Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet. Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et au temps de parole.

Drame de Crépol (I)

M. Bernard Buis .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) J'associe Marie-Pierre Monier et Gilbert Bouchet à ma question.

Une marche blanche se déroule actuellement à Romans-sur-Isère en mémoire de Thomas, 16 ans, mortellement poignardé à Crépol. Nous pensons à sa famille, ses amis, son lycée, son club de rugby, à tous les habitants de son village meurtris par cette tragédie.

Samedi soir, alors que le bal organisé par le comité des fêtes battait son plein, la convivialité a laissé place à l'atrocité. Selon le procureur de la République, quinze personnes ont été blessées. Face à cette violence gratuite et débridée, l'émotion nous tenaille.

Cet événement est tout sauf un fait divers. Après la sidération, les questions : pourquoi, pourquoi eux, pourquoi Thomas, pourquoi Crépol ? J'espère que l'enquête apportera des réponses. Je salue la réactivité des forces de l'ordre, qui ont interpellé neuf individus. Pas de conclusions hâtives, laissons la justice travailler.

Cela étant, vu la nature de ces actes criminels qui semblent prémédités, nous devons collectivement nous interroger pour éviter que de tels drames ne se reproduisent. En cette semaine de Congrès des maires, comment accompagner et rassurer nos communes, surtout en territoire rural, pour que les événements essentiels à la vie de nos villages se tiennent dans la sérénité ? (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques autres travées)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - Dans la nuit de samedi à dimanche, Thomas a été tué à la sortie d'une fête, au coeur de son village. Je dis toute ma solidarité à sa famille et à ses proches, aux habitants de Crépol et à toutes les personnes blessées - certaines sont dans un état grave. Dans ce drame qui touche tout un village, nous sommes aux côtés de la maire de Crépol, Mme Martine Lagut.

Ces violences sont graves et inacceptables. Une enquête judiciaire a été ouverte, 68 auditions ont été menées. Les enquêteurs travaillent d'arrache-pied, et neuf personnes ont été interpellées. J'ai confiance dans nos forces de l'ordre et la justice. Toute la vérité sera faite. Les auteurs et leurs complices devront répondre de leurs actes.

L'heure est au recueillement, à la retenue et à la décence. Utiliser ce drame pour jouer sur les peurs serait manquer de respect aux victimes.

Le Gouvernement est conscient des évolutions de la délinquance dans les territoires ruraux. Conformément aux engagements du Président de la République et à la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, nous créons 239 nouvelles brigades de gendarmes, dont deux nouvelles dans la Drôme...

M. Olivier Paccaud.  - Il faut déjà renforcer celles qui existent !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.  - ... ce qui représente 2 000 gendarmes supplémentaires. La présence des forces de l'ordre partout sur le territoire, notamment dans la ruralité, est une priorité pour mon gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

Inondations dans le nord de la France

Mme Marie-Claude Lermytte .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) À la suite des inondations, chacun connaît la gravité de la situation dans le Nord, mais surtout dans le Pas-de-Calais. J'adresse ma solidarité à toutes les personnes touchées, aux sauveteurs et à tous les services mobilisés.

Certaines communes ont déjà été reconnues en état de catastrophe naturelle ; beaucoup d'autres suivront. Viendra bientôt le temps du bilan : que penser de l'état des wateringues, du curage de l'Aa et des canaux non navigués, complètement envasés ? Quelle a été l'efficacité des bassins de rétention ?

Les acteurs doivent se réunir pour mieux réguler les crues. Une chose est sûre : l'État devra aider les collectivités territoriales, qui ne doivent plus tout financer.

Après les inondations de 2021, Jean Pierre Decool formulait déjà des propositions, notamment pour améliorer le drainage et le curage.

Entendez-vous engager rapidement ces travaux de réfection, afin que nos territoires puissent anticiper les prochaines crues ? Des moyens importants seront-ils mis à disposition ? J'espère que votre réponse sera une belle éclaircie pour les victimes. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Je m'associe à votre hommage aux forces de l'ordre, aux bénévoles et aux équipes municipales qui continuent de lutter contre les conséquences des inondations.

Vous vous tournez vers l'après. Il a commencé, doucement. Après Gérald Darmanin, le Président de la République s'est rendu sur place ; Marc Fesneau a actionné le dispositif des calamités agricoles ; enfin, la Première ministre était aux côtés des sinistrés il y a quelques jours.

Sans attendre, j'ai transmis au Conseil d'État un projet de décret pour faciliter le curage, pas seulement dans le Pas-de-Calais. Nous travaillons sur ce texte depuis plusieurs semaines. Préservation de l'environnement rime avec principe de précaution : il faut curer pour lutter contre les inondations.

Les inondations de 2002 ont permis d'améliorer les dispositifs d'alerte. Nous devons réfléchir désormais à l'état des wateringues et à l'organisation des syndicats. Le Président de la République a souhaité comparer les politiques menées en Belgique et aux Pays-Bas, en confiant une mission au maire de Saint-Omer.

Nous avons été au rendez-vous de l'alerte, nous serons au rendez-vous du retour d'expérience. (Applaudissements sur les travées dRDPI et du groupe INDEP)

Prévention des inondations

M. Jean-Yves Roux .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Il y a dix ans, le Parlement adoptait la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam), qui créait une nouvelle compétence de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi) et prévoyait la possibilité de lever une taxe optionnelle dans la limite de 40 euros par habitant pour protéger les territoires les plus vulnérables.

Que s'est-il passé depuis ? Disposons-nous de moyens supplémentaires pour lutter contre les inondations ? Non ! Les choses s'aggravent. Dans mon département comme tant d'autres, les communes peinent à financer ne serait-ce que les études préliminaires. Une épée de Damoclès pèse sur tous.

Les collectivités alertent les pouvoirs publics depuis plusieurs années, en vain. En 2024, la charge d'un grand nombre d'ouvrages de protection leur incombera. Une solidarité territoriale est nécessaire pour mieux prévenir les inondations.

Monsieur le ministre, allez-vous surseoir à cette disposition prévue pour 2024 ? Quand transformerons-nous le principe de solidarité territoriale en actes ? (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - La loi Maptam a presque dix ans. La question de son bilan se pose, au vu des disparités territoriales. Dans la nuit du 14 au 15 novembre, des inondations très graves ont eu lieu en Haute-Savoie. Les investissements Gemapi, qui incluent 44 millions d'euros de soutien de l'État, ne sont pas pour rien dans le fait que cette crue, la plus haute depuis 1904, n'ait pas fait plus de dégâts.

Mais nous devons aller plus loin. Dès le 1er janvier, le fonds vert pourra être mobilisé pour renforcer les systèmes d'endiguement.

Le dérèglement climatique va vite. Plutôt que de subir successivement les crues, les éboulements ou les sécheresses, nous devons penser l'adaptation globale de notre système. Je présenterai le programme national d'adaptation au changement climatique la semaine prochaine. Sortons du déni : à un tel rythme, nous devons nous préparer à un réchauffement climatique de 4 degrés. Cela implique une refonte du dispositif catastrophes naturelles et une évolution de nos mécanismes de solidarité. Nous serons au rendez-vous ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Violences faites aux femmes

Mme Audrey Linkenheld .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.) Il y a quelques jours, dans son État de la pauvreté en France, Caritas titrait : Les femmes en première ligne. En février, la Fondation Abbé Pierre insistait, dans son rapport annuel, sur le mal-logement au féminin.

Or les violences sociales touchent particulièrement les femmes victimes de violences conjugales : 210 000 femmes subissent chaque année les coups de leur conjoint ou ex-conjoint et 121 sont mortes depuis janvier, car notre société n'a pas su les protéger.

En moyenne, les femmes font six départs infructueux avant de quitter leur conjoint. Pourquoi ? Il leur faut assumer seules toutes les dépenses, avec un salaire moyen inférieur de 25 %. Une femme sur six a besoin d'un logement, mais quand l'offre est insuffisante, ce sont les femmes victimes de violences qui en font les frais. Les maires le savent bien, eux qui gèrent la pénurie.

Tant que nos services publics essentiels - logement, santé, insertion - seront délaissés par l'État, les femmes resteront captives des déserts médicaux, immobiliers et sociaux.

Madame la ministre, lors de la 24e journée internationale contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre, allez-vous réorienter profondément votre politique du logement et de la solidarité ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE-K et du GEST)

Mme Bérangère Couillard, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations .  - Votre préoccupation est la nôtre. Depuis six ans, nous agissons vigoureusement contre les violences faites aux femmes. Oui, les femmes gagnent moins que les hommes et sont dans des situations plus précaires. J'ai en tête le chiffre de sept allers-retours en moyenne - c'est toujours trop. Nous devons mettre à l'abri ces femmes et leurs enfants.

Nous avons adopté de nombreux dispositifs : cinq lois, avec des mécanismes pour recueillir la parole des femmes, protéger les victimes et sanctionner les auteurs de violences.

Depuis 2017, nous avons doublé l'hébergement d'urgence, avec 10 000 places, et nous avons instauré le pack nouveau départ dans cinq départements pilotes pour faciliter le départ des femmes, puisque les féminicides arrivent souvent au moment de la séparation - il s'agit bien de sauver des vies. Enfin, nous mettons en place l'aide universelle d'urgence dans tous les départements. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Audrey Linkenheld.  - Vos positions budgétaires contredisent vos déclarations. C'est pourquoi notre groupe déposera un amendement au projet de loi de finances pour créer des places d'hébergement pour les 2 000 enfants à la rue et leurs mères. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K)

M. Rachid Temal.  - Bravo !

Prime exceptionnelle de pouvoir d'achat

Mme Michelle Gréaume .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K) Nos communes sont à l'os. Elles n'ont plus de marge : baisse de la DGF, non indexée sur l'inflation, augmentation non compensée du point d'indice, reprises d'acompte sur le filet de sécurité... Et maintenant, le casse-tête de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat !

Celle-ci dépend surtout des moyens financiers de la commune. Souvent, l'État décide, mais ne paie pas. Plus que d'une prime, les gens ont besoin d'augmentations de salaire ! Et que dire de l'inégalité de traitement entre les fonctionnaires ? Certaines collectivités territoriales peinent à recruter.

On demande aux maires de faire toujours plus, avec toujours moins. D'où une profonde colère. Redonnez-leur le pouvoir et les moyens d'agir ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Le hasard fait bien les choses : vous posez une question sur le rôle des maires lors du Congrès des maires de France. (Marques d'ironie sur les travées des groupes Les Républicains et SER)

M. Rachid Temal.  - Quel hasard !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Vous n'êtes pas la seule à considérer, dans cet hémicycle, que la République doit se trouver aux côtés de ceux qui sont en première ligne.

M. Fabien Gay.  - Trente secondes de gagnées...

M. Christophe Béchu, ministre.  - En l'espèce, les actes valent mieux que les paroles.

Quand j'entends dire, du côté gauche de l'hémicycle, que les communes sont à l'os, je tiens à rappeler que le quinquennat de François Hollande est terminé ! (Exclamations à gauche ; applaudissements sur les travées dRDPI, des groupes INDEP et UC ; Mme Silvana Silvani fait des moulinets avec ses bras.) La baisse des dotations de 10 milliards d'euros entre 2012 et 2017, voilà le socle des difficultés des collectivités ! (Les protestations augmentent.) Jamais les collectivités territoriales n'ont été aussi pauvres que sous le quinquennat de François Hollande ! (Tumulte à gauche, la voix du ministre se perd dans les protestations ; M. Rachid Témal fulmine.)

M. le président. - Monsieur Témal, laissez le ministre parler !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Après treize ans sans hausse, la DGF augmente pour la deuxième année consécutive.

M. Ian Brossat.  - Vous êtes à côté de la plaque !

M. Christophe Béchu, ministre.  - En 2024, 1,2 milliard d'euros de compléments de crédits seront versés aux collectivités. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains et à gauche ; Mme Sophie Primas et M. Mickaël Vallet lèvent les bras) 200 millions d'euros de DGF, 11 millions pour les communes nouvelles, 100 millions pour les aménités rurales, 250 millions de FCTVA, 500 millions d'euros pour le fonds vert, voilà la réalité ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

Que certains soient fâchés avec les chiffres, c'est une chose ; qu'ils soient fâchés avec la réalité, c'en est une autre ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP ; huées à gauche)

Mme Michelle Gréaume.  - En aucun cas, le principe de libre administration ne peut servir de justification. Les collectivités doivent disposer de ressources suffisantes, ce qui n'est clairement pas le cas ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et du GEST, ainsi que sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains)

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales

Mme Isabelle Florennes .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Parmi les nombreux sujets d'inquiétude pour les communes, la hausse d'un point de cotisation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), décidée lors de la réforme des retraites, leur coûtera 640 millions d'euros par an.

L'article 9 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale a prévu une compensation intégrale, mais aucune mesure technique n'a été prévue pour la rendre applicable pour l'instant. Rien non plus dans le PLF, alors que les employeurs privés bénéficient d'une baisse de cotisations AT-MP à due concurrence. Cette mesure est-elle reportée à plus tard ? Sinon, qu'est-il prévu pour 2024 ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques .  - Soyons lucides : le déficit de la CNRACL est voué à s'aggraver, pour des raisons démographiques : on compte 1,55 fonctionnaire actif pour un fonctionnaire retraité, contre quatre pour un dans les années 1990, et le ratio sera à peine supérieur à un en 2030, le déficit atteignant alors 8 milliards d'euros. Face à cela, le Gouvernement a annoncé la hausse d'un point de cotisation des employeurs publics ; mais la Première ministre s'est engagée ici même à la compenser intégralement. Je réitère ici cet engagement. Il reste à déterminer les modalités de cette compensation. (« Ah ! » sur les travées du groupe UC)

Le Gouvernement a missionné l'inspection générale des finances (IGF), l'inspection générale de l'administration (IGA) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas) qui doivent rendre leurs conclusions d'ici à la fin novembre. Cette compensation devrait intervenir concomitamment à la hausse de taux. Cette mission doit aussi identifier des pistes d'équilibrage. Nous avançons donc en responsabilité.

Mme Isabelle Florennes.  - À l'heure où les communes préparent leur budget, cette information est primordiale. Nous attendons le rapport que vous annoncez. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Enfants à la rue

Mme Mathilde Ollivier .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Yan Chantrel applaudit également.) Zéro enfant à la rue, c'était votre promesse il y a un an. Mi-novembre, la trêve hivernale a commencé et le froid s'installe ; et ce soir, 2 822 enfants dormiront dehors. C'est un échec. Pis, votre bilan s'est alourdi : il y en a 20 % de plus qui dorment dans la rue.

L'hébergement d'urgence relève de la responsabilité de l'État, mais c'est la solidarité citoyenne qui y répond : 30 écoles accueillent des enfants au chaud. Après leur accouchement, des mères restent des semaines à l'hôpital pour ne pas retourner à la rue. Nos maires, nos départements sont en première ligne et alertent le Gouvernement, mais vous vous réfugiez dans le déni. Nous vous avons demandé 10 000 places d'hébergement supplémentaires à l'Assemblée nationale, mais vous avez refusé. Surtout, ne m'opposez pas des excuses financières ! Dans un pays comme la France, que représentent 10 000 places en plus face à des enfants qui dorment dans les écoles et doivent vite ranger leur sac de couchage le matin ? Que dit cette banalisation de notre société ? (Applaudissements sur les travées du GEST, ainsi que sur plusieurs travées des groupes SER et CRCE-K)

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - Évidemment, lors de la semaine des droits de l'enfant, un enfant à la rue, c'est un de trop. Avoir des conditions de vie dignes est un droit de l'enfant.

Contrairement à ce que vous dites, le Gouvernement prend ses responsabilités. Nous y avons été attentifs encore lors du comité interministériel de l'enfance. Les efforts de mise à l'abri n'ont jamais été aussi importants. (Protestations à gauche) Depuis 2017, il y a eu de multiples mises à l'abri, mais des familles arrivent constamment.

M. Ian Brossat.  - Et alors ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État.  - Le pacte des solidarités améliore les conditions de vie des enfants (exclamations à gauche), pour qu'ils soient aussi scolarisés. Nous veillons aussi à l'accès aux soins et aux loisirs. Mais mettre à l'abri ces enfants ne doit pas nous éloigner de l'accès à un logement pérenne : ainsi, pas moins de 240 000 personnes ont ainsi eu accès à un logement social l'année dernière, dont 100 000 enfants.

Nous conduisons une politique volontariste avec les associations et les collectivités.

Mme Mathilde Ollivier.  - En 2017, le Président de la République ne voulait plus voir aucune personne à la rue  -  2 800 enfants à la rue, c'est une catastrophe sociale. Réveillez-vous et ouvrez ces 10 000 places maintenant ! (Applaudissements sur les travées du GEST, ainsi que sur plusieurs travées des groupes SER et CRCE-K)

Drame de Crépol (II)

Mme Anne Ventalon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ma question s'adressait au ministre de l'intérieur. Le 19 novembre, les habitants de Crépol se sont réveillés avec un sentiment d'incrédulité et d'effroi. J'associe à ma question Gilbert Bouchet, qui, comme nous tous, partage la douleur de la famille de Thomas et des blessés.

Nous ne comprenons plus ce qui arrive à notre pays. Les ruraux, qui ne bénéficient pas des commodités de la ville, en subissent désormais les inconvénients. Aux agressions contre les élus s'ajoute l'attaque criminelle de bals de villages.

Certes, les forces de l'ordre ont agi avec célérité, mais les Français sont las des marches blanches, des sempiternelles annonces ministérielles succédant aux drames.

La flambée des actes antisémites et des violences diverses semble indiquer que la prophétie de Gérard Collomb s'est réalisée : nous vivons désormais face à face.

Qu'envisage le Gouvernement à moyen et long terme pour que, dans ce pays, il redevienne inconcevable qu'on agresse le médecin, l'instituteur ou le maire ? Comment restaurer la valeur de l'autorité qui rend naturel le respect des uniformes ?

Albert Camus disait que le but d'un écrivain est d'empêcher la civilisation de se détruire. Est-ce aussi l'objectif du Gouvernement ? Comment compte-t-il y parvenir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - (Exclamations à gauche) Face à face, non, mais unis dans le silence et le recueillement. Je fais miens les mots que vient de prononcer le président Larcher.

Hier, j'étais interpellé par l'un de vos collègues. Voulant rendre hommage à ce gosse, je lui ai donné le prénom de l'un de mes enfants. Ce n'était pas de la désinvolture, c'est simplement que cet enfant aurait pu être celui de chacun d'entre nous.

La famille a demandé qu'il n'y ait aucune exploitation politicienne. Comment vous répondre en quelques secondes ? Nous avons renforcé le nombre de policiers, de gendarmes, de magistrats et de greffiers, grâce à votre vote. Je remercie les forces de sécurité intérieure pour leur rapidité, les pompiers, la déléguée interministérielle d'aide aux victimes, l'association France victimes.

Le ministère de la justice est le ministère des victimes. Les auteurs de ces actes seront châtiés à la hauteur de leurs crimes par une cour d'assises composée majoritairement de Français comme vous et moi. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du RDSE et du groupe INDEP)

Zones de revitalisation rurale

M. Rémy Pointereau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les zones de revitalisation rurale (ZRR) (« Ah » à droite) existent depuis 1995. Les élus locaux y sont attachés car elles favorisent le maintien de commerces et d'artisans, mais aussi l'installation de professionnels de santé.

Certains, dans votre majorité, ont voulu leur peau, mais c'était sans compter sur le Sénat !

Le dispositif doit être réformé, chacun en convient. La commission de l'aménagement du territoire a travaillé depuis trois ans, pour aboutir à une proposition de loi définissant un zonage plus juste et plus efficace au bénéfice de 19 000 communes.

Mais vous proposez à l'article 7 du projet de loi de finances une tout autre réforme : vous conservez la maille intercommunalité plutôt que la commune et intégrez des aires urbaines - notamment des villes de 25 000 habitants - ce qui est contraire au bon sens. En conséquence, seulement 13 600 communes seront classées au lieu de 17 000.

Allez-vous revoir votre copie ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Michel Masset et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent également.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Envisageons-nous de corriger l'article 7 du projet de loi de finances ? Oui ! (M. le ministre fait mine de partir ; exclamations à droite.)

M. Mickaël Vallet.  - Par le 49.3 ?

M. Christophe Béchu, ministre.  - La Première ministre donnera le détail précis de ce que je m'apprête à vous décrire. (Rires)

Plusieurs voix à droite. - Elle est là ! (Mme la Première ministre sourit.)

M. Christophe Béchu, ministre.  - Tout d'abord, je rends hommage aux sénateurs Delcros et Espagnac (applaudissements sur quelques travées des groupes UC et SER), qui ont estimé que nous ne pouvions pas mettre fin aux ZRR au 31 décembre 2023. Je salue également votre commission de l'aménagement du territoire (Mme Élisabeth Doineau applaudit.) ainsi que l'ancien maire de Lazenay et ancien président du département du Cher, pour qui c'est un combat de plus de quarante ans.

Si le nombre de communes concernées diminue alors que 90 % du territoire est en zone rurale, c'est qu'il y a un problème de critères. L'intégration de départements entiers entraîne des effets de bord : si des villes de 20 000 habitants et des villages de 200 habitants sont sur le même pied, ce sera au détriment des seconds. (M. Jean-Noël Guérini le confirme.)

Nous allons revoir le maillage. La Première ministre vous en dira plus dans quelques instants. (Sourires ; applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe INDEP)

M. Rémy Pointereau.  - Je me réjouis que le Sénat vous ait fait reculer. Vous abordez la ruralité avec une certaine désinvolture. Elle mérite beaucoup mieux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Brigitte Devésa et M. Jean-François Longeot applaudissent également.)

Problématiques des collectivités ultra-marines

Mme Audrey Bélim .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'octroi de mer est un outil précieux pour nos collectivités territoriales. Nous sommes une majorité à être favorable à sa remise à plat, pour le rendre plus lisible, efficient et plus simple, pour nos concitoyens, nos collectivités territoriales et nos TPE et PME.

Censé protéger l'économie insulaire, il s'applique aussi aux produits locaux. Bien réformé, il pourrait dynamiser notre économie et l'emploi. Or depuis 2017, les réformes sur les outre-mer se sont faites sans eux, l'intérêt comptable de court terme passant avant l'investissement à long terme. Je rappelle la réforme des aides économiques, et l'amendement du rapporteur général de l'Assemblée au PLF 2024 : voté sans étude d'impact, il se fondait sur un rapport peu flatteur pour notre haute administration.

Monsieur le ministre, vous engagez-vous à réunir tous les acteurs - élus, consommateurs, entreprises - pour réformer l'octroi de mer ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE-K)

M. Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer .  - Depuis l'appel de Fort-de-France, le Gouvernement a voulu bâtir un nouvel avenir pour les outre-mer, avec les 72 mesures présentées au Comité interministériel des outre-mer (Ciom), qui se réunira à nouveau demain.

La première est la réforme de l'octroi de mer, injuste, inégalitaire et qui taxe aussi les produits locaux.

J'en viens à la méthode et au calendrier.

Une méthode : les élus locaux, auxquels nous venons d'écrire, seront associés - les parlementaires le seront aussi. Le monde économique également, avec une première réunion en décembre.

Un calendrier : cette réforme sera élaborée en 2024, traduite dans le projet de loi de finances pour 2025 et mise en oeuvre dès 2027.

Lutter contre la vie chère et garantir les ressources des collectivités territoriales : cette réforme sera collective ou ne sera pas. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

Lutte contre les violences faites aux élus

Mme Alexandra Borchio Fontimp .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre-Antoine Levi applaudit également.) Gestion de la commune, option autodéfense : tel est le nouveau module de formation des maires par le Raid. Peut-être deviendront-ils des militaires à part entière...

La recrudescence des agressions, des injures et des démissions est devenue le marronnier du congrès des maires de France. En cause : délitement de l'autorité et contestations de leurs décisions. Malgré la posture martiale du Gouvernement, la situation se dégrade. Le numéro vert n'y suffira pas... (On ironise à droite.)

Cet ensauvagement de la société, qui délite l'autorité de l'État, est le problème majeur de notre pays. Sans une fermeté extrême, nous n'y arriverons pas ! Je suis fière d'appartenir au groupe Les Républicains qui a, en premier, tiré le signal d'alarme et proposé des mesures fortes.

Nous connaissons les annonces du Gouvernement, mais de nouvelles mesures sont-elles prévues pour que les maires exercent leur mandat sans l'angoisse de l'agression ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville .  - La protection des élus est une nécessité : elle concourt à la protection de la République.

M. François Bonhomme.  - Ça commence bien...

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État.  - Or les agressions abjectes se multiplient contre nos élus. Si le nombre de violences physiques n'augmente pas, les outrages se multiplient. Le Gouvernement a lancé une mobilisation générale pour concrétiser un nécessaire choc civique.

Le Gouvernement a financé un plan d'aide aux élus victimes de violences et d'autres mesures, à hauteur de 5 millions pour 2024. D'ores et déjà, 3 400 référents, policiers et gendarmes, se consacrent à ces tâches. Dans chaque arrondissement, préfets et procureurs ont réuni les élus.

Des boutons d'alarme et des systèmes de vidéosurveillance seront déployés. Le centre d'analyse et de lutte contre les atteintes aux élus (Calae) coordonne la mise en oeuvre des mesures. Les ministres de l'intérieur et de la justice sont au travail. Un numéro d'assistance psychologique a été créé, en lien avec France Victimes. (M. Laurent Burgoa ironise.)

Cette semaine, un premier point d'étape sera effectué par Dominique Faure, qui rencontrera les maires en compagnie des magistrats et des forces de l'ordre. (On feint de s'en réjouir sur les travées du groupe Les Républicains.) Le diagnostic est clair, les moyens sont en place. Je m'assurerai que les résultats sont à la hauteur, et j'espère que vous le ferez avec moi. (Protestations sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Alexandra Borchio Fontimp.  - Vous n'avez que listé les mesures déjà prises. Il faut s'attaquer aux causes. Plutôt que d'apprendre en classe la théorie du genre à nos enfants (on s'indigne à gauche), enseignons-leur le respect des élus et des institutions de la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Christine Herzog applaudit également.)

Aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales

Mme Dominique Vérien .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Un chiffre : 244 300. C'est le nombre de victimes de violences conjugales l'an dernier, principalement des femmes. Pour ces victimes, s'en sortir relève du parcours du combattant.

L'autonomie financière est un préalable indispensable à la rupture. C'est le sens de la proposition de loi de Valérie Létard, adoptée à l'unanimité par le Sénat comme l'Assemblée nationale, qui crée une aide universelle d'urgence. Il est d'ailleurs regrettable que Valérie Létard n'ait pas été associée à la rédaction des décrets, que nous attendons toujours - nous y sommes sensibles, depuis le zéro artificialisation nette (ZAN)...

Quand le décret arrivera-t-il ? Pour quel budget ? Qu'en est-il de la loi de programmation pluriannuelle prévue par la proposition de loi ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains)

Mme Bérangère Couillard, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations .  - Vous l'avez dit, 244 000 signalements ont été faits l'an dernier - pas parce qu'il y a plus de victimes, mais parce que les femmes parlent davantage. La société change.

Depuis six ans, nous agissons sans relâche sur tous les leviers contre les violences faites aux femmes : recueil de la parole, protection des victimes, sanction des auteurs. Nous avons lancé le pack nouveau départ.

L'aide universelle d'urgence vient du travail de Valérie Létard et a été votée à l'unanimité. Accompagner financièrement le départ des femmes est essentiel. Cette aide, octroyée par la CAF sous trois à cinq jours ouvrés, sera effective en décembre. Cette aide s'élèvera de 243 à plus de 1 300 euros, par exemple 1 377 euros pour une femme au Smic avec trois enfants. Cela pourvoira aux premières dépenses, dont vous savez qu'elles sont nombreuses lors du départ précipité du domicile. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)

Mme Dominique Vérien.  - Merci de votre engagement. Je précise que s'il faut 15 jours pour prendre rendez-vous à la CAF, en raison de l'engorgement des services, le délai de trois à cinq jours de ne sera pas respecté. Le Nord expérimente une demande immédiate : je demande que le décret le prévoie. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Nouvelles pistes de décentralisation

M. Jean-Gérard Paumier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Après la première rencontre de Saint-Denis, le Gouvernement a lancé une mission temporaire pour la clarification de l'action publique territoriale et de nouvelles pistes de décentralisation.

Or beaucoup d'élus locaux préféreraient une clarification de l'action de l'État dans ses relations avec les élus, ainsi que du rôle des coûteuses agences nationales, qui diluent les responsabilités et compliquent l'action des collectivités territoriales.

Clarification des appels à projets, qui se multiplient, alors que les collectivités manquent d'ingénierie.

Clarification des primes d'État comme Action coeur de ville, Territoires d'industrie, Petites villes de demain... (L'énumération se poursuit ; on s'en amuse sur plusieurs travées.)

Enfin, clarification des dotations déconcentrées.

Après la deuxième rencontre de Saint-Denis, le Gouvernement ne pourrait-il, en même temps que la mission Woerth, créer une mission temporaire pour clarifier l'action publique nationale et les moyens des maires dans un cadre plus déconcentré, qui serait confiée à un membre de la Haute Assemblée, chambre des territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Mickaël Vallet applaudit également.)

Mme Sophie Primas.  - Bravo !

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - (« Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains) Aux alentours de 12 h 30, les oreilles des sénateurs ont dû tinter alors que je complimentais la Haute Assemblée au Salon des maires. (On ironise sur les travées du groupe Les Républicains) J'ai officialisé une charte pour que l'agenciarisation rampante que vous dénoncez (on le confirme sur les travées du groupe Les Républicains) débouche sur une porte d'entrée simplifiée. Une seule adresse de contact pour les maires : la préfecture.

Puisque vous plaidez pour la clarté, évitons de superposer les missions. Les travaux de la mission Woerth ouvriront des perspectives de déconcentration, de décentralisation et des pistes sur le statut des élus. (M. Mickaël Vallet s'exclame.) Elle synthétisera les différents rapports et propositions. Dans quelques mois, nous verrons comment avancer, plutôt que de risquer de perdre tout le monde avec des démarches parallèles.

Nous souhaitons de la simplification, de la décentralisation, et réduire les appels à projets. C'est le sens de l'action que je mène depuis 500 jours. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

M. Jean-Gérard Paumier.  - Merci de votre non-réponse. Je citerai la Fontaine : « Ne faut-il que délibérer, la Cour en conseillers foisonne ; est-il besoin d'exécuter, l'on ne rencontre plus personne. » (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Malaise des maires

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La dernière enquête de l'Association des maires de France et du Cevipof confirme le malaise des élus locaux. Diminution de la DGF en euros constants, compétences abandonnées par l'État aux collectivités territoriales sans les moyens afférents, amenuisement des leviers fiscaux, difficultés pour souscrire une assurance : autant de difficultés.

Pas moins de 1 300 maires ont déjà démissionné depuis le début du mandat. Parmi les raisons mentionnées figure, au deuxième rang, la complexité croissante des relations avec l'État. Ce n'est pas aux élus de faire des efforts, mais bien à l'État. Multiplication des appels à projets, réglementation technocratique excessive, par exemple sur le ZAN : le choc de simplification tant espéré s'est mué en choc de suradministration.

Que compte faire le Gouvernement pour lutter contre ces obstacles qui découragent les 500 000 élus de notre pays et portent atteinte à notre démocratie locale ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et du GEST)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - (« Ah ! » sur de nombreuses travées) Vous étiez maire de Cahors il y a peu. Vous savez que depuis quelques années, la modération n'est plus de mise quand il s'agit pour la population d'exprimer ses revendications. Les gestes barrières sont tombés, le débat public est marqué par un degré nouveau d'agressivité. Je l'ai vécu, comme beaucoup de maires.

Le chiffre des démissions est effrayant, mais il n'est que de 10 % supérieur à celui du dernier mandat. (Murmures)

Oui, l'État doit prendre sa part, car il définit les règles du jeu. Il n'y a pas que les normes : les maires des petites communes souffrent aussi de la réunionite - Scot, pays, PCAET, intercommunalité, etc. - qui grignote leur temps personnel. (M. Jean-Baptiste Lemoyne et Mme Françoise Gatel le confirment.)

Se pose aussi la question du statut. Même si les maires ne demandent pas à être payés davantage, on ne peut gérer autant de contraintes, de pression, sans une forme de reconnaissance - désormais remplacée par les insultes et les violences.

Plus largement, il y a la question des moyens, pour les collectivités territoriales en général et les communes en particulier. Entre les conclusions de l'enquête du Cevipof et le rapport Darnaud...

M. Michel Savin.  - Excellent rapport !

M. Christophe Béchu, ministre.  - ... nous avons de la matière pour avancer en attendant les conclusions de la mission Woerth. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur quelques travées du groupe INDEP)

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure.  - Nous avons besoin d'une action d'ampleur : nous ne nous contenterons pas d'un numéro vert, d'une énième mission ou d'opérations de communication.

M. Christophe Béchu, ministre.  - Je n'ai pas dit cela !

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure  - Dans mon département, les agriculteurs ont retourné les panneaux à l'entrée de nos communes pour dénoncer le retard dans le versement des aides. Ils sont victimes d'un transfert de compétences non compensé vers les régions. L'étau administratif se resserre. Ne nous obligez pas à prendre le relais de ce mouvement ! Nous finirons nous aussi par marcher sur la tête ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Philippe Grosvalet applaudit également.)

Compensation des communes pour l'accueil des gens du voyage

Mme Pauline Martin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) En mai dernier, Hugues Saury interpellait le Gouvernement sur l'intolérable abandon de nos collectivités face à l'organisation d'événements de grande ampleur par les gens du voyage. La commune de Nevoy, dans le Loiret, faisait face à l'afflux de 40 000 pèlerins de l'association Vie et Lumière. Un second rassemblement, prévu pour le mois d'août, a finalement été déplacé sur l'ancienne base aérienne de Grostenquin, en Moselle. Nous vous en remercions sincèrement - nos collègues mosellans, peut-être moins...

M. Khalifé Khalifé.  - En effet !

Mme Pauline Martin.  - Les communes voisines ont eu à subir durant deux semaines les inévitables nuisances liées à un tel rassemblement. L'État, prenant ses responsabilités, a annoncé 1,5 million d'euros de compensation. Je m'en réjouis.

L'État envisage-t-il d'accompagner le prochain rassemblement de Pentecôte à Nevoy, en le limitant à 20 000 pèlerins ? Les communes du Loiret concernées seront-elles dédommagées, elles aussi ? Où le rassemblement d'août 2024 sera-t-il accueilli ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville .  - Vous avez mentionné les mesures d'accompagnement au bénéfice des communes qui ont accueilli le rassemblement de Grostenquin. Celui-ci s'est finalement tenu sur le site d'une base aérienne appartenant à l'État, qui a compensé les collectivités affectées par les dégradations liées à cet événement dans la mesure où c'est lui qui a choisi ce terrain.

S'agissant d'un terrain privé appartenant à une association dans le Loiret, il ne peut être question d'un tel accompagnement financier. Les deux situations sont différentes. À Nevoy, comme chaque année, l'État est présent. La préfecture met en oeuvre les moyens nécessaires pour sécuriser le rassemblement et éviter les dégradations.

M. Hugues Saury.  - Faux !

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État.  - L'État sera à vos côtés, si des dégâts étaient commis, pour mettre l'association face à ses responsabilités. Nous élaborons une convention financière avec l'association pour mieux anticiper et répondre à vos légitimes questions. (M. François Patriat applaudit ; M. Hugues Saury secoue la tête.)

Mme Pauline Martin.  - Une fois de plus, nous constatons l'immobilisme de l'État face à la déshérence des maires.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État.  - J'ai dit que nous allions vous aider !

Orientations de la politique agricole

Mme Jocelyne Antoine .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Depuis le début de la semaine, de nombreux panneaux d'entrée de nos communes sont retournés ou inversés. Le message est clair : on marche sur la tête. Ce sont les jeunes agriculteurs de nos départements qui nous le disent. L'action peut paraître anecdotique, mais leur détresse est réelle.

Nos agriculteurs ont engagé une transition énergétique et environnementale pour le renouvellement des générations. Pourtant, on continue de faire pression sur leurs prix. Votre politique est incohérente. Vous leur imposez des normes que ne respectent pas les produits importés. Le monde agricole est exaspéré, la coupe est pleine.

Quelles mesures durables, de terrain, allez-vous prendre pour redonner souffle, compétitivité et espoir à nos agriculteurs ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Ce n'est pas une action anecdotique : elle nous interpelle tous.

Notre trajectoire vous échappe ? Nous avons d'abord un objectif de rémunération avec les lois Égalim 1 et 2 et la loi Descrozaille. Vous ne croiserez pas un agriculteur qui veuille les abroger. Il faut aller plus loin.

Sur les assurances, puisque vous manquez d'éléments concrets (protestations sur plusieurs travées des groupes SER et Les Républicains), vous avez voté un texte qui vient profondément modifier le système assurantiel et garantir sa résilience.

Notre cap, c'est la souveraineté et la transition, qui ne vont pas l'une sans l'autre. Nous avons un outil, la planification, travaillée avec la profession, pour répondre aux injonctions - sur l'eau, sur les produits phytosanitaires, sur la biomasse, etc.

Pour être crédibles, nous avons besoin de moyens. Le budget que vous vous apprêtez à examiner s'élève à 1,3 milliard d'euros, c'est inédit.

C'est dans le cadre du pacte et de la loi d'orientation que vous verrez la cohérence de notre action. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Jocelyne Antoine.  - Ces mesures ne répondent pas complètement à l'enjeu des prix et du partage de la valeur ajoutée. Nos paysans souffrent dans nos campagnes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 16 h 15.

Présidence de M. Mathieu Darnaud, vice-président

La séance reprend à 16 h 30.