SÉANCE

du mardi 12 décembre 2023

45e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Véronique Guillotin, M. Philippe Tabarot.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Projet de loi de finances pour 2024 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote à la tribune du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Explications de vote

Mme Christine Lavarde .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) À l'automne 2017, pour mon premier PLF, 1 363 amendements ; cette année, 3 756 amendements, plus 175 %. L'inflation parlementaire s'envole ! Il est temps que notre autorité de régulation mette fin à cette dérive. Sept jours et six nuits consécutives pour la première partie, huit jours et autant de nuits pour la seconde : les organismes ont été mis à rude épreuve. Les pauses pour les sénateurs sont bien courtes, entre la fin de la séance et la réunion de commission du matin... Pas de pause pour les fonctionnaires : remercions-les chaleureusement. (Applaudissements)

Je remercie également les ministres qui ont joué le jeu du débat : ils étaient quatre au banc pour la mission « Écologie ». (Applaudissements sur les travées du RDPI) Monsieur Cazenave, pour votre premier PLF, vous êtes resté avec nous six jours et sept nuits, soit l'intégralité de la première partie, c'est une première. (Applaudissements sur de nombreuses travées du RDPI au groupe Les Républicains) Merci pour votre écoute, vos réponses, vos non-réponses aussi : les 35 000 communes attendent de connaître le calendrier budgétaire...

Richelieu disait « la politique n'est pas l'art du possible, c'est de rendre possible ce qui est nécessaire ». Ce qui est nécessaire, c'est réduire notre déficit et rembourser notre dette dont la charge explose. (MM. André Reichardt et Albéric de Montgolfier applaudissent.) L'achoppement du Conseil Ecofin sur la procédure de déficit excessif montre combien la France est fragilisée par ses mauvais résultats.

La majorité sénatoriale a fait de la politique, au sens noble. Nous avons proposé des choix responsables. Nous avons réduit le soutien aux apprentis les plus diplômés. Nous avons recentré sur les plus modestes les aides face au prix de l'énergie - premier pas vers la fin de la politique du chèque, même s'il faudra une réforme, car comment payer durablement l'électricité à plus de 220 euros/MWh ? Nous avons refusé d'être un paradis fiscal pour la Fifa. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous avons transformé l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en impôt sur la fortune improductive.

Les 7 milliards d'euros d'économies votées ne sont pas au détriment de la croissance ou de la transition écologique. Ce ne sont pas des économies de papier. Grâce à ce réel effort de redressement, le déficit public passe sous les 3 % du PIB dès 2025. Notre trajectoire est réaliste.

Monsieur le ministre, vous avez dit faire le pari de confiance avec les collectivités. Or vous ne respectez pas le principe « qui décide paie » en leur imposant à deux reprises des exonérations non compensées de taxe foncière - même si ce n'est peut-être pas votre choix personnel. Vous imposez les budgets verts pour tous, y compris les plus petites collectivités. Nous remettons en cause la méthode plus que l'objectif.

Le Sénat a voté des dispositions pour réussir le pari de l'action décentralisée : fonds climat territorial, affectation de quotas carbone aux autorités organisatrices de la mobilité, PTZ dans le neuf sur tout le territoire, meilleure définition des FRR.

Nous regrettons le refus de rehausser le plafond du quotient familial, alors que la natalité chute, ou les hausses de fiscalité, sur les hauts revenus, les rachats d'actions, les revenus de l'assurance vie ou de l'épargne-logement.

Dès à présent, monsieur le ministre, travaillons au PLF pour 2025, pour que vous ne puissiez être taxé d'impréparation. Les sujets sont nombreux : taxe de séjour, fiscalité des locations de courte durée, régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, ressources des chambres consulaires, fiscalité de l'eau... Quand aurons-nous connaissance des fiches d'évaluation des dépenses fiscales arrivées à échéance ?

Vous trouverez chez Les Républicains une opposition attentive, mais constructive, pour rendre possible ce qui est nécessaire, pour une France tournée vers l'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

M. Stéphane Ravier .  - Le dernier budget de l'État en excédent a été voté en 1973, sous Pompidou. Après les Trente Glorieuses, nous bouclons les Cinquante Piteuses avec un déficit à 144 milliards d'euros. En 2011, François Fillon se disait à la tête d'un État en faillite. La dette était de 1 500 milliards d'euros ; elle a doublé depuis. Sa charge atteint 52 milliards, et sera bientôt le premier poste budgétaire.

Depuis 1973, à défaut de poches de pétrole en France, les gouvernements successifs ont fait les poches des Français ; le forage fonctionne à plein régime. Les prélèvements obligatoires représentent 48 % du PIB, c'est 6,3 points de plus que la moyenne européenne. Vous ne dégagerez aucune marge de manoeuvre pour désendetter le pays et investir pour l'avenir sans remettre en question ce socialisme tentaculaire. (Protestations à gauche)

M. Mickaël Vallet.  - Si seulement !

M. Stéphane Ravier.  - Pour retrouver de la croissance, il faut moins d'impôts et de normes, moins d'accords de libre-échange comme avec le Mercosur ou la Nouvelle-Zélande, qui pénalisent nos paysans.

Nos impôts de production atteignent 100 milliards d'euros, quatre fois plus qu'en Allemagne. Votre gouvernement supprime certes la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) - ce qui ne grève pas son train de vie, mais le budget des collectivités, déjà exsangues.

Pas d'État stratège malgré un haut-commissariat au plan, pas de réindustrialisation viable, pas de plan d'infrastructures. L'État doit se réformer pour parvenir à un libéralisme national : libérer à l'intérieur, protéger à l'extérieur.

En 2017, Emmanuel Macron promettait 60 milliards d'euros d'économies par an, Édouard Philippe parlait d'addiction française à la dépense publique - et nous avons eu le « quoi qu'il en coûte ». Dernier clou dans le cercueil du Mozart de la finance, le ministre de l'économie avoue que nous sommes à l'euro près. (Marques d'impatience à gauche et sur les travées du RDPI ; le brouhaha et les claquements de pupitres couvrent la voix de l'orateur.)

M. Rachid Temal.  - Au revoir !

M. Stéphane Ravier.  - Je voterai bien évidemment contre ce budget.

M. Emmanuel Capus .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Dimanche, Javier Milei est devenu le nouveau président de la République argentine. C'est la première fois qu'un libertarien autoproclamé arrive aux plus hautes responsabilités.

M. Roger Karoutchi.  - Il a été élu...

M. François Patriat.  - Hitler aussi !

M. Emmanuel Capus.  - Le populisme et le dégagisme ont trouvé un nouveau carburant : la réduction drastique des dépenses publiques. Le nouveau président promet de s'y attaquer à la tronçonneuse. « Si un ministre présente un budget en déficit, je le vire », a déclaré Milei.

Chers collègues qui craignez l'internationale de l'ultralibéralisme, rassurez-vous : la France en est encore loin. (Sourires) Il faudrait d'abord qu'elle se réconcilie avec le libéralisme. (Applaudissements sur quelques travées des groupes Les Républicains et UC)

Ce PLF n'a rien d'un budget à la tronçonneuse, c'est un budget pragmatique, qui nous ramène lentement, mais sûrement dans les clous. Le déficit est contenu à 4,5 % et l'inflation à 2,6 %. On est loin de l'austérité qui s'annonce en Argentine. Le texte du Gouvernement place la France sur une trajectoire raisonnable, sans ajustement brutal.

La commission des finances a proposé d'aller un peu plus vite : à suivre le train sénatorial, monsieur le ministre, vous arriveriez plus vite à destination. Nous avons fait de nombreuses propositions pour limiter la hausse des dépenses. Le recentrage de l'apprentissage sur les artisans et PME permettrait d'économiser 725 millions d'euros par an.

Vous connaissez l'attachement des Indépendants à l'apprentissage. Son essor est une victoire économique et culturelle pour la France...

M. Martin Lévrier.  - Excellent !

M. Emmanuel Capus.  - ... mais nous ne pourrons pas rompre avec le « quoi qu'il en coûte » sans optimiser l'utilisation des deniers publics. En supprimant l'aubaine pour les grands groupes, on renforcera l'apprentissage, qui est une chance pour nos jeunes.

M. André Reichardt.  - Très bien.

M. Emmanuel Capus.  - Je salue le rapporteur général, qui a proposé plusieurs pistes pour réduire les dépenses - comme d'économiser 150 millions d'euros en réduisant les effectifs des opérateurs de l'État.

Aucune économie n'est populaire, mais c'est le prix à payer pour continuer à investir dans les missions régaliennes de l'État. Je me réjouis des hausses des budgets de la défense, des forces de l'ordre et de la justice. Ce réarmement matériel est indispensable, car préalable au réarmement moral dont nos démocraties fatiguées ont tant besoin.

Réaliser des économies là où c'est possible, pour investir là où c'est indispensable, telle était la ligne de notre groupe. En responsabilité, nous avons voté la majorité des économies proposées par la commission. Hélas, le rejet de missions importantes, dont « Immigration » et « Cohésion des territoires », ampute le budget de manière artificielle. J'aurais préféré que la majorité fasse des propositions. (M. Roger Karoutchi proteste.)

M. Loïc Hervé.  - Nous en avons faites !

M. Emmanuel Capus.  - Ne pas adopter certaines missions, c'est ne pas répondre à certains défis. Parce qu'il manque de crédits, je crains que le budget ne manque de crédibilité.

M. Didier Rambaud.  - Très bien !

M. Emmanuel Capus.  - Pendant sa campagne, Javier Milei arrachait un à un des post-it avec les noms des différents ministères, s'exclamant à chaque fois : « afuera ! », dehors. Ce n'est pas la bonne méthode pour réduire la dette publique.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Ce n'est pas une raison pour danser le tango !

M. Emmanuel Capus.  - Il existe un chemin plus raisonnable pour rétablir nos comptes. Le groupe Les Indépendants s'abstiendra.

À mon tour de saluer le président de la commission des finances et le rapporteur général pour la tenue de nos débats, malgré les près de 4 000 amendements, ainsi que le ministre pour son assiduité et son écoute. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur certaines travées du groupe UC)

M. Michel Canévet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le groupe UC est particulièrement préoccupé par l'état des finances publiques. Il y a dix ans, sept pays de la zone euro étaient plus endettés que nous ; aujourd'hui, il n'y a plus que l'Italie et la Grèce. Vincent Delahaye a raison de réclamer la règle d'or, si l'on veut restaurer notre capacité d'action.

Nous avons cherché à améliorer les recettes, d'environ 2,1 milliards d'euros, et à maîtriser les dépenses, à hauteur de 7 milliards.

Les sénateurs centristes ont été offensifs sur le sujet du logement : Lana Tetuanui sur l'outre-mer, Ghislain Cambier sur la crise de la construction, Denise Saint-Pé sur la rénovation énergétique, Jean Hingray sur le logement étudiant, Françoise Gatel sur les besoins de financement des collectivités territoriales pour la rénovation du bâti.

Jean-François Longeot a sollicité une meilleure programmation pluriannuelle sur la biodiversité, les relations entre État et collectivités et sur la transition énergétique.

Anne-Sophie Romagny a rappelé les succès de l'apprentissage, mais aussi les difficultés de France Compétences, Annick Billon a évoqué les résultats décevants de nos élèves dans les classements internationaux, alors que le taux de réussite au baccalauréat atteint 90,7 %.

Il y a plus de 400 types d'aides de l'État. Il faudra rationaliser, si l'on veut être efficace, et que les aides n'aillent pas toujours aux mêmes. Daniel Fargeot a évoqué la place des réseaux consulaires, la question du revenu des agriculteurs et le nécessaire renouvellement des générations. Yves Bleunven a appelé à évaluer le soutien à l'investissement productif, Vincent Capo-Canellas, à évaluer les actions du plan de relance, Brigitte Devesa, à évaluer l'impact de la réforme de France Travail sur l'emploi.

Nadia Sollogoub a insisté sur la prévention en matière de santé, et aussi invité à modifier l'intitulé de la mission « Anciens combattants » ; Jocelyne Guidez a rappelé les besoins en matière d'aide alimentaire.

Jean-Michel Arnaud a dénoncé les difficultés à obtenir des titres d'identité ou de séjour sécurisés. Olivia Richard s'est émue des délais de la justice administrative. Philippe Bonnecarrère s'est inquiété des résultats décevants en matière de lutte contre l'immigration irrégulière : avec 180 titres de séjours différents, il convient, là aussi, de rationaliser. Claude Kern a plaidé pour le sport-santé, Olivier Cigolotti a évoqué les difficultés à recruter de nos armées, malgré les hausses de crédits.

Olivier Cadic et Philippe Folliot ont parlé de francophonie. Catherine Morin-Desailly a souligné que le financement de l'audiovisuel public ne pouvait reposer sur l'affectation de TVA. Sonia de La Provôté a appelé à agir pour le patrimoine et s'est inquiétée du devenir des écoles supérieures d'art territoriales.

Notons deux avancées notables, l'une due à Bernard Delcros pour France ruralité revitalisation (FRR), l'autre à Françoise Gatel, pour la prise en compte des communes nouvelles.

Bref, l'apport des centristes aura été particulièrement important sur le volet dépenses. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe UC ; MM. Laurent Somon et Claude Raynal s'amusent.)

Écoutez également nos préconisations en matière de recettes. (Acclamations et applaudissements sur les travées du groupe UC) Nathalie Goulet a fait de nombreuses suggestions pour lutter contre la fraude et l'optimisation fiscale. Bernard Delcros a défendu une contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus et la taxation des rachats d'actions par les grandes sociétés. Sylvie Vermeillet (« Ah ! » sur les travées du groupe UC) a proposé de transformer l'IFI en impôt sur la fortune improductive. Voilà des mesures concrètes. Nous vous avons aussi proposé la suppression de certaines niches fiscales. N'ayons pas peur d'avancer, pour plus de justice et d'égalité. C'est le sens du vote du groupe centriste. (Vifs applaudissements prolongés sur les travées du groupe UC ; de nombreux sénateurs applaudissant debout.)

M. Grégory Blanc .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le monde d'après est sous nos yeux.

Nous sommes entrés dans un nouveau cycle monétaire, avec des chocs inflationnistes à répétition. Les politiques budgétaires sont de nouveau centrales. Un déficit de 250 milliards euros - la moitié des recettes nettes de l'État - pose problème.

L'accès au logement est au coeur des tensions liées aux mobilités sociales et migratoires, mais aussi à nos angoisses sur le terrorisme, les guerres, les pandémies.

Alors que la planète a franchi six des neuf limites vitales, nos efforts sont insuffisants. L'accord de Paris voulait limiter le réchauffement à 1,5°C, le Gouvernement prévoit plus 4°C. Il faudrait investir 66 milliards d'euros par an, selon le rapport Ferry-Pisani-Mahfouz : nous n'en sommes même pas à la moitié.

Le Gouvernement amorce tout juste un virage écologique, mais avec 7 milliards d'euros de crédits recyclés, nous sommes très loin du compte ! Et les inégalités sociales et patrimoniales demeurent. Votre doxa de la stabilité fiscale entretient la confusion entre stabilité du système fiscal et stabilité du niveau des prélèvements obligatoires.

Pourtant, la transition écologique va heurter de plein fouet notre système fiscal, à commencer par la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) dont le rendement va baisser de 13 milliards d'euros d'ici à 2030. Refuser de préparer le virage de la fiscalité écologique par des réformes structurelles est coupable, pour la planète comme pour nos finances publiques. Pourquoi ne pas engager ce virage dès maintenant avec une visibilité pluriannuelle ? C'est à l'État de préparer le changement et de sécuriser ses citoyens.

Votre objectif de stabilité du niveau des prélèvements obligatoires est une erreur. Il faudrait dégager 120 milliards d'euros pour être au rendez-vous du déficit, de la transition écologique, et du service de la dette.

Vous voulez poursuivre les baisses d'impôt de production, mais sans dire comment elles seront compensées : par un impôt sur la consommation, le patrimoine ou le revenu des actifs ?

Nous avons besoin d'un État stratège. Une politique financière ne pas fait une politique économique, encore moins écologique.

Le Sénat n'a pas modifié structurellement ce PLF. La majorité sénatoriale a fait sienne la confusion entre stabilité du système fiscal et stabilité du niveau des prélèvements. Elle a même voté plusieurs amendements non gagés ! Faire baisser les impôts pour quelques-uns par la dette pour tous est inacceptable.

Il y a eu quelques progrès, sur les meublés de tourisme, les rachats d'actions, la DGF ou les fonds de péréquation. Je salue la création d'une taxation bioclimatique - proposition historique du GEST.

Face au défi environnemental, nous devons repenser en profondeur le consentement à l'impôt, sans faire l'autruche. Il faut cesser de diminuer les impôts de production et revisiter l'imposition du patrimoine pour prélever les richesses qui dorment. Sans ressources nouvelles, on n'y arrivera pas : il faudra bien instaurer l'ISF climatique !

La dette n'est pas un tabou, si c'est pour financer l'essentiel ; or vous l'utilisez pour baisser les impôts - contresens social et écologique.

Il faut mieux financer le logement social, pour construire immédiatement. Les Français veulent un toit à tarif abordable, dans le respect de la planète.

Nous avons fait des propositions pragmatiques et ambitieuses : elles n'ont pas été retenues, nous voterons donc contre ce budget. Je remercie le président de la commission, le rapporteur général et tous les fonctionnaires du Sénat.

L'année 2024 va s'ouvrir ; comme dirait notre collègue insulaire, c'est maintenant que les affaires se corsent. (Sourires et applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Gisèle Jourda applaudit également.)

M. Pascal Savoldelli .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K) En 2023, un quart des ménages a connu des fins de mois à découvert, quatre Français sur dix ont renoncé à des soins, la Banque de France prévoit un effondrement de l'investissement des ménages en 2023 et 2024. La vulnérabilité climatique touche les plus modestes. Alors, les gens iront-ils mieux avec ce PLF ? Non.

D'abord en raison d'une limite démocratique : ce PLF a été pensé sans la représentation nationale. Monsieur le ministre, dès le 9 octobre, vous avez assumé l'usage du 49.3 et ignoré les alertes des maires et responsables d'élus. Notre débat financier a été biaisé par des combinaisons politiques électorales.

C'est pourquoi notre groupe a proposé une motion de rejet préalable, puis un contre-budget, avec 150 propositions de recettes et de relance des services publics et du pouvoir d'achat.

Quelques mesures ont été adoptées, sur les rachats d'actions, les logements vacants, les fédérations sportives internationales ou la lutte contre la fraude fiscale. Mais d'autres propositions ont été rejetées par le Gouvernement et la majorité sénatoriale, main dans la main.

Il y a bien un clivage gauche-droite. Bruno Le Maire, candidat permanent toujours absent (applaudissements sur quelques travées des groupes Les Républicains et CRCE-K), parlait de la fin du « quoi qu'il en coûte ». Le temps des économies serait venu, mais pour qui ? La fin du bouclier énergétique fait perdre 2,3 milliards d'euros aux ménages, alors que les grands groupes énergétiques reçoivent 42 milliards d'euros !

Les collectivités vont y perdre : sans indexation de la DGF sur l'inflation, les transferts diminueront de 5,6 milliards d'euros et la suppression de la CVAE coûtera 19,6 milliards.

La droite sénatoriale a encore affaibli l'action publique : moins 4,7 milliards pour l'agriculture, moins 2 milliards pour l'immigration, moins 1,4 milliard pour le plan de relance, moins 4 milliards pour l'audiovisuel public et surtout moins 19 milliards pour la cohésion des territoires !

Les projets du Gouvernement et de la droite se confondent : des économies sur les ménages, les services publics et les territoires, sans toucher aux actionnaires ni aux plus hauts revenus !

Nous sommes loin de la révolution écologique, comme vous le dites, monsieur Cazenave.

Socialisation des pertes et privatisation des profits : vous choisissez la dette plutôt que l'impôt. On compte 1 800 aides aux entreprises. La dette vient du refus d'une fiscalité juste et progressive pour tous, car notre système fiscal est dégressif pour les 1 % les plus riches ! Voilà d'où viennent la dette et le déficit.

Avec 145 milliards d'euros de déficit, nous atteignons un record. Nous dépendons des marchés financiers, et les intérêts de la dette fragilisent l'État. L'argent prend le pas sur nos valeurs. Or l'argent ne fait ni la nation ni la démocratie.

La dette privée des entreprises - 62 % du PIB - est taboue. Le Gouvernement choisit de la décentraliser et de la faire porter sur les collectivités territoriales et les salariés, qui n'en sont pas responsables.

Nous voterons contre ce budget qui n'améliorera pas la vie des Français, ne réglera ni la crise énergétique ni la bombe sociale du logement

Le Gouvernement et Les Républicains se sont accordés hier soir sur un article d'équilibre à 42 milliards d'euros. Tout était écrit d'avance ! La vérité, c'est que la droite n'a pas de budget alternatif. Nous oui, et il n'est ni irréaliste, ni extrémiste. L'année 2024 sera peut-être celle d'une résistance nouvelle, populaire, large et unitaire. Tout est possible ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et sur quelques travées du GEST)

M. Christian Bilhac .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Ainsi s'achève notre marathon budgétaire. Mais contrairement au marathon olympique dont la distance est immuable, le nôtre ne cesse de s'allonger. Le droit d'amendement est fondamental, mais peut-être faudra-t-il modifier notre Règlement pour respecter le délai constitutionnel d'examen. Cela dit, je me félicite que le temps programmé sur les missions ait été respecté, grâce à l'attention permanente et bienveillante du président Raynal, que je remercie ainsi que le rapporteur général et le ministre, pour son écoute et sa pédagogie.

Sur la partie recettes, je salue les avancées pour les collectivités, avec 1,5 milliard d'euros supplémentaires : fonds d'urgence pour les inondations, dotation incendie, revalorisation de la DGF, prolongation du filet de sécurité énergie, dotation pour les départements, élargissement de la dotation particulière « élu local » (DPEL). Les zones France Ruralités Revitalisation (FRR) sont une avancée, même si nous regrettons le rejet de notre amendement réintégrant le beau département du Lot : monsieur le ministre, nous comptons sur vous et je vous en remercie par avance ! (M. Thomas Cazenave s'amuse.)

Nous nous félicitons également des avancées pour les chambres consulaires, sans oublier l'élargissement du PTZ.

Sur les dépenses, la plupart des missions ont été adoptées, à l'exception de celles sur la cohésion des territoires, l'immigration, le sport et la vie associative, l'audiovisuel public, entre autres. Si les amendements du Gouvernement seront très probablement conservés dans un 49.3, qu'en sera-t-il de ceux du Sénat ?

Le Sénat a fait preuve de responsabilité : le déficit global a été réduit. Mais il devient de plus en plus inquiétant, et la charge de la dette sera encore alourdie par la hausse des taux d'intérêt.

Je siège ici depuis trois ans : je constate que tous les événements récents - crise sanitaire, guerre en Ukraine - rendent nos prévisions obsolètes. Alors, marc de café ou boule de cristal ? Les prévisions gouvernementales sont optimistes, mais conditionnelles...

Les collectivités territoriales ont de moins en moins d'autonomie fiscale. L'État ne conserve que le tiers du produit fiscal de la TVA. (M. Thomas Cazenave acquiesce.) Le coût de la dette dépasse les 54 milliards d'euros : lorsqu'on doit voir son banquier tous les mois, on est à sa merci... Ce n'est pas sur les services publics qu'il faut s'acharner, mais sur notre suradministration, pléthorique et paralysante.

Nous nous réjouissons de l'adoption d'une quinzaine d'amendements du RDSE. Certains ont été retirés après engagement du Gouvernement, notamment sur les contrats d'apprentissage (M. Thomas Cazenave acquiesce) et les pensions des veuves de harkis.

Je voterai ce PLF et mon groupe se partagera entre approbation et abstention. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Bernard Buis applaudit également.)

M. Didier Rambaud .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Début octobre, la droite sénatoriale nous avait annoncé un contre-budget, responsable et équilibré. Quelque 70 heures de débat plus tard, le voici : nous ne sommes pas déçus du voyage !

Voici votre manifeste d'il y a deux mois ! (M. Didier Rambaud brandit une brochure.) Trente-quatre pages de promesses d'un lendemain meilleur : renforcement de l'État, fin des petites économies, politique familiale de droite, économies sur le RSA, l'AME, l'hébergement d'urgence et l'APD... Lisez-le : c'est beau, c'est bleu, c'est grand !

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Vous devriez être plus modeste.

M. Didier Rambaud.  - M. Marleix défendait ce contre-projet, comme un rempart à la politique du chien crevé qui suit le fil de l'eau, selon les mots d'André Tardieu.

M. Marc-Philippe Daubresse et M. Jean-François Husson.  - On est au Sénat ici !

M. Didier Rambaud.  - C'est dans votre valse des milliards que votre budget a fini par sombrer. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

En première partie, l'amendement du président Retailleau sur le quotient familial a été rejeté par vos amis centristes ; puis, nouveau revers sur l'assurance vie. Victimes, vous aussi, de votre majorité relative, on ne compte plus les taxes et niches fiscales créées par vos amis centristes. (Lazzi sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

La seconde partie a démontré votre irresponsabilité (huées sur les travées du groupe Les Républicains) : pas de crédits pour le sport l'année des jeux Olympiques, aucun budget pour la politique migratoire, nulle politique du logement, fin du plan de relance, et j'en passe !

M. François Patriat.  - Très bien !

M. Didier Rambaud.  - Vous auriez pu proposer un contre-budget, mais au pied du mur, rien ! Vous avez pourtant une majorité, vous êtes responsable de votre texte.

Vous demandez la conservation des apports du Sénat, mais de quoi parlez-vous ? De la disparition comme par magie de la dette covid ? La gauche en a rêvé, vous l'avez fait.

Vous supprimez des postes de fonctionnaires, mais où ? Dans l'éducation nationale, la police, la justice ? Vous n'avez pas le courage d'aller au-delà des incantations. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; MM. Thomas Dossus, Ggory Blanc et Mme Cathy Apourceau-Poly applaudissent également.)

M. Jacques Grosperrin.  - On sent En Marche blessée. C'est Rambaud, pas Rimbaud...

M. Didier Rambaud.  - Monsieur le rapporteur général, si vous êtes aux responsabilités, les comptes seront rétablis, mais à quel prix ? Chacun y va de son petit amendement pour son électorat.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances.  - Vous avez écrit cela avant-hier ?

M. Didier Rambaud.  - L'irresponsabilité coûte cher, surtout lorsqu'elle préside aux décisions de toute une famille politique.

Le kantisme a les mains pures, mais il n'a pas de mains, disait Péguy.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - C'est le crépuscule de Renaissance...

M. Didier Rambaud.  - Le groupe Les Républicains a un budget à l'équilibre, mais il n'a pas de budget. (Rires sur les travées du RDPI)

Nous avions pourtant voté de bonnes choses en première partie : réduction de l'avantage fiscal sur les meublés de tourisme, déliaison de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS), taxe streaming - sur une idée de notre ancien collègue Julien Bargeton...

Mais je déplore, entre autres, le délai de carence dans la fonction publique, le rejet de 10 000 postes dans la fonction publique d'État, la baisse des moyens de l'AME.

Ce budget ne ressemble à rien : ni à un budget digne d'un parti de Gouvernement ni à un budget tout court. C'est un texte à trous. Vos coups de rabot sont des coups de hache (Mme Sophie Primas et M. Jacques Grosperrin protestent) et vos amendements ne sont pas évalués. (M. Marc-Philippe Daubresse et Mme Christine Lavarde protestent.)

Si le Gouvernement décide de garder les prétendus apports du Sénat, vous seriez les premiers à lui reprocher l'abandon des services publics.

Le seul vote raisonnable est l'abstention, comme le fera le RDPI. (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Bernard Fialaire applaudit également ; huées sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Thierry Cozic .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Yannick Jadot applaudit également.) Ce vote n'a de solennel que le nom. Après un énième 49.3, nous ne pouvons que nous interroger sur notre mission. Les heures passées à siéger, de jour comme de nuit, ne sauraient être balayées par le choix d'un seul homme : nous ne pouvons nous résoudre à ce que le Parlement ne soit plus qu'une chambre d'enregistrement.

Le cinglant camouflet du Gouvernement hier est un signe : cette méthode est inacceptable. Si nous ne sommes pas capables d'inventer un mode d'organisation politique plus acceptable, alors d'autres s'en chargeront, ceux qui disent que le problème est la démocratie. Cet effondrement des croyances liées à la démocratie doit nous préoccuper au plus haut point.

Ce budget est face à un triangle d'incompatibilité que trois semaines de séance n'auront pas résolu. Baisser l'impôt - votre obsession - et réduire les déficits, monsieur le ministre, vous n'êtes pas à une incohérence près.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - C'est vrai !

M. Thierry Cozic.  - J'en veux pour preuve vos investissements verts, bien loin de vos objectifs de décarbonation. Et vous de nous convaincre que les baisses de la dépense publique ne se feraient pas au détriment des plus fragiles. Mais personne n'est dupe...

Pourtant la promesse était alléchante : consolider les finances publiques, baisser la fiscalité et investir pour l'avenir. Ce « en même temps » très macronien s'est une nouvelle fois fracassé contre la réalité. Votre boussole reste la baisse systémique des impôts sur le capital.

Vous avez refusé, comme chaque année, d'aborder les sujets structurants, comme la fiscalité du capital et la contribution des plus aisés à l'effort de redressement des comptes publics. Quelle cécité dogmatique ! Refus d'un ISF, suppression de la flat tax... rien n'aura trouvé grâce à vos yeux.

Mais cela a un coût : ce désarmement fiscal permanent ne permet pas de réduire la dette. Il n'y a pas d'argent magique, comme aime à le dire la majorité présidentielle.

Et la dette écologique ? Elle n'est ni négociable ni renouvelable. La bifurcation écologique aurait dû être au coeur de ce budget : 34 milliards d'euros sont nécessaires, les 7 milliards prévus sont dérisoires. Avec une mise de départ si faible, comment croire à la multiplication des pains ? (Sourires) Et vous demandez aux collectivités territoriales de baisser leurs dépenses !

Nous vous avons pourtant proposé un ISF climatique. Vous avez aussi refusé l'indexation de la DGF sur l'inflation : au moment du vote, la droite sénatoriale, si prompte à se dire le grand défenseur des territoires, a brillé par son absence...

L'avenir des ruralités est peu lisible dans la cacophonie de l'article 7. Près de 75 % des articles transmis au Sénat n'ont pas fait l'objet d'une étude d'impact. Tout cela fleure bon l'amateurisme.

Sur de nombreux sujets, personne n'a rien compris. J'espère que le zonage concernant les ruralités permettra un atterrissage en douceur.

Autre question : le devenir de nos amendements votés sur ces bancs. Quelle démocratie voulons-nous ? Allez-vous balayer notre amendement à 350 millions d'euros en faveur des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) ? Allez-vous revenir sur la suppression de la scandaleuse niche fiscale Fifa, introduite à l'Assemblée nationale ? Allez-vous maintenir le PTZ pour les primo-accédants sur tout le territoire ? Le fonds de soutien aux activités périscolaires ?

M. Mickaël Vallet.  - Essentiel !

M. François Patriat.  - Irresponsable !

M. Thierry Cozic.  - Parce qu'il ne se fait aucune illusion, le groupe SER votera contre ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe CRCE-K et du GEST)

M. le président.  - Conformément à l'article 60 bis du Règlement, il va être procédé à un scrutin public à la tribune. Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l'appel nominal : lettre M. (Exclamations diverses)

Le projet de loi de finances pour 2024, modifié, est mis aux voix par scrutin public à la tribune de droit.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°98 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 294
Pour l'adoption 191
Contre 103

Le projet de loi de finances pour 2024, modifié, est adopté.

M. Gérard Larcher, président du Sénat .  - Nous voici arrivés au terme de notre marathon budgétaire. Nous avons battu de nouveaux records : 151 heures de séance, contre 144 l'année dernière ; 3 760 amendements, contre 3 040 l'an passé. Malgré les évolutions engagées depuis deux ans, le constat s'impose : il devient de plus en plus difficile d'assurer la qualité de nos débats dans le cadre contraint fixé par la Constitution. Je souhaite que la réflexion sur ce sujet se poursuive dans le cadre de la Conférence des présidents.

Je remercie particulièrement le rapporteur général pour son écoute, la qualité de son travail et ses avis ; le président Raynal pour sa vigilance et sa pédagogie, qui nous ont permis de respecter les délais d'examen ; les présidentes et présidents de séance ; nos 49 rapporteurs spéciaux et 76 rapporteurs pour avis, ainsi que les présidents de commission et les chefs de file des groupes politiques. Je remercie aussi l'ensemble du personnel du Sénat et des groupes politiques, en particulier le secrétariat de la commission des finances.

Je crois profondément au droit d'amendement, mais je vous le demande avec une certaine solennité : 3 760 amendements, cela a-t-il encore un sens ? Nous devrons remettre l'ouvrage sur le métier, si nous voulons que l'examen du budget reste un temps fort de la démocratie parlementaire. D'autant que, du fait de la situation politique, l'essentiel du débat budgétaire se tient dans notre assemblée. Notre rôle est donc essentiel pour éclairer la décision du Gouvernement.

Je vous remercie, monsieur le ministre, ainsi que vos collègues qui se sont succédé au banc du Gouvernement. En écoutant Mme Lavarde, j'ai compris qu'elle était tombée sous votre charme... (Sourires)

M. Claude Raynal, président de la commission des finances .  - Je m'associe, monsieur le président, aux remerciements que vous avez formulés. L'année dernière, en parlant du nombre d'amendements, j'avais dit : la coupe est pleine. Cette année, elle a débordé... (Sourires) Surtout dans la première partie : nous avons dû utiliser tous les temps possibles pour traiter l'ensemble des amendements.

Mme Christine Lavarde.  - Sauf le dimanche matin...

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Il faudra y réfléchir. Mais il est clair que cette situation résulte notamment du fait que l'Assemblée nationale n'a pas débattu du texte.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Absolument !

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Traditionnellement, de nombreux sujets étaient, en quelque sorte, prétraités par l'Assemblée nationale. Ce n'est plus le cas. Or nous ne disposons que de vingt jours pour examiner l'ensemble du PLF.

Je salue le travail de la direction de la séance pour faciliter nos débats de seconde partie en regroupant les amendements par thématique. La qualité de nos travaux s'en est favorablement ressentie. Sans ce travail, je crois que nous aurions été totalement débordés.

Je remercie le personnel de la commission des finances. Compte tenu du nombre d'amendements, nous avons dû réunir la commission presque tous les jours. Notre secrétariat a travaillé toutes les nuits. Je vous demande de l'applaudir. (Applaudissements) Ce travail est souterrain, mais essentiel à nos travaux. Je remercie aussi les fonctionnaires de la séance et les administrateurs des autres commissions qui ont assisté les rapporteurs pour avis.

Merci, mes chers collègues, d'avoir toléré que je vous suggère d'accélérer à tel ou tel moment... Je me suis efforcé de veiller à ce que les débats majeurs ne soient pas escamotés.

Je remercie le ministre pour son assiduité et la qualité de ses réponses. Il a su garder son sang-froid (M. Thomas Cazenave sourit), contrairement à certains de ses collègues...

M. André Reichardt.  - Au moins ils étaient là !

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Nous avons fait oeuvre utile en examinant l'intégralité du budget. Nous en retirons beaucoup d'informations, qui nourriront le travail parlementaire.

Reste que nous devons améliorer encore notre procédure. Ne vous sentez pas obligés de passer toujours par voie d'amendement, il y a bien d'autres façons de faire avancer le travail parlementaire !

Je remercie enfin le rapporteur général, qui a remarquablement assuré son rôle. (Applaudissements)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances .  - Merci à vous aussi, monsieur le président.

Au terme de ce débat qui me paraît réussi, je salue l'écoute du ministre.

Notre démocratie ne peut vivre que lorsque les assemblées se réunissent et délibèrent. Faute de débat à l'Assemblée nationale, le Sénat a dû mettre les bouchées doubles, dans un délai contraint. Au lieu de la traditionnelle « nuit de la mort », nous avons eu toute une semaine difficile - et même, en ce qui me concerne, un dimanche fatal, au cours duquel Mme Lavarde m'a remplacé au pied levé, avec succès.

En ces temps compliqués pour la démocratie, je vous remercie pour nos échanges sereins et constructifs. Chacun a eu sa part de satisfactions - et ses échecs, moi y compris. Ce qui s'est passé hier à l'Assemblée nationale ne fait que confirmer que notre démocratie est fragile. Écoutons-nous les uns les autres pour tenter d'ouvrir des perspectives de solution, comme nous le faisons au Sénat.

Faute de débat à l'Assemblée nationale, les textes sont plus faibles, des articles additionnels nous arrivent sans examen du Conseil d'État ni étude d'impact. Certains sénateurs de la majorité présidentielle ont jugé sévèrement notre travail - c'est le jeu. Notre copie n'est pas parfaite, mais elle est issue de 150 heures de débats de bonne tenue ; le Gouvernement doit la considérer à sa juste valeur, car le Sénat exprime aussi la voix de la France, à travers les territoires et les élus locaux.

Votre responsabilité, monsieur le ministre, est grande, plus encore aujourd'hui qu'avant-hier. Portez auprès du Gouvernement et du Président de la République ce message : au Sénat, la démocratie vit, comme bat le coeur des territoires. Conservez nos apports, sans quoi notre démocratie sera encore plus fragile. Je vous fais confiance. (Applaudissements)

M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics .  - Au cours de ces 150 heures de travail et 3 700 amendements, nous avons bien travaillé. Nous avons réussi à nous mettre d'accord sur un certain nombre d'orientations. Nous continuons à soutenir les entreprises via la suppression de la CVAE, et la réindustrialisation via le crédit d'impôt. Nous nous sommes mis d'accord sur une trajectoire de transition écologique avec la sortie progressive du gazole non routier (GNR) ou le malus pour les véhicules les plus polluants.

En matière de justice fiscale, nous avons fixé un taux d'impôt minimal conformément à l'accord de l'OCDE, indexé le barème de l'impôt sur le revenu et adopté un plan de lutte contre la fraude fiscale. Les enrichissements du Sénat sont nombreux : taxe streaming, exonérations pour Mayotte, avancées pour les communes nouvelles...

Il y a aussi des sujets de désaccord, en particulier autour des collectivités territoriales : sur la nécessité de renforcer encore leurs moyens, sur le scénario d'évolution du prix de l'électricité, sur certaines niches fiscales créées par le Sénat. Certes, vous avez ramené le déficit à 3 %, mais au prix de la suppression de nombreuses missions - le rapporteur général l'a reconnu.

Nous pouvons travailler encore mieux l'année prochaine, notamment par une préparation plus en amont. Je remercie le président Raynal, le rapporteur général et Mme Lavarde qui l'a remplacé un dimanche funeste (sourires), sans oublier les équipes du Sénat et de Bercy. (Applaudissements sur de nombreuses travées)

La séance est suspendue à 16 h 45.

Présidence de M. Mathieu Darnaud, vice-président

La séance reprend à 16 h 55.