Projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 (Conclusions de la CMP)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023.

M. Jean-François Husson, rapporteur pour le Sénat de la CMP .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP) Ce projet de loi a eu un parcours rapide et productif : il a été examiné en séance publique lundi, la CMP s'est réunie hier et nous examinons ses conclusions ce soir.

Le texte contient principalement des ouvertures de crédit pour financer la hausse de la charge de la dette - malheureusement ! - et le soutien à l'Ukraine, partiellement gagées par des sous-exécutions de crédits.

L'Assemblée nationale a ajouté des ouvertures de crédits en faveur de l'Ukraine, des familles monoparentales modestes, de l'aide alimentaire et de l'hébergement d'urgence. Le Sénat a adopté les amendements du Gouvernement et ajouté diverses mesures.

La CMP a conservé toutes les modifications adoptées par le Sénat à l'initiative ou avec le soutien du Gouvernement, notamment les 113 millions d'euros en faveur de Mayotte.

Je me réjouis de la qualité des échanges avec les députés, notamment avec mon homologue Jean-René Cazeneuve : nous partageons le souci de la bonne utilisation des deniers publics. (M. Pascal Savoldelli ironise.) Les enveloppes votées par le Sénat ont été conservées, mais réduites. Cet accord est équilibré et raisonnable.

Nous sommes convenus de 20 millions d'euros supplémentaires au profit de la réfection des ponts des collectivités, 50 millions pour le réseau d'eau, 60 millions pour les routes des collectivités - l'an dernier, nous avions voté 50 millions d'euros, mais l'État en avait détourné l'usage au profit des routes nationales ; la CMP a donc décidé, pour les sécuriser, de les inscrire à la mission « Relations avec les collectivités locales ». Nous attendons un engagement, monsieur le ministre.

En outre, 15 millions d'euros sont prévus pour l'Arménie et 20 millions d'euros pour l'aide alimentaire, qui s'ajoutent aux 20 millions votés par l'Assemblée nationale - ce n'est pas de trop ! Enfin, 4 millions d'euros abonderont le budget de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN).

En autorisations d'engagement, 35 millions d'euros iront à la réouverture de la ligne de train d'équilibre du territoire (TET) Metz-Nancy-Lyon, en contrepartie d'une participation à 50 % des collectivités territoriales.

Je vous invite à voter ces conclusions de CMP ; les amendements du Gouvernement se limitent à tirer les conséquences de cet accord en levant les gages. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics .  - L'aboutissement de ce texte est le fruit d'un travail intense, en confiance avec le Parlement.

Ce texte se borne à tirer les conséquences des aléas. Nous ne touchons pas à l'équilibre global de la loi de finances initiale. (M. Pascal Savoldelli fait mine de s'essuyer le front en signe de soulagement.)

Face à la crise, nos entreprises ont tenu : le taux de croissance est de 1 %, supérieur à la moyenne européenne et à celui de nos voisins. Notre stratégie contre l'inflation a fonctionné. Certes, celle-ci sera supérieure aux prévisions initiales, mais sera inférieure de 0,3 % par rapport à 2022, soit 4,9 %. En 2024, elle s'établirait à 2,6 %.

Avec 4,9 % de déficit, nous sommes à un niveau légèrement inférieur à ce que prévoyait la loi de finances initiale : une bonne nouvelle, compte tenu de la hausse des taux qui nous conduit à ouvrir 3,8 milliards d'euros supplémentaires pour la charge de la dette.

La semaine dernière, la Première ministre a lancé une première vague de revues de dépenses.

Nous abondons les crédits de la mission « Défense », de 2,1 milliards d'euros pour l'Ukraine et la modernisation de nos armées, anticipant l'application de la loi de programmation militaire (LPM), votée par le Sénat. Nous avons aussi soutenu la proposition transpartisane de prolonger le fonds spécial pour l'Ukraine.

Nous réaffirmons notre soutien à l'agriculture, un enjeu central pour les territoires ruraux et pour notre souveraineté. L'épidémie de grippe aviaire a touché de nombreuses exploitations, d'où 800 millions d'euros pour ouvrir des dédommagements aux exploitants touchés ; 20 millions d'euros aideront le secteur vitivinicole, touché par le mildiou, et 5 millions d'euros soutiendront l'agriculture biologique affectée par l'inflation.

Nous avons ouvert 400 millions d'euros de crédits pour des exonérations de cotisations patronales dans les outre-mer. Le plan Sargasses II a été renforcé. La dotation de solidarité territoriale a été reconduite pour la Corse.

Le budget du ministère des solidarités augmente pour tenir compte de la progression des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et de la prime d'activité. La prime de Noël sera augmentée pour les familles monoparentales les plus précaires, comme les subventions aux associations d'aide alimentaire.

Les conclusions de la CMP ne sont pas revenues sur ces avancées. Je salue également le travail du Sénat et du rapporteur général. Sur l'aménagement du territoire, vous avez amélioré le texte : 50 millions d'euros seront destinés à améliorer les réseaux d'eau ; vous avez renforcé les crédits en faveur des ponts routiers et des ponts ; sur l'initiative de M. Capo Canellas...

M. Emmanuel Capus.  - Excellent !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué.  - ... le budget de l'IGN sera augmenté. De plus, 20 millions d'euros supplémentaires sont prévus au profit des banques alimentaires.

Nous avons également soutenu votre initiative en faveur de l'Arménie.

Notre déficit est maintenu à 4,9 %, en raison de l'exécution prudente du budget : les dépenses supplémentaires sont compensées par des annulations de crédits.

Nous adoptons également une gestion prudente des agents des ministères : nous n'avons pas augmenté les dépenses de personnel, malgré les revalorisations salariales décidées cet été.

Je souhaite que vous adoptiez les conclusions de cette CMP sur un texte issu de la concertation. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Discussion du texte élaboré par la CMP

Mme la présidente.  - En application de l'article 42, alinéa 12 du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte, en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Article 4

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

I. - Rédiger ainsi le tableau de l'alinéa 2 :

(En millions d'euros)

 

RESSOURCES

CHARGES

SOLDE

 

 

dontfonctionnement

 

 

dont fonctionnement

 

 

 

 

 

dont investissement

 

 

dont investissement

 

Budget général

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes fiscales** / dépenses***

+2 417

+2 417

-

+4 447

+3 647

+801

 

Recettes non fiscales

-4 402

-2 531

-1 871

-

-

-

 

Recettes totales nettes / dépenses nettes

-1 985

-114

-1 871

+4 447

+3 647

+801

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l'Union européenne

-1 124

-1 124

 

 

 

 

 

Montants nets pour le budget général

-861

+1 009

-1 871

+4 447

+3 647

+801

-5 309

 

 

 

 

 

 

 

 

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

-

-

-

-

-

-

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

-861

+1 009

-1 871

+4 447

+3 647

+801

 

 

 

 

 

 

 

 

Budgets annexes

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Contrôle et exploitation aériens

+71

+71

-

-13

-5

-8

+84

Publications officielles et information administrative

-

-

-

-2

-2

-

+2

Totaux pour les budgets annexes

+71

+71

-

-15

-7

-8

+85

 

 

 

 

 

 

 

 

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

 

 

 

 

 

 

 

Contrôle et exploitation aériens

-

-

-

-

-

-

 

Publications officielles et information administrative

-

-

-

-

-

-

 

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

+71

+71

-

-15

-7

-8

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Comptes spéciaux

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Comptes d'affectation spéciale

-3 741

+148

-3 889

+178

+178

-

-3 919

Comptes de concours financiers

+184

-

+184

-537

-

-537

+721

Comptes de commerce (solde)

 

 

 

 

 

 

+951

Comptes d'opérations monétaires (solde)

 

 

 

 

 

 

-

Solde pour les comptes spéciaux

 

 

 

 

 

 

-2 247

 

 

 

 

 

 

 

 

Solde général

 

 

 

 

 

 

-7 471

 

 

 

 

 

 

 

 

*Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million d'euros le plus proche ; il résulte de l'application de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

** Recettes fiscales brutes, minorées des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

*** Dépenses budgétaires brutes, minorées des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

II. - Rédiger ainsi le tableau de l'alinéa 5 :

(En milliards d'euros)

Besoin de financement

 

Amortissement de la dette à moyen et long termes

149,6

          Dont remboursement du nominal à valeur faciale

144,5

          Dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés)

5,1

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

2,2

Amortissement des autres dettes reprises

0,9

Déficit budgétaire

171,2

Autres besoins de trésorerie

-14,5

       Total

309,4

 

 

Ressources de financement

 

Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats

270,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

6,6

Variation nette de l'encours de titres d'Etat à court terme

20,0

Variation des dépôts des correspondants

0,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État

31,2

Autres ressources de trésorerie

-18,4

       Total

309,4

 

M. Thomas Cazenave, ministre délégué.  - Les amendements du Gouvernement relèvent le plafond d'autorisation de dépenses, en rétablissant 189 millions d'euros en autorisations d'engagement et 154 millions d'euros en crédit de paiement.

Nous tenons ainsi compte des décisions du Sénat et de la CMP. Le soutien aux travaux sur le réseau routier est abondé de 60 millions d'euros au programme 122, via une action budgétaire spécifique dédiée aux collectivités territoriales, qui permettra d'en suivre l'exécution.

La rénovation des réseaux d'eau potable bénéficie de 50 millions d'euros, la conduite des travaux pour les ponts routiers 20 millions, la desserte Nancy-Lyon 35 millions, la majoration de subvention pour charge de service public au profit de l'IGN 4 millions d'euros et l'aide alimentaire 20 millions.

Le Gouvernement a choisi de rendre les amendements parlementaires opérants en levant les gages.

Nous n'avons pas besoin d'actualiser l'article liminaire : le déficit demeure inchangé à 4,9 % du PIB.

Article 5 (État B)

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Mission « Écologie, développement et mobilité durables »

 

I. - Modifier ainsi les autorisations d'engagement :

 

(en euros)

 

Programmes

 

+

 

-

Affaires maritimes, pêches et aquaculture

Énergie, climat et après-mines

4 000 000

105 000 000

0

0

TOTAUX

109 000 000

0

 

SOLDE

+109 000 000

 

II. - Modifier ainsi les crédits de paiement :

(en euros)

 

Programmes

 

+

 

-

Affaires maritimes, pêches et aquaculture

Énergie, climat et après-mines

4 000 000

70 000 000

0

0

TOTAUX

74 000 000

0

 

SOLDE

 

+74 000 000

 

M. Thomas Cazenave, ministre délégué.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

Mission « Relations avec les collectivités territoriales »

 

I. - Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

 

Programmes

 

+

 

-

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

Concours spécifiques et administration

Soutien à l'entretien du réseau routier local (ligne supprimée)

60 000 000

 

60 000 000

0

0

 

0

60 000 000

 

TOTAUX

120 000 000

60 000 000

 

SOLDE

 

+60 000 000

 

M. Thomas Cazenave, ministre délégué.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »

I. - Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

 

Programmes

 

+

 

-

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

 

20 000 000

0

 

TOTAUX

20 000 000

0

 

SOLDE

 

+20 000 000

 

M. Thomas Cazenave, ministre délégué.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Je vous donne mon avis personnel, même si mes collègues ont été consultés en amont : avis favorable.

Vote sur l'ensemble

M. Thomas Dossus .  - C'était donc une première, ce PLFG, une nouvelle catégorie de loi de finances : un bilan de la loi de finances initiale (LFI), auquel s'ajoutent quelques mesures d'urgence.

La LFI est restée dans la lignée de 2017 : moins de prélèvements, en particulier pour les classes supérieures, et soutien inconditionnel aux entreprises. Ce texte raconte la même politique...

L'année est marquée par une inflation forte, avec son corollaire : une hausse de la précarité pour les plus fragiles.

Le parcours parlementaire de ce texte n'a pas été inutile : nos collègues députés ont renforcé le soutien à l'Ukraine et l'enveloppe pour l'hébergement d'urgence, entre autres.

Nous regrettons que le Sénat ait été incapable d'envoyer un signe de solidarité avec les sinistrés du Pas-de-Calais : ce qui n'était pas possible au motif que l'on ne serait pas capable d'exécuter les dépenses avant la fin de l'année l'est devenu pour la rénovation des ponts, des routes, des réseaux d'eau et même la réouverture de la ligne TET Nancy-Lyon.

Ce projet de loi de fin de gestion aurait pu être un signal à nos compatriotes dans la détresse ; nous regrettons qu'il ne le soit pas. Cela dit, compte tenu des mesures d'urgence qu'il contient, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Pascal Savoldelli .  - Après l'examen de ce texte au pas de charge - pfiou ! - la CMP s'est mise d'accord et associe le Parlement aux choix budgétaires du Gouvernement.

Comment ne pas trouver étourdissant de devoir mobiliser plus de 21 milliards d'euros dans ce texte, à deux mois de la fin de l'exercice budgétaire ? Je me suis demandé s'il n'y avait pas une élection en début d'année prochaine ! (Sourires)

Nous avons proposé 30 millions d'euros pour l'aide alimentaire, mais la CMP a rogné 10 millions d'euros. Très sincèrement, cela nous met en colère. Le compte rendu des échanges témoigne que l'amendement du Sénat n'a pas été défendu : 10 millions d'euros, c'est une économie résiduelle, mais un compromis injustifiable !

C'est 0,0058 % du déficit public ! Quand on a un budget en fin d'année à 170 milliards d'euros de déficit, dans le rouge - couleur que j'aime beaucoup (sourires) -, on ne donne pas de leçons aux parlementaires et à l'opposition de gauche, monsieur le ministre.

Dans la même veine, vous avez refusé une aide d'urgence de 200 millions d'euros pour les sinistrés du Pas-de-Calais. Que tous les élus du département nous entendent : pour deux mois, c'est 50 millions et c'est tout. Soit c'est la route, soit c'est le gymnase, mais pas les deux mon capitaine.

En revanche, les ponts, les routes, les réseaux d'eau ont reçu des crédits. Ces propositions sont légitimes et nous les avons votées.

Mais il y a deux poids, deux mesures, monsieur le rapporteur. Notre groupe interrogera le Gouvernement sur l'exécution de ces crédits. Nous retiendrons aussi le rejet de notre amendement sur le remboursement de l'acompte du filet de sécurité aux communes.

Certes, l'argument constitutionnel est recevable, mais, finalement, le Sénat a refusé de trancher. Le chiffre des communes concernées a bien fluctué. Les règles étaient-elles adaptées pour aider les collectivités territoriales en difficulté ? Devons-nous reprendre quelques euros alors qu'elles doivent boucler des budgets contraints ?

Mais nous constatons que notre débat n'a pas été inutile : il y a un étalement, c'est un petit geste... Cela représente 69,8 millions pour les communes concernées. Il y aura des contentieux.

Nous voterons contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ; M. Thierry Cozic applaudit également.)

M. Christian Bilhac .  - Le Sénat a adopté le projet de loi de finance rectificative - pardon, le PLFG ! Ce changement de dénomination ne change ni les chiffres ni la réalité. L'exercice 2023 est marqué par les conséquences de l'inflation et le déficit s'aggrave encore - les administrations centrales en sont en grande partie responsables. Le déficit s'explique par une augmentation des dépenses et par une diminution des recettes, malgré l'augmentation des recettes fiscales.

Ce texte résume l'action du Gouvernement : aucune réforme structurelle et aucun cap clair. Il s'inscrit aussi dans l'air du temps : les milliards se baladent au gré du vent, comme les feuilles mortes. (Sourires)

Aucune réforme, aucune décentralisation (M. Thomas Cazenave le conteste), toujours plus de ministères, toujours plus d'opérateurs - mais ce n'est que la suite de la LFI. Quelque 195 équivalents temps plein (ETP) sont créés, mais pas au profit de la population, qui en demande toujours plus : hôpitaux, écoles...

Pourtant, dans l'Hérault, tous mes interlocuteurs - élus, chefs d'entreprises, agriculteurs : tous ! - me le disent : il y en a marre, l'administration nous bloque. Certes, ce n'est pas nouveau. Déjà, Pompidou disait qu'il fallait arrêter d'emmerder les Français. Mais cela continue... Il faut faire quelque chose, monsieur le ministre !

Je salue les améliorations adoptées en CMP. Les 50 millions pour le réseau d'eau potable, c'est urgent ! Ancien président de l'association des maires de mon département, j'avais voté un plan d'urgence pour la rénovation des réseaux d'eau en 2000 avec...

M. Pascal Savoldelli.  - ... tout le monde !

M. Christian Bilhac.  - ... l'ensemble des acteurs, un plan d'urgence. C'était il y a vingt-trois ans !

Le réseau routier, le Haut-Karabagh... J'approuve ces crédits. Le RDSE votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Vincent Capo-Canellas.  - Très bien ! 

M. Didier Rambaud .  - L'atterrissage de cette première loi de finances de fin de gestion se fait sans trop de turbulences.

Elle remplace le projet de loi de finances rectificative (PLFR) de fin de gestion depuis la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) du 28 décembre 2021, ce qui interdit toute nouvelle mesure fiscale nouvelle, avec donc un calendrier d'examen accéléré.

J'en arrive au fond du texte. Alors que la précarité progresse dans notre pays et que les Restos du Coeur refusent du monde, il était urgent d'agir. Les députés l'ont fait avec 20 millions d'euros de crédits supplémentaires pour ces associations. La banque alimentaire organise ce week-end sa collecte annuelle.

Notre groupe a souhaité une rallonge supplémentaire. Nous nous réjouissons donc des 40 millions d'euros de plus pour l'aide alimentaire en 2023. M. le ministre a rappelé que les dépenses liées à l'aide alimentaire atteignent 156 millions d'euros en 2023, soit le double de 2021 et le triple de 2018.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Un peu d'honnêteté intellectuelle ne nuit pas...

M. Didier Rambaud.  - Mais nous devons nous interroger collectivement sur les causes de cette situation inacceptable.

Je salue d'autres apports de mon groupe : 63 millions d'euros renforcent le soutien de l'État à Mayotte sur la crise de l'eau. Il faut distribuer plus de 3,5 millions de litres d'eau par semaine ; 300 personnes de la sécurité civile et des forces armées et des dizaines de camions sont mobilisés. Il faut aussi acheminer des congélateurs, des pastilles... Ces fonds sont indispensables.

Je me réjouis des 50 millions d'euros accordés au conseil départemental de Mayotte pour couvrir l'ASE, la PMI et le transport scolaire. Je salue le maintien de ces amendements en CMP. Le RDPI votera donc ce texte.

M. Thierry Cozic .  - (Mme Marion Canalès et M. Pascal Savoldelli applaudissent.) La nature du texte a profondément changé depuis la révision de la Lolf en 2021. Il était de faible densité, la Lolf en a fait un texte technique, sans épaisseur politique - dommage, alors que les besoins sont grands.

Alors que l'Assemblée nationale ne discute plus du budget de la nation, un PLFR aurait permis de débattre du fond, comme le financement des collectivités territoriales. Néanmoins, je me félicite d'un accord entre les deux chambres, qui en sortent enfin par le haut, alors que les 49.3 s'enchaînent.

Les ouvertures de crédits - 5,2 milliards d'euros, dont 2,1 milliards pour la défense - sont compensées par des annulations concernant des mesures de soutien aux entreprises - ce qui montre bien qu'elles sont inopérantes.

Nous nous félicitons du soutien à l'Arménie à hauteur de 15 millions d'euros, ainsi que des 20 millions d'euros pour la rénovation des ponts. Il est urgent que l'État se saisisse du problème.

Je salue également l'amendement du rapporteur général prévoyant 30 millions d'euros aux associations d'aide alimentaire, et regrette la réduction de 10 millions d'euros retenue en CMP, alors que les banques alimentaires sont dans une situation très tendue et subissent l'inflation. Ainsi, pour les Restos du Coeur, 1,3 million de personnes ont déjà été accueillies en 2023 contre 1,1 million sur l'ensemble de 2022, et 150 000 personnes risquent d'être éconduites. L'association, qui prévoit de servir 170 millions de repas, contre 140 millions en 2022, aurait besoin de 35 millions d'euros pour boucler son budget, alors qu'elle assure 35 % de l'aide alimentaire en France pour un budget de 200 millions d'euros par an. Ce coup de rabot est donc fort malvenu.

Les quelques avancées justifient que nous ne nous opposions pas au texte, malgré le rejet de nos amendements sur le filet de sécurité et sur l'Unédic.

Demain, nous débattrons du projet de loi de finances pour 2024. J'espère que les échanges seront à la hauteur de la situation. Le groupe SER y prendra toute sa place. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Thomas Dossus applaudit également.)

M. Laurent Somon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le groupe Les Républicains se félicite de l'accord en CMP, pour lequel je remercie le rapporteur général. Le Sénat a répondu à des situations d'urgence : sur les 200 millions d'euros de crédits votés par le Sénat, les communes sont particulièrement soutenues, notamment pour les ponts - à la suite du rapport de Bruno Belin, insistant sur ce qui représente le chantier du siècle. Déjà, en 2019, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable estimait à 25 000 le nombre de ponts en mauvais état structurel.

Nous nous réjouissons aussi de l'ouverture de crédits pour l'entretien de la voirie. Nous espérons que le vote du Parlement sera respecté et que ces crédits serviront aux collectivités territoriales, alors que les précédents crédits avaient été détournés vers le réseau national.

Les crédits pour l'entretien des réseaux d'eau répondent à la multiplication des sécheresses. Pas moins de 20 % du volume d'eau potable est perdu chaque année - un milliard de mètres cubes. Les conséquences économiques et financières sont lourdes.

Le Sénat soutient davantage le secteur de l'aide alimentaire. De plus en plus d'associations demandent de l'aide. Les 20 millions d'euros obtenus parent à l'urgence, mais il faut répondre sur le long terme.

À la suite de la proposition de résolution pour une paix durable au Haut-Karabagh, déposée par Bruno Retailleau, les 15 millions d'euros votés confirment notre soutien.

Ce sont certes des dépenses nouvelles, mais à des montants raisonnables, qui seront compensées par les économies que nous proposerons dans le projet de loi de finances.

Au-delà des 50 millions d'euros déjà votés, n'oublions pas les sinistrés du Pas-de-Calais et de la Somme. Nous serons attentifs à l'aide qui leur sera proposée dans le projet de loi de finances pour 2024.

Le groupe Les Républicains votera le texte issu des travaux de la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Emmanuel Capus .  - Même en matière de politique budgétaire, le bon sens peut primer. On ne met pas la charrue avant les boeufs... Ainsi, avant de débattre du budget de l'année N+1, nous clôturons les comptes de l'année N. Une page se ferme.

Mais c'est surtout une page qui s'ouvre : ce PLFG est la première occurrence de cette nouvelle catégorie de loi de finances. Nous voulions créer un objet ad hoc pour clore les comptes de l'année, en limitant le cadre d'ouverture de nouveaux crédits. Cela limite le Gouvernement, mais aussi le Parlement, dont l'une des missions principales est de voter le budget.

Ainsi, ce texte répond à une mission : extraire la nécessaire adoption des textes budgétaires des querelles politiciennes, ce qui réduit les espaces de débat, mais est utile pour tenir la comptabilité nationale.

Le Sénat a pris ses responsabilités. Je salue le travail du rapporteur général et du président de la commission des finances.

Ce texte porte trois mesures importantes et symboliques : l'augmentation des crédits de la mission Défense à 2,1 milliards d'euros, l'abondement du fonds de soutien à l'Ukraine et le déblocage de 20 millions d'euros pour les réfugiés arméniens. Certaines mesures sont plus stratégiques que d'autres, notamment quand il s'agit de défendre nos valeurs. Le groupe Les Indépendants votera ce texte. (M. Didier Rambaud applaudit.)

M. Laurent Somon.  - Excellent ! (Sourires)

M. Vincent Capo-Canellas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le groupe UC se réjouit de l'accord en CMP. Députés et sénateurs ont travaillé en bonne intelligence -  c'est à souligner. Le groupe UC adoptera, à sa quasi-unanimité, ses conclusions.

Des avancées sont à noter : 9 milliards d'euros de crédits sont ouverts, dont 3,8 milliards d'euros -  tout de même  - pour la charge de la dette, 2,1 milliards pour l'Ukraine, ou encore l'hébergement d'urgence. Cela ne doit pas nous faire dévier du cap de la maîtrise des finances publiques.

Le groupe UC salue le maintien d'aides votées par le Sénat, même réduites : 20 millions pour les ponts, 50 millions pour le réseau routier et 20 millions pour l'aide alimentaire. Je me félicite aussi de la dotation exceptionnelle pour l'IGN, issue de mon amendement, à hauteur de 4 millions d'euros.

Il est impératif de réduire notre dette. Le groupe UC s'associe aux recommandations du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Nous devons sécuriser notre capacité à faire face aux chocs économiques.

La Commission européenne a mis en garde la France mardi : nous risquons, en 2024, de ne pas être en ligne avec ses recommandations en raison d'une croissance excessive des dépenses publiques - comme trois autres pays. Celle-ci atteindrait 2,6 %, hors charge de la dette.

Alors que certains voisins sont en récession, notre économie a tenu bon face à la crise et l'État a continué à soutenir nos entreprises et nos concitoyens. Nous devons toutefois ajuster nos efforts aux contraintes budgétaires. Ce sera un élément essentiel du débat budgétaire qui s'ouvrira demain. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP ; M. Laurent Somon applaudit également.)

L'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°65 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 261
Pour l'adoption 242
Contre   19

Le projet de loi est définitivement adopté.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Voilà qui fait rêver le Gouvernement à l'Assemblée nationale !

La séance est levée à 22 h 55.

Prochaine séance demain, jeudi 23 novembre 2023, à 9 heures.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 23 novembre 2023

Séance publique

De 9 heures à 13 heures, à 14 h 30 et, éventuellement, le soir

Présidence : M. Alain Marc, vice-président, M. Mathieu Darnaud, vice-président, M. Pierre Ouzoulias, vice-président

Secrétaires : M. François Bonhomme, Mme Nicole Bonnefoy

1. Proposition de loi tendant à renforcer la culture citoyenne, présentée par M. Henri Cabanel et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°102, 2023-2024)

2. Proposition de loi visant à aménager la prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés, présentée par Mme Nathalie Delattre et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°83, 2023-2024)

3. Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2024 (A.N., n°1680)

=> Discussion générale

=> Examen de l'article liminaire

=> Examen de l'article 33 : évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget de l'Union européenne