pour l'instant, alors qu'il reste 80 km de digues à entretenir.

Forêt primaire dans les Ardennes

Mme Else Joseph .  - La perspective de réalisation d'une forêt primaire de 70 000 hectares dans le nord-est de l'Europe par l'association Francis Hallé nous inquiète. Ce projet flou exclurait l'activité humaine pour 7 000 ans : adieu les promenades libres, la découverte des forêts, la chasse, l'affouage... Installera-t-on des gradins pour observer la nature ? C'est l'homme qu'on met sous cloche, alors qu'il fait tout pour améliorer son rapport avec la nature - je témoigne des efforts du parc naturel régional des Ardennes.

Entendre que le potentiel économique et touristique n'est pas pertinent dans les Ardennes est scandaleux. Quid de l'industrie forestière - 350 000 mètres cubes exploités - ou des investissements du conseil départemental - la voie verte de la vallée de la Meuse est classée Eurovéloroute ? Est-ce là le projet d'industrie verte dont le département doit être pilote ?

Madame la ministre, il y a quelques mois, le ministère avait donné un accord de principe à ce projet déconnecté et idéologique. Nous attendons une réponse claire à ce projet punitif pour les Ardennes.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Les espaces en libre évolution sont des refuges pour la biodiversité et des points de référence pour faire progresser la connaissance scientifique des forêts. Elles peuvent s'insérer dans des massifs exploités et gérés, notamment contre le risque incendie.

L'État est attentif aux projets de restauration des forêts primaires, mais aussi au dialogue entre l'association et les parties prenantes, dont les acteurs d'une filière bois structurante, car filière d'avenir pour toute la région du Grand Est. Le bois est essentiel pour décarboner la construction.

Dans un contexte de changement climatique et de prévention du risque incendie, le Gouvernement entend étendre la gestion durable des forêts.

Mme Else Joseph.  - J'attendais un message clair de votre part... si la forêt n'est plus entretenue, que fera-t-on contre les incendies ? Nous serons contre cette forêt primaire.

Gravières en Basse Ariège

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Depuis des années, les entreprises du BTP multiplient les projets d'extraction de granulat en Basse Ariège, où se situe une nappe phréatique prioritaire. Les carrières provoquent des prélèvements directs sur la nappe, exposée sur 250 hectares. Or une extension des carrières de 1 100 hectares est prévue pour des projets contestables comme l'A69. L'exposer revient à assécher la nappe. Selon le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), 100 hectares exposés représente un million de mètres cubes de déficit par an, soit huit millions perdus avec ces extensions.

Il est donc urgent de revenir sur l'extension des gravières, d'autant que l'enfouissement prévu des déchets du BTP, chargés d'aluminium, risque de polluer définitivement la nappe alors que les sécheresses se multiplient. Peut-on suspendre et réévaluer ces projets ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - La gestion des ressources minérales au plus près de la zone de consommation est stratégique. Or le bassin toulousain est déficitaire en matériaux. Exploiter les alluvions nécessite souvent une phase de mise à nu, suivie d'un remblaiement.

La Dreal prévoit donc des prescriptions spécifiques. Le schéma régional des carrières Occitanie a fait l'objet d'études environnementales, dans le respect des schémas locaux d'aménagement.

En outre, la réglementation encadre strictement le remblayage des carrières. Les déchets externes à la carrière doivent être inertes et respecter certaines valeurs limites après un test de lixiviation. Enfin, les eaux souterraines sont analysées en lien avec les associations de protection de l'environnement.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Il faut réévaluer les projets à l'aune de l'accélération du réchauffement climatique.

Décrets d'application de la loi ZAN

M. Rémi Cardon .  - Le retard pris pour la publication des décrets d'application de la proposition de loi sur le « zéro artificialisation nette » (ZAN) adoptée le 20 juillet 2023 suscite des difficultés. En effet, plusieurs documents de planification d'aménagement du territoire sont d'ores et déjà en cours d'élaboration. Certains font l'objet d'un recours devant le tribunal administratif. La publication des décrets résoudrait ces litiges. Alors que l'on peine à maintenir les services publics et les commerces de proximité dans les territoires ruraux, le temps est à l'apaisement.

Quand les décrets seront-ils publiés ? Il faut coconstruire la planification écologique avec les élus locaux.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Conformément aux engagements du Gouvernement, la loi du 20 juillet 2023 a ajusté les dispositions de la loi Climat et résilience.

Plusieurs décrets d'application ont fait l'objet d'une concertation avec les parlementaires et l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité.

Un premier décret traite de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols dans les documents de planification et d'urbanisme.

Un second porte sur l'évaluation et le suivi de l'artificialisation des sols dans les documents de planification et d'urbanisme à compter de 2031. Il précise la nomenclature définissant les surfaces artificialisées ou non, ainsi que les seuils de référence retenus.

Tous deux ont été soumis à l'évaluation du Conseil national d'évaluation des normes et du Conseil d'État ; ils seront signés courant novembre par Christophe Béchu. Un document recensant les projets d'envergure nationale ou européenne fera l'objet d'un arrêté ministériel avant fin mars 2024. Une première liste sera soumise à la consultation des régions avant la fin de l'année 2023.

M. Rémi Cardon.  - J'espère que ce calendrier sera tenu.

Transfert des compétences eau et assainissement

Mme Marie-Pierre Monier .  - Depuis l'adoption de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), les modalités du transfert des compétences eau et assainissement des communes vers les intercommunalités, prévu au 1er janvier 2026, restent problématiques. Les élus contestent non pas la mutualisation, mais l'obligation de transfert. (M. Jean-Michel Arnaud acquiesce.)

Beaucoup de communes se sont déjà organisées en syndicats pour partager la ressource en eau ou mutualiser les réseaux.

Lors de la présentation du plan Eau, le 30 mars 2023, le Président de la République a plaidé pour un « modèle pluriel et différencié », laissant les élus dans le flou. Comment cette déclaration se traduira-t-elle concrètement ? Le transfert doit avoir lieu dans moins de 30 mois. Des possibilités de différenciation seront-elles prévues ? Le retour à un transfert optionnel est-il envisagé ? (M. Jean-Michel Arnaud applaudit.)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - L'échelon communautaire a été retenu pour remédier aux difficultés engendrées par l'émiettement des services. La mutualisation facilite la modernisation des réseaux.

À plusieurs reprises, le législateur et le Gouvernement ont apporté des souplesses, comme dans la loi Engagement et proximité avec l'activation d'une minorité de blocage, entre autres.

Parfois, une gestion de l'approvisionnement en eau dépassant les frontières de l'intercommunalité peut se révéler pertinente.

Sans revenir sur la répartition des compétences, le Gouvernement est favorable à l'introduction de nouvelles souplesses : premièrement, en étendant le maintien par délégation des syndicats infracommunautaires à tous ceux qui existaient au 1er janvier 2026 ; deuxièmement, en facilitant l'intervention des départements, qui pourraient adhérer à des syndicats mixtes ouverts ou recevoir la délégation de la maîtrise d'ouvrage par un EPCI à fiscalité propre ou un syndicat mixte.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Le Sénat a pris sa part dans les assouplissements proposés. Il faut faire confiance aux élus sur le terrain.

Absence de protection fonctionnelle pour les conseillers municipaux sans délégation

M. Jean-Michel Arnaud .  - Les agressions contre les élus municipaux ont augmenté de 15 % en un an, selon l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF).

Le code général des collectivités territoriales prévoit une protection fonctionnelle pour les maires et les élus ayant reçu une délégation. Mais les conseillers municipaux sans délégation ne sont pas éligibles à ce dispositif. Lors de l'examen de la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, les amendements visant à l'étendre à tous les élus ont été déclarés irrecevables : c'est alors le juge qui doit se prononcer sur l'application du mécanisme.

Or le Conseil d'État, dans un arrêt de 2011, a consacré, en tant que principe général du droit, l'octroi de la protection fonctionnelle à tout agent public. Dès lors, le Gouvernement l'accordera-t-il à tous les conseillers municipaux ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Les élus municipaux bénéficient d'un régime de protection qui s'apparente à la protection fonctionnelle applicable aux agents publics.

Celui-ci s'applique lorsque l'élu fait l'objet de poursuites judiciaires civiles ou pénales pour des faits qui n'ont pas le caractère de faute détachable de l'exercice de ses fonctions. Pour les élus des conseils municipaux, la protection fonctionnelle relève de l'État lorsque l'élu agit en qualité d'agent de l'État. Cette protection peut également être accordée aux conjoints, enfants et ascendants directs des élus décédés dans l'exercice ou du fait de leurs fonctions.

Comme je m'y suis engagée lors de l'examen de la proposition de loi, l'extension de la protection fonctionnelle sera abordée lors de la navette parlementaire.

En l'état actuel du droit, celle-ci doit faire l'objet d'une délibération expresse de l'organe délibérant. Toutefois, le Gouvernement soutient la proposition de loi sur la sécurité des élus locaux et la protection des maires, qui prévoit, entre autres, de rendre son activation automatique.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Merci pour votre réponse, mais cette extension ne vise que les élus ayant reçu une délégation, non les conseillers municipaux de base. Le Gouvernement doit régler ce problème.

Financement des services express régionaux métropolitains

M. Jean-Pierre Corbisez .  - Le Gouvernement a fait du train l'un des leviers de sa politique de transition énergétique. Il y a un an, le Président de la République annonçait la relance des projets de services express régionaux métropolitains (Serm). Je me réjouis que l'étoile ferroviaire de Lille en fasse partie.

Néanmoins, le compte n'y est pas, loin de là : alors que le projet lillois coûterait entre 7 et 9 milliards d'euros, le montant des subventions annoncé par le Gouvernement - 700 millions d'euros - laisse songeur : au mieux, seules les études seront financées.

Dans ces conditions, la région ne pourra pas boucler à elle seule le montage financier. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour soutenir ce projet indispensable à ce territoire ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Le Gouvernement offre la possibilité aux aires urbaines qui le souhaitent de se doter de Serm.

L'objectif est ambitieux : doubler la part modale du transport ferroviaire dans les déplacements du quotidien autour des grands pôles urbains, à la fois pour améliorer la desserte des zones périurbaines et participer à la décarbonation des mobilités.

L'élaboration des projets locaux suppose une démarche collective, réunissant tous les acteurs concernés. Tel est l'objet de la proposition de loi de Jean-Marc Zulesi, votée par le Sénat le 23 octobre dernier.

L'État est au rendez-vous en matière de financement. Le plan de relance a consacré 30 millions d'euros pour engager les premières études. L'État allouera 800 millions d'euros à un volet spécifique des contrats de plan État-région (CPER) - les régions pourront abonder le budget à parité. Si elles le souhaitent, ces dernières pourront créer des financements innovants, tels que des recettes affectées aux projets.

M. Jean-Pierre Corbisez.  - Mme la Première ministre a annoncé un plan doté de 100 milliards d'euros. Or vous parlez de 30 millions !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Ce montant porte uniquement sur les études !

Demande de logement social

Mme Sylviane Noël .  - Un décret du 29 mars 2023 a modifié le seuil de tension sur la demande de logement social mesuré à l'échelle des territoires concernés par la loi SRU.

Ainsi, un objectif de 25 % de logements sociaux - contre 20 % auparavant - s'impose désormais à Marignier, en Haute-Savoie ; sa pénalité passe de 40 000 à 85 000 euros.

Cette punition est insupportable à plusieurs titres. Financièrement, d'abord, car la pénalité intervient rétroactivement après le vote du budget. Juridiquement, ensuite, car elle tombe comme un couperet, sans aucun préavis. Humainement, enfin, car elle sanctionne des élus qui ne voient pas leurs efforts récompensés.

Dans ce domaine comme dans d'autres, l'État ne ferait-il pas mieux de manier la carotte plutôt que le bâton ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Le décret du 28 avril 2023, qui a fait l'objet d'une concertation avec les acteurs, a fixé le seuil de tension à quatre demandes pour une attribution.

Le Gouvernement a choisi la stabilité en reconduisant le seuil préexistant. Un taux de 20 % de logements sociaux - contre 25 % dans le droit commun - est appliqué aux communes où le taux de tension est inférieur à ce seuil.

Dès lors, la hausse du taux cible attendu de la commune de Marignier s'explique non par un changement réglementaire, mais uniquement par la hausse de la tension observée dans l'unité urbaine de Cluses. En trois ans, le taux est passé de 3,9 à 4,5 demandes pour une attribution. Ce niveau de tension résulte d'une méthode de calcul prenant en compte la situation particulière liée à l'épidémie de covid-19.

Le relèvement de l'objectif est lié à l'intensification des enjeux de production de logements sociaux sur ce territoire. La commune conserve la possibilité de déduire de son prélèvement annuel ses dépenses engagées en faveur du développement d'une offre sociale.

Mme Sylviane Noël.  - Votre réponse me laisse sur ma faim. Je vous ai interrogée sur des faits précis et vous me répondez en termes techniques.

Chauffage au bois

M. Christian Klinger .  - Le projet gouvernemental de planification écologique ambitionne de faire de la France l'une des premières nations à sortir des énergies fossiles. Le chauffage domestique au bois, auquel 7,2 millions de ménages français ont recours, s'inscrit dans cette ambition. Or vous envisagez de réduire drastiquement les aides à partir de 2024. Une partie des ménages modestes et ruraux risque d'être privée d'un accès à une source de chauffage compétitive et efficace pour décarboner. La filière, composée de nombreuses PME et ETI implantées dans nos territoires, sera pénalisée. Avez-vous bien mesuré toutes les conséquences de votre réforme ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Le Gouvernement prépare une refonte de MaPrimeRénov' pour le 1er janvier 2024, afin de multiplier les rénovations performantes et d'accélérer la dynamique de décarbonation du chauffage. Des priorités d'utilisation de la biomasse - dont la ressource est limitée - ont été fixées. Les paramètres des aides par geste pourraient être ajustés pour soutenir l'installation d'équipements bois lorsqu'il s'agit de la solution de référence. Tout recentrage sera progressif afin de donner de la visibilité à la filière. L'installation d'un chauffage au bois dans le cadre d'une rénovation d'ampleur continuera à bénéficier de MaPrimeRénov'. Ces nouvelles modalités seront connues dans les prochains mois.

M. Christian Klinger.  - Le bois de chauffage est issu d'une ressource locale, durable et responsable. Ne mettez pas tous vos oeufs dans le même panier et soutenez la filière bois.

Sécurité des élus locaux

Mme Marie Mercier .  - Le 10 octobre 2023, le Sénat a adopté la proposition de loi du président Buffet renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires.

L'agression d'un maire est une attaque contre la République.

En Saône-et-Loire, le maire de Mancey a démissionné et des menaces graves ont été prononcées contre les maires de Cheilly-lès-Maranges, Montcenis, Senozan et bien d'autres encore.

Il y a quelques jours, un maire a dû renoncer à présenter son projet d'agrandissement de la zone de loisirs devant trente administrés, tant ceux-ci étaient agressifs. L'équipe municipale est bouleversée : pourquoi tant de violence pour une aire de jeux ? Il n'y a plus de respect de la fonction.

Quand cette proposition de loi sera-t-elle inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, promulguée et appliquée ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Nous avons engagé un travail collectif sur la sécurité des élus. Le Gouvernement s'est engagé à soutenir cette proposition de loi qui comporte des avancées majeures comme l'amélioration de la prise en charge financière de la protection des élus et l'alourdissement des sanctions pénales. J'ai également présenté en mai dernier un « pack sécurité » et mis en place un centre d'analyse et de lutte contre les atteintes aux élus : à chaque menace, sa prévention.

En juillet 2023, un plan national a été présenté, construit autour de quatre axes : la protection juridique et fonctionnelle, la sécurité physique et l'accompagnement psychologique, la réponse judiciaire et les relations maires-parquets. Les évolutions législatives nécessaires sont dans le texte du Sénat. Je fais tout pour qu'il soit inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale avant la fin de l'année.

Mme Marie Mercier.  - Une proposition de loi a aussi des limites : les amendes restent impayées, les plaintes sont classées sans suite... Il faut traiter les causes et appliquer les lois existantes. Des administrés de tous âges et de tous milieux ne respectent plus les règles. Les élus sont inquiets de ce recul de l'ordre et de l'autorité.

Directive sur les émissions industrielles

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Bernard Buis souhaitait interroger le Gouvernement sur le projet de révision de la directive relative aux émissions industrielles.

Le 5 avril 2022, la Commission européenne a présenté un projet de révision qui intègre les élevages de volailles, porcins et bovins à partir d'un certain seuil. La position française vise à tenir compte des contraintes financières pour la profession agricole.

Le 10 juillet 2023, le Parlement européen a voté contre le projet de la Commission. C'est un message de soutien aux filières agricoles et nullement une mauvaise nouvelle pour la transition écologique : élevage et écologie ne doivent pas être opposés sans nuance.

Les négociations dans le cadre du trilogue européen se poursuivent-elles ? Quelles en seront les prochaines étapes ? Comment le Gouvernement compte-t-il protéger nos éleveurs ? Ceux-ci peuvent-ils être sereins ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - L'inclusion des activités d'élevage dans le champ de la directive n'a de sens qu'en rappelant que l'élevage a de l'avenir en France et qu'il détient une partie de la solution face au changement climatique. Le ministre de l'agriculture a annoncé un plan de soutien. La France défend l'élevage au niveau européen et restreint au maximum son inclusion dans le champ de la directive. Cela a porté ses fruits, avec des avancées dans l'orientation générale du Conseil du 16 mars : rehaussement des seuils, exclusion des élevages extensifs, etc. La France a soutenu ce compromis, en insistant sur la prise en compte des élevages durables.

Le mandat du Parlement du 11 juillet propose un statu quo. Le sujet devrait être abordé le 28 novembre dans le cadre des trilogues. Vous pouvez rassurer le sénateur Buis : les négociations sont bien en cours. La France estime que le vote du Parlement doit inciter le Conseil à desserrer la contrainte sur les élevages.

Règlement européen sur les produits phytosanitaires et vignobles français

Mme Pascale Gruny .  - Depuis plusieurs mois, la proposition de règlement européen relatif à l'utilisation durable des pesticides inquiète nos viticulteurs. Ce règlement, en cours de négociation, vise à imposer des mesures contraignantes aux États pour réduire de 50 % l'utilisation des produits phytosanitaires d'ici 2030. Il prévoit notamment une interdiction absolue de traitement dans et à proximité de « zones sensibles ». Cela pourrait conduire à l'abandon pur et simple de certaines parcelles du vignoble champenois qui compte plus de 1 500 hectares en zone Natura 2 000 et plus de 1 000 hectares en zone de non-traitement.

Les vignes de l'AOC Champagne sont très sensibles aux maladies : on ne peut pas se passer des traitements. Il est indispensable de laisser aux vignerons le temps de trouver des alternatives.

Quelle position défendrez-vous à Bruxelles pour préserver les intérêts de nos viticulteurs et protéger notre souveraineté alimentaire ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Ce texte, en cours de négociation, est encore susceptible d'évoluer.

La France soutient l'idée d'un règlement sur l'utilisation durable des produits phytopharmaceutiques. Cette initiative porte la transition à la bonne échelle, avec une protection commune des consommateurs européens, sans distorsion entre producteurs européens. Néanmoins, des évolutions sont nécessaires. L'étude d'impact complémentaire ne documente pas suffisamment les baisses de production.

Richesse, emplois, paysages, biodiversité : la viticulture est essentielle dans de nombreux territoires. Ce projet de règlement doit s'accompagner du développement d'alternatives fiables. Nous y travaillons.

Mme Pascale Gruny.  - Les intérêts français passent trop souvent à la trappe, quand nos concurrents européens sont autrement plus efficaces. Nous attendons de la fermeté !

Les produits phytosanitaires sont aussi des médicaments pour les plantes. Tant que la recherche n'aura pas avancé, ne pénalisons pas nos viticulteurs. Dans le Bordelais, on arrache les vignes...

Dégâts du mildiou

M. Alain Duffourg .  - Après les calamités de 2021 et 2022, les vignobles gersois ont subi cette année une attaque de mildiou sans précédent. Le ministre de l'agriculture a pu le constater sur place le 2 octobre dernier. Les pertes sont estimées à 50 % voire 80 % de la production.

En cas de calamité agricole, les pertes sont assumées pour une part par les agriculteurs, pour une autre par les assureurs, et les deux tiers restants par la solidarité nationale. Mais les assurances ne veulent pas payer. C'est pourquoi les organisations agricoles demandent la création d'un fonds d'urgence pour éponger quelque 23 millions d'euros de pertes. Une ligne budgétaire est-elle prévue ? Quand les agriculteurs seront-ils indemnisés ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Le Gouvernement soutient les viticulteurs. Le ministre de l'agriculture s'est immédiatement rendu sur le terrain, en Gironde, en Haute-Garonne, dans le Gers, l'Aude et les Pyrénées-Orientales. Les conséquences agronomiques ne seront connues avec précision qu'en 2024, après récolte et commercialisation. L'assurance récolte n'indemnise que des pertes directement liées à l'aléa climatique et non les conséquences sanitaires de l'aléa.

La situation de certains viticulteurs risque d'être très difficile dès 2024. Nous les soutiendrons avec des dispositifs de droit commun - dégrèvement de taxe foncière sur le non-bâti, report de cotisations fiscales et sociales, prise en charge de cotisations sociales - ou d'autres mesures spécifiques en cas de difficultés de trésorerie.

Financement des Maec

M. Daniel Salmon .  - Malgré l'ambition environnementale affichée par le Gouvernement via la planification écologique, les moyens ne sont pas au rendez-vous. Le financement des mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec), pourtant essentielles à la transition écologique, est dans l'impasse. En Bretagne, il manque 53 millions d'euros pour répondre aux demandes des agriculteurs engagés dans le dispositif. Au niveau national, il manque plusieurs centaines de millions d'euros ! Les agriculteurs qui se sont engagés volontairement vont se retrouver au bord de la route.

Il y a un risque de rupture de confiance, alors que la transition agricole urge. Hier, Marc Fesneau a annoncé travailler avec les agences de l'eau pour qu'elles prennent à leur compte une part du financement des Maec. Cela risque d'être insuffisant. Madame la ministre, pouvez-vous assurer aux agriculteurs engagés dans le dispositif Maec qu'ils seront accompagnés et obtiendront bien les aides prévues ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - L'enveloppe française des Maec s'élevait à 255 millions d'euros par an pour la programmation 2015-2020 de la PAC. En 2021, le Gouvernement a prévu une enveloppe annuelle de 260 millions d'euros pour 2023-2027, en légère augmentation. Sur ce montant, 40 millions d'euros ont été confiés aux régions pour les Maec non surfaciques, dont 12,5 millions pour la région Bretagne. L'enveloppe restante dédiée aux Maec surfaciques gérées par l'État a été prérépartie entre les territoires.

Le Gouvernement engagera dès 2023 la majorité des crédits de la programmation 2023-2027, dont 87 millions d'euros dévolus à la région Bretagne. La somme des crédits dédiés aux Maec est donc semblable à celle qui a été engagée pour la période 2015-2020, et nous faisons le point sur les participations des autres financeurs, notamment les agences de l'eau.

M. Daniel Salmon.  - Vous me parlez de l'argent qui a été versé, je vous parle de celui qui manque ! La signature de l'État est engagée. Des agriculteurs se sont engagés volontairement dans le dispositif, ce n'est pas pour qu'on les abandonne. Sans compter que les aides à l'hectare pour l'agriculture biologique sont passées de 110  à 92 euros par an.

Avance des aides de la PAC

M. Pierre Cuypers .  - Le 18 octobre dernier, j'ai attiré l'attention du ministre de l'agriculture sur la suspension du paiement de l'avance des aides de la PAC pour les agriculteurs de plus de 67 ans, due, d'après la direction départementale des territoires (DDT), aux difficultés de déploiement de certains outils d'instruction.

Plusieurs milliers de dossiers, dont 200 en Seine-et-Marne, sont en attente tant que l'Agence de services et de paiement (ASP) n'a pas réussi à croiser les données des caisses de retraite. Sous prétexte de problèmes informatiques, l'État pratique donc la rétention de millions d'euros d'aides de la PAC, au mépris des exploitations concernées, qui font face à des échéances financières et bancaires importantes. Quelle solution le ministère de l'agriculture propose-t-il pour régler cette situation inadmissible dans les plus brefs délais ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Depuis l'entrée en vigueur de la réforme de la PAC en 1993, la France paie des avances massives sur les paiements directs à la surface des aides couplées animales et de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), dès le premier jour autorisé par la réglementation, soit le 16 octobre. Elle est le seul État à procéder ainsi. Cette année, alors qu'entre en vigueur une réforme profonde de la PAC, Marc Fesneau a tenu son engagement d'un maintien du calendrier habituel de paiement des avances. Ainsi, 84,4 % des agriculteurs français ont reçu un paiement entre le 16 et le 18 octobre, et 89 % dans votre département.

Un agriculteur de plus de 60 ans n'est éligible aux aides de la PAC que s'il ne bénéficie pas d'une pension de retraite, d'où un contrôle spécifique qui suppose de croiser les données avec celles des caisses de retraite. L'une de ces dernières a rencontré des difficultés pour fournir les données dans les temps, mais ce problème est désormais résolu, et le paiement interviendra dans les tout prochains jours.

M. Pierre Cuypers.  - Qu'entendez-vous par « tout prochains jours » : huit jours, quinze jours ? Les aides de la PAC font partie du fonctionnement économique des exploitations. Les agriculteurs planifient des remboursements, pour leurs fournisseurs notamment, à partir du 16 octobre, comptant sur le versement des avances dans les temps, et ce quel que soit leur âge. Or ils ne peuvent tenir leurs engagements.

Fixation du prix de l'énergie sur le marché européen

M. Pierre-Jean Verzelen .  - En France, certaines entreprises sont asphyxiées par la hausse des prix de l'énergie. Nous avons pourtant un avantage compétitif historique : le nucléaire, l'énergie la plus propre et la moins chère. La France a en outre retrouvé son autosuffisance énergétique. Or les entreprises n'en voient pas la couleur, en raison du maintien, au niveau européen, de l'indexation du prix de l'électricité sur celui du gaz. Les annonces faites à ce sujet, à la suite notamment du récent séminaire gouvernemental franco-allemand, manquaient de clarté. Où en est-on réellement du changement du mécanisme de fixation du prix de l'énergie sur le marché européen ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Grâce à Agnès Pannier-Runacher, le conseil des ministres de l'énergie du 17 octobre dernier a adopté un accord européen. C'est une victoire pour l'Europe ; une victoire pour répondre à l'inflation et à la concurrence chinoise ; une victoire pour la France, qui assoit ainsi le principe du traitement identique entre le nucléaire et les énergies renouvelables ; une victoire pour le climat, car cet accord facilite les investissements dans la production d'énergies décarbonées. Cela permettra de stabiliser les prix de long terme et de protéger les consommateurs français.

Cet accord vient déconnecter les prix du gaz et ceux de l'électricité pour empêcher les prix de s'envoler en cas de crise sur le marché des énergies fossiles. Nous donnons ainsi de la visibilité aux industriels et aux consommateurs et sécurisons nos approvisionnements énergétiques grâce à la solidarité européenne. Comme l'a dit le Président de la République, nous reprenons le contrôle sur les prix de l'électricité.

Une sortie du marché européen, prônée par certains, aurait conduit à augmenter les factures des Français et mis en difficulté nos industries et notre sécurité d'approvisionnement. Une réforme était cependant nécessaire. C'est tout le travail qu'Agnès Pannier-Runacher a mené avec l'Alliance du nucléaire et la Commission européenne, pour la protection de nos intérêts. La finalisation du compromis avec le Parlement européen est attendue pour la fin 2023.

M. Pierre-Jean Verzelen.  - Une sortie du marché européen n'aurait peut-être pas été si catastrophique : l'Espagne et le Portugal ne s'en portent pas plus mal. Je vous encourage à annoncer les avancées que vous venez d'indiquer aux organismes professionnels, entreprises et commerçants, qui ne semblent pas en ressentir les effets.

Bénéfice du fonds chaleur territorial pour les écoles privées

M. Stéphane Sautarel .  - La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a institué le fonds chaleur territorial, pour augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation finale.

Une école primaire privée du Cantal a souhaité en bénéficier afin de remplacer une chaudière au fioul par une chaudière à granulés. Or l'article L. 151-3 du code de l'éducation, selon la jurisprudence constante du Conseil d'État, dispose que toute aide, financière ou matérielle, des collectivités publiques à ces établissements est prohibée. De plus, la loi du 15 mars 1850, dite loi Falloux, encadre l'intervention des collectivités.

Au regard de ces dispositions, confirmez-vous que les établissements scolaires privés ne peuvent bénéficier du fonds chaleur territorial ? Envisagez-vous de faire évoluer le cadre juridique afin que ces établissements puissent contribuer à l'atteinte de nos objectifs énergétiques ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Nous devons redoubler d'efforts en matière de sobriété énergétique afin d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Quelque 40 000 établissements publics du premier degré devront être rénovés d'ici dix ans. Un grand plan de rénovation énergétique des écoles élémentaires a été annoncé par le Président de la République le 23 avril 2023, impliquant la mobilisation de nouveaux outils et le renforcement des outils existants, dont le fonds chaleur territorial, pour soutenir les collectivités dans la rénovation de leur bâti.

Dans une décision du 14 avril 1999, le Conseil d'État a considéré qu'une aide à l'investissement ne pouvait être accordée par une commune à une école primaire privée. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) s'aligne sur cette jurisprudence. Toutefois, au vu de l'importance de l'enjeu, nos services sont mobilisés pour étudier une possible actualisation de cette interprétation.

M. Stéphane Sautarel.  - Rien ne justifie que les établissements privés ne soient pas traités comme les autres sur ce point. J'espère que les textes seront rapidement adaptés.

Difficultés de recrutement dans le secteur du soin à domicile

M. Fabien Genet .  - Une récente enquête auprès des directeurs de structures de soins et d'aide à domicile a révélé les importantes difficultés de recrutement rencontrées dans ce secteur. Près d'une demande de prise en charge sur dix ne pourrait être honorée, une prise en charge sur quatre ne pourrait l'être que partiellement.

Or le maillage territorial des professionnels du soin et de l'aide à domicile, qui se substitue au placement en Ehpad, joue un rôle clé en milieu rural. Les difficultés de recrutement se font sentir partout : en moyenne, un poste sur deux n'a pu être pourvu en 2022. Le manque de reconnaissance salariale explique certainement cette pénurie de vocations. Il faut agir pour renforcer l'attractivité du secteur par l'amélioration des conditions de travail, une meilleure prise en charge des indemnités kilométriques et une meilleure tarification des services. Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - La ministre Aurore Bergé affirme son soutien à la valorisation des métiers de l'aide aux personnes âgées. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 double les fonds alloués, avec l'ambition de créer 50 000 postes supplémentaires dans les Ehpad.

Concernant l'aide à domicile, le Gouvernement a budgété 1 milliard d'euros d'ici la fin du quinquennat. La proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir a fixé une feuille de route, qui apportera des solutions concrètes : mise en place d'une carte professionnelle ; généralisation des flottes de véhicules de service ; refonte du financement à l'heure pour répondre aux problèmes de temps partiels subis, d'horaires fractionnés et de plages non rémunérées ; développement de l'accès à la formation professionnelle.

M. Fabien Genet.  - Une vraie mobilisation s'impose pour faire connaître et reconnaître ces métiers et les rendre plus attractifs. Il y va de la prise en compte du vieillissement de la population, de la soutenabilité financière du système, de la dignité due aux seniors et de la solidarité intergénérationnelle.

Formation des médecins maîtres de stage

M. Jean-Luc Fichet .  - À mon tour de féliciter Mme la ministre pour sa polyvalence, même si je regrette l'absence du ministre de la santé...

Les 12 000 généralistes maîtres de stage sont précieux pour accompagner les jeunes médecins, en particulier dans les territoires qui manquent cruellement de professionnels de santé. Avec la quatrième année d'internat en médecine générale, leur nombre doit mécaniquement augmenter. Or l'Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) réduit les possibilités de formation, ce qui limite le nombre de médecins pouvant être formés à la maîtrise de stage.

Un rapport conjoint de l'Igas et de l'Iger préconise de promouvoir la maîtrise de stage universitaire en maintenant, autant que de besoin, la formation « hors quota » lorsqu'elle est indemnisée par l'ANDPC.

Les maîtres de stage s'inquiètent du nombre de formations et du volume horaire dédié.

Comment comptez-vous à la fois renforcer l'accès des médecins généralistes aux formations de maîtrise de stages, et les rassurer quant à votre stratégie d'augmentation du nombre de médecins dans les territoires sous-dotés ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - La lutte contre la désertification médicale est une priorité du Gouvernement, en lien avec les territoires et les professionnels de santé. Nous favorisons les stages en ambulatoire et accompagnons la mise en oeuvre de la quatrième année d'internat en médecine générale, avec 13 000 praticiens formés depuis 2017 à la maîtrise de stage universitaire.

Nous voulons aller plus loin : dans l'offre de formation, en mettant en place un nouveau cadre pédagogique de la maîtrise de stage universitaire d'ici fin 2023, qui définira des objectifs spécifiques à l'accompagnement des étudiants de deuxième et troisième cycles ; dans l'accompagnement financier, avec une enveloppe dédiée de 41,9 millions d'euros sur la période 2022-2027.

Nous favorisons l'exercice coordonné, avec un objectif de 4 000 maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) en 2027 ; nous faisons sauter un verrou en permettant à la MSP d'être juridiquement maître de stage.

Nous avançons sur le maillage par les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), en visant une couverture totale fin 2024. Des territoires qui se coordonnent mieux, c'est autant d'opportunités de stage en plus !

M. Jean-Luc Fichet.  - Votre réponse ne me satisfait pas. La loi a créé les médecins juniors, et prévu qu'ils soient accompagnés par des maîtres de stage. Il faut donc en former, et en nombre !

Dispositif Rézone

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Je salue la présence en tribune du conseil municipal d'Escolives-Sainte-Camille, emmené par son maire : ils sont ici chez eux, dans la maison des élus locaux.

L'outil Rézone permet aux professionnels de santé de savoir de quelles aides ils peuvent bénéficier. Le zonage distingue les zones d'action prioritaire, éligibles à de nombreux dispositifs incitatifs, et les zones d'action complémentaire, offrant une palette d'aides beaucoup plus restreinte.

Or certains territoires pourtant sous-denses en termes de démographie médicale se trouvent catégorisés en zone d'action complémentaire. C'est le cas de Coulanges-sur-Yonne, où la non-éligibilité à certaines aides découlant de ce zonage conduit un médecin à remettre en cause son projet d'installation...

Comment ce zonage est-il établi ? Comment peut-on le réviser ? Quelles sont les dérogations à la main des ARS ou du ministère pour accompagner un médecin souhaitant s'établir en zone d'action complémentaire ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Le zonage a été établi par les ARS sur la base d'une méthodologie nationale, revue en 2021, après concertation avec les parties prenantes, pour mieux prendre en compte les spécificités locales.

Rézone est un outil complémentaire d'aide à l'installation des médecins ; il est révisé tous les trois ans, mais l'arrêté régional peut être modifié par l'ARS afin d'ajuster les aides aux besoins du territoire. Ainsi, le zonage dont dépend Coulanges-sur-Yonne pourra être modifié jusqu'au mois de juillet 2024. Dans l'Yonne, une organisation tripartite - CPAM, ARS, conseil départemental - examine mensuellement les projets d'installation et propose un accompagnement personnalisé. Plusieurs leviers peuvent être mobilisés : aide complémentaire du conseil départemental, exonération sur les bénéfices en ZRR, appui d'un assistant médical, intégration au sein d'un exercice coordonné, accompagnement à l'accueil de la famille du praticien.

Nous sommes mobilisés pour favoriser l'égal accès aux soins. C'est avec les professionnels eux-mêmes et avec les acteurs locaux, dont les élus, que nous réussirons à relever les défis.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Je retiens que le zonage Rézone peut être modifié par l'ARS jusqu'en 2024, et que les aides sont mobilisables jusqu'à douze mois après l'installation. Ce sera précieux pour Coulanges. Merci de l'attention que vous portez à l'Yonne, madame la ministre !

Urgences de l'hôpital de Manosque

M. Jean-Yves Roux .  - Il y a un an, je vous alertais déjà sur les grandes difficultés des urgences de l'hôpital de Manosque. En 2022, 28 jours de fermeture de nuit durant l'été. Depuis le début 2023, les urgences ont fermé 180 nuits et 18 journées, et seuls 39 % sont des jours régulés. En novembre, aucune urgence de nuit jusqu'au 15 du mois ; des ouvertures de jour sont planifiées - sauf les 4, 5, 8 et 13. Espérons que l'usager retiendra ! Quant au centre Vista qui vient d'ouvrir à proximité des urgences, il annonce déjà ne pas avoir vocation à les remplacer.

Vous nous répondrez que nos concitoyens doivent appeler le 15 - ce que tous les élus leur conseillent depuis des années. Mais la situation continue de se dégrader. Toute la chaîne de premier secours et recours souffre désormais de cette dégradation.

M. Braun nous annonçait le 1er septembre 2022 une série de mesures censées produire des effets : la loi Rist, la prime de solidarité territoriale adaptée, des dispositifs innovants d'aide médicale d'urgence, des appels à candidatures. Mais le service public hospitalier s'enfonce dans la crise.

Le provisoire - qui change tout le temps - va-t-il devenir la norme dans nos territoires ruraux ? Cette situation use les personnels de l'hôpital, les premiers secours ainsi que les pompiers, fragilise les patients qui trouvent porte fermée, et ne permet pas de mener des politiques de recrutement attractives.

Comptez-vous conforter rapidement les urgences de Manosque ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Sans nier les difficultés, réelles, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour renforcer le recrutement et l'attractivité du centre hospitalier de Manosque. Malgré des tensions sur les ressources humaines, la prise en charge des patients repose sur plusieurs leviers : présence à proximité de médecins correspondants du Samu ; protocole de fonctionnement restreint lorsque la situation nécessite une régulation, avec maintien de l'accueil et de la prise en charge des urgences vitales, le plateau technique étant disponible 24 heures sur 24 ; maison médicale de garde assurant la prise en charge les dimanches et veilles de jours fériés ; véhicule léger infirmier sur le secteur de Castellane ; déploiement d'une équipe dédiée au transport infirmier interhôpital.

Enfin, nous finançons un poste de chargé de mission pour travailler au recrutement de professionnels de santé, une campagne de communication, des vidéos promotionnelles pour diffuser les offres d'emploi. Un rendez-vous est prévu en novembre avec le cabinet d'Aurélien Rousseau, auquel vous participerez. Tout cela montre bien l'engagement du ministère dans la durée.

Arrêt de travail d'un salarié multi-employeurs particuliers

M. Alain Marc .  - Un salarié travaillant chez plusieurs particuliers a du mal à obtenir le paiement complet des indemnités journalières et des compléments de salaire qui lui sont dus à la suite d'un arrêt de travail.

Il lui faut fournir une copie de l'arrêt de travail de chaque employeur. Or les particuliers employeurs, souvent âgés, ne connaissent pas toujours leurs obligations ou ne les remplissent pas correctement.

La CPAM doit déterminer, employeur par employeur, le montant des indemnités journalières au regard de la rémunération que chacun a versée au salarié au cours des trois derniers mois. Ce montant doit être communiqué à la caisse de prévoyance des salariés de chaque particulier employeur afin qu'un complément de salaire soit calculé et reversé au salarié.

Les CPAM pourront-elles récupérer directement les informations de la déclaration sociale nominative afin de calculer le montant des indemnités journalières, employeur par employeur, et effectuer ainsi plus rapidement un versement global au salarié ? Pourront-elles remettre en un seul envoi à la caisse de prévoyance des salariés du particulier employeur l'intégralité du dossier « complément de salaire » pour chacun des employeurs, le complément de salaire étant ensuite globalisé pour un paiement direct et unique au salarié ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - En effet, la procédure applicable aux salariés de particuliers employeurs est lourde, et repose largement sur le salarié. En théorie, les particuliers employeurs devraient compléter l'attestation d'emploi, comme tout employeur de droit commun. Dans les faits, c'est le salarié qui fournit à la CPAM l'ensemble des bulletins de ses différents employeurs sur la période de référence.

Le Gouvernement s'est attaché à simplifier ces démarches. Depuis 2022, il suffit d'adresser à l'organisme d'assurance maladie une attestation sur l'honneur ainsi que les volets 1 et 2 de l'arrêt de travail, ce qui permet un versement plus rapide des indemnités journalières.

Par ailleurs, la gestion du régime de prévoyance des particuliers employeurs a été confiée à l'Institution de retraite complémentaire des employés de maison (Ircem), qui bénéficie de la télétransmission des décomptes d'indemnités journalières, ce qui dispense les salariés de toute démarche supplémentaire et leur permet de percevoir plus rapidement leurs indemnités complémentaires.

M. Alain Marc.  - Merci. Il faudra une évaluation de ces dispositifs, pour s'assurer que ces salariés, dont les revenus sont généralement faibles, perçoivent leurs indemnités au plus vite.

Pérennisation du baluchonnage en faveur des aidants

Mme Jocelyne Guidez .  - Inspirée du Québec et lancée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) en 2019, l'expérimentation du baluchonnage a été prolongée jusqu'à fin 2023. Dans 24 départements, un intervenant unique peut ainsi suppléer l'aidant à domicile sur une période continue allant de 36 heures à six jours consécutifs, ce qui est particulièrement utile pour les personnes ayant besoin de préserver leurs repères. Au 30 juin 2023, 389 baluchonnages avaient été réalisés, permettant 1 598 jours de répit.

À cent jours de la fin de l'expérimentation, j'alerte le Gouvernement : une interruption, même temporaire, ou un prolongement d'une seule année seraient néfastes. Le Gouvernement entend-il la prolonger en garantissant les financements nécessaires ?

M. Loïc Hervé.  - (Applaudissant) Très bonne question !

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Prendre soin de nos aidants est un impératif ; je salue votre engagement et les avancées dans ce domaine de votre proposition de loi. Bien que l'expérience québécoise de Baluchon ne soit pas transposable directement en France, une expérimentation a été lancée en 2019 et prolongée jusqu'à fin 2023. Le relayage à domicile par un seul relayeur est crucial pour les binômes aidant-aidé ayant des besoins spécifiques.

La loi Bien vieillir en cours d'examen à l'Assemblée nationale précisera les éléments indispensables à la protection des salariés. Le ministère des solidarités et de la famille souhaite collaborer avec les branches et les syndicats dans un secteur marqué par un taux élevé d'accidents du travail. Cette offre doit s'inscrire dans un parcours intégrant notamment du soutien psychologique. Ces travaux s'inscrivent dans la prochaine stratégie Aidants.

Mme Jocelyne Guidez.  - Il faut pérenniser cette expérimentation. J'y serai attentive lorsque nous examinerons la proposition de loi Bien vieillir. (M. Loïc Hervé applaudit.)

Conseil conjugal et familial

M. Claude Kern .  - Le Président de la République l'a dit au conseil des ministres du 14 septembre 2022, la prévention des conflits intrafamiliaux et des ruptures des liens familiaux est un sujet d'intérêt pour les enfants, pour les parents - notamment les femmes - et pour l'ensemble de la collectivité.

Or le conseil conjugal et familial n'est toujours pas reconnu, ni financé, alors que la déconjugalité impacte fortement notre société : première cause de pauvreté des femmes et des enfants, première cause du manque de logements, elle change les parcours scolaires, sociaux et de vie des enfants. Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) soulignait dès 2017 son utilité à chaque étape de la vie relationnelle des couples.

Avec un taux de divorce de 45 % et une famille monoparentale sur quatre, la famille, quoique plébiscitée par les Français, est fragilisée. Le conseil conjugal et familial doit être mis à la disposition du grand public au même titre que la médiation familiale. Quelles sont les intentions du Gouvernement à cet égard ? (M. Loïc Hervé applaudit.)

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Les pouvoirs publics doivent effectivement accompagner les couples et les familles après une séparation, notamment conflictuelle, grâce à la médiation familiale ou aux espaces de rencontre. C'est le rôle des établissements d'information, de consultation ou de conseil familial (EICCF) soutenus financièrement par l'État, et devenus en 2018 des espaces vie affective relationnelle et sexuelle (Evars).

Mais il faut faire plus : combien de souffrances pourraient être évitées, pour les parents comme pour les enfants, si les couples étaient aidés à surmonter leurs difficultés ou à se séparer de manière apaisée - sans parler des dépenses évitées pour les collectivités ou pour les couples eux-mêmes ? (M. Loïc Hervé le confirme.) Le ministère des solidarités et des familles proposera donc à la caisse nationale des allocations familiales d'expérimenter des modes de financement pour mieux soutenir les Evars et ce, avant même que les difficultés ne conduisent à une séparation.

Conseils d'administration des CAF

Mme Françoise Gatel .  - La récente loi Plein emploi fait du bloc communal l'autorité organisatrice de la politique d'accueil du jeune enfant. Les élus communaux savent qu'ils devront respecter les injonctions des conseils d'administration des caisses d'allocations familiales (CAF), notamment concernant le taux de remplissage - sans y être jamais associés. Or le Sénat est très attaché au principe selon lequel qui paie décide - ou est à tout le moins associé à la décision. Le Gouvernement entend-il faire une place dans ces conseils d'administration aux principaux financeurs de la politique d'accueil du jeune enfant ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Le Gouvernement se réjouit du compromis trouvé en CMP pour confier aux communes le rôle d'autorité organisatrice de l'accueil du jeune enfant ; sous réserve de son adoption définitive, c'est une reconnaissance méritée de leur engagement dans ce domaine.

Conformément aux engagements pris par le Président de la République et la Première ministre, la compensation de cette nouvelle compétence sera définie à la suite d'une étude des charges induites réalisée en collaboration avec les associations représentatives des élus ; le questionnaire a déjà été construit et validé. La convention d'objectifs et de gestion signée en juillet allouera des moyens ambitieux.

Il sera essentiel d'associer les communes aux décisions nationales de manière appropriée à leur rôle spécifique dans le modèle d'organisation cible.

Mme Françoise Gatel.  - Pour une fois, je ne demande pas d'argent, mais que les élus locaux aient voix au chapitre. Ils ne demandent pas des médailles, mais à être associés à un objectif qu'ils vont financer. Un jour peut-être obtiendrai-je un simple « oui » ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; Mme Sylvie Vermeillet approuve.)

Territoires zéro chômeur de longue durée (I)

Mme Marie-Pierre Richer .  - L'expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée, menée dans 58 départements, a fait ses preuves. Elle est pourtant menacée par l'arrêté du 31 juillet 2023 qui diminue la participation de l'État à son financement - les sommes inscrites dans le projet de loi de finances étant par ailleurs insuffisantes. Dans le Cher, la communauté d'agglomération Bourges Plus a candidaté afin de mettre en place ce dispositif : des moyens ont été engagés et l'entreprise à but d'emploi est prête à accueillir ses premiers salariés. Idem dans les autres territoires habilités, essentiels dans l'accompagnement des personnes durablement privées d'emploi. Avez-vous l'intention de maintenir un financement correspondant aux besoins ?

M. Claude Kern.  - Très bien !

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Le soutien du Gouvernement aux territoires zéro chômeur de longue durée est constant et augmentera en 2024. Cette expérimentation est prolongée jusqu'en 2025 avec l'habilitation de 50 nouveaux territoires ; c'est la plus forte croissance du budget du ministère du travail.

L'État finance à la fois une dotation d'amorçage pour chaque emploi nouvellement créé, un complément temporaire d'équilibre en cas de déséquilibre financier des structures et une contribution au développement de l'emploi, fixée par décret dans une fourchette de 53 à 110 % du Smic. Elle est de 95 %, le même taux qu'avant la crise sanitaire, pour permettre un pilotage budgétaire du dispositif.

Mme Marie-Pierre Richer.  - Je ne sais que penser de votre réponse. Ce dispositif a suscité tant d'espoir... Mme Borne, alors ministre du travail, avait promis qu'aucun territoire ne serait laissé de côté. Le projet porté par Bourges Plus est le seul du département.

Territoires zéro chômeur de longue durée (II)

M. Gilbert-Luc Devinaz .  - Olivier Dussopt a soutenu la semaine dernière que son budget augmentait dans le projet de loi de finances ; soit, mais il manque toujours 20 millions d'euros.

Il a également évoqué une évaluation de l'expérimentation - que la loi prévoit courant 2025. Le Gouvernement serait-il en train de changer les règles du jeu ? En habilitant des territoires, le Gouvernement s'engage à soutenir leur trajectoire d'embauche. Alors que l'Union européenne débloque 23 millions d'euros pour soutenir les pays membres désireux de répliquer l'expérimentation française, comptez-vous permettre à cette expérimentation de se dérouler pleinement, conformément à la loi ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - M. Dussopt regrette de ne pouvoir être là. J'ai déjà répondu à Mme Richer sur l'augmentation du budget. Nous avons à ce jour habilité 58 territoires ; ce budget est en augmentation de 53%, avec 23 millions d'euros supplémentaires.

Nous souhaitons continuer à avancer, mais il appartient à l'association de piloter son budget.

Laisser les territoires habilités créer de nouvelles entreprises à but d'emploi et recruter des salariés limitera nécessairement le nombre de nouveaux territoires. Comme le prévoit la loi, un comité scientifique travaille depuis juin sous la présidence de Yannick L'Horty à l'évaluation de l'expérimentation, et rendra son rapport à la mi-2025 au plus tard.

M. Gilbert-Luc Devinaz.  - Je regrette moi aussi l'absence de M. Dussopt. Villeurbanne compte deux territoires habilités, au coeur des quartiers prioritaires de la politique de la ville. S'ils ne sont pas maintenus, 79 recrutements devront être annulés - touchant des personnes qui se sentent déjà abandonnées par les pouvoirs publics.

La séance est suspendue à midi et demi.

Présidence de M. Mathieu Darnaud, vice-président

La séance est reprise à 14 h 30.