Immigration et intégration (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration.

Demande de réserve

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois.  - La commission des lois souhaite réserver l'examen des amendements portant sur le chapitre II du titre I - soit les articles additionnels avant l'article 3, les articles 3, 4, 5, 6 et 7 et articles additionnels - pour examen après l'article 13, donc potentiellement mercredi en fin d'après-midi ou le soir.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le Gouvernement ne peut s'opposer à l'avis du président de la commission des lois, si cela peut aider la Haute Assemblée à trouver un compromis sur l'article 3. Laissons du temps au temps, dans un esprit de responsabilité et d'ouverture.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Quelle surprise !

La réserve, acceptée par le Gouvernement, est de droit.

Rappel au Règlement

M. Patrick Kanner.  - Sur la base de l'article 44-6 du Règlement, le Gouvernement pouvait s'y opposer...

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Oh non ! Je respecte le Parlement !

M. Patrick Kanner.  - ... mais manifestement, cela l'arrange. C'est avec la partie droite de l'hémicycle que vous voulez avoir un accord, non celle de gauche. (Rires à droite)

Les arbitrages entre les groupes Les Républicains, UC et le Gouvernement vont changer l'ordonnancement du texte, ce que nous regrettons. Cette vérité éclatera à la vue de tous. (Protestations à droite) Chers collègues, vous êtes fébriles... (« Oh ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

Le ministre de l'intérieur avait pourtant indiqué que cet article 3 était de bon sens. Vous allez le tripatouiller... (Marques d'indignation à droite) Cela montre que vous n'avez pas réellement la volonté de régulariser des travailleurs que vous applaudissiez chaque soir à 20 heures pendant le covid ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Difficile de trouver un compromis avec vous, puisque tous les orateurs de gauche ont dit qu'ils voteraient contre le texte ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Patrick Kanner.  - On peut espérer !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - L'ouverture est limitée par l'instinct de survie !

M. Thomas Dossus.  - On a le droit de ne pas vouloir voter l'article 3...

Discussion des articles (Suite)

APRÈS L'ARTICLE 1er D

M. le président.  - Amendement n°248 rectifié bis, présenté par MM. Le Rudulier, Menonville et Frassa, Mme Josende, MM. Rochette et Courtial, Mmes Puissat et V. Boyer, MM. Ravier et Paccaud, Mmes Petrus et Bellurot, MM. Chasseing et Wattebled, Mme Lopez, M. Bruyen, Mmes Micouleau et Belrhiti, M. Genet, Mme Devésa et M. Duffourg.

Après l'article 1er D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant la section 1 du chapitre III du titre II du livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est insérée une section ainsi rédigée :

« Section ...

« Dispositions générales

« Art. L. 423 - ...  -  Lorsqu'un étranger prétend à un titre de séjour pour motif familial prévu au présent chapitre, il doit justifier de ressources stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. À défaut, ce sont les membres du foyer fiscal auquel il sera rattaché en France qui peuvent justifier de ces ressources.

« Pour l'appréciation des ressources mentionnées au premier alinéa, toutes les ressources du demandeur, ou à défaut, des membres de son futur foyer fiscal de rattachement en France, sont prises en compte, indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail.

« Ces ressources doivent atteindre le montant fixé par le décret en Conseil d'État pris en application de l'article L. 434-8 du présent code.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux étrangers entrant dans les catégories prévues aux articles L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et aux enfants étrangers mentionnés à l'article L. 423-12 à la charge de leurs parents. Elles ne sont pas non plus applicables lorsque la personne d'attache en France est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 et L. 821-2 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code. »

Mme Catherine Belrhiti.  - La France comptait début 2022 1,25 million de bénéficiaires de titres de séjour pour motif familial. Notre modèle social généreux est une pompe aspirante pour l'immigration, qui perçoit 20,7 milliards d'euros de prestations non contributives. Nous ne pouvons être le guichet social du monde entier.

Nous voulons donc soumettre la délivrance des titres de séjour pour motif familial à des conditions de ressources.

M. le président.  - Amendement n°353 rectifié, présenté par Mmes Eustache-Brinio et Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Bruyen, Burgoa et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mmes Garnier, F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Le Rudulier, Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mmes Micouleau et Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Perrin, Mmes Pluchet, Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel et Cuypers, Mme Imbert, M. Khalifé et Mme Petrus.

Après l'article 1er D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 423-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« ...° L'étranger justifie de ressources stables, régulières et suffisantes ;

« ...° L'étranger dispose ou disposera à la date de son arrivée en France d'un logement considéré comme normal pour un ménage sans enfant ou deux personnes, vivant dans la même région géographique ;

« ...° L'étranger dispose d'une assurance maladie. 

« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Le regroupement familial est soumis à conditions de ressources ou de logement, mais pas pour les conjoints de Français. Il ne faudrait pas que le poids de leur assimilation pèse sur la communauté nationale, sans compter que cela ouvre la porte à des mariages insincères. On le sait bien, quand on a été élu local.

Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois.  - L'amendement n°248 rectifié bis est très large, donc plus imprécis que l'amendement n°353 rectifié. Retrait du premier au profit du second.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°248 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°353 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°354 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi, Allizard, Anglars, Bacci, Bas, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Retailleau et Reynaud, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux et Cuypers, Mme Imbert, MM. Khalifé et Mandelli et Mme Petrus.

Après l'article 1er D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 432-1, il est inséré un article L. 432-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 432-1-....  -  La délivrance ou le renouvellement d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger :

« 1° N'ayant pas satisfait à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français dans les formes et délais prescrits par l'autorité administrative ;

« 2° Ayant commis les faits qui l'exposent à l'une des condamnations prévues aux articles 441-1 et 441-2 du code pénal ;

« 3° Ayant commis les faits qui l'exposent à l'une des condamnations prévues aux articles 222-34 à 222-40, 224-1-A à 224-1-C, 225-4-1 à 225-4-4, 225-4-7, 225-5 à 225-11, 225-12-1 et 225-12-2, 225-12-5 à 225-12-7, 225-13 à 225-15, au 7° de l'article 311-4 et aux articles 312-12-1 et 321-6-1 du code pénal. » ;

2° Après l'article L. 432-5, il est inséré un article L. 432-5-... ainsi rédigé :

« Art. L. 432-5-.... - Une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle peut, par une décision motivée, être retirée à tout étranger ayant commis les faits qui l'exposent à l'une des condamnations prévues aux articles 441-1 et 441-2 du code pénal. »

M. Roger Karoutchi.  - Cet amendement de bon sens ne pourra recueillir qu'un avis favorable de la part du ministre... (Sourires)

L'administration doit pouvoir refuser de renouveler ou retirer des titres de séjour aux étrangers n'ayant pas respecté une obligation de quitter le territoire français (OQTF), ayant commis une fraude documentaire ou des délits graves comme le trafic de drogue ou le proxénétisme.

M. le président.  - Sous-amendement n°618 à l'amendement n°354 rectifié de M. Karoutchi, présenté par Mme Aeschlimann.

Amendement n° 354

I.  -  Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ... Ayant commis les faits qui l'exposent à l'une des condamnations prévues au livre II du même code lorsqu'ils le sont sur le titulaire d'un mandat électif public, ou toute personne mentionnée aux 4° et 4° bis de l'article 222-12 ou à l'article 222-14-5 dudit code, dans l'exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur. » ;

II.  -  Compléter cet amendement par deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après l'article L. 432-6, il est inséré un article L. 432-6-... ainsi rédigé :

« Art. L. 432-6-.... - Une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle peut, par une décision motivée, être retirée à tout étranger ayant commis les faits qui l'exposent à l'une des condamnations prévues au livre II du même code lorsqu'ils le sont sur le titulaire d'un mandat électif public, ou toute personne mentionnée aux 4° et 4° bis de l'article 222-12 ou à l'article 222-14-5 dudit code, dans l'exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur. »

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Ce sous-amendement étend cette fermeté à tous les étrangers qui s'en prennent à nos policiers, pompiers, élus, soignants, gardiens d'immeubles ou contrôleurs. Nous dénonçons la multiplication des violences contre eux, alors soyons cohérents. Les étrangers coupables de tels actes n'ont rien à faire en France s'ils ne respectent pas ceux qui oeuvrent pour l'intérêt général.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis favorable à l'amendement et au sous-amendement.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable également. Une partie de ce que vous proposez existe déjà, mais nous peaufinerons la rédaction durant la navette. (M. Roger Karoutchi acquiesce.)

J'ai déjà demandé aux préfets de refuser un renouvellement ou un titre de séjour aux étrangers ayant un casier judiciaire ou connus de la police, notamment pour radicalisation.

La fraude documentaire n'est pas du même niveau. Il fut un temps où les OQTF servaient aux étrangers de preuve de leur séjour en France... (M. André Reichardt le déplore.) J'ai demandé que cela cesse.

M. Fabien Gay.  - Monsieur Karoutchi, vous voulez refuser un titre de séjour à un étranger ayant commis une fraude documentaire. Mais de nombreux travailleurs sans papiers, pour régulariser leur situation, utilisent un alias - la carte d'identité d'un parent ou d'un ami - pour ouvrir un compte en banque et travailler. Avec votre amendement, ils ne pourraient plus prétendre à la régularisation.

Je ne sais pas ce qu'il en sera de l'article 3, mais il y a une contradiction entre cet amendement et la régularisation dans les métiers en tension. Nous voterons contre.

M. Roger Karoutchi.  - Je remercie le ministre de son avis favorable. Les circulaires ministérielles vont effectivement dans le bon sens, mais l'inscrire dans la loi rendrait la mesure automatique.

Monsieur Gay, les préfets peuvent régulariser les clandestins au cas par cas : c'est le cas pour 7 000 à 10 000 personnes par an. À ma connaissance, ils n'ont pas commis de fraude documentaire.

Vous parlez d'étrangers en situation irrégulière qui, en plus de cela, commettent une fraude documentaire ? Double faute, double peine ! (M. Fabien Gay proteste.)

M. Guy Benarroche.  - Cet amendement équivaut à l'abandon de toute régularisation, sauf au cas par cas et sur décision arbitraire du préfet. Dans ce cas, inutile de passer des heures sur un projet de loi censé s'appeler « intégration ».

M. Gay a été clair : certaines personnes sont en situation irrégulière et devraient être régularisées. Si on multiplie les obstacles, cela réduit ces possibilités (M. Roger Karoutchi le conteste.) La question est claire : voulons-nous ou non sortir de cette situation ?

M. Alexandre Ouizille.  - Avec la circulaire Valls, la seule passerelle possible entre régularité et irrégularité implique d'utiliser des documents faux, puisqu'il faut présenter des fiches de paie, donc avoir travaillé. Or le travail en situation irrégulière est interdit.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Examinons un problème compliqué avec des idées simples : il est préférable de passer par la voie légale plutôt que par la voie illégale pour obtenir un titre de séjour. Êtes-vous d'accord ? (« Oui ! » à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous n'avons jamais dit le contraire !

M. Alexandre Ouizille.  - Mais nous parlons de ceux qui sont déjà là !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ayons des idées simples. C'est drôle qu'une telle phrase vous fasse sursauter. (Protestations à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Parce que vous dites des bêtises !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Non, j'ai un avis différent de vous - même si je sais que, pour les gens de gauche, cela équivaut à dire des bêtises. (Protestations renouvelées à gauche)

M. Thomas Dossus.  - Vous nous prenez pour des idiots !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Des étrangers se trouvent en situation irrégulière, dont certains sont entrés sciemment de façon irrégulière, en détournant le droit d'asile ou en utilisant un faux état civil. Doivent-ils être régularisés ?

Une voix à gauche.  - Oui.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Non. L'amendement de M. Karoutchi est déjà appliqué dans les faits.

Un autre sujet, même s'il lui est apparenté, est celui des alias. Je pense aux cas des Maliens, dont le pays n'a pas d'état civil et est en guerre... (M. Fabien Gay acquiesce.)

Je n'ai pas compris qu'il y aurait dans l'amendement de M. Karoutchi une opposition à la régularisation de ces personnes qui n'ont pas fourni un faux, mais se sont fait passer pour quelqu'un d'autre...

M. André Reichardt.  - On s'accroche aux branches !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - ... parfois même à la demande de leur patron.

M. Fabien Gay.  - On est d'accord !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Elles ne sont pas responsables de ce qui leur a été imposé - pour parler comme vous - par le rapport de force entre le capital et le travail. L'employeur peut constater qu'un de ses salariés a été embauché sous alias et se tourner vers le préfet pour régulariser, mais pas toujours. Notons que plus de la moitié des employeurs d'étrangers en situation irrégulière sont eux-mêmes étrangers...

D'autres étrangers, enfin, sont en situation irrégulière sans avoir produit de document frauduleux, car ils le sont devenus après avoir été embauchés régulièrement...

M. Karoutchi s'oppose à la fraude, mais aussi aux crimes et délits, si j'ai bien compris... (M. Roger Karoutchi le confirme.)

La fraude ne doit pas donner droit à régularisation. Avis favorable. (M. Pierre Jean Rochette applaudit.)

Le sous-amendement n°618 est adopté.

L'amendement n°354 rectifié bis, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°623, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Après l'article 1er D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa des articles L. 423-6, L. 423-10 et L. 423-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ».

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Cet amendement porte de trois à cinq ans la durée du lien entre un étranger et les membres français de sa famille pour obtenir un titre de séjour pour motif familial.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°623 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°384 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 1er D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 434-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le mot : « internationales » sont insérés les mots : « et l'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire accordée sur le fondement de l'exercice d'une activité professionnelle ».

Mme Mélanie Vogel.  - Cet amendement ouvre le regroupement familial aux personnes ayant accès à la régularisation prévue à l'article 3. Il serait absurde de ne pas le faire, car elles sont présentes sur le territoire depuis au moins trois ans - souvent bien plus ! Pouvoir vivre avec sa famille aide à l'intégration. J'aurais du mal à comprendre que le groupe Les Républicains, qui défend la famille, s'y oppose.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La commission n'a pas lu dans votre amendement ce que vous en dites ! Il n'est pas fait mention de durée de séjour sur le territoire, mais de la possession d'une carte de séjour temporaire - octroyée aux saisonniers, par exemple. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis. C'est le titre de séjour long qui donne droit au regroupement familial. Le titre court prévu par l'article 3, comme tous les titres courts, ne permet pas de faire venir sa famille. C'est du bon sens ! Les personnes concernées ne sont pas là de manière définitive.

L'amendement n°384 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 1er E

M. le président.  - Amendement n°17 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux, Mme Girardin, M. Grosvalet, Mme Pantel et M. Masset.

Supprimer cet article.

M. André Guiol.  - Voici encore un article qui nous éloigne d'un possible consensus sur ce texte, en durcissant l'accès au titre de séjour « étranger malade » et en prévoyant que le traitement ne soit pas couvert par l'assurance maladie.

Cela concerne peu de personnes. De plus, ce serait dommageable pour la santé publique : cela n'empêchera pas des malades de venir, mais reviendrait à laisser sur notre territoire des malades en situation irrégulière, avec toutes les conséquences dangereuses que cela implique. Supprimons cet article inefficace et dangereux.

M. le président.  - Amendement identique n°43 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Ian Brossat.  - Le nombre des titres de séjour « étranger malade » ne cesse de diminuer, mais vous voulez encore en resserrer les critères d'accession en supprimant la notion d'accès effectif. Or certains soins théoriquement accessibles dans un autre pays ne le sont pas en réalité, en raison de difficultés économiques ou de discriminations.

M. le président.  - Amendement identique n°165, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Sébastien Fagnen.  - Nous tenons aussi cet article pour injuste et inutile. Injuste, car il privera de soins des personnes qui en ont urgemment besoin et ne peuvent y accéder dans leurs pays d'origine. Inutile, car cela représente une part infinitésimale des étrangers résidant en France.

Soyons pragmatiques : cet article aura pour seule conséquence une perte de chance pour les personnes concernées, sans aucune incidence sur les flux migratoires.

M. le président.  - Amendement identique n°472 rectifié bis, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

M. Olivier Bitz.  - Cet amendement a pour objet d'inviter le Gouvernement à nous éclairer sur la compatibilité de cet article avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

M. le président.  - Amendement identique n°501 rectifié, présenté par Mme Souyris, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée.

Mme Anne Souyris.  - Le titre « étranger malade » a été créé pour venir en aide à des personnes dont la santé est menacée et qui ne peuvent accéder à des soins adaptés dans leurs pays d'origine. Supprimer la notion d'effectivité va à l'encontre du principe de réalité. De plus, exclure la prise en charge par l'assurance maladie met en danger la santé de personnes déjà vulnérables.

Enfin, l'article autorise les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) à demander des informations médicales aux médecins sans l'accord des personnes concernées, une violation inacceptable du secret médical.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission des lois.  - Avis défavorable. Pourquoi réduire ce titre de séjour ? Tout d'abord, il n'existe quasiment qu'en France. (Protestations à gauche) Pourquoi serions-nous le seul pays à devoir soigner les personnes qui estiment ne pouvoir l'être ailleurs ? Le dispositif a non pas été resserré ces dernières années, mais assoupli : nous proposons donc de revenir à la rédaction d'avant 2016, en considérant qu'à partir du moment où le traitement existe dans le pays d'origine, la France n'a pas d'obligation d'accueillir.

Nous proposons ensuite qu'un accord soit trouvé entre les systèmes sociaux pour un partage de la prise en charge des soins. Cela nous semble raisonnable et efficace.

Je vous renvoie au rapport de l'Ofii sur le sujet, selon lequel le dispositif étranger malade « est un guichet ouvert en termes de coûts de soins ». Je pourrais donner des exemples du coût des traitements correspondant aux 4 000 cas par an dont nous parlons, mais je ne voudrais pas nourrir les polémiques. Ces montants sont exceptionnellement élevés ; c'est bien une charge pour la nation.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - C'est une question délicate, qui concerne effectivement peu de gens. En 2017, 4 227 titres de ce type ont été délivrés et l'année dernière 3 280. La loi portée par Bernard Cazeneuve a réduit les possibilités de délivrance en prévoyant la présence d'un médecin auprès de l'Ofii.

Ne confondons pas l'aide médicale de l'État (AME), qui est en effet un enjeu de santé public, et ce débat. Ce titre a été créé pour accueillir des malades du sida sans thérapie dans leur pays, mais il a désormais changé de nature. Sans préjudice de la compétence de Didier Leschi, le directeur de l'Ofii, je ne vois pas bien quels seraient les effets de la suppression de la notion d'effectivité. Mais par égard pour lui, sagesse.

Seules la France et la Belgique octroient ce genre de titres, mais d'autres pays peuvent accueillir des malades sous d'autres titres. En l'absence d'étude d'impact, on ne sait pas si ces dispositions modifiées s'opposent à la position de la Cour européenne des droits de l'homme. Il serait bon que la commission des lois de l'Assemblée nationale auditionne Didier Leschi à ce propos.

M. Bitz pourrait retirer son amendement, puisque le Gouvernement s'engage à regarder les effets de cette disposition.

M. Patrick Kanner.  - Je regrette votre position, monsieur le ministre. Nous ne retirerons pas notre amendement.

On touche le fond ! Nous ne serions plus fiers d'accueillir les quelques milliers de personnes qui n'ont pas accès dans leur pays à certains traitements ? Je regrette cette vision déshumanisée. Nous parlons d'un acquis des associations qui se sont battues pendant la pandémie de sida afin de pouvoir soigner des personnes qui, sans cela, risquaient de crever - il faut appeler un chat un chat !

Cet amendement qui tourne le dos à notre histoire, à une certaine idée de fraternité universelle, signe la volonté politique de la droite. (MM. Alexandre Ouizille et Sébastien Fagnen applaudissent.)

Mme Mélanie Vogel.  - La France n'a pas l'obligation d'accorder ces visas ; ils sont accordés à la discrétion des préfets.

Vous avez été nombreux, à droite, au moment de l'examen de la loi Gaillot sur l'IVG, à dire que l'important, c'était l'accès au droit, non le droit lui-même. Ne l'oubliez pas ici !

L'une des conditions d'accès au titre « étranger malade » est le danger de mort. Il est donc naturel que le traitement coûte plus cher qu'une aspirine ! Ces étrangers ne viennent pas pour une jambe cassée ou une entorse au poignet !

Enfin, de nombreux Français partent à l'étranger - Turquie, Ukraine, Tunisie - pour pouvoir se faire soigner à moindre coût. Voudriez-vous que ces pays les en empêchent ?

Mme Anne Souyris.  - Que savez-vous des questions épidémiologiques ?

Même si on peut accéder à une trithérapie dans certains pays d'Afrique, il n'y en a certainement pas pour tout le monde. Ne pas soigner un malade du VIH ouvre bien la voie à des risques d'épidémie.

M. Stéphane Ravier.  - Ce que nous avons entendu est tout simplement scandaleux ! Ne pas vouloir révéler le coût des soins concernés, sous prétexte que cela enflammerait les réseaux sociaux est scandaleux.

La vérité, c'est que ce coût est assumé par les Français ! Ils doivent savoir combien cette immigration leur coûte !

Je vous en ferai la demande, et j'en donnerai l'écho le plus large ! (Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit.)

M. Roger Karoutchi.  - Je représente le Sénat au conseil d'administration de l'Ofii. À ce titre, j'ai pu discuter à plusieurs reprises avec M. Leschi du problème des étrangers malades.

J'entends bien les remarques sur l'origine de ce titre, légitimes alors que de nombreux pays ne soignaient pas le sida et que la France était en pointe. Mais les choses ont changé. Même les membres du conseil d'administration de l'Ofii admettent que ce titre de séjour fait l'objet de nombreux dérapages. Les demandeurs viennent parfois de pays parfaitement développés, dotés de systèmes de soins éminents, mais veulent aller dans tel ou tel hôpital français parce que le traitement est de meilleure qualité que les meilleurs hôpitaux américains...

Faut-il accueillir en France, dans les meilleurs de nos hôpitaux, des gens qui viennent de pays comme les États-Unis ou le Canada ? (Mme Mélanie Vogel lève les bras.) Cela n'a plus de sens !

Mme Muriel Jourda.  - Je voudrais faire un rappel historique. En 2011, le titre « étranger malade » - qui n'est pas discrétionnaire, madame Vogel, mais accordé sous conditions - a été créé avec pour condition l'absence de traitement dans le pays d'origine. Il a fonctionné ainsi jusqu'à ce qu'en 2016, une décision du Conseil d'État introduise la notion d'accès effectif.

Nous ne faisons que revenir à la situation antérieure, qui n'avait pourtant déplu à aucune des deux majorités qui se sont succédé à la tête du pays...

Mme Frédérique Puissat.  - Bravo !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Écartons tout de suite le cas des Français qui vont se faire soigner à l'étranger : ils paient leurs soins ! Il n'est pas scandaleux que nos hôpitaux qui accueillent des étrangers soient rémunérés.

Monsieur Ravier, les chiffres que vous demandez figurent dans le rapport annuel de l'Ofii. Librement accessibles, ils sont publiés sous l'égide du ministère de l'intérieur. Arrêtez avec vos théories du complot !

Certains, comme vous, aiment les punchlines ; pour ma part, modéré, j'essaie d'avoir du recul. C'est pourquoi je ne fournis pas ces chiffres, tout en disant où ils se trouvent, en toute transparence.

Quand un étranger demande à pouvoir bénéficier d'une dialyse rénale en France - il en existe dans presque tous les pays - c'est en réalité la greffe rénale qu'il réclame dès qu'il est pris en charge...

M. Guy Benarroche.  - Certains ressortissants de pays développés profitent de notre système de santé, et vice versa, mais ce n'est pas le sujet.

Sous prétexte qu'il y a des abus, on fait fi du coût induit par l'absence de soins dans un premier temps. Évaluons avant de supprimer.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Cette solution est intéressante et ne mérite pas d'être vouée aux gémonies, comme l'a fait le président Kanner. En l'état, nous reviendrions à ce qui prévalait jusqu'en 2016, sous François Hollande.

Toute politique publique mérite d'être questionnée, y compris celle-ci.

Nous vérifierons si ce que propose la commission est conforme au droit international et évaluerons le nombre de personnes concernées.

M. Karoutchi vient de faire une ode à l'hôpital public, objet de sa prochaine question d'actualité ? (M. Roger Karoutchi se récrie.)

Le dernier rapport de l'Ofii est public, monsieur Ravier : vous y verrez ainsi que l'office déplore le dévoiement de la procédure pour des procréations médicalement assistées (PMA), autorisées par le tribunal administratif de Lille en dépit de deux avis défavorables. Était-ce bien conforme à la volonté du législateur ?

Sagesse.

L'amendement n°472 rectifié bis est retiré.

Les amendements identiques nos17 rectifié bis, 43 rectifié, 165 et 501 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°560 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

Rédiger ainsi cet article :

La section 3 du chapitre V du titre II du livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est abrogée.

M. Stéphane Ravier.  - C'est l'histoire d'un dirigeant algérien qui a insulté les Français pendant des années, tout en se faisant soigner en France : celle d'Abdelaziz Bouteflika. Pourquoi nos gouvernements ont-ils accepté de soigner ce dictateur arrogant ?

Quelque 30 000 Bouteflika encombrent nos hôpitaux. La principale cause est non pas le VIH, mais la psychiatrie : dix fois plus que les greffes d'organes ! Et ces personnes viennent d'abord d'Algérie - les Algériens savent-ils qu'ils ne sont plus Français ? -, suivent les Comoriens, les Ivoiriens, les Congolais, les Camerounais...

Ces titres de séjour créent une filière d'immigration illégale : ces personnes restent ensuite sur le territoire, font venir leur famille et vivent des prestations sociales.

Alors que nos hôpitaux souffrent et que de nombreux Français renoncent à se faire soigner pour des raisons économiques, cet article est une provocation !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis défavorable : la commission propose un recalibrage, non une suppression.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Vous dites n'importe quoi, monsieur Ravier. Le rapport de l'Ofii est envoyé chaque année aux parlementaires : n'hésitez pas à le copier-coller sur Twitter. Les troubles mentaux ne sont que la troisième cause de consultation. La première est toujours le VIH, les hépatites virales et la tuberculose, pour 27,2 % des demandes, puis les maladies de l'appareil circulatoire pour 22,7 % ; les troubles psychiatriques ne représentent que 16,5 %.

Je préférerais que le président Tebboune vienne se faire soigner en France plutôt qu'en Allemagne !

M. Stéphane Ravier.  - S'il paie !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ce serait une bonne chose pour notre diplomatie. La détestation est toujours mauvaise conseillère.

Pourquoi l'extrême droite est-elle si obsédée par l'Algérie ? Cela relève de la nostalgie ! (Quelques rires à droite)

L'amendement n°560 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°385 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

...) Après le mot : « accord » sont insérés les mots : « constaté par écrit ».

Mme Mélanie Vogel.  - Défendu.

L'amendement n°385 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 1er E est adopté.

ARTICLE 1er F

M. le président.  - Amendement n°42 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Ian Brossat.  - L'article 1er F durcit les conditions d'obtention d'un titre « étranger malade », ce qui est contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) et à celle de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE). Les critères actuels, déjà contestables, deviendront rigides. Relèvent-ils du domaine de la loi ?

M. le président.  - Amendement identique n°473 rectifié bis, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

M. Olivier Bitz.  - Ce projet de loi vise à durcir notre droit en matière migratoire. Le RDPI souscrit à l'objectif, mais dans le respect de la CEDH. Le Gouvernement peut-il nous rassurer ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Le texte de la commission reprend l'état du droit existant, avec le toilettage de l'arrêté du 5 janvier 2017. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

Monsieur Bitz, nous fournirons à l'Assemblée nationale des éléments, que nous ferons parvenir aux présidents de groupe du Sénat, sur la conformité de cette mesure avec nos engagements internationaux.

L'amendement n°473 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°42 rectifié n'est pas adopté.

L'article 1er F est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er F

M. le président.  - Amendement n°166, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er F

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 425-4 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « peut se voir délivrer une autorisation provisoire de séjour d'une durée minimale de six mois » sont remplacés par les mots : « se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an ».

Mme Laurence Rossignol.  - Depuis 2016, les prostitués - essentiellement des femmes, à 80 % étrangères - peuvent bénéficier d'un parcours de sortie de la prostitution, assorti d'un titre de séjour de six mois. C'est trop court ; mieux vaudrait un an.

C'est un outil supplémentaire de soutien à des personnes fragiles et de lutte contre les réseaux de traite.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable, sur un sujet délicat. Nous sommes attentifs à la situation des victimes de la traite d'humains et du proxénétisme.

Deux titres existent : le premier est une autorisation provisoire de séjour de six mois pour un étranger victime de traite et de proxénétisme ; le second une carte de séjour « vie privée et familiale » d'un an lorsqu'une plainte est déposée contre le proxénète ou que la victime accepte de témoigner. En mettant à égalité les titres de séjour, nous supprimons l'incitation à démanteler les réseaux.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Madame Rossignol, j'estime positif d'étendre la durée de ce titre à un an, à condition que les personnes concernées portent plainte. Accepteriez-vous un sous-amendement en ce sens ?

Mme Laurence Rossignol.  - L'un comme l'autre, nous voulons lutter contre les réseaux, monsieur le ministre. Mais les enquêteurs vous diront que les raisons pour lesquelles les femmes portent plainte sont diverses, et ne tiennent pas à l'obtention d'un titre de séjour plus long.

La première des raisons pour lesquelles une plainte n'est pas déposée, ce sont les moyens de pression dont dispose le proxénète sur la famille restée au pays.

Notre amendement vise à sécuriser le parcours de sortie de la prostitution. Je n'entrerai pas dans une logique de donnant-donnant.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le premier titre de six mois est renouvelable et vaut autorisation de travail tant que la personne n'est pas sortie de la prostitution. Il me semble que ce que propose le ministre existe déjà.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - À la demande de Mme Buffet à l'Assemblée nationale, nous avons introduit un titre de séjour de protection en cas de violences conjugales, si la victime a déposé plainte.

Avis favorable. J'ai compris que vous ne vouliez pas créer de filière irrégulière supplémentaire. Passer par le préfet offre des garanties.

Mme Laurence Rossignol.  - Cela concerne quelques centaines de personnes.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Regardons comment le préfet peut se porter garant d'une personne qui subit des traitements dégradants, même si elle ne porte pas plainte.

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°166, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°119 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Après l'article 1er F

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 312-2-... ainsi rédigé :

« Art. L. 312-2-....  -  La délivrance d'un visa peut, suivant les États et en vertu d'une liste établie annuellement par décret après avis des commissions parlementaires compétentes et mise en oeuvre d'une procédure de consultation publique, être subordonnée au paiement d'une taxe ainsi qu'au dépôt d'une caution couvrant les frais de rapatriement, laquelle est restituée par l'autorité consulaire au retour dans l'État d'origine de la personne sollicitant le visa.

« Le montant des taxes susvisées en fonction des États est fixé par décret en Conseil d'État. ».

M. Joshua Hochart.  - Cet amendement vise à exiger une compensation financière à l'obtention d'un visa. Cela fera diminuer le nombre de demandes et de séjours irréguliers, et financera la surveillance de nos frontières ainsi que l'accueil des étrangers réguliers. Cela existe ailleurs.

M. le président.  - Amendement n°535 rectifié ter, présenté par M. Ravier.

Après l'article 1er F

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La délivrance d'un visa peut, suivant les États et en vertu d'une liste établie annuellement par décret, être subordonnée au paiement d'une taxe ainsi qu'au dépôt d'une caution couvrant les frais de rapatriement, laquelle est restituée par l'autorité consulaire au retour dans l'État d'origine de la personne sollicitant le visa.

« Le montant des taxes susvisées en fonction des États est fixé par décret en Conseil d'État. »

M. Stéphane Ravier.  - C'est trop cher, on n'y arrivera pas... Voilà ce que l'on entend lorsqu'il s'agit d'expulser les clandestins. Chaque étranger demandant un visa long séjour devrait verser une somme mise sous séquestre, qui servirait le cas échéant à payer son retour en avion et son placement en centre de rétention administrative (CRA) - un clandestin en CRA nous coûte 700 euros par jour ! Quelque 3,5 millions de titres de plus de trois semaines sont en cours de validité : je vous laisse calculer le nombre de charters que nous pourrions financer à raison de 1 000 euros par personne !

M. le président.  - Amendement n°245 rectifié bis, présenté par MM. Le Rudulier, Menonville et Frassa, Mme Josende, MM. Rochette et Courtial, Mmes Herzog et Puissat, M. Paccaud, Mmes Petrus, Lavarde et Bellurot, MM. Chasseing et Wattebled, Mmes Micouleau et Belrhiti, M. Genet, Mme Devésa, M. Duffourg et Mme V. Boyer.

Après l'article 1er F

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 311-1-... ainsi rédigé :

«Art. L. 311-1-....  -  Sauf pour les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, une caution est exigée de tout étranger qui demande un visa ou un titre de séjour.

« La caution est restituée lors du départ de l'étranger s'il a satisfait à l'ensemble des conditions de son séjour, sinon, elle est retenue, notamment lorsque l'étranger refuse de quitter le territoire national à l'issue de la période de validité du document autorisant sa présence en France. »

Mme Lauriane Josende.  - Cet amendement vise à instaurer une caution, pour inciter le demandeur à quitter le territoire à l'issue de la période de validité de son document. Cela existe déjà au Canada.

M. le président.  - Amendement n°340 rectifié, présenté par M. Karoutchi, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Bacci et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa et Cambon, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mme Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge, Le Rudulier et H. Leroy, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Perrin, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon, Szpiner et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus.

Après l'article 1er F

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre I du livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par une section ... ainsi rédigée :

« Section ...

« Dépôt préalable d'une caution retour pour la délivrance d'un titre de séjour pour motifs d'études

« Art. L. 412-....  -  La première délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant » mentionnée à l'article L. 422-1 est subordonnée au dépôt par l'étranger d'une caution.

« La caution mentionnée au premier alinéa est restituée à l'étranger lorsqu'il quitte la France à l'expiration du titre de séjour mentionné au même alinéa, en cas de renouvellement de ce titre de séjour ou en cas d'obtention d'un autre titre de séjour avec changement de motif.

« Par exception au deuxième alinéa, la caution mentionnée au premier alinéa est définitivement retenue lorsque l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une décision d'éloignement.

« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application de cet article. »

M. Roger Karoutchi.  - Le nombre de titres de séjour « étudiant » a beaucoup augmenté : c'est une nouvelle voie d'immigration. Or les présidents d'université nous disent que de nombreux étudiants étrangers ne suivent pas les cours et ne se présentent pas aux examens. Il s'agit d'une immigration détournée de son objectif premier.

Pour y remédier, nous proposons l'instauration d'une caution, qui sera remboursée en cas de départ volontaire ou d'obtention d'un nouveau titre de séjour.

Le rapport de l'OCDE est assez critique sur la qualité des étudiants étrangers accueillis en France.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - MM. Ravier et Szcurek proposent une caution pour tous les visas. Nous sommes favorables à une plus grande maîtrise de l'immigration. Pour autant, il faut tenir compte de la capacité de gestion de notre administration : il y a 1,7 million de visas et 187 titres différents, y compris les « passeports talents ». Avis défavorable aux amendements nos119 rectifié, 535 rectifié ter et 245 rectifié bis.

L'amendement n°340 rectifié s'inscrit dans l'esprit de nos travaux. Nous avons souhaité que la primodélivrance de titres « étudiant » soit mieux contrôlée. Ajouter une caution pour vérifier l'effectivité des études nous semble de bon aloi. Avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

Monsieur Karoutchi, je comprends votre philosophie, mais je ne pense pas que cette voie soit la bonne. C'est plus par l'exigence, notamment sur le niveau de langue, que nous résoudrons le problème. Nous sommes moins-disants que le Québec. Par ailleurs, la dotation budgétaire des universités tient compte du nombre d'étudiants inscrits. Je crains des effets de bord défavorables à des étudiants doués, mais modestes.

M. Roger Karoutchi.  - Monsieur le ministre, vous dites qu'il faut rehausser le niveau de langue des personnes qui s'installent en France. Mais ce n'est pas le sujet : les étudiants étrangers en sciences n'ont pas besoin d'une maîtrise parfaite de la langue de Voltaire.

En revanche, de nombreux étudiants étrangers ne passent pas leurs examens et les universités sont peu regardantes, car leur dotation dépend du nombre d'étudiants inscrits.

Trouvons une mesure désincitative. Si la caution est modeste, ceux qui veulent vraiment étudier en France viendront. C'est une mesure vertueuse.

M. Pascal Savoldelli.  - Nous voyons bien ce qu'il y a de commun entre la droite sénatoriale et l'extrême droite. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Les étrangers vont-ils devoir acheter leur présence ? Devront-ils faire l'état des lieux de leur logement ou de leur université ? C'est irresponsable !

Chers collègues républicains, vous êtes pour une République une et indivisible et pour l'égalité. Mais vous instaurez de l'inégalité !

Au Canada, cette règle vise à attirer les francophones. Vous êtes des menteurs ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. le président.  - Monsieur Savoldelli...

M. Pascal Savoldelli.  - Vous avancez des arguments fallacieux et faites les mêmes demandes que l'extrême droite. M. Karoutchi, vous devriez sortir votre amendement de cette discussion commune !

M. Roger Karoutchi.  - Ce n'est pas moi qui fais le dérouleur de séance !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Monsieur Savoldelli, tous les titres de séjour donnent lieu à la perception de droits. Il nous appartient de fixer les conditions d'entrée sur notre territoire : il n'y a aucun droit acquis. Le système de la caution existe dans d'autres pays, il n'a rien de choquant. (M. Pascal Savoldelli s'exclame.)

L'amendement n°119 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos535 rectifié ter et 245 rectifié bis.

L'amendement n°340 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

La séance est suspendue quelques instants.

ARTICLE 1er G

M. le président.  - Amendement n°151, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Nous voulons supprimer cet article, qui impose aux étudiants de transmettre à l'administration des documents attestant du caractère réel et sérieux de leurs études.

Le titre ne leur est pourtant pas offert, c'est un parcours du combattant : Campus France vérifie les candidatures, notamment le niveau en français, et les services consulaires examinent les conditions financières et d'hébergement.

Cette nouvelle mesure est vexatoire et va à l'encontre de la tendance mondiale. Quand d'autres pays adoptent des stratégies offensives pour attirer les talents, ne nous enfermons pas dans une logique de suspicion en considérant les étudiants comme une population à risque migratoire.

M. le président.  - Amendement identique n°428 rectifié bis, présenté par Mme O. Richard, MM. Cadic, Canévet, Hingray et Levi et Mmes Perrot et Sollogoub.

Mme Olivia Richard.  - Je rejoins ma collègue : il en va de la place de la France à l'international. Je salue le travail de Campus France et des services consulaires. Ceux qui viennent en France doivent déposer un dossier et respecter plusieurs critères.

Alors que la France est en perte de vitesse en matière d'accueil des étudiants internationaux, cette mesure est regrettable.

De plus, c'est démesuré au regard des moyens des préfectures : qui va lire toutes ces attestations d'assiduité ?

M. le président.  - Amendement identique n°451, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Ian Brossat.  - Le contrôle du caractère réel et sérieux des études est déjà prévu dans le Ceseda, mais vous le rendez systématique. Pour des gens qui passent leur temps à critiquer l'administration et la bureaucratie, quelle étrange conversion !

M. le président.  - Amendement identique n°570 rectifié, présenté par Mme de Marco, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Mme Monique de Marco.  - Le nombre de doctorants en France baisse depuis 2011, alors qu'il augmente dans le monde.

Vous créez un climat de suspicion qui adresse un mauvais signal et risque de fragiliser la recherche française. La France rayonne aussi au travers de son système éducatif. Ne nous privons pas de l'enrichissement qu'apportent ces étudiants étrangers.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Actuellement, un étudiant qui vient étudier en France obtient une carte de séjour d'un an. À l'issue, il peut obtenir un titre pluriannuel pour la durée de ses études, généralement de quatre ans. Nous proposons simplement de vérifier que le titre de séjour obtenu sert au motif pour lequel il a été délivré. Il s'agit non pas de renouveler ce titre tous les ans, mais de pouvoir le retirer si le caractère réel et sérieux des études n'est pas avéré.

L'image de la France dans le monde n'en sera pas abîmée.

Avis défavorable à tous ces amendements.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. Roger Karoutchi.  - Je dois dire que je suis quelque peu stupéfait. J'ai été étudiant boursier.

M. Michaël Weber.  - C'était il y a longtemps ! (Sourires)

M. Roger Karoutchi.  - Cela m'a permis d'être le plus jeune agrégé d'histoire de France ! (Applaudissements) Tous les ans, pour obtenir le renouvellement de ma bourse, je devais prouver le sérieux de mes études. Je trouve curieux que ce qui est imposé à des étudiants français boursiers soit inacceptable pour des étudiants étrangers...

En quoi cela atteindrait-il le prestige de la France ?

M. Yannick Jadot.  - Vous avez mentionné l'intérêt pour la diplomatie française d'accueillir les chefs d'État étrangers dans nos hôpitaux. Pourquoi pas ? Mais la construction de notre pays, d'une société d'intelligence, se fonde sur l'université, la recherche et notre rayonnement.

Hier nous avons voté l'amendement de M. Joyandet sur la francophonie.

La première université française date du XIIe siècle. Neuf siècles que la France rayonne grâce à elle ! Elle a même été reconnue par le pape Innocent III - l'un de ces papes que vous aimez bien citer, quand ils parlent de fanatisme. Aujourd'hui, c'est contre le fanatisme qui s'est installé dans cette assemblée que je lutte. (Exclamations à droite)

M. Roger Karoutchi.  - Demander aux étudiants de prouver qu'ils étudient, ce n'est pas insensé, tout de même !

M. Yannick Jadot.  - Au Canada, les étudiants ne sont pas comptés dans les chiffres de l'immigration. Voilà une autre conception de l'intelligence. Pour que les francophiles ne défilent pas dans d'autres capitales avec le drapeau russe, accueillons-les ! (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Stéphane Ravier proteste.)

M. Rémi Cardon.  - Cet article demande un caractère réel et sérieux. Que cela signifie-t-il concrètement ? Une attestation de réussite, un diplôme ? Face aux lourdeurs administratives des universités, les obtenir prend parfois six mois !

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Je regrette de ne pas avoir été suffisamment convaincante sur les contrôles en amont de Campus France et des réseaux consulaires.

Je ne comprends pas pourquoi on demande aux étudiants de prouver le sérieux de leurs études en première année. C'est un signal très négatif. Et la première année d'études, ce n'est pas toujours la plus sérieuse. (Sourires) Évitons toute rupture d'égalité.

M. Pierre Jean Rochette.  - Nous avons l'impression que, d'un côté, il y a les humanistes qui veulent donner tout à tout le monde, sans contrôle - c'est « open bar » - (murmures à gauche), et, de l'autre, des rétrogrades qui ne lâchent rien.

Le débat est plus subtil : peut-on accueillir tout le monde ?

M. André Reichardt.  - 3 000 milliards d'euros !

M. Pierre Jean Rochette.  - Non, on ne peut pas accueillir tout le monde, nos concitoyens ne sont pas d'accord (M. Yannick Jadot le conteste), notamment dans la Loire.

M. André Reichardt.  - Qui paierait ?

M. Pierre Jean Rochette.  - Si les caisses de l'État étaient pleines, il y a 40 ans, aujourd'hui ce n'est plus le cas. Ce texte propose un équilibre : aucune mesure ne peut être décidée sans contrôle.

M. Ian Brossat.  - À vous entendre, nous avons l'impression d'être un pays misérable, à la limite en voie de développement...

M. André Reichardt.  - Malheureusement, c'est le cas !

M. Ian Brossat.  - Personne n'a dit que c'était « open bar ». (M. Pierre Jean Rochette le conteste.) Nous sommes la septième puissance économique mondiale ! (Mme Valérie Boyer proteste.)

M. Stéphane Ravier.  - Nous avons 3 000 milliards d'euros de dette !

M. Ian Brossat.  - Que voulons-nous être comme pays ? (Mme Marie-Pierre de La Gontrie applaudit.)

M. Guy Benarroche.  - Nous payons tous des impôts, nous voulons les voir utilisés à bon escient.

Non, on ne vient pas en France sans aucun contrôle, et est-ce préjudiciable que des étudiants continuent à venir ? Sans les articles 1er E, 1er F, 1er G introduits par la commission des lois, serions-nous dans une situation financière catastrophique ? Le déficit français est-il uniquement lié à ces cas ?

Cela signifierait que depuis vingt ans, toutes les lois votées seraient mauvaises, organisant la faillite de l'État. Si tel est le cas, fermez les frontières !

M. Alexandre Ouizille.  - Vous voyez l'immigration comme un coût... pas nous. Alors que l'incurie règne dans toutes les préfectures de France, qu'il est impossible d'obtenir un rendez-vous, que les réponses se font attendre, vous voulez ajouter une couche supplémentaire de contrôles.

La question est aussi administrative : rien ne fonctionne sur le traitement des étrangers. Vous vous faites plaisir, mais, au fond, vos articles ne changeront rien.

M. Stéphane Ravier.  - (Exclamations à gauche) Monsieur Brossat, regardez la réalité en face ! La France est la septième puissance économique mondiale. Il n'y a pas longtemps, elle était sixième ; avant, cinquième. Nous ne cessons de dégringoler. Il ne suffit pas de se draper de belles images. Nous cumulons 3 000 milliards d'euros de dette, payons 60 milliards d'euros d'intérêts de la dette. Nous sommes à l'os, les Français sont rackettés comme jamais et obtiennent de moins en moins d'équipements et services publics.

Ne vous bercez pas de mots, camarades ! (Rires à gauche)

M. Mickaël Vallet.  - Non !

M. Stéphane Ravier.  - La CGT manifeste devant le Sénat pour régulariser les clandestins...

Mme Audrey Linkenheld.  - Des travailleurs !

M. Stéphane Ravier.  - ... ce qui va pénaliser les Français. Et oui, les visas étudiants, c'est une filière d'immigration clandestine. (Protestations à gauche)

M. Ian Brossat.  - N'importe quoi !

M. Fabien Gay.  - M. Ravier vient de prouver sa méconnaissance de l'histoire de France. C'est Clovis qui, en 511, a instauré le droit d'asile. Les étudiants et étudiantes viennent en France participer au rayonnement de notre pays comme du leur.

L'argument financier ne tient pas. Selon le rapport de Campus France de décembre 2022, l'accueil des étudiants rapporte 1,35 milliard d'euros nets à la France ! Moins nous en accueillerons, moins cela rapportera à la France. Supprimons cet article. (M. Sébastien Fagnen applaudit.)

Mme Sylvie Robert.  - Je suis attristée par ce débat, qui rappelle celui sur l'augmentation des frais d'inscription pour les étudiants étrangers. Ces étudiants sont une ressource, non une charge. Monsieur Karoutchi, vous allez nuire à l'attractivité de notre pays ! (M. Roger Karoutchi le conteste.)

Les grandes écoles et les universités exercent un contrôle, Campus France aussi, et s'y ajoutent les examens.

M. Roger Karoutchi.  - Précisément, des examens !

Mme Sylvie Robert.  - Y a-t-il des études montrant que les étudiants étrangers ratent plus leurs examens que les Français ?

M. Roger Karoutchi.  - Oui !

Mme Sylvie Robert.  - Il n'y a pas de chiffres ! Actuellement, les écoles d'ingénieurs recherchent des étudiants étrangers ; elles en sont satisfaites et effectuent des contrôles motivés et sérieux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE-K)

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Des contrôles réels et sérieux... ils existent déjà !

Mme Sylvie Robert.  - Et donc ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le titre de séjour ne dure qu'un an. Pour obtenir ensuite une carte pluriannuelle, il faut justifier du caractère sérieux des études. Ce seront toujours ces mêmes éléments que les préfectures demanderont lors des contrôles (M. Yannick Jadot proteste.) Tout cela est très simple.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Pour répondre à M. ...

M. Alexandre Ouizille.  -  Ouizille !

Mme Audrey Linkenheld.  - Il est des Hauts-de-France !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je ne l'ai pas croisé souvent... Votre démonstration est malhonnête. Vous parlez d'incurie des agents de préfecture, alors qu'ils accomplissent un travail très important. Vous les maltraitez, d'un seul mot.

Vous faites les Shadoks : vous avez supprimé 5 500 postes de fonctionnaires dans les préfectures et sous-préfectures !

M. Alexandre Ouizille.  - C'est Sarkozy !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Non, sous Hollande. Et, ensuite, vous nous demandez que cela fonctionne mieux... Vous vous fichez du monde !

Ce n'est pas honnête de mettre cette situation sur le dos des agents. C'est nous qui recréons des effectifs dans les préfectures ! (M. Alexandre Ouizille proteste.)

M. Rémi Cardon.  - C'est faux !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le problème n'est pas le nombre d'étudiants, mais leur qualité. Bien sûr, il y a une question de capacité d'accueil de nos établissements. Avec le Président de la République, nous voulons 500 000 étudiants internationaux d'ici 2027, et le doublement des bourses.

En cinq ans, le nombre d'étudiants venus d'Afrique du Nord a augmenté de 16 % ; c'est 21 % pour les étudiants européens et 34 % pour les étudiants venus d'Afrique subsaharienne, tandis que le nombre d'étudiants venus d'Asie ou d'Océanie diminue de 3 %. Il faudrait peut-être renforcer nos efforts vers ces derniers, là où l'innovation se crée.

Il faut aussi reconnaître que certaines filières d'immigration irrégulière se servent de l'immigration étudiante -  nous devons les combattre. Ce n'est pas qu'un sujet de francophonie, comme au Québec. Un minimum de maîtrise de la langue est nécessaire pour suivre des études universitaires. Ces débats ne valent pas des noms d'oiseaux.

Monsieur Karoutchi, le problème est bien le budget des universités, fondé sur le nombre d'inscriptions. Vous aurez le débat avec la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Avis défavorable à ces amendements.

Les amendements identiques nos151, 428 rectifié bis, 451 et 570 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°140 rectifié bis, présenté par Mme Cazebonne, MM. Patriat, Rambaud, Buis, Iacovelli et Patient, Mme Havet et MM. Lévrier et Lemoyne.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, sauf les e?tudiants e?trangers ayant obtenu leur baccalauréat français dans un établissement français à l'étranger homologué par le ministère chargé de l'éducation nationale

M. François Patriat.  - Le Président de la République, en 2018, devant l'Institut de France, souhaitait que l'on accueille 700 000 élèves en 2030 dans notre réseau à l'étranger. L'amendement vise à ce qu'un étudiant étranger ayant passé son bac dans un institut agréé par la France puisse poursuivre ses études en France, sans autre justification.

M. le président.  - Amendement n°213, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, sauf s'il a obtenu un baccalauréat français dans un établissement français appartenant au réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ou de la Mission laïque française, 

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Cet amendement de repli de l'amendement n°151 soustrait à l'obligation de production annuelle de documents les étrangers ayant effectué leur scolarité dans un établissement français à l'étranger et ayant obtenu un bac français.

En 1997, la mission d'étude des législations de la nationalité et de l'immigration de Patrick Weil soulignait la contradiction entre l'ambition de construire le plus grand réseau d'éducation au monde et le peu d'encouragement à poursuivre des études dans l'enseignement supérieur français.

Accordons une marque de confiance aux étrangers ayant passé un bac français - ils seront nos interlocuteurs de demain dans leurs pays.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Les jeunes obtenant un bac français à l'étranger sont soumis exactement aux mêmes contrôles que les autres. Il n'y a pas d'exemption possible. Vous demandez que, dans la suite de ses études, cet étudiant soit dédouané de la justification du caractère réel et sérieux de ses études. Mais avoir obtenu un bac français ne constitue en rien une présomption de sérieux. (M. Roger Karoutchi acquiesce.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°213. Avoir obtenu un bac français est la garantie d'un choix linguistique, mais pas du sérieux des études futures.

L'amendement n°140 rectifié bis invite à créer une filière particulière, c'est une piste à étudier. Le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche y travaillent. Cette disposition n'a pas sa place dans ce texte, plutôt dans un texte relatif à l'enseignement supérieur. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°140 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°213 n'est pas adopté.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Dommage !

L'article 1er G est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er G

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par MM. Levi, Laugier et Wattebled, Mmes Guidez et Perrot, M. Houpert, Mmes O. Richard et Vérien et MM. A. Marc, J.M. Arnaud, Chatillon, Menonville, L. Hervé et Hingray.

Après l'article 1er G

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 422-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 422-... ainsi rédigé :

« Art. L. 422-.... - Les étudiants étrangers ayant obtenu leur baccalauréat français dans un établissement français à l'étranger homologué par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), ou de la Mission laïque française (MLF) et souhaitant poursuivre leurs études supérieures en France sont exemptés de justifier de leurs conditions de ressources pour l'obtention d'un titre de séjour portant la mention "étudiant" . »

M. Pierre-Antoine Levi.  - Nous facilitons le parcours des étudiants étrangers ayant obtenu leur bac dans un établissement français de l'étranger en les exemptant de la condition de ressources pour l'obtention d'un titre étudiant, afin d'encourager l'attractivité de la France.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Demande de retrait, sinon avis défavorable. Ces étudiants ont parfois engagé des frais considérables dans le secondaire. En France, on leur demande une condition de ressources de 615 euros mensuels. Ce n'est pas très élevé.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Mme Olivia Richard.  - Je soutiens cet amendement. Nous voulons attirer les élèves de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE). Il existe une bourse d'excellence, et 60 % des élèves du réseau de l'AEFE sont étrangers.

L'amendement n°5 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°152, présenté par M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er G

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 422-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 422-2-... ainsi rédigé :

« Art. L. 422-2-.... - La carte de séjour prévue à l'article L. 422-1 est également délivrée lors de sa première admission au séjour, sans avoir à justifier de ses conditions d'existence et sans que soit exigée la condition prévue à l'article L. 412-1, à l'étranger résidant de façon habituelle dans un des pays figurant sur une liste définie par décret et inscrit dans un des établissements d'enseignement supérieur dont la liste figure au même décret. »

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Cet amendement crée un nouveau cas de délivrance de plein droit d'un titre de séjour temporaire étudiant. Certains étudiants peuvent entrer en France pour un court séjour ; s'ils s'inscrivent dans un établissement français, ils devront quitter le territoire au bout de trois mois.

Le décret précisera les pays d'origine et les établissements concernés.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Il y a incompétence négative du Parlement puisque tout serait défini par décret. De plus, un visa court séjour n'est fait que pour un court séjour.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°152 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°341 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci et Bas, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc, Bonhomme, Bonnus et Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Burgoa et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mme Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Le Rudulier, Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Perrin, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mme Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus.

Après l'article 1er G

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 719-4 du code de l'éducation est complétée par les mots : « , qui sont majorés pour les étudiants étrangers en mobilité internationale ».

M. Stéphane Piednoir.  - Nous consacrons dans la loi la différenciation des droits d'inscription à l'université, qui découle d'un simple arrêté 19 avril 2019. Cela enverra un signal politique et consolidera l'assise juridique des décisions de présidents d'université.

Dans sa décision du 1er juillet 2020, le Conseil d'État a validé la majoration des droits pour les étudiants étrangers en mobilité.

Dans le cadre de mon rapport pour avis sur la mission Enseignement supérieur, j'ai constaté que les effectifs d'étudiants étrangers remontaient, avec des profils intéressants. Preuve que cette majoration ne nuit pas à notre attractivité.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis favorable. Ce n'est pas une nouveauté : il est déjà possible de majorer les droits universitaires pour les étudiants extracommunautaires. Les universités peuvent exempter certains étudiants de cette majoration.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable, non sur le principe, mais parce que l'amendement relève du PLF. Je vous sens impatients d'entendre Bruno Le Maire... (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains) S'il est voté, il sera censuré par le Conseil constitutionnel.

L'amendement n°341 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 1er H

M. le président.  - Amendement n°124, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Supprimer cet article.

M. Christopher Szczurek.  - Cet article fait peser sur l'État français une mission d'assistance juridique et transforme notre pays en guichet social.

La France a accordé 316 000 titres de séjour en un an, soit l'équivalent de la population nantaise. L'autorité administrative est déjà généreuse, elle ne peut devenir un auxiliaire juridique facilitant l'installation d'étrangers sur notre sol.

Si le Gouvernement veut limiter l'immigration, supprimons cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°446, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Ian Brossat.  - L'expérimentation de l'examen à 360 degrés augmenterait le caractère discrétionnaire de l'autorité administrative, en la concentrant dans une unique décision. Supprimons cet article.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. La commission des lois a proposé l'examen à 360 degrés des titres de séjour. Actuellement, si une demande sur un premier motif est rejetée, l'étranger peut avancer un autre motif. Il existe 187 titres, et donc autant de motifs.

Nous prévoyons que lorsqu'une demande est déposée sur un motif donné, soit l'administration accorde le titre, soit elle examine l'intégralité des autres motifs possibles, afin de balayer la situation de cet étranger et ainsi éviter des demandes sans cesse renouvelées. Il n'est pas question de pouvoir discrétionnaire. Cela permet de dire au demandeur, une fois pour toutes, s'il peut obtenir un titre de séjour. Il ne pourra renouveler sa demande qu'en cas d'élément nouveau. Simple application du droit.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable. Monsieur Brossat, je ne comprends pas votre argument. Donnez sa chance au produit ! Grâce à lui, nous saurons si le demandeur a droit au séjour et nous éviterons les détournements de procédure.

Monsieur Szczurek, je vois deux hypothèses. Première hypothèse : vous ne voulez aucun étranger en France, et vous ne voulez pas qu'un étranger puisse faire valoir ses droits. Ce n'est pas notre ligne.

Seconde hypothèse : cet article imaginé par le président de la commission des lois, avec lequel nous avons travaillé en amont, va régler bien des problèmes et éviter des contentieux. (M. André Reichardt approuve.) Bref, c'est notre efficacité qui vous gêne. Vous voulez que les Français aient des problèmes, pour en faire votre beurre électoral ! Au moins, c'est clair : vous cherchez votre intérêt particulier et non l'intérêt général. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; MM. Stéphane Ravier, Christopher Szczurek et Joshua Hochart protestent.)

Les amendements identiques nos124 et 446 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°323 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Guy Benarroche.  - Ce dispositif, qui permet de déclarer irrecevables les demandes des étrangers, sauf en cas d'éléments nouveaux, affaiblirait le droit au séjour. Ce pouvoir discrétionnaire est d'autant moins acceptable que les défaillances de l'administration sont connues. La précarité des étrangers est souvent liée à des impasses : impossibilité d'obtenir un rendez-vous en préfecture, difficulté d'accès aux soins ou au travail.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Il n'y a pas de droit absolu et général au séjour des étrangers en France. La représentation nationale se doit de fixer les conditions d'accès au séjour. Nous avons proposé que l'intégralité des motifs soit examinée en une seule fois. Votre proposition supprimerait tout l'intérêt du dispositif.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. Guy Benarroche.  - Le RN ne veut pas d'étrangers en France. La commission des lois et la droite sénatoriale veulent réduire considérablement le nombre d'immigrés. Je comprends que c'est votre position. (M. Philippe Bonnecarrère acquiesce.) Mais arrêtez de penser que la situation actuelle est hors de contrôle. Ce n'est pas vrai !

Nous devons accepter qu'il y aura de plus en plus de migrants et que nous devons mieux les accueillir, afin qu'ils deviennent une richesse et une force pour notre pays.

L'amendement n°323 rectifié n'est pas adopté.

L'article 1er H est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er H

M. le président.  - Amendement n°562 rectifié bis, présenté par Mmes Jacques, Lavarde, Puissat et Joseph, MM. Panunzi, Chaize, Pointereau et Klinger, Mmes Dumont, Lopez et V. Boyer, M. Cadec, Mmes Bellurot, Lassarade, Gruny et Belrhiti, MM. Mouiller et Cuypers, Mmes Aeschlimann et de Cidrac et M. Khalifé.

Après l'article 1er H

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article L. 442-3 est ainsi rédigé :

« Ne peuvent séjourner à Saint-Barthélemy que les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré à Saint-Barthélemy après avis du conseil exécutif. » ;

2° Aux articles L. 441-3 et L. 443-3, les mots : « à Saint-Barthélemy » sont supprimés.

Mme Micheline Jacques.  - Les amendements nos499 rectifié, 500 rectifié et 562 rectifié bis visent à mieux associer la communauté de Saint-Barthélemy à la maîtrise de l'entrée et du séjour sur son territoire.

Victime de son succès, l'île est saturée. La population locale peine à se loger. Certes, avec 4 % de chômage, le plein emploi est là. Mais c'est un territoire de 21 km2. Nous voulons une autorisation d'accès au travail émanant de la collectivité territoriale.

La loi organique permet de consulter la collectivité sur l'entrée et le séjour. Avec les amendements nos499 rectifié et 500 rectifié, la collectivité territoriale pourrait émettre un avis sur les demandes de séjour, comme le fait déjà la Polynésie française.

Solution alternative, l'amendement n°562 rectifié bis vise à territorialiser les titres de séjour. La procédure est déjà largement dématérialisée. Là aussi, nous nous inspirons des règles en vigueur en Polynésie française.

M. le président.  - Sous-amendement n°606 rectifié à l'amendement n°562 rectifié de Mme Jacques, présenté par Mme Petrus.

Amendement n° 562

Remplacer le dernier alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

2° À l'article L. 441-3, les mots : « à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin » sont supprimés ;

3° L'article L. 443-3 est ainsi rédigé :

« Ne peuvent séjourner à Saint-Martin que les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré à Saint-Martin après avis du conseil exécutif. »

Mme Annick Petrus.  - Il y a 120 nationalités à Saint-Martin. L'immigration, nous connaissons ! Mais nous sommes inquiets. Mon territoire, c'est 34 000 habitants sur 53 km2, le troisième territoire français le plus pauvre, plus de 3 000 demandes de logements en attente, la quasi-totalité des métiers en tension.

D'où l'importance de maîtriser l'entrée et le séjour des étrangers sur notre île, en l'absence de frontière matérielle avec Sint Maarten.

Nous proposons donc que le conseil exécutif de Saint-Martin soit systématiquement consulté lors de la délivrance des titres.

M. le président.  - Amendement n°500 rectifié, présenté par Mmes Jacques, Lavarde, Puissat et Joseph, MM. Panunzi, Chaize, Pointereau et Klinger, Mmes Dumont, Lopez et V. Boyer, MM. Belin et Cadec, Mme Bellurot, M. Genet, Mmes Lassarade, Gruny et Belrhiti, MM. Mouiller et Cuypers, Mmes Aeschlimann, Malet et de Cidrac et M. Khalifé.

Après l'article 1er H

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 442-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le mot : « délivrés », sont insérés les mots : « , après avis conforme du conseil exécutif, ».

Mme Micheline Jacques.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°499 rectifié, présenté par Mmes Jacques, Lavarde, Puissat et Joseph, MM. Panunzi, Chaize, Pointereau et Klinger, Mmes Dumont, Lopez et V. Boyer, MM. Belin et Cadec, Mme Bellurot, M. Genet, Mmes Lassarade, Gruny et Belrhiti, MM. Mouiller et Cuypers, Mmes Aeschlimann et de Cidrac et M. Khalifé.

Après l'article 1er H

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 442-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le mot : « délivrés » sont insérés les mots : « , après avis du conseil exécutif, ».

Mme Micheline Jacques.  - Défendu.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je comprends les difficultés décrites par nos collègues, auxquelles tout le monde peut compatir, mais la commission ne peut émettre un avis favorable. De fait, vous donneriez à Saint-Barthélemy une compétence de l'État. Le sous-amendement de Mme Petrus pose le même problème. À Saint-Martin, il existe un droit de séjour, mais j'entends les difficultés de logement que vous signalez. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Qu'il existe des dispositions particulières pour certains territoires, notamment ultramarins, nul n'y trouve à redire. Le droit au séjour et l'asile doivent y être envisagés différemment du Nord ou de la Corrèze. Mais de là à octroyer au Conseil exécutif de Saint-Barthélemy une compétence de l'État, il y a un pas que la République ne saurait franchir. Vous serez consultés sur une ordonnance relative à l'article 74 de la Constitution, mais il n'est pas question de priver l'État de compétences régaliennes. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Micheline Jacques.  - Au bénéfice de ces réponses, je retire mes amendements. Reste qu'il faudra faire évoluer la loi organique pour doter Saint-Barthélemy d'un dispositif de maîtrise de l'immigration à la hauteur de la situation, en s'inspirant du système polynésien.

Mme Annick Petrus.  - Je partage l'avis de ma collègue.

Les amendements nos562 rectifié bis, 500 rectifié et 499 rectifié sont retirés, de même que le sous-amendement n°606 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°447, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'article 1er H

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois, le Gouvernement remet un rapport évaluant les coûts et les conséquences en termes de santé publique de la réforme du droit à l'aide médicale de l'État opérée par la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020. 

M. Ian Brossat.  - Nous demandons un rapport sur les conséquences de la réforme de l'AME de 2019. D'aucuns évoquent des dépenses exorbitantes : il faut objectiver la situation en toute transparence. Rappelons que l'AME est déjà très encadrée, loin de l'open bar parfois décrit : trois mois de résidence, dépôt physique de la demande, revenus inférieurs au plafond de 810 euros...

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Depuis cette réforme qui a, en effet, limité l'accès à l'AME, le coût du dispositif n'a cessé d'augmenter, jusqu'à atteindre 1,2 milliard d'euros. La commission des lois se refuse à faire droit aux demandes de rapport, le Parlement n'ayant pas le pouvoir de donner des injonctions au Gouvernement. Avis défavorable.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.  - Sagesse. Dans le cadre de la mission « Santé » du projet de loi de finances, vous avez accès à toutes les données sur l'AME. Par ailleurs, le Gouvernement a confié une mission à Patrick Stefanini et Claude Evin, dont le rapport est attendu pour début décembre.

L'amendement n°447 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°503 rectifié, présenté par Mme Souyris, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée.

Après l'article 1er H

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le non-recours à l'aide médicale d'Etat.

Mme Anne Souyris.  - L'AME, réservée à ceux qui gagnent mois de 810 euros par mois, est destinée aux plus pauvres des plus pauvres. Plus de la moitié de ceux qui pourraient y avoir accès n'y recourent pas, comme le confirme le pré-rapport Evin-Stefanini. Avant de réformer ce dispositif, il est essentiel de disposer de données claires sur l'AME, notamment sur le non-recours. Plutôt que de supprimer ou de restreindre, il faudrait rétablir l'égalité de traitement !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable, pour les motifs précédemment évoqués.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Pour les motifs précédemment évoqués, sagesse.

M. Victorin Lurel.  - On nous parle d'une dynamique explosive, mais nous contestons le calcul présenté par la rapporteure. Tous les rapports montrent qu'il n'y a pas d'abus de droit. Prétendre que l'AME serait un facteur d'attractivité est fiction qui ne fait pas honneur à la France !

Mme Corinne Narassiguin. - Très bien !

L'amendement n°503 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 1er I

Mme Raymonde Poncet Monge .  - L'AME est un dispositif indispensable de santé publique, a déclaré le ministre de la santé. Les écologistes le pensent aussi, tout comme nombre d'associations, de Médecins du Monde à la Cimade, et les médecins qui ont récemment publié une tribune au nom du serment d'Hippocrate.

Elle a déjà été plusieurs fois rabotée. La remplacer par une aide médicale d'urgence (AMU) accroîtra les difficultés des personnes concernées, et rien ne prouve que des économies en résulteront - au contraire. Comment y voir autre chose qu'une mesure idéologique, déshumanisante et mâtinée de xénophobie, voire de racisme ?

En 2019, le Défenseur des droits a qualifié d'idée fausse la théorie selon laquelle l'AME créerait un appel d'air. Alors qu'on estime le taux de non-recours à 80 %, il faudrait plutôt en faciliter l'accès.

Comme l'a dit la présidente de Médecins du Monde, compliquer l'accès à l'AME ne rapporterait rien, hormis la honte ! (Applaudissements à gauche ; M. Loïc Hervé s'exclame.)

Mme Anne Souyris .  - La suppression de l'AME au profit d'une AMU est une grave atteinte aux principes essentiels de notre République. Où sont nos valeurs communes d'égalité et de fraternité ?

Cette couverture sanitaire était un socle consensuel de notre contrat social. La supprimer, c'est condamner à mort ses bénéficiaires ! (Protestations à droite ; M. Loïc Hervé s'indigne.) Ce serait aussi favoriser la propagation de maladies infectieuses : leur santé, c'est la nôtre.

Le coût de l'AME, 1,2 milliard d'euros cette année, représente 0,47 % du budget de l'assurance maladie.

Nous sommes à un carrefour de civilisation : d'un côté, la fraternité ; de l'autre, l'indifférence. (Murmures désapprobateurs à droite) Voilà ce que disait le pape François à Marseille !

M. Loïc Hervé.  - Vous entendre citer le pape... Tout arrive !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - Il se dit beaucoup de choses sur l'AME, souvent inexactes. Pour faire un bon mot ou par méconnaissance des dossiers, certains disent parfois des bêtises. (M. Roger Karoutchi s'agace.)

L'AME ne bénéficie pas à tout étranger en situation irrégulière, seulement à ceux qui ont le moins de ressources. En outre, elle ne concerne qu'un panier réduit de soins, comme l'on dit ; les titulaires de l'AME n'ont donc pas de lunettes gratuites.

On peut avoir une vision humanitaire de la question, à l'instar des oratrices précédentes, mais aussi une vision plus intéressée pour la population française. Car les rapports, notamment de l'Igas, le montrent : plus les personnes se font soigner tard, plus leur prise en charge est coûteuse. Au bout du compte, supprimer l'AME nous coûterait donc plus cher ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Bernard Jomier .  - Chaque année, nous débattons de cette question dans le cadre du projet de loi de finances. Que vient-elle faire dans ce texte ? Rien ne démontre le moindre lien entre l'AME et les phénomènes migratoires, le moindre effet d'appel d'air. Personne ne risque sa vie pour venir bénéficier de l'AME !

M. Stéphane Ravier.  - Vous niez l'évidence ! (Mme Émilienne Poumirol s'indigne.)

M. Bernard Jomier.  - La réaction du monde soignant fait chaud au coeur : les organisations de jeunes médecins montent au créneau, parce qu'on touche au sens de leur mission. La suppression de l'AME n'aura aucun effet sur le contrôle de l'immigration, et un effet négatif sur les finances des hôpitaux. Raisonnons sur des faits, non sur des représentations ou des marqueurs. Marqueurs de quoi, au juste ? Du pire ! (Applaudissements à gauche et sur les travées du RDPI)

M. Yannick Jadot .  - Chers collègues de la droite, à l'époque de Pasqua, Sarkozy ou Hortefeux, vous n'étiez pas tendres avec l'immigration, mais vous gouverniez. Et Charles Pasqua mettait en oeuvre l'espace Schengen, et Sarkozy et Hortefeux revenaient sur leurs idées de quotas et de double peine. Ils tenaient compte des réalités et intégraient des arguments rationnels.

Nous avons bien compris que, ce qui se joue, c'est votre survie politique - et l'avenir du ministre. Mais nous ne pouvons jouer avec la santé des Françaises et des Français ! Comment, après l'épidémie de covid-19, pourrions-nous laisser des gens sans soins, au risque qu'ils soient vecteurs d'épidémie pour toute la population ? Cessez de faire de la politique politicienne sur ces sujets ! (Applaudissements à gauche)

M. Yan Chantrel .  - Les lubies de la droite et de l'extrême droite se retrouvent dans cet article de la honte. Vous mettez en danger l'ensemble de nos compatriotes, car l'AME relève d'une politique de santé publique.

En 2019, elle a été durcie par l'instauration d'une durée minimale de présence de trois mois sur le territoire. Résultat : on a aggravé la situation, déjà difficile des urgences. Plus les maladies s'aggravent, plus leur prise en charge est onéreuse.

Revenez à la raison, renoncez à cette mesure inefficace. Travaillons plutôt sur le non-recours dans une perspective de santé publique ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Xavier Iacovelli .  - L'AME coûte 1,2 milliard d'euros pour 400 000 bénéficiaires. Seuls 50 % de ses bénéficiaires potentiels y ont recours. Il y a un problème de non-recours plus que d'abus de droit.

Le pré-rapport Evin-Stefanini montre qu'il n'y a pas d'attractivité due à l'AME. Il faut tordre le cou à ces lubies de l'extrême droite ! Les bénéficiaires de l'AME ne viennent pas en France pour se faire soigner, ils fuient la dictature ou la misère.

Restreindre l'accès à l'AME entraînerait retards de diagnostic et risques d'épidémie. En 2012, l'Espagne a supprimé un dispositif équivalent pour le réintroduire en 2018, après avoir constaté une explosion des dépenses de santé.

Rétablissons donc l'AME ! Je rappelle qu'un passage aux urgences coûte à la collectivité 2 000 euros ; mieux vaut mobiliser la médecine de ville.

M. Fabien Gay .  - L'assistance médicale gratuite remonte à 1893. Dès alors, on considérait que chacun, en République, mérite d'être soigné.

L'enjeu est surtout de santé publique, car les virus s'attaquent à tous, étrangers ou non. Après le covid, comme il a été dit, on ne peut sérieusement défendre la suppression de l'AME.

Vous appuyez sur beaucoup de fantasmes, mais l'AME n'est pas un appel d'air. Ceux qui cherchent à rejoindre la France fuient la guerre, la misère ou l'oppression : ils ne traversent pas la Méditerranée pour toucher l'AME !

M. Stéphane Ravier. - Bien sûr que si !

M. Fabien Gay. - Soigner toutes et tous relève d'un devoir d'accueil digne, d'un devoir d'humanité. De surcroît, plus les malades sont pris en charge tard, plus cela coûte cher.

Vous n'assumez pas ce que vous faites : la preuve, aucun orateur ne se lève sur vos travées pour défendre la suppression de l'AME ! (Applaudissements à gauche ; M. Bruno Retailleau fait signe qu'il prendra la parole ultérieurement.)

M. Alain Joyandet .  - Nous n'avons pas de mal à assumer une mesure d'intérêt général et n'entendons pas nous laisser caricaturer.

Monsieur Jadot, lorsque Nicolas Sarkozy était Président de la République, nous avons réformé l'AME, notamment en introduisant un ticket modérateur et en la réservant aux soins urgents. (M. Roger Karoutchi le confirme.) Résultat : à notre départ, elle ne coûtait plus que 588 millions d'euros. Ensuite, les vannes ont été ouvertes, et le dispositif est devenu un appel d'air pour l'immigration. (Protestations à gauche)

M. Bernard Jomier.  - C'est faux !

M. Yannick Jadot.  - Prouvez-le !

M. Alain Joyandet.  - Nous sommes le seul pays d'Europe dans lequel il n'y a aucune limite à ce dispositif. (On le conteste à gauche.)

Nous avons fait reculer le coût de l'AME de près de 40 % sans refuser de soigner les malades. La France a 3 000 milliards d'euros de dette et ne peut accueillir toute la misère du monde. La réforme structurelle que nous proposons mettra fin à l'appel d'air ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Stéphane Ravier .  - S'il fallait une preuve de l'attractivité de l'AME, je l'ai donnée dans la discussion générale : 20 000 demandes supplémentaires en seulement six mois, 423 000 bénéficiaires au total. On parle d'un dispositif maîtrisé, mais en fait c'est l'anarchie !

L'AME coûte 1,2 milliard d'euros, pendant qu'on demande à l'hôpital 600 millions d'euros d'économies. La supprimer est une mesure de justice sociale et nationale ! (M. Thomas Dossus s'indigne.) Des millions de nos compatriotes ne se soignent plus ou mal, parce qu'ils n'en ont plus les moyens. Mais l'humanisme de gauche, c'est toujours pour les autres, jamais pour les nôtres ! (Vives protestations à gauche)

Mme Cécile Cukierman.  - C'est la différence entre l'humanisme et l'égoïsme !

M. Stéphane Ravier.  - Je hiérarchise mon action et mes sentiments, au profit des miens d'abord. Vous portez l'humanisme en bandoulière, mais venez à l'hôpital de Marseille : vous verrez les preuves que vous demandez !

Mme Mélanie Vogel .  - M. Ravier vient de le prouver, c'est l'article de la honte. Les virus, les infections, contrairement à vous, se fichent bien des passeports. Ils touchent davantage les personnes les plus fragiles. Vous méprisez les valeurs fondamentales de l'humanité ! (M. André Reichardt s'exaspère.)

Mme Valérie Boyer. - Ça suffit !

Mme Mélanie Vogel. - Il n'y a pas de chantage à l'épidémie : ce n'est pas nous qui transmettons les virus... Cessez de délirer, monsieur Ravier !

En outre, il est moins cher de soigner les personnes au début de leur maladie plutôt que de devoir les prendre en charge à l'hôpital.

M. Stéphane Ravier. - L'hôpital, elles y vont déjà !

Mme Mélanie Vogel. - Aucune étude ne montre un lien entre AME et immigration. La moitié de ceux qui pourraient en bénéficier n'y ont pas recours, et elle ne pèse que 0,4 % des dépenses de santé. Tout ce que vous voulez, c'est faire souffrir davantage les étrangers. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER ; M. Ian Brossat applaudit également.)

M. Victorin Lurel .  - Je suis de ceux qui pensent que politique et morale peuvent se marier. La France est porteuse de grandes valeurs, nous nous piquons d'être le pays des droits de l'homme. Mais, aujourd'hui, la France a peur d'elle-même. Ernest Renan vantait une conception élective de la nation, vous nous ramenez à une vision organique, derrière laquelle il y a la race et les pensées raciales. N'ayons pas peur d'appliquer nos principes républicains ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Ian Brossat .  - Enfin tout de même ! Soigner les gens quand ils sont malades : cela ne devrait pas faire débat, en tout cas dans l'arc républicain...

Plus de 3 000 médecins ont signé une pétition pour le maintien de l'AME. Les parlementaires du Modem ont signé une tribune en ce sens. Les pays qui avaient supprimé un tel dispositif, comme l'Espagne, l'ont rétabli. Faire de la politique politicienne sur ces questions est déshonorant. (Applaudissements à gauche)

Mme Ghislaine Senée .  - Sur 100 euros consacrés à la médecine, 50 centimes vont à l'AME. Vous parlez d'appel d'air, mais les migrants fuient la misère et la guerre : croyez-vous vraiment que ce soit pour l'AME qu'ils viennent en France ?

M. Stéphane Ravier.  - En tout cas, c'est pour ça qu'ils ne repartent pas...

Mme Ghislaine Senée.  - Vous parlez beaucoup des migrants, mais vous devriez parler avec eux, et avec les associations qui luttent pour leur accès à l'information, pour que l'on puisse se soigner, se loger et vivre dignement en France. Non, les migrants ne sont pas des experts en politique comparée ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. le président.  - Amendement n°25 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Ian Brossat.  - Nous sommes profondément attachés à l'AME. Les arguments invoqués pour la supprimer sont proprement aberrants. Elle n'entraîne aucun d'appel d'air, contrairement à ce que d'aucuns racontent. Du point de vue de la santé publique, nous avons intérêt à traiter les malades au plus tôt. Enfin, le coût du dispositif ne représente que 0,5 % des dépenses de l'assurance maladie.

M. le président.  - Amendement identique n°167, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Marion Canalès.  - La remise en cause de l'AME aurait un coût financier, sanitaire et humain. Trois anciens ministres de la santé se sont prononcés pour son maintien. Les conclusions provisoires du rapport Evin-Stefanini sont sans appel, et plus de 3 000 médecins ont souligné dans une tribune l'intérêt du dispositif. Après l'avoir supprimé, l'Espagne a fait marche arrière. L'AME évite le recours à l'hôpital, et 50 % des bénéficiaires potentiels de cette aide n'y ont pas recours. Nous parlons de VIH, de tuberculose, c'est-à-dire de santé publique et de risque épidémique, pas de soins de confort !

M. le président.  - Amendement identique n°329 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - La semaine dernière, des journalistes de France Inter informés des conclusions provisoires du rapport Evin-Stefanini expliquaient qu'il montrait l'absence d'abus et d'appel d'air. Le taux de non-recours est élevé, et le délai minimal de présence sur le territoire a déjà été allongé.

L'AME est la prestation sociale la plus contrôlée de notre pays. Sa suppression aurait des conséquences dévastatrices sur notre système de soins, aggravant la saturation des urgences. D'après un sondage récent, 56 % des Français sont favorables à l'AME, et même 61 % lorsqu'on leur explique les enjeux.

M. le président.  - Amendement identique n°433 rectifié, présenté par MM. Laouedj, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guérini, Guiol et Roux, Mmes Girardin et N. Delattre, MM. Fialaire et Grosvalet, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset.

M. Ahmed Laouedj.  - Nous le disons clairement : nous sommes contre la suppression de l'AME ! (Applaudissements sur de nombreuses travées à gauche) Idéologique, cette suppression est un non-sens sanitaire et économique, qui risque d'avoir de graves conséquences sur notre système de santé, car les pathologies prises en charge tardivement sont plus coûteuses.

Des médecins bénévoles, croyant encore à quelques valeurs humanistes, continueraient à soigner ces malades, qu'il y ait urgence ou non. Mais ce n'est pas le pays dans lequel nous souhaitons vivre ! Nous ne consentirons jamais à réduire les droits en matière de santé. Comme le disent les soignants dans leur tribune, l'AME est un outil essentiel à la santé des individus et à la santé publique : leur santé, c'est la nôtre ! (Applaudissements sur de nombreuses travées à gauche)

M. le président.  - Amendement identique n°567 rectifié, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

M. Xavier Iacovelli.  - La suppression de l'AME est une triple faute : déontologique - l'appel des 3 000 médecins le montre -, sanitaire - au vu du risque de contagion - et économique - traiter les maladies posteriori est plus coûteux qu'priori. Nous retirons notre amendement et voterons les autres, pour supprimer l'AMU au profit de l'AME. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

L'amendement n°567 rectifié est retiré.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - En écoutant les débats,...

M. Thomas Dossus.  - De votre côté, c'était le silence !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Silence gêné...

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - ... de nombreuses expressions me sont venues à l'esprit : vous n'avez pas le monopole du coeur, tout ce qui est excessif est insignifiant...

M. Hussein Bourgi.  - Ça tourne en boucle depuis hier... Changez de disque !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je ne partage pas votre vision morale : d'un côté, il y aurait les inattaquables, de l'autre ceux qui sont sans coeur et sourds à la fraternité...

Il est normal que nous débattions de la façon dont les soins sont pris en charge dans notre pays. Pour les étrangers en situation irrégulière, une prise en charge urgente est assurée. Ils peuvent ensuite s'inscrire à l'AME, qui couvre les soins à 100 %.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Pas tous !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Nous avons voté une aide médicale d'urgence qui inclut les maladies graves et douleurs aiguës, les soins liés à la grossesse et ses suites, les vaccinations réglementaires, la médecine préventive - un panier de soins tout à fait convenable. Nul délaissement de la santé des étrangers, nul risque pour celle des Français. Ramenons les choses à leur juste mesure.

Dans un pays qui a 3 000 milliards d'euros de dette, les considérations financières ne sont pas neutres. Est-ce un appel d'air ? Ce qui est certain, c'est qu'on a bien envie de continuer à bénéficier du système français quand on a commencé à y goûter... C'est un motif de maintien sur le territoire. (On proteste sur de nombreuses travées à gauche.)

M. Yannick Jadot.  - Une incitation à être malade !

M. Xavier Iacovelli.  - Personne ne fait exprès d'être malade !

M. Jean-François Husson.  - Laissez la rapporteure poursuivre !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La suppression de l'AME a aussi une autre motivation, que vous pourrez qualifier d'égoïste.

Mme Mathilde Ollivier. - Tout à fait !

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Laissez-moi quand même le temps de la formuler... Elle tient à notre cohésion nationale : nombre de Français ont du mal à comprendre que des personnes en situation irrégulière, qui ne paient pas de cotisations, soient mieux prises en charge qu'eux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Stéphane Ravier applaudit également ; protestations à gauche) Avis défavorable à l'ensemble des amendements.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Je tenterai d'éclairer le débat par cinq arguments rationnels, sans dogmatisme, mais avec lucidité.

Premièrement, l'AME est un dispositif de santé publique dont la visée est triple : humanitaire, sanitaire et économique. Cette question n'a pas sa place dans le présent texte. Ne créons pas de confusion inutile. (Marques d'assentiment à gauche)

Deuxièmement, contrairement à des idées reçues, l'AME n'est pas un facteur d'attractivité pour les candidats à l'immigration ni un facteur de tourisme médical. (Applaudissements à gauche et sur les travées du RDPI et du RDSE) Les bénéficiaires de l'AME qui sont pris en charge le sont pour des pathologies aiguës, non déclarées avant l'entrée sur le territoire. Mélanger les débats sur l'AME et ceux qui ont trait au contrôle de l'immigration est un non-sens.

Troisièmement, le Gouvernement soutient l'AME de façon constante depuis 2017. En 2019, nous l'avons réformée : elle est encadrée et maîtrisée.

M. Alain Joyandet.  - Son montant a doublé...

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - C'est la prestation la plus contrôlée de l'assurance maladie.

Quatrièmement, transformer l'AME en AMU n'est pas un simple changement sémantique. Cela comporterait des risques pour nos concitoyens. Il vaut mieux prévenir que guérir, prendre en charge une maladie avant qu'elle ne dégénère ou ne se propage.

En 2011, l'instauration d'un droit de timbre a eu pour conséquence une hausse de la fréquentation des urgences de 18 %, et de 7 % pour l'ensemble du système hospitalier. Les personnes malades se rendront aux urgences, où elles seront soignées. Cela coûtera plus cher au système de santé, car la prise en charge à l'hôpital coûte plus cher que la prise en charge en ville. (Mme Véronique Guillotin acquiesce.)

Est-ce à dire que l'AME ne peut pas être améliorée ? Non. Le Gouvernement n'est pas fermé, il est prêt à explorer toutes les pistes, à mettre tous les sujets sur la table, avec humanité et pragmatisme. C'est pourquoi, sous l'autorité de la Première ministre, Gérald Darmanin, Aurélien Rousseau et moi-même avons commandé à Claude Evin et Patrick Stefanini un rapport pour dresser un état des lieux de l'AME et proposer des pistes d'évolution. Leurs conclusions doivent être rendues début décembre. Nous les partagerons avec vous. Sans préjuger de leurs préconisations, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur ces amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; marques de déception à gauche)

M. Yannick Jadot.  - Après tout ce que vous avez dit !

M. Bernard Jomier.  - Je remercie Muriel Jourda, qui a présenté des arguments de fond. Mais la rédaction que vous proposez montre l'inadaptation totale du dispositif. L'AMU prendrait en charge les douleurs aiguës - un mal de dents qui passe avec un doliprane -, mais pas les douleurs chroniques, souvent révélatrices d'une pathologie grave. Quelle inconséquence !

Ce n'est pas un dispositif de santé publique. Il sera sans effet sur l'immigration, et ne répond pas à l'objectif que vous défendez. La motivation est ailleurs : c'est « un marqueur fort ». Mais de quoi ?

Sans faire de procès en xénophobie aux membres de la majorité sénatoriale - je ne parle pas de M. Ravier - vous posez un marqueur qui remet en cause les valeurs fondamentales de notre pays et de nos soignants. (Applaudissements à gauche)

Mme Corinne Narassiguin.  - Nous ne faisons pas de la morale, mais de l'éthique. De nombreux soignants se battent pour le maintien de l'AME, dont le collectif du personnel hospitalier de Seine-Saint-Denis.

Supprimer l'AME, c'est submerger encore davantage l'hôpital public, dans des territoires déjà sous-dotés.

Les Français s'étonnent que les étrangers soient soignés quand eux-mêmes n'ont pas accès aux soins, ai-je entendu. Rendez-vous la semaine prochaine dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour traiter des déserts médicaux ! Ce n'est pas en enlevant des droits aux étrangers que vous résoudrez le problème de l'accès aux soins.

Madame la ministre, après votre excellent plaidoyer, il est incompréhensible que vous ne souteniez pas les amendements de suppression.

M. Patrick Kanner.  - Il est inhabituel de voir cinq groupes du Sénat sur huit demander la suppression d'un même article - c'est la deuxième fois cet après-midi. Signe qu'il y a une cohérence dans la bienveillance à l'égard de populations qui vivent sur notre territoire et demandent solidarité. En transformant l'AME en AMU, la majorité a décidé de marquer le texte très à droite ; je le regrette.

Après votre argumentaire, que nous partageons, je m'étonne, madame la ministre, de votre conclusion. Cet article est clairement un cavalier, il sera censuré par le Conseil constitutionnel. (M. Xavier Iacovelli le confirme.) Vous devriez être solidaire du RDPI ! Mais nous avons compris que votre avis de sagesse est une posture, pour permettre à la droite de voter un article qui mérite d'être combattu. J'ai demandé un scrutin public. Nous vous appelons à agir en conscience, en responsabilité, avec bienveillance. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Valérie Boyer manifeste son exaspération.)

Mme Laurence Rossignol.  - Je ne fais pas l'insulte à ceux qui voteront cet article de les taxer de xénophobie, mais votre souci n'est clairement pas la santé publique. Il y a trop de politique dans ce débat.

Mme Catherine Belrhiti.  - Ce n'est pas de la politique, c'est la réalité !

Mme Laurence Rossignol.  - Ce texte vise à mieux intégrer les étrangers en situation régulière, lutter contre l'immigration clandestine et protéger notre pays des étrangers hostiles aux valeurs républicaines. Nous en sommes loin avec cet article. Vous courez derrière l'extrême droite ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) M. Ravier n'a pas de surmoi : au moins, avec lui, les choses sont claires.

M. Stéphane Ravier.  - Très claires !

Mme Laurence Rossignol.  - Le projet des Républicains, c'est la cohésion de la République. Dans le combat de valeurs qui nous occupe, vous cédez ! Vous pourrez toujours surenchérir sur M. Ravier, qui ne distingue pas les étrangers de ceux qui sont là depuis trois générations, mais pour qui travaillez-vous ? Pour l'extrême droite ! (Protestations à droite) Comportez-vous en républicains, menez une politique conforme aux valeurs de la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Pascal Savoldelli.  - Point de morale, de dogmatisme. Nous avons un devoir d'humanité. J'ai entendu des choses assez terribles. Certaines vies auraient-elles plus de valeur que d'autres ? Voilà la question qui se pose avec la suppression de l'AME. Il faut l'assumer.

En ouvrant ce débat, nous fracturons la France en opposant les Français et l'Autre. L'ADN de notre nation, c'est de considérer que toutes les vies se valent.

Les dépenses ? Il faut rapporter les 1,2 milliard d'euros que coûte l'AME aux 89,7 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales !

L'AME ne doit pas être une question idéologique. C'est aux médecins de déterminer la politique de soins.

M. le président.  - Merci de conclure.

M. Pascal Savoldelli.  - Or ils appellent publiquement à maintenir l'AME. Le législateur n'a pas à se substituer aux médecins. (Applaudissements sur quelques travées à gauche)

M. Stéphane Ravier.  - Chers élus de gauche (« Ah ! » à gauche), par votre acharnement à défendre l'AME - des soins gratuits réservés aux clandestins, des hors-la-loi dont le nombre s'élève à 423 000, soit l'équivalent de la ville de Toulouse, qui ne cotisent rien et perçoivent tout - vous prenez acte de leur présence irréversible sur notre territoire.

Ce message est un formidable appel d'air. Les candidats à l'émigration savent qu'ils trouveront en France des élus de gauche qui s'évertueront à ce qu'ils restent sur le territoire, qui vont même à la rencontre des clandestins pour leur faire connaître leurs droits, quand ils n'ont qu'un devoir : rentrer dans leur pays d'origine ! C'est là-bas qu'ils doivent être soignés. (M. Yan Chantrel proteste.)

M. François Patriat.  - L'appel à la sagesse, c'est l'appel à la réflexion et à la responsabilité, loin des postures. À gauche, vous connaissez Claude Evin ; à droite, vous connaissez Patrick Stefanini.

M. Bruno Retailleau.  - Très bien, même !

M. François Patriat.  - Pensez-vous que ces hommes de bords opposés pourraient aller à l'encontre des intérêts de la France ?

Vous transférez le financement de l'AME vers la sécurité sociale : à terme, cela nous coûtera plus cher. C'est une faute éthique, sanitaire, économique. Ne cédez pas à ceux qui invoquent le coût ou parlent d'appel d'air. J'en appelle à votre humanité pour voter ces amendements. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du RDSE et du groupe SER)

M. Bernard Jomier.  - Merci.

Mme Véronique Guillotin.  - Je voterai ces amendements. Transformer l'AME en AMU est une mauvaise décision économique et sanitaire. Les malades, non soignés, satureront les hôpitaux, qui les prendront en charge, mais ne seront pas payés.

Il n'y a pas d'appel d'air ni de non-maîtrise, le rapport Evin-Stefanini le confirme.

Prise à temps, une bronchite se soigne avec six jours d'antibiotiques ; si vous laissez traîner, le malade risque de se retrouver en réanimation, ce qui coûtera bien plus cher ! Votons ces amendements. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du RDPI, du GEST et du groupe SER)

M. Bruno Retailleau.  - J'observe que sur le banc du Gouvernement, les deux ministres n'ont pas le même avis. (Exclamations sur les travées du groupe SER et du RDPI)

Je n'ai aucune leçon d'humanité à recevoir de quiconque. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'égalité ontologique des êtres humains est fondatrice de nos valeurs. (M. Mickaël Vallet s'exclame.)

Dans le PLFSS, le Gouvernement demande un effort aux Français qui cotisent à hauteur de 800 millions d'euros en dépenses courantes de soins. (Protestations à gauche) Il est normal de se pencher sur l'AME, qui connaît une forte progression.

M. Hervé Gillé et Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Cela coûtera plus cher !

M. Bruno Retailleau.  - Le panier de soins est quasi équivalent à celui des résidents : ne manquent que la PMA et les cures. C'est sans équivalent en Europe. L'Allemagne, le Danemark, la Suède, l'Italie ont-ils plus de problèmes de santé publique que nous ? Avant la création de l'AME en 1999, la France était-elle plus sujette aux pandémies ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Le sida !

M. Bruno Retailleau.  - Il y a un lien entre notre capacité à réguler l'immigration et à préserver notre régime social.

M. Xavier Iacovelli.  - Un peu de solidarité !

M. Bruno Retailleau.  - Les socialistes danois l'ont bien compris : entre ouverture des frontières et protection sociale, il faut choisir ! (On s'impatiente à gauche.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Terminé !

M. Bruno Retailleau.  - Nous avons choisi, et transformons l'AME en AMU. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Hervé Gillé.  - Dix-neuf secondes de dépassement !

M. Éric Kerrouche.  - Les séances de psychothérapie en direct de M. Ravier rendent le débat compliqué. (Sourires à gauche) Réduire une grande donnée statistique au chiffre de la population de Toulouse est trompeur ; réparti sur l'ensemble du territoire, le volume est négligeable.

Il n'y a pas de fraude à l'AME, ou très peu. Il n'y a pas d'appel d'air. Le taux de non-recours est considérable. Or M. Retailleau dresse immédiatement le lien entre AME et immigration, lien que rien n'étaye. Nous ne parlons plus de l'AME mais d'un totem politique. On sort de la rationalité, de notre rôle de législateur, alors que les arguments objectifs ont été rappelés par la ministre. Ce mauvais choix, des gens comme vous et moi vont le payer. Prenons du recul et de la hauteur.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - D'après Médecins du Monde, le non-recours s'élèverait à 80 %. Est-ce à dire que huit étrangers sur dix venus pour l'AME sont devenus amnésiques ? (Sourires et applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER)

M. Patriat semble être le seul à avoir compris comment le raisonnement de Mme la ministre aboutit à un avis de sagesse.

Mme Laurence Rossignol.  - Il a beaucoup d'expérience. (Sourires)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - De quelle promesse cette sagesse est-elle la contrepartie ? Que cache-t-elle ? Nous devrions suivre l'avis du ministre de la santé, qui est opposé à cet article. Qu'avez-vous négocié avec la droite ? (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

M. Yannick Jadot.  - Il y a quelques jours, Bruno Retailleau lançait un appel solennel à soutenir les Arméniens du Haut-Karabagh, convoquant Missak Manouchian, immigré mort pour la France. Faut-il être mort pour la France pour mériter votre respect ? (Protestations exaspérées sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bruno Retailleau.  - Nul !

M. Yannick Jadot.  - Ces sans-papiers qui construisent vos maisons, ramassent vos poubelles, livrent vos repas, vous les avez applaudis pendant la pandémie, à laquelle ils ont payé un tribut élevé. Ne méritent-ils pas eux aussi votre respect et votre reconnaissance, même s'ils ne sont pas morts pour la France ? (Mêmes mouvements) Au moment de supprimer l'AME, pensez à ce que ces travailleurs de première et deuxième lignes ont fait pour nous pendant le covid ! (MM. Thomas Dossus et Patrick Kanner applaudissent.)

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Peut-être n'avez-vous pas entendu tous mes propos. J'ai dit que le Gouvernement était très attaché au maintien de l'AME.

M. Hussein Bourgi.  - Soyez cohérente jusqu'au bout !

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Sans dogmatisme aucun, puisque ce sujet est arrivé dans ce texte où il n'a pas sa place (on le confirme vivement à gauche), Gérald Darmanin, Aurélien Rousseau et moi-même avons confié à MM. Evin et Stefanini une mission, dont, par cohérence, nous attendons les conclusions.

Mme Audrey Linkenheld.  - Cette mesure n'a rien à faire dans ce texte !

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Nous aurons le débat à l'Assemblée nationale, sur la base des conclusions de cette mission. D'où notre avis de sagesse.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - C'est l'article 45 !

M. Guy Benarroche.  - En effet, l'AME n'a rien à faire dans ce projet de loi. Le rapport Evin-Stefanini ne fera que confirmer ce que nous savons déjà.

La sagesse serait de supprimer cette mesure qui n'a rien à faire dans ce texte ! (Mme Émilienne Poumirol applaudit.) Nous en parlerons au PLFSS, ou dans un projet de loi Santé. Ce n'est pas à la commission des lois de se saisir de ce sujet. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER ; M. Ian Brossat applaudit également.)

À la demande du groupe SER, les amendements identiques nos25 rectifié, 167, 329 rectifié et 433 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°23 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 331
Pour l'adoption 140
Contre 191

Les amendements identiques nos25 rectifié, 167, 329 rectifié et 433 rectifié ne sont pas adoptés.

(Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; on s'indigne à gauche.)

M. le président.  - Amendement n°624, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

I.- Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

I.- Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

...°  Au 3° de l'article L. 111-2, au 2° de l'article L. 121-7, au second alinéa de l'article L. 132-1 et au troisième alinéa de l'article L. 264-2,  les mots : « de l'État » sont remplacés par les mots : « d'urgence » ;

...° Le titre V du livre II est ainsi modifié :

II.- Alinéa 5

Après le mot :

sociale 

insérer les mots :                                                  

depuis plus de trois mois

III.- Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans ce cas, la prise en charge des dépenses mentionnées à l'article L. 251-2 peut être partielle.

IV.- Après l'alinéa 7 

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent chapitre par les organismes d'assurance maladie, son coût, ainsi que les données générales recueillies en matière de santé publique.

V.- Alinéa 18

Remplacer cet alinéa par six alinéas ainsi rédigés :

2° Le chapitre II est ainsi modifié :

a) L'article L. 252-1 est ainsi modifié :

- à la première phrase du premier alinéa et au quatrième alinéa, la première occurrence des mots : « de l'État » est remplacée par les mots : « d'urgence » ;

- au troisième alinéa, la seconde occurrence des mots : « de l'État » est remplacée par les mots : « d'urgence » ;

b) À l'article L. 252-2, les mots : « de l'État » sont remplacés par les mots : « d'urgence » ;

c) Au premier alinéa de l'article L. 252-3, la première occurrence des mots : « de l'État » est remplacée par les mots : « d'urgence » ;

VI. Alinéas 19 à 26

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

3° À la première et à la seconde phrase de l'article L. 253-1, les mots : « de l'État » sont remplacés par les mots : « d'urgence » ;

VII.- Après l'alinéa 27 :

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

I bis.-  Au 1° du I et au premier alinéa du III de l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, ainsi qu'au 3° du III de l'article L. 162-20-1 et à l'article L. 174-20 du même code, les mots : « de l'État » sont remplacés par les mots : « d'urgence ».

VIII.- Alinéa 28

Rédiger ainsi cet alinéa :

II.- Le présent article entre en vigueur le 1er juin 2024.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Nous garantissons l'opérationnalité du nouveau dispositif en alignant les conditions d'éligibilité sur celles de l'ancienne AME.

Une fois n'est pas coutume, l'amendement demande également un rapport sur les données recueillies en matière de santé publique : cela nous a été soufflé par le directeur de l'Ofii.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Sagesse, par souci de cohérence avec la mission confiée à MM. Evin et Stefanini.

L'amendement n°624 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°506 rectifié, présenté par Mme Souyris, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée.

I.  -  Alinéa 6

Après les mots :

état de santé

insérer les mots :

physique et psychique

II.  -  Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Les soins psychiatriques.

Mme Anne Souyris.  - Cet avis de sagesse est une grande tristesse. (Mme la ministre secoue la tête.) Tristesse aussi de constater, à peine élue, que l'humanisme du Sénat n'est pas au rendez-vous. (Protestations sur quelques travées du groupe Les Républicains) D'où cet amendement de repli.

J'ai visité le centre de rétention de Vincennes, où 245 étrangers sont retenus dans des bâtiments vétustes, dans des conditions indignes, en attente de leur renvoi forcé. On m'a signalé le nombre croissant de personnes souffrant de problèmes psychiatriques lourds. L'accès aux soins psychiatriques doit être maintenu : c'est une question de dignité, de santé publique, mais aussi de sécurité publique.

M. le président.  - Amendement n°484 rectifié, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Belin et Khalifé, Mme Canayer, M. Duffourg, Mme Devésa, M. Klinger, Mme Belrhiti, MM. Reynaud, Laugier et Bas, Mme Berthet, MM. Brisson, Genet et Favreau, Mmes Jacques et Bellurot et MM. Somon, Tabarot, Gremillet et Menonville.

Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les soins psychiatriques d'urgence.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Cet amendement vise à étendre le panier de soins de l'AMU aux soins psychiatriques d'urgence - c'est la différence avec l'amendement précédent.

La pathologie psychotique d'un forcené qui risque de passer à l'acte est-elle une maladie grave au sens de l'article 1er I ? Mieux vaut préciser que l'on ne doit pas se limiter aux seules maladies somatiques.

C'est un enjeu de santé, mais aussi de sécurité publique. Selon l'Observatoire international des prisons, 20 % des personnes détenues souffrent de troubles psychotiques. Mieux vaut prévenir que guérir.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La France entière attend des soins psychiatriques, Français et étrangers confondus !

L'amendement n°484 rectifié a le mérite de viser les seuls soins d'urgence. Cela étant, nous avons préféré ne pas lister les soins pris en charge : restons-en à une rédaction large, pour éviter les omissions. Avis défavorable à l'amendement n°506 rectifié, demande de retrait de l'amendement n°484 rectifié.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Sagesse, par cohérence, comme sur tous les amendements qui visent à modifier le panier de soins. Le Gouvernement a démontré son attachement à l'AME depuis 2017. Nous attendons désormais les conclusions de la mission Evin-Stefanini, avant le débat à l'Assemblée nationale.

Mme Laurence Rossignol.  - On n'a pas attendu longtemps ! À peine votre AMU votée que des amendements viennent tenter de combler les trous dans la raquette, preuve que votre affaire ne fonctionne pas !

Je ne doute pas que l'AME sera rétablie à l'Assemblée nationale. (On ironise sur les travées du groupe Les Républicains.) Pour autant, je propose de voter l'amendement de Mme Souyris.

Mme Aeschlimann propose une mesure de sécurité publique visant à protéger les Français des étrangers psychotiques, mais la psychiatrie ne se limite pas à soigner des forcenés qui brandissent un couteau. Les patients doivent être pris en charge bien en amont - c'est le problème de votre critère d'urgence. Une tentative de suicide relève-t-elle de l'urgence ? Au bout de combien de tentatives ? Tout cela n'a pas de sens.

Mme Anne Souyris.  - Je m'associe aux propos de Mme Rossignol : l'urgence n'a pas de sens. Il y a quelques mois, une personne en centre de rétention est morte après plusieurs épisodes psychiatriques graves non traités. La situation ne fait qu'empirer : on traite l'urgence à l'hôpital, pas le mal chronique.

M. Bernard Jomier.  - Mme la rapporteure se livre bien à une énumération, puisque le texte cite les douleurs aiguës, mais pas les douleurs chroniques.

Ce n'est pas au Parlement d'établir les référentiels de santé, de définir le panier de soins.

Je n'ai pas compris si, pour vous, les soins psychiatriques devaient relever de l'AMU - seulement que vous préfériez l'amendement de Mme Aeschlimann, car il contient le mot « urgence ». (Mme Laurence Harribey s'en amuse.) On abaisse le niveau de notre assemblée. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Nous n'avons pas proposé d'amendement à cet article, car c'est une quête vaine, mais voterons celui de Mme Souyris, car les troubles psychiatriques doivent évidemment être suivis. L'AMU est une impasse. Attendons le rapport Evin-Stefanini avant de changer la législation. (M. Xavier Iacovelli applaudit.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Madame la ministre, vous avez délivré un plaidoyer robuste pour l'AME, mais votre conclusion était assez baroque. À deux reprises, vous avez indiqué que le rapport Evin-Stefanini serait remis avant la discussion à l'Assemblée nationale. Il aurait été normal d'en disposer avant l'examen au Sénat ! Je suis fière d'être sénatrice, et je regrette que vous traitiez le Sénat avec si peu d'égards. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Guy Benarroche.  - Le Sénat a voté la suppression de l'AME, mais nous savons tous que le débat se fera à l'Assemblée nationale. Ce vote n'est qu'un marqueur dans une négociation politique. Nous aurons eu une discussion longue et intéressante, tant mieux - mais chacun sait que l'AME demeurera. Jamais le travail du Sénat n'a été ce point dévalué. Jusqu'ici, le travail de la commission des lois a été sans faille, mais cet article n'est pas du niveau attendu. D'ailleurs, vous ne le défendrez même pas en CMP... (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Mme Rossignol s'égare. Si notre rapporteure s'est montrée plus ouverte à mon amendement, c'est qu'il vise uniquement les soins d'urgence.

M. Bernard Jomier.  - L'avis est tout de même défavorable !

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Vous caricaturez volontiers, mais il y a bien une différence majeure avec l'amendement n°506 rectifié.

Cela dit, j'entends la volonté d'éviter les inventaires à la Prévert, et je retire mon amendement. (Mme Frédérique Puissat applaudit.)

L'amendement n°484 rectifié est retiré.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Madame de La Gontrie, je ne méprise en aucun cas le travail des sénateurs. MM. Evin et Stefanini devaient initialement remettre leurs conclusions en janvier. Il se trouve que le débat se tiendra à l'Assemblée nationale en décembre, c'est pourquoi nous leur avons demandé d'anticiper la remise du rapport. Faire un état des lieux de l'AME prend du temps : il n'aurait pas été prêt avant l'examen au Sénat.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - France Inter l'a bien eu !

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Non, il s'agit d'un pré-rapport.

En aucun cas, nous ne préjugeons de ses conclusions. D'où notre avis de sagesse sur l'ensemble des amendements. (M. Hervé Gillé et Mme Corinne Narassiguin le déplorent.)

M. Xavier Iacovelli.  - Très bien.

M. Victorin Lurel.  - Je suis un vieux parlementaire, madame la ministre : laissez-moi vous dire que personne n'est dupe de votre avis de sagesse. Preuve de votre connivence avec la droite, vous retirez un amendement, vous donnez un avis de sagesse... Élucidons cette manoeuvre machiavélique : il ne s'agit que de communication ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Guillaume Gontard.  - Madame la ministre, votre avis de sagesse est incompréhensible. Vous auriez dû donner un avis favorable aux amendements de suppression, en attendant les conclusions de la mission. Cela aurait été clair. Nous ne sommes pas dupes. Le Sénat est devenu la chambre de négociation entre le Gouvernement et Les Républicains.

Le cinéma sur l'AME, en attendant celui sur l'article 3, aurait pu être amusant pour les spectateurs que nous sommes, mais le message envoyé à nos concitoyens est terrible : vous nourrissez les fantasmes sur l'appel d'air. Avec ce vote qui est tout sauf anodin, vous vous laissez entraîner dans une dérive ultra-droitière. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER ; Mme Silvana Silvani applaudit également.)

L'amendement n°506 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°507 rectifié, présenté par Mme Souyris, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée.

Alinéa 6

Après les mots:

état de santé

insérer les mots :

, notamment en cas d'affection longue durée,

Mme Anne Souyris.  - Même combat pour nos principes. Les personnes souffrant d'affections de longue durée (ALD) sont particulièrement vulnérables et risquent de graves complications. Les intégrer à l'AMU offre un filet de sécurité. C'est une démarche de prévention, un investissement de santé à long terme, pour éviter des hospitalisations coûteuses.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Votre amendement ne semble pas conforme à son objet, puisqu'il ne vise que les cas où l'AMU est attribuée sur décision discrétionnaire du ministre de la santé.

Le périmètre que nous avons retenu comprend déjà les ALD. Votre amendement est donc satisfait. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Sagesse, pour les mêmes raisons que précédemment.

L'amendement n°507 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°358 rectifié bis, présenté par M. Klinger, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bas et Bazin, Mmes Bellurot et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mme Gosselin, MM. Gremillet, Grosperrin, Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Joyandet et Karoutchi, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, Le Gleut, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Panunzi, Paul, Paumier, Pellevat, Pernot et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux, Cuypers et Khalifé, Mme Petrus et M. Somon.

Alinéa 9

Après le mot :

graves

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

et les soins urgents dont l'absence mettrait en jeu le pronostic vital ou pourrait conduire à une altération grave et durable de l'état de santé de la personne ou d'un enfant à naître ;

M. Christian Klinger.  - L'amendement restreint le périmètre de l'AMU. La notion de douleurs aiguës est trop vague, M. Jomier l'a dit. Je propose de la remplacer par cette rédaction, adoptée par le Sénat lors du projet de loi de finances pour 2023.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement, qui apporte de la lisibilité.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Sagesse.

Mme Laurence Rossignol.  - Pourtant, ce n'est pas sage, c'est même honteux !

L'amendement n°358 rectifié bis est adopté.

(Protestations sur les travées du groupe SER)

Mme Laurence Rossignol.  - Les médecins parmi vous auraient dû s'abstenir. C'est scandaleux !

M. le président.  - Amendement n°125, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

M. Aymeric Durox.  - Supprimons la prise en charge par l'AMU des examens de médecine préventive, alors que l'AME a coûté 1,2 milliard d'euros en 2022 - c'est délirant ! - et qu'un tiers des Français renoncent aux soins pour des raisons financières.

En outre, les immigrés clandestins bénéficient de dix autres dispositifs de soins, pour 600 millions d'euros supplémentaires, selon un récent rapport de l'Assemblée nationale.

La médecine préventive, essentielle à la santé publique, ne relève pas, par nature, de l'urgence médicale. Ciblons nos dépenses pour mieux répondre à la crise du système de santé.

Oui, l'AME crée un appel d'air, qui surcharge un système de santé déjà ébranlé par le Gouvernement Macron. On est passé de 150 000 bénéficiaires en 2004 à 411 000 en 2022 ! Cela illustre bien la faillite morale du système. (Protestations à gauche)

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La médecine préventive, vous le reconnaissez, est importante en termes de santé publique. En la supprimant du panier de soins de l'AMU, nous risquons de favoriser la propagation de maladies... (Exclamations à gauche)

Mme Laurence Rossignol.  - Ah, voilà !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  -  Ce sont les propos que j'ai toujours tenus : vous n'écoutez que ce que vous voulez !

Avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement est très bien ! Pourquoi vous arrêter en si bon chemin ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis défavorable. La médecine préventive est un enjeu de santé publique.

M. Guy Benarroche.  - Tout à l'heure, nous entendions qu'il était inacceptable de soigner des personnes en situation irrégulière. Mais on soigne bien des personnes en prison, qui sont parfois étrangères...

L'amendement n°125 n'est pas adopté.

L'amendement n°431 rectifié bis n'est pas défendu.

À la demande du groupe Les Républicains, l'article 1er I est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°24 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 336
Pour l'adoption 200
Contre 136

L'article 1er I, modifié, est adopté.

ARTICLE 1er J

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux, Mme Girardin, M. Grosvalet, Mme Pantel et M. Masset.

Supprimer cet article.

Mme Maryse Carrère.  - Cet article supprime l'obligation pour les autorités de transport d'accorder aux étrangers en situation irrégulière des réductions tarifaires. Cela soulève des difficultés pratiques et risque d'accroître le risque de fraude : ceux qui payaient ne le feront plus.

À l'heure où nous luttons pour réduire notre empreinte carbone, il faudrait plutôt élargir les tarifs réduits.

M. le président.  - Amendement identique n°40 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Pascal Savoldelli.  - Après la caution demandée aux étudiants étrangers, la suppression des transports à tarif réduit en Île-de-France pour les bénéficiaires de l'AMU ! C'est une marotte francilienne : la décision de Valérie Pécresse de 2016 a été annulée en 2018 par le tribunal administratif de Paris pour discrimination. La loi SRU avait prévu ces réductions sous conditions de revenu.

Vous isolerez encore les plus précaires et nourrirez le repli sur soi. Dégrader l'accueil ne régule en aucun cas les flux migratoires. Votre article est purement dogmatique. (M. Stéphane Ravier s'exclame.)

M. le président.  - Amendement identique n°168, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - Même en situation irrégulière, on a besoin de se déplacer, par exemple pour effectuer les démarches de régularisation. Supprimer le tarif préférentiel est une injustice criante pour des étrangers déjà en situation très difficile.

Cet article est téléguidé par Valérie Pécresse, qui a déjà renié ses promesses de campagne sur le passe Navigo. Ce n'est pas à la hauteur du Sénat !

M. Mickaël Vallet.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement identique n°288 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - C'est l'article Pécresse ! Elle reconnaît elle-même que cela fait trois ans qu'elle veut mettre fin à ce qu'elle appelle une « prime à l'illégalité ». C'est loufoque ! Cet article aurait dû être déclaré irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.

Cette mesure coûte six fois moins que la fraude... C'est, encore une fois, un positionnement purement idéologique.

M. le président.  - Amendement identique n°474 rectifié bis, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

M. Olivier Bitz.  - Le génie créateur de la majorité sénatoriale est sans limites ! Cet article ferait peser sur les agents des guichets le contrôle de la régularité du séjour. Ce n'est pas leur rôle.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis défavorable.

Premièrement, il est exact que la commission des lois a adopté une disposition à la demande d'Île-de-France Mobilités.

Deuxièmement, chers collègues, faites-nous ce crédit : personne n'imagine qu'un billet de RER à tarif réduit crée un appel d'air et que son existence est connue dans toute l'Afrique ! (On s'exclame à gauche.)

Il ne s'agit pas de priver les bénéficiaires de l'AMU d'un droit à un tarif réduit. La tarification en fonction du niveau de revenus existe, mais nous avons été surpris de constater que les bénéficiaires de l'AME se targuaient de leur irrégularité pour demander un droit au tarif réduit...

Le tribunal administratif de Montreuil a considéré que cela relevait de l'égalité devant les services publics, mais il est étonnant d'exciper de son irrégularité pour demander un tarif réduit.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Cette disposition ne figurait pas dans le projet de loi initial. Toutefois, octroyer un tarif réduit aux étrangers en situation irrégulière est difficilement justifiable. Depuis 2020, les préfets ont instruction de tirer toutes les conséquences de la fin du droit au séjour des étrangers. Sagesse.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - On pose, enfin, une condition de régularité pour bénéficier des tarifs de solidarité dans les transports. J'associe à mon propos Valérie Pécresse, Marie-Carole Ciuntu, Agnès Evren, Marie-Claire Carrère-Gée, Anne Chain-Larché, Jacqueline Eustache-Brinio et Roger Karoutchi qui a toujours combattu cette injustice au Sénat ! Car oui, c'est injuste vis-à-vis des usagers en règle.

En Île-de-France, jusqu'en 2016, la réduction atteignait 75 % pour les étrangers en situation irrégulière. Si le juge administratif a imposé cette interprétation défavorable de la loi SRU, c'est parce que les textes l'y contraignaient. Je me réjouis de l'adoption de cet article contre la prime à l'illégalité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Joshua Hochart.  - On voudrait maintenir des avantages financiers pour les clandestins, alors que le coût des transports explose. (Mme Laurence Rossignol proteste.) Votre mentalité, c'est « toujours moins cher pour les autres, toujours plus cher pour les nôtres » ! (M. Alain Duffourg applaudit.)

M. Éric Kerrouche.  - Les vôtres et les nôtres ? (M. Stéphane Ravier s'exclame.) Prenez vos médicaments, monsieur Ravier !

Une voix à gauche.  - Ça va bien se passer !

M. Éric Kerrouche.  - Pour vous, on n'est jamais assez français. Mais, une fois dans votre vie, consultez les données - pas les fantasmes. Ainsi, sur trois générations, un tiers des Français a une ascendance étrangère et cela se passe très bien ! (M. Stéphane Ravier proteste.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Et alors ?

M. Éric Kerrouche.  - C'est l'histoire de la France. Nous sommes un pays de diversité, ce qui fait notre force. Vous êtes le ferment de la division ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE-K)

Les amendements identiques nos19 rectifié bis, 40 rectifié, 168, 288 rectifié et 474 rectifié bis ne sont pas adoptés.

L'article 1er J est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er J

M. le président.  - Amendement n°67 rectifié quinquies, présenté par MM. Canévet et Bleunven, Mme N. Goulet, MM. Longeot et J.M. Arnaud, Mmes Romagny et Havet, M. Cadic, Mmes O. Richard et Jacquemet et M. L. Hervé.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le mot : « visiteur », sont insérés les mots : « de propriétaire, ».

M. Michel Canévet.  - Pour l'attribution de visas de long séjour, je propose de prendre en compte les propriétaires, car de nombreux Britanniques propriétaires dans le Finistère ont été pénalisés par le Brexit.

M. le président.  - Amendement n°336 rectifié bis, présenté par Mmes Imbert, Noël et Bellurot, MM. Sautarel et H. Leroy, Mmes Demas, Berthet et Joseph, M. Paccaud, Mme Malet, MM. Burgoa et Belin, Mme Estrosi Sassone, MM. Anglars, Pellevat et Saury, Mme Belrhiti, MM. Houpert et Pointereau, Mme P. Martin, M. Brisson, Mmes Micouleau et Gruny, MM. Bouchet et Gueret, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Tabarot, D. Laurent, Bouloux et Chatillon, Mme Dumont et MM. Lefèvre et Khalifé.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Tout ressortissant étranger propriétaire en France d'une résidence secondaire peut solliciter la délivrance d'un visa de très long séjour l'autorisant à séjourner sur le territoire national pour une durée ne pouvant excéder six mois par an. La durée de validité de ce visa est de cinq ans. »

Mme Pascale Gruny.  - Les ressortissants étrangers propriétaires d'une résidence secondaire en France doivent bénéficier d'un visa de très long séjour.

M. le président.  - Amendement n°489 rectifié ter, présenté par Mme Berthet, M. Genet, Mme Puissat, M. Bas, Mmes Bellurot et Demas, M. Houpert, Mme V. Boyer, M. Paccaud, Mme Dumont, M. Favreau, Mme M. Mercier et M. Lefèvre.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 312-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 312-... ainsi rédigé :

« Art. L. 312-....  -  Le visa long séjour est délivré de plein droit aux ressortissants britanniques propriétaires d'une résidence secondaire en France. Ils sont à ce titre exemptés de souscrire une demande de visa long séjour.

« Les conditions d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État. »

M. Philippe Bas.  - Cet amendement est le meilleur des trois, parce qu'il est le plus ciblé. C'est lui qui créera le moins d'appel d'air (exclamations à gauche) parce qu'il est réservé aux seuls Britanniques. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Je demande l'avis du Gouvernement.

Vous posez une question très pratique, celle des conséquences du Brexit sur les citoyens britanniques ayant une résidence secondaire en France et dont la résidence principale demeure au Royaume-Uni. Actuellement, ils ne peuvent pas rester plus de 90 jours. Or le visa de long séjour n'est pas adapté à des séjours épisodiques. Il faut trouver une solution, madame la ministre.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Je vous rassure : ces ressortissants peuvent déjà bénéficier d'un tel visa s'ils résident plus de trois mois sur une période de 180 jours glissants sur notre territoire. (« Ah ! » à gauche) En effet, les administrations font l'objet de directives particulières depuis le Brexit : chaque situation est instruite, dans le respect du droit européen et du Ceseda.

Les Britanniques peuvent donc séjourner en France jusqu'à douze mois, après quoi ils doivent demander une carte de séjour pluriannuelle. Par ailleurs, 160 000 citoyens britanniques ont bénéficié de mesures facilitant leur séjour en vertu de l'accord de retrait.

Retrait, donc, des amendements nos67 rectifié quinquies et 489 rectifié ter qui sont satisfaits. Avis défavorable à l'amendement n°336 rectifié bis qui crée un nouveau visa.

Mme Corinne Narassiguin.  - Après le durcissement sur le regroupement familial voté hier et la possible suppression des articles 3 et 4, voilà que nous volons au secours des Britanniques ! Pour nos collègues Les Républicains, il y a les mauvais et les bons étrangers !

M. Philippe Bas.  - C'est vrai !

M. Stéphane Ravier.  - Oui, c'est ça : bravo !

Mme Corinne Narassiguin.  - À eux, on ne demande pas de parler français !

Mme Valérie Boyer.  - Honni soit qui mal y pense !

M. Philippe Bas.  - Cela ne relève pas de votre ministère, madame la ministre, mais les procédures que vous avez rappelées ne fonctionnent pas : les démarches sont trop complexes. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE-K et SER)

L'amendement n°67 rectifié quinquies n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°336 rectifié bis.

L'amendement n°489 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 20 h 10.

Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 40.

Mises au point au sujet d'un vote

M. Laurent Somon.  - Au scrutin public n°24 sur l'article 1er I, Alain Milon souhaitait voter contre et non pour. (Mmes Marie-Pierre de La Gontrie et Audrey Linkenheld s'exclament.)

Mme Isabelle Florennes.  - Sur le même article 1er I, Nathalie Goulet et Bernard Delcros souhaitent voter contre.

Mme la présidente.  - Acte vous est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l'analyse politique du scrutin.

Discussion des articles (Suite)

APRÈS L'ARTICLE 1er J (Suite)

Mme la présidente.  - Amendement n°65 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet et Tabarot, Mmes Lopez et Garnier, M. Klinger et Mmes Josende et Goy-Chavent.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le maire ne peut valider l'attestation d'accueil si le logement de l'hébergeant est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l'article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. »

Mme Valérie Boyer.  - Un étranger souhaitant venir en France pour une visite privée ou familiale inférieure à trois mois doit justifier d'un hébergement suffisant et des moyens de subvenir aux frais de séjour.

Je souhaite que les maires ne valident plus l'attestation d'accueil si le logement de l'hébergeant est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV). (Marques d'indignation à gauche)

M. Ronan Dantec.  - Pourquoi ?

Mme Valérie Boyer.  - Les attributions de logement y sont strictes. Certains ne repartent plus. Les sociaux-démocrates, au Danemark, ont créé des procédures spéciales pour certains quartiers.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Malgré votre pugnacité, retrait, ou avis défavorable. Vous pouvez vous trouver en QPV avec un logement correct et des revenus permettant d'accueillir un étranger. Il y aurait rupture du principe constitutionnel d'égalité.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. Pascal Savoldelli.  - L'exposé des motifs est très clair : « ne plus valider l'attestation d'accueil si le logement de l'hébergeant est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. »

On ne peut rester indifférent à la gravité de ces propos.

M. Jérôme Durain.  - « Salauds de pauvres ! »

M. Pascal Savoldelli.  - C'est inacceptable. Pourquoi une telle discrimination ? (M. Stéphane Ravier s'en amuse.)

La France est une et indivisible. J'espère que nous partageons tous ce principe républicain. Or vous vous servez de ce projet de loi pour créer des catégories de Français. Pour une fois, je suivrai la commission. Sinon, il faudrait que je dise à mes 1,4 million de concitoyens du Val-de-Marne que nous ne sommes pas égaux.

J'aime beaucoup Jean Ferrat.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - On s'en serait douté ! (Sourires)

M. Pascal Savoldelli.  - Je pense donc à « Cet air de liberté au-delà des frontières / Aux peuples étrangers qui donnaient le vertige ». (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et du GEST)

Mme Valérie Boyer.  - Un effort considérable est déployé dans la politique de la ville. Les conditions d'octroi des logements sont particulièrement difficiles. Or lorsque nous avons auditionné des représentants d'autres pays, nous avons constaté que ces quartiers y faisaient l'objet de traitements particuliers.

Il ne s'agit pas de discriminer (protestations à gauche), mais de prendre en compte certaines difficultés. Lorsqu'elles arrivent en France avec une attestation de tourisme, les personnes ne peuvent parfois plus repartir, ce qui aggrave les difficultés de ces quartiers.

Je retire mon amendement d'appel. (M. Hervé Gillé et Mme Audrey Linkenheld s'exclament.)

L'amendement n°65 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°430 rectifié, présenté par Mme Cazebonne, MM. Patriat, Rambaud, Buis, Iacovelli et Patient, Mme Havet et M. Lévrier.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé : 

I.  -  À l'article L. 436-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après la première occurrence du mot : « articles », est insérée la référence : « L. 423-1, ».

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Mme Samantha Cazebonne.  - Cet amendement exonère les conjoints étrangers de Français de toute taxe liée à la délivrance ou au renouvellement de leur titre de séjour. Cela constitue une discrimination fondée sur la nationalité, selon le Défenseur des droits.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis défavorable, car les taxes et droits de timbre couvrent les frais de dossier.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. François Bonhomme.  - Régulièrement, on se prévaut de la Défenseure des droits pour réclamer la fin de mesures prétendument discriminatoires. Mais Mme Hédon, autorité soi-disant indépendante, n'est pas impartiale. On trouve dans son rapport annuel un chapelet des discriminations. Elle est contre tout contrôle d'identité...

M. Thomas Dossus.  - Elle a raison !

M. François Bonhomme.  - ... et met en cause les chefs d'établissement ayant l'outrecuidance de demander une tenue correcte. À force, on finit par affaiblir la cause que l'on défend. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Éric Kerrouche.  - Le Défenseur des droits est bien une autorité administrative indépendante (AAI). Elle a le droit d'exprimer les propos qu'elle souhaite. Lisez le rapport de 2017 d'un autre Défenseur des droits, bien plus prononcé sur l'immigration, Jacques Toubon. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

L'amendement n°430 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°120 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant l'article L. 430-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 430-... ainsi rédigé :

« Art. L. 430-.... - Aucun titre de séjour ne peut être délivré lorsque l'étranger se trouve en situation irrégulière sur le territoire français.

« Le fait, pour un étranger, de pénétrer ou de séjourner en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 312-2 et L. 411-1 ou de se maintenir en France au-delà de la durée autorisée par son visa est puni d'un an d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende. »

M. Joshua Hochart.  - Nous voulons envoyer un message clair et ferme aux étrangers voulant arriver illégalement en France ou ceux qui veulent se maintenir en France. Aucun titre de séjour ne doit être délivré dans ce cas, selon le programme présidentiel de Marine Le Pen. Enfreindre la loi doit être puni, pas récompensé.

Mme la présidente.  - Amendement n°549 rectifié ter, présenté par M. Ravier.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'article L. 821-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 821-1.  -  L'étranger qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 311-1, L. 411-1, L. 411-3 et L. 433-7 ou qui s'est maintenu en France au-delà de la durée autorisée par son visa sera puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros.

« La juridiction pourra, en outre, interdire à l'étranger condamné de pénétrer ou de séjourner en France. L'interdiction du territoire emporte, de plein droit, reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant à l'expiration de la peine d'emprisonnement. » ;

2° Après l'article L. 821-1, il est inséré un article L. 821-1-... est ainsi rédigé :

«  Art. L. 821-1-....  -  Les peines prévues à l'article L. 821-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un État membre de l'Union européenne :

« 1° S'il a pénétré sur le territoire métropolitain sans remplir les conditions mentionnées aux points a, b ou c du paragraphe 1 de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) et sans avoir été admis sur le territoire en application des points a et c du paragraphe 4 de l'article 5 de ce même règlement ; il en est de même lorsque l'étranger fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission en application d'une décision exécutoire prise par un autre État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; 

« 2° Ou si, en provenance directe du territoire d'un État partie à cette convention, il est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2,20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2, à l'exception des conditions mentionnées au point e du paragraphe 1 de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, précité et au point d lorsque le signalement aux fins de non-admission ne résulte pas d'une décision exécutoire prise par un autre État partie à la convention. »

M. Stéphane Ravier.  - (Marques d'exaspération à gauche) Merci de votre accueil chaleureux...

Imaginez que quelqu'un s'introduise chez vous pour siroter un verre et que la police vous dit que, même s'il a commis plusieurs délits, il a faim et soif, il est probablement mineur et son orientation sexuelle ne plaisait pas à son entourage... (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K et SER)

Mme Émilienne Poumirol.  - Et allez !

M. Stéphane Ravier.  - On verra dans trois mois ce qu'on fait... Voilà ce que font les clandestins : ils violent la loi même avant de fouler notre sol. Quand des gens entrent chez moi, je dois pouvoir les en chasser. L'entrée par effraction est interdite, mais si vous le faites, on vous trouve de bonnes et crédibles excuses ? Existe-t-il un autre pays dans le monde avec une loi aussi loufoque ? Rétablissons le délit de séjour irrégulier, supprimé en 2012 par un certain Manuel Valls.

Mme la présidente.  - Amendement n°64 rectifié ter, présenté par Mme V. Boyer, MM. Houpert et P. Martin et Mmes Goy-Chavent et Devésa.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du chapitre II du titre II du livre VIII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est insérée une section ... ainsi rédigée :

« Section ...

« Manquement aux conditions de séjour

« Art. L. 822-....  -  Est puni de 3 750 euros d'amende le fait pour tout étranger âgé de plus de dix-huit ans de séjourner en France au-delà de la durée autorisée par son visa ou en méconnaissance de l'article L. 411-1.

« L'étranger condamné en application du présent article encourt la peine complémentaire de trois ans d'interdiction du territoire français.

« Pour l'application du présent article, l'action publique ne peut être mise en mouvement que lorsque les faits ont été constatés lors d'une procédure de retenue aux fins de vérification du droit à la circulation ou de séjour dans les conditions prévues aux articles L. 813-1 à L. 813-4. »

Mme Valérie Boyer.  - Le 31 décembre 2012, sous l'impulsion de François Hollande, et quand Emmanuel Macron était secrétaire général adjoint de l'Élysée, le délit de séjour irrégulier a été supprimé.

Le cadre européen impose de privilégier l'éloignement. Pourquoi traiter différemment ce délit d'un délit ordinaire ? La retenue administrative limite le contrôle administratif à quatre heures, compliquant le travail des forces de l'ordre et des préfectures. Rétablissons ce délit de séjour irrégulier, supprimons la retenue administrative et autorisons de nouveau la garde à vue.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°342 rectifié bis, présenté par M. Le Rudulier, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci, Bas et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Joyandet, Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Retailleau et Reynaud, Mme Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon, Szpiner et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus.

M. Stéphane Le Rudulier.  - Il ne s'agit pas de rétablir le délit de séjour irrégulier tel qu'il a été supprimé par la loi du 31 décembre 2012 : nous nous sommes alignés sur la jurisprudence de la CJUE. Celle-ci, dans son arrêt du 6 décembre 2012, n'a pas écarté un délit de séjour irrégulier assorti d'une peine d'amende, voire d'expulsion. C'est le cas en Italie depuis le 25 juillet 1998, où il est puni d'une amende de 5 000 à 10 000 euros. Créons un tel délit.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - C'est la première fois que j'entends citer Mme Le Pen dans cet hémicycle, et c'est une bonne entrée en matière : ce que vous proposez ne peut être fait ! La CJUE n'autorise pas la sanction du séjour irrégulier par une peine de prison. Voilà qui est symptomatique... (M. Aymeric Durox s'exclame.)

M. Ravier demande en plus que soient sanctionnées les modalités d'entrée irrégulière, y compris pour les demandeurs d'asile : on voit bien le problème. Avis défavorable aux amendements nos120 rectifié et 549 rectifié ter.

Avis favorable aux amendements nos64 ter et 342 rectifié bis, rédigés avec beaucoup de finesse juridique. En effet, la peine d'amende élimine l'obstacle juridique, et la période de retenue sera utilisée pour vérifier le droit au séjour.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable aux amendements nos120 rectifié et 549 rectifié ter.

Le délit de séjour irrégulier a certes été supprimé fin 2012, alors qu'Emmanuel Macron était secrétaire général de l'Élysée, par une loi contre laquelle j'ai voté - nous étions alors tous deux députés, madame Boyer -, mais il s'agissait de l'application d'une directive européenne votée par le parti populaire européen (PPE). C'était une sorte de coproduction générale.

Ce délit est-il nécessaire ? N'y a-t-il pas d'autre moyen d'empêcher les gens de traverser sa propriété, monsieur Ravier ? Vous ne semblez pas fréquenter la police... (M. Stéphane Ravier s'exclame.)

Il y a au moins trois moyens d'agir : le délit d'entrée irrégulière dans l'espace Schengen, le délit de maintien en situation irrégulière et le délit de retour non autorisé sur le territoire français. Tous les trois sont codifiés dans le Ceseda. Nous pourrons répondre ainsi à votre problème, monsieur Ravier.

Il n'y a pas loin de la coupe aux lèvres. Certes il n'y a plus de garde à vue, mais il y a une retenue. Pendant tout le quinquennat de M. Sarkozy, madame Boyer,...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Et vous-même !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - ... il n'y a eu que 600 condamnations pour délit de séjour irrégulier pour 87 peines de prison ferme, toutes inférieures à deux ans - bien peu ont effectivement fait de la prison.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Cela s'appelle des aménagements de peine !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le but est de réaliser des contrôles. Avis favorable aux amendements nos 64 rectifié ter et 342 rectifié bis.

Pour rendre hommage au travail réalisé par le ministre Valls en 2012, il y a eu beaucoup plus d'interpellations depuis la mise en place de la mesure de retenue : 91 000 sous Hollande, 70 000 sous Sarkozy et 120 000 sous le premier quinquennat du président Macron, grâce à la retenue.

Monsieur Ravier, tous les pays européens ont aménagé le délit. L'introduction de l'amende souhaitée par M. Le Rudulier et Mme Boyer est bienvenue, mais les gendarmes ont la possibilité d'agir si vous les accueillez chez vous, monsieur Ravier. Si Mme Le Pen a envie de vous revoir après que vous l'ayez quittée pour M. Zemmour, mais qu'elle ne vous a pas prévenue... (sourires), n'hésitez pas à appeler la police, nous vérifierons son identité, même sans délit de séjour irrégulier. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Henri Cabanel applaudit également.)

L'amendement n°120 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°549 rectifié ter.

Les amendements identiques nos64 rectifié ter et 342 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°475 rectifié, présenté par MM. Bitz, Patriat et Mohamed Soilihi, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article L. 823-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le nombre : « 15 000 euros » est remplacé par le nombre : « 75 000 euros ».

M. Olivier Bitz.  - Nous souhaitons durcir les sanctions applicables aux reconnaissances frauduleuses de paternité. (M. le ministre s'en félicite.) L'amende atteindrait 75 000 euros. Ces reconnaissances augmentent, notamment dans les territoires ultramarins.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis favorable à l'élévation du quantum de la sanction, même si nous pouvons en relativiser la portée : combien de condamnations sont prononcées à ce titre ?

Les reconnaissances frauduleuses de paternité posent problème au regard du Ceseda. Pis, leurs conséquences s'imposent à la société comme aux enfants qui en sont victimes.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable. La Chancellerie détient ces statistiques, mais je peux vous dire que cela représente 20 % des fraudes que nous constatons.

En vue de l'examen par le juge constitutionnel, monsieur Bitz, l'amende proposée est proportionnée puisqu'elle équivaut à celle prévue pour l'escroquerie. L'amendement est particulièrement intéressant pour Mayotte en raison du droit local relatif à la paternité.

L'amendement n°475 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'amendement n°268 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°139 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mmes Lopez et Garnier, MM. Cadec, Sido et Klinger et Mme Goy-Chavent.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 21-23 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Nul ne peut être naturalisé s'il a été pris en charge au cours de sa minorité dans les conditions prévues à l'article L. 221-2-4 du code de l'action sociale et des familles. » 

Mme Valérie Boyer.  - Les mineurs non accompagnés (MNA) sont souvent non mineurs, et accompagnés de trafiquants. Ils sont pris en charge par les départements, avec beaucoup de difficultés... Les mineurs ne sont pas concernés par l'obligation d'un titre de séjour, et ne peuvent donc être éloignés du territoire national.

Selon l'Assemblée des départements de France (ADF), 11 315 MNA ont été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance en 2021. Un mineur considéré en MNA pourrait accéder à la nationalité française à sa majorité. C'est un appel d'air.

M. Jérôme Durain.  - Il y avait longtemps !

Mme Valérie Boyer.  - Ce sont en majorité de jeunes hommes, mais on voit aussi de plus en plus de femmes enceintes, mineures ou non, accoucher en France. (Protestations à gauche)

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Je ne peux vous suivre sur ce terrain. Votre rédaction est beaucoup trop large. Si un enfant est pris en charge comme MNA, pourquoi le priver à jamais de la naturalisation ? S'il est resté sur le territoire français et y a travaillé sans difficulté, ce serait un petit peu excessif.

M. Vincent Éblé et Mme Laurence Harribey.  - Un petit peu !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le Gouvernement a déposé un texte sur le droit des étrangers et non sur l'accès à la nationalité - sujet sur lequel nous n'avons pas à rougir : le gouvernement Macron naturalise 30 % de moins que le gouvernement Sarkozy. Mais les deux débats sont distincts, et votre proposition n'a pas sa place dans ce texte.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est inconstitutionnel.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ce sont des cavaliers législatifs. J'espère que le Conseil constitutionnel saura les censurer.

Je suis d'accord pour tenir une discussion républicaine sur le sujet de la nationalité, plus difficile d'ailleurs à mener à l'Assemblée nationale - je le dis pour les partis minoritaires là-bas, mais majoritaires ici.

Je serai systématiquement défavorable aux dispositions relatives à la nationalité, pour lesquelles j'espère la censure du Conseil constitutionnel.

Une voix à gauche. - Tout à l'heure, c'était sagesse !

L'amendement n°139 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°335 rectifié ter, présenté par Mmes Imbert, Noël, Puissat et Bellurot, MM. Somon, Sautarel et H. Leroy, Mmes Demas, Berthet et Joseph, M. Paccaud, Mmes Malet et Garnier, MM. Burgoa et Belin, Mme Estrosi Sassone, MM. Anglars, Pellevat et Saury, Mme Belrhiti, MM. Houpert, Bruyen et Pointereau, Mme Eustache-Brinio, M. Cadec, Mme P. Martin, M. Brisson, Mmes Borchio Fontimp, Micouleau et Gruny, MM. Bouchet, Savin et Gueret, Mmes Bonfanti-Dossat et Nédélec, MM. D. Laurent et Bouloux, Mme Dumont, MM. Lefèvre et Rochette, Mme Aeschlimann et MM. Rietmann, Perrin, Tabarot, Chatillon, Khalifé et Gremillet.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 221-2-5 du code de l'action sociale et des familles est abrogé.

Mme Corinne Imbert.  - Cet amendement abroge l'article L.221-2-5 du code de l'action sociale et des familles modifié par la loi Taquet : un MNA orienté par la cellule nationale ne peut plus être réévalué par le département d'accueil, un coût important pour la collectivité.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Vous nous posez un problème diplomatique... (Sourires) La loi Taquet a dix-huit mois, et le Sénat a pleinement voté la disposition visée. Selon Bernard Bonne, rapporteur de cette loi, les réexamens ne sont pas souhaitables. Nous militons régulièrement pour une meilleure stabilité législative : retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°335 rectifié ter n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°3 rectifié quater, présenté par Mme Eustache-Brinio, MM. Bazin et Daubresse, Mme Dumas, M. Mandelli, Mme V. Boyer, M. Reichardt, Mmes Belrhiti et Dumont, MM. E. Blanc, Brisson, Somon, Belin et Courtial, Mme Di Folco, M. Bouchet, Mmes Garnier, Lassarade et Berthet, MM. Saury, Frassa, Burgoa, Piednoir et J.P. Vogel, Mmes Demas, Micouleau, Aeschlimann, F. Gerbaud et Josende, M. Anglars, Mme Noël, MM. Genet et Bas, Mmes Drexler et Joseph et MM. Chatillon, de Nicolaÿ, Grosperrin et Savin.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- Après le premier alinéa de l'article L. 300-1 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour bénéficier du droit mentionné au premier alinéa, l'étranger non ressortissant de l'Union européenne doit résider en France depuis au moins cinq ans au sens de l'article L. 111-2-3 du code de la sécurité sociale. »

II.- Le deuxième alinéa de l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « et résidant en France depuis au moins cinq ans au sens de l'article L. 111-2-3 ».

III. - Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° L'article L. 232-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour bénéficier de l'allocation mentionnée au premier alinéa, l'étranger non ressortissant de l'Union européenne doit résider en France depuis au moins cinq ans au sens de l'article L. 111-2-3 du code de la sécurité sociale. » ;

2° Après le premier alinéa de l'article L. 245-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour bénéficier de l'allocation mentionnée au premier alinéa, l'étranger non ressortissant de l'Union européenne doit résider en France depuis au moins cinq ans au sens de l'article L. 111-2-3 du code de la sécurité sociale. »

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Nous voulons conditionner l'ouverture des droits aux prestations sociales non contributives à cinq années de résidence stable et régulière. Seraient concernés les allocations familiales, la prestation de compensation du handicap (PCH), les aides personnelles au logement (APL) et le Dalo.

Mme Valérie Boyer.  - Très bien !

Mme la présidente.  - Amendement identique n°625, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - C'est le même amendement, anti appel d'air. En termes de solidarité nationale, il ne me semble pas scandaleux de fixer un tel délai de franchise avant de bénéficier d'aides non contributives.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Cela existe déjà, par exemple à Mayotte avec un décalage sur les prestations non contributives comme le RSA. Le Conseil constitutionnel n'a pas censuré ces dispositions.

Sagesse : il faut regarder les effets de bord sur l'allocation aux adultes handicapés (AAH), car certaines personnes ne peuvent pas vivre sans.

Je précise qu'on ne peut décaler les prestations contributives.

Mme Laurence Rossignol.  - J'aimerais être certaine de bien comprendre : il s'agit de décaler le versement des allocations familiales, qui concernent donc les enfants ? (M. le ministre le confirme.) Ainsi, des travailleurs en situation régulière payant des cotisations pourraient voir leurs enfants privés d'allocations familiales. En d'autres termes, vous organisez la pauvreté dans des familles régulièrement installées en France... Soit vous n'êtes pas sérieux, soit on touche le fond ! (Applaudissements à gauche)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ce décalage existe déjà : l'étranger qui arrive sur le sol national ne peut toucher de prestations familiales avant six mois de présence.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Entre six mois et cinq ans, il y a de la marge !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Vous n'avez pas sous-amendé les amendements...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - En effet : nous voterons contre.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Il existe déjà des décalages de prestations dans le droit français. Ne dites donc pas qu'il s'agit d'une horreur absolue...

M. Thomas Dossus.  - Cinq ans, si !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - La question est de savoir ce qui est acceptable entre un délai de six mois et un délai de cinq ans.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Entre six mois et cinq ans, cela n'a rien à voir !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Il faut regarder les effets de bord et en discuter. Mais inutile de monter sur ses grands chevaux.

M. Pascal Savoldelli.  - J'aimerais savoir sur quelles bases objectives la commission a déterminé ce délai de cinq ans. Le rapporteur peut-il nous expliquer ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - C'est tout simple : cinq ans, c'est un an de titre de séjour temporaire plus quatre ans de carte de séjour pluriannuelle. (Marques d'incrédulité à gauche)

Mme Audrey Linkenheld.  - Quel rapport ?

M. Gérald Darmanin, ministre.  - J'imagine que la commission s'est fixée sur cinq ans par homothétie par rapport au délai de cinq ans prévu pour le RSA.

Mme Laurence Rossignol.  - Qu'en pense Aurore Bergé ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce serait bien que le Gouvernement en pense quelque chose...

Mme Laurence Rossignol.  - Le ministre a dit qu'il est pour !

Les amendements identiques nos3 rectifié quater et 625 sont adoptés et deviennent un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°387 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 1er J

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard au 1er juin de chaque année, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif au respect du droit à un recours effectif devant la Cour européenne des droits de l'homme en matière des contentieux relatifs à l'asile, à l'entrée, au séjour et à l'éloignement des étrangers.

Mme Mélanie Vogel.  - Je constate que la droite a été incapable de défendre sa mesure, mais que le ministre l'a parfaitement fait à sa place... (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains)

Le 22 octobre dernier, monsieur le ministre, vous avez déclaré dans le JDD - choix intéressant - que vous vouliez renoncer au caractère suspensif des recours devant la CEDH. Nous demandons à connaître les conséquences d'une telle décision sur le respect du droit à un recours effectif, qui est une garantie fondamentale.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Merci d'avoir bien mesuré la différence entre un parlementaire de base et un ministre... (Sourires)

La CEDH établit un rapport annuel, si ma mémoire est bonne, et il existe un comité de suivi de l'exécution de ses décisions, dont vous pouvez consulter les travaux. Point n'est besoin d'être un parlementaire avisé pour avoir saisi que, derrière votre demande de rapport, se trouve une malice adressée au ministre ; à lui d'y répondre, s'il le souhaite.

Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le Gouvernement de M. Hollande est à l'origine du décalage du versement du RSA, en 2016. Pas de leçons de morale !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - On parle de cinq ans !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je respecte bien évidemment la CEDH. Elle ne prévoit pas que ses recours soient suspensifs. Des personnes coupables de crime présentes irrégulièrement sur le territoire national ont été placées en centre de rétention administratif, puis ont fait appel de la décision d'expulsion auprès de la CEDH. Une personne était fichée pour terrorisme et considérée comme très dangereuse par mes services. Je pouvais décider soit de la garder le temps de l'appel, soit de l'éloigner, l'appel n'étant pas suspensif. Mon honneur de ministre de l'intérieur est d'appliquer tout ce que prévoit l'État de droit, ce que j'ai fait. Avis défavorable. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains)

L'amendement n°387 rectifié n'est pas adopté.

AVANT L'ARTICLE 1er

Mme la présidente.  - Amendement n°572 rectifié, présenté par Mme de Marco, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre IV du titre I du livre IV du code d'entrée et de séjour des étrangers et des demandeurs d'asile est complétée par une sous-section ainsi rédigée :

« Sous-section... 

« Droit à la formation linguistique

« Article L. 414-9-....  -  Dès la délivrance du récépissé de demande de titre, tout étranger résidant en France, quelle que soit la nature de sa demande, a le droit de recevoir une formation au français.

« Dans chaque département, le représentant de l'État recense et publie l'offre de formation linguistique dispensée dans chaque département par les associations, les services de l'État, de Pôle emploi et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Elle est régulièrement actualisée.

« Cette offre de formation au français est communiquée au moment de la délivrance du récépissé de demande de titre et de la délivrance du titre, adaptée à la nature du titre demandé. »

Mme Monique de Marco.  - La loi du 24 juillet 2006 a pérennisé les contrats d'intégration républicaine rendant obligatoire l'apprentissage du français pour les personnes étrangères s'établissant en France. Les limites sont évidentes : de nombreux étrangers n'ont pas de formation.

Cet amendement reconnaît un droit à la formation au français pour toutes les personnes étrangères majeures présentes sur le territoire. Ce serait aussi saluer l'engagement des associations bénévoles qui accompagnent les étrangers dans leur apprentissage du français.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je peine à comprendre. Nul n'interdit aux étrangers de se former à la langue française. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°572 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°235, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard douze mois après la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant la politique de formation linguistique à destination des étrangers. Ce rapport dressera un état des lieux des moyens budgétaires et humains mis en oeuvre pour cette politique, évaluera les délais dans lesquels les formations prescrites sont mises en oeuvre par les organismes de formation, ainsi que les contraintes auxquels font face les étrangers pour accéder à ces formations, notamment en terme d'éloignement géographique et de conciliation avec leur vie professionnelle et familiale.

M. Mickaël Vallet.  - Nous souhaitons rehausser les moyens consacrés à l'apprentissage du français, mais l'article 40 nous contraint à une demande de rapport. Les organismes de formation sont saturés, les créneaux rares dans certaines régions, les délais d'attente longs, et il peut être difficile d'accéder géographiquement aux formations.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable, comme à toute demande de rapport. Augmenter les crédits consacrés à la formation relève du projet de loi de finances.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. Mickaël Vallet.  - La semaine dernière, nous avons débattu des questions linguistiques par le biais de la proposition de loi de la majorité sénatoriale visant à interdire l'écriture inclusive. La France, en dépit du discours prononcé par le Président de la République à Villers-Cotterêts, auquel on ne peut que souscrire sur le papier, n'a pas de politique linguistique. La ministre de la culture aurait dû être présente à vos côtés, monsieur le ministre, pour stimuler ce débat.

Nous nous sentons couverts par la loi Toubon, mais manquons d'une vision globale sur les questions liées à la langue, y compris, monsieur Brisson, en ce qui concerne les langues régionales. Or ce sujet est fondamental, notamment du fait de la pression de la langue anglaise.

L'amendement n°235 n'est pas adopté.

ARTICLE 1er

Mme Audrey Linkenheld .  - L'article 1er conditionne l'octroi de la carte de séjour pluriannuelle non à une formation linguistique, mais à l'atteinte d'un niveau de langue sanctionné par un examen - et aussi, dans le dispositif de la commission, d'un niveau de culture et d'histoire. Nous passons donc d'une obligation de moyens à une obligation de résultat. Nous craignons que la langue, facteur d'intégration, ne devienne ainsi facteur d'exclusion.

Cet article risque de faire peser des obligations sur les demandeurs, sans qu'ils aient les moyens d'y répondre. Il faut évaluer précisément cette question : quelles sont les structures présentes en France, comment agissent-elles ?

Que le niveau à atteindre soit fixé par décret ne fait que renforcer nos inquiétudes.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Nous en arrivons au premier article d'essence gouvernementale.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il était temps !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je ne suis pas membre de la commission des lois...

Il faudra non seulement passer, mais réussir, un examen de français pour obtenir un titre de séjour pluriannuel. Le nombre de personnes ayant accès à la naturalisation a diminué de 30 % en raison de l'échec au test de français. Nous ne souhaitons pas donner un titre de séjour long à des personnes n'ayant pas un niveau suffisant.

Quelque 70 000 personnes par an seraient concernées, soit un nombre important, largement supérieur au nombre de personnes concernées par le regroupement familial. Le Portugal et la Croatie, par exemple, ont depuis longtemps conditionné le droit au séjour à la maîtrise de leur langue à un niveau A2 ou B1, donc assez bas.

Dans l'article 2, supprimé par la commission, nous imaginions dégager du temps sur le temps de travail pour apprendre le français. Plus largement, il y a une exigence de résultat, mais nous prévoyons aussi des moyens en augmentant de 25 % les crédits de l'intégration.

Les femmes, majoritaires dans l'immigration de travail, sont particulièrement concernées par le problème de la non-maîtrise de la langue. La loi Sarkozy de 2006 a conditionné l'octroi d'une carte de résident de dix ans à la maîtrise du français, puis la loi Cazeneuve de 2016 a prévu une double exigence, de niveau A1 au bout d'un an de résidence et A2 après cinq ans de résidence.

Cette mesure ne concerne ni les étudiants, ni les titulaires d'un passeport talent, ni les saisonniers.

Si l'on veut s'intégrer durablement dans la République, il faut d'abord maîtriser sa langue. C'est ce que font la plupart des autres pays européens. Il est d'ailleurs surprenant que personne n'ait songé à le prévoir avant le Gouvernement d'Emmanuel Macron... (M. Olivier Bitz applaudit.)

Mme la présidente.  - Amendement n°232, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

M. Éric Kerrouche.  - Mieux intégrer par la langue, l'objectif est consensuel. Nous le savons bien, la langue est un outil d'intégration puissant.

La difficulté est que ce projet de loi utilise la langue pour opérer un tri entre les étrangers. La langue devient ainsi un couperet, alors que son apprentissage s'inscrit dans un parcours : souvent, les immigrés l'apprennent en travaillant.

Le niveau de maîtrise du français visé par l'article est celui qui prévaut aujourd'hui après quatre ans de présence en France. La marche est donc énorme : 15 000 à 20 000 étrangers se verraient refuser un titre de séjour pluriannuel sur cette base.

D'autres pays prévoient certes de telles exigences, mais ils mobilisent davantage de moyens budgétaires. Par ailleurs, avez-vous pensé aux biais de sélection que produirait cette mesure ? Les immigrés des anciennes colonies françaises seraient favorisés, ce qui irait à l'encontre des objectifs que vous visez.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°284 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - Que se serait-il passé si l'État français avait demandé à mes arrières grands-parents de prouver leur maîtrise de la langue française au moment de leur arrivée ? Ils ne la maîtrisaient pas, mais nombre de leurs petits-enfants sont devenus instituteurs...

Comment conditionner la délivrance d'un titre de séjour à un examen, alors que c'est par la pratique qu'on apprend la langue ? Ceux qui échouent aux examens sont ceux qui ont les parcours de vie les plus précaires. Les sanctionner ainsi est injuste et discriminatoire !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Je reviens à ce que j'ai dit dans la discussion générale : une politique migratoire consiste à choisir qui vient et qui reste sur le territoire, et à quelles conditions.

M. Max Brisson.  - Très bien !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Un pays est fondé à déterminer les conditions de maintien sur son sol des étrangers qui y entrent. Oui, la disposition prévue exclura certains étrangers, ceux qui n'auront pas un niveau de langue suffisant.

Cet article fixe le niveau de langue au niveau A2, assorti d'une obligation de résultat. Il s'agit de pouvoir s'intégrer durablement en France.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. Éric Kerrouche.  - J'ai accompagné des étudiants étrangers dans leur apprentissage du français. Il est très compliqué d'apprendre une nouvelle langue, le mesurez-vous ? La nécessité de cet apprentissage ne fait pas débat, mais le niveau fixé est irréaliste. D'autre part, je vous repose la question : avez-vous pensé aux biais de sélection ? Cette mesure favorisera une certaine immigration, en provenance de nos anciennes colonies, et dissuadera peut-être d'autres immigrés, qualifiés, de nous rejoindre.

M. Mickaël Vallet.  - On peut semer des graines pour la suite de nos débats... L'histoire des immigrés à travers le monde, quels que soient les continents, est toujours un peu la même - les romans, notamment en langue française, et les films en offrent moult exemples : des personnes marquées jusqu'à la fin de leur vie du sceau d'un parler hésitant, des enfants qui souffrent de devoir traduire leurs parents et ont parfois honte d'eux, avant de le regretter.

Je partage totalement l'exposé du ministre et sa logique, car la langue est ce qui émancipe d'un cercle familial parfois étroit, sans oubli de la culture d'origine. Mais je ne le suis plus lorsqu'il parle de 20 000 personnes qui échoueront. Quels sont les moyens prévus pour donner à tout le monde la possibilité de réussir ? (M. Jérôme Durain applaudit.)

M. Guy Benarroche.  - L'ambition d'une intégration réussie est partagée par tous. La maîtrise de la langue est le premier outil. Mais l'article 1er n'est pas adapté à la diversité des situations.

Le Défenseur des droits a souligné que la mesure gouvernementale ne prévoit aucune exception liée à l'âge, au handicap ou à une particulière vulnérabilité économique. Le renvoi au règlement du niveau à atteindre pose également problème.

Selon la CFDT, le doublement des formations et le développement des parcours ont fait passer le taux de réussite au niveau A1 de 66 à 75 % en deux ans.

Nous nous opposons à cet article.

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous ne sommes pas hostiles à l'idée de fixer un certain niveau de langue, mais comment le niveau A2 pourrait-il être atteint en un an ? C'est à peu près le niveau qu'ont nos bacheliers pour leur deuxième langue vivante, après plusieurs années d'étude... Au lieu de renvoyer à la précarité les demandeurs, accompagnons-les dans l'apprentissage de notre belle langue !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je ne pensais pas que l'intégration par la langue se heurterait à des oppositions de principe. (M. Mickaël Vallet s'exclame.)

M. Éric Kerrouche.  - Ne caricaturez pas !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Si une personne rate l'examen, elle n'aura pas de titre de séjour long, mais pourra avoir un nouveau titre d'un an qui, certes, ne lui ouvrira pas droit au regroupement familial ; c'est ce que nous voulons, pour éviter le communautarisme. À travers la langue, il y a aussi une compréhension de certains concepts comme la laïcité ou l'égalité entre les femmes et les hommes.

Le budget du ministère de l'intérieur - que vous voterez, je n'en doute pas - prévoit des moyens en hausse pour l'intégration, dont 9 millions d'euros supplémentaires pour l'Ofii.

Le niveau A2 est exigé pour un titre de séjour en Italie après deux ans de résidence. Il est exigé aussi en Chypre ou au Danemark, dont les langues sont d'un apprentissage difficile. Aux États-Unis, il faut non seulement parler anglais, mais le titre de travail est lié à une entreprise. On ne peut pas dire que nous sommes les plus exigeants. Nous avons longtemps été les moins exigeants, et nous y remédions.

C'est une mesure de bon sens. Quiconque a déjà été élu local voit que le non-accès à la langue prive de tout, y compris de l'accès aux droits - d'où le non recours.

À moins de vouloir maintenir les étrangers dans une forme d'assistanat, il faut que ces hommes et ces femmes puissent accéder eux-mêmes à leurs droits, sans avoir à être accompagnés. C'est aussi le moyen pour les femmes de s'émanciper de leur mari et de leur communauté. (Mme Françoise Gatel applaudit.)

M. Mickaël Vallet.  - Pourquoi dénaturer nos propos ?

Les amendements identiques nos232 et 284 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°493 rectifié ter, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Belin et Duffourg, Mme Muller-Bronn, MM. Klinger et Bouchet, Mmes V. Boyer et Belrhiti, MM. Reynaud et Panunzi, Mme Berthet, MM. Brisson, Genet et Favreau, Mmes P. Martin, Jacques et Bellurot, MM. Karoutchi, Somon, Tabarot, Gremillet et Menonville, Mmes Lopez et Canayer et MM. Khalifé, Cambier, Laugier et Bruyen.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le second alinéa de l'article L. 413-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « S'il est parent, l'étranger s'engage également à assurer à son enfant une éducation respectueuse des valeurs et principes de la République et à l'accompagner dans sa démarche d'intégration à travers notamment l'acquisition de la langue française. » ;

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Alors que le motif familial est le deuxième motif de délivrance de titres de séjour, cet amendement vise à responsabiliser les parents étrangers dans la démarche d'intégration de leurs enfants allophones. Nous intégrons dans le contrat d'intégration républicaine un engagement à assurer à leurs enfants une éducation respectueuse des valeurs et principes de la République et à les accompagner dans l'acquisition de la langue française, fondement de notre identité nationale, ciment de la communauté nationale et prérequis pour l'insertion sociale et professionnelle.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je partage l'intention, mais la langue française sera surtout transmise par l'école.

Mme Audrey Linkenheld.  - Évidemment !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - En outre, l'article 13 prévoit que le séjour est conditionné au respect des principes de la République. Votre amendement est satisfait : retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable. On pourrait en effet, au cours de la navette, lier l'article 1er à l'article 13 sur les valeurs de la République, mais il manque l'aspect parental, que je soutiens.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La commission des lois a ajouté dans l'article 13 un contrat qui prévoit déjà le respect des principes et des valeurs républicains.

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous voterons évidemment contre cet amendement. C'est le rôle de l'école de la République que d'enseigner aux enfants la langue française. Je ne méconnais pas la responsabilité des parents, français ou étrangers, mais l'école de la République ne serait-elle plus capable d'assurer cet apprentissage ?

L'amendement n°493 rectifié ter est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°626, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Le 3° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cet accompagnement est subordonné à l'assiduité de l'étranger et au sérieux de sa participation aux formations mentionnées aux 1° et 2° du présent article. » ;

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Nous conditionnons l'accompagnement professionnel dont bénéficient les signataires du contrat d'intégration républicaine au suivi sérieux et assidu des formations déjà prescrites en matière linguistique et civique.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°626 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°517 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Daubresse et Bonneau, Mme N. Goulet, MM. Bruyen, Klinger, Paccaud, Rietmann, Pellevat et Lefèvre, Mme V. Boyer, M. Kern, Mmes Schalck, Muller-Bronn et Dumont, M. Bas, Mme Herzog, M. Pointereau, Mme Drexler, MM. Belin et Cadec, Mmes Borchio Fontimp, Micouleau et Bellurot, MM. Genet et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. Bouchet, Duffourg, Chatillon, Cuypers et Gueret, Mme Aeschlimann et M. Gremillet.

Après l'alinéa 9

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Afin de déterminer le niveau de français requis pour la délivrance de chaque type de titre de séjour, le pouvoir réglementaire prend en considération les conclusions d'une étude d'impact relative aux effets de ce niveau d'exigence envers chacune des catégories de demandeurs. » ;

M. André Reichardt.  - Cet amendement a reçu un avis défavorable de la commission des lois, mais j'espère vous convaincre.

Il s'agit de prendre en compte une étude d'impact dans la fixation du niveau de langue requis.

Mme Audrey Linkenheld.  - C'est bien, ça !

M. André Reichardt.  - La définition du niveau requis relève du pouvoir réglementaire, mais c'est au pouvoir législatif de rappeler les principes d'égalité et de proportionnalité des effets obtenus. Le niveau d'exigence doit tenir compte du type d'emploi recherché, du handicap, de l'âge, du niveau de scolarisation de la personne.

Cet amendement renforce la sécurité juridique d'un dispositif qui risque d'être jugé discriminant et disproportionné.

Mme Audrey Linkenheld.  - Très bien !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La commission a estimé que définir le niveau de langue ne relevait pas forcément du pouvoir réglementaire. C'est pourquoi elle l'a fixé au niveau A2.

Mme Audrey Linkenheld.  - Cela relève du décret !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - L'étude d'impact n'est plus nécessaire. Retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable. L'avis du Conseil d'État évoque longuement l'impact des dispositions sur la langue. Cela relève du domaine réglementaire, à mon sens. Surtout, votre amendement vient amoindrir la disposition du Gouvernement qui conditionne le titre de séjour long à un niveau de langue.

Mme Audrey Linkenheld.  - C'est pour cela qu'il est bien !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Votre amendement serait-il d'inspiration patronale ? (Mme Audrey Linkenheld s'exclame.) Je reconnais que nous limitons ainsi la main d'oeuvre disponible dans certains métiers. Je rappelle que 30 % des étrangers réguliers parlent ou écrivent mal le français. Mais les étrangers ne sont pas qu'une main d'oeuvre : ils vivent dans la société. Ils continuent à être dans la cité quand ils ont quitté l'usine ou l'entreprise qui les emploie ! C'est pourquoi je ne veux pas distinguer le niveau de français attendu selon les métiers, mais selon le type de titre de séjour. Lorsqu'on veut s'installer durablement sur le territoire de la République, il faut parler et comprendre le français. Le point de vue patriotique l'emporte sur le point de vue capitalistique.

M. André Reichardt.  - Puisque je n'ai pas réussi à vous convaincre, je retire mon amendement.

Mme Audrey Linkenheld.  - Il est repris !

M. André Reichardt.  - J'espère toutefois que le juge administratif vous donnera raison, car je reste persuadé que le niveau d'exigence peut varier selon les situations.

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous reprenons cet amendement, qui ne prévoit pas un niveau d'exigence différent selon les demandeurs - auquel cas nous aurions pu souscrire aux arguments du ministre -, mais se borne à demander une étude d'impact.

Mme la présidente.  - Il devient l'amendement n°517 rectifié ter.

L'amendement n°517 rectifié ter n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°452, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Alinéa 15

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Il a bénéficié des conditions nécessaire à l'apprentissage de la langue française soit l'accès à des cours gratuits dans son département de résidence ; » 

M. Ian Brossat.  - L'exigence de réussite à l'examen doit aller de pair avec l'accès à des cours gratuits. Si l'on vise réellement l'intégration, il faut être cohérents, et assurer les moyens nécessaires pour que les personnes concernées puissent apprendre le français. Votre objectif n'est-il pas plutôt de limiter le nombre d'étrangers sur le territoire ? Sinon, vous n'auriez pas restreint le regroupement familial ou supprimé les allocations pour les étrangers en situation régulière ! Il s'agit en réalité de dégrader les conditions de vie des étrangers sur notre sol.

Mme la présidente.  - Amendement n°234, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 15, après la première phrase

Insérer deux phrases ainsi rédigées : 

Ces dispositions ne sont applicables qu'à la condition qu'une formation adaptée, à proximité de son lieu de résidence, ait été proposée à l'étranger, et que cette formation ait pu être mise en oeuvre par l'organisme de formation avant le terme du titre de séjour. L'étranger peut attester par tout moyen du non-respect de ces conditions.

M. Adel Ziane.  - Nous partageons l'objectif d'une meilleure intégration par le travail et par la langue.

M. Mickaël Vallet.  - Et nous l'avons déjà dit.

M. Adel Ziane.  - La semaine dernière, certains s'inquiétaient d'ailleurs que l'écriture inclusive ne compromette la capacité d'apprentissage des étrangers.

Mais ce soir, les dés sont pipés. Pour atteindre l'objectif, il faudrait que l'État apporte les moyens nécessaires, en termes de proximité des cours, d'accessibilité, de nombre d'heures. Voyez les moyens mis en place par le Luxembourg à destination des migrants pour les intégrer par la langue !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable, car vous écrasez l'obligation de résultat, principal apport du texte, au bénéfice d'une obligation de moyens. Le contrat d'intégration républicaine prévoit déjà des cours, la condition de gratuité est remplie.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Les cours et examens de langue ne concernent que les étrangers en situation régulière ; les autres ont vocation à quitter le territoire, pas à suivre des cours ! Les moyens renforcés, ce sont les 9 millions d'euros, pour environ 70 000 titres de séjour long.

Je suis prêt à sous-amender l'amendement de M. Brossat pour réaffirmer dans la loi la gratuité des cours - mais sans écraser l'obligation de réussite à l'examen. Vous dites partager l'objectif, mais exiger des moyens, je vous prends au mot ! J'attends de voir qui refusera des cours gratuits pour les étrangers désireux de s'intégrer dans la République. (M. Claude Kern et Mme Françoise Gatel s'en amusent ; M. Dany Wattebled applaudit.)

M. Bruno Retailleau.  - D'accord !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je propose de conserver l'obligation et de préciser que les cours sont gratuits.

Mme la présidente.  - C'est le sous-amendement n°653.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis favorable à ce sous-amendement, les cours étant déjà gratuits.

M. Guillaume Gontard.  - Rappel au Règlement !

Je demande une brève suspension de séance, car nous n'avons pas tout à fait compris ce que proposait le Gouvernement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue quelques instants.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°653 à l'amendement n°452 de M. Brossat et les membres du groupe CRCE - Kanaky présenté par le Gouvernement.

ARTICLE 1er

Amendement n° 452

I. Alinéa 2

Remplacer les mots :

Rédiger ainsi cet alinéa

Par les mots :

Après cet alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé

II. Alinéa 3

remplacer la référence

par la référence

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous avons dit nos réticences à l'obligation de justifier d'un certain niveau de langue, fixé au niveau A2, pour pouvoir prétendre à une carte de séjour pluriannuelle. Nous avons demandé une étude d'impact, qui nous a été refusée. Nous craignons que ce test de langue soit facteur d'exclusion plutôt que d'intégration. La gratuité des cours de langue est positive, mais n'apaise pas nos craintes. Cette exigence rejettera dans la précarité des personnes qui ne demandent que de vrais moyens pour apprendre notre belle langue et s'intégrer.

M. Ronan Dantec.  - M. le ministre nous a expliqué que la langue était un Graal pour l'intégration dans la communauté nationale. D'où l'obligation de maîtrise d'un certain niveau de langue, que nous contestons.

Mais si l'État ne fournit pas de pont pour atteindre le Graal, ce sera un vrai parcours du combattant, un frein ! Sans lui faire de procès d'intention, nous connaissons l'habileté du ministre... (Sourires) Il faut des garanties claires, inscrire, en parallèle de l'obligation de résultat, une obligation de moyens pour l'État. Est-ce bien le cas ici ?

Mme Cécile Cukierman.  - Il s'agit d'un amendement de repli.

Ce projet de loi est le vôtre, monsieur le ministre, et celui de la commission des lois du Sénat. Nous cherchons, pour notre part, l'efficacité, pour ceux pour lesquels nous nous battons. La maîtrise de la langue française est un vecteur d'intégration fondamental, une condition indispensable de l'émancipation.

Par le langage, nous faisons société, nous faisons République. Il faut donc garantir l'accès à des cours gratuits dans chaque département. Nous devons être ambitieux, offensifs, pour favoriser l'intégration. Nous voterons l'amendement sous-amendé par le Gouvernement.

M. Jacques Fernique.  - Le niveau A2 est déjà une obligation pour l'obtention du brevet des collèges, pour la maîtrise d'une langue vivante étrangère. Or les collégiens pratiquent cette langue trois heures par semaine pendant quatre ans avant le brevet, soit pendant 432 heures...

M. Mickaël Vallet.  - L'objectif de maîtrise de la langue est partagé par tous. La question est celle du niveau requis au regard des moyens consacrés. La difficulté est de les objectiver. Bernard Jomier a dit qu'il ne revenait pas aux parlementaires de dresser la liste des pathologies relevant de l'AMU. Nous ne sommes pas davantage spécialistes de l'enseignement du français, d'où nos interrogations sur le niveau de langue visé.

La France n'a pas un office de la langue permettant d'aborder ces sujets de manière transversale. Si vous acceptez d'ajouter un élément relatif à l'accessibilité effective aux cours, monsieur le ministre, nous pourrions être plusieurs à ne pas voter contre votre sous-amendement, dans lequel je ne veux pas voir malice.

M. Dany Wattebled.  - En immersion, on apprend plus rapidement une langue. Les Français en situation régulière parlent français tous les jours, ils n'ont pas besoin de suivre des cours pendant quatre ans.

Mme Françoise Gatel.  - Je ne suis pas sûre de mon niveau de français ce soir... (Sourires) J'ai bien compris ce qu'a dit le ministre. (M. le ministre s'en félicite.) Le Gouvernement souhaite donner à chacun la possibilité d'apprendre le français, c'est pertinent et salutaire. J'ai compris les explications de Mme Cukierman. Ensuite, j'ai été perdue... (Sourires)

La gratuité me paraît une extraordinaire garantie d'accès aux cours.

On refuse de lister les pathologies couvertes par l'AMU, mais on nous explique qu'il faudrait lister tous les moyens nécessaires pour faciliter l'accès aux cours de français ? Il y a là un peu de mauvaise foi ! C'est un prétexte pour ne pas vous retrouver, de manière républicaine, autour du sous-amendement gouvernemental à l'amendement communiste. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et du RDPI)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je remercie le groupe CRCE-K. J'ai bien compris que cela ne constituait pas un blanc-seing.

Trouver un compromis ensemble sur un sujet républicain me paraît souhaitable. Je regrette vos circonvolutions visant à éviter de voter mon sous-amendement... J'espère que nous rétablirons l'article 2 qui prévoit des cours de français durant les heures de travail.

Nous avons passé assez de temps sur l'article 1er. (« Oui ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

Nous avons trouvé un but noble - maîtriser le français - assorti de moyens nobles - la gratuité des cours. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP)

Le sous-amendement n°653 est adopté.

L'amendement n°452, sous-amendé, est adopté.

L'amendement n°234 n'a plus d'objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°263 rectifié, présenté par M. Ouizille et Mme Narassiguin.

Compléter cet article par cinq paragraphes ainsi rédigés :

....  -  Il est constitué une délégation parlementaire à l'immigration et à l'intégration, commune à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Elle exerce le contrôle parlementaire de l'action du Gouvernement en matière d'immigration et d'intégration et évalue les politiques publiques en ce domaine. À cette fin, elle est destinataire des informations utiles à l'accomplissement de sa mission. Lui sont notamment communiqués : 

1° Tous les éléments d'information statistiques relatifs à l'immigration et à l'intégration ; 

2° Un rapport annuel de synthèse exhaustif des crédits consacrés à l'immigration et à l'intégration ;

3° Des éléments d'appréciation relatifs à l'activité générale et à l'organisation des services de l'État dédiés à l'immigration et à l'intégration ; 

En outre, la délégation peut solliciter du Premier ministre la communication de tout ou partie des rapports des inspections ministériels ainsi que des rapports des services d'inspection générale des ministères portant sur l'immigration et l'intégration ;

....  -  La délégation parlementaire à l'immigration et à l'intégration est composée de quatre députés et de quatre sénateurs. Les présidents des commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées respectivement de l'immigration et de l'intégration sont membres de droit de la délégation parlementaire à l'immigration et de l'intégration. La fonction de président de la délégation est assurée alternativement, pour un an, par un député et un sénateur, membres de droit.

Les autres membres de la délégation sont désignés par le Président de chaque assemblée de manière à assurer une représentation pluraliste. Les deux députés qui ne sont pas membres de droit sont désignés au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci. Les deux sénateurs sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.

....  -  La délégation peut entendre le Premier ministre, les ministres compétents, ainsi que les directeurs compétents en matière d'immigration et d'intégration. Les directeurs de ces services peuvent se faire accompagner des collaborateurs de leur choix en fonction de l'ordre du jour de la délégation. La délégation peut également entendre les directeurs des autres administrations centrales ayant à connaître des enjeux relatifs à l'immigration et à l'intégration. 

....  -  Chaque année, la délégation établit un rapport public dressant le bilan de son activité. 

Dans le cadre de ses travaux, la délégation peut adresser des recommandations et des observations au Président de la République et au Premier ministre. Elle les transmet au Président de chaque assemblée.

....  -  La délégation parlementaire à l'immigration et à l'intégration établit son règlement intérieur. Celui-ci est soumis à l'approbation du Bureau de chaque assemblée.

Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation sont financées et exécutées comme dépenses des assemblées parlementaires.

Mme Corinne Narassiguin.  - L'amendement propose la création d'une délégation parlementaire réunissant députés et sénateurs, avec des moyens de contrôle et d'évaluation des politiques publiques en matière d'immigration.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le Sénat a souhaité que l'on cesse de créer des délégations parlementaires...

Une voix à droite.  - Un machin !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - ... qui ôtent des moyens aux commissions permanentes. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°263 rectifié n'est pas adopté.

L'article 1er, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er

Mme la présidente.  - Amendement n°627, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 433-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 433-1-1. - Par dérogation à l'article L. 433-1, il ne peut être procédé à plus de trois renouvellements consécutifs d'une carte de séjour temporaire portant une mention identique. »

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Limitons à trois les renouvellements consécutifs d'une carte de séjour temporaire.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°627 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°255 rectifié, présenté par MM. Le Rudulier et Anglars, Mme Guidez, MM. Menonville et Frassa, Mmes Romagny et Josende, MM. Rochette et Courtial, Mmes Puissat et V. Boyer, MM. Pointereau et Paccaud, Mmes Petrus, Lavarde et Bellurot, M. Chasseing, Mme P. Martin, M. Wattebled, Mme Lopez, M. Bruyen, Mmes Herzog, Micouleau et Belrhiti, M. Genet, Mmes Canayer et Devésa et M. Duffourg.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code civil est ainsi modifié :

1° L'article 21-28 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « 21-2, », est insérée la référence : « 21-7, » ;

b) Les deux derniers alinéas sont ainsi rédigés :

« Les personnes à l'intention desquelles est organisée la cérémonie sont tenues d'y participer. Toutefois, en cas de motif légitime les en empêchant, leur participation est reportée à la cérémonie suivante.

« Au cours de la cérémonie d'accueil, la charte des droits et devoirs du citoyen français mentionnée à l'article 21-24 et le texte de « La Marseillaise » sont remis aux personnes ayant acquis la nationalité française mentionnées au premier alinéa du présent article. Il est procédé au chant d'au moins un couplet, suivi du refrain, de l'hymne national, auquel ces personnes sont tenues de participer. » ;

2° L'article 21-29 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

-  les mots : « susceptibles de » sont remplacés par les mots : « appelées à » ;

-  est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Cette communication est faite au moins trente jours avant la date de la cérémonie. » ;

b) Au second alinéa, après le mot : « demande », sont insérés les mots : « , dans un délai de huit jours » ;

3° Après l'article 21-29, sont insérés deux articles 21-30 et 21-31 ainsi rédigés :

« Art. 21-30.  -  Le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police convoque quinze jours au moins avant la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française les personnes à l'intention desquelles elle est organisée. Cette convocation précise la date et l'heure d'ouverture de la session, sa durée prévisible et le lieu où elle se tiendra. Elle rappelle l'obligation de répondre à cette convocation sous peine d'être condamné à l'amende prévue à l'article 21-31. Elle invite les personnes convoquées à renvoyer, par retour de courrier, le récépissé joint à la convocation, après l'avoir dûment signé. Lorsque le maire a été autorisé à organiser la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française en application du second alinéa de l'article 21-29, une copie de ce récépissé lui est transmise sans délai par l'autorité compétente.

« Art. 21-31.  -  Le fait, sans motif légitime, de ne pas déférer à la convocation reçue en application de l'article 21-20 est puni de 7 500 euros d'amende. Le fait, sans excuse valable, de quitter la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française avant qu'elle soit achevée ou de refuser de participer au chant prévu au dernier alinéa de l'article 21-28 est puni de la même peine. »

II.  -  Au second alinéa de l'article 433-5-1 du code pénal, après le mot : « réunion », sont insérés les mots : « ou lors de la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française prévue à l'article 21-28 du code civil ».

Mme Frédérique Puissat.  - Nous souhaitons rendre la remise du décret de naturalisation plus officielle par la participation obligatoire à la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La lourdeur de cette cérémonie rend l'idée difficilement réalisable. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Mme Corinne Narassiguin.  - Quel est l'intérêt de cet amendement ? Chanter un couplet suivi du refrain de la Marseillaise. Faut-il aussi chanter juste ? (Vives protestations à droite)

Allez-vous instaurer un délit de fausse note ? On atteint le summum du ridicule.

M. Max Brisson.  - Ça, c'est sûr !

Mme Corinne Narassiguin.  - Cette cérémonie est un moment solennel et important. Mais vous soupçonnez ces nouveaux citoyens d'être priori de mauvais citoyens ; c'est symptomatique de tout ce que vous avez voté. (Murmures à droite) Je suis scandalisée ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Michaël Weber applaudit.)

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Malgré l'avis défavorable de la commission des lois, il n'est pas ridicule de demander à quelqu'un qui demande la nationalité française de chanter la Marseillaise. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)

M. Hussein Bourgi.  - J'assiste régulièrement à de telles cérémonies. Nous avons droit à un message du Président de la République et à la diffusion de la Marseillaise que chacun chante en choeur. Les cérémonies sont à la main du préfet, qui les organise de façon particulièrement républicaine, en invitant parlementaires et élus. Tous les récipiendaires sont présents. Les préfets sont obligés de leur demander de n'être accompagnés que d'une personne.

Nos débats sont surréalistes. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Olivier Paccaud.  - J'invite certains ou certaines collègues à lire l'amendement de M. Le Rudulier. Le point essentiel est de participer à la cérémonie, et non de chanter. (« Ah ! » sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

La République, ce sont d'abord des symboles - un drapeau, la Marianne, notre devise... - qui nous rassemblent. Je suppose que, comme moi, vous êtes fiers de chanter la Marseillaise.

Monsieur Bourgi, j'ai assisté comme vous à des cérémonies. Même si parfois le chant de certains naturalisés était hésitant, ils le faisaient avec beaucoup de coeur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Malgré tout l'intérêt du sujet, le Gouvernement ne tient pas à ce que les questions de nationalité figurent au sein de ce projet de loi. C'est un cavalier législatif. Avis défavorable.

L'amendement n°255 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°605, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre I du titre Ier du livre VIII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'intitulé est complété par les mots : « et des visas » ;

2° L'article L. 811-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 811-2.  -  Les actes et décisions de justice étrangers relatifs à l'état civil, produits par un ressortissant étranger pour justifier notamment de son identité et de ses liens familiaux, doivent être préalablement légalisés au sens du II de l'article 16 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019. La présomption de validité des actes de l'état civil ainsi produits, telle que prévue à l'article 47 du code civil, et l'opposabilité des jugements étrangers dont la régularité n'a pas été préalablement vérifiée par l'autorité judiciaire française, sont subordonnées à l'accomplissement de cette formalité.

« Sous réserve des dispositions de l'alinéa précédent, la vérification de tout acte de l'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil. »

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Nous voulons légaliser les actes d'état civil pour lutter contre la fraude.

L'amendement n°605, accepté par la commission, est adopté.

ARTICLE 2 (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°20 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux, Mme Girardin, MM. Fialaire et Grosvalet, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa de l'article L. 6321-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il peut également proposer aux salariés allophones des formations visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret. » ;

2° L'article L. 6321-3 est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. L. 6321-3.  -  Pour les salariés allophones signataires du contrat mentionné à l'article L. 413-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, engagés dans un parcours de formation linguistique visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret, les actions permettant la poursuite de celui-ci constituent un temps de travail effectif, dans la limite d'une durée fixée par décret en Conseil d'État, et donnent lieu au maintien de la rémunération par l'employeur pendant leur réalisation. » ;

3° L'article L. 6323-17 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les formations en français langue étrangère choisies par les salariés allophones signataires du contrat mentionné à l'article L. 413-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret, financées par le compte personnel de formation et réalisées en tout ou partie durant le temps de travail, l'autorisation d'absence est de droit dans la limite d'une durée fixée par décret en Conseil d'État. »

M. Philippe Grosvalet.  - J'ai noté une certaine unanimité pour reconnaître que la langue française est un formidable vecteur d'assimilation, dans un pays ou les Français n'ont pas toujours parlé français. Ma propre grand-mère ne parlait pas français. L'école républicaine est l'un des meilleurs creusets de formation et d'intégration. L'entreprise devrait l'être également. Je m'étonne de la suppression par la commission des lois de l'article 2.

Le partage d'une langue est source de réussite de nos entreprises et de sécurité au travail. Rétablissons cet article.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°388 rectifié ter, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Mme Mélanie Vogel.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°564, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code du travail est ainsi modifié : 

1° Le troisième alinéa de l'article L. 6321-1 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Il peut également proposer aux salariés allophones des formations visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret. Par dérogation, pour les salariés visés à l'article L. 7221-1 du code du travail et ceux employés par les particuliers employeurs visés à l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles, les modalités d'application du précédent alinéa sont renvoyées à un décret. » ;

2° L'article L. 6321-3 est ainsi rétabli :

« Art. L. 6321-3.  -  Pour les salariés allophones signataires du contrat mentionné à l'article L. 413-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, engagés dans un parcours de formation linguistique visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret, les actions permettant la poursuite de celui-ci constituent un temps de travail effectif, dans la limite d'une durée fixée par décret en Conseil d'État, et donnent lieu au maintien de la rémunération par l'employeur pendant leur réalisation. » ;

3° À l'article L. 6321-6, les mots : « à l'article L. 6321-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 6321-2 et L. 6321-3 » ;

4° L'article L. 6323-17 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour les formations en français langue étrangère choisies par les salariés allophones signataires du contrat mentionné à l'article L. 413-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret, financées par le compte personnel de formation et réalisées en tout ou partie durant le temps de travail, l'autorisation d'absence est de droit dans la limite d'une durée fixée par décret en Conseil d'État.

« Par dérogation, pour les salariés mentionnés à l'article L. 7221-1 du présent code et ceux employés par les particuliers employeurs mentionnés à l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles, les modalités d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont renvoyées à un décret. »

M. Olivier Bitz.  - Nouveau sénateur, je suis admiratif du cheminement de ce texte : la volonté du Gouvernement et celle de la majorité sénatoriale se rencontrent. La langue française doit être au coeur de l'intégration des étrangers. Il faut la mobilisation de tous : pouvoirs publics, associations, mais aussi entreprises. Pourquoi s'exonéreraient-elles de ce devoir de mieux intégrer les étrangers ? Rétablissons l'article 2.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°586, présenté par le Gouvernement.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Cet article 2 a malheureusement été supprimé par la commission des lois. Un employeur embauchant un étranger en parcours d'intégration doit lui donner la possibilité de suivre des cours de français sur ses heures de travail.

C'est juste, car les étrangers n'ont pas l'occasion, alors qu'ils ont souvent de longs trajets pour se rendre à leur travail, de suivre des formations.

Les patrons contribuent au logement, à la protection de l'environnement, à l'égalité femmes-hommes ; ils ont aussi une responsabilité dans l'intégration de leurs salariés.

Nous appelons au patriotisme de ces entreprises. Il aurait été plus facile de créer une taxe, mais nous faisons le pari social de l'entreprise.

Un étranger qui ne fait pas toutes ses 35 heures en raison du parcours d'intégration est moins compétitif qu'un étranger parfaitement intégré. Vous êtes les représentants d'un grand parti gaulliste : le travail n'est pas que source de profit, il est aussi facteur d'émancipation.

Ce serait l'honneur de cette assemblée de rétablir cet article 2 pour un capitalisme à visage humain. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Cécile Cukierman.  - C'est beau ! Mais ce n'est pas encore au niveau A2... (Sourires)

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La commission des lois a supprimé cet article, d'où son avis défavorable aux amendements de rétablissement.

La langue est un facteur d'intégration. Mais sur qui pèse l'intégration par la langue ? Dans certains pays, c'est sur l'étranger lui-même. Nous n'avons pas fait ce choix.

L'article 2 prévoit qu'elle repose sur l'employeur. Il a déjà la faculté d'offrir des formations de français : quand il s'agit d'un enjeu de sécurité, l'employeur fournit ces formations.

Faut-il lui faire porter l'intégralité de cette formation et de l'intégration par la langue ? Non, cela doit rester à la charge de l'État. Si vous évoquez la possibilité d'un recours à la taxe, c'est bien que c'est à l'État de fournir cette formation.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Nous ne demandons pas aux entreprises de payer la formation, mais de libérer moins de 5 % du temps de travail pour apprendre le français - rien de révolutionnaire !

Si l'on considère que nous devons aux étrangers de l'émancipation, ce n'est pas le niveau A2 du communisme, mais le niveau A1 du gaullisme !

Avis favorable à tous ces amendements qui rétablissent l'article 2.

M. Olivier Rietmann.  - Oui à l'intégration économique des étrangers, mais cela doit être financé par les pouvoirs publics. Vous transférez une charge aux entreprises. Cet article 2 n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact sérieuse (M. le ministre brandit un document), en témoigne la réaction d'Olivia Grégoire devant notre délégation aux entreprises en juin dernier.

Toutes ces petites normes accumulées finissent par coûter 60 milliards d'euros chaque année aux entreprises françaises, soit 3 % du PIB. L'article 2 coûte peut-être peu cher, mais il faut une étude d'impact sérieuse.

En outre, votre article s'applique à toutes les entreprises, de la TPE à la grande entreprise, sans différenciation. Les TPE n'embaucheront plus d'étrangers en parcours d'intégration. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Ian Brossat.  - Nous voterons les amendements de rétablissement de l'article 2. Dès que l'on envisage une obligation quelconque à l'égard des employeurs, il est frappant de voir qu'il est impossible de la mettre en oeuvre. La majorité sénatoriale a supprimé les sanctions prévues à l'article 8 contre les employeurs exploitant sciemment des travailleurs sans-papiers... Chacun doit prendre sa part dans l'intégration des étrangers.

Mme Cécile Cukierman.  - Notre débat est politique : il est question de projets de société.

Tous les patrons ne sont pas des voyous, bien au contraire. Dans la Loire, la plupart des employeurs sont d'accord pour prendre en charge la formation au français de leurs employés. La rentabilité de leur entreprise ne peut qu'en sortir renforcée !

Les entreprises ont une responsabilité sociale et territoriale. Elles ne peuvent ni tout payer à la place des autres, ni s'exempter de tout.

Nous voterons pour les amendements de rétablissement de l'article.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - M. Brossat nous prend pour des suppôts du Medef. Mais à l'article 8, notre amendement était identique à celui du groupe communiste. (Murmures à gauche)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Les entreprises de moins de cinquante salariés ne sont pas concernées, ce sont les opérateurs de compétences (Opco) qui se chargeront de la formation et qui rembourseront aux entreprises l'équivalent de 1 000 euros par an et par salarié. Les entreprises ont une vocation sociale et doivent contribuer à l'intégration.

Monsieur Rietmann, je ne peux pas vous laisser dire n'importe quoi. Avec votre raisonnement, il n'y aurait plus de comité d'entreprise ! Je suis en désaccord avec vous : consacrer 5 % du temps à de la formation reste très raisonnable.

Les amendements identiques nos20 rectifié bis, 388 rectifié ter sont adoptés et l'article 2 est rétabli.

Les amendements identiques nos564 et 586 n'ont plus d'objet.

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois.  - La commission des lois avait pris l'initiative de demander la réserve de l'examen du chapitre II du titre I, afin d'en examiner les dispositions demain. Or nous n'avançons pas très vite. Avec l'accord des présidents de groupe, je vous propose donc de demander la levée de la réserve afin que nous reprenions le cours normal de la discussion.

Plusieurs voix à droite.  - Très bien !

Mme la présidente.  - J'ai été saisie d'une demande de la commission des lois tendant à revenir sur la réserve du chapitre II du titre I et à reprendre l'examen des articles dans leur ordre initial. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Favorable.

La levée de la réserve, de droit, est ordonnée.

APRÈS L'ARTICLE 2 (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°522 rectifié, présenté par M. Ravier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 21-19 du code civil, le 7° est abrogé.

M. Stéphane Ravier.  - Être Français, cela s'hérite ou se mérite. Le droit permet à un réfugié d'obtenir la nationalité française sans condition de résidence. Sous la présidence de M. Macron, 680 000 demandes d'asile ont été déposées. Avec un taux d'acceptation de 42 % par l'Ofpra et la CNDA, ce sont 280 000 réfugiés qui pourraient prétendre à la naturalisation depuis 2017, soit l'équivalent de la ville de Bordeaux.

Notre droit doit montrer notre exigence et notre fermeté. Pour que cette loi ne soit pas une loi d'immigration de plus, mais la première loi de non-immigration, je vous invite à supprimer cette possibilité.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Cette exemption est prévue par la convention de Genève, mais d'autres conditions subsistent. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°522 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°523 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 21-20 du code civil est abrogé.

M. Stéphane Ravier.  - Message au locataire de l'Élysée : la culture française existe bel et bien dans le droit positif, le code civil évoque l'« entité culturelle et linguistique française ».

Mais la compétence linguistique n'est pas suffisante. La France n'est pas une idée, on ne peut devenir Français qu'en y vivant durablement et en acceptant ses codes et sa culture.

En 2022, 320 millions de personnes parlaient français dans le monde, dont 255 millions en faisaient un usage quotidien, dans 112 pays. Cette population a crû de 7 % en quatre ans seulement !

Juridiquement, tous ces gens peuvent accéder à la nationalité française en arrivant en France. C'est une prime à l'immigration francophone de masse.

Mais il faut plus qu'une bonne maîtrise de la langue française pour prétendre à l'intégration en France. Mohamed Merah parlait parfaitement français ! Les racailles qui ont mis la France à feu et à sang il y a quelques mois aussi.

Je propose de voter la suppression de l'exemption d'un délai de résidence minimale en France pour l'acquisition de la nationalité d'un francophone.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Il n'est pas illogique que des personnes parlant parfaitement la langue française soient dispensées de stage, mais elles doivent remplir les autres conditions. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°523 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°526 rectifié, présenté par M. Ravier.

Après l'article 2 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 25 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° S'il a été condamné en France ou à l'étranger pour un acte qualifié de crime par la loi française et ayant entraîné une condamnation à une peine d'au moins cinq années d'emprisonnement. »

M. Stéphane Ravier.  - Cet amendement rétablit une version précédente de l'article 25 du code civil afin de faciliter le recours à la déchéance de nationalité en cas d'infraction grave. Nous devons refuser les éléments sécessionnistes et conquérants et donner au pouvoir politique une plus large possibilité de recourir à la déchéance de nationalité. Un quart des détenus étrangers en France sont condamnés à une peine de cinq ans ou plus : la déchéance diminuerait la surpopulation carcérale.

Les binationaux sont exclus des chiffres de la délinquance étrangère, difficile donc de chiffrer cette situation alors que ce serait une exigence de cohésion nationale et de transparence. La nationalité française se mérite, trop de binationaux profitent du laxisme judiciaire pour faire régner la terreur et entretenir le communautarisme. La naturalisation n'est pas un chèque en blanc.

Mme la présidente.  - Amendement n°50 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mme Lopez, MM. Bruyen, Cadec, Genet et Saury, Mme Jacques, MM. Bonneau, Sido, Chasseing, Somon et Klinger et Mmes Josende, Goy-Chavent, Devésa et Aeschlimann.

Après l'article 2 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 25 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° S'il est condamné pour un acte qualifié d'homicide ou de tentative d'homicide commis sur un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique. »

Mme Valérie Boyer.  - On déplore entre quatre et seize décès de policiers ou gendarmes en mission par an. Je souhaite donc ouvrir la déchéance de nationalité à l'encontre d'un binational coupable de violences à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique.

L'accès à la nationalité est l'aboutissement de l'intégration. Il est important de donner des signaux de cohésion, de solidarité et de cohérence à nos concitoyens.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le droit de nationalité a atteint un certain équilibre en ce qui concerne les possibilités de déchéance. Avis défavorable à l'amendement n°536 rectifié.

Le cas visé par Mme Boyer est intéressant. Sagesse à l'amendement n°50 rectifié.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable à ces deux amendements, mais pas sur le fond, madame Boyer. Ce sont des cavaliers législatifs, qui relèvent du droit de la nationalité et non du présent texte.

Mme Valérie Boyer.  - Je ne partage pas cet argument. On ne peut pas traiter en même temps d'immigration et d'intégration, sans parler de la nationalité. La déchéance de nationalité que j'ai proposée serait un signal fort et utile.

L'amendement n°526 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°50 rectifié est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°49 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mme Lopez, MM. Bruyen et Cadec, Mme P. Martin, MM. Genet, Szpiner et Saury, Mmes Muller-Bronn et Jacques, M. Chasseing, Mme Imbert, M. Klinger et Mmes Josende, Goy-Chavent et Devésa.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l'article 25 - 1du code civil est ainsi rédigé :

« Les dispositions de cet article ne s'appliquent pas si les faits reprochés à l'intéressé sont mentionnés au 1° de l'article 25. » 

Mme Valérie Boyer.  - Défendu.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°49 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Nous avons examiné 94 amendements durant la journée ; il en reste 433 à examiner.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 8 novembre 2023, à 15 heures.

La séance est levée à 0 h 55.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 8 novembre 2023

Séance publique

À 15 heures, 16 h 30, le soir et la nuit

Présidence : M. Gérard Larcher, président, Mme Sophie Primas, vice-présidente, M. Loïc Hervé, vice-président

Secrétaire : Mme Patricia Schillinger

1. Questions d'actualité

2. Désignation des 23 membres de la commission d'enquête sur l'impact du narco-trafic en France et les mesures à prendre pour y remédier (droit de tirage du groupe Les Républicains)

3. Désignation des 21 membres de la délégation sénatoriale aux outre?mer autres que les 21 sénateurs d'outre-mer, membres de droit

4. Suite du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration (procédure accélérée) (texte de la commission, n°434 rectifié, 2022-2023)

5. En outre, avant la suspension de l'après-midi, désignation des 37 membres du groupe de travail préfigurant la commission spéciale chargée d'examiner, sous réserve de son dépôt, le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole