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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions d'actualité

Situation à Gaza et envoi d'armes

M. Guillaume Gontard

Mme Élisabeth Borne, Première ministre

Antisémitisme (I)

M. Dominique de Legge

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Tempête Ciaran (I)

Mme Nadège Havet

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Mineurs non accompagnés

Mme Laure Darcos

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Éligibilité des territoires ruraux au PTZ

M. Christian Bilhac

M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement

Antisémitisme (II)

M. Hussein Bourgi

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Annonces du Gouvernement à la suite des émeutes de l'été 2023

M. Pierre Barros

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville

Mariages d'étrangers en situation irrégulière

M. Olivier Henno

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Maintien d'Atos dans le giron français

M. Cédric Perrin

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé du numérique

Aide médicale d'État

M. Patrick Kanner

Mme Élisabeth Borne, Première ministre

Stocks de procédures judiciaires

Mme Françoise Dumont

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Avenir des concessions autoroutières

M. Vincent Delahaye

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Suites judiciaires des émeutes urbaines

Mme Marie-Carole Ciuntu

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville

Tempête Ciaran (II)

M. Simon Uzenat

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Harcèlement scolaire

Mme Agnès Evren

M. Gabriel Attal, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Jurisprudence européenne sur le refoulement des migrants

M. Jean-Michel Arnaud

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Mise au point au sujet d'un vote

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales (Nomination)

Commission d'enquête (Nominations)

Délégation sénatoriale aux outre-mer (Nominations)

Immigration et intégration (Procédure accélérée - Suite)

Demande de réserve

Demande de priorité

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 BIS

Mme Corinne Narassiguin

Mme Audrey Linkenheld

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS

ARTICLE 2 TER

APRÈS L'ARTICLE 2 TER

AVANT L'ARTICLE 3

ARTICLE 3

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Mme Audrey Linkenheld

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Patrick Kanner

Mme Isabelle Florennes

M. Ian Brossat

M. Yannick Jadot

M. Guy Benarroche

Mme Mélanie Vogel

M. Bruno Retailleau

M. Thomas Dossus

Mme Marie-Pierre de La Gontrie

Mme Cécile Cukierman

M. Guillaume Gontard

M. Ronan Dantec

M. Yan Chantrel

M. Philippe Bas

M. Christian Bilhac

Mme Michelle Gréaume

M. David Ros

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois

Groupe de travail (Nominations)

Immigration et intégration (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 3 (Suite)

APRÈS L'ARTICLE 3

ARTICLE 4

M. Guy Benarroche

Mme Mélanie Vogel

M. Philippe Bas

M. Ian Brossat

Mme Marie-Pierre de La Gontrie

APRÈS L'ARTICLE 4

ARTICLE 5 (Supprimé)

APRÈS L'ARTICLE 5 (Supprimé)

ARTICLE 6

M. Marc Laménie

ARTICLE 7

APRÈS L'ARTICLE 7

Ordre du jour du jeudi 9 novembre 2023




SÉANCE

du mercredi 8 novembre 2023

18e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaire : Mme Patricia Schillinger.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et au temps de parole.

Situation à Gaza et envoi d'armes

M. Guillaume Gontard .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Cela fait trente jours que Gaza est bombardée jour et nuit ; trente jours de siège, sans ressources ; trente jours pendant lesquels cette prison se transforme en cimetière à ciel ouvert. Au droit à se défendre succède une vengeance aveugle. (Protestations sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Dominique de Villepin rappelait hier que « la force ne permet pas d'assurer la sécurité d'un peuple. Ce qui assure la paix et la sécurité, c'est la justice. » Voilà trente jours que nous attendons une parole forte de la France pour un cessez-le-feu et la libération des otages.

Le soutien inconditionnel aux opérations d'Israël est une erreur tragique et historique. Depuis dix ans, la France a vendu pour 209 millions d'euros d'armes vers Israël - bombes, roquettes - malgré le traité de l'ONU interdisant l'exportation si des armes sont utilisées pour commettre des crimes de guerre ou contre l'humanité.

À la veille de la conférence humanitaire, la France a l'occasion de faire entendre une voix forte et courageuse. Comptez-vous vous montrer à la hauteur du Général de Gaulle, qui avait décidé d'un embargo militaire au moment de la guerre de six jours ? Reconnaîtrez-vous l'État palestinien, selon ce que le Parlement a voté en 2014 ? Défendrez-vous la solution à deux États ? (Applaudissements sur les travées du GEST, des groupes SER et CRCE-K)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - Depuis les terribles attaques terroristes perpétrées par le Hamas contre Israël, la situation dans la région est extrêmement préoccupante. Israël a le droit à la sécurité, mais dans le respect du droit international.

La situation à Gaza est dramatique. Le bilan est extrêmement lourd, avec de nombreuses victimes civiles, dont des enfants. Ils ne doivent pas payer les crimes du Hamas. La France n'a cessé de défendre le droit humanitaire, clair sur les principes de distinction, de nécessité, de proportionnalité et de précaution. Une trêve humanitaire immédiate et durable est absolument nécessaire en vue d'un cessez-le-feu.

La France est mobilisée pour la paix. Sur l'initiative du Président de la République, une conférence humanitaire internationale pour Gaza se tiendra demain à Paris.

Nous mettons tout en oeuvre pour que les ressortissants français soient rapatriés - plus de cent l'ont été depuis vendredi - et pour la libération des otages.

Notre position, invariable, est la solution à deux États. Le Président de la République la porte autour de trois piliers : la sécurité, le soutien humanitaire et un processus politique pour garantir à la fois la sécurité d'Israël et la création d'un État pour les populations palestiniennes.

La France ne ménage aucun effort pour protéger les civils et obtenir la paix. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Antisémitisme (I)

M. Dominique de Legge .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Plus de 1 000 actes antisémites ont été recensés depuis le 7 octobre, croix gammées, lettres de menaces ou agression de Français, parce qu'ils sont juifs, jusqu'à leur domicile. Comment la France en est-elle arrivée là ? Comment comptez-vous lutter contre cet antisémitisme d'atmosphère qui gangrène notre société ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Le nombre d'actes antisémites, déjà nombreux avant l'attaque du Hamas, explose. Avec 1 159 actes depuis le 7 octobre, nous sommes à plus du triple de l'ensemble de l'année 2022.

Croix gammées, étoiles de David taguées et autres agressions ont abouti à 518 interpellations. Dans les 950 lieux où les Français de confession juive ont l'habitude de se réunir, 11 000 policiers, gendarmes et militaires de la mission Sentinelle ont été déployés.

La haine est aussi en ligne, avec 7 726 signalements sur la plateforme Pharos et 296 individus identifiés.

J'ai pris des dispositions claires pour que les personnes étrangères concernées -  120 sur l'ensemble des interpellations  - se voient retirer leur titre de séjour. On ne peut pas toucher une personne de confession juive en France sans toucher toute la République : ils ont l'absolue protection de la République.

Les policiers et les gendarmes sont mobilisés dans ce but. (Applaudissements sur la plupart des travées, à l'exception de celles du groupe CRCE-K)

M. Dominique de Legge.  - Pour traiter le mal, il faut le prendre à la racine. L'antisémitisme déguisé en compassion palestinienne se nourrit du wokisme et de la haine de la culture occidentale. (Protestations à gauche ; applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Alain Marc applaudit également.) Dans ce domaine comme dans d'autres, il n'y a pas de place pour le « en même temps ». Il existe une culture française, qui puise ses valeurs dans la civilisation judéo-chrétienne. (« Oui ! » à droite ; marques de protestation à gauche)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Très bien !

M. Stéphane Ravier.  - Bravo !

M. Dominique de Legge.  - N'y renonçons pas au nom du multiculturalisme ! Nous avons fait trop d'accommodements raisonnables alors que, depuis de nombreuses années, des voix se sont élevées, que nous avons refusé d'entendre. (Marques de désapprobation à gauche)

M. Stéphane Ravier.  - La mienne !

M. Dominique de Legge.  - En 1894, Anatole France écrivait que l'antisémitisme était la mort de la civilisation européenne, des propos bien d'actualité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC et INDEP)

Tempête Ciaran (I)

Mme Nadège Havet .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Les tempêtes Ciaran et Domingos ont déferlé du Pas-de-Calais à l'Occitanie, frappant particulièrement la Bretagne et le Nord - jusqu'à 207 km/h à la pointe du Raz. Trois personnes ont perdu la vie, dont Frédéric Despaux, agent d'Enedis mort en intervention à Pont-Aven.

Grâce au déclenchement de France Alerte, à l'action du préfet du Finistère et des services, des vies ont été sauvées. Je remercie tous les agents publics, nationaux et territoriaux, pour leur engagement.

Les Finistériens sont résilients et solidaires, mais l'inquiétude est forte dans le secteur agricole, entre serres brisées et manque d'eau pour les éleveurs. Le préjudice pour la ferme finistérienne dépasse les 200 millions d'euros. Comment soutiendrez-vous les agriculteurs, qui, toujours solidaires, dégagent des arbres comme ils aidaient l'an dernier les pompiers contre les incendies. À nous de nous tenir à leurs côtés. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mmes Françoise Gatel et Cathy Apourceau-Poly applaudissent également.)

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Je salue tous les services publics des collectivités et de l'État mobilisés durant cette tempête. Je rends hommage aux victimes, en particulier à l'agent d'Enedis venu en renfort. Je pense aux agriculteurs touchés, notamment dans le Pas-de-Calais encore aujourd'hui.

Je me rendrai la semaine prochaine dans le Finistère.

Nous prévoyons une palette de solutions. Ainsi, vous avez voté le nouveau système assurantiel qui va s'appliquer pour les pertes de récoltes, avec une indemnité de solidarité y compris pour les non-assurés. Le seuil de 50 % étant parfois insatisfaisant, nous réfléchissons à un fonds de soutien pour combler les trous dans la raquette.

Les pertes sont importantes. Certaines relèvent du régime des catastrophes naturelles, d'autres des calamités agricoles. Nous regardons comment aller plus loin, pour les fraises par exemple. Le président de la région Bretagne souhaitait soutenir l'investissement, nous pourrons l'appuyer. Dans tous les cas, il faut aller vite. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mineurs non accompagnés

Mme Laure Darcos .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Alors que s'ouvrent les assises des Départements de France, l'afflux massif de mineurs isolés représente un véritable casse-tête pour les départements, qui consacrent pas moins de 1,5 milliard d'euros à leur prise en charge.

À l'heure où les droits de mutation à titre onéreux s'effondrent - moins 80 millions d'euros en Essonne -, l'État doit accroître son soutien.

Les départements recherchent de nouvelles solutions face à la saturation des structures d'accueil, accentuée par l'interdiction par la loi Taquet, dès 2024, de l'hébergement à l'hôtel des mineurs confiés à l'aide sociale à l'enfance (ASE). J'avais déposé deux amendements à ce sujet au projet de loi Immigration, déclarés irrecevables au titre de l'article 40.

Les départements demandent que la compétence de mise à l'abri des mineurs non accompagnés (MNA) revienne à l'État, ainsi que la compensation à l'euro près de leur prise en charge. L'immigration étant une compétence régalienne, l'État est-il prêt à le faire ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Nous sommes très attachés à la protection des enfants isolés, c'est pourquoi l'ASE prend en charge les MNA dans les mêmes conditions que les mineurs français.

Depuis 2016, l'État soutient les départements via une répartition des MNA sur le territoire et une aide financière. La loi Taquet a fait évoluer les critères pour lutter contre les abus et protéger les enfants. Nous augmentons les moyens des services de l'État, par exemple dans les Alpes-Maritimes, où le préfet a réquisitionné des locaux.

Nous avons lancé une enquête flash début septembre. Avec Charlotte Caubel et Éric Dupond-Moretti, nous recherchons des solutions de long terme. Nous rencontrerons l'Assemblée des départements de France (ADF) avec la Première ministre et discuterons des solutions à apporter. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

Éligibilité des territoires ruraux au PTZ

M. Christian Bilhac .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) « Mes amis, au secours ! » : c'était le cri d'alarme de l'abbé Pierre, il y a bientôt 70 ans, pour les sans-logis.

Les contraintes liées à la rénovation énergétique, le zéro artificialisation nette (ZAN), l'inflation, les taux d'intérêt élevés aggravent la crise du secteur du logement, qui représente plus d'un million de salariés et 400 000 entreprises artisanales. Diminution de 30 % des permis de construire, de 21 % des mises en chantier, chute d'un tiers des ventes... Quand le bâtiment va, tout va - mais quand il ne va pas ?

Il faut du temps entre le rallumage du moteur et la vitesse de croisière. Avec la fin du Pinel et l'exclusion des communes rurales du prêt à taux zéro (PTZ), les territoires ruraux sont une fois de plus oubliés. Pourtant, les besoins en logement y sont énormes et l'accès à la propriété est un facteur d'attractivité. Sans aides pour accéder à la propriété, plus de jeunes couples. Sans jeunes couples, plus d'écoles.

Je demande que les zones rurales soient éligibles aux nouvelles conditions du PTZ. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; MM. Jacques Fernique et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent également.)

M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement .  - Nous devons faire évoluer notre modèle de développement territorial pour l'adapter aux nouveaux enjeux : transition énergétique, diversité des situations... Nous souhaitons faire évoluer notamment le PTZ. Dans le cadre du projet de loi de finances, nous proposons de le prolonger jusqu'en 2027 et de l'adapter aux différentes situations locales.

En zone tendue, là où il faut absolument construire, nous le concentrons sur le logement neuf. En zone détendue, nous maintenons l'accession sociale à la propriété dans le neuf (M. Marc-Philippe Daubresse s'exclame), notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPPV), ainsi que l'acquisition-rénovation.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Vous allez dans le mur, 300 000 emplois de moins !

M. Patrice Vergriete, ministre délégué.  - Par exemple, dans la Creuse, plus de la moitié des logements sont des passoires thermiques et le taux de vacance y est de 15 %. Il faut y privilégier l'acquisition-rénovation. N'oublions pas la prime de sortie de vacance. Avec Dominique Faure, je suis prêt à signer des pactes de rénovation avec les territoires volontaires pour engager cette transition. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Droit dans le mur !

Antisémitisme (II)

M. Hussein Bourgi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'écrivain martiniquais Frantz Fanon écrivait il y a soixante-dix ans : « Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l'oreille, on parle de vous. »

Cela fait cinq semaines que les Français dressent l'oreille : ils sont horrifiés, scandalisés par la résurgence de l'antisémitisme. Pas un jour sans une nouvelle agression, menace ou dégradation contre nos compatriotes de confession juive.

L'antisémitisme n'a jamais disparu de la société française ; désormais, il s'étale sans complexe et empoisonne la vie de nos compatriotes. Madame la Première ministre, toutes les forces politiques se lèvent.

M. Roger Karoutchi.  - Eh oui !

M. Hussein Bourgi.  - Le président du Sénat et la présidente de l'Assemblée nationale ont appelé à une manifestation dimanche prochain. Merci, monsieur le président ! (Applaudissements sur la plupart des travées)

Quels moyens le Gouvernement compte-t-il mobiliser pour que chacun prenne toute sa part pour lutter contre ce fléau ? (Applaudissements sur la plupart des travées)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Plus de 11 000 policiers sont mobilisés sur 950 sites fréquentés habituellement par les Français de confession juive. Des manifestations ont été interdites pour que Paris évite d'entendre « Mort aux Juifs » comme en 2013 ou que des synagogues soient attaquées au cocktail Molotov, comme à Berlin.

Malheureusement, ceux qui passent à l'acte sont souvent très jeunes. Je suis prêt à répondre sur ce sujet aux questions de votre commission des lois : ont été interpellées 120 personnes étrangères, dont une quarantaine en situation irrégulière et trois fichés S. (M. Marc-Philippe Daubresse le confirme.)

Sur les 500 interpellés, il y a de nombreux jeunes, voire des mineurs, comme ceux ayant chanté des chants nazis dans le métro, qui font l'objet d'une enquête très suivie par la préfecture de police.

Chaque acte antisémite, dans le monde physique ou sur internet, fait l'objet d'une procédure, dès le moindre graffiti.

La sévérité de la justice attend tous ceux qui ont proféré des menaces de mort, notamment contre des rabbins. À Levallois-Perret, en vingt minutes et via TikTok, la police a arrêté l'auteur.

Lorsque 75 % des contenus antisémites constatés sont visibles sur Twitter, nous devons tous réfléchir à l'accès à ces plateformes. (MM. Pierre Jean Rochette et Michel Savin applaudissent.)

Tout le monde doit prendre sa part. (Applaudissements sur les travées du RDPI, sur plusieurs travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

M. Hussein Bourgi.  - Sur toutes nos travées, vous nous trouverez toujours mobilisés, à commencer par dimanche prochain. Nous sommes tous dépositaires de la phrase « Heureux comme un juif en France », qui nous oblige. (Applaudissements sur la plupart des travées)

Annonces du Gouvernement à la suite des émeutes de l'été 2023

M. Pierre Barros .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K) La mort du jeune Nahel, 17 ans, lors d'un contrôle policier, a été le point de départ de huit jours d'émeutes d'une rare intensité. Maire de Fosses, j'ai été, comme d'autres élus, témoin de graves violences. Je salue l'engagement des policiers et des gendarmes comme de tous les élus et agents du service public.

Quatre mois après ces tragiques événements, la présentation du plan gouvernemental était très attendue. Madame la Première ministre, j'étais à la Sorbonne : bien des élus en sont sortis déçus. Le tout-répressif et le contrôle social sont une double peine sur les familles monoparentales.

Avez-vous entendu les élus ? S'ils demandent à armer les polices municipales, c'est parce que les forces de l'ordre ont disparu de leurs territoires et que l'État n'y assure pas ses compétences régaliennes.

Quand on parle de la police de proximité, il faut non seulement augmenter les effectifs, mais aussi reconnaître la complexité de ce métier en termes de rémunérations et de carrière. Madame la Première ministre, vous donnez-vous ces moyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville .  - Des actions immédiates de gestion de crise ont d'abord été prises pour rétablir l'ordre républicain, puis un projet de loi transpartisan a été consacré à la reconstruction.

En parallèle, le Gouvernement a pris le temps du diagnostic. Une concertation s'est tenue avec les élus locaux. La Première ministre a annoncé le 26 octobre des mesures qui ne concernent pas que la sécurité, à commencer par le déploiement des forces d'action républicaine, expérimenté à Besançon, Valence et Maubeuge. (M. Laurent Burgoa ironise.)

La responsabilisation des parents est un enjeu majeur : ils seront impliqués dans l'indemnisation des victimes. Les classes de défense et le service militaire volontaire participeront de la réinsertion des jeunes décrocheurs dans une citoyenneté active.

Nous avons aussi créé une peine complémentaire de suspension de compte d'utilisateur en cas d'infraction sur une plateforme en ligne.

M. le Président.  - Concluez !

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État.  - Il s'agit d'une réponse multiforme. Le Gouvernement déploie tous les leviers pour que ces événements ne se reproduisent plus. (MM. Olivier Bitz et François Patriat applaudissent.)

M. Pierre Barros.  - Nous avons lu le communiqué de presse. C'est bien d'expérimenter... mais il serait mieux que, à titre expérimental, l'État fasse son travail ! (Rires ; applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État.  - Faites le vôtre aussi.

Mariages d'étrangers en situation irrégulière

M. Olivier Henno .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Stéphane Wilmotte, maire d'Hautmont, dans le Nord, a obtenu, grâce à son courage et à l'aide du préfet et du ministre, l'expulsion d'un imam salafiste qui faisait l'apologie du terrorisme - aujourd'hui en Algérie. Demain, ce maire, à la suite d'une citation directe de ce triste individu, se trouvera devant le tribunal. Sans faire la moindre pression sur la justice, souveraine, je souhaite poser des questions que je crois légitimes.

Est-il opportun de modifier la législation ? C'est le sens de l'amendement que j'ai déposé avec Stéphane Demilly. Faut-il renforcer l'accompagnement des maires par les préfets et les procureurs ? Prolonger le délai d'enquête avant un mariage ?

Nous ne pouvons laisser les maires, ces soutiers de la République, seuls face au problème des mariages de complaisance, qui risquent de se multiplier avec le renforcement de notre législation sur l'immigration. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Je salue le courage du maire d'Hautmont qui, en interpellant le préfet, ainsi que vous et moi, a obtenu l'expulsion de cet imam étranger qui défendait une version moyenâgeuse et radicale de l'islam ; il est désormais interdit de retour sur le territoire français. M. Wilmotte, qui paie cher ce courage, a l'entier soutien de la République, du ministère de l'intérieur et de ses services, et a reçu une protection face aux menaces qu'il reçoit.

Vous avez raison : les enquêtes doivent sans doute durer plus longtemps pour que les maires puissent agir en cas de doute sur la véracité du mariage d'un étranger. Par ailleurs, comme on l'a vu à Béziers, le droit de se marier ne peut en aucun cas être un obstacle à l'éloignement d'un étranger en situation irrégulière.

Dans le cadre de loi Immigration, vous avez adopté un amendement de M. Bitz qui porte la peine pour fraude documentaire concernant la reconnaissance de paternité à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. Nous travaillons à un dispositif qui permettra aux maires d'empêcher qu'on se marie non par amour, mais par intérêt, contre la République. (Applaudissements sur les travées du RDPI et des groupes UC et INDEP)

M. Olivier Henno.  - Merci de saluer le courage de M. Wilmotte. Nous avons le devoir de ne pas laisser les maires seuls. Ce cas n'est pas isolé, et risque de se reproduire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Maintien d'Atos dans le giron français

M. Cédric Perrin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Madame la Première ministre, nous sommes entrés dans une ère où la compétition stratégique est la norme et la lutte contre les ingérences étrangères, une nécessité.

La délégation parlementaire au renseignement en a fait le thème de son dernier rapport. Son président, Sacha Houlié, membre de votre majorité, vous invite à sortir du déni. Dans le même sens, j'ai récemment publié avec d'autres parlementaires Les Républicains une tribune, « Cessons de vendre nos fleurons à des puissances étrangères », appelant à refuser la vente d'Atos à EP Equity Investment, la société du milliardaire tchèque Daniel K?etínský. Depuis, les déboires se sont succédé : chute vertigineuse de l'action d'Atos, plainte au parquet national financier, départ forcé du président-directeur général, arrivée opportune d'un nouvel investisseur...

Atos est une entreprise privée, mais ce n'est pas une entreprise comme les autres : c'est sur ses supercalculateurs que repose la sûreté de notre parc nucléaire. Cela fait peser un risque inacceptable sur notre souveraineté. Comment comprendre le silence assourdissant de votre Gouvernement ? Nous attendons une réponse claire. (« Bravo !» et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé du numérique .  - Vous avez raison, Atos n'est pas une entreprise comme les autres, mais un fleuron industriel français : 100 000 emplois, présence dans plus de 70 pays et des savoir-faire français qui rayonnent dans le monde entier.

Pour une part minoritaire de ses activités, elle présente un intérêt stratégique : elle est la dernière entreprise européenne à concevoir des supercalculateurs et sera le premier partenaire des jeux Olympiques et Paralympiques pour la cybersécurité...

Plusieurs voix sur les travées du groupe Les Républicains.  - La réponse !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Je pense aussi à la supervision de notre parc nucléaire.

Contrairement à ce qui a été proposé à l'Assemblée nationale, le Gouvernement n'est pas favorable à la nationalisation d'Atos, qui ne réglerait pas les problèmes de l'entreprise. Atos a besoin de partenaires industriels et d'investisseurs, non de la tutelle de l'État.

Une prise de participation inférieure à 10 % aura une influence marginale sur la vie de l'entreprise. (Plusieurs voix à droite et M. Rachid Temal le contestent.)

Le code monétaire et financier soumet, de toute manière, toute prise de participation dans une entreprise stratégique à une autorisation du ministre de l'économie et des finances. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Rachid Temal.  - Que fera-t-il ?

Plusieurs voix à droite. - Où est-il ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - C'est rassurant...

M. Cédric Perrin.  - Ceux qui attendaient une réponse claire en sont pour leurs frais... À travers sa commission des affaires étrangères et de la défense et, si elle le souhaite, sa commission des affaires économiques, le Sénat remplira sa mission constitutionnelle de contrôle dans l'affaire Atos ! (« Bravo ! » et applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements sur quelques travées des groupes SER et CRCE-K)

Aide médicale d'État

M. Patrick Kanner .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe SER) Depuis sa création par Lionel Jospin, l'aide médicale d'État (AME) est combattue par les extrêmes droites, de Le Pen à Zemmour. Hier, le Sénat a voté sa suppression, sans opposition du Gouvernement : une digue de plus vient de sauter. (Murmures désapprobateurs à droite)

Le tout sur fond de cacophonie gouvernementale : début octobre, Gérald Darmanin s'est déclaré pour la suppression ; avant-hier, madame la Première ministre, vous avez indiqué y être défavorable, au nom de l'humanité et de la santé publique, dans l'attente du rapport Stefanini-Evin ; hier, après un plaidoyer presque émouvant en faveur de l'AME, la ministre Firmin Le Bodo s'est subitement dédite en émettant un avis de sagesse, blanc-seing pour la droite sénatoriale ; le soir même, son ministre de tutelle, Aurélien Rousseau, l'a désavouée, qualifiant la suppression de grave erreur. (Marques d'ironie à droite)

Nous partageons l'avis de votre ministre - le dernier dont j'ai parlé... (Rires à gauche) Nous dénonçons le calcul de la droite sénatoriale, prête à sacrifier la santé des étrangers et la santé publique par cynisme électoral ! (Applaudissements nourris sur les travées des groupes SER, CRCE-K, du GEST et du RDSE ; exclamations indignées à droite) L'ensemble du corps médical est révolté, une certaine idée de la République sociale est bafouée. (On continue de s'indigner à droite.)

Madame la Première ministre, à quelques heures de la prévisible suppression des articles 3 et 4 du projet de loi sur l'immigration, nous en sommes réduits à constater la recomposition de la droite, avec votre ministre de l'intérieur à la manoeuvre. Quelle est la position officielle du Gouvernement sur l'AME ? (« Bravo ! » et applaudissements nourris sur les travées des groupes SER, CRCE-K, du GEST et du RDSE)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - Le projet de loi Immigration, que vous examinez en ce moment, répond à un double objectif : éloigner plus rapidement ceux qui n'ont pas vocation à rester sur notre sol et mieux intégrer ceux que nous choisissons d'accueillir. (Marques d'ironie sur les travées du groupe SER)

M. Patrick Kanner.  - C'est mal parti !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.  - S'agissant de l'AME, la position du Gouvernement est sans ambiguïté ; elle a été exprimée clairement hier.

M. Rachid Temal.  - Par qui ? (On se gausse à gauche.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.  - L'AME est nécessaire et répond à un impératif de santé publique. (Exclamations à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Et voilà !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.  - Elle protège tous nos concitoyens en évitant la propagation de certaines maladies. (Vifs applaudissements et rires sur les travées des groupes CRCE-K, SER et du GEST ; applaudissements sur les travées du RDSE)

Ce dispositif est très encadré ; il est même le plus surveillé de l'assurance maladie. (« Bravo ! » ; vifs applaudissements et rires à gauche ; applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE ; marques de scepticisme à droite)

Nous avons besoin d'un diagnostic objectif et précis : c'est l'objet de la mission confiée à Patrick Stefanini et Claude Evin. La ministre déléguée vous l'a dit hier, cet état des lieux permettra, le cas échéant, de proposer des évolutions pour l'AME. Les conclusions de la mission, attendues pour début décembre, seront rendues publiques, et nous en tirerons les conséquences dans la suite du débat parlementaire.

L'AME a déjà été réformée, en 2019, dans le cadre naturel qu'est le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Monsieur Kanner, ma méthode est constante : les faits, le débat et la recherche d'efficacité - l'inverse du dogmatisme et des postures ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes SER et CRCE-K)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Dites-le à la droite !

M. Stéphane Ravier.  - Et le 49.3 !

Stocks de procédures judiciaires

Mme Françoise Dumont .  - Ma question s'adressait à M. le garde des sceaux. (Exclamations amusées sur plusieurs travées)

M. Rachid Temal.  -  Il est occupé ! (L'amusement redouble.)

Mme Françoise Dumont.  - Le 27 octobre dernier, RMC a dévoilé des éléments du rapport commun de l'IGPN, l'IGA et l'IGJ sur la gestion des stocks de procédures, remis au Gouvernement en juin. J'ai plusieurs fois demandé à le consulter, sans succès -  les journalistes, eux, ont pu s'en procurer un exemplaire.

Le rapport indiquerait que, l'année dernière, les commissariats disposaient d'un stock de 2,7 millions de plaintes, dont un tiers de plus de deux ans ; il faudrait y ajouter les 3,5 millions de plaintes déposées cette année. Il préciserait que des dossiers portant sur des faits graves dorment sans avoir fait l'objet d'investigations, alors que les auteurs présumés ont été identifiés. Le rapport conclurait que le stock de procédures pourrait atteindre 3,5 millions de plaintes en attente en 2030.

Dans un État de droit, on ne peut laisser des coupables impunis, il faut répondre au devoir de justice vis-à-vis des victimes. Cette situation est-elle liée à un manque de personnels ? Quelles sont les dix-sept recommandations du rapport ? Le Gouvernement entend-il y donner suite, et quand ? Surtout, les 2,7 millions de dossiers en souffrance seront-ils traités avant la fin des délais de prescription ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Le garde des sceaux et moi-même sommes conscients des grandes difficultés de la filière investigation. C'est pourquoi nous avons commandé cet état des lieux, qui sera naturellement rendu public.

Environ 3 millions de plaintes ne sont pas actuellement suivies. Je rappelle que 5 millions de plaintes sont déposées chaque année devant la police et la gendarmerie, ce qui est considérable, pour des faits très divers, des atteintes physiques, extrêmement graves, aux dégâts matériels, qui n'ont pas la même urgence.

Pourquoi un tel stock ? Il y a, en effet, un manque chronique de policiers et gendarmes. Grâce à votre soutien, nous avons augmenté les effectifs de 17 000 agents, réparant en cela beaucoup d'erreurs.

M. Rachid Temal.  - De Sarkozy ?

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur.  - Nous ne pouvons créer ex nihilo des officiers de police judiciaire (OPJ), il faut les former. La loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) permet de nommer des OPJ dès l'école de police.

En outre, le garde des sceaux a simplifié la procédure pénale. De mon côté, j'ai fait avancer la numérisation des procédures : désormais, plus de la moitié sont dématérialisées. Les moyens des parquets et des greffes ont été renforcés.

Bien sûr, nous traiterons l'ensemble des procédures ; il n'y aura pas de délai de prescription. J'ai donné pour consigne qu'on traite en priorité les plaintes visant des atteintes aux femmes et aux enfants. (MM. François Patriat et Olivier Bitz applaudissent.)

Avenir des concessions autoroutières

M. Vincent Delahaye .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le 22 mars dernier, le ministère de l'économie et des finances a publiquement annoncé qu'il interrogerait le Conseil d'État sur un possible raccourcissement de la durée des contrats de concession d'autoroute. Le 8 juin, le Conseil d'État a rendu son avis.

Entre ces deux dates, est-il exact que les sociétés d'autoroutes ont engagé un contentieux pour atteinte à leur image ? (M. Mickaël Vallet s'exclame.) Pensez-vous que cette procédure ait eu un effet sur l'avis du Conseil d'État ? Le Sénat a réclamé un sommet des autoroutes, maintes fois repoussé : quand aura-t-il lieu ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Mickaël Vallet.  - Bravo !

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Monsieur le sénateur, chacun connaît votre expertise dans le domaine autoroutier - votre passion, même.

Bruno Le Maire et moi avons, en effet, annoncé devant l'Assemblée nationale en mars que nous allions saisir le Conseil d'État sur la possibilité juridique de raccourcir la durée des concessions sans compensation massive, mais aussi sur la contribution des sociétés autoroutières à notre stratégie de décarbonation, dont vous serez saisis dans le cadre du projet de loi de finances.

En effet, les sociétés d'autoroute ont ouvert un contentieux. C'est leur droit. Le seul effet possible sur la saisine du Conseil d'État aurait été que celui-ci suspende ses travaux consultatifs, ce qu'il n'a pas fait. Il nous a remis son avis, que nous avons rapidement rendu public.

Bref, en aucun cas ce contentieux n'a pu affecter l'indépendance du Conseil d'État ; les règles ont été entièrement respectées. À supposer qu'il y ait eu pression, celle-ci ne fonctionne pas, puisque nous avons proposé au Parlement une contribution des sociétés d'autoroute.

D'ici à la fin de l'année, nous lancerons des travaux sur l'avenir des concessions, en y associant le Sénat et l'Assemblée nationale.

M. Vincent Delahaye.  - Mes informations allaient dans le sens d'une influence de ce recours sur le Conseil d'État, mais je prends acte de vos déclarations. Il est important que nous dialoguions avec vous et les sociétés d'autoroutes, qui ne sont pas très ouvertes au dialogue, sur l'équilibre financier de ces contrats.

Nous considérons qu'ils sont beaucoup trop profitables. En particulier, l'indexation des tarifs sur l'inflation est inadaptée, car les charges de ces sociétés dépendent peu de l'inflation. L'augmentation, cette année, a été très forte, de 4,75 %, soit 4 milliards d'euros de bénéfices supplémentaires d'ici à la fin des contrats.

Soyons vigilants sur ces augmentations et rappelons que, dans une concession, le patron, c'est l'État ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains)

Suites judiciaires des émeutes urbaines

Mme Marie-Carole Ciuntu .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ma question s'adressait à M. le garde des sceaux, dont nous regrettons l'absence.

Le maire de L'Haÿ-les-Roses et sa famille attaqués à leur domicile, les mairies de Villeneuve-le-Roi et Valenton réduites en cendres, des commissariats pris pour cible, comme à Villecresnes et Sucy-en-Brie : le Val-de-Marne a payé un très lourd tribut aux récentes émeutes.

Si trois personnes ont été condamnées pour l'incendie du poste de police de Villecresnes, aucune autre suite judiciaire n'a été apportée à ces faits, à ma connaissance.

Alors que ces émeutes ont entraîné 650 millions d'euros de dégâts à un millier de bâtiments publics et que les symboles mêmes de la République ont été visés, la Première ministre a insisté, le 26 octobre, sur la nécessité d'une réponse pénale exemplaire. Nous ne pouvons que souscrire à l'objectif, mais, cet été, seulement 1 000 condamnations avaient été prononcées, le plus souvent à de courtes peines, pour 10 000 émeutiers.

Où en sommes-nous ? Nous demandons un bilan département par département du nombre de personnes condamnées, des peines prononcées et de leur exécution. Tous les moyens de l'État doivent être mobilisés, il y va de sa crédibilité et de celle des élus ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Daniel Chasseing applaudit également.)

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville .  - Entre le 27 juin et le 6 juillet derniers, 516 communes de 66 départements ont été le théâtre de violences urbaines. Le 30 juin, le garde des sceaux a demandé par circulaire une réponse pénale rapide, ferme et systématique.

Le traitement juridique des affaires a été empreint de célérité. Le taux de réponse pénale s'élève à 92 %, le taux de déferrement de 90 % et le recours à la comparution immédiate a été massif. Près de 1 800 personnes ont été condamnées à une peine d'emprisonnement, d'un quantum moyen de neuf mois ferme.

Le garde des sceaux a présenté des mesures concrètes pour renforcer la répression envers les plus jeunes et responsabiliser leurs parents, dont un placement éducatif de jour ou de nuit pour les mineurs, un partenariat renforcé avec l'armée et la création d'une responsabilité civile de plein droit des deux parents d'un mineur, même séparés. Ces mesures fortes ont été saluées par de nombreux élus. (MM. François Patriat et Olivier Bitz applaudissent ; marques de scepticisme à droite.)

Mme Marie-Carole Ciuntu.  - Pour le maire de L'Haÿ-les-Roses, l'espoir d'une sanction de ses agresseurs s'éloigne encore. Vous l'aviez pourtant assuré, madame la Première ministre, qu'ils seraient punis. Nous l'espérons bien ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Tempête Ciaran (II)

M. Simon Uzenat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La tempête Ciarán a durement éprouvé la Bretagne. Nous saluons l'engagement des pompiers, des forces de l'ordre et de sécurité civile, des agents locaux ainsi que des opérateurs, et rendons hommage à Frédéric Despeaux, agent d'Enedis décédé dans l'exercice de ses fonctions.

Alors que le monde agricole est lourdement touché, le comité catastrophe naturelle ne se réunit que le 14 novembre, bien tard. Confirmez-vous que les dégâts de la tempête entrent dans ce champ de garantie ?

Le Gouvernement parle de quelques pourcents de foyers à raccorder, mais ce sont des dizaines de milliers de Bretons qui subissent les conséquences des promesses non tenues. Réseau cibi improvisé faute de téléphone satellitaire en Finistère, usine d'eau potable dépriorisée dans les Côtes-d'Armor, station d'épuration sans électricité dans le Morbihan... Des maires sont contraints d'appeler le copain d'un copain chez Enedis, d'utiliser leur propre véhicule pour aller chercher des groupes électrogènes, de multiplier les relances pour sécuriser des points critiques... Perdus au milieu de nulle part, obligés d'endosser des responsabilités majeures sans moyens ni informations, les élus sont à bout.

La sous-traitance de l'État confine désormais à la maltraitance. Nous voyons là les effets directs du sous-investissement chronique dans nos services publics. Face à la multiplication prévisible des catastrophes climatiques, il est urgent d'agir. Quelles mesures concrètes allez-vous prendre ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et du GEST)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Les dommages causés par les vents violents sont couverts par la garantie tempête des polices d'assurance souscrites par les collectivités. Vendredi dernier dans le Finistère, le Président de la République a annoncé le déclenchement rapide de l'état de catastrophe naturelle et de l'état de calamité agricole.

Le comité catastrophe naturelle se réunira le 14 novembre, c'est très rapide. Le décret paraîtra bientôt. Le mécanisme couvrira notamment les dommages liés aux phénomènes de submersion ou de débordement des cours d'eau. En cas de difficulté, les collectivités peuvent saisir elles-mêmes le médiateur des assurances.

Enfin, la dotation de solidarité peut prendre en charge les dégâts subis par les biens des collectivités ; j'ai demandé à la direction générale des collectivités locales (DGCL) de rappeler les règles aux préfets, pour une prise en charge rapide. J'y veillerai personnellement. Par ailleurs, le ministre de l'agriculture poursuit l'évaluation des dégâts afin d'enclencher au plus vite la procédure de reconnaissance en calamité agricole. Les pertes de récoltes seront prises en charge pour les agriculteurs non assurés via l'indemnité de solidarité nationale.

Comme à chaque fois, nous serons aux côtés des collectivités, des agriculteurs et de tous nos concitoyens. (M. François Patriat applaudit.)

Harcèlement scolaire

Mme Agnès Evren .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur Attal, dès votre prise de fonction, vous avez eu des mots forts et courageux contre le harcèlement scolaire. L'omerta était devenue insupportable.

Les chiffres sont accablants. Un jeune sur cinq est victime de harcèlement scolaire, deux fois plus qu'avant ; la moitié des victimes ne parlent pas ; 80 % des parents sont inquiets. Les faits, démultipliés par les réseaux sociaux, ne s'arrêtent plus aux grilles de l'école, ne laissant aucun répit aux victimes.

Les 30 millions d'euros annoncés pour les brigades anti-harcèlement suffiront-ils, alors que les établissements manquent de médecins, de psychologues et d'infirmiers scolaires ? Tous les personnels seront-ils systématiquement formés à prévenir et détecter ? Allez-vous rendre obligatoire le questionnaire d'autoévaluation alors que les deux heures banalisées sont facultatives ?

Allez-vous mettre en place des mesures d'éloignement du harceleur pour protéger la victime, comme le propose Marie Mercier dans sa proposition de loi ? (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains) Face à ce drame humain, l'action doit être à la hauteur de la communication. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit également.)

M. Gabriel Attal, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - S'il est une cause qui peut nous rassembler, c'est la lutte contre ce fléau. Des élèves vont à l'école la boule au ventre, certains finissent par se donner la mort.

Nous avons besoin de toutes les bonnes idées, et sommes bien sûr attentifs aux propositions du groupe Les Républicains et de Mme Mercier. (« Ah ! » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Sur la formation, nous généralisons le programme de lutte contre le harcèlement à l'école (pHARe), qui prévoit au moins cinq adultes formés par établissement - des enseignants, mais aussi par exemple des agents de la cantine, bien placés pour détecter.

Demain, journée nationale de lutte contre le harcèlement, tous les établissements scolaires organiseront une action. Les deux heures banalisées ne sont pas optionnelles : elles seront consacrées à débattre du sujet et à remplir le questionnaire d'autoévaluation élaboré avec Marcel Rufo, Éric Debarbieux et Nicole Catheline.

Sur les sanctions, je l'ai dit dès cet été, c'est aux harceleurs de quitter l'établissement et non aux harcelés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC et du RDSE) À Mont-de-Marsan, une semaine après le dépôt d'une plainte le 9 octobre, trois harceleurs ont été interpellés ; ils passeront devant le juge des enfants le 15 novembre. Entretemps, ils ont été exclus de l'établissement, comme plusieurs dizaines de jeunes harceleurs depuis que j'ai pris cette décision. La peur et la honte sont en train de changer de camp. Il y a encore du travail, mais vous pouvez compter sur ma mobilisation, comme je sais pouvoir compter sur la vôtre. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE, des groupes INDEP, UC et Les Républicains, ainsi que sur quelques travées du GEST)

Mme Agnès Evren.  - Malgré les nombreuses annonces sur le respect de la laïcité à l'école, celle-ci est aujourd'hui fragilisée comme jamais. J'espère qu'il n'en sera pas de même pour la lutte contre le harcèlement scolaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Jurisprudence européenne sur le refoulement des migrants

M. Jean-Michel Arnaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) L'article 78-2 du code de procédure pénale prévoit qu'un étranger qui ne dispose pas des documents nécessaires s'expose à un refus d'entrée sur le territoire et peut être placé en zone d'attente, le temps pour l'administration d'organiser son retour. Cette mesure a prouvé son efficacité.

Or dans un arrêt du 21 septembre 2023, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a considéré que la France ne pouvait refouler des personnes migrantes entrées illégalement sur son sol sans leur octroyer un délai pour quitter volontairement le territoire. Sur le terrain, cela se traduira par une procédure administrative de réadmission, à rebours du message de fermeté du Gouvernement.

Cette décision court-circuite notre droit national, dans un contexte d'augmentation des flux migratoires. Dans les Hautes-Alpes, où les migrants empruntent régulièrement les cols de l'Échelle et de Montgenèvre pour passer d'Italie en France, ni l'accueil ni la surveillance des frontières ne sont à la hauteur.

Comment la France prendra-t-elle en compte cette décision dans le contexte de l'examen du projet de loi Immigration ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Dans les Hautes-Alpes comme dans les Alpes-Maritimes, nous avons considérablement renforcé les moyens et expérimenté un commandement unique des forces qui protègent nos frontières. C'est très efficace : depuis le 1er juillet, nous avons augmenté de 70 % les retours dans les pays d'origine, et plus de 60 000 refus d'entrée ont été prononcés depuis le début de l'année.

Le Conseil d'État ayant saisi la CJUE sur cette question préjudicielle, à la demande d'associations militantes, il doit désormais interpréter sa décision. Je précise que celle-ci n'interdit pas aux États européens de rétablir les contrôles aux frontières intérieures, comme nous le faisons depuis 2015, au vu de la menace terroriste.

Nous espérons que le Conseil d'État reconnaîtra que les gendarmes et policiers ne peuvent être engoncés dans des procédures administratives ou judiciaires s'apparentant à la garde à vue, et considérons que l'expérimentation menée depuis juillet pour un refus d'admission rapide est compatible avec le droit européen.

J'attends avec confiance la décision du Conseil d'État.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Nous devons aussi accompagner dignement les migrants qui franchissent la frontière, accueillis dans des bungalows à 1 850 mètres d'altitude, et renforcer durablement le contrôle à la frontière italienne avec un escadron de gendarmerie permanent. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 16 h 20.

Présidence de Mme Sophie Primas, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 30.

Mise au point au sujet d'un vote

Mme Isabelle Florennes.  - Lors du scrutin n°24, Mme Élisabeth Doineau souhaitait voter contre.

Mme la présidente.  - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales (Nomination)

Mme la présidente.  - Une candidature pour siéger au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Commission d'enquête (Nominations)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la désignation des 23 membres de la commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier.

En application de l'article 8 ter, alinéa 5 de notre Règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Délégation sénatoriale aux outre-mer (Nominations)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la désignation des 21 membres de la délégation sénatoriale aux outre?mer autres que les 21 sénateurs d'outre-mer, membres de droit.

En application de l'article 6 decies de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et du chapitre XVII bis de l'Instruction générale du Bureau, les listes des candidats présentés par les groupes ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Immigration et intégration (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration.

Demande de réserve

M. Patrick Kanner.  - Avec les articles 2 bis et 2 ter, nous abordons des questions relatives au code de la nationalité. En vertu des articles 32 et 44 alinéa 6 de notre Règlement, je demande la réserve des articles 2 bis et 2 ter, afin de permettre au garde des sceaux d'être présent au banc des ministres lors de leur examen.

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois.  - Avis défavorable. La commission a mené un long travail, y compris avec le cabinet de la Chancellerie, et il n'y a pas de difficulté particulière.

Le président Kanner est malicieux...

M. Patrick Kanner. - Facétieux !

M. François-Noël Buffet, président de la commission.  - ... mais j'agirais de même si l'un d'entre nous se trouvait dans une telle situation. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer.  - Cette demande n'est pas nécessaire, elle est indélicate et sera sans effet. Lorsqu'un ministre est au banc, il s'exprime au nom de tout le Gouvernement. Que n'avez-vous demandé la réserve sur les articles qui concernaient le code du travail hier ! Vous auriez pu exiger la présence d'Olivier Dussopt !

Plusieurs voix sur les travées du groupe SER.  - Nous avons réclamé sa présence !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Votre demande est politicienne.

L'avis sera systématiquement défavorable sur les amendements relatifs au code de la nationalité, qui sont d'évidents cavaliers législatifs.

Défavorable à la demande de réserve, sur le fond comme sur la forme.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Mon rappel au Règlement se fonde sur l'article 44.

Le dysfonctionnement est total. Le garde des sceaux est jugé par la justice en ce moment même, et travaillerait le soir et la nuit ? Nous débattrions du droit du sol en son absence ?

Nous avons invoqué l'article 45 en commission, sans succès.

Vous nous taxez d'indélicatesse, mais il ne s'agit pas d'appliquer le manuel de savoir-vivre de Mme de Rothschild ! Il s'agit du fonctionnement du Gouvernement ! Monsieur le ministre, votre réponse est légère.

La réserve n'est pas ordonnée.

Demande de priorité

M. François-Noël Buffet, président de la commission.  - En application de l'article 44 de notre Règlement, la commission des lois demande la priorité d'examen des amendements nos655 à l'article 3 et 656 à l'article 4.

Nous demanderons en outre une suspension de quinze minutes après l'examen des amendements portant articles additionnels après l'article 2 ter afin d'examiner les sous-amendements déposés depuis la réunion de commission de ce matin.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

La priorité est ordonnée.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 BIS

Mme Corinne Narassiguin .  - L'article 2 bis, introduit en commission par Les Républicains, est une régression inacceptable, en plus d'être cavalier législatif. Il vise à mettre fin à l'acquisition automatique de la nationalité, à leur majorité, des jeunes nés en France de parents étrangers. Le signal que nous leur adressons est terrible. Ils devront toujours prouver qu'ils méritent d'être français alors qu'ils n'ont connu que la France. (MM. André Reichardt et Roger Karoutchi manifestent leur agacement.)

Comment avoir envie de vous intégrer quand la République vous signifie qu'elle ne veut pas vous intégrer ? La volonté doit se manifester dans les deux sens !

La loi Pasqua a été abrogée en 1998 par Lionel Jospin, car cela ne fonctionnait pas. Et le rapport de Patrick Weil a montré l'inefficacité et l'injustice de telles mesures.

Mme Audrey Linkenheld .  - J'ajoute que les jeunes filles pourraient être empêchées de manifester leur volonté. En prenant une telle disposition, nous créerions des inégalités de traitement dans une même famille et irions au-devant de situations administratives complexes.

Cet article est en contradiction totale avec notre conception de la République. Nous aurions aimé entendre le garde des sceaux sur cette mesure qui n'a pas sa place dans un projet de loi relatif à l'immigration.

Mme la présidente.  - Amendement n°22 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj, Roux et Grosvalet, Mme Pantel et M. Masset.

Supprimer cet article.

M. Henri Cabanel.  - Nous sommes résolument contre cet article 2 bis, résurgence de la loi Pasqua.

Une formalité administrative ne crée pas un attachement. Nous sommes attachés au droit du sol.

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas avoir, vous aussi, déposé d'amendement de suppression ?

Mme la présidente.  - Amendement identique n°169, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - Le ministre l'a dit, il sera favorable à ces amendements de suppression, car cette mesure n'a pas sa place ici. Mais pourquoi n'avoir pas lui-même déposé un amendement de suppression ?

Cet article est d'autant plus inutile que le droit prévoit déjà que l'acquisition de la nationalité peut faire l'objet de la manifestation de sa volonté de la part du demandeur, entre 13 et 16 ans.

Nous allons créer une rupture d'égalité dans la République. C'est intolérable : s'il y a bien un domaine sur lequel nous ne pouvons transiger, c'est notre appartenance à la République.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°286 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - On peut en effet s'étonner de l'absence du garde des sceaux.

Sur le fond, nous sommes choqués par ces modifications du droit du sol. La manifestation de volonté, qui n'est pas définie, risque d'être diversement interprétée. Et quid de ceux qui ne sauront pas qu'ils doivent se manifester ? De ceux qui se manifesteront trop tard ? De ceux qui seront partis un an à l'étranger avec leurs parents au cours des cinq ans ?

Mme la présidente.  - Amendement identique n°467, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Pascal Savoldelli.  - Le combat de la droite contre le droit du sol n'est pas nouveau : c'est leur idée fixe. L'automaticité d'acquisition de la nationalité avait déjà été supprimée par Édouard Balladur, à la suite des travaux de la commission mise en place par Jacques Chirac et présidée par Marceau Long.

Pourtant, le droit du sol accompagne toute l'histoire de la République. (M. Roger Karoutchi le conteste.)

Mme Boyer a déposé de nombreux amendements.

Mme Frédérique Puissat.  - Elle travaille !

M. Pascal Savoldelli.  - Comment oublier que c'est Vichy qui a le premier remis en cause le droit du sol ? Et l'ordonnance de 1945, issue du combat des Français et des immigrés contre le nazisme, qui a instauré le droit du sol actuel.

La proposition de la droite sénatoriale est dangereuse : elle fait planer un doute sur l'avenir d'une partie de notre jeunesse.

Le droit du sol a supplanté celui du sang, mais je rappelle qu'à une époque, on parlait de sang impur... Le droit du sol doit être conçu comme une citoyenneté politique.

Mme Audrey Linkenheld.  - Très bien !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission des lois.  - Avis défavorable. Nous nous serions bien dispensés de ce rappel historique, d'autant que le droit du sol a commencé bien avant la Première Guerre mondiale. Les fondements juridiques ne sont pas exactement ceux que vous évoquez.

Cet article provient en effet d'un amendement de Mme Boyer, très investie sur ces sujets, qui « tangente » les limites de l'article 45 ; nous en sommes conscients.

Demander une manifestation de la volonté ne nous paraît pas anormal pour un jeune né en France de parents étrangers et qui a peut-être grandi dans une communauté dont il se sent proche. Il n'aura rien à prouver, juste à manifester sa volonté.

Personne ne cherche à faire vivre la mémoire de M. Pasqua, mais chacun se souvient de l'autorité morale de M. Marceau Long et de l'intégrité intellectuelle de M. Pierre Mazeaud.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Favorable à ces amendements de suppression : cet article n'a rien à faire dans un texte relatif à l'immigration.

M. Roger Karoutchi.  - Chacun votera en conscience, mais je ne suis pas d'accord avec le ministre, une fois n'est pas coutume.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Une fois n'est pas coutume ?

M. Roger Karoutchi.  - Monsieur le ministre, ayant appris que vous remodeliez la droite autour de vous, j'aimerais pouvoir m'adresser à vous. (Marques d'amusement sur plusieurs travées)

Il faut cesser de dire que le droit du sol est un principe républicain, c'est faux. Le premier texte sur l'acquisition de la nationalité et les mouvements migratoires date de 1889. À l'époque, nous avions besoin de plus de troupes, dans un contexte de grande faiblesse démographique par rapport à l'Allemagne. (MM. François-Noël Buffet et Philippe Bonnecarrère acquiescent.) C'est un principe de réalité, non un principe républicain. Cet article a toute sa place dans ce texte. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. André Reichardt.  - Bravo !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le Gouvernement considère que cet article est un cavalier, mais vous êtes les seuls juges de son irrecevabilité...

Nous ne mélangeons pas le code civil avec le Ceseda : n'y ajoutons pas le code de la nationalité, aussi intéressants ces sujets soient-ils ! Nous pourrons en débattre dans un autre cadre.

Avis favorable sur ces amendements de suppression.

Mme Laurence Rossignol.  - Votre proposition est choquante et méconnaît ce qu'est un adolescent de 16 ou 17 ans. (Marques d'agacement à droite) Vous demandez à un mineur, qui peut être en conflit affectif avec ses parents, de faire une démarche d'adulte. Ensuite, la porte se ferme ! Combien d'adolescents sont informés de leurs droits ? Probablement très peu.

Ce texte est destiné à lutter contre ceux qui veulent rester alors qu'ils n'y ont pas droit, mais là, nous parlons d'enfants nés en France avec lesquels nous devons faire nation. Nos conceptions diffèrent.

M. Pascal Savoldelli.  - M. le rapporteur nous demande de mettre l'histoire de côté, mais lui ne le fait pas. Jamais Roger Karoutchi ne me demandera de mettre l'histoire de côté.

M. Roger Karoutchi.  - Heureusement !

M. Pascal Savoldelli.  - Dès qu'il y a eu peuple français, il y a eu droit du sol. À la Révolution, il suffisait d'avoir vécu un an en France pour obtenir la nationalité française, car la France n'est pas une nation religieuse ou ethnique, c'est une nation politique. Avant, les Français étaient sujets du roi, leur sang était soi-disant impur, contrairement au sang bleu de l'aristocratie. Remettre en cause le droit du sol, c'est remettre en cause les fondements de la République.

M. Guy Benarroche.  - Laurence Rossignol l'a dit : ces jeunes sont là pour faire nation, et ils la font déjà...

M. Roger Karoutchi.  - Pas toujours !

M. Guy Benarroche.  - ... depuis leur naissance, que ce soit à l'école ou dans leurs activités sportives et culturelles.

Ils sont, pour 99 % d'entre eux, naturellement français. Or leur demander d'exprimer une volonté suppose qu'ils ne le sont pas...

Le véritable sujet, c'est la lutte contre l'immigration irrégulière.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Je ne m'attendais pas à un débat sur les grands principes. (Murmures à gauche ; Mme Audrey Linkenheld s'exclame.)

Monsieur Savoldelli considère que le droit du sol fait partie de nos grands principes républicains. (M. Pascal Savoldelli le confirme.) La loi de 1993 a été soumise au Conseil constitutionnel, qui a estimé qu'elle ne portait atteinte à un aucun principe de valeur constitutionnelle : Monsieur Savoldelli, le Conseil constitutionnel vous a répondu.

Les amendements identiques nos22 rectifié bis, 169, 286 rectifié et 467 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°524 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

Rédiger ainsi cet article :

Les articles 21-7, 21-8, 21-9, 21-10 et 21-11 du code civil sont abrogés.

M. Stéphane Ravier.  - Le droit du sol est devenu un dogme ; M Karoutchi l'a dit. (Exclamations sur les travées du GEST) J'ai le droit d'être d'accord avec lui sur des faits historiques !

Le droit du sol a été créé afin d'aligner autant d'hommes que l'Allemagne en cas de mobilisation générale. Mais la prochaine invasion ne viendra pas d'outre-Rhin...

Pourquoi donnerait-on la nationalité à quelqu'un qui vit comme un étranger, fût-il né en France ?

Avoir été à l'école de la République n'est en aucun cas suffisant puisqu'on y apprend que la France n'est plus une patrie charnelle. Selon l'Ifop, en 2020, 57 % des lycéens français musulmans plaçaient la charia au-dessus des lois de la République. (Murmures à gauche)

M. Roger Karoutchi.  - C'est vrai !

M. Stéphane Ravier.  - Un enfant sur six qui naît en France a deux parents étrangers hors Union européenne. Depuis 2017, cela représente 60 000 naissances annuelles : autant de personnes qui vont ainsi pouvoir demander le droit du sol, l'équivalent de la ville de Nice au bout de cinq ans !

Pourquoi ne pas suspendre le droit du sol en métropole, comme à Mayotte ?

En 2020, 58 % des Français étaient favorables à la suppression du droit du sol. Un veau qui naît dans une écurie ne devient pas un cheval. (Huées à gauche)

M. François Patriat.  - C'est abject !

Mme la présidente.  - Monsieur Ravier, veuillez rester correct.

M. Stéphane Ravier.  - Mes chers collègues, c'est à vous de mettre fin à cette stupide loi du sol : c'est une évidence et une urgence !

Mme la présidente.  - Amendement n°344 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci, Bas, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques et Josende, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, M. Milon, Mme Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Perrin, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon, Szpiner et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel et Cuypers et Mme Petrus.

Rédiger ainsi cet article :

Le code civil est ainsi modifié :

1° Le titre Ier bis du livre Ier est ainsi modifié :

a) Au second alinéa de l'article 20-5, la référence : « 21-11 » est remplacée par la référence : « 21-7 » ;

b) Le premier alinéa de l'article 21-7 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Tout enfant né en France de parents étrangers peut, à partir de l'âge de seize ans et jusqu'à l'âge de dix-huit ans, acquérir la nationalité française à condition qu'il en manifeste la volonté, qu'il réside en France à la date de sa manifestation de volonté et qu'il justifie d'une résidence habituelle en France pendant les dix années qui la précèdent.

« Dans les mêmes conditions, la nationalité française peut être réclamée, au nom de l'enfant mineur né en France de parents étrangers, à partir de l'âge de treize ans, la condition de résidence habituelle en France devant alors être remplie à partir de l'âge de trois ans. Le consentement du mineur est requis, sauf s'il est empêché d'exprimer sa volonté par une altération de ses facultés mentales ou corporelles constatée selon les modalités prévues au troisième alinéa de l'article 17-3.

c) Les articles 21-10 et 21-11 sont abrogés ;

d) À la fin du premier alinéa de l'article 21-13-2, les mots : « des articles 21-7 ou 21-11 » sont remplacés par les mots : « de l'article 21-7 » ;

e) Au premier alinéa de l'article 21-28, la référence : « 21-11 » est supprimée ;

2° Le titre Ier du livre V est ainsi modifié :

a) À l'article 2493, les mots : « le premier alinéa de l'article 21-7 et l'article 21-11 » sont remplacés par les mots : « les premier et troisième alinéas de l'article 21-7 » ;

b) L'article 2494 est ainsi modifié :

- Au deuxième alinéa, les mots : « les articles 21-7 et 21-11 sont applicables » sont remplacés par les mots : « l'article 21-7 est applicable » ;

- Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, l'article 2493, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, s'applique à l'enfant né à Mayotte de parents étrangers entre l'entrée en vigueur de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 précitée et de la loi n°  du  pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration. »

Mme Valérie Boyer.  - Mes amendements sont en discussion commune avec le précédent, mais je n'emploierai pas les mêmes termes que le précédent orateur.

Dès 2012, avec l'arrivée de François Hollande à l'Élysée, la France a perdu la maîtrise de son immigration - les chiffres le prouvent. Le nombre d'acquisitions de nationalité a également augmenté : plus 53,6 % entre 2017 et 2021.

Les conditions d'accès à la nationalité pour les mineurs restent favorables et contribuent à l'attractivité de notre territoire. La commission des lois a souhaité les resserrer. Je déplore que cette question ait été initialement absente d'un projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration : l'acquisition de la nationalité, c'est l'aboutissement de l'intégration.

Avec cet amendement, je souhaite que la durée de résidence habituelle sur le territoire soit portée à dix ans. En 1993, la loi Pasqua n'avait pas provoqué de désordre. L'amendement prévoit également des coordinations nécessaires pour Mayotte.

Députée, j'avais déjà présenté ces amendements lors du débat de la loi Collomb. Quand parlerons-nous de nationalité, sinon dans ce texte ?

Mme la présidente.  - Amendement n°66 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot, Genet, Saury et Klinger, Mmes Josende et Goy-Chavent et M. Gremillet.

Rédiger ainsi cet article :

Le code civil est ainsi modifié :

1° L'article 21-7 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa après le mot : « majorité », sont insérés les mots : « à condition qu'il en manifeste la volonté et qu'il justifie de son assimilation à la communauté française dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État » et le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « dix » ;

b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa n'est pas applicable à l'enfant ayant un casier judiciaire ni à l'enfant dont les parents étaient en situation irrégulière en France au moment de sa naissance. » ;

2° L'article 21-11 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'obtention de la nationalité française est soumise à l'assimilation du mineur et de ses responsables légaux à la communauté française, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »

Mme Valérie Boyer.  - Cet amendement restreint aussi les conditions d'acquisition de la nationalité au titre du droit du sol.

Mme la présidente.  - Amendement n°69 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mmes Garnier et P. Martin, MM. Genet et Saury, Mme Romagny, M. Klinger et Mmes Josende et Goy-Chavent.

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le code civil est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article 21-7 est complété par les mots : « et, si, à la date de sa naissance, ses deux parents résidaient en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans » ;

2° Après l'article 21-7, il est inséré un article 21-7-... ainsi rédigé :

« Art 21-7-.... - À la demande des deux parents et sur présentation de justificatifs, la mention qu'au jour de la naissance de l'enfant, ils résident en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans est portée sur l'acte de naissance de l'enfant selon des conditions et modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Lorsque l'officier de l'état civil refuse d'apposer la mention, les deux parents peuvent saisir le procureur de la République, qui décide, s'il y a lieu, d'ordonner cette mesure de publicité en marge de l'acte, selon des modalités prévues par décret en Conseil d'État. » ;

3° Au premier alinéa de l'article 21-11, après la première occurrence des mots : « sa résidence » sont insérés les mots : « , si, à la date de sa naissance, les deux parents résidaient en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans » ;

4° Les articles 2493, 2494 et 2495 sont abrogés. 

II.  -  Les articles 21-7 et 21-11 du code civil sont applicables, dans leur rédaction antérieure à la loi n° ... du ... pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, à l'enfant né en France de parents étrangers avant l'entrée en vigueur de ladite loi si les deux parents justifient avoir résidé en France de manière régulière pendant la période de cinq ans mentionnée aux mêmes articles 21-7 et 21-1. 

Mme Valérie Boyer.  - Il s'agit de subordonner en France métropolitaine le bénéfice du droit de sol à deux années de présence pour les deux parents.

Mme la présidente.  - Amendement n°70 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mmes Garnier et P. Martin, M. Genet, Mme Lassarade, MM. Szpiner, Saury et Chasseing, Mme Romagny, M. Klinger et Mmes Josende et Goy-Chavent.

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le code civil est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article 21-7 est complété par les mots : « et, si, à la date de sa naissance, l'un de ses parents au moins résidait en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans » ;

2° Après l'article 21-7, il est inséré un article 21-7-... ainsi rédigé :

« Art 21-7-....  -  À la demande de l'un des parents et sur présentation de justificatifs, la mention qu'au jour de la naissance de l'enfant, il réside en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans est portée sur l'acte de naissance de l'enfant selon des conditions et modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Lorsque l'officier de l'état civil refuse d'apposer la mention, le parent peut saisir le procureur de la République, qui décide, s'il y a lieu, d'ordonner cette mesure de publicité en marge de l'acte, selon des modalités prévues par décret en Conseil d'État. » ;

3° Au premier alinéa de l'article 21-11, après la première occurrence des mots : « sa résidence », sont insérés les mots : « , si, à la date de sa naissance, l'un de ses parents au moins résidait en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans » ;

4° Les articles 2493, 2494 et 2495 sont abrogés. 

II. - Les articles 21-7 et 21-11 du code civil sont applicables, dans leur rédaction antérieure à la loi n° ... du ... pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, à l'enfant né en France de parents étrangers avant l'entrée en vigueur de ladite loi si l'un des parents justifie avoir résidé en France de manière régulière pendant la période de cinq ans mentionnée aux articles 21-7 et 21-1 du code civil.

Mme Valérie Boyer.  - C'est un amendement de repli qui subordonne le bénéfice du droit du sol en France métropolitaine au séjour régulier de deux années, sur le territoire national, d'un des deux parents.

Actuellement, des jeunes filles mineures arrivent enceintes en France pour obtenir ce totem d'immunité : un enfant né en France. Cette situation désespérante contribue au trafic d'êtres humains. En restreignant le droit du sol, nous évitons de telles situations dramatiques.

À Mayotte, on distribue des kits d'accouchement pour les femmes qui arrivent en bateau !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis défavorable sur les amendements nos524 rectifié bis, 66 rectifié, 69 rectifié et 70 rectifié. Sagesse sur l'amendement n°344 rectifié.

Certaines déclarations sont excessives, monsieur Ravier. Sachons conserver la nécessaire sérénité de nos discussions.

L'amendement no 524 rectifié bis de M. Ravier est inconstitutionnel.

Madame Boyer, il a été suffisamment difficile de faire accepter par le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel une situation dérogatoire spécifique pour Mayotte. Vos amendements nos66 rectifié, 69 rectifié et 70 rectifié présentent des risques d'inconstitutionnalité majeurs.

Je donne un avis de sagesse du bout des lèvres sur l'amendement n°344 rectifié, qui fait passer la durée de résidence de cinq à dix ans. Certes, vous préparez la CMP, mais nous sommes déjà à la limite de l'article 45. (Vives protestations à gauche)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable. Le rapporteur reconnaît lui-même qu'on est à la limite de l'article 45. Le Conseil constitutionnel appréciera...

M. Ravier, vous avez comparé des humains à des animaux...

M. Stéphane Ravier.  - C'est une image !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Vous auriez pu en prendre une autre, car elle ne vous honore pas. Le ministre de la République que je suis ne saurait rester sans réagir. (Bravos à gauche ; applaudissements sur plusieurs travées)

Madame Boyer, vous parlez d'un temps ancien pour Mayotte. Ce gouvernement a modifié les règles de régularisation et donc d'acquisition de la nationalité qui s'y appliquent : désormais, il faut que l'un au moins des deux parents soit en séjour régulier ou national, et que l'autre soit arrivé au moins trois mois avant la conception de l'enfant.

Faut-il aller plus loin ? Probablement. Les sénateurs de Mayotte envisagent de faire passer le délai à neuf mois avant la conception de l'enfant (marques d'amusement à gauche) et d'exiger que les deux parents soient en situation régulière.

Une telle disposition sera-t-elle constitutionnelle ? Le Conseil d'État avait émis des doutes lors de notre précédente réforme. Nous y travaillons.

M. Fabien Gay.  - Mon rappel au Règlement est fondé sur l'article 32. Notre groupe est attaché au débat démocratique et républicain. J'ai un désaccord avec M. Karoutchi, mais cela n'est pas grave : ce ne sera ni le premier ni le dernier... Mais ce qu'a dit notre collègue Ravier est indigne et intolérable : comparer des hommes et des femmes à des animaux est inacceptable. Tous les républicains ici présents doivent le condamner. Il est inadmissible de laisser un racisme décomplexé s'exprimer librement dans cet hémicycle.

Mon groupe condamne fermement ces propos. (Applaudissements sur de très nombreuses travées)

Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois.  - L'étranger est le veau, et le Français le cheval ! Nous sommes tous ravalés au rang de bête dans cette histoire. Voilà qui n'est pas très élégant. (Exclamations à gauche)

Ce que dit M. Ravier est faux : la France est un pays universaliste, où l'on peut devenir français, quelles que soient sa religion, sa couleur de peau, son orientation sexuelle et son origine. En France, quelqu'un peut devenir français par assimilation, ce qui implique d'adhérer à la totalité de ce qu'est la France. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Valérie Boyer.  - Bravo !

M. Stéphane Ravier.  - Il ne s'agit pas de renvoyer des êtres humains au rang d'animaux : ni les étrangers, ni les Français. C'est une image. Je suis navré si j'ai froissé quelqu'un.

Mais quand même, recevoir une leçon de démocratie de la part d'un représentant du parti communiste, c'est un comble ! (Vives protestations à gauche) Cette idéologie a provoqué la mort de 100 millions de personnes et a privé de libertés fondamentales des millions d'individus. Monsieur Gay, vous devriez vous faire plus modeste ! (M. Fabien Gay s'exclame.)

Quand on se réclame du communisme, parler de démocratie et de libertés, c'est une honte ! Après le Nuremberg du nazisme, il faudra qu'il y ait un jour un Nuremberg du communisme ! (Exclamations exaspérées sur les travées du groupe CRCE-K) Quelque 100 millions de morts et vous osez nous faire la leçon : honte à vous ! (Les protestations redoublent.)

Mme la présidente.  - Je souhaite que nos débats conservent leur sérénité, marque de fabrique du Sénat. À cette fin, je n'hésiterai pas à faire usage des prérogatives de la présidence de séance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je souhaite que nos débats soient respectueux des personnes ; ce n'est pas le cas. Je demande une suspension de séance.

La séance est suspendue quelques instants.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Je salue l'initiative du ministre d'avoir demandé une suspension de séance, car cette dernière prenait une tournure inacceptable. Nous nous associons totalement aux propos de Fabien Gay.

Nous voterons contre ces amendements.

Monsieur le rapporteur, je m'étonne de votre avis de sagesse. Si vous avez un doute sérieux sur la constitutionnalité d'un amendement, votre avis doit être défavorable. Que Mme Jourda banalise les propos de M. Ravier pose problème.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je les remets à leur juste place.

M. Bruno Retailleau.  - Je n'étais pas présent au début de l'incident de séance, mais Mme Jourda a remis les choses au point avec justesse.

Sous la Ve République, avec les articles 40, 41 et 45 de la Constitution, les pouvoirs du Parlement sont amoindris. Si nous nous autocensurons par crainte du Conseil constitutionnel, nous ne sommes plus législateurs !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Dites-le à Gérard Larcher !

M. Bruno Retailleau.  - Dans son texte de réforme des retraites, le Gouvernement avait bien présenté deux articles potentiellement inconstitutionnels...

Allons jusqu'au bout de nos convictions ! Parfois, le Conseil constitutionnel nous réserve de bonnes surprises.

L'amendement n°524 rectifié bis n'est pas adopté.

À la demande du GEST, l'amendement n°344 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°25 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 133
Contre 210

L'amendement n°344 n'est pas adopté.

L'amendement n°66 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos69 rectifié et 70 rectifié.

L'article 2 bis est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°345 rectifié, présenté par M. E. Blanc, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mme Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 21-2 du code civil est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq » ;

2° À la première phrase du deuxième alinéa, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « huit ».

Mme Frédérique Puissat.  - Défendu.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°345 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°62 rectifié quinquies, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet et Tabarot, Mme Lopez, MM. Saury, Szpiner, Sido et Klinger et Mmes Josende et Goy-Chavent.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 21-11 du code civil, il est inséré un article 21-11-... ainsi rédigé :

« Art. 21-11-.... - L'étranger perd le droit qui lui est reconnu à l'article 21-7 s'il n'est manifestement pas assimilé à la communauté française. » 

Mme Valérie Boyer.  - Il s'agit pour l'autorité publique de s'opposer à l'acquisition de la nationalité française par le droit du sol si elle peut prouver que l'étranger ne s'est manifestement pas assimilé à la communauté française - l'assimilation restant présumée.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Cet amendement reprend une condition qui existe déjà pour l'acquisition de la nationalité par naturalisation. Il pourrait toutefois être précisé dans sa rédaction. Sagesse.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°62 rectifié quinquies est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°628, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code civil est ainsi modifié :

1° À l'article 2493, les mots : « de trois mois » sont remplacés par les mots : « d'un an » ;

2° Sont ajoutés deux livres ainsi rédigés :

« Livre VI

« Dispositions applicables en Guyane

« Art. 2535.  -  Le présent code est applicable en Guyane dans les conditions définies au présent livre.

« Art. 2536.  -  Pour un enfant né en Guyane, les deux premiers alinéas de l'article 21-7 ne sont applicables que si, à la date de sa naissance, l'un de ses parents au moins résidait en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de neuf mois.

« Art. 2537.  -  L'article 2536 est applicable dans les conditions prévues à l'article 17-2.

« Toutefois, les articles 21-7 et 21-11 sont applicables à l'enfant né en Guyane de parents étrangers avant l'entrée en vigueur de la loi n°  du  pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, si l'un des parents justifie avoir résidé en France de manière régulière pendant la période de cinq ans mentionnée aux mêmes articles 21-7 et 21-11 du présent code.

 » Livre VII

« Dispositions applicables à Saint-Martin

« Art. 2544.  -  Le présent code est applicable à Saint-Martin dans les conditions définies au présent livre.

« Art. 2545.  -  Pour un enfant né à Saint-Martin, les deux premiers alinéas de l'article 21-7 ne sont applicables que si, à la date de sa naissance, l'un de ses parents au moins résidait en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de trois mois.

« Art. 2546.  -  L'article 2545 est applicable dans les conditions prévues à l'article 17-2.

« Toutefois, les articles 21-7 et 21-11 sont applicables à l'enfant né à Saint-Martin de parents étrangers avant l'entrée en vigueur de la loi n°  du  pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, si l'un des parents justifie avoir résidé en France de manière régulière pendant la période de cinq ans mentionnée aux mêmes articles 21-7 et 21-11 du présent code. »

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Mayotte, la Guyane et Saint-Martin rencontrent des difficultés particulières que le ministre de l'intérieur a exposées. Nous avons tous en mémoire l'amendement de Thani Mohamed Soilihi, sénateur de Mayotte, imposant une présence des parents des demandeurs sur le sol français depuis plus de trois mois pour l'application du droit du sol, exception validée par le Conseil d'État.

Au regard de la situation particulière de ce territoire, mais aussi de la Guyane, par sa frontière avec le Suriname et le Brésil, et de Saint-Martin, par sa proximité avec Haïti, nous proposons d'étendre le délai à an pour Mayotte et de créer un délai de neuf mois pour la Guyane et trois mois pour Saint-Martin.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je peux m'entendre avec les sénateurs mahorais et avec la commission sur des aménagements concernant l'acquisition de la nationalité à Mayotte, au vu de la situation particulière de ce territoire ; mais comme j'émettrai un avis de sagesse sur les amendements du sénateur Mohamed Soilihi demandant des rapports, je serai défavorable à celui-ci.

Le même problème se pose à Saint-Martin et en Guyane, c'est vrai ; à la Martinique également, à cause de la proximité de Sainte-Lucie. Nous y répondrons à l'Assemblée nationale ou en CMP. Mais nous parlons ici de simples régularisations, non du code de la nationalité. Ce serait mentir à nos concitoyens mahorais de laisser croire que le problème peut être réglé dans la loi ordinaire.

L'amendement n°628 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°73 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mmes Lopez et Lassarade, MM. Saury et Sido, Mme Romagny, M. Klinger et Mmes Josende, Goy-Chavent, Devésa et Aeschlimann.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 21-11 du code civil, il est inséré un article 21-11-... ainsi rédigé :

« Art 21-11-....  -  I.  -  Pour un enfant né en Guyane, le premier alinéa de l'article 21-7 et l'article 21-11 ne sont applicables que si, à la date de sa naissance, les deux parents au résidaient en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans.

« Toutefois, les articles 21-7 et 21-11 sont applicables à l'enfant né en Guyane de parents étrangers avant l'entrée en vigueur de la loi n° ... du ... pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, si les deux parents justifient avoir résidé en France de manière régulière pendant la période de cinq ans mentionnée aux mêmes articles 21-7 et 21-11.

« II.  -  À la demande des parents et sur présentation de justificatifs, la mention qu'au jour de la naissance de l'enfant, il réside en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de deux ans est portée sur l'acte de naissance de l'enfant selon des conditions et modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Lorsque l'officier de l'état civil refuse d'apposer la mention, le parent peut saisir le procureur de la République, qui décide, s'il y a lieu, d'ordonner cette mesure de publicité en marge de l'acte, selon des modalités prévues par décret en Conseil d'État. »

Mme Valérie Boyer.  - Cette situation n'est pas réservée à Mayotte ou à la Guyane ; on l'observe aussi, à une moindre échelle, dans de nombreux territoires métropolitains. Et la tendance s'aggrave, du fait de l'arrivée inédite de très jeunes femmes qui viennent acquérir ce totem d'immunité : accoucher en France. Il faut prendre le problème à bras-le-corps. Or ce texte ne comporte aucun élément sur la naturalisation ou sur les mineurs non accompagnés - qui ne sont souvent ni l'un ni l'autre.

À Mayotte, il y a plus de naissances étrangères que françaises ! La situation est hors de contrôle, tous les parlementaires mahorais le signalent.

Les amendements nos73 rectifié bis, 74 rectifié bis, 71 rectifié bis et 72 rectifié bis sont retirés.

Mme la présidente.  - Amendement n°481 rectifié bis, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dressant un premier bilan de la mise en oeuvre des dispositions relatives aux conditions d'acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France des enfants nés à Mayotte de parents étrangers.

M. Olivier Bitz.  - La loi du 10 septembre 2018 a instauré des conditions dérogatoires à Mayotte. Ce dispositif produit ses effets. Avant de durcir ces mesures, il serait bon de les évaluer précisément.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - C'est une demande de rapport : retrait ou avis défavorable.

Le ministre a émis le souhait d'avoir ce débat à l'Assemblée nationale. La commission a essayé d'adapter le texte à la situation migratoire, en tenant compte, pour Mayotte, du rapport d'information de Mme Estelle Youssouffa.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°481 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°480 rectifié bis, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la campagne d'information menée à destination des candidats à l'émigration vers Mayotte à propos des nouvelles règles d'acquisition de la nationalité sur ce territoire, et de prévention à l'égard des Français, et des étrangers en situation régulière, sur les conséquences juridiques et financières encourues en cas de reconnaissances frauduleuses de paternité.

M. Bernard Buis.  - Dans son avis du 5 juin 2018 sur la proposition de loi de Thani Mohamed Soilihi, le Conseil d'État avait relevé l'intérêt d'une campagne d'information à Mayotte et dans les pays d'origine sur les changements de règles. Celle-ci n'a jamais eu lieu.

Cet amendement vise à faire connaître aux candidats à l'immigration clandestine les nouvelles règles d'acquisition de la nationalité sur ce territoire et les peines prévues en cas de reconnaissance frauduleuse de paternité - cinq ans d'emprisonnement et, désormais, 75 000 euros d'amende - sans parler des obligations en matière civile.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°480 rectifié bis n'est pas adopté.

ARTICLE 2 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux, Mme Girardin, M. Grosvalet, Mme Pantel et M. Masset.

Supprimer cet article.

M. Henri Cabanel.  - Cet article prive du droit du sol un enfant né en France de parents étrangers s'il a été condamné d'une peine d'au moins six mois. Or une telle condamnation traduit d'abord une défaillance de notre système éducatif. Il est déraisonnable de conditionner l'avenir d'un enfant à la nationalité de ses parents.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°237, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Jérôme Durain.  - Cette mesure est disproportionnée, car elle obture l'avenir d'un jeune pour des faits de faible gravité (M. Francis Szpiner s'étonne), au seul prétexte que ses parents sont étrangers.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°285 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - Un article du code civil empêche l'acquisition de la nationalité en cas de condamnation, mais ne s'applique pas au droit du sol des enfants nés en France de parents étrangers. L'article 2 ter revient sur cette exception. Un jeune condamné pour agression sonore, par exemple (MM. Olivier Rietmann et Francis Szpiner protestent) - c'est passible de six mois de prison - ne pourrait plus, de sa vie entière, acquérir la nationalité française ! Nous devons bien nous fonder sur la loi pour écrire la loi ! (Mme Marie-Pierre de La Gontrie le confirme.) Ayez bien conscience de ce que vous votez aujourd'hui ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Avis défavorable à tous ces amendements : la commission a en effet été convaincue par Mme Boyer qui a proposé cet article additionnel.

Le texte ne concerne pas la peine encourue, mais la peine prononcée. Tous les praticiens du droit savent qu'on ne prononce pas une peine ferme de six mois à l'égard d'un mineur pour des faits de faible gravité. (Protestations sur les travées du GEST)

Le texte de la commission ne prive pas à vie l'intéressé de la possibilité de demander la naturalisation ; simplement, il ne bénéficie plus du droit du sol.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous parlons d'un enfant né en France. S'il n'a pas la nationalité française, que devient-il ? La belle affaire, direz-vous, il aura celle de ses parents. C'est exact juridiquement, mais il aura vécu toute sa vie en France. Vous le condamnez donc à avoir la nationalité d'un pays qu'il ne connaît pas.

M. Guy Benarroche.  - Je connais bien la différence entre peine encourue et peine prononcée, mais une peine encourue peut être prononcée. (Mme Marie-Pierre de LGontrie le confirme.) Selon votre texte, une condamnation à une peine de six mois empêcherait l'application du droit du sol. (Mme Audrey Linkenheld renchérit.) Que ferions-nous de ces enfants qui sont nés et ont été éduqués en France ? Votre but est en réalité de compliquer encore davantage l'accès à la nationalité, assumez-le !

M. Francis Szpiner.  - Certains vivent dans les codes, d'autres dans la vie réelle. Tout magistrat vous le confirmera : si un mineur de 16 ans est condamné à six mois ferme, c'est qu'il s'agit de sa cinquième ou sixième comparution !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ça dépend !

M. Francis Szpiner.  - Il aura eu droit auparavant à un rappel à la loi, à une remise aux parents - dont je m'étonne, soit dit en passant, qu'elle soit considérée comme une sanction, à un avertissement... Six mois ferme, c'est une peine considérable. Évoquer les nuisances sonores, c'est une plaisanterie ! (Protestations sur les travées du GEST)

Les magistrats seront conscients des conséquences que cette peine aurait si le texte de la commission était adopté. Faites-leur confiance pour ne pas la prononcer à la légère.

Je m'étonne enfin d'entendre certains parler « d'enfants » de 16 ans, alors qu'ils veulent fixer la majorité à cet âge... (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)

Les amendements identiques nos21 rectifié bis, 237 et 285 rectifié ne sont pas adoptés.

L'article 2 ter est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°121, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code civil est ainsi modifié :

1° Les articles 19-1, 19-3, 19-4 et 20-5 sont abrogés ;

2° Au deuxième alinéa de l'article 20, les références : « 19-1 », « 19-3 » et « 19-4 » sont supprimées.

II.  -  Les articles 23 et 25 de la loi n° 73-42 du 9 janvier 1973 complétant et modifiant le code de la nationalité française et relative à certaines dispositions concernant la nationalité française sont abrogés.

M. Christopher Szczurek.  - Cet amendement supprime tous les articles de notre droit positif qui consacrent le droit du sol.

La nationalité est un pilier fondamental de notre nation. Être français s'hérite ou se mérite. Le droit du sol automatique revient à accorder la nationalité française à tous les étrangers nés en France, quels que soient leurs antécédents familiaux. La réforme constitutionnelle proposée pendant la campagne présidentielle par Marine Le Pen visait à rendre plus stricts les critères de l'acquisition de cette nationalité. Supprimer dès aujourd'hui les dispositions qui les concernent serait un signal fort. (Marques d'ironie à gauche) La nationalité doit rester un privilège réservé à ceux qui partagent nos valeurs.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Tout peut être discuté, mais il me semble difficile de supprimer le droit du sol au détour d'un amendement.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°121 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°573 rectifié, présenté par Mme de Marco, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 21-14-1 du code civil, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. 21-14-....  -  La nationalité française est conférée par décret, sur proposition d'un député ou d'un sénateur, à tout étranger s'étant illustré par son courage ou son mérite, au service de la société française.

« En cas de décès de l'intéressé, dans les conditions prévues au premier alinéa, la même procédure est ouverte à ses enfants mineurs qui, au jour du décès, remplissaient la condition de résidence prévue à l'article 22-1. »

M. Guy Benarroche.  - C'est un amendement d'appel de Monique de Marco. En 1999, le législateur a introduit une nouvelle disposition dans le code civil permettant au ministre des armées d'accorder la nationalité française à des personnes étrangères blessées pour la France au cours d'un engagement opérationnel. Or de nombreux étrangers oeuvrent quotidiennement au service de la France, sous les drapeaux, mais aussi dans le civil.

La naturalisation relève du fait du prince si elle est confiée au seul Gouvernement. Les parlementaires, interlocuteurs privilégiés des élus, sont les témoins de la bonne intégration de nombreux étrangers qui représentent une certaine idée de la France. Cet amendement propose d'étendre aux parlementaires ce droit de naturalisation exceptionnel.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - On peut déjà accorder la naturalisation pour service rendu à la nation. Un parlementaire peut proposer un nom pour cette procédure, de même qu'il propose un nom pour une décoration, sans décider lui-même de son attribution. Avis défavorable à défaut d'un retrait.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°573 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°346 rectifié bis, présenté par Mme V. Boyer, M. Le Rudulier, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Bacci, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, M. Milon, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Perrin, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon, Szpiner et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 21-17 du code civil, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « dix ».

Mme Valérie Boyer.  - Cet amendement porte de cinq à dix ans le temps de résidence nécessaire pour obtenir une naturalisation, soit la durée de validité d'une carte de résident. Ce temps est de dix ans en Autriche, en Espagne, en Lituanie, en Pologne, en Slovénie et en Italie, de neuf ans au Danemark, de huit ans en Croatie, Estonie, Hongrie, Roumanie, Slovaquie et Allemagne, de sept ans à Chypre et en Grèce. Dans ce domaine comme dans d'autres, comme le regroupement familial, l'asile ou les mineurs isolés, la France est la plus généreuse - d'aucuns diraient la plus faible.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°521 rectifié ter, présenté par M. Ravier.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 21-17 du code civil, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « dix ».

M. Stéphane Ravier.  - En 2022, 59 900 étrangers ont été naturalisés. L'Insee estime en 2021 à quatre millions le nombre d'immigrés légaux présents en France, qui pourront donc d'ici cinq ans demander leur naturalisation.

Or la nationalité française se mérite ! Ce n'est pas un titre de séjour à durée indéterminée, ni une fiction juridique. C'est un enracinement de l'âme, une communauté de destin. Nous pouvons assimiler des individus, non des masses ; dans le temps long, non dans la précipitation. Imaginez : une personne arrivée au début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron pourrait être naturalisée ! C'est court - même si cinq ans avec Macron, c'est long... (Rires à droite)

Mettons un terme à la déconstruction juridique des mots et des choses. Il y a une identité française, n'en déplaise au wokes ! Les standards européens sont beaucoup plus stricts que les nôtres. Face à la décivilisation et la désassimilation, notre responsabilité est historique !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La commission des lois a été convaincue par l'argument de Mme Boyer : dix ans permettent de passer de l'intégration à l'assimilation. Avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Corinne Narassiguin.  - Je m'étonne de cet avis favorable de la commission sur des amendements qui émanent tant des Républicains que de Reconquête, à l'extrême-droite. Signe de la dérive de notre assemblée sur ce texte qui rendra la France de moins en moins accueillante.

M. Guy Benarroche.  - Comme hier, des amendements identiques sont déposés par Les Républicains et par Reconquête - même si seule Mme Boyer est citée. Les Républicains seraient-ils à la reconquête d'une absence de générosité ? (Sourires à gauche)

Avec tous les appels d'air que vous dénoncez, la France devrait être le pays qui accueille le plus d'immigrés ! En réalité, c'est une fable : salaire, conditions d'accueil, rien n'incite les gens à venir chez nous plutôt qu'ailleurs. Toutes les données scientifiques le prouvent.

Il faudrait dix ans de présence pour demander sa naturalisation ? Pourquoi pas vingt-cinq, ou même toute une vie ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Nos collègues s'affolent que des amendements identiques soient présentés par M. Ravier et des sénateurs Les Républicains. Mais la pensée politique ne doit pas s'articuler par rapport aux positions d'une autre personne !

Je remarque pourtant que le groupe SER a retiré avant la séance un amendement identique à un autre de M. Ravier...

M. Max Brisson.  - Oh !

Mmes Marie-Pierre de La Gontrie et Corinne Narassiguin.  - C'était une demande de rapport !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Non. Modifier sa position en fonction de celles d'autres personnes est regrettable. (Protestations à gauche ; applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Stéphane Ravier applaudit également.)

Les amendements identiques nos346 rectifié bis et 521 rectifié ter sont adoptés et deviennent un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°122, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code civil est ainsi modifié :

1° L'article 21-27-1 est ainsi rédigé :

« Art. 21-27-1. - Lors de son acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique, l'intéressé perd sa ou ses autres nationalités.

« Le premier alinéa ne s'applique pas aux pays avec lesquels la France a signé des accords bilatéraux autorisant de posséder plusieurs nationalités. » ;

2° L'article 23 est ainsi rédigé :

« Art. 23.  -  Toute personne majeure de nationalité française, résidant habituellement à l'étranger, qui acquiert volontairement une nationalité étrangère perd automatiquement la nationalité française à compter de la date d'acquisition de la nouvelle nationalité.

« Le premier alinéa ne s'applique pas aux pays avec lesquels la France a signé des accords bilatéraux autorisant de posséder plusieurs nationalités.

« Dans le cas visé au deuxième alinéa du présent article, l'intéressé est libre de choisir entre garder ou perdre sa nationalité française. »

M. Joshua Hochart.  - Notre amendement supprime la binationalité et la multinationalité, qui soulèvent des questions de loyauté. Ce sujet complexe exige une réponse pragmatique.

Nous défendons depuis toujours l'assimilation. Épouser la nationalité française est un acte d'amour. Lorsqu'on demande la naturalisation, il est anormal qu'on conserve la nationalité du pays que l'on a voulu quitter.

Mais nous sommes pragmatiques : nous instaurons la possibilité de dérogation par le biais d'accords bilatéraux avec des pays entretenant des liens forts avec la France.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - C'est un amendement d'appel : impossible d'adopter ce genre de mesures au détour d'un amendement. Retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°122 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°527 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 25 du code civil est ainsi rédigé :

« L'individu qui possède la nationalité française peut, par décret pris après avis en Conseil d'État, être déchu de la nationalité française, sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride : ».

M. Stéphane Ravier.  - Un exemple pour justifier cet amendement : si Karim Benzema, qui aurait la double nationalité franco-algérienne, a, effectivement des liens avec les Frères musulmans, je demande la déchéance de sa nationalité française. (M. Akli Mellouli s'exclame.) Selon Florence Bergeaud-Blackler, anthropologue au CNRS, cette organisation cherche à mettre tous les musulmans au service de l'établissement d'une société islamique mondiale. Si des binationaux affichent clairement leur allégeance à une autre nation, nous devons les déchoir de la nationalité française.

Rendons à César, et à notre excellente collègue Valérie Boyer (exclamations à gauche), ce qui lui appartient : faisons en sorte que les Français de papier soient déchus.

Mme la présidente.  - Amendement n°525 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article 25 du code civil, les mots : « peut, par décret pris après avis conforme du Conseil d'État, être déchu de la nationalité française » sont remplacés par les mots : « est déchu de la nationalité française par décret pris après avis conforme du Conseil d'État ».

M. Stéphane Ravier.  - Être français s'hérite ou se mérite. À Marseille, 55 % des crimes et délits sont commis par des étrangers, 50 % à l'échelle de la France ; 25 % des détenus sont étrangers - sans compter les binationaux.

La déchéance de nationalité, proposée par François Hollande contre les terroristes, validée par la Cour européenne des droits de l'homme et à laquelle Robert Badinter (exclamations à gauche), si apprécié ici, était favorable, doit être étendue aux criminels - à ces narcoterroristes qui terrorisent les honnêtes gens et tuent des innocents.

Personne ici ne voudrait faire partie de la même communauté que ces criminels. Or la nation est une famille. Nous ne pouvons garder des pièces rapportées qui déchirent le contrat social. (Mme Cécile Cukierman proteste.)

Qui a inventé la déchéance de nationalité ? Raymond Poincaré, dont le ministre de l'intérieur était Albert Sarraut, un radical-socialiste, en 1927. Qui a pensé l'infliger aux criminels ? Édouard Daladier en 1938, avec le même ministre de l'intérieur. Vive le parti radical-socialiste, dont je dois être un des derniers représentants au Sénat ! (Protestations à gauche)

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Nous ne pouvons pas modifier si lourdement le code de la nationalité au détour d'un amendement.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°527 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°525 rectifié bis.

Mme la présidente.  - Amendement n°355 rectifié, présenté par Mmes Ciuntu et Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci, Bas et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc, Bonhomme, Bonnus et Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mme de Cidrac, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau, Frassa et Genet, Mme Gosselin, MM. Gremillet, Grosperrin, Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Perrin, Mmes Pluchet et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

A l'article 958 du code général des impôts, remplacer le montant :

55

par le montant :

250

Mme Marie-Carole Ciuntu.  - Cet amendement relève le niveau du droit de timbre pour une demande de naturalisation de 55 à 250 euros, plus conforme aux standards européens.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Il est exact que le montant du droit de timbre n'a pas évolué depuis 2011. Sagesse. (Marques d'ironie à gauche)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°355 rectifié est adopté et devient un article additionnel

M. François-Noël Buffet, président de la commission.  - Je demande une suspension de quinze minutes pour permettre à la commission d'étudier les sous-amendements déposés ce matin sur l'amendement n°656.

La séance, suspendue à 18 h 20, reprend à 18 h 35.

AVANT L'ARTICLE 3

Mme la présidente.  - Amendement n°528 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

Avant l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre I du livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'intitulé est ainsi rédigé :

« Assimilation à la République française » ;

2° Toutes les occurrences du mot : « intégration » sont remplacées par le mot : « assimilation ».

M. Stéphane Ravier.  - Je vous parle d'une République disparue, exigeante avec elle-même et ceux qui la composent : la IIIe République avait des défauts, mais elle n'a jamais failli sur la nation. Pour Renan, celle-ci est une âme, un principe spirituel ; à la fois une communauté de souvenirs et une volonté de faire vivre l'héritage reçu.

L'intégration, c'est simplement vivre ensemble - une sorte de colocation. L'assimilation, c'est être lié à jamais à une même famille, car le devoir moral de tout individu est de prendre soin de sa famille avant tout. L'assimilation n'est pas l'oubli de soi, mais la fusion avec un corps politique qui vous aime et vous soutient, si vous remplissez vos devoirs envers lui. Être français n'est pas qu'un droit ; c'est aussi une somme de devoirs pour en être digne. En remplaçant le mot « intégration » par « assimilation », faisons briller davantage ce beau mot : « Français » !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je me réjouis que vos métaphores soient désormais plus entendables par cet hémicycle... (M. Stéphane Ravier sourit.) L'intégration est suffisante ; c'est la notion que retient le Ceseda. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°528 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°123 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Avant l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 225-1 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il n'y a pas de discrimination en cas de distinction entre les personnes fondée sur la possession de la nationalité française dans les cas de mise en oeuvre du principe de priorité nationale, ou de celle d'un État membre de l'Union européenne pour l'application du droit de l'Union. »

M. Christopher Szczurek.  - Nous voulons exclure du champ des discriminations l'application du principe de priorité nationale. Cette notion a été plébiscitée par treize millions de Français à l'élection présidentielle. La priorité nationale, qui n'est pas une exclusivité, est la conséquence naturelle de la nationalité. Elle n'a rien de discriminatoire, et 95 % des pays l'appliquent. Elle fut défendue notamment par Roger Salengro ! (Exclamations à gauche)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°529 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

M. Stéphane Ravier.  - Adolphe Landry, ce nom ne vous dit sans doute rien. C'est celui d'un brave ministre radical-socialiste qui, en 1931, défendit la priorité nationale. Heureusement que je suis là pour défendre le radical-socialisme ! (Murmures à gauche ; Mme Maryse Carrère lève les yeux au ciel.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Vous êtes plus radical que socialiste...

M. Stéphane Ravier.  - Dans la fonction publique, on applique une exclusivité nationale ; nous célébrons volontiers notre exception culturelle. La priorité est la règle aux États-Unis ou encore dans le Brésil de M. Lula. Certes, elle ne résoudra pas tous les problèmes, mais n'aiderait-elle qu'un petit nombre de Français à retrouver un emploi, c'est-à-dire dignité et fierté, cela ferait ma joie !

La nation, c'est prendre soin d'abord des siens. Pour ma part, j'ai toujours préféré mes filles à mes cousines, mes cousines à mes voisines et mes voisines aux étrangères !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le principe de priorité nationale n'existe pas. La loi prévoit déjà des différences entre les nationaux et les autres, c'est suffisant. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. Philippe Grosvalet.  - Ainsi donc, M. Ravier se revendique du radical-socialisme... Radical, le mot est faible en ce qui le concerne. Quant à socialiste, peut-être avec un préfixe ?

M. Stéphane Ravier.  - Ayez le courage de préciser votre pensée !

M. Philippe Grosvalet.  - Dans mon département, nombre d'entreprises cherchent à recruter, parfois 500 ou 1 000 salariés. Nous manquons de main-d'oeuvre, pour Airbus ou pour la construction navale. Heureusement qu'il y a des travailleurs étrangers - 30 % sur les chantiers navals -, sinon ces productions dont nous sommes fiers se feraient ailleurs ! (Applaudissements sur des travées du GEST ; Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

Les amendements identiques nos123 rectifié et 529 rectifié bis ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°469, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Avant l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport six mois après la promulgation de la présente loi sur l'application de la circulaire du 28 novembre 2012 relative à la régularisation par le travail et ses limites pour répondre aux réalités socio-économiques des territoires

Mme Cécile Cukierman.  - Nous demandons un rapport sur l'application de la circulaire Valls, dont les limites sont notoires. De nombreux préfets ont reporté des rendez-vous de régularisation. Le renouvellement des titres de séjour est privilégié à la naturalisation. L'expérimentation d'un nouveau titre de séjour de plein droit ne peut être débattue que sur la base d'une telle évaluation.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable à cette demande de rapport.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°469 n'est pas adopté.

ARTICLE 3

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois .  - Nous voici donc parvenus au fameux article 3. (Exclamations sur diverses travées) Nous avons eu des divergences, notamment sur sa portée. Le groupe Les Républicains n'y était pas favorable, pour ne pas ouvrir la voie à une régularisation importante, pour ne pas dire massive. D'autres collègues, notamment centristes, avaient une approche différente.

Les choses ont évolué. Un amendement portant article additionnel après l'article 4 a été déposé, qui rend possible la régularisation d'étrangers par la procédure d'admission exceptionnelle au séjour, avec des conditions supplémentaires de durée de présence sur le territoire, de respect des valeurs de la République au sens large et de vérification de la réalité de l'activité auprès de l'employeur.

La conséquence de cette initiative est évidemment la suppression de l'article 3, que nous voterons, de même que celle de l'article 4. J'insiste : la suppression de ces articles et l'amendement n°657 portant article additionnel après l'article 4 constituent un ensemble.

M. Patrick Kanner.  - Rappel au Règlement, sur la base de l'article 33, alinéa 2 ! Nous demandons une suspension de séance pour permettre à M. Dussopt de venir siéger au banc du Gouvernement. (Marques d'agacement à droite)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Absolument !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je suis là !

M. Patrick Kanner.  - Voilà quelques mois, MM. Darmanin et Dussopt nous vantaient l'équilibre entre les deux piliers du texte : maîtrise des flux migratoires et intégration par le travail. Mais le ministre du travail a disparu : que le ministre de l'intérieur lance un avis de recherche ! (Sourires) M. Dussopt n'étant pas, lui, devant une instance juridictionnelle, nous exigeons qu'il vienne défendre les articles 3 et 4, dont il est l'initiateur. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Mme la présidente.  - Il revient à la présidence d'apprécier. Je ne donnerai pas suite à votre demande, compte tenu du nombre de prises de paroles prévues. (On s'en félicite à droite.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je regrette de ne pas vous suffire !

M. Patrick Kanner.  - « Un seul être vous manque... »

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Je remercie le président Buffet pour ses explications.

Actuellement, on ne peut régulariser une personne qui travaille si son employeur ne le veut pas. Les régularisations sur le fondement de la circulaire Valls concernent le volet famille plus que le travail. Malgré une volonté politique ou préfectorale, il n'est pas possible de régulariser ces personnes.

Le Gouvernement voulait mettre fin à ce servage des temps modernes, l'employeur pouvant s'opposer à la régularisation, en général pour qu'on ne découvre pas qu'il emploie une personne, et peut-être plusieurs, en situation irrégulière. L'article 3 faisait sauter ce verrou.

Je regrette que la commission des lois ait supprimé la sanction administrative très forte prévue par le Gouvernement pour les entreprises embauchant de nombreux travailleurs irréguliers.

D'autre part, l'article 3 vise à régulariser des personnes qui ne sont ni expulsables ni régularisables, dans certaines conditions - métiers en tension, zones géographiques tendues, présence minimale de trois ans sur le territoire. Elles bénéficieraient d'un titre de séjour d'un an, n'ouvrant pas droit au regroupement familial. Cette mesure s'appliquerait jusqu'en 2026, en sorte qu'il n'y aurait pas d'appel d'air - même si j'ai eu du mal à le démontrer dans le débat public, la caricature étant plus facile.

Nous entendons le compromis trouvé par la majorité sénatoriale ; il est acceptable par le Gouvernement.

M. Bruno Retailleau.  - Tant mieux !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le dispositif devra être retravaillé. Je note d'ailleurs que M. Retailleau régularise davantage de personnes que le Gouvernement n'entendait le faire.

M. Bruno Retailleau.  - C'est faux !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je suis sûr qu'il votera le sous-amendement du Gouvernement à l'amendement n°657...

Le Gouvernement donnera un avis de sagesse à cet amendement n°657. Il continue de tenir à l'article 3, tout en comprenant qu'un compromis politique doit être trouvé. C'est la position de tout le Gouvernement, dont Olivier Dussopt, qui s'est exprimé cet après-midi.

Je remercie tous les groupes qui ont participé aux discussions, singulièrement M. Marseille, qui a défendu des propositions intéressantes, reprises du reste dans l'amendement visant à instaurer un article 4 bis.

Ce n'est pas le coeur du projet de loi : l'article 3 du Gouvernement concerne 7 000 personnes par an jusqu'en 2026, principalement des femmes. Il permettrait de mettre un terme à un écosystème d'embauches irrégulières. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

M. Pierre Jean Rochette.  - Bravo !

Mme Audrey Linkenheld .  - Il n'est pas simple de s'exprimer sur cet article, tant la situation a évolué. Les articles 3 et 4 ont été réservés, puis dé-réservés ; il est maintenant question de leur substituer un article 4 bis...

L'article 3 contient une avancée : des travailleurs sans-papiers vivant en France depuis plus de trois ans et exerçant des métiers dont nous avons tous besoin - auxiliaires de vie, gardiens, agents de nettoyage, cuisiniers, plongeurs... - auraient droit à une carte de séjour temporaire de plein droit. Nous continuerons à défendre cette mesure et à proposer de l'élargir. (M. Patrick Kanner applaudit.)

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Depuis des semaines, des travailleurs sans-papiers sont en grève dans une trentaine de sites d'Île-de-France, demandant ce que la justice et la raison devraient commander : la régularisation. La plupart exercent des métiers difficiles et dangereux.

Ils procèdent d'une immigration choisie, formalisée notamment par la circulaire Valls de 2012. Mais c'est encore trop pour vous : il faut durcir et durcir encore... Cette politique d'immigration jetable, à l'oeuvre depuis quinze ans, et que vous voulez rendre encore plus sévère, est inadaptée et humainement coûteuse.

Émeline Zougbédé, sociologue au CNRS, a montré que la liste officielle des métiers en tension ne correspond pas à ceux qui sont exercés par les travailleurs sans-papiers. La position raisonnable et humaniste, celle que défendent les écologistes, c'est la régularisation de plein droit de tous les travailleurs sans-papiers ! (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Yan Chantrel applaudit également.)

M. Patrick Kanner .  - Nous ne laisserons pas dénaturer l'article 3 ni l'article 4. Régulariser une personne qui vit et travaille en France, c'est reconnaître sa participation à notre société. J'ai rencontré lors de ma campagne électorale nombre de patrons du Nord qui réclament un encadrement juridique pour celles et ceux qui enrichissent ainsi notre pays. Nul pathos ici, je parle de réalité économique !

Mme Isabelle Florennes .  - Nous n'avons jamais été des fétichistes de l'article 3. Notre démarche est pragmatique, guidée par la recherche d'un compromis satisfaisant, où qu'il figure dans le texte.

Nous ne comprenons pas l'effervescence suscitée par la disposition relative aux métiers en tension. Notre ligne sur le sujet n'a pas varié : la solution la plus efficace est de conserver le pouvoir d'appréciation des préfets, pour une gestion au cas par cas. C'est ce que prévoit notre amendement déposé à l'article 3.

L'article 3 pose un problème symbolique ? Aucun problème, mettons cette disposition ailleurs ! La commission des lois propose un article additionnel après l'article 4. Cela nous convient parfaitement. Nous sommes attachés au fond, pas à la forme. L'essentiel est que le dispositif modifie le régime applicable en matière d'autorisation de travail.

Un salarié sans-papiers qui souhaite régulariser sa situation doit obtenir l'accord de son employeur à travers un formulaire Cerfa. Nous souhaitons la suppression de l'accord préalable de l'employeur pour les demandes de régularisation. Il n'y a là ni appel d'air ni déni de réalité ! (Applaudissements sur des travées du groupe UC)

M. Ian Brossat .  - L'article 3 n'était pas la panacée, mais nous avions de nombreuses propositions à faire pour en étendre l'application. Nous regrettons le sort que lui réserve la majorité sénatoriale.

Au moins permettait-il de commencer à sortir de l'hypocrisie. De nombreux travailleurs sans papier exercent des métiers difficiles dans des conditions rudes - femmes de ménage, éboueurs, employés des travaux publics. Ils se lèvent tôt, se couchent tard et bossent dur. Qu'il leur faille solliciter l'autorisation de l'employeur, qui avait souvent sciemment fait le choix de recruter un travailleur sans-papiers, a quelque chose d'absurde.

Je regrette que la majorité sénatoriale ait choisi de sacrifier cette disposition qui permettait d'avancer. Une satisfaction, néanmoins : les enquêtes d'opinion prouvent que les Français, pourtant durs sur les questions d'immigration, sont favorables à la régularisation des travailleurs sans-papiers. (On le conteste à droite ; applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Stéphane Ravier.  - Place du Colonel Fabien, peut-être...

M. Yannick Jadot .  - Nous arrivons à un point clé du débat. Monsieur le ministre, vous aviez dit vouloir être gentil avec les gentils et méchant avec les méchants... À l'arrivée, ce texte sera méchant avec les gentils !

Il ne repose que sur des mensonges et des contre-vérités. (Marques d'indignation à droite)

M. Philippe Bas. - Heureusement, vous êtes là !

M. Yannick Jadot. - Le mot-clé, c'est l'appel d'air : mais pas une étude, pas un expert, pas un chef d'entreprise, pas un syndicaliste ne confirme cette hypothèse ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Stéphane Ravier, Christopher Szczurek et Joshua Hochart protestent également.) Il faudrait limiter les mariages mixtes, le regroupement familial, réduire le nombre d'étudiants étrangers... Ce débat nous mène dans un monde parallèle !

M. Laurent Somon.  - Inutile de hausser la voix !

M. Philippe Mouiller.  - Nous sommes au Sénat, ici !

M. Yannick Jadot.  - Les Françaises et les Français attendent des réponses sur le fond, mais vous présentez un texte du désordre et du mensonge. Laisser dans l'illégalité des dizaines de milliers de personnes qui construisent la France est scandaleux ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur des travées du groupe SER ; M. Ian Brossat applaudit également.)

M. Stéphane Ravier.  - Ce sont elles qui se sont mises dans l'illégalité !

M. Guy Benarroche .  - Le titre Ier s'intitule « Assurer une meilleure intégration des étrangers par le travail ». Avec Guillaume Gontard, j'ai été reçu par vous, monsieur le ministre - avec, à l'époque, M. Dussopt... Vous nous avez expliqué vos intentions ; nous vous avons répondu que nous les comprenions et que nous chercherions à les compléter. Mais avec le texte de la commission des lois, nous sommes passés d'un projet de loi destiné à faciliter l'intégration par le travail à un simple consensus politicien. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Mélanie Vogel .  - L'article 3 servait les éléments de langage du Gouvernement : un texte équilibré, marchant sur deux jambes - celle des horreurs et celle des douceurs. Les horreurs, nous les voyons bien. Et voici qu'il est question d'amputer celle des douceurs, qui pourtant ne consistait qu'à donner un peu de dignité à un petit nombre de personnes, pour un peu de temps. (Murmures désapprobateurs à droite)

De la part de la majorité sénatoriale, cela ne surprendra personne. Mais le Gouvernement a dit qu'il donnerait un avis de sagesse sur la suppression de l'article 3, si j'ai bien compris... (M. le ministre le conteste avec énergie.) Vous préférez perdre l'honneur pour faire voter une loi !

M. Bruno Retailleau .  - (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains) Oui, nous sommes à un moment clé de la discussion du texte. Depuis le départ, nous nous opposons aux articles 3 et 4 ; nous sommes cohérents.

Je sais qu'il faut parfois du culot en politique, mais M. le ministre ne manque pas d'air.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Vous pouvez parler !

M. Bruno Retailleau.  - Si ce que nous proposons était l'équivalent de ce que vous proposiez, les groupes de gauche ne s'y opposeraient pas !

L'article 3 ouvrait un droit automatique à la régularisation. La fraude devenait créatrice d'un droit automatique, auquel l'administration n'aurait pu s'opposer. (M. Thomas Dossus le conteste.) Ce dispositif risquait d'entraîner des dizaines de milliers de régularisations. Le nôtre est tenable et ne crée pas de droit automatique.

Si un sous-amendement vise à le restreindre, je suis prêt à le voter, même s'il vient du Gouvernement !

M. Patrick Kanner.  - Bel aveu !

M. Thomas Dossus .  - Le Gouvernement capitule en rase campagne sur un article qui ne représentait déjà pas grand-chose.

Nous, écologistes, sommes attachés à la valeur du travail et à l'égalité des droits. (Exclamations à droite) La droite, elle, préfère les clandestins et le travail au noir.

M. Retailleau avait dit qu'il ne souhaitait pas un jeu de bonneteau, avec une réécriture de l'article 3 ailleurs dans le texte. Mais que vous apprêtez-vous à faire ?

M. Bruno Retailleau.  - Vous voterez donc l'amendement de la commission ?

M. Thomas Dossus.  - Certainement pas ! Vous allez réécrire le dispositif, mais en pire. Le texte qui sortira du Sénat sera un vrai cabinet des horreurs, un accord scellé entre Les Républicains et le RN ! (Protestations indignées à droite ; applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - J'ai fait partie d'un rassemblement de parlementaires de toutes tendances politiques, y compris de Renaissance, qui ont soutenu l'article 3 pour mettre un terme à l'hypocrisie. Nous connaissons tous des personnes en situation irrégulière qui travaillent dans la restauration, la grande distribution ou le BTP. Soit il faut qu'elles quittent le territoire, soit nous en avons besoin pour faire tourner l'économie. Dans ce cas, est-il judicieux de les maintenir dans l'illégalité, donc dans la précarité ?

La circulaire Valls a pour défaut majeur de requérir l'autorisation de l'employeur. Autre défaut, elle fait dépendre les décisions du libre arbitre des préfets : les préfectures ont un comportement très hétérogène. Toutefois, elle a l'avantage de concerner tous les secteurs professionnels. Le dispositif proposé concerne, lui, les seuls métiers en tension.

Mme Cécile Cukierman .  - Dans sa version originelle, l'article 3 mettait fin au rôle des employeurs prévu par la circulaire Valls, qui pose de nombreuses difficultés.

Nombreux sont ceux qui craignent un appel d'air. Mais ne nous trompons pas de débat : ces femmes et ces hommes sont déjà présents sur le territoire, ils travaillent dans nos industries et nos entreprises agricoles, construisent le Paris des jeux Olympiques et Paralympiques 2024.

J'espère que vous sanctionnerez avec la même vigilance les entreprises qui emploient des travailleurs sans-papiers ! (Mme Gisèle Jourda applaudit.)

M. Guillaume Gontard .  - Qu'est-ce qu'un travailleur ou une travailleuse sans papiers ?

M. Stéphane Ravier.  - Un hors-la-loi !

M. Guillaume Gontard.  - Une travailleuse ou un travailleur, tout simplement, qui contribue à la marche de notre pays. Certes, ces personnes n'ont pas de papiers, mais elles travaillent. Qu'arrive-t-il à la droite ? Hier, la valeur famille a été descendue en règle. Aujourd'hui, elle s'en prend à la valeur travail... (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Ronan Dantec .  - Notre société ne fonctionnerait pas sans les dizaines de milliers de travailleurs sans-papiers qui se trouvent sur notre sol - tout le monde le sait. (Murmures désapprobateurs à droite) Sans ces travailleurs, la France serait une puissance affaiblie. Que la droite veuille d'une France affaiblie nous étonne, mais vous êtes constants dans l'effort...

À propos des travailleurs sans papiers, M. Retailleau a parlé de fraude.

M. Mickaël Vallet.  - Ils travaillent plus que Pénélope !

M. Ronan Dantec.  - Mais le patron d'un petit restaurant qui en emploie deux ou trois ou le grand groupe industriel qui en emploie des centaines à travers ses filiales ne sont-ils pas des fraudeurs ?

Plusieurs voix sur les travées du groupe Les Républicains.  - Si !

M. Ronan Dantec.  - Et quid de l'État, qui touche leurs cotisations ?

Vous renforcez la France du non-droit, qui déstabilise la société. Notre responsabilité de parlementaires, c'est au contraire d'assurer la cohésion de la société ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

M. Yan Chantrel .  - Votre projet de loi était censé améliorer l'intégration : je ne vois pas la moindre ligne à ce sujet. Injustice partout, justice et humanité nulle part !

L'article 3 constituait une maigre ébauche ; vous l'avez rejeté, non sans hypocrisie manifestement, puisque le ministre dit avoir une liste des élus de droite demandant la régularisation de salariés qu'ils jugent donc utiles au pays ! À force de faire des immigrés de la chair à canon électorale, dans une course à l'échalote derrière l'extrême droite, vous finirez par n'avoir plus de républicain que le nom. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

C'est une pente fatale : plus vous allez vers l'extrême droite, plus vous la renforcez ! (M. Stéphane Ravier s'exclame.) Le problème n'est pas l'immigré, mais sa fiche de paie. Ces personnes participent pleinement à l'économie : la représentation nationale devrait faire preuve de reconnaissance envers eux, plutôt que les montrer du doigt. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

M. Philippe Bas .  - Les postures accusatoires et moralisatrices sont totalement déplacées. Que ceux qui défendent l'idée que la fraude peut être créatrice de droit n'invoquent pas la morale en nous taxant d'hypocrisie ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations indignées à gauche)

L'article 3 était la solution de la paresse de la puissance publique (M. Yannick Jadot et plusieurs sénateurs du GEST protestent), de la résignation à ne rien faire pour que ces emplois soient pourvus par des Français ou des étrangers réguliers.

Créer un droit à la régularisation, comme le voulait le Gouvernement, est insoutenable. Qu'un pouvoir discrétionnaire de l'État récompense une conduite exceptionnellement vertueuse, pourquoi pas (on se gausse à gauche), mais créer un droit opposable, c'est inacceptable - en raison des principes républicains qui sont les nôtres, et que j'aimerais voir mieux partagés ici. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Thomas Dossus proteste.)

M. Christian Bilhac .  - Au RDSE, nous adorons le débat (sourires). Nous aimons amender les textes imparfaits. Comment se passer des travailleurs étrangers qui sont dans nos champs, sur nos chantiers, dans les cuisines des restaurants ? Ne faisons pas l'autruche !

L'automatisme peut poser problème, c'est vrai. Avec cette réécriture, le préfet délivrera les titres. À la préfecture de Montpellier, la pile de dossiers en attente fait un mètre : mieux vaudrait sans doute donner au préfet un droit de véto.

Quoi qu'il en soit, supprimer cet article plutôt que l'amender est une solution de facilité. (M. Mickaël Vallet applaudit.)

M. Christopher Szczurek.  - L'article 3 est mort, vive l'article 3 ! À l'issue des tractations de la journée, la campagne de régularisation massive voulue par le Gouvernement n'est pas réellement remise en cause. La majorité sénatoriale laisse ouvertes les fenêtres d'une maison déjà offerte aux quatre vents.

Avec deux millions de chômeurs et trois millions de sous-employés, l'économie française peut répondre sans immigration à cette prétendue crise de main-d'oeuvre qui n'est qu'une crise des salaires et des conditions de travail.

N'en déplaise à la gauche, le texte valide posteriori des pratiques illégales, et l'exploitation de personnes précaires ! La gauche constitue son armée de réserve électorale - la même que Marx appelait l'armée de réserve du capitalisme. (Vives exclamations à gauche) Vous organisez le dumping social, et n'améliorerez en rien la situation des travailleurs français ou étrangers. Se défausser sur le préfet est une capitulation du politique indéfendable. (M. Stéphane Ravier et M. Joshua Hochart applaudissent.)

M. Mickaël Vallet.  - Vous préférez les armistices !

M. Francis Szpiner.  - Nous défendons la valeur du travail. (Vives protestations à gauche) La gauche devrait s'interroger sur le fait que des emplois ne sont pas pourvus par nos compatriotes (marques d'ironie à gauche) : faibles salaires, manque de formation, vous ne voulez pas voir le problème. Je vous renvoie aux propos de Georges Marchais sur l'immigration. (Vives exclamations à gauche) Vous dites qu'il y aurait une sorte de bonneteau juridique, et que l'article 3 abrogé et l'article 3 reconstitué seraient jumeaux. Le droit opposable défendu par le Gouvernement vous allait très bien : votre vision, c'est puisque nous ne pouvons rien, laissons faire ! (Vives protestations à gauche)

M. Guillaume Gontard.  - C'est vous !

M. Francis Szpiner.  - Vous pensez, comme Yannick Jadot, que l'immigration ne pose aucun problème ? Manifestement, nous ne vivons pas dans le même monde...

Nous disons que c'est l'autorité qui décide qui peut être régularisé, et non le droit opposable ! Oui, nous avons la volonté politique de contrôler l'immigration. (Mêmes mouvements) Respecter la dignité des personnes, ce n'est pas leur dire de venir en France et de rester dans la clandestinité pour être régularisés ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations à gauche)

M. Stéphane Ravier.  - La gauche Terra nova !

M. Pascal Savoldelli.  - Monsieur Szpiner, Georges Marchais n'était pas contre l'immigration, il était contre le capitalisme.

M. Stéphane Ravier.  - Il était aussi contre l'immigration !

M. Pascal Savoldelli.  - Le ministre et M. Retailleau disent bien la même chose : on ne peut régulariser une personne si son employeur ne le permet pas.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Absolument.

M. Pascal Savoldelli.  - C'est vrai dans le secteur marchand, mais pas seulement. Dans mon département, des travailleurs sans-papiers de Chronopost tiennent un piquet de grève depuis 23 mois : pourquoi ne sont-ils pas régularisés ? L'État figure pourtant au capital de La Poste.

Pourquoi le Parlement et le Gouvernement font-ils mine d'ignorer ce conflit social qui concerne des milliers de travailleurs sans papiers ? (M. Guy Benarroche applaudit.)

Mme Michelle Gréaume .  - Ces sans-papiers qui travaillent, on ne les voit pas. Ils sont pourtant au Fouquet's, dans les filiales de La Poste, ou pour poser des panneaux photovoltaïques financés par des aides de l'État.

Le problème, c'est votre relation avec le Medef. (« Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains) Moi, j'entends des patrons qui, ne trouvant pas à recruter, embauchent des étrangers courageux, prêts à travailler, qui se lèvent tôt et ne traînent pas dans la rue à vous demander une pièce. Il faut les régulariser ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER ; M. Stéphane Ravier s'exclame.)

M. David Ros .  - Cet article 3, si j'ai bien compris, est le tournant des débats. Les Échos d'hier citent une étude de l'Insead, l'Institut Descartes et le Human Capital Leadership Institute qui appelle la France à s'ouvrir davantage aux immigrants, comme l'ont fait le Canada ou Singapour. Les Échos, ce n'est pourtant pas la gauche...

Monsieur le ministre, vous êtes au volant : gare à ce que ce prétendu virage à gauche ne vous entraîne pas vers la droite - non celle de M. Ravier, mais celle qui nous mène dans les graviers ! (Exclamations ironiques à droite ; quelques applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Ce sujet est certes important, mais ce n'est pas le coeur du texte.

Je rappelle ma position, pour Mme Vogel : je suis favorable à conserver l'article 3 tel qu'il est, et donnerai un avis défavorable aux amendements de suppression ; je donnerai un avis de sagesse sur l'amendement de repli de la commission.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Sagesse ou paresse ?

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ai-je voulu instaurer un droit opposable ? Non. J'ai seulement voulu donner au législateur des critères pour régulariser des personnes. En général, les parlementaires - je l'ai été - demandent à pouvoir agir à la place de l'État. Je vous en donne les moyens, et cela ne vous convient pas !

Hypocrisie ? Beaucoup d'entre vous sont intervenus pour faire régulariser certains travailleurs. Les courriers que je reçois le matin ne ressemblent pas au débat de ce soir, mais qu'importe...

Vous auriez pu modifier les critères, les durcir ; allonger la durée de séjour requise, imaginer des quotas, comme M. Szpiner. Vous avez refusé de prendre ce pouvoir parlementaire que je vous offrais, au profit d'un maintien des régularisations par le préfet, au cas par cas. L'hypocrisie arrange tout le monde : le ministre régularise, sur demande du maire ou du parlementaire, et il n'y a pas de droit opposable !

Monsieur Kanner, ne me faites pas croire que vous auriez voté ce texte si l'article 3 n'avait pas été supprimé. Idem pour les autres groupes de gauche. (On le conteste vigoureusement à gauche.)

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous n'avons jamais dit cela !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Allons, cette astuce est transparente. Ce que vous voulez, et c'est normal, c'est que le Gouvernement échoue. Voudriez-vous que je fasse confiance à des personnes qui ne voteront pas le texte ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous aurions voté l'article 3.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - La politique se fait à l'épreuve de la réalité. Vous annoncez que vous ne voterez pas l'amendement de la majorité sénatoriale car il ne va pas assez loin. Vous refusez donc une avancée pour les travailleurs ! (Protestations à gauche)

Mme Audrey Linkenheld.  - C'est faux !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Cet article met pourtant fin au servage du travailleur vis-à-vis de l'employeur.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est faux !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Par hypocrisie ou par posture, vous refusez de petites avancées. Lorsque vous étiez aux responsabilités pendant dix ans, vous n'avez jamais régularisé de plein droit, jamais supprimé ces articles du code du travail. Vous avez tous, communistes exceptés, soutenu la circulaire Valls. Le Gouvernement vous propose d'avancer, et vous tendez le pied dans l'espoir qu'il se casse la figure ! Depuis votre alliance avec M. Mélenchon, vous avez quitté les rivages des partis de gouvernement.

Il y a une cohérence dans le texte du Gouvernement : l'article 2, l'article 3, l'article 5 et l'article 8. La commission des lois a supprimé l'article 2, heureusement rétabli hier, l'article 5 et l'article 8, mais conservé l'article 3. L'enfer, pour la majorité sénatoriale ! (Sourires)

L'article 5 supprimait la possibilité pour un étranger de créer une autoentreprise sans justifier de papiers, véritable filière d'immigration irrégulière : ces étrangers payent des impôts, cotisent, puis demandent la régularisation. Certes, cette suppression ne plaît pas aux entreprises qui profitent de ce dévoiement de l'autoentreprise pour y piocher une main-d'oeuvre bon marché...

La commission des lois a également supprimé l'article 8, qui impose la fermeture administrative des entreprises employant des personnes en situation irrégulière. Pourtant, elle n'a pas supprimé l'article 3, dont vous dites qu'il instaure un droit automatique ! J'espère que, par cohérence, vous voterez le rétablissement des articles 5 et 8. (M. Bruno Retailleau s'amuse.)

Monsieur Retailleau, vous ne vouliez pas d'article sur la régularisation. Vous avez obtenu un compromis politique, c'est bien normal dans une assemblée parlementaire.

M. Bruno Retailleau.  - Nous ne voulions pas d'un droit automatique ! L'amendement est différent de l'article 3.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Bien sûr, il s'appelle 4 bis, il doit donc être très différent... (Sourires) Vous vous êtes mis d'accord avec M. Marseille pour supprimer la notion d'automaticité. Le Gouvernement soutiendra ce compromis, mais ne faites pas croire que vous souhaitiez ardemment cette mesure !

Que s'est-il donc passé ? De la politique parlementaire ! Il y avait une majorité pour ne pas supprimer l'article 3, et une majorité pour voter contre le texte, puisque la gauche aurait été ravie de faire tomber le ministre de l'intérieur, après avoir voté pour l'article 3. (Sourires) Mais j'ai un instinct de survie assez développé. (Sourires) Accepter le compromis, c'est prendre ses responsabilités. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et du groupe UC)

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois .  - Sortons de l'hypocrisie. Il y a une grande différence entre l'article 3 et l'amendement que nous avons déposé à l'article 4.

M. Bruno Retailleau.  - Bien sûr !

M. François-Noël Buffet, président de la commission.  - L'automaticité du titre de séjour, sur simple déclaration, sans vérification auprès de l'employeur, conduisait à régulariser largement et de plein droit. Cela ne nous convenait pas. Si l'article 3 n'a pas été supprimé, c'est que la commission a souhaité que le débat ait lieu en séance.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vous n'étiez pas d'accord entre vous !

M. François-Noël Buffet, président de la commission.  - Nous voulons une régularisation au cas par cas, par le préfet, dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour ; il étudiera la situation et vérifiera la réalité de l'emploi auprès de l'employeur. Il me paraît vertueux de ne pas régulariser des gens qui travaillent pour des voyous ! (M. Bruno Retailleau renchérit ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; vives protestations à gauche)

Mme Silvana Silvani.  - Ce sont les patrons qu'il faut sanctionner !

M. François-Noël Buffet, président de la commission.  - Cette distinction avec l'article d'origine est essentielle.

Comme dans tout compromis, chacun a fait valoir son point de vue. Nous ne refusons pas de régulariser des étrangers en situation irrégulière qui ont un contrat de travail, nous supprimons seulement l'automaticité. Que le débat ait lieu, mais sur la base de la vérité ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Groupe de travail (Nominations)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la désignation des 37 membres du groupe de travail préfigurant la commission spéciale chargée d'examiner, sous réserve de son dépôt, le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.

En application de l'article 8 bis, alinéas 2 et 3, de notre Règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Il appartiendra au Sénat de transformer ce groupe de travail en commission spéciale, après le dépôt du projet de loi, conformément à l'article 16 bis de notre Règlement.

La séance est suspendue à 20 heures.

Présidence de M. Loïc Hervé, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Immigration et intégration (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 3 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°655, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Supprimer cet article.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Dans ce pays, tant certains chefs d'entreprise que certains étrangers travaillent de manière irrégulière, ce qui renvoie deux formes d'irrégularité dos à dos. En tant que législateurs, nous ne pouvons nous résigner à ce que la loi soit ainsi bafouée - c'est notre position de principe.

Cela dit, la réalité est souvent plus complexe. C'est pourquoi l'admission exceptionnelle au séjour (AES) autorise la régularisation d'un étranger en situation irrégulière. C'est le préfet qui examine les critères, guidé par les orientations générales de la circulaire Valls.

Tel est l'état du droit positif, que personne ici - ou presque... - n'a voulu modifier. Chacun s'accorde à ce que des autorisations exceptionnelles existent.

L'article 3, dans sa version initiale, visait à régulariser les étrangers dans les secteurs en tension. Ceux-ci devaient fournir une preuve de travail, sans l'aide de l'employeur, pour être automatiquement régularisés. Nous ne pouvions l'accepter, car cela sortait de la casuistique de l'AES.

En instaurant cette automaticité, l'État ne ferait plus usage de son pouvoir discrétionnaire. Ce serait encourager la fraude, qui deviendrait créatrice de droits ; nous ne pouvions nous y résoudre.

Dans ces conditions, nous proposons la suppression de cet article, au bénéfice d'un retour à la philosophie actuelle de l'AES : chaque situation est examinée par le préfet au cas pour cas.

M. le président.  - Amendement identique n°126, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

M. Christopher Szczurek.  - La France compte près de 4,5 millions de travailleurs immigrés et de membres de leurs familles. Il faut stopper l'immigration officielle et clandestine, qui aggrave le chômage, les mauvaises conditions de travail et les bas salaires. C'est ce que disait non pas Marine Le Pen, mais Georges Marchais dans les années 1980.

M. le président.  - Amendement identique n°366 rectifié ter, présenté par M. Duffourg.

M. Alain Duffourg.  - L'article régularise des étrangers dans les métiers en tension. Or la loi sur le plein emploi dispose que les chômeurs seraient privés de droits en cas de refus de deux offres d'emploi sérieuses. La France compte plus de 5 millions de chômeurs : pourquoi inciter des étrangers à venir dans ces conditions ? Supprimons cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°530, présenté par M. Ravier.

M. Stéphane Ravier.  - L'article 3 ajoute au grand remplacement un grand renoncement ! Cette nouvelle carte de séjour est une porte d'entrée supplémentaire pour les immigrés. Alors que nous comptons 2,5 millions de chômeurs sur notre sol, il faut plutôt revaloriser les métiers en tension, en les exonérant de charges et en revalorisant les salaires.

L'article 3, lui, encourage une concurrence déloyale sur notre sol. L'immigration est une trappe à bas salaires. Une politique familiale ambitieuse, un RSA sous conditions, le recours à l'apprentissage sont de bien meilleures solutions.

Vous nous prenez en otage ! Quelque six Français sur dix estiment qu'il y a trop d'étrangers en France : ils attendent de la fermeté.

Pour 1 % de travailleurs immigrés supplémentaires, ce sont les salaires des ouvriers qui baissent. En France, le salaire net est bas, le salaire brut est élevé : la différence, c'est le « pognon de dingue » de la dépense sociale et non contributive !

D'après les données de votre ministère, en 2017, 14 % des jeunes étaient au chômage ; c'est 43 % pour les Algériens et 48 % pour les Turcs ! Votez mon amendement !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

M. Henri Cabanel.  - Hier, nous avons connu un vrai faux pas : la suppression de l'AME. Nous avons tenté de convaincre, en vain. Le vote de notre assemblée n'est pas rationnel : c'est l'idéologie dogmatique de la majorité sénatoriale qui a parlé.

Ce soir, nous nous apprêtons à renoncer à la seule mesure intéressante du texte, l'article 3. Véritable basculement, il marquait la fin d'une hypocrisie, celle de la marginalisation systématique des étrangers qui travaillent dur, dans l'intérêt de notre nation, sans qu'ils puissent véritablement s'intégrer.

Notre groupe voulait voter cet article 3. S'il est supprimé, en sus de l'AME, nous ne voterons pas ce texte. (Mme Marie-Arlette Carlotti et M. Ian Brossat applaudissent.)

M. Roger Karoutchi.  - Monsieur le ministre, la différence majeure, entre vous et nous, est simple : crée-t-on un droit opposable automatique ou fait-on du cas par cas ? Personne ne dit qu'un certain nombre d'immigrants en situation irrégulière, travaillant dans des secteurs d'emploi compliqués, ne doivent pas être régularisés...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Si !

M. Yan Chantrel.  - Il y en a quelques-uns, quand même !

M. Roger Karoutchi.  - Laissez-moi parler ! Nous allons passer de 7 000 à 8 000 régularisations annuelles à un nombre indéterminé - personne n'en sait rien. Cette automaticité est dangereuse !

Environ 500 000 immigrés en situation régulière sont au chômage. Cette automaticité crée une concurrence déloyale entre ceux qui ont suivi les règles et les autres. Je préfère clairement la décision au cas par cas, plutôt que de donner une prime aux étrangers en situation irrégulière, employés par des patrons voyous, pour reprendre les termes du groupe CRCE-K. Aidons plutôt les étrangers en situation régulière à trouver du travail.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous ne voterons pas ces amendements. Certes, l'article 3 initial ne répondait pas globalement à nos attentes, mais c'était une avancée très importante.

Ce pas de deux entre les rapporteurs, le Gouvernement et le groupe LR est intéressant. M. Karoutchi disait que personne ne contestait la régularisation : eh bien si !

M. Roger Karoutchi.  - Ne travestissez pas nos propos !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Or il y a bien d'autres cas - le domaine fiscal ou immobilier - où l'on parle de droit à l'erreur. Ici, on parle de fraude. La différence sémantique est intéressante. (M. Roger Karoutchi s'impatiente.) Roger Karoutchi, nous nous connaissons depuis longtemps : vos mines ne me déstabilisent pas ! (Sourires)

Monsieur le ministre, confirmez-vous que les préfectures appliqueront de manière homogène le dispositif proposé par les rapporteurs ? On le sait : c'est le problème de la circulaire Valls.

M. Bruno Retailleau.  - Avec l'article 3, la fraude crée un droit : nous ne pouvions l'accepter.

L'aberration serait de capituler : avec 7 % de chômage, il est fou de penser que l'immigration peut aider à régler le problème des métiers en tension.

En 1993, François Mitterrand, constatant les trois millions de chômeurs en France, déclarait sur un plateau TV : « Contre le chômage, on a tout essayé. » Aujourd'hui, en serions-nous là ? Mais non ! On n'a pas tout essayé. (Protestations à gauche)

Nous laisserions tomber les 1,4 million de jeunes sans emploi ? Chers collègues de gauche, soyez sensibles à mon argument : ce n'est certainement pas en régularisant des clandestins, et avec de petits salaires quel'on réglera le problème ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations sur les travées du groupe SER)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Monsieur Retailleau, je suis sensible à cette argumentation.

Le Gouvernement avait prévu la notion de zone géographique tendue ; la commission l'a fait disparaître. Or la Bretagne rencontre plus de difficultés dans des métiers en tension que les Hauts-de-France.

Vous parlez d'appel d'air, mais il s'agit de personnes que nous ne pouvons pas expulser : nous devons les régulariser, car nous avons besoin de cette main-d'oeuvre.

Si l'article 3 est supprimé, que va-t-il se passer en Bretagne ? La FNSEA demandera des visas de travail, pour ramasser des fraises à Plougastel...

Mme Sophie Primas.  - Des saisonniers !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Pas uniquement ! Et les saisonniers sont aussi une trappe à irrégularité.

Certes, il faut mieux former, mais il n'est pas si facile de faire en sorte que des salariés de la restauration des Hauts-de-France viennent faire de l'agriculture en Bretagne.

M. Ian Brossat.  - Nous regrettons la suppression de l'article.

Je conteste l'idée ahurissante selon laquelle la régularisation des travailleurs sans papiers serait un dumping nuisant aux travailleurs français. C'est l'inverse ! Le problème vient du maintien de travailleurs sans papiers en concurrence avec des travailleurs en situation régulière. La régularisation évite ce dumping et serait une bonne nouvelle pour tous.

De plus, l'idée d'une responsabilité égale entre la fraude du salarié et celle de l'employeur est insensée ! La responsabilité première va à celui qui exploite sciemment des sans-papiers. Nous n'avons pas le droit de dire des choses pareilles !

M. Jérôme Durain.  - Très bien !

M. Philippe Bas.  - Monsieur le ministre, je soutiens la suppression de l'article 3.

Tout à l'heure, vous avez dit : « qu'on dise au moins la vérité sur le fond de cet article » - prétendant qu'il se bornerait à préciser dans la loi des critères de régularisation.

Non, monsieur le ministre, ce n'est pas le fond de cet article, qui est un changement de système : on passe de la faculté pour l'État de régulariser un clandestin à titre exceptionnel à la création d'un droit.

L'article initial du Gouvernement en témoigne. Je lis votre texte : l'étranger qui travaille en France « se voit délivrer de plein droit », etc. De plein droit ! Nous ne voulons pas d'un tel système. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; Mme Brigitte Devésa applaudit également.)

Mme Laurence Rossignol.  - Depuis hier, nous entendons souvent le postulat selon lequel l'intégration serait un échec. Je ne suis pas d'accord : de très nombreuses personnes issues de l'immigration sont parfaitement intégrées. (M. Stéphane Ravier le conteste.) Mais vous ne les voyez pas, chers collègues de droite. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Les fraudeurs, les clandestins, que nous appelons les sans-papiers, travaillent et élèvent leurs enfants, sans faire de bruit. Changez de regard !

Vous proposez le statu quo, en pire (M. Jérôme Durain renchérit), une nouvelle fabrique à clandestins. Vous vous arrangez très bien des clandestins ! Vous savez que ces personnes resteront sur le territoire français. Vous serez contents, car vous aurez fait de l'agitation politique.

Vous déposez des amendements avec le zemmourien et les lepénistes. Des centristes à l'extrême droite, c'est la même chose ! (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements à gauche)

M. Guy Benarroche.  - Philippe Bas dit la vérité (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains) : le Gouvernement pensait nécessaire de régulariser automatiquement certains travailleurs parfaitement intégrés à la société. Je remercie M. Bas d'avoir souligné cette vérité, tout comme je remercie MM. Darmanin et Dussopt d'avoir eu cette bonne idée.

Mais, pour des calculs politiciens, vous avez abdiqué et renoncé à cette excellente idée !

Mme Sophie Primas.  - Parce que vous, vous ne faites pas le politicien, là !

M. Guy Benarroche.  - Il est clair que, dans la réalité, tout ce que nous votons ici sera remis en cause par l'Assemblée nationale. Je ne dis pas que nous travaillons en vain, mais je le répète : il faut régulariser les sans-papiers, pour ne pas renoncer à leur intégration. Combien je regrette vos calculs ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

À la demande du groupe SER, du GEST et de la commission, les amendements identiques nos655, 126, 366 rectifié ter et 530 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°26 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 329
Pour l'adoption 191
Contre 138

Les amendements identiques nos655, 126, 366 rectifié ter et 530 sont adoptés.

En conséquence, les amendements du n°270 au n°401 rectifié n'ont plus d'objet.

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - De justesse !

APRÈS L'ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°34 rectifié, présenté par Mme N. Delattre et MM. Bilhac, Cabanel, Guiol, Laouedj, Roux, Grosvalet et Masset.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 414-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 « Dans le cadre de la délivrance de la carte de séjour "travailleurs saisonniers", pour les activités relevant des secteurs professionnels tels que définis au 1° de  l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, la situation de l'emploi est non opposable au demandeur. »

M. Michel Masset.  - C'est ma première intervention. (Applaudissements sur quelques travées à gauche)

Nous voulons supprimer l'obligation faite aux employeurs de l'agriculture de justifier que leurs emplois saisonniers ne trouvent pas de candidats français. Malgré les efforts des professionnels et des pouvoirs publics, le monde agricole reste en grande difficulté. (Applaudissements sur quelques travées du RDSE)

M. le président.  - Amendement identique n°99 rectifié bis, présenté par MM. Menonville et Longeot, Mmes Guidez et Antoine, MM. J.M. Arnaud, Canévet et Kern, Mmes Perrot et Romagny, M. Maurey, Mme Jacquemet et MM. L. Hervé et Bleunven.

M. Claude Kern.  - Défendu.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Si des difficultés existent, ces emplois devraient être inclus dans la liste des métiers en tension, au sein du dispositif que nous proposerons ultérieurement. Retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°99 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°34 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°283 rectifié, présenté par MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa des articles L. 421-1, L. 421-2, et L. 421-3, au troisième alinéa de l'article L. 421-3 et à l'article L. 421-5, les mots : « d'un an » sont remplacés par les mots : « de trois ans ».

2° Le deuxième alinéa des articles L. 421-1 et L. 421-3 sont supprimés.

M. Yannick Jadot.  - Cela plaira à la droite sénatoriale. (« Ah ! » à droite) La durée des titres de séjour octroyés pour la première fois devrait être non pas d'un an, mais de trois ans, pour faciliter l'intégration des travailleurs étrangers et alléger la charge administrative des préfectures.

On nous parle de « mode de vie ». N'oubliez pas les sans-papiers travaillant dans les cuisines des restaurants : ce sont eux qui connaissent la cuisine française ! (Applaudissements sur quelques travées du GEST)

M. le président.  - Amendement n°33 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux, Mme Girardin, MM. Fialaire et Grosvalet, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par les mots : « ou, à défaut d'autorisation, à la justification par tout moyen de l'exercice d'une activité salariée durant au moins vingt mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois. » 

Mme Maryse Carrère.  - Des étrangers sans titre de séjour valable travaillent en France depuis plusieurs mois, voire plusieurs années... Ces personnes sont parfaitement intégrées. Mais les employeurs ne les déclarent pas, ce qui bloque leur demande de titre de séjour.

L'autorisation préalable de l'employeur pose problème : nous voulons la supprimer, à condition que le travailleur puisse présenter certains justificatifs. Étant donné la suppression de l'article 3, j'ai peu de doutes sur le sort réservé à ma proposition...

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Monsieur Jadot, vous proposez un premier titre de séjour de trois ans : c'est très long. La pratique veut que l'on commence par un titre court, pour évaluer la capacité d'intégration des personnes : avis défavorable.

Madame Carrère, votre amendement réintroduirait l'article 3, que nous venons de supprimer : avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°283 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°33 rectifié bis.

M. le président.  - Amendement n°223, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers est complété par une phrase ainsi rédigée : « La caractéristique selon laquelle l'étranger exerce un emploi sous le statut de travailleur indépendant ne fait pas obstacle à la délivrance d'une carte de séjour, dès lors qu'au moins les deux tiers de son revenu professionnel annuel résultent de l'utilisation d'un algorithme exploité directement ou indirectement par une plateforme numérique telle que définie à l'article 242 bis du code général des impôts. »

M. Jérôme Durain.  - Nous dénonçons une hypocrisie : l'exclusion des travailleurs des plateformes du bénéfice de la régularisation au titre de l'AES, au seul motif qu'ils n'ont pas le statut de salariés. Les entreprises qui les emploient ne sont pas de simples intermédiaires : elles fixent le prix des courses et organisent le travail quotidien. Il existe bien un lien de subordination, comme l'a estimé la Cour de cassation à maintes reprises.

Mettre la tête dans le sable : voilà la seule réponse du Gouvernement !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. L'extension de la circulaire Valls ne nous semble pas être la bonne solution à ce problème réel ; nous préférerions une solution contractuelle, comme dans une proposition de loi qui a été déposée.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°223 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°405 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 413-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des informations sur la vie en France et des démarches essentielles pour la venue et pour l'installation sont mises à disposition dans les principales langues comprises par les étrangers présents en France lors du passage de l'étranger dans les consulats français, dans les préfectures et dans les locaux de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. »

Mme Mélanie Vogel.  - Cet amendement est simple : actuellement, l'État met à la disposition des personnes souhaitant s'installer en France des informations. Puisque les conditions de cette installation vont se durcir, il faudrait qu'elles soient aussi présentes dans les consulats, les préfectures et les locaux de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii).

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - C'est déjà le cas : retrait ou avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°405 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°406 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°515, présenté par Mme Narassiguin, M. Bourgi, Mme Brossel, MM. Chaillou et Chantrel, Mmes Conway-Mouret et de La Gontrie, M. Durain, Mmes Harribey et G. Jourda, MM. Kanner et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Marie, Mme S. Robert, M. Roiron, Mme Rossignol et MM. Stanzione, Temal, Tissot et M. Vallet.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conditions d'accès à la fonction publique pour les étrangers non européens, les conséquences de leur statut d'agent contractuel de droit public pour leur intégration et un état des lieux des difficultés de recrutement de la fonction publique.

Mme Corinne Narassiguin.  - Par cet amendement d'appel, nous demandons un rapport sur l'accès des étrangers non européens à la fonction publique, qui rencontre elle aussi des difficultés de recrutement : 6 000 emplois n'étaient pas pourvus l'année dernière. Certains étrangers non européens occupent des contrats précaires et peuvent se trouver momentanément en situation irrégulière. Simplifions les procédures pour leur apporter plus de sécurité.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable à cette demande de rapport. Sur le fond, s'ils veulent entrer dans la fonction publique, ces étrangers peuvent manifester d'abord leur volonté d'appartenance à la communauté nationale en entrant dans un processus de naturalisation.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°515 n'est pas adopté.

L'amendement n°460 est retiré.

ARTICLE 4

M. Guy Benarroche .  - Monsieur le ministre, vous m'aviez dit qu'il fallait s'intéresser à la réalité des crédits de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA), et sortir des postures.

Selon vous, il est normal que les crédits n'augmentent pas en 2024 ; mais je vous faisais remarquer qu'ils étaient en baisse dès le projet de loi de finances pour 2023. Or personne n'a pu bénéficier de l'efficacité que vous attribuez à ce texte avant son adoption...

À mon appel à étendre le modèle d'accueil des Ukrainiens, vous m'avez répondu : chiche, appliquons la règle du temporaire pour tous les étrangers. Mais ce que nous souhaitons, c'est que la prise en charge des Ukrainiens, indépendamment de leur vocation à rester longtemps ou non, soit étendue : que la prise en charge soit inconditionnelle pour tout le monde ! (On s'impatiente à droite.)

M. Roger Karoutchi.  - Impossible !

Mme Mélanie Vogel .  - La commission souhaite supprimer l'article 4, qui ouvre le droit de travailler aux demandeurs d'asile issus de pays bénéficiant d'un taux de protection très élevé - Afghanistan, Syrie  - qui tardent à obtenir l'asile non par leur faute, mais à cause de nous. Pourquoi êtes-vous contre ? Je ne comprends pas ! Nous l'avons fait pour les Ukrainiens, et chacun s'en est réjoui. Expliquez-moi ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Philippe Bas .  - Pourquoi, madame Vogel ? Parce qu'il faut vérifier que ce sont bien des Afghans ! Il faut prendre garde à ne pas donner des autorisations à des personnes qui se font passer pour des persécutés, alors qu'ils ne le sont pas. (Protestations sur les travées du GEST)

M. Max Brisson.  - Très bien !

M. Ian Brossat .  - Préfère-t-on que les gens vivent de leur travail ou des revenus de l'assistance ? (Mme Corinne Narassiguin et M. Yan Chantrel renchérissent.)

Je m'étonne de votre position, chers collègues de droite...

La dignité s'acquiert par le travail ; ces personnes ne demandent qu'une seule chose : vivre de leur travail, être utiles par leur travail. Et vous les renvoyez à un revenu d'assistance de 6,80 euros par jour ?

Mme Cécile Cukierman.  - Très bien !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - Ne développons pas des fantasmes irraisonnés... L'article 4 ne prévoit pas une autorisation de plein droit : il devrait donc vous satisfaire... Il dit « peut », et non « doit ».

Selon l'étude d'impact, il s'appliquerait aux ressortissants des pays dont le taux de protection dépasse 50 %. Neuf pays, dont essentiellement l'Afghanistan, l'Érythrée et la Syrie, sont concernés.

Entre septembre 2021 et septembre 2022, 354 personnes ont obtenu une autorisation de travail. Vous voulez supprimer un article qui laisse la main à l'autorité administrative et qui par ailleurs ne concerne que quelques centaines de personnes. Vous préférez qu'elles travaillent au noir ou vivent avec 6,80 euros par jour ? L'article 4 est beaucoup plus conforme à ce que vous souhaitez que vous ne l'imaginez.

Mme Colombe Brossel.  - On a beaucoup parlé d'hypocrisie à propos de l'article 3 ; on pourrait aussi en parler ici, ainsi que d'un déni de réalité. (Protestations à droite)

M. Mathieu Darnaud.  - Cela fait beaucoup !

Mme Colombe Brossel.  - À Paris, en 2022 et 2023, entre le 18e et le 19e arrondissement, 5 000 personnes qui campaient sur les trottoirs ont été mises à l'abri lors de douze opérations...

Une voix à droite.  - Que fait Hidalgo ?

Mme Colombe Brossel.  - Et vous proposez de revenir sur cet article 4 ? On ne peut pas faire la loi sans tenir compte de la réalité ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Laurence Rossignol.  - Monsieur Bas, vous soupçonnez l'article 4 d'ouvrir des droits à de futurs déboutés du droit d'asile. Vous êtes méfiants, précautionneux ; mais cet article n'a pas été rédigé par des socialistes ou des communistes ! Il a été rédigé par M. Darmanin, qui n'est pas le militant le plus no border que je connaisse ! (Rires et quelques applaudissements à gauche) Faites confiance à votre ami Gérald Darmanin, à ses services et à leur volonté de traquer les futurs déboutés du droit d'asile !

Vous commettez aussi une erreur économique : dès lors que ces réfugiés font leur demande de droit d'asile, ils bénéficient de l'ADA. Cela coûterait moins cher s'ils travaillaient ! Votre position est difficile à comprendre... (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je m'exprime non pas en tant que no border, mais en tant que ministre de l'intérieur. (Exclamations à gauche) Ne soyez pas déçus... (Sourires)

L'article 4 sera vraisemblablement supprimé par le Sénat...

Mme Laurence Rossignol.  - Nous aurons fait notre possible !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Monsieur Bas, il est évident que l'autorisation de travail ne sera accordée que lorsque les vérifications auront été effectuées.

Vaut-il mieux que ces réfugiés touchent l'ADA plutôt que de vivre légalement du fruit de leur travail - sans que cela ouvre, en aucun cas, le droit à un titre de séjour ? C'est ce qui se passe en Allemagne, où il existe une tolérance pour les irréguliers en attente de titre.

Nous avons retenu une application au-delà d'un taux de protection de 50 % - mais nous pourrions aussi placer la barre plus haut. Pour les Afghans, le taux atteint 80 %. Ce n'est pas une mesure d'attractivité. Elle est sans rapport avec l'asile. Nous faisons seulement en sorte que ces personnes puissent travailler plutôt que de toucher l'ADA !

Nous avons fait venir plusieurs milliers d'Afghans après la chute de Kaboul, dont des traducteurs, des médecins, des infirmiers...

Mme Laurence Rossignol.  - Des juges aussi !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Pourquoi ont-ils dû attendre six mois en touchant 360 euros par mois avant de pouvoir travailler ?

Monsieur Benarroche, la loi de finances pour 2023, hors Ukraine, prévoyait 320 millions d'euros pour l'ADA, mais nous n'en avons exécuté que 275 millions. Pourquoi ? Parce que nous instruisons beaucoup plus rapidement les demandes, et payons donc l'ADA moins longtemps. Nos chiffres sont sincères. Nous sommes déjà efficaces ; imaginez notre efficacité une fois cette loi votée !

Si l'article 4 est supprimé, nous aurons moins de cotisations et plus de dépenses, c'est dommage. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI ; M. Pierre Jean Rochette applaudit également.)

M. le président.  - Amendement n°656, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Supprimer cet article.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Vous l'aurez compris, cet amendement découle de l'accord trouvé au sein de la majorité sénatoriale. (On ironise sur les travées du groupe SER et du GEST)

Le groupe UC n'était pas opposé à la proposition du Gouvernement. Mais relativisons : l'importance des principes mis en avant dans vos interventions est inversement proportionnelle à celle du sujet.

Historiquement, les demandeurs d'asile pouvaient travailler dans notre pays. Cette possibilité a été supprimée par le gouvernement Rocard de crainte qu'elle ne constitue un appel d'air...

M. le ministre a cité l'exemple allemand, mais nos voisins viennent de revoir leur position pour instaurer un système de travail d'utilité collective.

Nous ferions un déni de réalité ? Non, le sujet dont nous parlons est à la marge de la marge : Mme de La Gontrie a parlé de quelques centaines de personnes, mais ce sont en fait 1 150 personnes qui ont reçu en 2022 une autorisation de travailler après six mois de présence.

Le Gouvernement propose une application pour les pays avec un taux de protection de 50 % ; mais c'est une fiction arithmétique ! Parmi ces pays, il y a des pays à très fort taux de protection - Afghanistan, Syrie - et d'autres à très faible taux - Tunisie, Côte d'Ivoire, Sénégal. Les Afghans concernés ne seraient pas ceux qui sont arrivés à la chute de Kaboul : sans maitrise du français, ils ne pourraient s'adapter rapidement à la vie dans notre pays. (Mme Audrey Linkenheld proteste.)

Mme Colombe Brossel.  - Allez porte de la Chapelle !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Ces personnes sont déjà titulaires du droit d'asile, madame Brossel !

Je n'ai pas le sentiment que ces dispositions constituent une révolution. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; protestations à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Votons-le alors !

M. le président.  - Amendement identique n°127, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

M. Christopher Szczurek.  - Cet article permettrait à un Afghan ou à un Syrien de travailler immédiatement en arrivant sur notre sol. Cela constitue évidemment un appel d'air (protestations à gauche) - je sais que vous aimez ce mot - alors qu'un demi-million de demandeurs d'asile se trouvent déjà sur notre sol.

Cet article faciliterait l'implantation de migrants sur notre sol et augmenterait la pression sur les administrations chargées de l'asile. La France deviendrait une destination privilégiée alors que l'intégration ne fonctionne plus, que les services sociaux sont saturés, et que les Français réclament l'arrêt de l'immigration, qu'elle soit légale ou illégale.

M. le président.  - Amendement identique n°365 rectifié ter, présenté par MM. Duffourg et Hingray.

M. Alain Duffourg.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°531, présenté par M. Ravier.

M. Stéphane Ravier.  - L'article 3 est celui qui a fait couler le plus d'encre et de salive, mais celui-ci est tout aussi mauvais. Pas moins de 60 % des demandeurs d'asile sont déboutés : il y a lieu d'être dégoûté. Le droit d'asile n'a rien à voir avec les migrations économiques ; vraiment ?

Monsieur Darmanin, vous voulez être gentil avec les gentils et méchant avec les méchants ?

M. Mickaël Vallet.  - C'est tellement mieux d'être méchant avec tout le monde !

M. Stéphane Ravier.  - Qui sont les gentils ? Ceux que vous pouvez payer pas cher ? Vous supprimez les frontières entre irrégularité et régularité en ouvrant le marché du travail à la terre entière. Vous répondez en réalité à la demande de l'extrême gauche d'un droit au travail inconditionnel. Ne vous étonnez pas ensuite de l'embolie des tribunaux administratifs. C'est le meilleur moyen pour que nous nous retrouvions dans dix-huit mois pour voter une trente-et-unième loi sur l'immigration...

Vous espérez séduire des chefs d'entreprise avec cette vision court-termiste, mais ne ferez qu'augmenter le chômage et la charge sociale. Le patron du Medef s'est exprimé à ce sujet le 4 novembre : il y a beaucoup de chômeurs dans nos régions et la première priorité est de les ramener vers l'emploi.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous ne voterons pas ces amendements. Monsieur Bonnecarrère, j'ai senti une hésitation, ou une contradiction dans vos propos. Ou bien c'est trop, ou bien c'est trop peu : je ne comprends plus ! (Rires à gauche ; marques d'agacement à droite)

Si seules quelques centaines de personnes sont concernées, il ne s'agit donc pas d'une ouverture abrupte, pour reprendre les termes de Bruno Retailleau. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER et du GEST)

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Monsieur le président, je comprends que vous n'ayez pas demandé l'avis de la commission : vraisemblablement, le Sénat votera l'amendement n°656 de la commission. Les autres amendements deviendraient sans objet.

M. Michel Masset.  - Sur la forme, je salue la créativité de nos rapporteurs. Les articles 3 et 4 sont enterrés ou en passe de l'être, mais l'article 4 bis s'apprête à voir le jour ! L'importance que nous accordons à la clarté de l'écriture de la loi me fait voir d'un mauvais oeil ces tours de passe-passe légistiques.

Sur le fond, j'ai l'impression d'un geste non assumé : la suppression d'un article, dont, en fait, vous reconnaissez la nécessité. Vous ajoutez seulement des critères qui n'ont pas besoin de figurer dans la loi. Nous verrons comment les autorités administratives et juridictionnelles se débrouillent de critères aussi folkloriques que l'intégration dans la société française ou l'adhésion à nos modes de vie...

Étant moi-même issu du milieu économique, je m'oppose à la suppression de l'article 4.

M. Bruno Retailleau.  - Nous nous opposons depuis le départ à cet article et voterons l'amendement de suppression de la commission.

L'enjeu n'est pas le droit d'asile, qui est sacré, à condition de ne pas être dévoyé.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Oui, nous parlons de l'accès au travail.

M. Bruno Retailleau.  - La directive Accueil de 1989 fixe un délai maximal de neuf mois avant d'accéder à un permis de travail. Certains pays fixent ce délai à neuf mois, d'autres, comme la France, à six mois, d'autres encore le suppriment, comme il est proposé ici - ce qui serait très mal interprété.

M. Thomas Dossus.  - Par qui ?

M. Bruno Retailleau.  - Je rappelle que 75 % des Français pensent qu'il y a trop d'immigration, y compris chez les électeurs de LFI. (Protestations à gauche) Supprimons l'article 4. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

À la demande des groupes Les Républicains, SER et du GEST, les amendements identiques nos656, 127, 365 rectifié ter et 531 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°27 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 329
Pour l'adoption 191
Contre 138

Les amendements identiques nos656, 127, 365 rectifié ter et 531 sont adoptés et l'article 4 est supprimé.

Les amendements nos37 rectifié, 228, 296 rectifié bis, 83 rectifié, 240, 295 rectifié, 371 rectifié, 438, 24 rectifié bis, 229, 231 et 294 rectifié n'ont plus d'objet.

APRÈS L'ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°657, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 435-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 435-4.  -  À titre exceptionnel, l'étranger qui a exercé une activité professionnelle salariée figurant dans la liste des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement définie à l'article L. 414-13 durant au moins douze mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois, et occupant un emploi relevant de ces métiers et zones, et qui justifie d'une période de résidence ininterrompue d'au moins trois années en France, peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « travailleur temporaire » ou « salarié » d'une durée d'un an. Ces conditions ne sont pas opposables à l'autorité administrative.

« Dans l'exercice de sa faculté d'appréciation, l'autorité compétente prend en compte, outre la réalité et la nature des activités professionnelles de l'étranger, son insertion sociale et familiale, son respect de l'ordre public, son intégration à la société française et son adhésion aux modes de vie et aux valeurs de celle-ci, ainsi qu'aux principes de la République mentionnés à l'article L. 412-7.

« La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. »

II.  -  Après le deuxième alinéa de l'article L. 5221-5 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un titre de séjour ?salarié? ou ?salarié temporaire? est délivré à l'étranger sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-... du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorisation de travail peut lui être accordée, après vérification auprès de l'employeur de la réalité de l'activité alléguée. »

III. - Le présent article est applicable jusqu'au 31 décembre 2026.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - Nos concitoyens veulent que nous prenions nos responsabilités : grâce à l'accord conclu au sein de la majorité sénatoriale, le Sénat votera un texte. Ils nous demandent de surmonter nos désaccords, nous leur prouvons que nous en sommes capables.

Hier soir, nous avons pris connaissance d'un communiqué de presse de M. Retailleau, se réjouissant de pouvoir « voter notre texte ». Une heure plus tard, le président Marseille disait qu'il voterait un texte reprenant les desiderata des centristes.

En début d'après-midi, le ministre s'est offusqué que chacun s'attribue le texte alors que c'était son texte qui serait voté. Lorsqu'un texte a trois pères...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Mariage pour tous !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Il faut faire une recherche de paternité...

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur.  - ... c'est qu'il est solide ! Sur le fond, le groupe UC et le Gouvernement souhaitaient des régularisations dans les métiers en tensions, elles seront possibles. Le groupe Les Républicains ne voulait pas de régularisations de plein droit et opposables, il n'y en aura pas. Le groupe UC voulait la suppression de l'accord préalable de l'employeur, il l'a obtenue. Le groupe Les Républicains nous alertait sur la préservation de l'ordre public et le contrôle de la réalité de l'activité professionnelle : ces éléments seront pris en compte par les préfets. Le dispositif proposé répond ainsi à toutes les préoccupations exprimées.

M. le ministre, toujours habile, a dit que nous dessaisissions le Parlement au profit des préfets. Mais dans la mesure où nous voulons un examen au cas par cas, il ne peut être fait que par ces derniers.

La moitié des travailleurs sans papiers ont un employeur étranger, nous a appris le ministre. Dès lors, je comprends la volonté de nos collègues de vérifier la réalité de l'activité alléguée.

Il ne me paraît pas choquant que ce dispositif ait migré de l'article 3 à l'article 4 bis. Ce n'est pas un bien long voyage, et personne n'est oublié. Voilà qui est prometteur pour l'avenir de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. le président.  - Sous-amendement n°658 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657

I.  -  Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés : 

I.  -  La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section 4 ainsi rédigée :

« Sous-section 4 :

Régularisation pour motif professionnel

II.  -  Alinéa 4

Supprimer les mots : 

À titre exceptionnel,

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Après cette communication de la droite à la droite, il me semble utile de donner une explication plus globale... L'histoire parlementaire expliquée aux enfants présentée par M. Bonnecarrère est insuffisante.

Cet amendement est une version très dégradée de l'article 3 et de la circulaire. Nous voulons revenir à plus de sérieux.

La circulaire Valls continuera-t-elle d'exister ? Je répète qu'elle concerne tous les secteurs, et non les seuls métiers en tension.

M. le président.  - Sous-amendement n°674 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657, alinéa 4

Supprimer les mots :

À titre exceptionnel

M. Guy Benarroche.  - Les travailleurs et travailleuses étrangers sans titre de séjour vivent dans la précarité, situation inacceptable dans un pays comme le nôtre. Pourtant, ils cotisent.

La seule manière de les sortir de la précarité est de les régulariser, ce que ne permet pas cet amendement, qui prévoit un droit exceptionnel. De plus, vous voulez expérimenter le dispositif jusqu'en 2026, alors que nous avons besoin d'un droit pérenne.

M. le président.  - Sous-amendement n°659 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657, alinéa 4, première phrase

Supprimer le mot :

salariée

M. Éric Kerrouche.  - Le rapporteur a présenté cet accord politique avec une euphorie qui prouve combien il vous réjouit, surtout au groupe centriste... (M. le rapporteur hausse les épaules.)

Ce sous-amendement supprime la restriction du dispositif aux étrangers exerçant une activité professionnelle salariée, qui est une hypocrisie. Quid des travailleurs des plateformes ? La Cour de cassation a constaté à plusieurs reprises l'existence d'un lien de subordination de fait. Le Gouvernement ne peut se contenter de constater le caractère irrégulier de leur séjour sans leur apporter de réponse.

M. le président.  - Sous-amendement identique n°670 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Mme Antoinette Guhl.  - L'accès à la régularisation doit bénéficier à l'ensemble des travailleurs, y compris les autoentrepreneurs des plateformes.

M. Guy Benarroche.  - Très bien !

M. le président.  - Sous-amendement n°660 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657, alinéa 4, première phrase

Supprimer les mots : 

figurant dans la liste des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement définie à l'article L. 414-13

et les mots :

occupant un emploi relevant de ces métiers et zones

Mme Colombe Brossel.  - Nouveau déni de réalité : vous voulez restreindre les régularisations aux métiers en tension - ce critère n'existe pas dans la circulaire Valls - , mais la liste de ces métiers n'est pas adaptée. Imaginez que les métiers de l'hôtellerie et la restauration ne sont pas considérés comme en tension... Pourquoi ? Parce qu'ils sont, justement, occupés par des étrangers. Bienvenue en Absurdie !

La liste a été actualisée en 2008, puis en 2021 : en treize ans, le marché du travail avait eu le temps d'évoluer. Olivier Dussopt - que je ne vois pas au banc du Gouvernement - a annoncé le lancement d'une concertation pour actualiser la liste, mais cela ne paraît pas avoir été fait.

M. le président.  - Sous-amendement identique n°672 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guillaume Gontard.  - Seuls les travailleurs exerçant dans un métier de la liste pourraient être régularisés, alors que cette liste n'est actualisée que sporadiquement, de surcroît sans consultation des partenaires sociaux. Les serveurs de café et restaurant n'y figurent pas... Cette liste n'est pas représentative des tensions sur le marché du travail. Comment prendre des décisions sur la base d'un outil défaillant ?

M. Guy Benarroche.  - Très bien !

M. le président.  - Sous-amendement n°661 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657, alinéa 4, première phrase

Remplacer le mot : 

douze

par le mot : 

huit

Mme Monique Lubin.  - La circulaire Valls impose à l'étranger de justifier d'une ancienneté de huit mois. La commission propose d'allonger cette durée à douze mois. Nous nous y opposons. Un étranger qui travaille est un étranger qui s'intègre : les preuves d'amour sont déjà suffisantes !

M. le président.  - Sous-amendement identique n°675 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - Les travailleuses et travailleurs étrangers sans titre de séjour sont privés de leurs droits. Privés de la protection du code du travail, ils doivent accepter les pires conditions de travail et, fréquemment, de mauvais traitements. En cas de refus de fiche de paie, par exemple, le travailleur est dans l'incapacité de prouver qu'il travaille, quelle que soit la durée exigée.

M. le président.  - Sous-amendement n°665 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n°657, alinéa 4, première phrase

1° Remplacer les mots : 

peut se voir délivrer

par les mots : 

se voit délivrer de plein droit

2° Dernière phrase

Supprimer cette phrase

M. Christian Redon-Sarrazy.  - L'amendement de la commission instaure l'arbitraire le plus total : dans la même situation, l'un sera régularisé, l'autre non. La délivrance de plein droit que nous proposons n'empêche pas l'autorité compétente de procéder à des vérifications.

M. le président.  - Sous-amendement n°671 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657, alinéa 4

Remplacer les mots :

peut se voir

par les mots :

se voit

Mme Mathilde Ollivier.  - Avec l'amendement n°657, vous donnez un tour de vis à la circulaire Valls : restriction aux salariés, critères flous liés au mode de vie, non-automaticité... Les autorités administratives décideront des régularisations : nous refusons ce pouvoir discrétionnaire. La loi est la loi : tout étranger qui travaille devrait voir sa situation régularisée !

M. le président.  - Sous-amendement n°673 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657

1° Alinéa 4

Supprimer la deuxième occurrence du mot :

temporaire

2° Alinéa 8

Supprimer le mot :

temporaire

M. Jacques Fernique.  - Monsieur le rapporteur, vous avez une mauvaise compréhension de ceux qui mériteraient d'être régularisés. Imaginez que vous soyez blessé dans votre pays en guerre, que vous obteniez un titre de séjour pour raison médicale : à son expiration, votre pays étant toujours en guerre, vous vous retrouvez en situation irrégulière et ne pouvez pas travailler. Nous nous opposons aux dispositifs à caractère temporaire.

M. le président.  - Sous-amendement n°666 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657, alinéa 4

Remplacer les mots :

d'un an

par les mots :

de trois ans

Mme Ghislaine Senée.  - Ce sous-amendement vise à rendre pluriannuelle la carte de séjour portant la mention « travailleur temporaire ». Nous dénonçons la conception utilitariste de l'immigration et demandons une sécurité juridique pour les travailleurs étrangers, qui suppose une vision pluriannuelle. Cette mesure allégera aussi la charge des services préfectoraux.

M. le président.  - Sous-amendement n°668 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657, alinéa 4, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

M. Thomas Dossus.  - La situation est lunaire : le président Retailleau, tel Attila, nous a expliqué pendant des mois que l'article 3 disparaîtrait. Aucune réécriture de l'article, assurait-il. Et pourtant, voici l'article 4 bis !

Dans le Journal du dimanche, le ministre a expliqué que les travailleurs étrangers qui ne causaient aucun trouble à l'ordre public méritaient d'être régularisés.

Nous souhaitons rétablir le caractère opposable du dispositif.

M. le président.  - Sous-amendement n°676 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par le Gouvernement.

Amendement n° 657, après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

« Les périodes de séjour et l'activité professionnelle salariée exercée sous couvert des documents de séjour visés aux articles L. 422-1, L. 421-34, et L. 521-7 ne sont pas prises en compte pour l'obtention d'une carte de séjour temporaire portant la mention « travailleur temporaire » ou « salarié » mentionnée au premier alinéa.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ce sous-amendement vise à exclure du calcul des périodes travaillées celles passées en tant que demandeur d'asile, étudiant ou saisonnier. Avec la rédaction actuelle de l'amendement, vous vous apprêtez à régulariser beaucoup plus de personnes que ne le permettait l'article 3... (On ironise à gauche.)

M. le président.  - Sous-amendement n°662 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657, alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Mme Audrey Linkenheld.  - Comme vient de le dire le ministre, la réécriture des articles 3 et 4 semble s'être faite dans une certaine précipitation...

Supprimons l'alinéa 5, qui prévoit des critères déjà pris en compte, liés notamment à l'ordre public. Ce n'est pas qu'une question de redondance : en précisant ces critères pour les seuls métiers en tension, on pourrait laisser entendre qu'ils ne sont pas requis pour les autres titres de séjour. Or personne ne veut qu'on accorde un titre à des personnes dangereuses pour l'ordre public.

M. le président.  - Sous-amendement n°667 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657, alinéa 5

Supprimer les mots :

son intégration à la société française et son adhésion aux modes de vie et aux valeurs de celle-ci, ainsi qu'aux principes de la République mentionnés à l'article L. 412-7

Mme Mélanie Vogel.  - L'amendement de la commission fixe un critère d'adhésion aux modes de vie de la société française et aux principes de la République. On peut se référer à la loi pour connaître les principes de la République. Mais les modes de vie, de quoi s'agit-il ? (M. Francis Szpiner s'exclame.)

J'ai fait une recherche sur Google : selon une étude du CNRS de 2019, les Français veulent choisir leur manière de vivre - acceptation de la diversité, mariage homosexuel, euthanasie... -, et l'indice de libéralisme des moeurs a beaucoup augmenté en quarante ans. Je m'inquiète pour vous, chers collègues de droite ! (Applaudissements et rires à gauche ; marques de consternation à droite et sur des travées au centre)

Mme Françoise Gatel.  - Vous êtes trop bonne !

M. le président.  - Sous-amendement n°663 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657, alinéas 7 et 8

Supprimer ces alinéas

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous voulons supprimer les alinéas 7 et 8 de l'amendement, qui conditionnent la délivrance d'un titre de séjour pour activité professionnelle à une vérification auprès de l'employeur. De deux choses l'une : soit l'autorité administrative a mal fait son travail - je ne puis croire que vous le soupçonniez, puisque vous lui faites plus confiance qu'au Parlement -, soit des personnes seraient régularisées au titre d'une activité professionnelle sans pouvoir en exercer une.

M. le président.  - Sous-amendement n°669 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Amendement n° 657, alinéa 8

Remplacer les mots :

l'autorisation de travail peut lui être accordée, après vérification auprès de l'employeur de la réalité de l'activité alléguée 

par les mots :

elle vaut autorisation de travail au sens du présent article

Mme Mélanie Vogel.  - Avec cet article, vous proposez de donner des titres de séjour sans l'autorisation de travail qui l'accompagne. Ce serait revenir quarante ans en arrière ! Ce découplage rend le dispositif ineffectif, voire contreproductif. En réalité, vous réintroduisez le verrou de l'employeur. Que deviendront les employés des entreprises dont le business model est d'exploiter des travailleurs sans papiers ?

M. le président.  - Sous-amendement n°664 à l'amendement n°657 de Mme M. Jourda, au nom de la commission, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Amendement n° 657

I.  -  Alinéa 9

Remplacer l'année :

2026

par l'année :

2024

II.  -  Après l'alinéa 9

Insérer un paragraphe ainsi rédigé : 

....  -  Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard trois mois avant la date mentionnée au III du présent article, un rapport dressant le bilan de l'application des dispositions prévues aux I et II du présent article.

M. Éric Kerrouche.  - Dura lex, sed lex : cet adage romain résume bien votre parti pris. Mais il a pour pendant un autre adage, moins connu : summum jus, summa injuria. Autrement dit, à force de durcir les critères du droit, la loi contient en elle-même une injustice. Votre inflexibilité rendra ce dispositif inapplicable ! C'est pourquoi il est nécessaire de l'évaluer au plus vite.

M. le président.  - Amendement n°389 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section... ainsi rédigée :

« Sous-section...

« Régularisation des travailleurs

« Art. L. 421-4-1.  -  L'étranger en situation régulière ou irrégulière, qui a exercé une activité professionnelle salariée ou une activité professionnelle en tant que travailleur indépendant au sens de l'article L. 631-1 du code de la Sécurité sociale durant au moins six mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois, qui justifie par tout moyen de l'occupation de cet emploi sur le territoire français, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour portant la mention ?régularisation des travailleurs? d'une durée de trois ans.

« La carte de séjour mentionnée au premier alinéa est également délivrée de plein droit à l'étranger qui a exercé une activité professionnelle salariée saisonnière relevant du 3° de l'article L. 1242-2 du code du travail durant au moins huit mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois.

« Les périodes de séjour et l'activité professionnelle salariée exercée sous couvert des documents de séjour mentionnés aux articles L. 422-1, L. 421-34 et L. 521-7 sont pris en compte pour l'obtention de la carte de séjour mentionnée au premier alinéa.

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1, ».

II. - Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard deux ans après l'entrée de la présente loi, un rapport dressant le bilan de l'application du I du présent article.

Mme Mélanie Vogel.  - Nous voulons la régularisation de tous les travailleurs sans papiers, au-delà des seuls métiers en tension. La Poste emploie des centaines de travailleurs sans papiers via ses sous-traitants : ils ont pour consigne de se cacher quand l'inspection du travail arrive et se font virer par SMS.

La liste des métiers en tension est une usine à gaz. Soyons pragmatiques, régularisons tous les travailleurs. Plus de cotisations pour les retraites, moins de dumping social : tout ira mieux ! (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Ian Brossat applaudit également.)

M. le président.  - Amendement n°402 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section ... ainsi rédigée :

« Sous-section ...

« Régularisation des travailleurs

« Art. L. 421-4-1. - L'étranger en situation régulière ou irrégulière, qui a exercé une activité professionnelle salariée durant au moins six mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois, qui justifie par tout moyen de l'occupation de cet emploi sur le territoire français, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour portant la mention « régularisation des travailleurs » d'une durée de trois ans.

« Les périodes de séjour et l'activité professionnelle salariée exercée sous couvert des documents de séjour mentionnés aux articles L. 422-1, L. 421-34 et L. 521-7 sont pris en compte pour l'obtention de la carte de séjour mentionnée au premier alinéa. 

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1, ».

Mme Mélanie Vogel.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°404 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section... ainsi rédigée :

« Sous-section...

« Régularisation des travailleurs 

« Art. L. 421-4-1. - L'étranger en situation régulière ou irrégulière, qui a exercé une activité professionnelle en tant que travailleur indépendant au sens de l'article L. 631-1 du code de la Sécurité sociale durant au moins six mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois, qui justifie par tout moyen de l'occupation de cet emploi sur le territoire français, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour portant la mention « régularisation des travailleurs » d'une durée de trois ans.

« Les périodes de séjour et l'activité professionnelle salariée exercée sous couvert des documents de séjour mentionnés aux articles L. 422-1, L. 421-34 et L. 521-7 sont pris en compte pour l'obtention de la carte de séjour mentionnée au premier alinéa. 

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1, ».

Mme Mélanie Vogel.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°403 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section ... ainsi rédigée :

« Sous-section ...

« Régularisation des travailleurs

« Art. L. 421-4-1. - L'étranger en situation régulière ou irrégulière, qui a exercé une activité professionnelle salariée saisonnière relevant du 3° de l'article L. 1242-2 du code du travail, qui justifie par tout moyen de l'occupation de cet emploi sur le territoire français durant au moins six mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour portant la mention "régularisation des travailleurs" d'une durée de trois ans.

« Les périodes de séjour et l'activité professionnelle salariée exercée sous couvert des documents de séjour mentionnés aux articles L. 422-1, L. 421-34 et L. 521-7 sont pris en compte pour l'obtention de la carte de séjour mentionnée au premier alinéa. 

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1, ».

Mme Mélanie Vogel.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°170 rectifié, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section 4 ainsi rédigée :

« Sous-section 4 :

Régularisation pour motif professionnel

« Art. L. 421-4-1.  -  L'étranger occupant un emploi, et qui justifie par tout moyen d'une période de résidence ininterrompue, régulière ou non, d'au moins trois années en France et d'avoir exercé une activité professionnelle durant au moins six mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » lorsque l'activité professionnelle est exercée dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ou d'un contrat à durée déterminée d'une durée supérieure ou égale à douze mois, ou portant la mention « travailleur temporaire » lorsque l'activité professionnelle est exercée dans le cadre d'un contrat à durée déterminée d'une durée inférieure à douze mois.

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« Les dispositions de l'article L. 412-1 ne sont pas applicables pour la délivrance de cette carte.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après les mots : « aux articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1 ».

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°461 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV est complétée par une sous-section ainsi rédigée :

« Sous-section ...

« Étranger travaillant en France

« Art. L. 421-4-1. - L'étranger qui a exercé une activité professionnelle salariée durant au moins huit mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois et qui justifie d'une période de résidence ininterrompue d'au moins trois années en France se voit délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire portant la mention d'une durée d'un an. 

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« L'article L. 412-1 du présent code n'est pas applicable pour la délivrance de cette carte.

« Les périodes de séjour et l'activité professionnelle salariée exercée sous couvert des documents de séjour mentionnés aux articles L. 421-34, L. 422-1 et L. 521-7 ne sont pas prises en compte pour l'obtention d'une carte de séjour temporaire.

« L'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire ayant exercé une activité professionnelle dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée peut se voir délivrer, à l'expiration de ce titre, une carte de séjour pluriannuelle portant la mention ?salarié? sous réserve de remplir les conditions prévues à l'article L. 433-6.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1, ».

II.  -  Le I du présent article est applicable jusqu'au 31 décembre 2026.

Le présent article reste applicable aux titulaires de la carte de séjour mentionnée au I délivrée avant le 31 décembre 2026 et jusqu'à l'expiration de ce titre.

III.  -  Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois avant la date mentionnée au II du présent article, un rapport dressant le bilan de l'application du I.

M. Ian Brossat.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°239 rectifié, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre I du titre II du livre IV est complétée par une sous-section 4 ainsi rédigée :

« Sous-section 4

« Régularisation pour motif professionnel

« Art. L. 421-4-1.  -  L'étranger en situation régulière ou irrégulière, qui justifie par tout moyen de l'occupation d'un emploi sur le territoire français, figurant dans la liste des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement définie à l'article L. 414-13, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour portant la mention "salarié".

« La délivrance de cette carte entraîne celle de l'autorisation de travail mentionnée à l'article L. 5221-2 du code du travail, matérialisée par ladite carte.

« Les dispositions de l'article L. 412-1 ne sont pas applicables pour la délivrance de cette carte. » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article L. 436-4, après les mots : « aux articles », est insérée la référence : « L. 421-4-1 ».

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°330 rectifié bis, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

M. Guy Benarroche.  - Des députés des groupes Renaissance, Modem et Liot ont proposé les mêmes solutions que nous en vue d'aboutir à un consensus. Mais M. le ministre préfère discuter avec la droite. Cet amendement vise à restaurer l'automaticité de la régularisation des travailleurs sans papiers.

M. le président.  - Amendement identique n°370 rectifié bis, présenté par M. Laouedj, Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol et Roux, Mme Girardin, M. Grosvalet, Mme Pantel et M. Masset.

Mme Maryse Carrère.  - Des secteurs entiers vivent en partie du travail clandestin. Ces pratiques sont largement condamnées, mais le problème demeure. Nous proposons la création d'une carte de séjour « salarié » pour favoriser l'intégration par le travail et lutter contre l'exploitation d'une main-d'oeuvre sans protection.

La séance est suspendue quelques instants.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Les sous-amendements étant très nombreux, je formulerai un avis général. Vous nous reprochez de manquer de pragmatisme sur la réalité des étrangers irréguliers travaillant en France. Mais le pragmatisme n'est pas une politique (on ironise sur les travées du GEST) : il faut poser des principes. Nous ne reconnaissons pas le droit au séjour automatique des étrangers en France.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vous ne reconnaissez pas le droit au séjour des étrangers ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - L'irrégularité ne peut créer un droit à la régularisation. (Mme Mélanie Vogel s'exclame.) Cela dit, le pragmatisme impose de reconnaître que certaines situations peuvent être admises - non par principe, mais par exception. C'est pourquoi nous privilégions l'admission exceptionnelle au séjour.

Vous nous reprochez de durcir les conditions de la circulaire Valls ? Vous avez raison ! Pour nous, ce qui est exceptionnel ne doit pas être facilité, mais correctement encadré. Oui, nous voulons une admission exceptionnelle, plus dure.

Avis défavorable aux sous-amendements qui ne s'inscrivent pas dans cette vision, mais avis favorable au sous-amendement n°676 du Gouvernement, plus restrictif.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse sur l'amendement n°657.

J'émettrai des avis favorables à certains des amendements du groupe SER et du GEST.

Avec l'article 4 bis, on ne durcit pas la circulaire Valls : on crée une autre circulaire. (Exclamations amusées sur les travées du groupe SER et du GEST) Valls restera Valls. Il y aura une nouvelle circulaire, que vous pourrez appeler « Dussopt », par exemple...

Mme Audrey Linkenheld.  - Plutôt Retailleau !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Cette circulaire, dont vous précisez qu'elle n'est pas opposable - ce qui me paraît superfétatoire, mais soit - prévoira des critères de régularisation durcis par rapport à l'article 3.

Il existe trois types d'admission exceptionnelle au séjour (AES) : l'AES Valls, l'AES Compagnons d'Emmaüs, imaginée par Gérard Collomb, et une AES pour les mineurs apprentis. Avec cet amendement, vous en créez une quatrième.

Avis favorable aux sous-amendements nos669, 671, 665, 675 et 661, qui reprennent des mesures de l'article 3. Avis défavorable aux autres.

Quel que soit le résultat des votes, sagesse sur l'amendement n°657.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous voterons contre l'amendement n°657, mais pour tous les sous-amendements, hormis celui du Gouvernement.

Je parlais plus tôt d'histoire racontée aux enfants : personne n'est dupe, il fallait un accord, car M. Retailleau avait indiqué qu'il ne voterait l'article 3 à aucun prix. Pas de chance, le groupe UC lui trouvait un intérêt... Comment faire, quand la majorité au Sénat nécessite l'accord de vos deux groupes ? Vous vous êtes rencontrés, vous avez déjeuné, dîné, pris le thé, le café, et eu cette idée de génie : supprimer l'article 3 et le réécrire ailleurs, tout en l'assortissant de conditions plus strictes, avec une dose d'ordre public - cela plaît toujours, à droite - et de formules alambiquées.

Mais vous avez du mal à communiquer : chacun dit qu'il a gagné, y compris le Gouvernement. (Rires à gauche) Heureusement, l'Assemblée nationale fera le travail.

M. Stéphane Ravier.  - La gauche nous refuse le droit de voir l'immigration partout, mais, depuis deux articles, elle nous explique qu'il y a des immigrés partout : dans nos cuisines, nos champs, nos entreprises...

M. Roger Karoutchi.  - Pas faux...

M. Stéphane Ravier.  -  Il y en a aussi beaucoup dans les commissariats et les prisons ! (Rires sur certaines travées)

Mme Vogel ne s'en tient pas aux métiers en tension, mais appelle à régulariser tous les clandestins. Toujours plus !

L'amendement de la majorité sénatoriale, c'est la victoire de l'article 3 de M. Darmanin sur l'article 3 de la Constitution, selon lequel « la souveraineté nationale appartient au peuple, qui l'exerce par ses représentants ». Vous vous dessaisissez de votre responsabilité de législateur en laissant filer les régularisations massives par voie réglementaire. Le « cas par cas », on connaît : cela prendra plus longtemps, mais tout le monde sera régularisé. Mais la droite n'en portera pas la responsabilité...

D'autres solutions existent : hausse des salaires, RSA sous conditions, politique familiale et regain de natalité. (Perplexité amusée à gauche)

M. Olivier Henno.  - Oui, madame de La Gontrie, c'est un accord politique. Ce n'est pas un gros mot ! Cet accord révèle la solidité de la majorité sénatoriale. (Exclamations ironiques à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il a fallu ramer !

M. Olivier Henno.  - Nous avons agi avec prudence en choisissant le cas par le cas plutôt que la régularisation systématique. Ces deux dispositions ne se substituent pas à la circulaire Valls, elles s'y ajoutent.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est Top Chef !

M. Olivier Henno.  - On est un peu plus gentils avec les gentils.

Enfin, n'allez pas nous donner des leçons en matière d'accord politique, quand vous avez signé celui de la Nupes ! (Applaudissements et rires sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; Mme Laure Darcos applaudit également.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Jaloux !

M. Olivier Henno.  - Nous abordons ces questions avec prudence, car nous ne sommes plus dans les années 1980, à l'époque des pancartes « Touche pas à mon pote » ; le choc démographique est là.

Cet accord est équilibré et responsable. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Pierre Jean Rochette.  - Bravo !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Le tout, c'est d'y croire !

M. Guy Benarroche.  - Deux points m'inquiètent, si toutefois ils devaient prospérer.

D'abord, la suppression, inhumaine et contreproductive, de l'AME. Je ne comprends toujours pas l'avis de sagesse du Gouvernement. Cela restera un marqueur du texte issu du Sénat.

Ensuite, le recul sur la régularisation des travailleurs sans papiers, que nous voulions sans conditions et que le ministre réservait aux métiers en tension, est un abandon face à la droite. Mais y avait-il vraiment affrontement ? Plutôt de simples tensions fratricides.

M. le ministre s'était dit prêt au compromis, notamment concernant l'intégration des critères de respect des valeurs de la République. Au final, la commission des lois conserve le dispositif expérimental, transforme un droit en simple faculté, rétablit le pouvoir discrétionnaire du préfet et l'intervention de l'employeur, posteriori. On est loin d'avoir atteint un point d'équilibre.

M. Bruno Retailleau.  - Quand j'entends Olivier Henno, je me retrouve dans la majorité sénatoriale. (Marques d'ironie à gauche)

L'article créé par l'amendement n°657 n'a rien à voir avec l'article 3 du Gouvernement. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie se gausse.) Pour preuve, l'avis défavorable du Gouvernement sur la suppression de l'article 3 ; l'opposition farouche de la gauche à la suppression de l'article 3 - et son opposition à la proposition de la commission !

Dans Le Figaro, Sacha Houlié, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, annonce qu'il rétablira « le texte ambitieux du Gouvernement ». (Mme Cécile Cukierman s'exclame.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Vous finirez par ne pas voter votre propre amendement !

M. Bruno Retailleau.  - Oui, nous avons durci les conditions de la circulaire Valls et refusé tout droit automatique à la régularisation. Nous exigeons une durée de travail de huit à douze mois, nous prévoyons une instruction à 360 degrés sur le respect de l'ordre public et des principes de la République. Nous instaurons un dispositif anti-fraude : le préfet devra vérifier auprès de l'employeur la réalité du travail. J'espère d'ailleurs que des employeurs seront punis pour avoir fraudé. Enfin, l'expérimentation s'arrêtera en 2026. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Merci, monsieur Retailleau, d'être aussi favorable à l'article de régularisation. (M. Bruno Retailleau sourit.)

L'article 4 bis ne durcira pas la circulaire Valls, il en ajoute une autre.

M. Bruno Retailleau.  - Elle sera différente !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Aujourd'hui, une femme en situation irrégulière embauchée par un patron voyou ne peut être régularisée qu'au nom de Valls « famille », si elle a un enfant. On l'encourage à avoir des enfants pour être régularisée. Avec cette nouvelle circulaire, vous ne durcissez rien, puisqu'il n'y avait rien dans Valls à durcir !

Vous dites vouloir lutter contre les patrons voyous ? Soyez cohérents, votez le rétablissement de l'article 8, que la commission a supprimé. (On s'en amuse sur les travées du GEST.)

M. Thomas Dossus.  - La droite a pioché dans ses fonds de tiroir - et ceux du RN - pour aboutir à ce compromis politique.

Comment l'autorité compétente vérifiera-t-elle la compatibilité du mode de vie avec les principes de la République ? Quels outils de surveillance, quel respect de la vie privée, quelle preuve matérielle ? Les étrangers seront à la merci de l'arbitraire de l'État, qui pourra raconter n'importe quoi. On l'a vu au plus haut niveau de l'État, quand un ministre a accusé un footballeur d'une prétendue proximité avec les Frères musulmans, sans preuve aucune. (Le ministre s'impatiente, idem sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Laurent Burgoa.  - C'est fini ; penalty !

M. Éric Kerrouche.  - Cinquante nuances d'explications d'un accord politique... Autant M. Bonnecarrère était dans l'oraison funèbre, autant M. Henno a fait frétiller la brosse à reluire. (Sourires à gauche) Vous parlez de « main tremblante » tout en détruisant le texte au marteau.

Ce texte porte aussi sur le destin des étrangers. Le 30 mars dernier, l'Insee a publié une note factuelle, intitulée « Immigrés et descendants d'immigrés », qui fait mentir les fantasmes : le diplôme des enfants d'immigrés et leur répartition par catégorie socioprofessionnelle est très proche de la moyenne nationale ; l'ascension sociale est réelle, le brassage rapide ; la mixité des unions augmente au fil du temps, tout comme la sécularisation. Nous sommes loin de l'invasion !

Certes, il y a des catastrophes dans l'intégration, qu'il faut combattre - mais la tendance générale est loin d'être la caricature que certains décrivent. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Le sous-amendement n°658 n'est pas adopté, non plus que les sous-amendements nos674, 659, 670, 660, 672, 661, 675, 665, 671, 673, 666, et 668.

Le sous-amendement n°676 est adopté.

Le sous-amendement n°662 n'est pas adopté, non plus que les sous-amendements nos667, 663, 669 et 664.

À la demande des groupes Les Républicains et SER, l'amendement657, sous-amendé, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°28 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 345
Pour l'adoption 226
Contre 119

L'amendement n°657, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

Les amendements nos389 rectifié bis, 402 rectifié bis, 404 rectifié bis, 403 rectifié bis, 170 rectifié, 461 rectifié, 239 rectifié, 330 rectifié bis et 370 rectifié bis n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°468 rectifié ter, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 414-13 est ainsi rédigé :

« La liste de ces métiers est établie à l'échelle régionale après avis consultatif des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) de manière tripartite par l'autorité administrative et les organisations syndicales représentatives d'employeurs et de salariés. » 

Mme Michelle Gréaume.  - Nous demandons un rapport évaluant le nombre de personnes sans titre de séjour travaillant dans les métiers en tension, afin de mesurer l'impact des régularisations sur les secteurs concernés.

M. le président.  - Amendement n°222 rectifié ter, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l'article L. 414-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Après le mot : « établie » sont insérés les mots : « chaque année » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Cette liste peut être modifiée en cours d'année, à l'initiative de l'autorité administrative ou sur demande des organisations syndicales représentatives, en cas d'évolution rapide de la situation du marché de l'emploi. »

Mme Corinne Narassiguin.  - La liste des métiers en tension doit être actualisée chaque année, le marché de l'emploi évoluant rapidement.

La liste actuelle date d'avril 2021, et n'avait pas été actualisée depuis 2008. En novembre 2022, le ministre Dussopt avait annoncé des concertations avec les partenaires sociaux en vue d'une actualisation début 2023. Nous sommes en novembre...

M. le président.  - Amendement n°476 rectifié bis, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 414-13, après le mot : « établie », sont insérés les mots : « et actualisée au moins une fois par an ». 

M. Olivier Bitz.  - Nous demandons également une mise à jour annuelle de la liste, répondant en cela à une invitation du Conseil d'État.

M. le président.  - Amendement n°393 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 414-13 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « Au moins tous les six mois, l'autorité administrative procède, en accord avec les partenaires sociaux, à une évaluation visant à identifier des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement qui sont, le cas échéant, ajoutées à la liste de ces métiers et zones géographiques. »

Mme Mélanie Vogel.  - Défendu.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - C'est un vrai sujet, si nous voulons créer un dispositif opérationnel. Avis favorable à l'amendement n°476 rectifié bis, qui est le plus adapté. Avis défavorable aux autres.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°468 rectifié ter n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°222 rectifié ter.

L'amendement n°476 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

L'amendement n°393 rectifié bis n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°427 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 423-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 423-18-... ainsi rédigé : 

« Art. 423-18-....  -  L'étranger qui justifie par tout moyen être dépourvu d'une protection internationale, qui ne peut pas être renvoyé dans son pays de nationalité ou d'origine pour des raisons humanitaires et risquant la mort, la torture ou tout autre traitement inhumain ou dégradant en cas de renvoi dans son pays de nationalité ou d'origine, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. »

Mme Mélanie Vogel.  - L'article 3 devait résoudre une situation bien connue du ministre : celle des quelques milliers de personnes qui ne sont ni régularisables ni expulsables. C'est le cas d'étudiantes afghanes, par exemple, qui sont dans des limbes juridiques. La France les maintient dans la clandestinité, alors qu'elle ne peut les expulser. C'est irrationnel.

D'autres pays européens plus pragmatiques, comme l'Allemagne, ont trouvé le moyen de leur donner accès au marché du travail. Cet amendement tend à créer un titre de séjour pour ces personnes. J'aimerais connaître l'avis du Gouvernement sur ce problème.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Madame Vogel, je ne vous reproche pas d'être pragmatique. L'AES s'applique aussi pour des raisons humanitaires. Une disposition particulière n'est pas nécessaire. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°427 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°224 rectifié, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Lorsque l'étranger sollicite l'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail, il ne peut être requis aucune pièce justificative nécessitant le concours de son employeur. »

M. Jérôme Durain.  - Cet amendement garantit que l'étranger sans titre qui travaille et souhaite engager une procédure de régularisation puisse le faire sans être tributaire de son employeur.

M. le président.  - Amendement identique n°470 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Mme Michelle Gréaume.  - Nous mettons fin à la relation de subordination entre employé et employeur. La circulaire Valls impose de remplir un Cerfa. Or des employeurs, un peu voyous, refusent de remplir ou signer ce document.

Les salariés de l'entreprise d'intérim RHTT, située dans le 10e arrondissement de Paris et en Seine-et-Marne, font grève depuis trois semaines pour obtenir le formulaire. Voilà la réalité du terrain.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Les situations que vous évoquez ont été réglées par l'amendement n°657 que nous avons adopté. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos224 rectifié et 470 rectifié ne sont pas adoptés.

L'amendement n°262 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°176 rectifié, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre IV du code du travail est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier est complété par une section ainsi rédigée :

« Section... :

« Licenciement d'un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. 

« Art. L. 2411-....  -  Le licenciement d'un salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 8251-1 et ayant demandé la délivrance de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 421-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspection du travail.

« Le délai de protection court à compter du dépôt de la demande de carte de séjour auprès de la préfecture et jusqu'à six mois après la réponse de celle-ci. » ;

2° Le chapitre II est complété par une section ainsi rédigée :

« Section... :

« Étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. 

« Art. L. 2412-....  -  La rupture du contrat de travail à durée déterminée d'un salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 8251-1 et ayant demandé la délivrance de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 421-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspection du travail.

« Le délai de protection court à compter du dépôt de la demande de carte de séjour auprès de la préfecture et jusqu'à six mois après la réponse de celle-ci. »

M. Sébastien Fagnen.  - Nous entendons protéger l'étranger salarié sans titre qui demanderait sa régularisation pour motif professionnel contre d'éventuelles mesures de rétorsion de la part de son employeur. Le temps de la procédure de régularisation, il doit se voir accordé le statut de salarié protégé.

M. le président.  - Amendement identique n°439 rectifié, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Mme Marianne Margaté.  - Un employeur peu scrupuleux qui apprendrait la démarche de son employé pour être régularisé pourrait décider de le licencier. Il faut tout faire pour mettre fin aux situations de clandestinité.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Ces amendements se fondent sur un dispositif supprimé. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

Mme Cécile Cukierman.  - Inévitablement, ces amendements, rédigés il y a quelques jours au vu du calendrier contraint, se rapportent à des articles qui ont depuis été supprimés ou réécrits. Pour autant, nous ne pouvons balayer cette question d'un revers de manche.

J'ai l'impression de revivre les débats du XIXe siècle entre matérialistes et idéalistes... Pascal Savoldelli l'a dit, il existe une forme de conflit social invisible. Ces personnes existent et sont parfois menacées. J'espère que leur situation sera prise en compte au cours de la navette.

Les amendements identiques nos176 rectifié et 439 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°616 rectifié bis, présenté par M. Sautarel, Mme Lavarde, MM. Burgoa, Paccaud et Bouchet, Mme Petrus, MM. Panunzi et Bas, Mme Dumont, MM. Anglars, Belin et Rapin, Mme Bellurot, MM. Perrin, Rietmann et Genet, Mmes Drexler, Bonfanti-Dossat et Imbert et MM. de Legge et Gremillet.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par trois alinéas ainsi rédigés : 

« Chaque année, au plus tard le 1er novembre de l'année précédente, le Parlement vote les prévisions quant au nombre de travailleurs étrangers qui seront admis pendant la prochaine année. Ces futurs travailleurs étrangers ont vocation à travailler dans les domaines dits en tension dont la liste des métiers et des zones géographiques caractérisées par des difficultés de recrutement figure à l'article L. 414-13.

« En cas de situation exceptionnelle, le Parlement peut revoir les prévisions votées en les adaptant à la situation.

« Un décret pris en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article. »

M. Stéphane Sautarel.  - Notre pays doit se projeter pour maîtriser l'immigration économique. Outre les stocks, il convient de traiter les flux. C'est l'objet de cet amendement. Le Parlement déterminera chaque année, avant le 1er novembre, le nombre de travailleurs étrangers qui seront admis l'année suivante afin de travailler dans les métiers en tension.

M. le président.  - Amendement n°617 rectifié bis, présenté par MM. Sautarel, Paccaud et Bouchet, Mme Petrus, MM. Panunzi et Bas, Mme Dumont, MM. Anglars, Belin et Rapin, Mme Bellurot, MM. Perrin, Rietmann et Genet, Mmes Drexler et Imbert et MM. de Legge et Gremillet.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet un rapport au Parlement dans l'année qui suit la publication de la présente loi sur la possibilité de mise en place d'un vote par le Parlement sur les prévisions quant au nombre de travailleurs étrangers qui seront admis pendant la prochaine année. Le rapport évalue notamment la faisabilité, les modalités d'un tel vote ainsi que les conditions qui pourraient être exigées.

M. Stéphane Sautarel.  - Amendement de repli, pour demander un rapport sur la possibilité d'un tel vote.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis positif, mais défavorable à l'amendement n°616 rectifié bis. Dans l'article 1er A, nous avons prévu qu'un débat aurait lieu chaque année pour déterminer la politique migratoire. Retrait, sinon avis défavorable.

Idem pour l'amendement n°617 rectifié bis.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Mêmes avis.

M. Stéphane Sautarel.  - Je sais que nous avons adopté une mesure similaire, mais je voulais un débat spécifique sur l'immigration économique. Je retire toutefois mes amendements.

Les amendements nos616 rectifié bis et 617 rectifié bis sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°533, présenté par M. Ravier.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 436-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

a) Le taux : « 55 % » est remplacé par le taux : « 75 % » ;

b) Le nombre : « 2,5 » est remplacé par le nombre : « 4,5 » ;

2° Aux cinquième et septième alinéas, les montants : « 50 euros » et « 300 euros » sont respectivement remplacés par les montants : « 100 euros » et « 1 000 euros ».

M. Stéphane Ravier.  - Cet amendement vise à augmenter substantiellement les taxes sur l'embauche des travailleurs étrangers, alors que le taux de chômage est de 7,2 %.

Cette taxe, en limitant l'appel d'air, bénéficie aux Français autant qu'aux employeurs. Les emplois saisonniers ne seraient pas concernés.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Nous ne sommes pas opposés au travail des étrangers en situation régulière. Tant d'entreprises recourent à cette main-d'oeuvre ! Encourageons la régularité du travail, plutôt que de la décourager.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°533 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°575 rectifié, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Belin, Duffourg, Klinger et Bouchet, Mmes V. Boyer et Belrhiti, MM. Reynaud, Laugier, Cambier et Bas, Mme Berthet, MM. Genet et Favreau, Mmes Jacques et Bellurot, MM. Karoutchi, Somon, Tabarot, Gremillet et Menonville, Mmes Lopez et Canayer et M. Khalifé.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au troisième alinéa de l'article L. 5221-7 du code du travail, les mots : « peut échanger » sont remplacés par le mot : « sollicite ».

M. Christian Klinger.  - Nous souhaitons renforcer les exigences en matière de délivrance de l'autorisation de travail, nécessaire à l'octroi du titre de séjour mention « salarié » pour les étrangers souhaitant travailler en France.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable : en 2022, 240 000 demandes d'autorisation ont été examinées ; 4 000 ont été refusées cette année. Le dispositif est efficace. Ne créons pas une charge disproportionnée pour l'administration.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°575 rectifié est retiré.

ARTICLE 5 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°587, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le premier alinéa de l'article L. 526-22 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le statut d'entrepreneur individuel n'est pas accessible aux étrangers ressortissants de pays non membres de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ne disposant pas d'un titre de séjour les autorisant à exercer sous ce statut. »

M. Gérald Darmanin, ministre.  - J'ai déjà défendu cet article 5, supprimé par votre commission des lois. Il est aujourd'hui possible de créer une autoentreprise sans vérifier la régularité du séjour du demandeur, ce qui constitue une filière d'immigration irrégulière. Ainsi, un travailleur des plateformes, qui paie des impôts et des cotisations sociales, sera à terme régularisable.

Certes, le Conseil d'État a estimé qu'une partie du dispositif était d'ordre réglementaire, mais intervenir au niveau législatif aurait du poids. Je demanderai le retrait des amendements nos128 et 368 rectifié, car j'estime que la rédaction du Gouvernement est meilleure.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - L'amendement n°587 du Gouvernement reprend une observation de notre rapport, ce dont je me félicite - nous avons la même philosophie. L'avis du Conseil d'État révélait surtout que ces amendements étaient satisfaits. Mais nous sommes d'accord sur l'objectif. Avis défavorable.

M. le président.  - Amendement n°128, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le premier alinéa de l'article L. 526-22 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le statut d'entrepreneur individuel n'est pas accessible aux étrangers ressortissants de pays non membres de l'Union européenne ne disposant pas d'un titre de séjour les autorisant à exercer cette activité professionnelle. »

M. Christopher Szczurek.  - Pour limiter les abus, notamment dans le secteur de la livraison, inscrivons dans le code du commerce l'obligation de présenter des papiers en règle pour créer son autoentreprise.

M. le président.  - Amendement identique n°368 rectifié, présenté par MM. Duffourg et Verzelen, Mme Lermytte, M. Hingray, Mme P. Martin et MM. Wattebled et Gremillet.

Mme Pauline Martin.  - Cet amendement conditionne la création d'une autoentreprise à la présentation de titres en cours de validité.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable... mais si vous ne voulez vraiment pas le suivre, je vous invite à préférer l'amendement du Gouvernement, mieux rédigé. (Sourires)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je ne saurais mieux dire. (Rires)

Mme Audrey Linkenheld.  - Quelle entente !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Et oui, ça peut arriver !

M. Bruno Retailleau.  - J'ai rarement entendu un avis défavorable aussi favorable. Partisan de la fermeté, ce que propose le ministre me semble de bon aloi. J'y suis favorable. Peut-être pourrions-nous nous inscrire dans un même élan, chers collègues UC de la majorité sénatoriale ?

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Souhaitez-vous une suspension de séance, monsieur Retailleau ? (Sourires)

Mme Audrey Linkenheld.  - Une nouvelle circulaire Retailleau ?

M. Stéphane Ravier.  - L'ubérisation génère du moins-disant social, suscitant des trappes à bas salaire, véritable niche pour les étrangers.

Selon Capital, deux tiers des livreurs de plateformes sont des clandestins. Le secteur n'est pas régulé. Loin d'une société de progrès, ce phénomène donne l'impression d'une société en voie de tiers-mondisation. Les plus petits commerçants meurent pendant que nous ouvrons la porte au livreur étranger, puis lui refermons la porte au nez. (Mme Cécile Cukierman marque sa vive désapprobation.) Quel cynisme : l'esclavage s'installe sur les pistes cyclables et dans nos cages d'escalier.

Sans les étrangers, « vous êtes dans la merde pour faire le ménage », disait Éric Dupond-Moretti... Quelle poésie ! Comme disait Ruy Blas : « Bon appétit messieurs ! Ô ministres intègres ! »

Mme Cécile Cukierman.  - Chacun est bien sûr libre de ses propos, mais ce déversement de haine ne fait pas avancer le débat. Monsieur Ravier, vous avez raison : l'ubérisation de la société est une catastrophe, d'abord pour ceux qui travaillent pour ces plateformes, nouveaux exploiteurs du XXIe siècle.

Qui fait vivre ces plateformes ? Ces Français, nés en France, qui ont les moyens, vivent dans les métropoles, voire ailleurs - car l'ubérisation s'étend - et qui alimentent cette nébuleuse. Qui est responsable de la situation ? Je ne sais pas... mais, monsieur Ravier, prenez les choses avec un peu plus de sérénité. (MM. Christopher Szczurek et Stéphane Ravier protestent.)

L'amendement n°587 est adopté et l'article 5 est rétabli.

Les amendements identiques nos128 et 368 rectifié n'ont plus d'objet.

APRÈS L'ARTICLE 5 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°465, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'impact de l'octroi d'un titre de séjour pluriannuel aux travailleurs des professions médicales réglementées qui exerce en France.

Mme Cécile Cukierman.  - L'hôpital public ne pourrait fonctionner sans les 5 000 praticiens diplômés hors Union européenne (Padhue). Pourtant, les conditions de leur régularisation sont particulièrement drastiques. Comment ne pas désespérer de la lenteur du traitement des dossiers de ces praticiens ? Ce qui est vrai pour l'hôpital l'est aussi pour la médecine générale. Il faut lever les blocages.

J'ai le souvenir d'un amendement transpartisan dans le PLFSS 2018 ou 2019, qui allait dans ce sens - même s'il n'avait pas prospéré à l'Assemblée nationale. Ne sacrifions pas la santé des Français.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Il s'agit d'une demande de rapport : avis défavorable.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.  - Avis défavorable. C'est tout l'objet de l'article 7, où nous prévoyons un suivi au cas par cas.

L'amendement n°465 est retiré.

ARTICLE 6

M. Marc Laménie .  - Silencieux jusqu'à présent, j'ai écouté nos collègues. Je salue le travail de la commission. Les passeports talents, destinés aux créateurs d'entreprises, aux porteurs de projets innovants et aux chercheurs, méritent d'être renforcés. Un rapport de François-Noël Buffet de septembre 2015 recensait 10 000 passeports talents. 12 308 passeports talents ont été délivrés en 2021. J'irai dans le sens de la commission sur cet article 6.

M. Laurent Burgoa.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°629, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 13

Supprimer les mots :

À l'article L. 412-4, au 7° de l'article L. 413-5 et

II.  -  Alinéa 29

Compléter cet alinéa par les mots :

et L. 421-19

III.  -  Après l'alinéa 47

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

- la référence : « L. 421-13, » est supprimée ;

IV.  -  Alinéa 50

Remplacer la référence : 

3° 

par les mots :

premier alinéa

V.  -  Alinéa 58 

Remplacer les mots :

, 35° et 52° 

par les mots :

et 35° 

VI.  -  Alinéa 64

Supprimer les mots :

À l'article

et les mots :

Au 3° de l'article

L'amendement de coordination n°629, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 6, modifié, est adopté.

ARTICLE 7

M. le président.  - Amendement n°129, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart.

Supprimer cet article.

M. Christopher Szczurek.  - Nous demandons la suppression de l'article 7, qui crée une carte de séjour pluriannuelle « talent - professions médicales et de la pharmacie ». Il n'est pas moralement acceptable de dépouiller les pays du Sud, en particulier africains, de leurs médecins : ce ne sont pas à eux de payer les errements des gouvernements Macron, socialistes et LR. (Mme Audrey Linkenheld ironise.)

M. le président.  - Amendement identique n°534 rectifié bis, présenté par M. Ravier.

M. Stéphane Ravier.  - Votre manière de faire de la politique est formidable ! En 2018, Emmanuel Macron présente le grand plan « Ma santé 2022 » ; en 2020, c'est le Ségur de la santé ; en 2021, le plan « innovation santé 2030 » ; en 2022, ce sont les premiers voeux pour la santé... En 2023, le problème n'est toujours pas réglé, mais dès qu'une de vos politiques a capoté, vous présentez la solution miracle : l'immigration ! Et tant pis pour le risque de barrière de la langue et de non-partage de nos valeurs. (Mme Cécile Cukierman proteste.)

Vous avez supprimé le numerus clausus pour faire le numerus apertus, mais les quotas sont toujours trop restreints. Nous manquons de lits pour former et de médecins formateurs, qui sont partis à la retraite. Il faut regarder en face cette grosse tache sur votre tableau et non la recouvrir d'une couche d'immigration supplémentaire.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Ce sujet est complexe. Effectivement, dépouiller certains pays de leurs médecins est un risque. Ces professionnels doivent passer des épreuves de vérification des connaissances (EVC) avant de pouvoir exercer ; mais que font-ils en cas d'échec ? Ils restent en France. La commission propose des recrutements en fonction de la qualité des praticiens : après leur arrivée au titre du droit commun, ces personnes obtiennent une carte pluriannuelle si elles réussissent l'examen. Avis défavorable à ces amendements de suppression.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Même avis. Comme l'a dit la rapporteure, dans un contexte de forte tension, les Padhue contribuent pleinement à l'offre de soins sur le territoire. Nombre d'entre vous nous demandent d'accélérer la procédure d'habilitation.

Ce projet de loi était l'occasion de créer un nouveau titre pour coordonner le droit d'exercice de treize mois, le renouvellement et la carte pluriannuelle de quatre ans. (M. Stéphane Ravier proteste.)

Les amendements identiques nos129 et 534 rectifié bis ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°498 rectifié bis, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  La sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complétée par un article L. 421-13-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 421-13-1.  -  L'étranger qui occupe un emploi pour une durée égale ou supérieure à un an au sein d'un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social au titre d'une des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-1 du code de la santé publique, titulaire de l'attestation prévue aux articles L. 4111-2-1 et L. 4221-12-1 du même code et justifiant du respect d'un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d'État, se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention ?talent-professions médicales et de la pharmacie? d'une durée maximale de treize mois.

« L'étranger qui bénéficie d'une décision d'affectation, d'une attestation permettant un exercice temporaire ou d'une autorisation d'exercer mentionnées aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du même code, qui occupe un emploi et justifie du respect du seuil de rémunération tels que définis au premier alinéa se voit délivrer une carte pluriannuelle portant la mention ?talent  -  profession médicale et de la pharmacie? d'une durée maximale de 4 ans.

« Les cartes mentionnées aux premier et deuxième alinéas permettent l'exercice de l'activité professionnelle ayant justifié leur délivrance. »

II.  -  Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 4111-2, est inséré un article L. 4111-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 4111-2-1.  -  Par dérogation aux dispositions de l'article L. 4111-1, l'autorité compétente peut, après avis d'une commission comprenant notamment des professionnels de santé, délivrer une attestation permettant un exercice provisoire dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social à des ressortissants d'un État autre que ceux membres de l'Union européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen, titulaires d'un titre de formation délivré par un État tiers et permettant l'exercice de l'une des professions visées à l'article L. 4111-1 dans le pays d'obtention de ce diplôme, qui exercent cette profession, établissent leur expérience professionnelle par tout moyen et disposent d'un niveau de connaissance de la langue française suffisant pour exercer leur activité en France. Ces professionnels s'engagent également à passer les épreuves de vérification des connaissances mentionnées à l'article L. 4111-2.

« La durée de validité de cette attestation ne peut excéder treize mois, renouvelable une fois.

« Un décret en Conseil d'État définit les conditions d'application du présent article, notamment :

« a) Les délais, conditions, composition et modalités de dépôt des dossiers de demande d'attestation ;

« b) La composition et le fonctionnement de la commission mentionnée au premier alinéa ;

« c) Les établissements de santé, sociaux ou médico-sociaux au sein desquels ces professionnels peuvent exercer ;

« d) Les modalités de mise en oeuvre, de suivi et de nouvellement de ces attestions. » ;

2° Après l'article L. 4221-12, est inséré un article L. 4221-12-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 4221-12-1.  -  Par dérogation aux dispositions de l'article L. 4221-1, l'autorité compétente peut, après avis d'une commission comprenant notamment des professionnels de santé, délivrer une attestation permettant un exercice provisoire dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social à des ressortissants d'un État autre que ceux membres de l'Union européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen, titulaires d'un titre de formation délivré par un État tiers et permettant l'exercice de la profession visée à l'article L. 4221-1 dans le pays d'obtention de ce diplôme, qui exercent cette profession, établissent leur expérience professionnelle par tout moyen et disposent d'un niveau de connaissance de la langue française suffisant pour exercer leur activité en France. Ces professionnels s'engagent également à passer les épreuves de vérification des connaissances mentionnées à l'article L. 4221-12.

« La durée de validité de cette attestation ne peut excéder treize mois, renouvelable une fois.

« Un décret en Conseil d'État définit les conditions d'application du présent article, notamment :

« a) Les délais, conditions, composition et modalités de dépôt des dossiers de demande d'attestation ;

« b) La composition et le fonctionnement de la commission mentionnée au premier alinéa ;

« c) Les établissements de santé, sociaux ou médico-sociaux au sein desquels ces professionnels peuvent exercer ;

« d) Les modalités de mise en oeuvre, de suivi et de renouvellement de ces attestions. » ;

3° L'article L. 4111-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « Le ministre chargé de la santé ou, sur délégation, le directeur général du Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « L'autorité compétente » et les mots : « comprenant notamment des délégués des conseils nationaux des ordres et des organisations nationales des professions intéressées, choisis par ces organismes » sont remplacés par les mots : « composée notamment de professionnels de santé » ;

b) Aux sixième, septième et huitième alinéas du I, les mots : « du ministre chargé de la santé ou, sur délégation, du directeur général du Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « de l'autorité compétente » ;

c) Au premier alinéa du I bis, les mots : « Le ministre chargé de la santé ou, sur délégation, le directeur général du centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « L'autorité compétente » ;

4° L'article L. 4221-12 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « Le ministre chargé de la santé ou, sur délégation, le directeur général du Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « L'autorité compétente » ;

b) Au sixième alinéa, les mots : « du ministre chargé de la santé ou, sur délégation, du directeur général du Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « de l'autorité compétente ».

M. Olivier Bitz.  - Lors de l'examen de la proposition de loi Valletoux, nous avons réaffirmé que les Padhue étaient nécessaires au bon fonctionnement de notre système de santé. Cet amendement vise à rétablir l'octroi d'une carte de treize mois pour les titulaires d'une attestation d'exercice provisoire qui s'engagent à se présenter aux EVC. La commission des affaires sociales y était plutôt favorable sur le fond. L'étude d'impact indique que seuls 400 Padhue seraient concernés - c'est peu, mais pas rien pour l'offre de soin.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Vous proposez des conditions avantageuses à ces praticiens, qui pourraient venir directement avec leur famille. Mais qu'advient-il s'ils échouent aux EVC ? Nous préférons rester sur notre position, c'est-à-dire l'immigration de droit commun : les praticiens passent les EVC, puis ils obtiennent leur titre de séjour.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis favorable. Cette carte de treize mois permet de contrôler le niveau des praticiens. Ce que vous proposez, madame la rapporteure, ne le permet pas.

L'amendement n°498 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°362, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

I.  -  Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 421-13-1.  -  L'étranger qui occupe, dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social, un emploi pour une durée égale ou supérieure à trois mois au titre d'une des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-1 du code de la santé publique, qui est titulaire de l'attestation prévue aux articles L. 4111-2-1 et L. 4221-12-1 ou des dispositions dérogatoires liées aux territoires mentionnés à l'article L. 4131-5 du même code et dont la rémunération est supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d'État se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent-professions médicales et de la pharmacie » d'une durée maximale de treize mois, renouvelable.

II.  -  Alinéa 2

1° Supprimer la référence :

Art. L. 421-13-1.  -  

2° Remplacer les mots :

code de la santé publique

par les mots :

du même code

3° Supprimer la quatrième occurrence du mot :

d'une

4° Remplacer les mots :

du même code, et justifie du respect d'un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d'État

par les mots :

dudit code et dont la rémunération est supérieure au seuil prévu au premier alinéa du présent article

et les mots :

profession médicale

par les mots :

professions médicales

III.  -  Alinéa 3

Remplacer les mots :

La carte mentionnée au premier alinéa du présent article permet

par les mots :

Les cartes mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article permettent

et le mot :

sa

par le mot :

leur

Mme Marianne Margaté.  - La proposition de loi Valletoux prévoyait la création de deux cartes de séjour pour les Padhue. La majorité sénatoriale l'a supprimée au prétexte que le dispositif trouverait mieux sa place dans ce projet de loi.

Selon nous, le débat doit porter davantage sur l'accélération du processus d'attribution des cartes de séjour pluriannuelles pour les Padhue plutôt que sur les contrôles. N'ajoutons pas de la précarité administrative à leur précarité professionnelle. Nous proposons donc d'abaisser à trois mois l'occupation d'un emploi dans un établissement de santé pour bénéficier d'un passeport « talent - professions médicales et de pharmacie ».

M. le président.  - Amendement n°505 rectifié, présenté par Mme Souyris, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

et justifie du respect d'un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d'État, 

Mme Anne Souyris.  - Craint-on d'avoir trop de soignants ? La qualification est le critère essentiel devant primer dans la carte « talent - professions médicales et de la pharmacie ». Ces professionnels répondent à des besoins de santé publique importants et réduisent les inégalités dans l'accès aux soins. Imposer un seuil de rémunération brouillerait le débat : concentrons-nous sur la qualification médicale et la qualité des soins.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je ne réexpliquerai pas la position de la commission : si nous avons des buts communs, nous ne sommes pas d'accord sur les moyens : avis défavorable.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis défavorable. Bien sûr, nous soutenons le principe de la carte de séjour « talent » mais ces deux amendements ne nous semblent pas nécessaires.

Sur la durée du contrat de travail, nous estimons que le Padhue doit s'engager pour au moins une année pour obtenir la carte de séjour « talent ». (Mme Cécile Cukierman proteste.)

Les Padhue ne doivent pas bénéficier pas d'une procédure dérogatoire, y compris outre-mer. (Mme Cécile Cukierman proteste.)

L'amendement n°362 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°505 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié ter, présenté par Mme Eustache-Brinio, M. Bazin, Mme Noël, M. Reichardt, Mmes Di Folco et Berthet, MM. Frassa, Paccaud et Daubresse, Mmes V. Boyer, Chain-Larché, Joseph et Demas, M. Savin, Mmes Micouleau et Dumont, M. E. Blanc, Mme Belrhiti, MM. Brisson, Saury et Belin, Mme M. Mercier, MM. Bouchet et Pointereau, Mmes Deseyne et Lassarade, M. Duplomb, Mmes Lopez et Bellurot, MM. Cuypers, Perrin, Burgoa, Piednoir et J.P. Vogel, Mmes Aeschlimann, F. Gerbaud et Josende, MM. Anglars, Genet et Bas, Mme Drexler, MM. Chatillon, de Nicolaÿ, Grosperrin et Szpiner et Mme Imbert.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

sous réserve de la signature de la charte des valeurs de la République et du principe de laïcité

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Les médecins, dentistes, sages-femmes et pharmaciens étrangers doivent être tenus de signer la charte des valeurs de la République et du principe de laïcité. Cette mesure a été proposée par Patrick Pelloux, qu'on ne peut taxer d'être de droite, dans son rapport sur la radicalisation au sein des établissements de santé. Le ministre de l'intérieur étant très attaché au respect de cette charte, je ne doute pas du soutien du Gouvernement.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le rapport auquel vous faites référence est essentiel sur ce problème bien réel dans les établissements hospitaliers. Nous avons prévu d'y répondre à l'article 13, mais la commission a émis un avis de sagesse sur cet amendement.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - L'ensemble du Gouvernement est sensible au respect des principes de la République. Nous y reviendrons à l'article 13. Sagesse.

Mme Cécile Cukierman.  - Je vais faire du « en même temps » à 180 degrés... Madame Eustache-Brinio, nous ne pouvons que nous rejoindre quand vous défendez Patrick Pelloux ! (Exclamations amusées à droite) Oui, il faut nous préserver de ceux qui voudraient porter atteinte aux valeurs de la République, mais des milliers de professionnels sont bien intentionnés. Je pense aux médecins cubains, qui travaillent très bien dans les outre-mer ; les choses sont plus compliquées en métropole. Je voterai cet amendement, mais ne laissons pas croire que, sauf une infime minorité, les médecins étrangers seraient une menace.

L'amendement n°4 rectifié ter est adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 7

M. le président.  - Amendement n°58 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Savin, Mme Garnier, M. Cadec, Mme P. Martin, MM. Genet, Sido et Klinger, Mmes Josende, Goy-Chavent et Devésa, M. Gremillet et Mme Aeschlimann.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 143 du code civil, il est inséré un article 143-... ainsi rédigé :

« Art. 143-.... - Le mariage ne peut être contracté si l'un des futurs époux séjourne irrégulièrement sur le territoire français. »

Mme Valérie Boyer.  - Cet amendement est le premier d'une série qui porte sur les mariages. Face aux achats de mariage ou aux mariages frauduleux, les maires sont plongés dans des situations absurdes. M. Henno a posé une excellente question sur le sujet cet après-midi. En France, nul besoin de se marier pour s'aimer...

M. Gérald Darmanin, ministre.  - C'est la droite qui le dit !

Mme Valérie Boyer.  - Cet amendement d'appel vise à interdire le mariage si l'un des futurs époux séjourne de manière irrégulière sur notre territoire. Je sais parfaitement que la Cour européenne des droits de l'homme n'est pas d'accord avec moi (On se gausse sur les travées du GEST), mais ce débat est nécessaire.

M. le président.  - Amendement identique n°257 rectifié ter, présenté par M. S. Demilly, Mme Antoine, M. J.M. Arnaud, Mme Billon, MM. Bleunven, Bonneau, Cambier, Capo-Canellas, Chasseing et Courtial, Mme de La Provôté, MM. Delahaye et Dhersin, Mme Doineau, M. Fargeot, Mme Florennes, M. Folliot, Mmes Gacquerre, Gatel et N. Goulet, M. Guerriau, Mme Guidez, MM. Henno et L. Hervé, Mme Herzog, M. Hingray, Mme Jacquemet, MM. Kern, Lafon, Laugier, Lefèvre et Levi, Mme Loisier, MM. Longeot, P. Martin, Maurey, Menonville et Michallet, Mmes Nédélec et Noël, MM. Pellevat et Pillefer, Mme Puissat, MM. Reynaud et Rochette, Mme Romagny, M. Saury, Mme Sollogoub et MM. Vanlerenberghe, Verzelen, Wattebled, Chauvet, Lemoyne et Duffourg.

M. Olivier Henno.  - Les maires subissent une pression croissante lors des mariages de complaisance. L'objet de cet amendement de M. Demilly est de les aider.

M. le président.  - Amendement n°552 rectifié ter, présenté par M. Ravier.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 147 du code civil, il est inséré un article 147-... ainsi rédigé :

« Art. 147-.... - On ne peut contracter mariage si l'un des futurs époux séjourne irrégulièrement en France. »

M. Stéphane Ravier.  - Un maire est poursuivi pour avoir refusé de marier un étranger algérien sous OQTF. On punit le maire qui fait son travail ! Ce clandestin a fini par être expulsé, grâce à l'alerte du maire.

L'irrégularité ne doit pas servir de passe-droit. Le Sénat, s'il représente encore les territoires, devrait voter cet amendement de protection des maires. La droite, si elle est encore de droite, devrait voter cet amendement protégeant le cadre du mariage.

M. le président.  - Amendement n°258 rectifié bis, présenté par MM. S. Demilly et Anglars, Mme Antoine, M. J.M. Arnaud, Mme Billon, MM. Bleunven, Bonneau, Cadec, Cambier, Capo-Canellas, Chasseing et Courtial, Mme de La Provôté, MM. Delahaye et Dhersin, Mme Doineau, M. Fargeot, Mme Florennes, M. Folliot, Mmes Gacquerre, Gatel et N. Goulet, M. Guerriau, Mme Guidez, MM. Henno et L. Hervé, Mme Herzog, M. Hingray, Mme Jacquemet, MM. Kern, Lafon, Laugier et Levi, Mme Loisier, MM. Longeot et P. Martin, Mme P. Martin, MM. Maurey, Menonville et Michallet, Mmes Nédélec et Noël, MM. Pellevat et Pillefer, Mme Puissat, MM. Reynaud et Rochette, Mme Romagny, MM. Saury et Savin, Mme Sollogoub et MM. Vanlerenberghe, Verzelen, Wattebled, Chauvet, Lemoyne, Duffourg et Gremillet.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 165 du code civil est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Toutefois, l'officier de l'état civil qui tient cette qualité de l'article L. 2122-32 du code général des collectivités territoriales n'est jamais tenu en conscience de célébrer un mariage si l'un des futurs époux séjourne irrégulièrement sur le territoire français. Lorsque tous les officiers de l'état civil d'une commune refusent de célébrer un mariage car l'un des futurs époux séjourne irrégulièrement sur le territoire français, le maire de la commune en informe le procureur de la République et le représentant de l'État dans le département, auxquels il appartient de désigner un délégué spécial qui procèdera à la célébration du mariage.

« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article, notamment les modalités de désignation conjointe, par le procureur de la République et le représentant de l'État dans le département, des délégués spéciaux volontaires mentionnés à l'alinéa précédent qui ont la qualité de magistrat ou de fonctionnaire de l'État. »

M. Olivier Henno.  - Il s'agit d'un amendement de repli.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Mme Boyer a bien résumé la situation. Ce problème est réel et choquant, mais ne peut être résolu de cette façon - au-delà de la CEDH, le Conseil Constitutionnel protège le principe de liberté personnelle, dont relève la liberté de mariage. Nous proposerons un chemin, mais la voie est étroite. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Tentons de résoudre ensemble ce problème, sur lequel M. Henno m'a interrogé cet après-midi.

Les maires ne veulent pas être les blanchisseurs d'un mariage ou d'un Pacs irrégulier.

Mme Valérie Boyer.  - Exactement !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Leur rôle est de vérifier si le mariage est libre et éclairé.

Reste que vous prenez le problème du mauvais côté. Deux articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen fondent la position du Conseil constitutionnel - excusez du peu. On peut changer beaucoup de choses, mais la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ce serait quelque peu osé...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - On est heureux de l'entendre !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Le maire devrait pouvoir s'opposer clairement à un mariage, notamment en donnant du temps supplémentaire à l'enquête.

Mme Valérie Boyer.  - Je le propose aussi !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Nous pourrions octroyer plus de temps aux maires ou la faculté de refuser un mariage - cette décision étant susceptible d'appel.

Refuser par principe de marier une personne en situation irrégulière serait délicat : vous ne demandez pas les papiers de quelqu'un qui est en train de se marier. Si le titre de séjour de cette personne a pris fin dans les semaines précédant la cérémonie, on ne peut faire peser sur le maire la responsabilité de l'avoir tout de même mariée.

Avis défavorable, mais travaillons ensemble pour donner de vrais moyens au maire de s'opposer aux mariages gris ou blancs. Si nous suivions votre raisonnement, les enfants des étrangers en situation irrégulière ne seraient plus autorisés à s'inscrire à l'école : je ne puis m'y résoudre.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Très bien !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Je remercie Mme Boyer d'avoir soulevé ce problème. Monsieur le ministre, vous avez rappelé les difficultés juridiques. Mais les maires ont aussi un devoir de protection, notamment vis-à-vis des femmes.

Saisir un procureur est inutile, car il est débordé. J'ai été maire pendant trois mandats : en sachant que j'étais dans l'illégalité, j'ai refusé des demandes après avoir mené des auditions séparées, sans attendre l'avis du procureur.

Mme Michelle Gréaume.  - J'ai vécu une expérience similaire, mais le procureur a été très réactif : il a ordonné une enquête à la police nationale, qui manque malheureusement de temps pour travailler correctement.

Ne rendons pas le maire responsable de tout ! Si, demain, le maire endosse de nouvelles responsabilités, alors qu'une enquête judiciaire est en cours, son rôle risque d'être de plus en plus complexe. Prenons garde à ne pas mettre les maires en danger.

Les amendements identiques nos58 rectifié et 257 rectifié ter sont retirés, de même que l'amendement n°258 rectifié bis.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - J'anticipe... Je ne donnerai un avis favorable qu'à l'amendement n°61 rectifié de Mme Boyer, quitte à ce qu'il soit sous-amendé. Nous aurons ainsi une base pour avancer d'ici à la CMP.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La commission sera également favorable à l'amendement n°61 rectifié, qui est le seul à concilier l'objectif avec les exigences constitutionnelles. Difficile en effet de déroger à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. (M. Thomas Dossus ironise.) Je suis plus réservée sur un éventuel sous-amendement : trouvons un terrain d'attente sur ce point.

M. Bruno Retailleau.  - Avant la fin de l'examen ?

L'amendement n°552 rectifié ter n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°76 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Savin, Mmes Puissat et Garnier, M. Bruyen, Mme Borchio Fontimp, MM. P. Martin, Genet, Saury, Perrin et Rietmann, Mmes Muller-Bronn et Jacques, M. Chasseing, Mme Imbert, M. Klinger, Mmes Josende et Goy-Chavent et M. Gremillet.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 175-2 du code civil, il est inséré un article 175-... ainsi rédigé :

« Art. 175-....  -  Lorsque le procureur de la République décide de laisser procéder au mariage en application de l'article 175-2, le maire peut refuser de procéder à la célébration du mariage si l'un des futurs époux est un ressortissant étranger en situation irrégulière.

« Dans ce cas, le mariage est célébré par un agent des services préfectoraux sous la responsabilité du représentant de l'État dans le département où réside le ressortissant étranger. »

Mme Valérie Boyer.  - Je comprends la position de M. le ministre, mais contraindre un maire à procéder au mariage manifestement blanc d'une personne en situation irrégulière n'est pas acceptable. Dans ce cas, le mariage devrait avoir lieu à la préfecture.

Je retire mes amendements autres que le n°61 rectifié, mais il faudra régler le problème de fond.

Les amendements nos76 rectifié bis, 75 rectifié bis, 60 rectifié bis et n°492 rectifié bis sont retirés.

M. le président.  - Nous avons examiné 147 amendements aujourd'hui, il en reste 290.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 9 novembre 2023, à 11 heures.

La séance est levée à 1 h 50.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 9 novembre 2023

Séance publique

À 11 heures, l'après-midi, le soir et la nuit

Présidence : Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente, M. Alain Marc, vice-président, M. Dominique Théophile, vice-président

Secrétaires : Mme Alexandra Borchio Fontimp, M. Guy Benarroche

1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour le plein emploi (texte de la commission, n°58, 2023-2024)

2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant mesures d'urgence pour lutter contre l'inflation concernant les produits de grande consommation (texte de la commission, n°79, 2023-2024)

3. Suite du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration (procédure accélérée) (texte de la commission, n°434 rectifié, 2022-2023)