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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution

M. François Bayrou, Premier ministre

Salut à une délégation étrangère

Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution (Suite)

M. Mathieu Darnaud

M. Patrick Kanner

M. Hervé Marseille

M. François Patriat

M. Claude Malhuret

Mme Cécile Cukierman

Mme Maryse Carrère

M. Guillaume Gontard

M. Joshua Hochart

M. François Bayrou, Premier ministre

Rappels au règlement

Mme Cécile Cukierman

M. Pascal Savoldelli

M. Thomas Dossus

Mme Evelyne Corbière Naminzo

M. Michel Canévet

CMP (Nominations)

Commissions d'enquête (Nominations)

Projet de loi de finances pour 2025 (Suite)

Seconde partie (Suite)

Outre-mer

M. Georges Patient, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

M. Teva Rohfritsch, rapporteur pour avis de la commission des lois

M. Akli Mellouli

M. Christopher Szczurek

M. Marc Laménie

M. Georges Naturel

Mme Salama Ramia

M. Jean-Marc Ruel

Mme Lana Tetuanui

Mme Evelyne Corbière Naminzo

Mme Catherine Conconne

Mme Annick Petrus

Mme Audrey Bélim

Mme Viviane Malet

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer

Examen des crédits de la mission

Article 42 (État B)

Modifications de l'ordre du jour

Mise au point au sujet d'un vote

Projet de loi de finances pour 2025 (Suite)

Seconde partie (Suite)

Outre-mer

Examen des crédits de la mission (Suite)

Article 42 (État B - Suite)

Ordre du jour du jeudi 16 janvier 2025




SÉANCE

du mercredi 15 janvier 2025

37e séance de la session ordinaire 2024-2025

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mmes Catherine Di Folco et Patricia Schillinger.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution

M. le président.  - L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution.

M. François Bayrou, Premier ministre .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP, ainsi que sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains) Je n'ai pas l'intention de refaire le discours de politique générale que vous avez entendu hier - certains diront peut-être longuement... - par la voix de la ministre d'État Élisabeth Borne. J'en rappellerai simplement les grandes lignes.

Nous sommes entrés dans un temps extrêmement dangereux. Les nations qui avaient vécu pendant trois quarts de siècle dans un ordre qui paraissait établi et immuable ont basculé, au moment de l'attaque de la Russie de Vladimir Poutine contre l'Ukraine, dans un autre univers, commandé par la loi du plus fort, qui impose sa volonté aux autres.

Autour de cette agression, naguère inimaginable, se sont unis des pays qui ont profité de ce bouleversement de l'ordre international pour se glisser dans l'alliance de ceux qui en contestent la validité. C'est ainsi que l'Iran et la Corée du Nord ont participé à l'agression, par la fourniture d'armes et même par la mobilisation de forces humaines sur le terrain.

À ces éléments militaires s'en ajoutent d'autres, économiques, commerciaux et industriels.

Le mois dernier, la Chine a franchi le cap des 1 000 milliards d'euros d'excédent commercial. Notre Europe est d'une certaine manière paralysée, parce qu'elle respecte des règles que d'autres ne respectent pas, dans une démarche de dumping extrêmement agressive.

Longtemps nos alliés dans la défense de l'ordre international, les États-Unis ont réorienté leur politique vers l'affirmation de la puissance et une tentative de domination technologique, industrielle et commerciale, avec l'aide d'un système judiciaire extrêmement efficace, qui impose les normes américaines à tous ceux qui commercent en dollar. Cela crée un déséquilibre, et les fonds disponibles pour l'investissement se précipitent vers les États-Unis. Il en résulte une distorsion de puissance et de croissance phénoménale.

L'Allemagne, première puissance économique européenne, est en récession depuis deux ans. La France, elle, a enregistré l'année dernière une croissance supérieure à 1 %. C'est une différence de situation que nous pouvons revendiquer, sans qu'elle résolve tous nos problèmes.

Face aux tentatives de domination dont j'ai parlé, nous n'avons qu'une ressource : que l'Union européenne s'affirme comme entité et comme volonté. La France, le Président de la République, y travaillent, avec le concours de parlementaires de nombreuses sensibilités. Nous avons un marché et une capacité industrielle et de recherche qui nous permettent de faire jeu égal avec les États-continents.

La France connaît une situation particulière, marquée par un endettement croissant confinant au surendettement, contre lequel j'ai longtemps essayé, avec quelques autres, d'alerter l'opinion nationale, sans parvenir à mobiliser toutes les forces du champ démocratique au moment où il était déjà temps d'agir.

L'heure est au ressaisissement. J'en ai présenté hier les grandes lignes. Entrons donc dans le vif du sujet. (Marques d'ironie)

M. Rachid Temal.  - Enfin !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - La question des retraites est devenue centrale, presque obsédante, dans le débat public. Pendant des années, je n'ai pas réussi à mobiliser l'attention sur le grave déséquilibre de financement de notre système.

Le total des pensions versées s'est élevé l'an dernier à 380 milliards d'euros. Dans un système par répartition, cette dépense devrait être couverte par les cotisations des actifs et des entreprises. Or ces cotisations et les transferts d'impôt prévus représentent 325 milliards d'euros. En d'autres termes, la puissance publique dépense chaque année 55 milliards d'euros pour les retraites.

M. Stéphane Ravier.  - C'est le coût de l'immigration ! (Nombreuses marques de désapprobation à gauche)

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Plus précisément, de 10 à 15 milliards d'euros sont versés par les collectivités territoriales, de 40 à 45 milliards d'euros par l'État. Et ce transfert annuel, de l'ordre de 1,8 % du PIB, dure depuis le début des années 1990.

Or de cet argent public, nous n'avons pas le premier centime. Nous l'empruntons, tous les ans, depuis des décennies. C'est ainsi que la part de notre dette liée aux retraites est de l'ordre de 50 %.

Ce fait a été très longtemps nié, y compris par les organismes officiels. Il y a deux ou trois ans encore, notre système était présenté comme équilibré, et même - tenez-vous bien - légèrement excédentaire. (M. Emmanuel Capus approuve.)

Comme la structure démographique du pays est très déséquilibrée, il n'y a aucun espoir que cette situation s'améliore naturellement. Ou plutôt, il n'y a qu'un espoir, qui tient à notre politique économique : si notre taux d'emploi était celui de nos voisins, si notre productivité progressait comme la leur, nous n'aurions pas, pour l'instant, de problèmes de financement des retraites. Mais cela est illusoire, compte tenu de nos difficultés économiques.

Il est donc impossible d'imaginer l'avenir sans une réforme de notre système de retraites. Michel Rocard avait dit : il y a là de quoi faire tomber dix gouvernements. Dix, l'estimation me paraît modeste...

Le gouvernement dirigé par Élisabeth Borne, que je remercie d'avoir rejoint le mien, a mené la réforme la plus récente. Comme toutes, elle a été discutée et contestée. Au cours des derniers mois et semaines, nous avons constaté avec intérêt que de nombreux partenaires sociaux pensent avoir trouvé des voies d'amélioration de notre système. Les prenant au mot, nous leur disons : le moment est peut-être venu de rouvrir cette question et de remettre sur le chantier la réforme du système de retraites.

Les partenaires sociaux se sont tous, à ma connaissance, déclarés favorables à la reprise de ce travail en commun. Tous ont dit être prêts à rediscuter. Nous avons donc ouvert un nouveau cycle de travail. Ce travail est confié principalement aux partenaires sociaux - l'État y participe naturellement, comme responsable de la retraite des agents publics.

Nombre d'acteurs politiques mettent en doute la volonté des partenaires sociaux de s'entendre ou leur capacité à le faire. Mais la confiance accordée aux partenaires sociaux et la démocratie sociale sont l'un des piliers de notre démocratie ! Les partenaires sociaux sont légitimes et nous leur faisons confiance. Tout récemment encore, la plupart d'entre eux ont indiqué que cet espoir valait mieux que la stagnation.

Je les réunirai dès vendredi, sur le fondement d'un constat indiscutable, puisque découlant d'une mission flash de la Cour des comptes visant à établir la réalité chiffrée du financement des retraites. J'imagine que nul ici ne remet en cause l'indépendance de la Cour des comptes. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

Mmes Émilienne Poumirol, Marie-Pierre de La Gontrie et Raymonde Poncet Monge.  - Et le COR ?

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Nous devons défendre les institutions grâce auxquelles nous pouvons diriger notre destin. La Cour des comptes en est une.

Ce travail des partenaires sociaux aura un horizon assez proche, pour que personne ne puisse soupçonner qu'on cherche à noyer le poisson ou qu'on joue l'attentisme. (On ironise sur certaines travées à droite.) J'ai fixé une durée de trois mois, conformément au souhait de certaines organisations syndicales.

Je crois possible, probable même, que des voies d'amélioration soient trouvées. Si tel est le cas et que l'équilibre financier est respecté, un texte de loi sera soumis à l'Assemblée nationale et au Sénat pour traduire le résultat des négociations. En cas d'échec, nous en resterons au texte actuel (M. Francis Szpiner s'en félicite) : c'est le seul moyen de sauver l'image de notre pays - pensez aux agences de notation, qui jouent un rôle si important pour l'évolution de notre crédit auprès des investisseurs.

Un certain nombre de courants politiques soutiennent que les organisations patronales voudront faire échouer cette négociation. Je ne le crois pas. J'ai confiance dans le fait que tous les partenaires sociaux ont la volonté de réaliser des progrès. Je le réaffirme : la démocratie sociale est vitale pour notre pays.

Enfin, si cette conférence sociale débouche sur des accords partiels, nous les reprendrons dans un texte de loi soumis au Parlement.

En tout état de cause, la démocratie parlementaire aura le dernier mot, et il est bon qu'il en soit ainsi.

Telles sont les trois hypothèses pour le résultat de cette démarche, qui est la voie la plus franche, la plus transparente et la plus honnête qu'on puisse emprunter.

J'en viens à la question du budget.

Nous repartons de l'état de la délibération atteint au Sénat. Non pas - que nul ne le prenne mal - que le texte dans son état actuel soit parfait.

M. Jean-François Husson.  - Il est bien...

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Mais c'est le seul moyen d'aboutir rapidement, pour ne pas aggraver les dégâts causés par l'absence de budget.

Pour répondre à votre demande de transparence et de sincérité, monsieur le président du Sénat, nous réviserons l'hypothèse de croissance de 1,1 à 0,9 %, soit la prévision de la Banque de France. De même, l'inflation prévisionnelle sera ramenée à 1,4 %. (M. Jean-François Husson s'en félicite.)

Nous visons un déficit non de 5, mais de 5,4 %. Nous espérons y arriver...

M. Jean-François Husson.  - Il le faut !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - ... compte tenu des interventions innombrables de ceux qui, tout en défendant l'équilibre des comptes, proposeront des dépenses supplémentaires dans tous les domaines et avec les meilleures raisons du monde.

Nous protégeons les collectivités territoriales en maintenant la décision du Sénat de ramener leur effort à 2,2 %.

Nombreuses voix.  - Milliards !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - En effet : 2,2 milliards d'euros, contre 5 milliards d'euros initialement prévus. Cette mesure permettra notamment de rétablir l'équilibre des budgets de fonctionnement, ce qui est une clé des budgets d'investissement. Les collectivités sont le principal pôle d'investissement public. C'est pourquoi nous sommes totalement de l'avis du Sénat sur ce point. (Applaudissements sur de nombreuses travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

S'agissant du PLFSS, il faut souligner une évolution considérable : nous relevons l'Ondam de 2,9 à 3,3 %. Plusieurs milliards d'euros supplémentaires iront ainsi, notamment, au financement des hôpitaux.

Voix à gauche. - Millions !

M. le président. - Veuillez poursuivre.

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Tout le monde n'est pas obligé d'avoir le sens des ordres de grandeur (exclamations ironiques sur diverses travées), ...

M. Pascal Savoldelli.  - Un peu quand même...

M. François Bayrou, Premier ministre. - ... même si je pense que l'arithmétique est l'une des bases de l'enseignement primaire...

Le Gouvernement assume cet effort considérable au service de notre système de santé.

Pour l'essentiel, ce sont les choix budgétaires du Sénat que nous retenons. En particulier, nous entendons nous attaquer aux dépenses improductives ou excessives. Nous regarderons de près le budget des agences et les augmentations injustifiées. Je ne parle pas de « budget base zéro », comme dans d'autres pays européens, mais il faut reconsidérer la structure de notre dépense publique en fonction de l'utilité sociale et démocratique des politiques.

Nous prévoyons la baisse de dépenses la plus importante qui ait jamais été proposée au Parlement : 30 milliards d'euros. L'effort est très difficile, mais si nous ne prenons pas à bras-le-corps le rééquilibrage de nos comptes, tout ce que nous ferons par ailleurs sera vain.

Telle est notre méthode de réforme, marquée par le courage nécessaire et la prise en compte des défis nationaux, européens et internationaux. C'est le seul moyen d'être à la hauteur de l'heure et de notre mission. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP, sur des travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Yannick Jadot.  - Pas un mot sur l'écologie !

Salut à une délégation étrangère

M. le président.  - Je salue la présence dans notre tribune d'honneur, aux côtés du président de notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, de M. Titus Corl??ean, président de la commission des affaires étrangères du Sénat de Roumanie, et de Mme l'ambassadrice de Roumanie en France. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

Leur présence en ce moment important de notre vie politique et constitutionnelle souligne la qualité de notre relation avec un pays auquel nous lie une solidarité ancienne, particulièrement vivante alors que nous sommes engagés à travers nos forces armées en Roumanie comme nation-cadre de l'OTAN.

Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution (Suite)

M. Mathieu Darnaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pour la seconde fois en moins de six mois, nous débattons sur une déclaration de politique générale. La répétition de cet exercice n'est pas commune sous la Ve République. Elle témoigne d'une instabilité insupportable pour nos concitoyens.

Je ne parlerai pas de crise de régime, car nous n'en sommes heureusement pas là : l'extraordinaire plasticité de la Constitution de 1958 nous a protégés et, contrairement à ce que d'aucuns prétendent, nous protège encore.

M. Max Brisson.  - Très bien !

M. Mathieu Darnaud.  - Pour autant, la situation, inédite, nous oblige à des actions fermes, claires et efficaces. Nous en sommes loin. Mais l'audace n'est jamais impossible et la volonté, toujours envisageable.

Je rends hommage à votre prédécesseur, Michel Barnier. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP ; M. Jean-Baptiste Lemoyne et Mme Véronique Guillotin applaudissent également.) Après sa déclaration de politique générale, j'avais insisté sur la gravité du moment et notre responsabilité collective. Moins de trois mois plus tard, nous voici revenus à la case départ en raison d'une irresponsable alliance des contraires.

M. Alain Chatillon.  - Très bien !

M. Mathieu Darnaud.  - L'urgence de l'action s'est accrue. Car, n'en déplaise aux mauvais esprits, il faut un budget pour qu'un pays avance, une stabilité politique pour qu'une République protège, une vision politique pour qu'un gouvernement entraîne son peuple.

La France pourra-t-elle encore peser en Europe et dans le monde si elle perd la maîtrise de son destin ? Le monde de 2025 ne fera pas de cadeaux aux nations fragiles.

Dans ce contexte, il ne nous faut rien de moins qu'un rétablissement historique, comparable à celui de 1958. Il faut montrer à nouveau aux Français une voie de progrès et d'espoir. Saurez-vous le faire, monsieur le Premier ministre ? J'ose l'espérer.

Si l'on devait résumer en trois mots la période actuelle, ces mots seraient : urgence, responsabilité, action.

Urgence parce que, pour la première fois depuis 1979, la France est dépourvue d'un budget. Et les Français s'impatientent ! Le vote d'un budget sincère et cohérent est indispensable. Urgence aussi, car la crise politique que nous traversons a été exacerbée par la censure du gouvernement de Michel Barnier. Urgence en outre, parce que les tensions géopolitiques sont attisées et menacent notre souveraineté : la guerre sévit en Ukraine, l'impérialisme américain ressurgit et le Moyen-Orient souffre d'une instabilité chronique. Urgence enfin, car la France est fragilisée dans son système de protection sociale, sa capacité économique, sa justice et sa sécurité.

Vous avez souhaité ouvrir un dialogue avec les représentants des différentes forces politiques. Je vous ai exposé nos priorités. C'est le respect de ces priorités qui conditionne notre soutien au programme que vous venez de présenter.

Ce soutien est vigilant, car toutes les réponses ne sont pas encore apportées et des points restent à clarifier. C'est au fil de l'action concrète que l'on peut juger d'un programme de gouvernement. C'est aussi en vous appuyant sur les travaux du Sénat que vous pourrez réussir.

Ni rejet a priori ni soutien inconditionnel : nous jugerons sur pièces. Contrairement à d'autres, nous n'affichons pas d'emblée ces « lignes rouges » très à la mode ; mais nous avons des convictions, que vous connaissez.

Sur le budget, nous ne voulons pas de hausse d'impôt. Dans un pays détenant déjà le triste record du taux de prélèvements obligatoires, ce ne serait pas acceptable. N'est-il pas temps d'entériner un changement de paradigme, d'oser enfin réduire la dépense publique ? Vous y semblez prêt. Montrez aux Français que vous pouvez transformer un État boursouflé et empêtré dans ses lourdeurs bureaucratiques.

Je pense à la multiplication des agences et opérateurs de l'État, qui doublonnent les administrations et tendent à rendre l'État toujours plus impuissant. Le temps est venu de mener un audit de ces structures, car il y a là des pistes d'économies.

L'État doit se recentrer sur ses missions premières, être plus efficace et moins dispendieux. Il doit protéger les plus faibles, sans étouffer les classes moyennes et mieux accompagner les Français dans la nécessaire transition écologique, en préférant enfin l'incitation à la punition.

Lors du début de l'examen du PLF, notre groupe a formulé des propositions d'économies pragmatiques, adoptées par le Sénat. N'hésitez pas à vous en inspirer ! Comme le disait Gambetta, « lorsque le Sénat délibère, c'est la République qui réfléchit. »

Vous avez souligné les menaces pesant sur la pérennité de notre système de retraite. Notre responsabilité de parlementaires et votre responsabilité de gouvernant est de veiller à ce qu'il perdure dans de bonnes conditions. Pourtant, si vous avez dissipé quelques doutes, vous en avez créé d'autres. (M. Roger Karoutchi renchérit.) En particulier, quel rôle le Parlement jouera-t-il ? Il vous faudra très vite être plus clair.

Une autre priorité consiste à créer le meilleur environnement possible pour que les acteurs économiques travaillent et innovent. Nous devons soutenir nos entreprises, de toute taille, face à une concurrence mondiale de plus en plus féroce. Vous en avez peu parlé.

Je pense en particulier aux agriculteurs. Ils ont choisi de nourrir les hommes, l'un des plus beaux métiers, et permettent encore à notre commerce extérieur de briller dans l'agroalimentaire. Mais pour combien de temps ? Car ils souffrent de la surtransposition des normes, de la concurrence déloyale intra-européenne, des nouvelles pandémies animales, des difficultés d'approvisionnement en eau et du réchauffement climatique. Ils ont de plus en plus de mal à vivre dignement de leur activité.

Pour nos territoires, comme pour notre souveraineté alimentaire, nous devons tout mettre en oeuvre pour leur donner un avenir. Depuis longtemps, beaucoup de promesses leur ont été faites, mais peu ont été tenues. La dissolution de l'Assemblée nationale, puis la censure du gouvernement de Michel Barnier, ont encore retardé la réponse de l'État. À quelques semaines du salon de l'agriculture, le temps de l'action est venu ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Jean-François Longeot et Alain Marc applaudissent également.)

Nous débuterons dans quelques jours l'examen de la proposition de loi de nos collègues Laurent Duplomb et Franck Menonville visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur. Nous demandons au Gouvernement de soutenir ce texte complémentaire de la future loi d'orientation agricole et qui permettra une réponse concrète et immédiate.

Autre priorité, sans surprise : les collectivités territoriales. Nous sommes arrivés au bout d'un système trop centralisé, qui tourne le dos aux réalités des territoires. Jour et nuit, nos élus locaux tentent de régler de multiples problèmes et se débattent dans un amas de normes, contraintes et injonctions de tous ordres. Ils sont trop souvent étouffés par un pouvoir centralisateur et autocentré. Les maires, en particulier, sont parfois agressés. Ils sont épuisés. Ce sont pourtant eux qui incarnent et font vivre la démocratie de proximité, « à portée d'engueulade », comme le dit M. le président du Sénat.

Nos élus demandent plus de décentralisation et plus de confiance en leur action. Vous qui êtes maire, monsieur le Premier ministre, vous pouvez le comprendre mieux que quiconque.

Le Sénat a conduit de nombreux travaux pour réaffirmer la liberté communale. Les compétences eau et assainissement, le ZAN ou le statut de l'élu local ne sont pas des marottes sénatoriales : ce sont des enjeux essentiels pour libérer les territoires. Ainsi, le ZAN est emblématique de l'inflation normative d'un État ankylosé, vertical et parfois incohérent. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

M. Yannick Jadot.  - Sérieusement ?

M. Mathieu Darnaud.  - Nous avançons des propositions concrètes avec la proposition de loi dite Trace de Jean-Baptiste Blanc et Guislain Cambier.

Le ZAN fait aussi partie des multiples verrous qui bloquent l'accès à la propriété. Chacun doit pouvoir, dans la mesure de ses moyens, devenir propriétaire. Il est urgent de mettre en place une grande politique du logement !

J'en viens au régalien, une priorité évidente et qui fait désormais consensus. Les Français attendent qu'elle soit réaffirmée avec force. Je pense à la sécurité des biens et des personnes, au retour de l'ordre public, au respect de l'État et de ses représentants, à la maîtrise de l'immigration. Nous comprenons de vos propos qu'ils traduisent le soutien que vous apportez à l'action de votre ministre de l'intérieur, notre ancien collègue Bruno Retailleau. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Ni l'ordre républicain ni la laïcité ne doivent pouvoir être bafoués sans réponse ferme de l'État. « L'histoire nous enseigne qu'une civilisation, pour garder la maîtrise de son destin, doit se donner les moyens de sa sécurité » : ces mots de Jacques Chirac sont plus que jamais d'actualité. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains)

M. Philippe Bas.  - Bravo !

M. Mathieu Darnaud.  - La police, la justice et l'armée doivent être dotées d'un budget suffisant.

Sûrement faudra-t-il créer un parquet national spécialisé dans le narcotrafic et la criminalité organisée. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Plusieurs propositions de loi sont prêtes sur les sujets clés : nous espérons que celle sur le narcotrafic sera rapidement adoptée.

Il y a beaucoup à faire sur l'immigration. Votre ministre de l'intérieur a agi avec efficacité. Donnez-lui les moyens d'agir.

M. Laurent Burgoa.  - Bravo !

M. Mathieu Darnaud.  - L'outre-mer a besoin d'un accompagnement agile et intelligent. Je pense à Mayotte, territoire dévasté qui aspire à une reconstruction globale, à la Nouvelle-Calédonie, à la Martinique et à la Guadeloupe, où il faut lutter contre la cherté de la vie.

Vous êtes devant le Sénat, où se mêlent sagesse et audace, liberté de pensée et capacité de consensus, oeuvre législative et contrôle. Vous pouvez faire preuve de pragmatisme et vous appuyer sur nos travaux.

La gravité du moment nous oblige tous. Il est temps de parler enfin de la France aux Français.

M. Stéphane Ravier.  - La France aux Français ! Bravo !

M. Mathieu Darnaud.  - Vous avez l'immense responsabilité de redonner du souffle à l'action publique et de sortir des solutions toutes faites. (On tape sur les pupitres à gauche, l'orateur ayant dépassé son temps de parole.)

Cette responsabilité politique, en son sens le plus noble, est ce qu'attendent nos concitoyens. Comme le disait Stefan Zweig, « une seule chose fatigue l'homme : l'hésitation et l'incertitude ». Alors, monsieur le Premier ministre, ayez le courage d'agir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques travées des groupes INDEP et UC)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La semaine prochaine, Donald Trump deviendra le 47e président des États-Unis.

M. Stéphane Ravier.  - Bravo ! (Sourires à droite)

M. Patrick Kanner.  - Dès lors, c'est sa vision du monde qui sera imposée, au détriment de l'Otan, de l'Ukraine ou du Groenland. Pendant ce temps, les populismes gagnent l'Europe, la situation s'enlise au Proche-Orient et les relations se tendent avec l'Algérie.

Le monde est en ébullition et la France d'Emmanuel Macron se regarde le nombril. Oui, j'en veux au Président de la République d'avoir affaibli la voix de notre pays sur la scène internationale, avec sa dissolution incompréhensible. Comment accorder le moindre crédit à une nation gouvernée par un pouvoir instable, en contradiction totale avec le résultat des élections législatives ? (M. Mickaël Vallet applaudit.)

Face à ce chaos, la tentation était grande de laisser l'exécutif face à ses propres turpitudes. Nous aurions pu rester passifs. Cela n'a pas été notre choix. Nous demeurons dans l'opposition...

M. Joshua Hochart.  - Si peu ! (M. Stéphane Ravier renchérit.)

M. Patrick Kanner.  - ... fondamentalement, car nous ne partageons ni vos convictions ni vos priorités. Le budget que vous construisez n'est en aucun cas le nôtre et nous saurons vous le rappeler le moment venu.

Nous ne serons jamais vos alliés, ni vos partenaires. Nous ne sommes pas guidés par un intérêt personnel. (Vives exclamations à droite ; on ironise.)

M. Jacques Grosperrin.  - Qui le croit ?

M. Patrick Kanner.  - Nous n'avons jamais réclamé le moindre portefeuille ministériel.

En aucune façon, nous n'aurions pu envisager de participer à un gouvernement dont nous ne partageons pas le projet. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Notre seul honneur, c'est d'arracher des victoires. (M. Stéphane Ravier ironise.) C'est d'éviter la facture de l'incurie budgétaire d'Emmanuel Macron. Les Français n'attendent pas le grand soir mais veulent vivre mieux.

Je suis fier d'être socialiste aujourd'hui (on ironise à droite ; applaudissements à gauche), d'appartenir à une famille politique qui a obtenu des progrès pour nos concitoyens. Je vous invite à un peu d'humilité, chers collègues Les Républicains ! Sans la gauche, la taxe sur l'électricité aurait augmenté ; les consultations médicales auraient été déremboursées (applaudissements sur les travées du groupe SER) ; les retraites n'auraient pas été indexées sur l'inflation... (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-François Husson.  - C'est faux. (M. Laurent Somon renchérit.)

M. Patrick Kanner.  - Monsieur le Premier ministre, vous vous êtes engagé à revenir sur la réforme des retraites. Ce serait réparer une injustice sociale, celle d'un départ à la retraite à 64 ans.

M. Bruno Sido.  - C'est suffisant.

M. Patrick Kanner.  - C'est un impôt sur la vie des Français qui subissent des métiers pénibles, des carrières longues ou hachées.

Ce serait aussi réparer une anomalie démocratique. (M. Jean-Baptiste Lemoyne le conteste.) Nous avons tous en mémoire la brutalité avec laquelle cette réforme a été imposée, malgré l'opposition des Français. Suspendre cette réforme est salutaire.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - C'est irresponsable !

M. Patrick Kanner.  - Oui, il faut replacer les partenaires sociaux au centre des discussions et leur donner la possibilité de trouver un accord qui sauvegarde notre système par répartition.

Si les partenaires sociaux ne parvenaient pas à un accord dans les délais fixés, par le veto de fait du Medef, il serait intolérable de revenir à la loi de 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Le Parlement devra impérativement avoir le dernier mot.

M. Roger Karoutchi.  - On l'a déjà eu !

M. Patrick Kanner.  - Notamment sur l'âge de départ à la retraite et la durée de cotisation.

M. Bruno Sido.  - Démago !

M. Patrick Kanner.  - Nous voulons vous entendre sur ces points. Le compte n'y est pas.

Nous n'acceptons pas la provocation qui consiste à parler d'un déficit de 40 à 45 milliards d'euros par an. C'est une manipulation que d'annoncer un déficit exagéré pour mettre les partenaires sociaux face à un défi impossible à relever. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

C'est une manoeuvre issue de vos travaux au Plan, refusée à deux reprises par le COR. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST et sur quelques travées du groupe CRCE-K) Revenez sur votre affirmation et présentez la vérité aux Français.

Que proposez-vous concrètement en faveur du pouvoir d'achat ? Il est nécessaire de revaloriser les salaires en partant du Smic, et d'assurer aux agriculteurs, acteurs essentiels, des revenus décents. Nous nous battrons pour la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires. Abandonnez-vous le passage à trois jours de carence des fonctionnaires en cas d'arrêt maladie ? (Quelques protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Nous avons obtenu la marche arrière sur le déremboursement des consultations et des médicaments, et une légère augmentation de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam), mais cela suffira-t-il à sauver l'hôpital ? Quelles ouvertures de postes et de lits ?

L'école de la République doit accueillir tous les élèves. Revenez sur la suppression de 4 000 postes de professeurs ; diminuez le nombre d'élèves par classe ; améliorez l'accueil des élèves en situation de handicap. (Murmures à droite) Vos déclarations manquent de clarté. À question simple, réponse simple : annulez-vous la suppression des 4 000 postes ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Les collectivités territoriales ont été malmenées par les gouvernements successifs d'Emmanuel Macron, qui les ont privées de recettes propres, fragilisant le lien démocratique.

M. Jean-François Husson.  - François Hollande n'a rien fait ?

M. Max Brisson.  - La loi NOTRe...

M. Patrick Kanner.  - La seule compensation de la suppression de la taxe d'habitation a privé l'État de 23 milliards d'euros de moyens par an. Il est temps de redonner des moyens d'action budgétaire.

Vous avez indiqué limiter les coupes budgétaires à leur encontre, mais elles sont encore trop élevées. Nous serons encore combatifs.

M. Jean-François Husson.  - Vous auriez dû voter avec nous.

M. Patrick Kanner.  - Il faut placer l'outre-mer au rang des priorités avec un plan de rattrapage.

M. Bruno Sido.  - Avec quel argent ?

M. Patrick Kanner.  - Il faut lutter contre la vie chère et reprendre le chemin de l'égalité réelle.

Pour sortir Mayotte du chaos, il faudra plus qu'un plan de reconstruction sur deux ans.

En Nouvelle-Calédonie, le dégel du corps électoral a entraîné des pertes humaines et matérielles considérables. Nous avons proposé des solutions juridiques pour un plus grand dialogue.

Depuis huit ans, Emmanuel Macron n'a eu de cesse de désarmer l'État, en le privant de 50 milliards d'euros d'impôts par an.

M. Vincent Louault.  - Il les a rendus en prestations !

M. Patrick Kanner.  - Il a préservé les plus riches, aggravé les inégalités sociales. Réduire les dépenses publiques, c'est fragiliser les plus modestes.

Votre discours n'a pas donné de vision claire de l'équilibre général du budget. Nous sommes inquiets de découvrir vos sources d'économies.

La politique de l'offre mène non au ruissellement mais à l'assèchement des emplois. Elle n'empêche pas 300 plans sociaux en 2025 et la suppression de plus de 180 000 emplois.

En parallèle, les entreprises du CAC40, battant un nouveau record obscène, vont verser 100 milliards d'euros de dividendes et de rachats d'actions. (M. Didier Mandelli proteste.) Une réponse qui se limite à une imposition des plus hauts patrimoines n'est pas à la hauteur des enjeux.

Vous parlez d'une politique de logement repensée sans évoquer la captation du foncier ni les moyens des organismes de logement social.

Il faut agir sur les causes du réchauffement climatique et non uniquement sur ses effets. Reprendre la planification écologique est le préalable à une politique qui n'a d'autre choix que l'ambition. Agissons avec fermeté et cohérence pour un avenir plus respectueux de notre planète.

Monsieur le Premier ministre, les socialistes ont des propositions. (Marques d'ironie à droite)

M. Jacques Grosperrin.  - Lesquelles ?

M. Patrick Kanner.  - La situation politique vous contraint au compromis. Il n'est jamais agréable de perdre une élection -  encore moins deux  - et de subir une censure humiliante. Il faut se rendre à l'évidence : les Français ont sévèrement sanctionné la politique menée depuis huit ans. Vous n'avez d'autre choix que de l'infléchir et d'établir un vrai dialogue. Il n'y aura pas de stabilité dans la continuité des politiques menées jusqu'à présent !

Ceux qui vous ont précédé l'ont appris à leurs dépens : s'il y a matière à censurer le Gouvernement, il le sera.

En conclusion... (Vives protestations à droite, l'orateur ayant dépassé son temps de parole) Qu'il n'y ait pas de malentendu : dans l'hypothèse où nous ne censurerions pas le Gouvernement, ce ne serait pas un chèque en blanc. Vous nous trouverez sur notre chemin si vous attaquez les acquis sociaux.

Plusieurs voix à droite.  - C'est terminé !

M. Patrick Kanner.  - Monsieur le Premier ministre... (les protestations et marques d'impatience redoublent à droite), les conditions de la stabilité de notre pays sont entre vos mains ; donnez-nous de bonnes raisons de ne pas vous censurer. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Hervé Marseille .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) C'est la troisième fois depuis un an que nous assistons à une déclaration de politique générale. Pour nous sénateurs, c'est même la sixième fois, car nous avons double ration : lecture le mardi, explication le mercredi, au cas où l'on n'aurait pas compris. (Rires et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

Nos concitoyens sont lassés de toutes ces palinodies politiques. La censure du précédent gouvernement a affaibli notre pays. Il est faux de dire qu'elle a été sans conséquence : on le voit, à l'échelle européenne, sur le Mercosur, mais aussi les agriculteurs. Espérons que nous retrouverons une stabilité institutionnelle, dont nous avons le plus grand besoin.

Cela ne sera pas une mince affaire : depuis les élections législatives de juin, la France, divisée en trois blocs inconciliables, est bloquée comme jamais sous la Ve République. Le gouvernement de Michel Barnier s'est heurté de plein fouet à cette malheureuse réalité. Je salue son engagement.

Monsieur le Premier ministre, il vous incombe désormais d'accomplir cette mission, sous une pression extrême. Nous avons une obligation de résultat et non plus seulement de moyens.

Comment les Français nous jugeront-ils s'ils nous voient incapables de trouver des compromis ? C'est la démocratie représentative qui est en jeu. Faute de compromis, nous nous installerons dans l'instabilité et n'échapperons pas à une nouvelle dissolution. Ce sera la faute non pas d'un parti, mais de l'ensemble des parlementaires et les électeurs seront alors très sévères.

Président du groupe Union Centriste, je ne puis que saluer la nomination d'un Premier ministre centriste ! Certains sénateurs de mon groupe - Françoise Gatel, Valérie Létard - font partie de votre gouvernement, de même que des sénateurs d'autres groupes, et nous nous en réjouissons.

Vous avez les qualités requises pour réussir cet exercice difficile. Votre socle parlementaire rassemble la plus vaste coalition à l'Assemblée nationale.

M. Didier Marie.  - On verra ce que font les Républicains !

M. Hervé Marseille.  - La première condition de la réussite de votre action est la coordination de ce socle, pour soutenir le Gouvernement. Le sens du collectif est important. Il faut savoir ce que nous voulons avant de discuter avec d'autres.

La deuxième condition est l'ouverture du dialogue avec la gauche républicaine. Si nous ne voulons plus dépendre du Rassemblement national (M. Joshua Hochart proteste), la solution se trouve à gauche. La censure n'a abouti que parce que le RN l'a votée, avec l'ensemble du Nouveau Front populaire.

M. Rachid Temal.  - C'est un mauvais procès !

M. Hervé Marseille.  - Dans l'intérêt du pays, d'abord pour trouver un budget, nous pouvons trouver des compromis avec la gauche républicaine. La roue de secours de la loi spéciale n'a qu'un temps. Il faut indexer le barème de l'impôt sur le revenu, soutenir l'investissement des collectivités territoriales, traduire nos engagements pluriannuels pour la recherche, la justice et la défense, aider les outre-mer. Il faut également réduire les déficits ; c'est une question de soutenabilité et de respect des générations futures.

La question sociale doit être au coeur de nos préoccupations : 10 millions de nos concitoyens vivent dans la précarité. Depuis le « quoi qu'il en coûte », nous avons juxtaposé les mesures sociales. Mais cela ne fait pas une politique globale !

Le logement représente le tiers du budget des ménages ; or l'offre demeure grippée, alors que la demande ne cesse de croître. Répondons aussi au malaise des agriculteurs. Le projet de loi d'orientation agricole aborde notamment la transmission des exploitations ; mais le problème de fond, c'est le partage de la valeur ajoutée. Sur 100 euros de dépense alimentaire, moins de 7 euros reviennent aux producteurs. Les lois Égalim devront être prolongées, car les agriculteurs sont la catégorie socioprofessionnelle la plus souvent sous le seuil de pauvreté. Nombre d'agriculteurs retraités ne touchent même pas le minimum vieillesse ! Une proposition de loi sénatoriale remédie à ce problème : faisons-la prospérer rapidement.

À cette réalité inacceptable s'ajoutent les contraintes de la transition environnementale. C'est insupportable pour les agriculteurs ! Aidons le monde agricole à se transformer de manière réaliste et raisonnable. Il est urgent de modifier les conditions du ZAN, sur lequel travailleront Jean-Baptiste Blanc et Guislain Cambier. (M. Jean-Baptiste Lemoyne renchérit.)

La santé est une grande préoccupation de nos concitoyens. Voilà vingt ans que les déserts médicaux grandissent, sans jamais être résorbés. Deux autres chocs nous attendent : la dépendance et la baisse de la natalité.

Vous avez ouvert le chantier des retraites, sujet permanent de clivage ; faisons confiance aux partenaires sociaux. Pénibilité, carrières longues, emploi des seniors, les sujets sont nombreux. S'il n'y a plus de tabou, nous pourrons aborder la question du temps de travail. Nous travaillons trop peu en France. Dans ces conditions, il ne faut pas attendre de miracle de croissance.

Il faut de la simplification. Nous souffrons de trop de normes et de bureaucratie. Pourquoi ne pas faire pour le pays entier ce qui a fonctionné pour Notre-Dame et les jeux Olympiques, et qui est appliqué pour reconstruire Mayotte ?

Il faut avancer aussi sur d'autres sujets, notamment le statut de l'élu local, ainsi que la décentralisation et la différenciation, et la réforme institutionnelle en Corse et en Nouvelle-Calédonie.

Le dépassement des clivages politiques nécessite des concessions et des compromis. Mais progresser n'est pas dépenser toujours plus et augmenter les impôts ! Pendant que nous débattons, les taux d'intérêt montent, les défaillances d'entreprises se multiplient, les embauches sont gelées.

La situation internationale nous oblige : l'administration Trump s'installera dans quelques jours aux États-Unis ; la Chine est plus conquérante que jamais et la Russie n'a pas renoncé à ses ambitions. L'Europe est malade.

Ne perdons plus de temps.

Le groupe UC soutiendra votre action. (M. François Bayrou apprécie ; applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur quelques travées du RDPI)

M. François Patriat .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Est-il utile de rappeler encore la gravité de la situation ? Les Français n'ont plus confiance en la politique ni en les politiques.

M. Alexandre Ouizille.  - Ni en Macron !

M. François Patriat.  - Ils sont désabusés. Nous aurions pu avoir un esprit de réussite après le succès des jeux Olympiques et la reconstruction de Notre-Dame, mais le 4 décembre, les oppositions, de la gauche à l'extrême droite, ont décidé de censurer le gouvernement de Michel Barnier, en affirmant que les Français n'en seraient pas affectés. C'était leur mentir, car la facture est élevée. Chaque semaine sans budget, ce sont autant d'économies non réalisées, d'agriculteurs sans soutien, de collectivités dont les investissements ne sont pas financés, d'entrepreneurs qui peinent à remplir leur carnet de commandes et d'associations sans financements.

Pour couronner le tout, le 14 décembre, le cyclone Chido a frappé Mayotte avec une rare violence. Je pense à Salama Ramia, Saïd Omar Oili et Thani Mohamed Soilihi. Les dégâts sont considérables. Nous devons répondre à l'urgence tout en préparant la reconstruction. C'est un effort national légitime et nécessaire.

L'effort, la responsabilité et la stabilité seront les fils rouges de notre action, alors que le contexte international s'assombrit avec les récentes déclarations de Donald Trump.

Nous saluons la reprise de la discussion budgétaire. Nous devons avancer collectivement : les Français, élus et entreprises attendent que nous jouions notre rôle, en votant des mesures qui rétablissent la trajectoire budgétaire du pays.

Monsieur le Premier ministre, vous avez choisi la méthode de la concertation et de la confiance, que j'ai connue avec Michel Rocard et qui m'est chère. Vous êtes un homme de compromis. Encore faut-il une volonté pour y répondre.

Aussi, je m'adresse à mes collègues socialistes : quel que soit le contexte dans vos circonscriptions, ne cédez pas au manichéisme de vos alliés du NFP. Ils vous diront toujours qu'ils sont plus à gauche que vous ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Rachid Temal.  - Mais non !

Mme Audrey Linkenheld.  - Arrêtez ! C'est de la politique-fiction !

M. François Patriat.  - Le chemin pour la France doit être celui de l'intérêt général. L'abrogation de la loi sur les retraites coûterait 3,4 milliards d'euros cette année et 16 milliards d'euros en 2032. Le financement des retraites n'est plus équilibré. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.) C'est le travail qui reste le moyen de financer le système par répartition, auquel les Français sont attachés.

Voilà pourquoi nous soutenons la concertation pour améliorer la réforme des retraites de Mme Borne, que je salue.

Les partenaires sociaux doivent proposer des solutions sans dogme ni idéologie.

M. Mickaël Vallet.  - Ni exosquelette !

M. François Patriat.  - La valeur travail devient une frontière politique. Comment peut-on prétendre la défendre quand on s'oppose aux réformes qui la valorisent ?

M. Mickaël Vallet.  - Mettez les rentiers au boulot !

M. François Patriat.  - Il existe une petite musique du droit à la paresse. (Vives protestations sur les travées du groupe SER)

M. Rachid Temal.  - Un peu de sérieux !

M. François Patriat.  - C'est par la productivité du travail des Français que l'on revitalisera les services publics et nos territoires.

M. Rachid Temal.  - Les Français veulent du travail !

M. François Patriat.  - La dépense publique n'est pas toujours synonyme d'amélioration du service public. Ainsi, à l'hôpital, les investissements ont été massifs. Plan de relance, lutte contre les déserts médicaux, Ségur de la santé : plus de 30 milliards d'euros d'efforts, qu'aucun autre gouvernement n'avait réalisés auparavant. Sortons du dogme de la dépense et cessons de tout attendre de la fiscalité !

Monsieur le Premier ministre, vous êtes attaché à l'agriculture, comme moi. Nos agriculteurs sont confrontés à des défis immenses : crise agricole, inflation normative, surtransposition, concurrence déloyale, rémunérations. Nous devons répondre à leurs revendications légitimes. Redonnons à cette profession la fierté et la reconnaissance qu'elle mérite. Il en va de même pour les élus locaux, confrontés à une suradministration. Nous vous invitons à réconcilier l'État et les élus. C'est d'une évolution culturelle dont on a besoin.

La situation dramatique de Mayotte ne doit pas obérer les grandes difficultés rencontrées par l'ensemble des territoires d'outre-mer.

Nous devons impérativement poursuivre la transition écologique, que personne n'a citée aujourd'hui. (Protestations sur les travées du GEST ; M. Rachid Temal lève les yeux au ciel.)

La recherche, l'innovation et le travail sont des priorités absolues.

La confiance ne se décrète pas, elle se construit. Vous pouvez compter sur nous !

Moi aussi je citerai Pierre Mendès France, avec qui j'ai commencé la vie politique. (M. Guillaume Chevrollier ironise.)

Une voix à gauche.  - Il n'y a pas de quoi être fier !

M. François Patriat.  - Sa conception de la démocratie était exigeante. Selon lui, les élus doivent placer leur action politique au-dessus de leurs intérêts personnels. C'est un appel au courage et à l'action. Monsieur le Premier ministre, nous serons à vos côtés. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes UC, Les Républicains et du RDSE)

M. Claude Malhuret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains) Monsieur le Premier ministre...

M. Yannick Jadot.  - Ce n'est pas Mélenchon qui est Premier ministre !

M. Claude Malhuret.  -  ... J'aurais aimé commencer par vous souhaiter une bonne année 2025, mais j'ai peur que les défis himalayesques à venir ne les fassent prendre pour de l'ironie.

L'année 2025 est celle de tous les dangers : le risque de crise financière, économique et sociale est réel, en cas de nouvelle censure ou du vote d'un budget sans boussole qui n'inspirerait confiance à personne.

La situation internationale n'a jamais été si alarmante, sous l'effet de l'alliance des dictatures, la multiplication des régimes illibéraux, les rivalités entre grandes puissances et la guerre jusque sur notre continent.

La France risque-t-elle de voir les populistes au pouvoir ? L'Europe laisse-t-elle s'effacer sa place dans le monde, comme un visage de sable sur le rivage ?

Le succès de votre Gouvernement devrait être souhaité par tous ; or certains comptent sur son échec. La France est prise dans la tenaille du double extrémisme. À l'extrême gauche, le matamore des plateaux télé, le chienchien à son Poutine, (marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains) après avoir imposé sa cour des Miracles à l'Assemblée, s'est arrogé le droit d'affirmer des âneries que la sous-intelligentsia des ragots sociaux fait tourner en boucle. (Bravos à droite)

À l'extrême droite, le communiqué glaçant du RN à l'occasion de la mort de son fondateur, où Freud aurait vu le retour du refoulé, vient rappeler que la dédiabolisation n'était qu'un bobard pour les gogos et que Bardella préside le groupe illibéral pro-russe et antieuropéen d'Orban au Parlement européen.

Tous deux visent la présidentielle anticipée. LFI censure en rafale, à la kalachnikov : un texte, une censure ; neuf fois sur dix, cela ne fonctionne pas, mais c'est l'occasion d'une tribune. Le Rassemblement national n'a plus qu'à décider du moment opportun pour s'y associer. Le 4 décembre, il fallait détourner l'attention des réquisitions du procureur dans le procès des députés européens du RN.

Mais s'il y a eu censure, c'est parce qu'en 2024, un parti social-démocrate de gouvernement a uni ses voix à l'extrême droite et à l'extrême gauche pour renverser un Premier ministre républicain. (Applaudissements et bravos sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et du RDPI)

C'était une faute politique et morale ; j'espère qu'elle ne se reproduira pas. Les Français prennent conscience jour après jour que la censure a des effets désastreux sur notre pays. Il est peu probable qu'ils pardonnent à ceux qui s'aviseraient de recommencer. Depuis 2022 et plus encore depuis la dissolution, un nouveau monde politique est né, dont personne ne maîtrise les règles : comment gouverner sans majorité ?

Soit les partis de l'arc républicain sont assez courageux pour trouver des compromis ; soit après la décomposition, la recomposition se fera autour de l'un des extrêmes -  il n'est pas difficile de savoir lequel.

Nous avons tous une grande responsabilité et de graves difficultés à surmonter. C'est surtout le cas de la gauche républicaine, qui doit s'arracher des griffes d'une secte lancée dans un naufrage moral et politique depuis deux ans, et encore plus depuis le 7 octobre 2023. Le divorce sera d'autant plus dur que le gourou de la secte clouera au pilori ceux qu'il qualifiera de traîtres, avec toute sa meute.

Mais si cette gauche modérée devait céder une fois de plus au chantage, et contribuer à la chute du Gouvernement, les populistes des deux bords sauraient qu'ils ont gagné ! La France ne tarderait pas à devenir un régime illibéral.

Deux acquis des gouvernements depuis 2017 me paraissent peu contestables : les mesures fiscales grâce auxquelles la France a retrouvé attractivité et baisse du chômage et le retour à l'équilibre précaire, impopulaire mais indispensable, du système de retraites.

Pas de hausse d'impôt pour les classes moyennes, a titré Le Parisien ; il pourrait donc y en avoir pour d'autres...

Nous sommes prêts à des compromis, mais ne pouvons en faire avec la réalité, comme vous le proposent certains ici. La réalité, c'est l'ordre dans les comptes, et l'ordre dans la rue.

L'Assemblée nationale a voté, dans un accouplement incestueux des deux populismes, 60 milliards d'euros de dépenses supplémentaires et supprimé toute économie, avant de voter la censure. C'est dans ce paysage surréaliste que vous devrez gouverner, monsieur le Premier ministre, face à des députés extrémistes, grisés par leur nouveau pouvoir de faire tomber les gouvernements !

Nous approchons un point de non-retour où trop de gens dépendent de l'État - trop de clients, au sens romain du terme. La crise se chargera de corriger la trajectoire, si nous ne le faisons pas.

Si la France devait refuser les efforts qu'elle a exigés de l'Italie, de l'Espagne, du Portugal et de la Grèce, elle ferait peser un risque sur l'unité européenne. Tous les Européens lui en tiendraient rigueur.

Je veux croire que toutes les forces de l'arc républicain seront au rendez-vous pour vous aider. Il faudra qu'aucune voix ne manque. Nous y prendrons, bien sûr, notre part. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC, Les Républicains, du RDSE et du RDPI)

Mme Cécile Cukierman .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K) L'extrême droite est puissante dans de nombreux pays occidentaux - Italie, Suède, Pays-Bas, Autriche - et progresse en Allemagne. Elle se réjouit de la prise de fonction de Donald Trump aux États-Unis. Les récentes saillies d'Elon Musk, son autoritarisme, sa haine de l'État, montrent que le libéralisme économique menace l'équilibre mondial.

Jusqu'à présent, les démocraties occidentales se posaient en modèle face aux blocs autoritaires ou face à la montée de l'islamisme radical. Peuvent-elles relever le défi d'une espérance pour les peuples du monde ? C'est toute la difficulté de l'heure.

La France a, de par son histoire, un rôle précurseur pour porter les idéaux de justice et d'égalité. Comment parler de démocratie si nous bafouons ces deux concepts ?

Sur ces terres qui ont vu naître les droits de l'homme, où l'on s'est battu pour la conquête des droits élémentaires, où démocratie devrait rimer avec pluralisme et tolérance, la menace de l'extrême droite est bien réelle, tant la désespérance nourrit la colère, tant les difficultés nourrissent le rejet de l'autre, la concurrence plutôt que la solidarité.

Comme je l'avais dit à Michel Barnier le 2 octobre, il est inacceptable que le bloc arrivé en tête à l'Assemblée nationale soit de nouveau écarté par Emmanuel Macron. Votre Gouvernement, monsieur le Premier ministre, est le gouvernement des battus dans les urnes ! Le peuple a exprimé un choix de fond, une volonté de changement politique.

La vie est dure pour les femmes et les hommes de notre pays. Je pense aux victimes des deux cyclones successifs à Mayotte. Pouvoir d'achat en recul, explosion des factures d'énergie et des prix alimentaires, crise agricole, mal-logement, école en danger, hôpital en crise, désertification médicale nourrissent la colère qui gronde. L'avenir de notre jeunesse est incertain.

Il est urgent de stopper l'hémorragie des emplois industriels : 300 000 sont menacés. Monsieur le Premier ministre, la réindustrialisation ne passe pas par des manoeuvres de couloir, mais par une vraie ambition !

La précarisation des salariés entraîne un désarroi profond. Le collectif a perdu du terrain face à l'individualisation de la société, qui signe le triomphe des puissants. Pouvez-vous rester sourd au désir d'égalité, à l'aspiration démocratique et sociale ?

Les sept années de macronisme ont été utiles aux plus riches : les profits du CAC 40 ont explosé : 100 milliards d'euros en 2024 ! Le ruissellement s'est fait par torrents, mais vers le haut.

Vous devez agir pour une nouvelle répartition des richesses. C'est sans doute contraire à l'idéologie de votre socle commun, mais c'est indispensable pour s'attaquer au déficit public tout en répondant aux nécessités sociales. Votre seule réponse est la baisse de la dépense publique, c'est-à-dire la casse du service public. Or les Français veulent la sécurité et la justice, dans tous les pans de leur vie.

Rétablissons l'impôt sur la fortune. Taxons davantage les revenus au-delà de 100 000 euros annuels. Assurons la participation des plus grandes entreprises et contrôlons les aides publiques qui leur sont accordées. Favorisons l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. Abrogeons la réforme des retraites et ouvrons un dialogue social. Attaquons-nous à l'optimisation fiscale, cette prime aux tricheurs, sanctionnons l'évasion fiscale. Relançons la croissance en revalorisant les salaires et le Smic.

Défendons le service public, héritier de la Résistance et du front républicain contre le fascisme, cible, depuis l'ère Reagan et Thatcher, du libéralisme et du marché. Les collectivités territoriales sont l'un des derniers remparts contre la casse des services publics. Comme maire de Pau, vous le savez. Renforcez leur autonomie financière, indexez la DGF sur l'inflation, supprimez le fonds de précaution qui prévoit de les ponctionner, actualisez le versement du FCTVA, redonnez-leur les compétences pour aménager le territoire et répondre aux besoins des populations, dans les outre-mer comme dans nos villes et nos villages.

Surtout, cessons le double discours de la complainte sur le territoire et de l'austérité imposée par les votes au Parlement, duplicité insupportable.

Vous appelez au dialogue, voire au compromis. Nous serons toujours au travail pour sortir de la crise politique. Hélas, votre immobilisme se traduit par la reprise du projet de loi de finances du gouvernement Barnier, pourtant censuré. Idem pour le PLFSS, objet du 49.3 qui déclencha la censure. Emmanuel Macron annonçait pourtant le 5 décembre dernier un nouveau budget... Aucune menace, mais un principe de vérité : un comportement similaire provoquera un résultat similaire. Vous devenez le porte-parole d'un gouvernement censuré.

Que le Président de la République accepte enfin le résultat des législatives, en permettant une vraie politique de rupture avec celle qu'il a conduite et qui mène la France vers le chaos institutionnel, économique et social. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) « La vie est pavée d'occasions perdues », écrit Romain Gary dans La Promesse de l'aube. Je souhaite que la « promesse française » que vous faites soit une réussite, monsieur le Premier ministre. Nous n'avons plus le temps des occasions manquées !

Que les dirigeants politiques écoutent les Français, qui souhaitent le compromis. Nous leur devons clarté, stabilité, visibilité. Nous leur devons des réponses sur le budget, sur les retraites, sur les politiques publiques qui engagent leur avenir.

C'est un devoir aussi pour conforter notre pays sur la scène internationale, et auprès de nos partenaires européens ; la France, patrie des Lumières, ne doit pas se perdre dans l'incertitude.

Je rappelle à ceux qui oeuvrent à la stratégie du chaos que personne n'a vraiment gagné les dernières élections législatives. La digue du fait majoritaire a cédé. À cet égard, l'instauration de la proportionnelle pourrait consacrer la fragmentation du paysage politique. Il faudra en débattre, et penser cette réforme dans le cadre d'un rééquilibrage du pouvoir exécutif. Les pays qui pratiquent la proportionnelle ont un Premier ministre fort, ce qui oblige à faire des coalitions.

En attendant, nous négocions, non sans mal. Hier, une motion de censure ; aujourd'hui, des lignes rouges tous azimuts, des annonces gouvernementales encore timides. Souhaitons que nous trouvions le chemin étroit qui nous sortira de l'immobilisme.

Au RDSE, point de dogmatisme, tant par philosophie que par volonté de coconstruire. C'est au cas par cas, texte par texte, que nous jugerons vos propositions, en fonction de nos valeurs et de notre diversité.

Sur la question cruciale des retraites, la Cour des comptes fera un état des lieux financier. Derrière la logique mathématique de la démographie, il y a des hommes et des femmes qui attendent un geste, des concessions, qui devront être soutenables. Rien n'est tabou pour le RDSE. Nous souhaitons des avancées sur la pénibilité, l'usure au travail, la durée de cotisation ou encore la récompense de l'engagement citoyen. Quel financement ? Attendons la fumée blanche qui sortira du conclave. Mais les hausses de cotisations ne sont pas à exclure...

Sur les conditions de travail, un récent rapport pointe les failles du management français. L'ubérisation du travail, l'expansion de la sous-traitance, jusque dans les services publics, fragilise les salariés.

De plus en plus d'actifs consomment de la cocaïne pour tenir au travail. Il faut revoir les conditions de travail, branche par branche - c'est la condition pour accepter l'allongement des carrières.

Seconde urgence : un budget. Nous plaidons pour une meilleure justice fiscale et un effort contributif mieux réparti. L'augmentation du prélèvement forfaitaire unique et l'imposition des superdividendes ont fait les frais de la seconde délibération. Brisons les totems ! La réduction des dépenses devra être moindre, pour ne pas gripper la croissance.

Nous souhaitons la préservation des capacités d'investissement des collectivités locales, sans les exonérer de tout effort.

Je salue votre volonté de réconcilier toutes les France : périphérique, provinciale, des quartiers. La clé, c'est l'aménagement du territoire, la décentralisation et la déconcentration. Nous vous suivrons si vous garantissez les libertés locales, les services publics de proximité, et soutenez les collectivités, amortisseurs de la crise. Nous serons ouverts, tant que primeront la justice sociale, la solidarité et le progrès.

L'école doit être le tremplin vers l'égalité des chances, à l'abri de tout séparatisme. Nous sommes attachés aux fondamentaux républicains, à la laïcité. Quant aux valeurs de fraternité et d'humanisme, elles doivent rester au coeur de la politique d'immigration. Voilà nos lignes rouges !

Le poids des normes pèse sur nos agriculteurs et nos PME.

Il faut soutenir nos outre-mer, victimes du dérèglement climatique et des déséquilibres sociaux, qui participent au rayonnement de la France.

La France n'a rien à gagner à alimenter des rapports tendus avec des pays proches. Le RDSE appelle à l'apaisement avec l'Algérie. L'Afrique nous tourne le dos ! La diplomatie requiert un cap cohérent.

Monsieur le Premier ministre, nous avons en commun les Pyrénées, et la France à défendre. Le gouvernement Mendès France a duré sept mois, mais son héritage est reconnu. On peut faire beaucoup en peu de temps ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains) « Pierre Mendès France nous laisse sa foi, la République ; sa méthode, la vérité ; son exemple, l'inlassable combat pour la paix et pour le progrès », disait François Mitterrand. Un chemin à suivre ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe UC ; M. Ahmed Laouedj se lève pour applaudir.)

M. Guillaume Gontard .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le 2 octobre, je disais ici même que le gouvernement Barnier n'avait pas d'avenir. Avec gravité, je réitère ces propos. Après une motion de censure historique, vous n'avez pas modifié un seul des paramètres qui ont entraîné sa chute ! « La folie, c'est se comporter de la même manière et de s'attendre à un résultat différent », disait Einstein.

Malgré l'affront démocratique qu'a représenté votre nomination, nous avons accepté d'échanger avec le Président de la République et avec vous : il nous fallait être responsable pour deux. La voix de la France est attendue, dans un monde en déliquescence, où Trump revient aux affaires, où il faut soutenir l'Ukraine et stopper le génocide à Gaza.

Nous avons recherché des compromis, mais à quoi bon ? Le Président disait ne plus vouloir que le Rassemblement national puisse décider du sort du Gouvernement. Avait-il entendu le message des législatives : le barrage à l'extrême droite, à ses idées nauséabondes et à son incompétence crasse ? (MM. Joshua Hochart et Stéphane Ravier se gaussent.) Cette illusion n'a pas survécu à la nouvelle année. Vous reconduisez le pacte faustien de votre prédécesseur avec les héritiers de Pétain et les tortionnaires d'Algérie ! J'en veux pour preuve votre infâme tweet d'hommage à Jean-Marie Le Pen. (M. Stéphane Ravier ironise.)

J'en veux encore pour preuve le maintien, place Beauvau, du ministre d'extrême droite Bruno Retailleau (huées à droite, applaudissements sur quelques travées du GEST ; M. Bruno Retailleau rit) et la nomination d'un second ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin. Il fallait oser nommer garde des sceaux ce populiste (huées à droite ; « C'est nul ! ») qui, au mépris de la séparation des pouvoirs, a jugé « choquantes » les réquisitions du parquet contre Marine Le Pen...

M. Stéphane Ravier.  - Staline !

M. Guillaume Gontard.  - ... prises sur le fondement de votre loi de moralisation de la vie publique ! Toutes ces années à condamner les dérives droitières de Sarkozy et Fillon, pour vous lier à leurs pires rejetons, quel reniement ! (Les huées à droite redoublent.)

Reniement encore, vous accueillez dans votre gouvernement des ministres accusés de corruption, de détournements de fonds et de faux témoignages. (Nouvelles huées à droite ; « C'est honteux ! ») Reniement toujours, votre revirement sur le cumul des mandats, proposition rétrograde rejetée par les deux tiers des Français.

Vous rebattez les cartes du jeu des sept familles de la droite, en reconduisant une majorité des membres du gouvernement Barnier...

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Bravo !

M. Guillaume Gontard.  - ... sans parler des revenants désavoués dans les urnes. Est-ce là votre nouvelle méthode démocratique ? Vous rappelez les doléances des gilets jaunes, mais recyclez deux des Premiers ministres les plus brutaux de la Ve : 29 utilisations du 49.3, 143 gilets jaunes blessés par la police en application de la doctrine de maintien de l'ordre inspirée par Manuel Valls...

Voix à droite.  - Il fallait respecter la loi !

M. Guillaume Gontard.  - Cette brutalité a culminé lors de la contestation de la réforme des retraites d'Élisabeth Borne - réforme inique que vous refusez de suspendre. Les syndicats sont sommés de négocier dans un calendrier intenable, un revolver sur la tempe, avec le choix entre un accord au rabais ou le maintien des 64 ans. Enfumage !

Vide, sans vision, votre discours de politique générale ne rompt pas avec le dogmatisme de la politique de l'offre qui a ruiné nos finances publiques. Loin d'être responsables du dérapage, les deux derniers quinquennats de gauche ont réduit les déficits (on ironise sur les travées du groupe Les Républicains) et même la dette, sous Jospin.

M. Stéphane Piednoir.  - La bonne blague !

M. Guillaume Gontard.  - Seules les droites sont responsables du dévissage de nos finances publiques ! Assumez !

Vous intimez au Parlement de reprendre l'examen du budget, enjambant la censure comme le Président sa défaite aux législatives. Vous refusez la justice fiscale au profit du rabot généralisé, qui va pénaliser l'école publique, l'université, l'hôpital, les collectivités, fragiliser notre industrie et nos travailleurs. Vous sacrifiez la transition écologique, vous laissez sur le carreau nos compatriotes ultramarins.

Nous demandions 7 milliards d'euros pour la transition écologique, vous accordez 200 millions. Dans votre monde, point de dérèglement climatique ! Avec 148 mots dédiés au nucléaire et au techno-solutionnisme, vous montrez que vous avez encore moins d'ambition en la matière que vos prédécesseurs. Vous préférez dénigrer l'Office français de la biodiversité (OFB), qui lutte contre l'extinction du vivant.

M. Mathieu Darnaud.  - Parlons-en !

M. Guillaume Gontard.  - Vous êtes incapables, comme la FNSEA, de répondre aux problèmes structurels du monde agricole.

Comme Bill Murray dans Un jour sans fin, nous revivons sempiternellement le même jour politique, nous voyons se succéder des gouvernements de droite, menant la même politique injuste, autoritaire, climaticide, empiétant sur les plates-bandes de l'extrême droite.

M. Laurent Somon.  - Dans le film, il finit par gagner !

M. Guillaume Gontard.  - On ne gravit pas l'Himalaya en espadrilles : il faut s'équiper, écouter, accepter de modifier l'itinéraire pour ne pas sombrer dans la première crevasse. Crampons aux pieds, piolet à la main, nous continuerons à être responsables pour deux, ne pouvant nous résoudre à cette mortelle randonnée.

Monsieur le Premier ministre, vous ne nous donnez pas d'autre choix que la censure, mais il est encore temps de changer de chaussures et de vous éloigner du précipice. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

M. Joshua Hochart .  - Christopher Szczurek avait raison de qualifier le gouvernement Barnier de dernier sursis du système.

Pour la France, nous préférerions que vous réussissiez, mais rien ne nous permet d'y croire. Ce gouvernement n'a pour but que la préservation de ce qui reste du système, tant le conformisme y est la valeur cardinale. Tout au plus donnera-t-il l'occasion au PS et aux Verts de sortir de l'emprise mélenchoniste dans laquelle ils se sont compromis.

Vous proposez une conférence sur le financement des retraites et une mission de la Cour des comptes ? Mais les Français ne veulent pas de cette réforme ; ils l'ont dit lors des élections. Il n'est d'autre solution que l'abrogation de la mesure d'âge. Vous trouverez les financements dans la gabegie des opérateurs de l'État et de l'aide publique au développement. (M. Mickaël Vallet proteste.)

Comment régler les errements du présent quand on a été le serviteur des turpitudes du passé ? Le souci, c'est Emmanuel Macron, dont vous êtes l'un des principaux soutiens. Certes, vous n'êtes pas sectaire, mais nous n'attendons pas la moindre rupture de votre part. Malgré les castings et les promesses, la situation politique demeure bloquée.

Comme un poison lent, le pacte électoral contre la France travailleuse et populaire conclu par Gabriel Attal et Jean-Luc Mélenchon dévore toute stabilité parlementaire et consume un corps agonisant.

Nos collègues de droite sont dans l'illusion d'être revenus aux affaires. Certes, les rodomontades de Bruno Retailleau sonnent doux à nos oreilles. (Mme Dominique Estrosi Sassone proteste.) Mais du Kärcher de Sarkozy aux places nettes XXL de Darmanin, nous sommes habitués aux paroles non suivies d'actes. Usez donc du pouvoir réglementaire, à l'heure où le chaos migratoire permet à l'Algérie de déstabiliser le pays avec la complaisance de la gauche !

Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances - un budget tout cuit, qui n'est pas le vôtre, qui aurait été rejeté de toute façon, sans que nous débattions de la moindre vision.

Vous trouverez dans nos amendements des propositions d'économies.

Je vous souhaite de réussir, monsieur le Premier ministre. Nous ne vous condamnons pas d'office, mais vous donnons le bénéfice du doute. Si vous persistez dans la morgue du gouvernement précédent, vous subirez le même sort, et attiserez la colère populaire. Les cartes sont entre vos mains. Pour les Français, soyez plutôt un Sully qu'un Ravaillac. (M. François Bayrou sourit ; M. Stéphane Ravier applaudit.)

M. François Bayrou, Premier ministre .  - M. Gontard a souligné l'injustice que j'ai commise hier, à l'Assemblée nationale, en prononçant le nom de Lionel Jospin parmi ceux qui ont aggravé la dette. (« Ah ! » sur les travées du groupe SER)

Mme Émilienne Poumirol.  - Quand même !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Entre 1997 et 2002, l'endettement du pays a effectivement légèrement diminué. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST) Il faut le reconnaître. Je m'efforce d'être honnête et juste.

M. Darnaud...

M. Michel Savin.  - Excellent !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - ... a défendu à juste titre nos institutions et notre Constitution. L'audace n'est jamais une impasse ; vous avez raison. Vous avez souligné les tensions géopolitiques auxquelles notre pays est soumis. Vous avez raison.

Le travail sur les agences et les opérateurs de l'État est nécessaire, car on a parfois du mal à percevoir leur efficacité. Vous avez proposé un audit, je suis prêt à en discuter. Ce n'est pas facile. Disons la vérité : on a du mal à connaître leur nombre exact. (Murmures à droite et au centre) Leur budget serait passé de 20 milliards d'euros en 2018 à 30 milliards en 2019 et à 83 milliards d'euros en 2024. (On s'en émeut à droite et au centre.) L'augmentation est exponentielle. Je suis prêt à discuter avec vous des modalités de cet audit.

M. Yannick Jadot.  - Pas par McKinsey !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Certains estiment que ces organismes seraient plus efficaces que l'État lui-même, qui s'est déchargé sur eux d'une partie de l'action publique.

Sur les retraites, vous avez défendu la place du Parlement. Vous avez raison. Je suis prêt à aller en ce sens.

Les surtranspositions sont souvent dénoncées dans le secteur agricole. Il y a plus grave : l'imposition à l'agriculture française de normes et de règles non imposées à d'autres agricultures européennes.

M. Bruno Sido.  - Tout à fait.

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Si nous rendons équitables les règles à l'intérieur de l'Union européenne, ce sera un premier pas.

Je soutiens M. Retailleau. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP) J'ai souhaité qu'il soit ministre d'État, ministre de l'intérieur. Je soutiens aussi le ministre d'État, ministre de la justice. La coordination, la communauté d'inspiration entre sécurité et justice, qui a trop manqué, est une nécessité, avec la garantie de l'État de droit, principe essentiel.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Bien sûr ! Il faudra le leur rappeler !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Merci aux orateurs qui ont rappelé mes combats sur ce sujet.

Il faut s'attaquer au narcotrafic, lutter contre la délinquance des jeunes de manière efficace.

M. Kanner a rappelé qu'il ne participait pas au Gouvernement ou à la majorité mais a dit saisir la chance d'une main tendue. Les forces qui soutiennent le Gouvernement et l'opposition qui choisit le dialogue peuvent avancer ensemble. J'ai identifié trois cercles : ceux qui participent au Gouvernement, ceux qui s'opposent radicalement et ceux qui sont dans une opposition intellectuelle mais qui choisissent le dialogue. Je vous donne acte de votre position. (M. Patrick Kanner en prend note.) Nous avons travaillé ensemble, en en bonne foi, sans compromission. Nous avons pu, ces dernières heures, progresser.

Je vous donne deux assurances. La conférence sociale travaillera trois mois - si cela s'avère trop court, je suis prêt à accorder quelques semaines de plus, mais il ne faut pas perdre de temps, vu l'échéance d'octobre. Dans le meilleur des mondes, il y aura un accord, et un texte vous sera soumis. Faute d'accord d'aucune sorte - je ne crois pas à cette hypothèse, car je suis persuadé que chacun veut progresser -, pas de nouveau texte. Troisième hypothèse, si nous sommes dans une zone d'accord, de progrès, identifiée par les participants et à laquelle le Gouvernement aura donné crédit, nous préparerons un texte que nous soumettrons au Parlement. Ce n'est pas du tout ou rien. Nous pourrons prendre acte des progrès, marquer des points, même sans cathédrale sociale et législative.

Je suis prêt à renoncer à la suppression des 4 000 postes dans l'éducation nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du RDPI et du groupe UC ; M. Stéphane Sautarel applaudit également.) Mais nous savons tous que les postes mis au concours ne sont pas pourvus. Il y a un gros travail à faire sur l'attractivité, ...

Mme Laurence Rossignol.  - Il faut payer les enseignants !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - ... et pas seulement sur les salaires. Si les gouvernements précédents avaient amélioré les salaires, nous n'en serions pas là.

Quand j'étais ministre de l'éducation nationale, le niveau de rémunération des jeunes enseignants était supérieur à deux fois et demie le Smic. (Mme Cécile Cukierman proteste.) Tel n'est plus le cas, hélas. Je sais bien la faiblesse des salaires dans l'éducation nationale.

Nous pouvons travailler à ce redressement, mais les enjeux budgétaires sont considérables.

Monsieur Kanner, voilà qui témoigne de la bonne foi de nos échanges.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Ça avance !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Vous avez fait des pas ; je suis prêt à en faire, symétriquement.

L'augmentation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), de 3,3 % au lieu de 2,8 %, répond aussi à vos questions.

Mmes Laurence Rossignol et Marie-Pierre de La Gontrie.  - Et les jours de carence ? (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; d'un geste de la main, Mme Laurence Rossignol leur intime de se taire.)

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Le geste est moyennement élégant... Le sujet des jours de carence est entre les mains du Parlement ; (M. Victorin Lurel proteste) le Sénat en débattra. Mais il existe peut-être d'autres solutions... (Mme Colombe Brossel proteste.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - C'est dingue, on ne négocie pas ainsi !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Monsieur Kanner, vous n'êtes pas le seul à gauche à fustiger la politique de l'offre...

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Le CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Permettez-moi de vous rappeler que cette politique a été mise en oeuvre à compter de 2014, par un gouvernement que vous souteniez et auquel je veux rendre hommage.

Vous vous voulez constructif et exigeant, ces adjectifs sont justifiés.

Monsieur Marseille, les sénateurs sont sept ou huit (on ironise à droite) à être entrés au Gouvernement, car Valérie Létard était sénatrice avant de devenir députée. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Bernard Buis applaudit également.)

Oui, la stabilité institutionnelle est essentielle. Il y a un immense rejet, dans tous les électorats - sauf peut-être celui de LFI - de l'instabilité. Nous devons doter notre pays d'un budget et je partage vos priorités : logement, loi d'orientation agricole, partage de la valeur ajoutée, notamment.

Monsieur Patriat, (l'orateur cherche dans ses notes ; on ironise à droite) a profondément raison quand il dit qu'il faut donner toutes ses chances à l'amélioration du projet de réforme des retraites et quand il souligne les blocages provoqués par la censure. Son expérience, son acuité nous sont précieuses.

M. François Patriat.  - Il est bien ce Premier ministre ! (Sourires)

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Monsieur Malhuret a tracé un tableau grave et responsable de la situation. Nous connaissons tous son esprit et son sens de la formule. Il a fait le constat de la responsabilité d'une partie de la gauche modérée dans la censure.

Il a rappelé les trois acquis depuis 2017 : attractivité, modération de la fiscalité et ordre.

Oui, trop de gens dépendent de l'État et trop de dépenses publiques ne sont pas suffisamment efficaces. Nous devons rebâtir notre structure budgétaire.

Il a enfin souligné la nécessaire unité européenne.

Madame Cukierman, (l'orateur la cherche des yeux) ...

M. Bruno Sido.  - À gauche toute ! (Sourires)

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Comme disent les Écritures, « Je ne vous chercherais pas si je ne vous avais pas trouvée. »

Oui, la démocratie libérale comporte des ferments d'illibéralisme. Elon Musk considère que ses moyens considérables lui donnent le droit de s'immiscer dans la vie démocratique d'autres pays que le sien ! Je suis d'accord avec vous : le pluralisme et la tolérance sont la marque de notre démocratie.

Vous avez condamné l'optimisation fiscale. Le Gouvernement y travaille, pour plus de justice.

Seul point de désaccord : vous jugez que nous n'avons pas assez de services publics. Or nous sommes le pays, dans le monde, où les services publics sont les plus importants, et les plus chers. La vraie question, c'est celle de leur efficacité.

M. Louis Vogel.  - C'est vrai !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Ainsi que celle de la juste répartition entre fonction publique « de papier » et fonction publique « de service ».

Madame Carrère, j'ai beaucoup aimé votre intervention. Nous partageons beaucoup de choses (exclamations ironiques à droite) : nous sommes du même coin du monde, et nous en sommes fiers. Les Pyrénées ont souvent apporté à la vie politique française de l'écoute, de la tolérance et de l'humour.

Oui, les Français sont nombreux à souhaiter le compromis.

Vous avez annoncé que vous vous détermineriez texte par texte. C'est vrai pour tous les groupes, y compris le groupe centriste.

La conférence sociale traitera de plusieurs sujets que vous avez évoqués : pénibilité, usure au travail, rémunérations.

Vous avez défendu la capacité à faire des collectivités territoriales. Je vous en donne acte.

Monsieur Gontard, grâce à vous, j'ai pu corriger mon erreur concernant l'héritage du gouvernement de M. Jospin.

Permettez-moi de vous rappeler mes propositions qui vont dans votre sens : 475 millions d'euros supplémentaires pour le plan Eau ; stabilisation des taxes affectées aux budgets des agences de l'eau ; 75 millions d'euros supplémentaires pour le fonds Barnier ; maintien du fonds Chaleur ; 150 millions d'euros supplémentaires pour le fonds vert ; 50 millions d'euros supplémentaires pour le plan Vélo -  vous haussez les épaules, mais moi j'y crois !  -  ; maintien de la taxe de solidarité sur les billets d'avion.

Nous permettons aussi aux régions d'investir davantage, en décidant d'inscrire désormais les péages ferroviaires en section d'investissement. (« Très bien ! » à droite)

Il n'est donc pas juste de dire que l'on ne fait rien. Ce sont des efforts importants en faveur du développement durable et de la lutte contre le changement climatique.

La production d'électricité non carbodépendante, d'origine nucléaire ou géothermique, est également essentielle. (M. Yannick Jadot ironise.)

Enfin, monsieur Hochart... (L'orateur le cherche du regard.)

M. Joshua Hochart.  - Au centre ! (Sourires)

M. François Bayrou, Premier ministre.  - J'ai été assez longtemps non-inscrit pour comprendre l'aspect non condamnable de votre position.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Mais c'est l'extrême droite !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - François Mitterrand a été non-inscrit, Aimé Césaire aussi. (Émotion et désapprobation à gauche)

M. Mickaël Vallet.  - Joshua Hochart, ce n'est pas tout à fait Aimé Césaire !

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Monsieur Hochart, vous avez raison, ce n'est pas « mon » budget ; c'est le vôtre ! Car nous allons travailler à partir des orientations du Sénat.

C'est le seul budget qui permet de répondre à l'urgence. Nous ne pouvons pas laisser le pays sans budget et les Français ont conscience de la précarité de notre vie publique.

Je le revendique : nous avons choisi d'aller le plus vite possible, en mesurant les dégâts résultant de la censure. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 17 h 35.

La séance reprend à 17 h 50.

Rappels au règlement

Mme Cécile Cukierman .  - Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 36.

Nous assistons à un coup de force contre la démocratie et le Parlement. Le 4 décembre dernier, le gouvernement Barnier a été censuré et l'ensemble de sa politique rejetée, au-delà du seul PLFSS.

Nous le savons, les textes financiers sont le socle de toute politique. Ne pas soumettre un nouveau projet de loi de finances (PLF), c'est mépriser une nouvelle fois les électeurs et la représentation nationale. Les députés, qui ont mis à bas, pour la première fois depuis 1962, un gouvernement, seront très certainement privés de tout débat budgétaire.

Le Président de la République avait pourtant demandé l'élaboration d'un nouveau PLF ; pour une fois, j'ai salué cette décision.

Oui, il nous faut un budget, comme l'a dit le Premier ministre, mais pas un mauvais budget imposé au forceps aux Français.

M. Pascal Savoldelli .  - Mon rappel au règlement se fonde sur les articles 36 et 42 du règlement du Sénat et sur l'article 47 de la Constitution.

En reprenant le PLF d'un gouvernement censuré, le nouveau Premier ministre et la majorité sénatoriale ne respectent pas la Constitution. C'est un coup de force institutionnel inédit. Selon le quatrième alinéa de l'article 47 de la Constitution, « les délais prévus au présent article sont suspendus lorsque le Parlement n'est pas en session ». Mais la session n'a pas été interrompue ! Seule une adoption par ordonnance était possible.

Vous nous faites reprendre la discussion sans que l'on puisse revenir sur les recettes. Déposez donc un nouveau projet ! La ficelle est grosse. Vous bâillonnez le débat. On s'achemine vers une adoption en CMP sans aucun examen de la seconde partie par les députés !

Nous voulons un budget qui réponde aux urgences économiques et sociales. C'est vous qui êtes irresponsable ! Je vous le demande solennellement : ne confinez pas la démocratie.

M. Thomas Dossus .  - Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 42.

Nous vivons une anomalie démocratique. Avec quatorze des ministres censurés encore au Gouvernement et un nouveau Premier ministre soutien historique du Président de la République, c'est la même politique qui continue...

Qui est politiquement responsable de ce budget ? Construits par Gabriel Attal, portés par Michel Barnier, les arbitrages sont défendus par des ministres qui ne les ont pas choisis...

À quoi bon voter, puisqu'un gouvernement désavoué à deux reprises ignore les résultats démocratiques des élections ? Nous voyons une voiture sur les jantes qui continue d'avancer.

Nous démarrons avec l'examen de la mission « Outre-mer », alors qu'un département a été rasé par un cyclone dopé par nos émissions de gaz à effet de serre et personne n'en parle.

Mme Evelyne Corbière Naminzo .  - En vertu de l'article 44 bis de notre règlement, les sénateurs ont le droit de présenter des amendements au texte présenté au Sénat. Ce droit nous est ici refusé. En reprenant le budget de Michel Barnier, vous ne respectez pas la démocratie. En refusant les nouveaux amendements, vous manoeuvrez hypocritement !

Comment entamer cette discussion alors qu'aucun d'entre nous n'a pu déposer d'amendement pour répondre à la catastrophe mahoraise ? C'est un déni de démocratie. Quel décalage entre les ambitions personnelles de certains et la réalité catastrophique sur le terrain !

M. Michel Canévet .  - Mon rappel au règlement se fonde sur les articles 44 bis et ter.

Je regrette que l'on ne puisse déposer de nouveaux amendements ni ajouter de cosignataires. Des ajustements auraient été souhaitables.

Acte en est donné.

CMP (Nominations)

M. le président.  - Des candidatures pour siéger au sein de la CMP chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Commissions d'enquête (Nominations)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la désignation des dix-neuf membres de la commission d'enquête sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants et la désignation des vingt-trois membres de la commission d'enquête aux fins d'évaluer les outils de la lutte contre la délinquance financière, la criminalité organisée et le contournement des sanctions internationales, en France et en Europe, et de proposer des mesures face aux nouveaux défis.

En application de l'article 8 ter, alinéa 5 de notre règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Acte en est donné.

Projet de loi de finances pour 2025 (Suite)

M. le président.  - Avant de reprendre nos débats budgétaires là où nous les avions laissés, je tiens à remercier notre commission des finances qui s'est remise à la tâche avec l'esprit de rigueur et de responsabilité que nous lui connaissons. Je remercie le rapporteur général pour ses qualités d'écoute et de responsabilité et le président Raynal, gardien du temps de nos débats. Je salue les rapporteurs spéciaux, les rapporteurs pour avis, ainsi que les présidents de commission et les chefs de file des groupes.

Seconde partie (Suite)

Outre-mer

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.

M. Georges Patient, rapporteur spécial de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Catherine Conconne applaudit également.) J'associe à mon intervention mon corapporteur Stéphane Fouassin, malheureusement absent.

Difficile de ne pas évoquer d'abord nos compatriotes mahorais, très durement éprouvés. Les dégâts, catastrophiques, doivent encore être chiffrés. La proposition budgétaire du Gouvernement sera soutenue par la commission des finances et le projet de loi d'urgence pour Mayotte est attendu.

La crise institutionnelle en Nouvelle-Calédonie nécessite aussi une réponse affirmée de l'État, y compris budgétaire, pour faire face aux plus de 2 milliards d'euros de dégâts. Le Gouvernement propose un effort significatif de 200 millions d'euros.

L'objectif de la mission « Outre-mer » est le rattrapage des écarts entre outre-mer et métropole. C'est d'autant plus important dans le contexte de crise de la vie chère. Selon l'Insee, en 2022, les prix en Guadeloupe étaient supérieurs de 15,8 % aux prix dans l'Hexagone -  13,7 % en Guyane, 8,9 % à La Réunion. La situation dramatique à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie ne doit pas nous faire oublier les autres territoires ultramarins.

Ce budget s'élève à 2,56 milliards d'euros, en baisse de 250 millions d'euros -  soit 9 %  - par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Toutefois, le Gouvernement a déposé des amendements ramenant les crédits de la mission presque au niveau de 2024.

Le programme 123, qui a trait à l'amélioration des conditions de vie dans les outre-mer, était initialement raboté de 314 millions d'euros. Des amendements du Gouvernement reviennent sur ces baisses, c'est heureux. Ce programme soutient les collectivités ultramarines, qui souffrent de l'insularité et de l'importance des dépenses de personnel - soit presque 65 % des dépenses de fonctionnement du bloc communal, contre 52 % pour les communes de l'Hexagone, en raison notamment de la majoration des primes de personnel.

La ligne budgétaire unique (LBU) revient à son niveau de 2023, après une hausse appréciée des crédits en 2024. Des pistes de réforme pourraient être envisagées, dans le sens d'une plus grande décentralisation.

Le programme 138 rassemble les crédits en faveur de la compétitivité des entreprises, de l'amélioration de l'employabilité des jeunes et de la montée en qualification des actifs. Il enregistre une hausse de 3,4 %, soit 65 millions d'euros, en raison de la hausse des crédits alloués à l'exonération des charges sociales, alors que la masse salariale augmente régulièrement en outre-mer depuis 2022. Difficile néanmoins d'établir des prévisions fiables : c'est un point sur lequel progresser.

Les dépenses fiscales renforcent l'attractivité des outre-mer. Sur les deux programmes de la mission, elles s'établiraient en 2025 à 5,5 milliards d'euros, soit une hausse de 2,3 %, comme entre 2023 et 2024. Nous saluons cette évolution, essentielle pour compenser les déséquilibres avec l'Hexagone, notamment sur les prix des biens.

Les territoires d'outre-mer bénéficient par ailleurs de crédits en provenance d'autres programmes du budget général, pour un total de 21,1 milliards d'euros. L'effort de l'État ne baisse que de 3 % par rapport à 2024 ; cette diminution est essentiellement liée à la diminution des crédits outre-mer.

La commission des finances a rendu un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques .  - Exercice peu commun que d'évoquer un avis rendu par la commission des affaires économiques fin 2024, dans un contexte différent, sous un autre gouvernement ! À l'époque, les outre-mer étaient déjà confrontés à un contexte difficile, notamment au fléau de la vie chère, qui ne touche pas que les Antilles. Il reste beaucoup à faire, malgré l'accord trouvé en Martinique. Je pense notamment à la situation de la Nouvelle-Calédonie, au besoin d'investissement dans les services publics de base, comme en Guyane, et d'adaptation normative partout dans nos territoires.

Je me réjouis du récent règlement européen qui permet aux outre-mer de déroger au marquage CE pour les matériaux de construction. Nous touchons au but, mais, monsieur le ministre, une volonté politique forte et constante est indispensable sur ce point -  comme sur d'autres.

La contrainte budgétaire n'a certes jamais été aussi pesante, mais les besoins des outre-mer n'ont jamais été aussi grands. Affirmation vraie en 2024, qui l'est encore davantage en 2025 !

Je pense à nos compatriotes mahorais et aux enjeux immenses de la reconstruction de Mayotte. Un projet de loi d'urgence sera débattu. Plusieurs leviers devront être actionnés, à commencer par celui de la simplification des normes, puis le levier budgétaire.

Nécessité de dégager des crédits pour les outre-mer, conscience que tout n'est pas qu'une affaire d'enveloppe budgétaire : tels sont les deux piliers de l'avis de la commission des affaires économiques.

La baisse de 37 % des crédits du programme n'était pas acceptable. Notre avis favorable est un avis exigeant. Il vous revient, monsieur le ministre, de prendre la pleine mesure des besoins de nos territoires.

Après avoir écouté le Premier ministre, je suis raisonnablement optimiste. Ses mots témoignent d'une poursuite bienvenue de l'action de l'État. Ces territoires sont aussi des territoires d'optimisme, d'innovation et de grand attachement à la République.

Agissons vigoureusement en réponse aux problèmes, et soutenons le dynamisme de nos territoires ultramarins ! (MM. Bernard Buis et Marc Laménie applaudissent.)

M. Teva Rohfritsch, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - (M. Bernard Buis applaudit.) Le PLF 2025 initial prévoyait une baisse drastique des crédits de la mission : inacceptable.

Nous devons refuser la fatalité de la vie chère, en Martinique comme en Polynésie française. La situation de Mayotte nécessite une réponse rapide, forte et concrète. La crise en Nouvelle-Calédonie aussi, ainsi que le chômage massif, les tensions migratoires, le défi de la souveraineté alimentaire, ou la protection des océans et de la biodiversité.

La baisse des crédits était non seulement inopportune, mais mal calibrée. Elle concernait les prêts de développement outre-mer, indispensables pour l'accès des PME aux financements, l'aide au fret, qu'il faudrait élargir, alors que les prix en Polynésie sont supérieurs de 51 % à ceux de l'Hexagone, la LBU ou les dispositifs d'aide à la continuité territoriale, essentiels au maintien de la cohésion de la nation.

Le déficit public élevé appelle certes à réduire les dépenses. Mais les outre-mer ne peuvent pas servir de bouc émissaire budgétaire !

Nos collectivités ultramarines sont confrontées à des difficultés structurelles liées à leur isolement et à leur éloignement. Il faut un volontarisme inscrit dans la durée. La diminution des crédits relève d'une courte vue budgétaire. Il faut certes des comités interministériels des outre-mer (Ciom), mais surtout des moyens et de la continuité, tout en protégeant nos concitoyens !

Il faut un réajustement des crédits. L'engagement pris par le précédent ministre des outre-mer constituait un compromis acceptable ; c'est pourquoi la commission des lois avait émis un avis favorable à l'adoption des crédits.

Nous serons attentifs aux arbitrages que vous rendrez, monsieur le ministre, pour trouver une solution acceptable par tous. (MM. Marc Laménie, Bernard Buis, Jean-Marc Ruel, et Mme Lana Tetuanui applaudissent.)

M. Akli Mellouli .  - (Applaudissement sur les travées du GEST ; Mme Audrey Bélim applaudit également.) L'outre-mer incarne la richesse et la diversité de notre République. Il est aussi le miroir des défis auxquels nous devons faire face pour construire une égalité réelle et durable. Ces territoires, bien qu'éloignés géographiquement, ne peuvent être relégués à la périphérie de nos préoccupations ! Il y va de la continuité de notre contrat social.

« Une civilisation qui s'avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. » Ces mots d'Aimé Césaire résonnent avec une actualité forte, dans la situation que vit Mayotte. Avant même que le cyclone la frappe, l'île connaissait une situation alarmante : bidonvilles à perte de vue, problèmes migratoires ... Mayotte a choisi la France, que lui avons-nous offert en retour ? Un Smic horaire et un RSA inférieurs à celui de la métropole ! En réponse, certains se cachent derrière un problème migratoire. (M. Christopher Szczurek ironise.) Il existe, mais imaginer y répondre en réduisant l'aide au développement de 37 % est une illusion ! Quand des populations en détresse décident de quitter leur pays, elles le quittent. Il ne faut pas réduire les difficultés de Mayotte à cette seule question. Car c'est bien la République qui a failli : nous avons laissé Mayotte dans une situation indigne. Elle mérite mieux que d'être une collectivité de seconde zone ! Changeons notre regard. Mayotte fait partie intégrante de notre République, avec ses droits, sa dignité.

Partout en outre-mer, nos compatriotes subissent des inégalités criantes. En Polynésie, en Nouvelle-Calédonie comme ailleurs, la revendication est claire : une vie digne !

On se souvient de la grève générale de 2009 dans les Antilles. Chaque mouvement social porte les mêmes revendications : augmentation des salaires, minima sociaux et retraites, baisse des prix.

Malgré les rapports alarmants du Conseil économique, social et environnemental (Cese), et les conclusions de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur le coût de la vie dans les outre-mer, le malaise perdure. Les prix outre-mer sont 10 à 15 % plus élevés qu'en métropole ; l'écart atteint 30 à 40 % en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie-Kanaky. Réduire les fractures structurelles qui persistent entre la métropole et les outre-mer est une exigence fondamentale. Ce n'est pas seulement une question de justice sociale, c'est essentiel pour préserver l'unité nationale. Il est urgent d'agir pour renforcer les liens entre l'Hexagone et l'outre-mer.

Les coupes budgétaires sont inacceptables. Le GEST refuse que nos compatriotes ultramarins servent de variable d'ajustement budgétaire. Le compte n'y était pas en 2024, il l'est encore moins en 2025, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mmes Audrey Bélim et Evelyne Corbière Naminzo applaudissent également.)

M. Victorin Lurel.  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le ministre, vous êtes ministre d'État. Ce n'est pas un titre honorifique. Vous êtes censé avoir l'écoute et la confiance du Premier ministre et du Président de la République.

Votre budget - il sera le vôtre au terme de cette séance - est meilleur que celui qui avait été présenté par votre prédécesseur. Les problèmes en Nouvelle-Calédonie étaient connus ; il a fallu une catastrophe à Mayotte pour que les gouvernements acceptent d'accorder une priorité aux outre-mer.

Votre budget est meilleur, nous le voterons. Mais il n'est pas parfait. Vous ajoutez 700 millions d'euros, légèrement plus que les crédits de 2024. Ce que proposait M. Barnier était une catastrophe budgétaire !

Nous comprenons qu'il faille accorder une priorité à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte. Mais il y a une absente : la vie chère. La loi contre la vie chère n'est pas tout à fait appliquée, pas davantage que la loi sur l'égalité réelle outre-mer.

Mme Micheline Jacques, Mme Béatrice Bellay, députée, et moi-même, avons élaboré une feuille de route complète pour lutter contre ce fléau. Il faudrait que ces propositions figurent dans un projet de loi : vous devriez laisser votre nom sur une loi contre la vie chère, monsieur le ministre d'État, car c'est une thématique transversale à tous les outre-mer.

Avec ces 700 millions d'euros supplémentaires, vous construisez un budget d'urgence. Il faudra répéter cet effort compte tenu des besoins et des aspirations des territoires.

Vous apportez des corrections à l'abattage précédent, avec 180 millions d'euros pour les exonérations de charges patronales. Compte tenu de l'imprécision des données sur le sujet, je vous suggère de ramener cette dépense à 120 millions d'euros et d'émettre un avis favorable sur les amendements du groupe SER, voire d'autres groupes : ce serait une première traduction du protocole signé en Martinique. Nous voterions alors avec enthousiasme votre budget ! (Applaudissements sur quelques travées du groupe SER ; M. Akli Mellouli applaudit également.)

M. Christopher Szczurek .  - Alors que l'Assemblée nationale débat du projet de loi d'urgence pour Mayotte, je souhaite apporter mon soutien aux Mahorais sinistrés. Cette île, si éloignée, est pourtant dans nos coeurs. Je pense aussi à nos compatriotes de Nouvelle-Calédonie, frappés par une violence inacceptable, et à ceux des Antilles, où la vie chère est encore plus insoutenable qu'en métropole.

La mission « Outre-mer » est l'une des plus touchées par les mesures d'économies : 500 millions d'euros en AE et 353 millions d'euros en CP. Seule exception : 104 millions d'euros pour le soutien aux entreprises. Cette baisse est profondément inquiétante, alors que les manques structurels d'investissement et de volonté politique sont mis en lumière par le drame touchant Mayotte.

Là-bas, comme en Guyane, le manque d'investissement pour protéger nos frontières est inacceptable. L'installation d'un radar militaire ou la réforme du droit de la nationalité seraient des réformes certes coûteuses, mais moins onéreuses que l'immobilisme actuel.

Les collectivités territoriales ultramarines ne peuvent supporter toutes les économies demandées. D'autres pistes existent, notamment au sein des opérateurs de l'État. Les outre-mer ne sauraient être la variable d'ajustement.

L'indifférence des gouvernements successifs a conduit à une accumulation des crises sociales et économiques. Il faut des modèles résilients et durables avec des investissements ciblés pour retrouver la sécurité et des services publics de qualité. Nous espérons que le Sénat adoptera des mesures efficaces pour répondre aux attentes de nos compatriotes. Dans l'attente, nous réservons notre position.

M. Marc Laménie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) En décembre dernier, lorsque nous aurions dû examiner cette mission, le contexte était déjà particulier. Or l'outre-mer mérite respect et reconnaissance.

Depuis mai dernier en Nouvelle-Calédonie et septembre en Martinique, nous condamnons fermement toutes les violences. Je rends hommage aux treize personnes décédées en Nouvelle-Calédonie, dont deux gendarmes, et aux trois personnes décédées durant les émeutes en Martinique.

Sur le Caillou, la situation économique et sociale est catastrophique : 700 entreprises ont été pillées ou endommagées ; le chômage a explosé ; les recettes des collectivités territoriales se sont écroulées ; de nombreuses infrastructures publiques sont détruites ; le montant des dégâts s'élèverait à 2 milliards d'euros.

En Martinique, le coût des émeutes est estimé entre 78 et 100 millions d'euros.

Chido est le cyclone le plus violent ayant jamais touché Mayotte : on déplore 39 personnes décédées et 5 000 blessés. Nous adressons tout notre soutien aux Mahorais.

L'habitat précaire de 100 000 personnes a été détruit. Les infrastructures publiques ont été touchées, et les risques sanitaires sont encore très présents, dans le département le plus pauvre de France.

L'année 2024 nous a rappelé les nombreuses difficultés auxquelles font face les outre-mer : sécurité, pouvoir d'achat, urbanisme, accès aux soins, immigration illégale. L'année 2025 devra apporter des réponses concrètes, efficaces et pérennes.

Nous ne pouvons plus reporter l'examen de nombreux sujets. Nous aurons ainsi l'occasion d'examiner le projet de loi d'urgence pour Mayotte.

Cette mission n'apportera pas toutes les réponses ; elle ne représente qu'une petite part de l'effort de l'État pour les outre-mer. En 2025, le PLF prévoit 21 milliards d'euros de CP au total, la mission ne représentant que 12 % des crédits. Après une hausse sensible en 2024, ses crédits sont malheureusement réduits de 9 %, à 2,55 milliards d'euros en CP : c'est 250 millions d'euros de moins que l'an dernier.

La forte dégradation du déficit public entraîne une baisse des crédits de nombreuses missions. C'est une nécessité, alors que la note de la France a été dégradée.

Nous avons déposé des amendements pour rétablir nos finances publiques, mais avons mis un point d'honneur à ne pas réduire les crédits de certaines missions importantes, comme l'éducation ou la santé. Il doit en être de même pour les outre-mer.

En Guadeloupe, le panier moyen est 50 % plus cher que dans l'Hexagone. La baisse des crédits destinés à améliorer les conditions de vie -  à hauteur de 300 millions d'euros  - est inopportune.

Les logements insalubres constituent 18 % des logements outre-mer, contre 2 % dans l'Hexagone.

Nous dénonçons les réductions des prêts de développement ou de l'aide au fret.

Le groupe INDEP votera les crédits de la mission, sous réserve que les engagements du gouvernement précédent soient respectés. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; Mme Jocelyne Guidez applaudit également.)

M. Georges Naturel .  - La mission « Outre-mer » ne saurait être un simple exercice budgétaire : elle est l'expression de la solidarité nationale envers ces territoires qui font la richesse et la diversité de la République. Or plusieurs de nos outre-mer traversent des crises exceptionnelles : Mayotte a été frappée par Chido, qui a tout détruit.

Nos compatriotes mahorais sont dans une détresse absolue face à l'ampleur des dégâts. Ils ont besoin d'aide, faute de quoi la situation sociale s'aggravera.

Mais n'oublions pas la Nouvelle-Calédonie. Conséquence des émeutes du 13 mai dernier, l'économie, déjà fragilisée, a subi un séisme : secteurs clefs à l'arrêt, entreprises ruinées ou incendiées ; les dégâts sont considérables. Le pays s'enfonce. Le temps qui passe aggrave la situation. La chute du gouvernement local nourrit l'instabilité.

Le Gouvernement a prévu des prêts, mais ces dispositifs ne seront opérationnels que dans plusieurs mois. L'urgence est là : les trésoreries sont vides, nous risquons une rupture de financement. C'est pourquoi nous plaidons pour des subventions directes et immédiates. J'ai déposé des amendements visant à débloquer 200 millions d'euros pour éviter l'effondrement de l'économie calédonienne et pour empêcher que la Nouvelle-Calédonie ne sombre dans la récession.

L'heure est à la mobilisation pour soutenir Mayotte et la Nouvelle-Calédonie. Sinon ces territoires s'enfonceront dans la crise. L'État doit agir maintenant. (Mmes Annick Petrus et Nadine Bellurot et M. Marc Laménie applaudissent.)

Mme Salama Ramia .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI) Faire des outre-mer un ministère d'État est un bon signal et une invitation au travail, car les outre-mer sont au coeur de notre République et doivent être au centre de nos actions.

Les crises successives ont mis en lumière l'urgence de répondre avec force et clarté aux défis touchant nos concitoyens ultramarins. Nous serons attentifs aux premiers signes que vous enverrez en leur faveur.

Nous sommes prêts à étudier les crédits de la mission « Outre-mer », qui enregistrent une nette diminution en 2025. L'effort global s'élève à 19 milliards euros en AE et 21 milliards d'euros en CP.

Nous partageons la nécessité de réduire le déficit public, mais cet effort ne devrait pas peser autant sur ces territoires, où le coût de la vie dépasse de 40 % celui de l'Hexagone. C'est pourquoi le RDPI déposera un amendement pour rétablir le niveau des crédits à celui de 2024.

Un tel budget d'austérité ne peut être opposé à un territoire dévasté ; je parle ici de Mayotte, mon territoire, avec émotion.

Les crédits ne tiennent pas compte du désastre causé par Chido. Nous attendons du Gouvernement qu'il rétablisse la justice sociale et la solidarité. Le RDPI votera l'adoption des crédits, malgré nos réserves sur certaines coupes budgétaires.

Nous notons une légère hausse des crédits pour soutenir nos entreprises ; ces mesures sont essentielles.

Des baisses préoccupantes affectent les prêts de développement outre-mer. Nous voulons abonder cette action de 24 millions d'euros afin de soutenir les économies locales et d'offrir des solutions de trésorerie souples à nos entreprises.

Il est urgent d'agir pour compenser les coûts du fret pour les produits de première nécessité. Nous déplorons les coupes touchant le service militaire adapté (SMA) et les aides à la mobilité via l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom). C'est un mauvais signal envoyé à notre jeunesse.

Le régiment du service militaire adapté (RSMA) pourrait être mobilisé pour contribuer à la reconstruction de Mayotte et former les artisans de demain.

Le programme « Conditions de vie outre-mer » subit une baisse notable.

Nous préconisons de renforcer le fonds régional d'aménagement foncier et urbain.

La baisse de 76 % des crédits de paiement en faveur des contrats de convergence et de transformation est alarmante ; elle compromet la signature des nouveaux contrats de redressement en outre-mer (Corom) en 2025.

Enfin, les fonds de secours outre-mer doivent être révisés à la hausse pour faire face aux dégâts causés par le cyclone. Les Mahorais attendent cette aide avec impatience.

En responsabilité, nous voterons sous réserve les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Marc Laménie applaudit également.)

Présidence de Mme Anne Chain-Larché, vice-présidente

M. Jean-Marc Ruel .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) L'année 2024 a été particulièrement difficile pour nos concitoyens et pour nos institutions. Nous voici un 15 janvier en train de débattre du PLF 2025, alors que l'année est déjà entamée.

L'outre-mer ne déroge pas à la règle. Triste constat : 4 ministres des outre-mer en 2024. Chacun a eu à gérer une crise...

Cela avait commencé par une crise de l'eau à Mayotte ; en mai, la Nouvelle-Calédonie s'est embrasée à la suite du projet de loi constitutionnelle ; en septembre, les Martiniquais ont manifesté contre la vie chère ; enfin le cyclone Chido, puis le cyclone Dikeledi, a touché Mayotte. Je témoigne à nos concitoyens mahorais la solidarité des habitants de mon archipel.

Je me félicite de la décision du Premier ministre de nommer un ministre d'État à Oudinot. Vous êtes le dernier Premier ministre à être venu à Saint-Pierre-et-Miquelon. (M. Manuel Valls s'en étonne.)

Nos rapporteurs ont rappelé les chiffres du PLF initial : 2,78 milliards d'euros en AE, soit une baisse de 12,52 % par rapport à 2024 et 2,55 milliards d'euros en CP, soit une diminution de 8,89 % en CP.

Le programme « Conditions de vie outre-mer » présente une baisse encore plus inquiétante, à hauteur de 37 % en AE et de 34 % en CP.

Vous héritez d'une réduction significative des crédits pour les outre-mer, après plusieurs années de hausse.

Nos territoires cumulent un trop grand nombre de défis à relever. Ce budget initial est inacceptable. Cependant, le RDSE salue l'effort réalisé pour rétablir les crédits de 2025 au niveau de 2024. Notre groupe votera les récents amendements du Gouvernement ainsi que les crédits de la mission.

Le Premier ministre a évoqué un nouveau plan de financement et de développement dans le cadre d'un Ciom. La méthode n'est pas nouvelle : le dialogue entre élus est toujours une bonne chose, mais elle a apporté peu de résultats depuis trois ans. Il est nécessaire de faire émerger des solutions du terrain, voulues par les populations et les acteurs locaux.

C'était la stratégie adoptée en 2018, avec le Livre bleu outre-mer, qui faisait suite aux Assises des outre-mer. Nous en avons perdu le cap.

L'absence de continuité stratégique pose problème. Quelle sera votre méthode pour mettre en oeuvre le plan annoncé par le Premier ministre ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme Lana Tetuanui .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Teva Rohfritsch, Mme Maryse Carrère et M. Marc Laménie applaudissent également.) Iaorana ite matahiti api : meilleurs voeux - vous aurez compris ! (Sourires)

Après le vote de la motion de censure, le train PLF s'est brusquement arrêté au Sénat. Espérons qu'il arrivera à destination.

Je salue le ministre d'État, ministre des outre-mer ; bienvenue au Sénat.

J'ai aussi une pensée pour nos compatriotes mahorais. Le cyclone Chido a dévasté Mayotte. Le groupe UC soutiendra les démarches pour la reconstruction de l'île.

Je me dois d'évoquer la situation de nos voisins du Caillou. En 2024, la Nouvelle-Calédonie a connu des émeutes d'une rare violence - près de 2 milliards d'euros de dégâts, dont 400 millions pour les infrastructures publiques. Près de 800 entreprises ont été dégradées, pillées ou incendiées, alors que beaucoup ne sont pas assurées contre les émeutes.

Le PIB calédonien a subi une contraction brutale -  de 20 à 30 %. Les pertes fiscales, douanières et sociales sont estimées à plus de 500 millions d'euros.

Les collectivités territoriales peinent à faire face à leurs dépenses de fonctionnement. Un réamorçage des finances est nécessaire pour relancer l'économie de l'archipel. Le groupe UC le soutiendra.

Il faut débattre sereinement de l'avenir institutionnel de l'île.

Le PLF prévoyait une baisse de 12,5 % des AE, et une baisse de 9 % des CP par rapport à 2024. Ce recul était regrettable, notamment pour les collectivités territoriales d'outre-mer qui subissent des crises à répétition.

Ces situations d'urgence ont récemment entraîné une hausse des crédits de la mission. Toutefois, nous devons rester raisonnables : nous devons participer à l'effort national et améliorer la gestion de nos politiques publiques. Le prochain Ciom doit en être l'occasion.

Le logement, la cherté de la vie, le taux de chômage, l'accès à l'eau potable, l'insécurité grandissante liée au trafic de drogue font partie des fragilités des outre-mer. Le Gouvernement en a pris conscience : après la déclaration de politique générale du Premier ministre, nous sommes assurés d'un accompagnement spécifique et renforcé.

S'agissant de la plus belle des collectivités d'outre-mer, la Polynésie (sourires), je rappelle mon hostilité à l'augmentation de la taxe sur les billets d'avion. La mesure de limitation adoptée par le Sénat pour la classe économique est un moindre mal. Mais nous opposer les directives européennes alors que nous avons le statut de PTOM relevant de la législation des pays ACP m'interpelle. Une dérogation serait nécessaire, au vu notamment de la concurrence des compagnies américaines.

Je remercie nos collègues qui ont livré bataille en séance sur ce sujet, en particulier Vincent Capo-Canellas. Reste que nous sommes inquiets des conséquences de cette augmentation sur l'activité touristique.

Je prends acte du maintien du soutien de l'État à la politique de santé en Polynésie française à hauteur de 4 millions d'euros, mais c'est largement insuffisant. Je regrette l'absence de crédits pour le renouvellement de la convention « santé-solidarité ». Cette convention si importante pour ma collectivité est-elle en voie de disparition ?

De même, l'absence de crédits de paiement dans le cadre de la gestion de nos contrats de convergence et de transformation m'interpelle. La faute en revient-elle au pays, du fait du manque de dossiers ficelés, ou aux méandres des couloirs parisiens ?

S'agissant des autres dotations propres à ma collectivité, leurs montants sont maintenus.

Je soutiens l'amendement de M. Delahaye qui supprime l'indemnité d'éloignement des fonctionnaires de l'État affectés en Polynésie française, mesure que j'ai défendue dans ma proposition de loi d'août 2022. Il ne s'agit pas de supprimer l'indexation sur la cherté de la vie, mais cette prime est égale à cinq mois de traitement indiciaire à chaque séjour de deux ans. Une prime d'installation égale pour tous permettrait une réduction des dépenses publiques qui me semble d'actualité.

Le groupe Union Centriste votera les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; MM. Teva Rohfritsch et Marc Laménie applaudissent également.)

Mme Evelyne Corbière Naminzo .  - Alors que le précédent gouvernement a été censuré, le pays réclame un changement de cap. Quant aux outre-mer, ils méritaient un autre budget, au moins 10 000 fois plus ambitieux ! (M. Jean-Baptiste Lemoyne s'exclame.)

Alors que le la décision de dégel du corps électoral en Nouvelle-Calédonie a provoqué le chaos, que des protestations contre la vie chère ont éclaté en Martinique et en Guadeloupe, que le cyclone Chido a dévasté Mayotte et que l'épidémie de chikungunya s'aggrave à La Réunion, nos territoires auraient besoin d'un soutien massif.

Leurs difficultés structurelles justifient des interventions spécifiques : vie chère, taux de chômage et de pauvreté supérieurs à ceux de l'Hexagone -  la pauvreté touche 36 % des Réunionnais  - , services essentiels parfois mal assurés. De plus, les collectivités territoriales ultramarines sont particulièrement touchées par la baisse des crédits.

Comment ne pas évoquer la Kanaky-Nouvelle-Calédonie, où les plaies sont encore vives mais où les accords de Nouméa n'ont jamais autant résonné dans les consciences et les coeurs ? La revendication par un peuple de son droit à l'autodétermination demeure légitime. Huit mois après les événements du 13 mai, des émeutes de la faim sont à craindre. Cette catastrophe sociale et économique est la conséquence d'une attitude jusqu'au-boutiste et paternaliste, mêlée à des réflexes colonialistes.

L'heure est à la responsabilité collective : nous devons reconstruire la Kanaky-Nouvelle-Calédonie. C'est le sens de plusieurs amendements déposés avec l'assentiment massif des élus, indépendantistes ou non.

À Mayotte, votre projet de loi d'urgence intervient deux mois après le passage du cyclone (M. Manuel Valls le conteste), alors que l'urgence humanitaire est patente. Nous déplorons la mort de 39 personnes et sommes solidaires de toutes les victimes sans papiers, qui ont perdu la vie ou ne peuvent être soignées. Notre groupe remercie toutes les personnes qui viennent en aide aux victimes, quelles qu'elles soient.

Derrière les lignes budgétaires, il y a des vies humaines et l'avenir de près de 3 millions de Français. Les outre-mer ne peuvent pas être les premiers territoires à pâtir de la baisse des dépenses publiques. Or cette mission révèle en creux un manque de vision du Gouvernement pour les outre-mer, ainsi que sa méconnaissance de nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ; Mme Audrey Bélim applaudit également.)

Mme Catherine Conconne .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Nous pourrons dire que nous avons vécu une sacrée époque : instabilité institutionnelle, défiance généralisée, dérèglement et imprévisibilité...

Cette ambiance culmine dans les pays dits d'outre-mer. Des décennies de luttes inachevées pour l'égalité ont laissé des séquelles que l'on pourrait qualifier d'irréparables. La course au rattrapage pour des conditions de vie plus acceptables a laissé une impression amère et durable de « loin des yeux, loin du coeur ».

Malgré les efforts consentis et les progrès objectifs, les indicateurs sont alarmants : nombre de nos compatriotes sont plongés dans l'extrême précarité. Pas moins de 30 % de nos compatriotes ultramarins vivent sous le seuil de pauvreté. Ce n'est pas juste ! J'attends toujours la mission du COR sur les pensions en outre-mer promise par l'un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre !

Je n'ajouterai pas de l'huile sur le feu. L'heure est au « maré rein », comme on dirait chez moi : une détermination et une solidarité collectives, fondées sur un dialogue mûr et respectueux. Apprenons à nous reparler, à nous enrichir mutuellement, élus locaux, nationaux et État, avec pour seul objectif le progrès pour nos pays. La tâche est immense, monsieur le ministre, et je vous dis déjà : bienvenue !

Nourrie depuis des décennies à la parole césairienne, je dirai : ensemble faisons un pas, puis un autre et encore un autre ; et tenons tous ces pas gagnés.

Au vu des pas accomplis dans ce budget rectifié, dans un esprit constructif et de progrès, je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Annick Petrus .  - Les outre-mer font face à des défis structurels qui appellent des réponses spécifiques et ambitieuses.

La vie chère reste un lourd fardeau. À Saint-Martin, les produits alimentaires sont en moyenne 47 % plus chers que dans l'Hexagone, alors que les ménages y ont un revenu médian bien inférieur à la moyenne nationale et que 40 % de la population saint-martinoise vit sous le seuil de pauvreté. Ces chiffres traduisent une précarité économique alarmante, qui affecte aussi les perspectives de la jeunesse locale.

La ministre des comptes publics, Amélie de Montchalin, a décidé de maintenir la hausse de la taxe de solidarité sur les billets d'avion, parlant d'une mesure de « justice fiscale et écologique ». Mais cette hausse pénalisera lourdement les populations ultramarines, qui dépendent quasi exclusivement du transport aérien pour leurs déplacements, et aggravera les fractures territoriales. Saint-Martin, du fait de sa triple insularité, sera particulièrement touchée. Cette décision incompréhensible risque de provoquer un effet de contagion des troubles sociaux.

Dans ce contexte tendu, il est impératif d'apporter des réponses concrètes aux territoires ultramarins, notamment à leur jeunesse. L'éloignement, les coûts liés à la mobilité et le manque de proximité culturelle rendent le dispositif actuel du RSMA peu accessible aux jeunes saint-martinois. La création d'une antenne spécifique à Saint-Martin, en mesure d'accueillir 85 jeunes par an, permettrait de proposer des formations adaptées aux réalités économiques locales, par exemple dans les secteurs du bâtiment, du nautisme et de l'économie bleue. Au-delà des apprentissages techniques, le RSMA inculque des valeurs fondamentales : discipline, respect, solidarité. Il renforce la cohésion sociale dans un territoire marqué par de fortes inégalités.

Offrir un cadre structurant et valorisant à nos jeunes, c'est investir dans la stabilité sociale et économique de Saint-Martin. Les jeunes saint-martinois ne demandent pas un traitement de faveur, mais l'égalité des chances. Créons une antenne locale du RSMA pour proposer à une génération désillusionnée un avenir valorisant au sein de sa communauté. Un budget renforcé pour ce dispositif est une priorité stratégique pour les outre-mer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Audrey Bélim .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Quel aurait été le destin de la Guyane si l'État avait décidé d'en faire le territoire de l'excellence aérospatiale européenne ? Celui de La Réunion, hotspot de la biodiversité, s'il avait décidé d'en faire le territoire de l'excellence en sciences naturelles et volcanologie ? Ceux des territoires ultramarins et de la France hexagonale si l'on avait décidé de faire des ressources de chacun des forces pour faire rayonner la France ?

La réalité de nos territoires est bien éloignée de cet espoir. Après le passage du pire cyclone depuis 90 ans, Mayotte est dévastée. J'adresse à nos compatriotes mahorais, au nom du groupe socialiste, un puissant message de solidarité.

Avant cet événement dramatique, nous parlions des mouvements sociaux contre la vie chère en Martinique. Un peu plus tôt, nous parlions même de guerre civile en Nouvelle-Calédonie-Kanaky. Au-delà de la vie chère, les problèmes sont multiples : sécurité, logement, santé.

Nous proposons de renforcer les effectifs de l'Autorité de la concurrence et des DGCCRF pour des contrôles spécifiques aux outre-mer, afin de venir à bout des insupportables monopoles qui empoisonnent la vie des Ultramarins.

Nous donnons l'alerte sur la baisse de près de 12 % de la LBU, alors que les besoins en logements sont énormes. Je proposerai dans quelques semaines, à la faveur d'un espace réservé au groupe socialiste, d'expérimenter l'encadrement des loyers en outre-mer, car les loyers à Saint-Denis ou Saint-Paul sont équivalents à ceux de Montpellier ! Dans le même temps, il faut amplifier notre effort de construction et de réhabilitation.

Monsieur le ministre, n'entendez pas dans mon discours du pessimisme ou de la mendicité. Prenez-le comme un appel à travailler ensemble. Il y a quelques années, vous avez dit à Ericka Bareigts, alors députée, qui dénonçait l'affirmation inadmissible selon laquelle la France serait un pays de race blanche, que, ce jour-là, c'était elle, femme noire, femme réunionnaise, qui incarnait Marianne. Nous avons la mémoire de ces mots qui ont ramené les outre-mer au coeur de la nation.

L'absence de considération dont nous avons souffert, particulièrement depuis 2017, affaiblit notre sentiment d'appartenance à la France. Nous avons trop souvent la désagréable impression de ne pas compter autant que nos compatriotes de France hexagonale.

Monsieur le ministre, avançons ensemble pour retrouver le chemin de l'égalité réelle ! Nous sommes fiers d'être français, même dispersés aux quatre coins du monde. Avec nous, la France pourra redevenir grande. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Evelyne Corbière Naminzo et MM. Teva Rohfritsch et Saïd Omar Oili applaudissent également.)

Mme Viviane Malet .  - Le jour où ces crédits devaient être initialement examinés, j'aurais commencé par souligner la résilience dont fait preuve la Nouvelle-Calédonie après les violentes émeutes qu'elle a connues. Mais, depuis, le cyclone Chido a dévasté Mayotte. Je réaffirme mon soutien aux Mahoraises et aux Mahorais, dont le département est tout entier à reconstruire.

Chacun des territoires d'outre-mer est singulier. Il nous appartient d'oeuvrer à la reconnaissance de leurs spécificités, atouts comme handicaps.

En particulier, nous nous attachons à dénoncer les différences de traitement et les réglementations injustifiées ou inadaptées. C'est dans cet esprit que je me bats depuis six ans contre l'application uniforme de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

En matière de continuité territoriale, des engagements forts ont été pris lors du Ciom du 18 juillet 2023. J'ai déposé un amendement visant à rétablir les crédits nécessaires à leur mise en oeuvre, importante pour nos habitants, notamment ceux qui doivent se former.

Je sonne l'alerte sur les difficultés de l'agriculture à La Réunion. Les planteurs de canne ont connu l'année dernière la pire récolte depuis des décennies. En 2020 déjà, plus de 42 % des agriculteurs réunionnais vivaient sous le seuil de pauvreté. Il faut se pencher aussi sur le niveau des retraites agricoles. Je défendrai pour nos éleveurs un amendement relevant le plafond du régime spécifique d'approvisionnement, inchangé depuis une décennie, en dépit d'un engagement du Président de la République.

L'accès à l'eau est également un enjeu fondamental.

Mme la présidente.  - Il faut conclure.

Mme Viviane Malet.  - En huit ans, monsieur le ministre, vous êtes le huitième à occuper ce poste ; cette succession n'est pas propice à une vision de long terme. Je compte sur vous pour obtenir en faveur de nos territoires les crédits qu'ils méritent ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Marc Laménie applaudit également.)

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer .  - Je suis honoré de défendre devant le Sénat les crédits de la mission « Outre-mer », quelques années après d'autres exploits...

Je connais votre grande attention pour les territoires d'outre-mer : celle de Gérard Larcher, de Micheline Jacques, des élus ultramarins et de tous ceux qui comme moi, ont ces territoires au coeur.

Le Premier ministre a fait un choix fort : créer un ministère d'État pour les outre-mer pour la première fois depuis un demi-siècle. En le confiant à un ancien Premier ministre, il confirme la priorité donnée à ces territoires. Ce choix m'honore et surtout m'oblige.

Alors que Mayotte est meurtrie, je salue l'engagement de Salama Ramia, Saïd Omar Oili et de mon collègue Thani Mohamed Soilihi.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Très bien !

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Déjà dévasté, ce territoire a été frappé une nouvelle fois, il y a trois jours, par une tempête tropicale. J'ai une pensée pour les victimes et rends hommage aux services de l'État.

Je présenterai dans quelques jours un projet de loi d'urgence. Nous devrons nous attaquer aux deux fléaux que sont l'immigration illégale et l'habitat illégal. Dans deux mois, un texte plus structurel vous sera soumis, concrétisant le programme Mayotte debout, élaboré en liaison avec les élus locaux, les parlementaires de Mayotte et votre délégation aux outre-mer.

En Nouvelle-Calédonie, près de 15 % du PIB a été détruit à la suite des émeutes de mai dernier. Il nous faut trouver un chemin de réconciliation. J'entamerai une négociation en vue d'un accord de refondation du modèle calédonien. Je m'inspirerai de la méthode de Michel Rocard et de Lionel Jospin, avec qui j'ai travaillé, mais aussi des travaux du Sénat et de l'engagement personnel du président Larcher.

Sur la vie chère, des chiffres éloquents ont été donnés. Nous devons apporter des solutions concrètes à nos concitoyens, établir la vérité des prix et instaurer des outils de régulation plus puissants. Des propositions de loi seront prochainement débattues, dont celle de Victorin Lurel. Je compte sur sa lucidité sur ce qui a pu et n'a pas pu être fait. Gouverner est difficile, mais nous devons avancer.

Au-delà des crises, nous devons toujours regarder les outre-mer comme des territoires de formidables opportunités. Quand éclatent les émeutes, quand s'abattent les tempêtes, ces territoires se rappellent à nos mémoires. Mais quand le tumulte s'apaise, on les oublie ! Cela doit changer.

Ces territoires sont des joyaux de la République. Ils abritent 10 % de la biodiversité mondiale et font de la France la deuxième puissance maritime mondiale.

M. Philippe Folliot.  - Et même la première !

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - La deuxième, je crois bien.

Ils font de la France un pays monde, présent sur cinq continents et trois océans. Ils sont riches d'identités, de cultures, de traditions singulières.

Mais c'est aussi dans ces territoires que se concentrent les plus grandes difficultés : pauvreté, violences, narcotrafic. Ils ont souvent un profond sentiment d'injustice et d'abandon.

Nous devons répondre à leurs besoins singuliers et favoriser leur insertion dans leurs bassins régionaux. On le dit depuis longtemps, il faut passer aux actes !

Une députée posait hier au Premier ministre la meilleure des questions : qu'est-ce que la France des outre-mer ? C'est à cette question que je veux répondre, en construisant dans le dialogue avec les forces vives des territoires de nouvelles trajectoires de développement et de financement. Je me consacrerai avec détermination à cette belle mission, et le Ciom sera réuni pour entériner cette ambition et cette méthode renouvelées.

Le budget doit nous donner les moyens de faire face aux crises et d'accompagner le développement de tous les territoires.

La première mouture du PLF 2025 demandait aux outre-mer des efforts excessifs. J'ai demandé de nouveaux arbitrages. Je remercie le Premier ministre d'avoir accordé au budget des outre-mer un traitement tout à fait exceptionnel dans le contexte financier actuel, témoignant de la réelle priorité donnée à ces territoires.

Si les amendements présentés par le Gouvernement sont adoptés, le budget de la mission s'élèvera à 3,5 milliards d'euros en AE et 3 milliards d'euros en CP, en hausse de 11 et 6 % respectivement par rapport à un budget 2024 déjà historiquement élevé. Je le dis avec humilité, car je mesure tout ce qui est à accomplir.

Ce budget permettra de poursuivre l'effort pour la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie. Près de 600 millions d'euros ont déjà été mobilisés. La garantie de l'État sera portée à 1 milliard d'euros pour un prêt de l'Agence française de développement (AFD). Une enveloppe supplémentaire de 200 millions d'euros permettra la reconstruction des écoles et bâtiments publics. Une nouvelle dotation à la société de gestion des fonds de garantie d'outre-mer (Sogefom), à hauteur de 29 millions d'euros, permettra d'amplifier le soutien aux entreprises via des prêts garantis. Enfin, l'État complétera l'avance accordée en décembre dernier, si les conditions demandées sont remplies. Des réformes sont en effet nécessaires. Certains veulent aller plus loin, mais j'en appelle à leur esprit de responsabilité pour ne pas fragiliser l'équilibre général du budget.

Le travail immense et difficile pour reconstruire Mayotte sera également rendu possible par ce budget. L'évaluation des dégâts est en cours, et tous les moyens seront mis en oeuvre pour répondre aux besoins. Le budget prévoit d'ores et déjà une enveloppe nouvelle de 100 millions d'euros en AE et 35 millions d'euros en CP pour amorcer la reconstruction des bâtiments publics. Ces moyens ont vocation à être massivement complétés. Après les promesses, il faut passer aux engagements et aux actes ! Je compte sur votre vigilance.

Les dispositifs de soutien prévus avant le passage de Chido seront confirmés, notamment les 60 millions d'euros du plan Eau Mayotte, dont 21,7 millions d'euros sur le budget de la mission.

Ce budget permet de renforcer nos dispositifs de soutien à l'ensemble des territoires. La réforme des exonérations de charges prévues par la Lodéom n'aura pas lieu cette année. Près de 180 millions d'euros seront ainsi réinjectés dans les territoires.

Les dispositifs de soutien à l'investissement public et privé sont également renforcés : je pense à l'Agence française de développement, à Bpifrance ou aux contrats de convergence, outils essentiels pour nos collectivités.

Plus largement, le soutien de l'État va bien au-delà de la mission « Outre-mer ». Il passe notamment par des dépenses fiscales portées par 105 programmes, dans tous les ministères. Je souhaite en la matière une plus grande coordination. Nous améliorerons également la consommation des fonds européens.

Ce budget, que je présente avec modestie et non en criant victoire, est un budget de solidarité et d'ambition. Solidarité avec les territoires en crise, ambition pour accompagner chacun d'eux dans un développement durable. Logement, agriculture, autonomie alimentaire, lutte contre la pauvreté, économie bleue : les sujets à traiter sont multiples.

Les territoires ultramarins représentent ce qu'il y a de plus beau dans notre pays. Soutenons-les. Ils le méritent, pour une France en grand ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur des travées du RDSE ; Mme Catherine Conconne et M. Victorin Lurel applaudissent également.)

Examen des crédits de la mission

Article 42 (État B)

Mme la présidente.  - Amendement n°II-1976 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Cet amendement rehausse les crédits du programme 138 compte tenu des prévisions des organismes de sécurité sociale. La réforme des dispositifs Lodéom nécessite des échanges avec les professionnels concernés.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Les exonérations Lodéom sont importantes pour favoriser l'emploi. Il conviendrait toutefois de renforcer la fiabilité des prévisions de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). Avis favorable.

M. Victorin Lurel.  - Compte tenu de l'imprécision des prévisions et des autres amendements qui ont été déposés, je m'étonne de l'absence de mesure relative à l'aide au fret. Le président de l'Autorité de la concurrence et la DGCCRF ont pourtant insisté sur son importance. J'espère un avis favorable aux amendements sur le sujet.

Mme Catherine Conconne.  - Cet amendement est bienvenu. La mobilisation du Sénat, tous groupes confondus, lors de l'examen de la première partie du PLF a donc porté ses fruits. Les collectivités et les entreprises ultramarines saluent cet effort.

L'amendement n°II-1976 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-1220 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Cet amendement rehausse les crédits du programme 123 en vue de la participation de l'État au financement des réparations et reconstructions des établissements scolaires de Nouvelle-Calédonie. L'abondement porte sur 120 millions d'euros en AE et 35 millions d'euros en CP.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-1298 rectifié ter de M. Naturel et alii.

M. Georges Naturel.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis favorable. La Nouvelle-Calédonie a subi des dégâts très importants, évalués à près de 2 milliards d'euros.

Les amendements identiques nosII-1220 et II-1298 rectifié ter sont adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-1272 rectifié quater de M. Naturel et alii.

M. Georges Naturel.  - Il n'est pas réaliste de compter uniquement sur des prêts de l'AFD pour répondre aux besoins de la Nouvelle-Calédonie. La solidarité nationale doit jouer, comme pour Mayotte. La somme de 200 millions d'euros me semble raisonnable pour pourvoir aux besoins les plus urgents. Dans la mesure où 120 millions d'euros sont prévus grâce aux amendements qui viennent d'être adoptés, cet amendement ouvre 80 millions d'euros supplémentaires pour la reconstruction des infrastructures.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-1975 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Il s'agit d'augmenter les crédits destinés à la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie. Nous souhaitons un suivi très attentif de la consommation de ces crédits. Il est normal que beaucoup d'argent public soit engagé pour la Nouvelle-Calédonie, mais j'entends aussi les demandes des autres territoires. L'exemplarité est nécessaire et chacun doit être conscient de l'effort consenti pour relever ce territoire.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-113 rectifié bis de M. Marseille et alii.

Mme Jocelyne Guidez.  - Nous souhaitons créer un nouveau programme « Aide à la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie ».

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-1252 rectifié de Mme Carrère et alii.

Mme Maryse Carrère.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-1254 de M. Kanner et du groupe SER.

M. Patrick Kanner.  - Monsieur le ministre, votre nomination au rang de ministre d'État témoigne de l'importance que le Gouvernement entend accorder aux outre-mer, qui traversent de graves difficultés. Cet amendement, sur lequel nous avons demandé un scrutin public, a l'avantage de leur redonner des perspectives. Il est ambitieux, détaillé et, certes, coûteux. Mais si la Nouvelle-Calédonie en est là, c'est parce que l'État a voulu forcer le destin, provoquant les émeutes du printemps dernier. Nous avons une responsabilité collective. Je vous remercie de bien vouloir donner un avis favorable à ces amendements présentés par trois présidents de groupe.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-1233 rectifié bis de M. Xowie et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Cet amendement prévoit une aide à la reconstruction des infrastructures publiques du pays, à hauteur de 400 millions d'euros. Les émeutes du 13 mai ont entraîné de nombreuses dégradations d'infrastructures. Votre prédécesseur avait annoncé 80 millions d'euros en AE. Les CP annoncés sont insuffisants. Où les élus de Nouvelle-Calédonie sont-ils censés trouver les sommes manquantes ? Nous demandons au Gouvernement de lever le gage.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis favorable aux amendements identiques nosII-1272 rectifié quater et II-1975, dont l'adoption rendrait les autres sans objet.

Mme Micheline Jacques.  - Je suis favorable à l'aide accordée à la Nouvelle-Calédonie, mais tous les territoires ultramarins sont en difficulté. Or il s'agit ici de ponctionner 400 millions d'euros sur le programme « Conditions de vie en outre-mer ». Je ne suis pas favorable à la ponction de cette ligne.

M. Akli Mellouli.  - Attention à ne pas déshabiller Paul pour habiller Jacques. Déplacer des lignes ne réglera pas les problèmes ! Il faut une réponse forte pour les outre-mer, conformément aux annonces du Gouvernement.

Les amendements identiques nosII-1272 rectifié quater et II-1975 sont adoptés.

En conséquence, les amendements nosII-113 rectifié bis, II-1252 rectifié, II-1254 et II-1233 rectifié bis n'ont plus d'objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-1222 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Il ne s'agit pas de déshabiller Paul pour habiller Jacques ou Pierre, ni de créer une compétition. Nous devons offrir des perspectives de long terme à chacun des territoires. Nous pourrions travailler à un renforcement du fléchage, mais il faut faire face à l'urgence, notamment à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie. Il faudra aller plus loin pour Mayotte et opérer une refonte plus générale.

Par cet amendement, le Gouvernement renouvelle son soutien au conseil départemental de Mayotte à hauteur de 60 millions d'euros en CP et 100 millions d'euros en AE, dans le cadre d'une convention.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-1291 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Cet amendement s'inscrit dans la continuité des engagements pris en 2023 pour un accompagnement renforcé de l'État, destiné à répondre aux besoins spécifiques de Mayotte. Les besoins en matière d'aide sociale à l'enfance ont doublé ; quant aux coûts des transports scolaires, ils ont augmenté de 42 % en deux ans. La situation financière du territoire s'est fortement dégradée depuis la fin 2022. Reconnaissons les difficultés spécifiques de Mayotte et donnons à ses habitants une chance de construire un avenir digne.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Compte tenu de la situation catastrophique de Mayotte, il s'agit d'une mesure nécessaire. Avis favorable.

Les amendements identiques nosII-1222 et II-1291 sont adoptés.

Modifications de l'ordre du jour

Mme la présidente.  - Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a demandé l'inscription en deuxième et troisième points de l'ordre du jour du mardi 4 février de la suite éventuelle du projet de loi d'urgence pour Mayotte et, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi relative à l'exercice de la démocratie agricole.

Acte est donné de cette demande.

En ce qui concerne la proposition de loi relative à l'exercice de la démocratie agricole, nous pourrions prévoir une discussion générale de 45 minutes et fixer les délais limites au lundi 3 février à 12 heures pour le dépôt des amendements de séance et le même jour à 15 heures pour l'inscription des orateurs dans la discussion générale.

Il en est ainsi décidé.

La séance est suspendue à 20 heures.

Présidence de M. Didier Mandelli, vice-président

La séance est reprise à 21 h 30.

Mise au point au sujet d'un vote

M. Laurent Burgoa.  - Au scrutin public n°150, Cédric Vial souhaitait s'abstenir.

Acte en est donné.

Projet de loi de finances pour 2025 (Suite)

Seconde partie (Suite)

Outre-mer

Examen des crédits de la mission (Suite)

Article 42 (État B - Suite)

M. le président.  - Amendement n°II-1974 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Nous souhaitons couvrir les premières dépenses d'urgence pour la reconstruction de Mayotte. Le montant inscrit sera amené à être affiné dans le cadre de l'exécution 2025 et au vu des besoins.

Nous attendons les résultats d'une mission inter-inspections ; j'aurai également à mes côtés une mission dédiée à Mayotte pour rendre le travail interministériel et l'action de l'État plus efficaces, en lien avec les équipes présentes sur place autour du préfet.

Le montant spécifique du programme 123 sera donc complété par les crédits des autres programmes budgétaires.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis favorable. Cette ouverture est totalement justifiée au vu de l'ampleur des dégâts.

L'amendement n°II-1974 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1978 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Cet amendement augmente les crédits des contrats de convergence et de transformation et des contrats de développement ultramarins signés en 2024, pour que le Gouvernement respecte les engagements pris envers les collectivités. Ces contrats verront leur durée passer de quatre à six ans. Nous devons poursuivre leur déploiement dans tous les territoires, afin que nos concitoyens bénéficient d'infrastructures essentielles. Ces dispositifs représentent plus de 8 milliards d'euros d'investissement, dont 2 milliards d'euros de crédits contractualisés par l'État.

M. le président.  - Amendement n°II-1204 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1292 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - C'est un apport bienvenu. La nouvelle génération des contrats de convergence a été signée par les territoires ultramarins en 2024. Par cet abondement supplémentaire, l'État tiendra ses engagements de manière lissée, sur la durée. Sagesse sur l'amendement n°II-1978. Demande de retrait de l'amendement n°II-1204 au profit de l'amendement précédent. Avis favorable à l'amendement n°II-1292.

L'amendement n°II-1978 est adopté.

L'amendement n°II-1204 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°II-1292.

M. le président.  - Amendement n°II-1982 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Nous mobilisons les crédits nécessaires pour le plan Eau Mayotte en 2025, afin d'éviter le retour de la crise de l'eau survenue en 2023-2024. Nous revenons progressivement à la situation antérieure au cyclone. Un travail important reste à effectuer ; des investissements sont nécessaires, dont la construction d'une deuxième usine.

Le plan Eau Mayotte est cofinancé à hauteur de 65 millions d'euros en AE et 62 millions d'euros en CP pour 2025 par les ministères chargés des outre-mer, de la transition écologique, de l'aménagement du territoire et de la santé.

C'est un sujet important en général, mais tout particulièrement à Mayotte. La Réunion connaît par ailleurs une crise de l'eau par manque de pluie.

M. le président.  - Amendement n°II-1348 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Nous souhaitons renforcer l'appui de l'État au syndicat mixte Les eaux de Mayotte (Lema). La crise de l'eau de 2023-2024 a exposé les faiblesses du système d'approvisionnement en eau potable et d'assainissement de Mayotte. Les tours d'eau ont affecté la vie des Mahorais. Le syndicat mixte Lema a besoin d'un financement pérenne, sans lequel il ne pourrait pas réaliser des infrastructures pourtant vitales.

Cet amendement abonde l'action n°6 du programme 123 de 4 millions d'euros en CP. C'est une étape clé pour construire un avenir durable à Mayotte et investir dans la dignité, la santé et le bien-être des Mahorais.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Sagesse sur l'amendement n°II-1982 : l'apport de 21,7 millions d'euros en AE et 20 millions en CP pour le plan Eau Mayotte est bienvenu. Retrait de l'amendement n°II-1348 à son profit.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Demande de retrait.

L'amendement n°II-1348 est retiré.

Mme Lana Tetuanui.  - Nous allons voter l'amendement du Gouvernement. J'attire l'attention du ministre sur les 48 communes de Polynésie. En effet, les délais qui leur ont été imposés pour fournir de l'eau potable aux habitants sont échus depuis le 31 décembre. Avec Teva Rohfritsch, nous demandons au Gouvernement d'apporter de l'aide à ces communes auxquelles la compétence eau a été donnée, sans moyens !

L'amendement n°II-1982 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1209 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Cela fait quelques années que nous demandons de parfaire le financement du syndicat mixte de gestion de l'eau et de l'assainissement de Guadeloupe (SMGEAG). Nous avions évalué le besoin à plus d'un milliard d'euros. Depuis, quelques investissements ont été réalisés, mais il reste 800 millions d'euros à financer. Nous demandons une subvention de 40 millions d'euros par an sur cinq ans et une garantie d'emprunt de 500 millions d'euros sur trente ans.

Pas moins de 100 000 habitants sont contraints à des tours d'eau. La situation est grave à Mayotte, mais aussi en Guadeloupe. 

Mon collègue Théophile propose une aide plus modeste de 10 millions d'euros. Il faudrait au moins que l'un des deux amendements soit adopté.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - De 2016 à 2022, le ministère des outre-mer a engagé 141,4 millions et consommé 72,5 millions d'euros. Un rapport a été demandé à la Cour des comptes sur la gestion de l'eau et de l'assainissement outre-mer, au titre de l'article 47-2 de la Constitution. En outre, le syndicat des eaux de Guadeloupe a bénéficié d'un Corom de 20 millions d'euros dans le dernier PLF. Voyons comment ces crédits seront consommés. Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Monsieur Lurel, je vous rejoins sur le constat. Le système des tours d'eau ne peut devenir la norme en Guadeloupe. Des investissements importants sont nécessaires. Mais nous divergeons sur la méthode. L'État n'a pas la compétence de la distribution d'eau potable. L'implication des acteurs locaux me paraît déterminante pour sortir de la crise. Depuis 2016, l'État s'est fortement mobilisé financièrement dans le cadre du plan Eau. Le syndicat mixte de gestion de l'eau de Guadeloupe est soutenu depuis 2023 à travers un contrat d'accompagnement renforcé. Un pilotage financier est nécessaire pour qu'il dispose d'une trésorerie adaptée. Il faut par ailleurs poursuivre la montée en puissance de l'investissement. Un plan d'investissement de 320 millions d'euros a été stabilisé pour la période 2024-2027. Depuis septembre 2023, 36 opérations ont été engagées pour sortir 50 000 personnes des tours d'eau d'ici à 2026. L'État apporte une aide financière au syndicat pour l'exploitation, les investissements et l'assistance technique, sous réserve du respect des engagements de performance pris par contrat.

Il ne saurait y avoir de sortie de crise sans implication des acteurs locaux et sans effort de redressement, parallèlement aux investissements réalisés. C'est sur cette base qu'il convient de poursuivre l'accompagnement de l'État aux côtés du syndicat mixte.

Je suis prêt à poursuivre la discussion avec les élus locaux. Il faut néanmoins un contrat, donnant-donnant. Retrait.

M. Victorin Lurel.  - Les partenaires locaux -  région, département, établissements publics de coopération intercommunale (EPCI)  - apportent des financements. Sur les 131 millions d'euros qui ont été investis ces dernières années, l'État a contribué à hauteur de 10 millions d'euros. D'autres fonds proviennent de l'Office français de la biodiversité (OFB) ou du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader).

Une fois les subventions versées, on agit. On a même viré le comptable public qui n'a pas fait son travail ! Une convention d'accompagnement renforcé a néanmoins été mise en oeuvre ; cela a été excessif : il n'y avait pas de détournement de fonds, mais une confusion sur les comptes bancaires. L'État s'est alors retiré. Le syndicat mixte est désormais confronté à une grave crise de trésorerie. Son nouveau président, Ferdy Louisy, maire de Goyave, l'a dit : l'affaire est grave, sans investissement, on dépose le bilan ! Il est vrai toutefois que le département pourrait faire davantage.

Monsieur le rapporteur spécial, le plan d'investissement ne prévoit pas 320 millions d'euros, mais 213 millions d'euros jusqu'en 2028. Il faut que l'État revoie ses aides et le plan de financement. Je retire cet amendement si une discussion est ouverte.

L'amendement n°II-1209 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1264 rectifié quinquies de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - C'est un amendement similaire, mais doté d'un montant plus modeste. Une nouvelle gouvernance a été mise en place au SMGEAG, assortie d'un plan ambitieux pour dégraisser, comme on dit, la structure. Or son budget propre ne suffira pas pour assurer à la fois les frais d'investissement et de fonctionnement. Le rendement du réseau se dégrade : nous en sommes à moins de 40 % d'efficacité ! Sur 1 000 litres d'eau produits, 600 litres sont perdus. C'est dramatique. Les collectivités se sont engagées ; 10 millions d'euros, ce serait un bon coup de pouce pour les deux ans à venir.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait, pour les mêmes raisons que sur l'amendement précédent.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Pour l'année 2024, une enveloppe de 20 millions d'euros a été accordée. Pas moins de 16 millions d'euros sont déjà prévus cette année. Je veux que l'on puisse avancer sur ce sujet, mais sur une base contractuelle. Ayons une discussion sereine et transparente avec les élus. Retrait.

L'amendement n°II-1264 rectifié quinquies est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1979 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Nous mettons à niveau les crédits de l'Agence française de développement (AFD) à hauteur de 21 millions d'euros en AE et 2 millions en CP. Je veux souligner l'importance du rôle de l'AFD à l'échelon régional. Cet outil doit être bien plus utilisé.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Sagesse : cet apport de nouveaux crédits est bienvenu.

L'amendement n°II-1979 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1977 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Nous augmentons de 10 millions d'euros en AE et de 9 millions en CP les crédits de Bpifrance pour les territoires ultramarins afin de revenir au niveau de 2024.

M. le président.  - Amendement n°II-1194 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Nous rétablissons à l'identique les crédits de l'action n°4 du programme 138. Vous revenez certes de manière avantageuse sur la diminution prévue dans la version initiale du budget, mais quid de l'aide au fret, qui baisse fortement ? Le Gouvernement prend-il des engagements dans ce domaine ? Tout ne peut pas relever du Ciom. La vie chère est un thème commun à tous les territoires d'outre-mer. On prévoit une aide pour les passagers aériens ; mais rien sur le fret ni sur les produits de première nécessité ! Je voterai votre amendement, monsieur le ministre, mais j'aimerais entendre vos engagements sur la cherté de la vie, contre laquelle prendre une panoplie de mesures est nécessaire.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1351 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Les crédits de l'action n°4 sont indispensables pour accompagner les investissements des entreprises ultramarines. Une baisse de 71 % des AE et 75 % des CP n'est pas acceptable. Les prêts de développement outre-mer (PDOM), seul produit financier spécifique à l'outre-mer développé par Bpifrance, répondent aux besoins en fonds de roulement des TPE-PME ultramarines. Ils ont engendré 44 millions d'euros d'investissement en 2023, pour 151 entreprises bénéficiaires. En 2024, 119 entreprises ont pu bénéficier de 30 millions d'euros de crédits. Dans un contexte bancaire de plus en plus contraint, la réduction de cette action est inadaptée, car elle entraverait la relance économique de ces territoires.

M. le président.  - Amendement n°II-326 de Mme Jacques au nom de la commission des affaires économiques.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis.  - Au nom de la commission des affaires économiques, je salue le vote à l'unanimité, transpartisan, de la commission des finances sur cette aide aux TPE-PME. Je salue également le geste du Gouvernement, qui propose 10 millions à la place des 8 millions d'euros votés en commission.

M. le président.  - Amendement identique n°II-825 rectifié quater de M. Buval et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1303 rectifié ter de MM. Rohfritsch et Lemoyne.

M. Teva Rohfritsch.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Sagesse sur l'amendement n°II-1977. Retrait des amendements nosII-1194 et II-1351. Les amendements nosII-326 et identiques sont satisfaits par l'amendement du Gouvernement. Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

M. Victorin Lurel.  - Pas moins de 35 millions d'euros étaient inscrits en 2024. Là, nous sommes à 10 millions d'euros : ce n'est pas suffisant !

L'amendement n°II-1977 est adopté.

Les amendements nosII-1194, II-1351, II-326, II-825 rectifié quater et II-1303 rectifié ter n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-1980 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Cet amendement augmente de 8 millions d'euros en CP et en AE les crédits en faveur de la Sogefom ; il complète l'amendement n°II-1296 rectifié ter.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - La Sogefom apporte des garanties partielles aux TPE-PME. Cet apport est bienvenu. Sagesse.

M. Jean-François Husson.  - Très bien.

L'amendement n°II-1980 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1981 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Cet amendement augmente les crédits du Fonds outre-mer (FOM) de 4 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP.

M. le président.  - Amendement n°II-1304 rectifié bis de M. Rohfritsch et alii.

M. Teva Rohfritsch.  - Cet amendement diffère du reste des amendements en discussion commune. Dans le cadre du PLF 2024, nous avions voté une mesure qui a été réduite en gestion par le précédent gouvernement. Les communes polynésiennes n'ont donc pu bénéficier du soutien en ingénierie financière proposé par ce biais. Nous devons éviter que la situation ne s'aggrave.

M. le président.  - Amendement n° II-1282 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Sagesse sur l'amendement du Gouvernement ; le FOM est un outil important.

Avis du Gouvernement sur les deux autres amendements.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

Mme Jocelyne Guidez.  - Le rapporteur a demandé l'avis du Gouvernement ! (On s'impatiente à droite.)

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Pardonnez ma légère distraction : voilà huit ans que je ne vous avais pas vus, je vous retrouve, je peux m'y perdre, l'erreur est humaine... (Sourires ; on s'en amuse à droite.)

Avis défavorable.

M. Victorin Lurel.  - L'amendement de M. Teva Rohfritsch est surtout en faveur du Pacifique.

Monsieur le ministre, vous avez de l'expérience, même si huit ans ont passé. Vous avez été Premier ministre ! On nous reproche toujours de ne pas avoir la compétence technique suffisante pour monter les dossiers, mais c'est un prétexte ! Je voterai l'amendement n°II-1304 rectifié bis, mais ce prétexte n'en est pas moins irritant.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - C'est notre rôle d'accompagner les communes polynésiennes en ingénierie financière, mais il y a déjà un appui via le FOM. Un recrutement est en cours à la communauté de communes des îles Marquises.

Mon amendement répond au même objectif que celui de M. Teva Rohfritsch.

M. Teva Rohfritsch.  - Effectivement, mais le recrutement n'a été ouvert qu'à la fin de l'année pour les Marquises. Il y a deux autres demandes, à Mahina et dans l'intercommunalité Tereh?amanu, qui n'ont pu être menées à bien faute de moyens. Si le ministre nous assure de son soutien, connaissant la fongibilité du FOM, je retirerai mon amendement.

L'amendement n°II-1304 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°II-1981 est adopté.

L'amendement n°II-1282 rectifié n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-1729 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Nous le retirons au profit de l'amendement n°II-1407 rectifié de M. Georges Patient.

L'amendement n°II-1729 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1280 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1407 rectifié de M. Georges Patient et allii.

M. Dominique Théophile.  - Cet amendement abonde le programme 123 de 10 millions d'euros en CP afin de couvrir les engagements pris au titre des Corom sélectionnés en 2023 et 2024.

Une première série de communes a signé des Corom en 2021. Ce dispositif, dont le rapporteur spécial est le père, a été pérennisé en 2024. À ce jour, une vingtaine de communes y sont engagées.

M. le président.  - Amendement n°II-1357 de Mme Ramia.

Mme Salama Ramia.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait de l'amendement n°II-1280 rectifié au bénéfice de l'amendement n°II-1407 rectifié.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je lève le gage.

L'amendement n°II-1729 est retiré.

L'amendement n°II-1280 rectifié est retiré.

L'amendement n°II-1407 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°II-1357 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1428 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - On a peu parlé jusqu'à présent d'un territoire qui nous est cher : Wallis-et-Futuna. Un filet social de 3 millions d'euros a été déployé à partir de septembre 2024 dans le cadre d'un contrat entre l'État et la collectivité, en faveur des populations les plus défavorisées du territoire.

M. le président.  - Amendement n°II-634 rectifié bis de M. Kulimoetoke et alii.

M. Teva Rohfritsch.  - M. Kulimoetoke sollicite une augmentation de l'enveloppe supérieure à celle qui est proposée par le Gouvernement.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis favorable à l'amendement n°II-1428. Les crédits diminuaient : cette évolution est bienvenue.

Retrait de l'amendement n°II-634 rectifié bis au profit de l'amendement du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

M. Akli Mellouli.  - Nous voterons contre l'amendement du Gouvernement, qui est moins disant. Il faut tenir compte des réalités, sinon le programme de développement ne sera pas réalisé.

L'amendement n°II-1428 est adopté.

L'amendement n°II-634 rectifié bis n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-1730 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Il s'agit d'honorer un engagement passé à hauteur de 2,5 millions d'euros en faveur des écoles à Mayotte. Cet engagement est évidemment très loin des besoins qui sont en train d'être analysés, puisque 30 % des écoles sont détruites après le passage du cyclone Chido.

L'amendement n°II-1349 est retiré.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Sagesse. C'est bienvenu dans le contexte actuel.

L'amendement n°II-1730 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1676 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Il n'y a pas que des hausses, il y a aussi des baisses... Nous diminuons de 8 millions d'euros les crédits du fonds exceptionnel d'investissement (FEI), estimant qu'ils ne seraient pas consommés.

M. le président.  - Amendement n°II-1205 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Nous souhaitons une reprise des crédits à l'identique. J'avais déjà quitté le Gouvernement quand cet engagement a été pris. Les réformes de 2018 de suppression de la taxe sur la valeur ajoutée non perçue récupérable (TVA NPR) et de réforme des zones franches d'activités nouvelle génération (Zfang) devaient dégager des économies à réinjecter dans d'autres actions, notamment le FEI.

Je ne peux pas voter cet amendement. Avec Yves Jégo, nous avions créé ce fonds pour remplacer les sociétés immobilières d'outre-mer (Sidom).

M. le président.  - Amendement n°II-1371 de M. Omar Oili.

M. Saïd Omar Oili.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - La baisse des CP envisagée pour 2025 paraît justifiée. Près de 21 millions d'euros en AE n'ont pas été consommés en 2023, dernière année pour laquelle les données consolidées sont disponibles. Sagesse sur l'amendement du Gouvernement. Avis défavorable à l'amendement n°II-1205 de M. Lurel, qui est contraire à celui du Gouvernement. Idem sur l'amendement n°II-1371 de M. Omar Oili.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable à ces deux amendements.

Mme Catherine Conconne.  - Je partage l'analyse de M. Lurel. Quand Annick Girardin, ministre des outre-mer, a proposé le remplacement de la TVA NPR par un fonds d'investissement, ce dernier nous a été vendu comme un Graal intouchable. Nous l'avions vu venir : on a la preuve aujourd'hui que nous avions raison.

L'amendement n°II-1676 est adopté. En conséquence, les amendements nosII-1205 et II-1371 n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-1219 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Cet amendement réduit les crédits alloués au programme 138, pour respecter les engagements de résorption du déficit public. Il s'inscrit dans la ligne des mesures relatives à l'ajout de jours de carence dans la prise en charge des arrêts maladie des fonctionnaires et des militaires et à la réduction des indemnités journalières prises en charge par l'État.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1314 rectifié de M. Canévet et alii.

M. Michel Canévet.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis favorable, car ces amendements prévoient des économies de 925 000 euros, afin de tenir l'objectif de 5 % de déficit public.

M. Victorin Lurel.  - L'affaire me paraît grave ! On fait 925 000 euros d'économies sur quoi ? Les indemnités journalières et les arrêts maladie ! Or l'engagement a été pris de revenir sur les annonces relatives aux jours de carence... On anticiperait donc une mesure qui fait l'objet de discussions avec le Premier ministre ? Je suis étonné ! Ce n'est pas une affaire symbolique, mais philosophique et politique !

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Je ne vois pas comment on peut abonder dans le sens de cet amendement. Depuis tout à l'heure on évoque le renforcement de la présence de l'État outre-mer. Dans le même temps, on affaiblirait ses forces vives, c'est-à-dire les fonctionnaires ? On parle de santé, d'éducation, d'accès à l'eau, et on tape sur les doigts de ceux qui oeuvrent en ce sens ! (M. Michel Canévet proteste.)

M. Akli Mellouli.  - Cette mesure affectera le pouvoir d'achat des fonctionnaires ; c'est une régression, non conforme aux attentes de nos compatriotes ultramarins.

M. Michel Canévet.  - Cette mission doit aussi participer aux efforts d'économie demandés. Dégageons des moyens pour l'investissement, non pour le seul fonctionnement. (Mme Evelyne Corbière Naminzo et M. Victorin Lurel protestent.)

Les amendements identiques nosII-1219 et II-1314 rectifié sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-1203 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Retiré : le Gouvernement a fait des efforts.

L'amendement n°II-1203 est retiré.

M. le président.  - Amendement n° II-1213 de Mme Conconne et du groupe SER.

Mme Catherine Conconne.  - En 2021, la Martinique a subi pillages et émeutes. Bon nombre d'entreprises ont été vandalisées et l'État n'a pas su protéger ni les biens ni les personnes. En 2024, rebelote ; depuis septembre, 150 entreprises ont été pillées et vandalisées et des milliers d'employés sont en chômage partiel, sans aucune garantie que l'activité reprenne. Beaucoup de chefs d'entreprise veulent mettre la clé sous le paillasson. Les assureurs font la fine bouche et ne souhaitent plus assurer le risque émeute.

Les chefs d'entreprise sont impuissants. Pourtant cela relève des missions régaliennes de l'État que de protéger les entreprises.

Prévoyons un fonds de 75 millions d'euros pour que l'État soutienne les entreprises ; 75 millions, c'est un minimum, résultat d'une évaluation sérieuse de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Martinique.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - L'État a prévu d'appliquer l'accord multipartite signé à la Martinique. Un amendement du RDPI a été adopté pour réduire le taux de TVA sur les produits de première nécessité dans les Antilles, ce qui coûtera à l'État 2 milliards d'euros. Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable. Bien sûr, il y a des trous dans la raquette en matière d'assurances. Plutôt que de créer un fonds, trouvons les moyens de répondre aux difficultés réelles des entreprises. Des financements ont été mobilisés, un accord a été signé...

Mme Catherine Conconne.  - Ce débat est lunaire... Me rétorquer « baisse la TVA » alors que je vous parle d'entreprises pillées et vandalisées, on est où, là ? Vous additionnez les poules et les canards ! (M. Manuel Valls rit de bon coeur.) Il faut atterrir !

Bpifrance, avec ses règles strictes, ne va pas soutenir nos entreprises en fonds propres si facilement...

M. Georges Naturel.  - En Nouvelle-Calédonie, des entreprises ne sont plus assurées, car la garantie émeutes a été retirée. Elles ne peuvent donc plus demander des prêts-relais bancaires. C'est un problème. Créons un fonds de garantie ou accompagnons mieux ces entreprises. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio renchérit.)

M. Victorin Lurel.  - Quand on additionne toutes les baisses, on atteint moins 414,6 millions d'euros ! Madame Conconne a parfaitement raison.

Le Gouvernement s'est engagé à diminuer la TVA, mais la règle de l'entonnoir empêche d'exécuter cet engagement ; la Martinique a baissé l'octroi de mer ; il faut commencer un début d'exécution... Faisons des efforts.

Mme Jocelyne Guidez.  - Jusqu'à présent, j'ai voté comme le Gouvernement ; mais j'habite aussi la Martinique, c'est la désolation. Il faut leur venir en aide. Je voterai l'amendement de Mme Conconne.

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°II-1213, mis aux voix par assis et levé, est adopté.

(Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement n°II-1198 de Mme Conconne et du groupe SER.

Mme Catherine Conconne.  - Mon collègue Georges Patient a rappelé l'accord tripartite signé après les émeutes. Avec Guillaume Chevrollier, nous avons publié un rapport sur la continuité territoriale. Celle-ci concerne les transports de passagers principalement par avion, mais aussi les marchandises. Cela existe pour la toute proche Corse, qui est aussi « outre-mer », si l'on raisonne géographiquement, et qui, en la matière, bénéficie de moyens importants depuis quarante ans. Or le 4 décembre dernier, nous avons voté une augmentation de plusieurs dizaines de millions d'euros de cette aide pour la Corse, qui s'élève au total à plus de 100 millions d'euros. Nous demandons la moitié, 56 millions d'euros.

Ce geste est essentiel, et nous n'inventons rien : cela existe déjà dans la République !

M. le président.  - Amendement n°II-826 rectifié ter de M. Buval et alii.

M. Dominique Théophile.  - Retiré au profit de l'amendement n°II-1198.

L'amendement n°II-826 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-324 de Mme Jacques au nom de la commission des affaires économiques.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis.  - Affectons 14 millions d'euros à la continuité territoriale, pour qu'elle soit au même niveau qu'en 2024, conformément à l'engagement de François-Noël Buffet.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1300 rectifié bis de M. Rohfritsch et alii.

M. Teva Rohfritsch.  - Il s'agit de tenir les engagements du Ciom de 2023. C'est une question de justice.

M. le président.  - Amendement n°II-1199 de Mme Bélim et du groupe SER.

Mme Audrey Bélim.  - Cet amendement rétablit les financements de la continuité territoriale pour 2025. La baisse des financements s'ajoute à celle de 1,2 million d'euros prévue pour Ladom. Conséquence : Ladom sera contrainte de refuser toute nouvelle demande dès octobre 2025. Cela irait à l'encontre du rapport Conconne-Chevrollier et des conclusions du Ciom, menaçant l'accès de nos jeunes à la mobilité et à l'emploi.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1275 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1239 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Il s'agit d'indexer le budget de la continuité territoriale sur l'inflation. La vie chère est le fléau numéro un pour tous les habitants des territoires ultramarins. L'État consacre 257 euros par an pour un Corse contre 16 euros pour un Réunionnais en matière de continuité territoriale.

La continuité territoriale permet à nos jeunes d'accéder à des formations qualifiantes, à la faveur d'allers-retours entre l'Hexagone, l'Europe et les outre-mer. Au lieu d'envisager de réduire ses moyens, il faudrait plutôt l'étendre, sinon, elle restera un voeu pieux.

M. le président.  - Amendement n°II-1322 rectifié de Mme Malet et alii.

Mme Viviane Malet.  - Sanctuariser les crédits de la continuité territoriale n'est rien d'autre que la concrétisation des engagements du Ciom. Nous proposons un abondement de 12 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-1333 rectifié quater de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1276 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1347 rectifié de Mme Petrus et alii.

Mme Annick Petrus.  - Conformément aux engagements du Ciom et aux recommandations du rapport Conconne-Chevrollier, il faut augmenter les crédits en faveur de la continuité territoriale, à hauteur de 1 million d'euros. C'est une question d'équité.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Les crédits alloués à la continuité territoriale ont augmenté de 20 millions d'euros entre 2023 et 2024. Une hausse de 56 millions d'euros serait très élevée. J'invite le Gouvernement à travailler ce sujet, mais je demande le retrait de l'amendement n°II-1198.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les autres amendements ?

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis sur l'amendement n°II-1198 : c'est une question de calibrage.

Les élus ultramarins seront invités ou bien par le Président de la République ou bien par le Premier ministre ou bien par moi-même pour discuter de la continuité territoriale, du fret, de la vie chère...

Avis favorable, dès lors, aux amendements nosII-324 et II-1300 rectifié bis, qui, en augmentant de 14 millions d'euros les crédits, permettent de respecter les engagements pris lors du Ciom.

Je lève le gage, et propose le retrait des autres amendements.

M. Victorin Lurel.  - Je souhaite rappeler au souvenir de mes collègues l'amendement n°I-72 rectifié bis déposé par Jean-Jacques Panunzi et d'autres collègues le 22 novembre dernier sur la continuité territoriale.

L'amendement précise que depuis 2009 « la dotation est gelée et n'évolue plus, restant établie à près de 187 millions d'euros. » On parle de 187 millions ! La Corse et pourtant à côté ; or on demande à peine 56 millions. Est-ce excessif de dire que 3 millions de personnes à 22 000 km méritent mieux que cela ? Monsieur le ministre d'État, soyez le premier ministre des outre-mer à régler cette injustice. Moi, je n'ai pas pu ! (Mme Lana Tetuanui apprécie.)

Mme Catherine Conconne.  - Retirer ou maintenir ? J'hésite beaucoup. Cher Manuel Valls, j'ai envie de vous faire confiance, mais que l'on ne me parle pas de calibrage ; on a voté une augmentation de 50 millions d'euros pour la Corse, le 4 décembre dernier ; Catherine Vautrin était au banc, je m'en souviens comme si c'était hier.

Rendez-vous en mars ?

Je retire l'amendement.

L'amendement n°II-1198 est retiré.

Les amendements identiques nosII-324 rectifié et II-1300 rectifié ter sont adoptés. En conséquence, les amendements nosII-1199, II-1275 rectifié, II-1239, II-1322 rectifié, II-1333 rectifié quater, II-1276 rectifié et II-1347 rectifié n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-1174 de Mme Guidez et M. Marseille.

Mme Jocelyne Guidez.  - L'isolement géographique de Mayotte est un obstacle majeur. Rétablissons les crédits alloués à la continuité territoriale à hauteur de ceux de 2024, afin que les Mahorais disposent d'un soutien à la mobilité. Le Gouvernement doit lever le gage.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-1174 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1385 de M. Mellouli et alii.

M. Akli Mellouli.  - Il s'agit de renforcer les crédits de Ladom comme les amendements de Mmes Bélim et Conconne. Peut-être qu'entre-temps nos collègues auront changé leur vote ? (On s'amuse sur divers bancs.)

M. le président.  - Amendement n°II-1277 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-325 de Mme Jacques, au nom de la commission des affaires économiques.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis.  - La baisse du budget de Ladom met en péril une quarantaine de postes. Pour les préserver, augmentons de 4 millions son budget.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1302 rectifié bis de M. Rohfritsch et alii.

M. Teva Rohfritsch.  - Votons cette augmentation, en cohérence avec notre vote pour réajuster le budget de la continuité territoriale. Dans le Pacifique, on est à plus des 22 000 km dont parlait M. Lurel ! Il s'agit alors aussi de faire nation. C'est une question de justice.

M. le président.  - Amendement n°II-1301 rectifié bis de M. Rohfritsch et alii.

M. Teva Rohfritsch.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1197 de Mme Conconne et du groupe SER.

Mme Catherine Conconne.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1384 de M. Mellouli et alii.

M. Akli Mellouli.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - J'aimerais que cela soit pareil à l'Assemblée nationale... (Rires)

Puisqu'il faut choisir entre divers amendements, je donne un avis favorable à l'amendement n°II-1301 rectifié bis de M. Rohfritsch, qui augmente de 3 millions les crédits de Ladom. Je lève le gage. Retrait des autres amendements à son profit.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis.  - Lors de son audition, Ladom avait sollicité une aide à hauteur de 4 millions d'euros.

L'amendement n°II-1385 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-1277 rectifié n'est pas adopté.

M. Victorin Lurel.  - Les amendements suivants sont soutenus par la commission...

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis.  - ... des affaires économiques.

Les amendements identiques nosII-325 et II-1302 rectifié bis sont adoptés. En conséquence, les amendements nosII-1301 rectifié ter, II-1197 et II-1384 n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-827 rectifié bis de M. Buval et alii.

M. Dominique Théophile.  - Il faut renforcer l'aide au fret pour rendre effective la continuité territoriale. Après trois mois de travaux, 38 auditions et deux déplacements en Guyane et en Guadeloupe, les manquements en la matière apparaissent dans toute leur ampleur. En Martinique, l'État s'est engagé sur les frais d'approche pour 6 000 produits de première nécessité.

Pour l'heure, la traduction budgétaire n'est pas là. Cet amendement y remédie.

M. le président.  - Amendement n°II-1195 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Nous avons dit que nous voterions ce budget amendé - il faut donc adopter des amendements tels que celui-ci. Le transport de marchandises est un facteur inflationniste important.

Cet amendement de 25 millions d'euros bénéficie au transport de marchandises. Il faut respecter le protocole d'octobre dernier. Levez le gage !

La TVA a baissé, l'octroi de mer a baissé, et l'effort continue, mais l'État n'a pas commencé à tenir ses engagements.

Il faut aussi aider les autorités de la concurrence et les services déconcentrés de l'État.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1350 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-831 de Mme Conconne.

Mme Catherine Conconne.  - Là, on entre dans le dur : les engagements pris par l'État. La baisse de TVA est une péréquation : ce qui est ajouté quelque part est enlevé ailleurs, et l'effort de l'État est assez faible. Cependant, la continuité territoriale avait été mise dans la balance. Encore une fois, nous n'inventons rien : la toute proche Corse bénéficie de la continuité territoriale.

Déjà en 2023, lorsque j'ai établi mon rapport avec Guillaume Chevrollier, j'avais senti les choses venir et réclamé 5 millions d'euros, en vain. Depuis, la crise a eu lieu, et je demande un premier pas de 15 millions d'euros.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Dans un contexte budgétaire contraint, l'aide au fret ne soutiendra pas directement le pouvoir d'achat de nos concitoyens ultramarins. Retrait de tous les amendements.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable, même si je suis conscient que le problème est réel.

Nous présentons un budget amélioré, mais qui reste contraint, et je suis bien conscient du problème de fond qu'est la vie chère. Je comprends que vous réclamiez une certaine égalité avec la Corse. Fret, concurrence, réalité des prix qui fait débat - des articles de presse en parlent -, je veux pour tous ces sujets un vrai débat.

Je ne peux donc pas donner un avis favorable. À titre personnel, je crois qu'il existe d'autres pistes que l'aide directe au fret, qui me gêne. Mais nous devons en débattre.

Mme Catherine Conconne.  - L'État signe donc un accord pour faire cesser les émeutes, pour faire revenir la raison dans un pays enflammé. Cet accord comprend une aide à la continuité territoriale et l'État dit aujourd'hui que non, il n'y aura pas d'aide. Il faudra assumer cette décision.

Ici, le 4 décembre, on a trouvé 50 millions d'euros pour la Corse. Nous demandons un geste de 15 millions... Que voulez-vous que je vous dise ? La signature de l'État sera considérée comme caduque !

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Vous ne pouvez pas dire cela.

M. Marc Laménie.  - Je comprends ces amendements de nos collègues qui vivent cette situation au quotidien. L'éloignement géographique, le pouvoir d'achat... Même depuis la métropole, nous connaissons ces problèmes ultramarins.

Nous pouvons néanmoins faire confiance à M. le ministre sur ces sujets : il faut les retravailler. Je me rallierai à l'avis de la commission.

M. Victorin Lurel.  - Le Gouvernement a signé le protocole le 16 octobre dernier pour réduire les frais d'approche pour 69 familles de produits en Martinique. L'État s'est engagé !

D'après l'avis de 2019 de l'Autorité de la concurrence, le fret et l'assurance représentent 15 % du prix des marchandises. Lorsque le rapporteur spécial doute que les aides au fret ne soient utiles, je l'invite à relire ses dossiers.

Parlons de tout ! Non seulement des produits de première nécessité, mais aussi des télécommunications, de l'énergie. Pourquoi n'a-t-on jamais établi un service public universel de télécommunications outre-mer, alors que cela existe dans l'Hexagone ? Même chose sur les pièces détachées automobiles, pour lesquelles il faudrait respecter la propriété intellectuelle pendant quinze ans, sous prétexte de protéger nos industriels contre la concurrence chinoise. Cela n'existe nulle part ailleurs !

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Oui à la continuité de l'État, mais je ne peux laisser dire que l'État ne respecte pas le protocole.

Il existe une exonération de TVA sur les 69 familles de produits en Martinique, complétant la baisse de l'octroi de mer pour 54 familles.

M. Victorin Lurel.  - C'est conventionnel, et non législatif !

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je rappelle aussi les travaux sur la réduction des frais d'approche pour les produits de première nécessité.

Ensuite, je souhaite ouvrir un débat sur la concurrence, sur le fonctionnement et les moyens de l'Autorité de la concurrence. La DGCCRF doit renforcer ses contrôles.

Enfin, nous débattons de la continuité territoriale et du fret, pour lequel les crédits sont au niveau de la consommation de 2024.

Je ne peux donner un avis favorable, mais je m'engage à ouvrir le débat, avec les acteurs économiques et avec les élus, lors du Ciom.

L'amendement n°II-827 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements n°II-1195, n°II-1350 et n°II-831.

M. le président.  - Amendement n° II-828 rectifié bis de M. Buval et alii.

M. Dominique Théophile.  - Il s'agit de créer une aide exceptionnelle de 11 millions d'euros en faveur du fret dans le cadre de la continuité territoriale en Martinique, afin de respecter l'engagement pris par l'État en octobre dernier. Les frais d'approche d'une liste de produits de première nécessité seraient compensés. C'est un sujet fondamental pour faire baisser les prix de 6 000 produits.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-828 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1353 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1234 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Depuis dix ans, les crédits de la LBU ne font que diminuer, comme si la situation des outre-mer importait peu. Pourtant, les outre-mer sont confrontés à des difficultés économiques et sociales particulières : la vie chère, le logement insalubre, le changement climatique, la pauvreté.

La LBU finance le logement social et très social, la lutte contre l'habitat indigne, l'accession sociale à la propriété. Cet amendement adopté par l'Assemblée nationale augmente la LBU de 30 millions d'euros. Rétablir le montant de 2024 traduirait une intention de faire mieux pour les outre-mer. Nous invitons le Gouvernement à lever le gage.

M. le président.  - Amendement n°II-1200 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Entre 2010 et 2014 -  monsieur le ministre, nous étions entre 2012 et 2014 dans le même gouvernement  - la LBU s'élevait à 270 millions d'euros, contre 210 millions aujourd'hui. Nous voulons éviter une baisse de 32 millions d'euros. Ne sacrifions pas la politique du logement.

M. le président.  - Amendement n°II-1227 rectifié de Mme Malet et alii.

Mme Viviane Malet.  - La LBU est cruciale pour les habitants et pour le BTP. Nous proposons un abondement de 10 millions d'euros.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Il est nécessaire de consommer les crédits ouverts de cette ligne avant d'en voter de nouveaux. Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Le logement est une priorité. Je ne peux pas laisser dire que rien n'est fait. Entre 2020 et 2024, la LBU était en constante augmentation ; en 2025, elle est stabilisée à 260 millions d'euros en AE et 184 millions en CP, soit 7 % de plus qu'en 2023. Elle a été calibrée en fonction des besoins, mais aussi de la capacité des territoires à la consommer.

Je sais que La Réunion a des difficultés de logement et de construction. Je connais bien votre département, madame la sénatrice. J'en parlais, il y a quinze jours, avec la maire de Saint-Denis.

Après la décision du Ciom de juillet 2023, un décret doit être pris afin de créer un crédit d'impôt pour la réhabilitation du logement social en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).

Le calibrage est le bon et l'État est au rendez-vous. Avis défavorable.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Comme beaucoup d'élus réunionnais, je suis préoccupée par la crise du logement : 45 000 familles sont en attente d'un logement. En découlent d'autres problèmes, tels que les violences intrafamiliales ou l'échec scolaire.

Nous dire que les crédits ne sont pas consommés, c'est nous renvoyer dans nos filets. C'est oublier que les normes européennes s'appliquent dans nos départements tropicaux, où elles ne sont pas adaptées.

Autre problème : la question foncière. La Réunion est contrainte par la loi Littoral, même à 2 000 mètres d'altitude. Monsieur le ministre, si vous connaissez La Réunion, vous connaissez aussi les contraintes des élus locaux. Nous avons besoin de la LBU. Vous ne pouvez pas dire que nous ne faisons pas notre travail.

M. Victorin Lurel.  - Le rapporteur dit que les crédits ne sont pas consommés. Mais lorsque vous inscrivez des AE en LBU, vous mettez sept ans pour les consommer. Tout est fait pour bloquer les dossiers. Il faut affronter le filtre du bureau des agréments, qui est contrôlé par Bercy, et non par le ministre des outre-mer. La répartition se fait dans le secret des offices ! L'enveloppe globale a baissé, mais celle de la Guyane et de Mayotte a augmenté.

Nous avons encore à apprendre. La clef, c'est vous, monsieur le ministre. Levez le gage pour 10 millions de plus pour la LBU !

Mme Lana Tetuanui.  - Il est 23 h 28, nous sommes en 2025 ... Et j'entends parler de sujets datant de la nuit des temps ! J'entends parler sur les travées de gauche de sujets très anciens.

Je respecte tous mes collègues, mais sommes-nous conscients que nous traversons une crise financière ? Nous demandons à chacun de faire des économies, donc nous devons identifier des priorités. (M. Laurent Burgoa renchérit.) Avec M. Rohfritsch, nous avions beaucoup de demandes, mais nous avons fait des choix. Nous avons décidé de participer à l'effort collectif. Mayotte et la Nouvelle-Calédonie sont prioritaires ! Il y a tant d'urgences... à un moment, il faut arrêter.

Il faut saluer la main tendue du Gouvernement. C'est un effort considérable. Revenons à la raison, chers collègues. La Polynésie, alors qu'elle souffre aussi de la vie chère, a décidé de retaxer les produits sucrés... alors on ne va pas venir pleurer ici ! (Mme Micheline Jacques renchérit ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Laurent Somon.  - Bravo !

Mme Catherine Conconne.  - Hallucinant !

L'amendement n°II-1353 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosII-1234, II-1200 et II-1227 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°II-1206 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Défendu. (On ironise à droite.)

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait. Le montant proposé de 46 millions d'euros nous paraît disproportionné. D'autres actions ont été prévues, notamment pour Mayotte.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Le Gouvernement a déjà déposé trois amendements augmentant les crédits. Le calibrage va déjà dans le bon sens. Retrait.

L'amendement n°II-1206 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1364 de Mme Bélim.

Mme Audrey Bélim.  - Cet amendement dénonce la participation disproportionnée des collectivités territoriales d'outre-mer au redressement des finances publiques.

Certaines communes de l'Hexagone sont exclues du fonds de réserve, parce qu'elles bénéficient de la DSU, ce qui n'est pas le cas des communes d'outre-mer. Mamoudzou devra ainsi verser 1,3 million d'euros et Cayenne 2 millions d'euros. M. Buffet s'était engagé à un effort, mais Mme Vautrin n'a pas suivi.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait. Les amendements nosII-1222 et II-1224 du Gouvernement illustrent les efforts importants malgré le contexte budgétaire actuel.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Comme cela a été précisé lors de l'examen de la mission « Relation avec les collectivités territoriales », le Gouvernement s'est engagé à introduire une possibilité d'exonération pour les communes d'outre-mer.

Il propose d'exonérer les 300 premiers EPCI en fonction de l'indice de ressources de la DGF. Il n'y a pas de raison que des EPCI d'outre-mer qui ne font pas partie des 300 les plus fragiles soient exonérés au seul motif qu'ils sont situés outre-mer. Il faut respecter le principe d'égalité et la réalité de ces communes. Retrait.

Mme Audrey Bélim.  - Les communes des outre-mer sont les plus fragiles de France. Parmi les villes de la Communauté intercommunale du Nord de La Réunion (Cinor) se trouve Saint-Denis : c'est la ville la plus riche parmi les plus pauvres de France.

J'en appelle à la solidarité.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Je témoigne ma solidarité à Mme Bélim. Notre groupe votera cet amendement. Depuis le début de la discussion, on pointe sans cesse les difficultés structurelles des outre-mer et là, on entend que leurs communes ou EPCI pourraient payer comme tout le monde. Mais ces collectivités accompagnent les familles, souvent en grande difficulté ; à La Réunion, 30 % de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Le Territoire de l'Ouest comprend le cirque de Mafate, très touristique. Mais les habitants ne peuvent en sortir qu'à pied, ou par hélicoptère. Autant dire que c'est surtout à pied.

L'amendement n°II-1364 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1330 rectifié quinquies de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - Cet amendement est vital. En 2018, une étude de Santé publique France a révélé que 92 % des habitants de Martinique et 95 % des habitants de Guadeloupe étaient exposés à la contamination au chlordécone. Les concentrations atteignent parfois cinquante fois la norme européenne pour l'eau potable.

En Martinique, 5 000 hectares, soit entre un cinquième et un tiers des surfaces agricoles utiles (SAU), sont contaminés. Le cancer de la prostate, très fréquent aux Antilles, est reconnu comme maladie professionnelle en cas d'exposition au chlordécone.

Il est impératif d'allouer des moyens supplémentaires au plan chlordécone. Le bilan est très loin de la réalité ; c'est pourquoi nous exigeons une hausse du montant de l'enveloppe.

M. le président.  - Amendement n°II-1274 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Le plan chlordécone a été lancé en février 2021 pour la période 2021-2027 pour un montant de 92,3 millions d'euros. Au 31 décembre 2023, les montants consommés s'élèvent à 35,7 millions en AE.

Le plan de relance et le programme « Interventions territoriales de l'État » (Pite) abondent les crédits d'environ 40 millions d'euros, pour atteindre 130 millions d'euros au total.

Le record de consommation en AE est de 20 millions d'euros en 2023 : les crédits supplémentaires demandés ne pourraient probablement pas être absorbés.

Demande de retrait des amendements nosII-1330 rectifié quinquies et II-1274 rectifié.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

Les amendements nosII-1330 rectifié quinquies et II-1274 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Le temps fixé pour l'examen de cette mission est de six heures, ce qui conduira la présidence à lever la séance à 1 h 35. Gardons notre bon rythme, sans quoi nous devrons reporter la fin de l'examen de la mission à dimanche.

M. le président.  - Amendement n°II-834 de Mme Conconne.

Mme Catherine Conconne.  - J'aimerais que M. le ministre s'empare du sujet. L'un de nos collègues députés souhaitait créer un institut régional d'administration (IRA), car nous avons besoin dans nos territoires d'experts et de techniciens. J'accepterai de retirer cet amendement, ainsi que l'amendement n°II-835, pour que cette question soit examinée dans le cadre du Ciom. Ces deux amendements avaient reçu un avis favorable en commission.

Cela dit, un point essentiel. Le Sénat est un lieu profondément démocratique, chacun peut s'y exprimer librement. Je suis très présente en séance. Certains débats ne sont pas prioritaires pour moi, lorsqu'ils concernent la Lozère, la Dordogne ou la Bretagne. Mais jamais je me permettrais d'en juger la pertinence.

J'aimerais que le même régime nous soit appliqué. Je n'ai de leçons à recevoir de quiconque quant aux sujets que je défends dans l'hémicycle : personne n'a à m'imposer mes priorités.

M. le président.  - Amendement n°II-835 de Mme Conconne.

Mme Catherine Conconne.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable, mais comme Mme Conconne s'est adressée au ministre, je le laisse répondre. (Sourires)

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Votre proposition est légitime, madame Conconne. À ce stade, les établissements satisfont la totalité des besoins de recrutement de l'administration de l'État. Plusieurs IRA sont situés en région, y compris à Bastia. La volonté de créer un IRA dans chaque bassin océanique, ou au moins en outre-mer, correspond à l'attachement de ces territoires à la colonne vertébrale de l'État. Je m'engage à ce qu'on examine cette question (Mme Catherine Conconne apprécie.) ; nous verrons à quelles conditions nous pouvons y arriver. Mon état d'esprit, c'est de ne pas infantiliser les outre-mer.

Retrait.

L'amendement nosII-834 et II-835 sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°II-1296 rectifié bis de M. Naturel et alii.

M. Georges Naturel.  - Cet amendement assure le déploiement du dispositif exceptionnel de prêts garantis en outre-mer déployés par la Sogefom au bénéfice des TPE et des PME. L'AFD en est le principal actionnaire.

Il faut donner à la Sogefom les moyens d'atteindre ses objectifs : 21 millions d'euros sont nécessaires pour 2025. Je demande au Gouvernement de lever le gage.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - L'AFD est le principal actionnaire de la Sogefom. D'autres dispositions ont été prévues pour soutenir les prêts accordés par l'AFD à la Nouvelle-Calédonie.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis favorable. En 2024, 40 millions d'euros ont été versés à la Sogefom pour que les banques octroient plusieurs centaines de prêts aux entreprises touchées par la crise. Le soutien se poursuivra en 2025. Je lève le gage.

Mme Corinne Narassiguin.  - Merci au Gouvernement de lever le gage. La reconstruction du tissu de la Nouvelle-Calédonie doit passer par un soutien complet aux TPE-PME. Nous devons soutenir ces efforts de manière transpartisane.

L'amendement n°II-1296 rectifié ter est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1297 rectifié bis de M. Naturel et alii.

M. Georges Naturel.  - Merci à mes collègues pour le vote précédent.

Cet amendement d'appel vise à créer un fonds d'urgence pour construire une route alternative pour garantir un accès sûr aux habitants du Mont-Dore et de Yaté.

Depuis plus de quarante ans, l'unique route qui relie une partie de la commune du Mont-Dore au sud de l'île est régulièrement le théâtre de violences. Depuis les émeutes du 13 mai, l'insécurité atteint un niveau critique, avec 60 carjackings violents et armés. Les autorités ont fermé la route. Résultat : 15 000 habitants ne peuvent plus circuler.

Aujourd'hui encore, la route est fermée de 18 heures à 5 heures du matin. En France hexagonale, une route alternative aurait été construite depuis longtemps.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - La reconstruction de la route doit être financée via le prêt de l'AFD à la Nouvelle-Calédonie. Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

M. Naturel a rappelé la situation de cette route. Les modalités de sécurisation doivent être discutées dans le cadre de la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie, et ensuite, l'État devra accompagner les acteurs locaux. Il faut prendre le temps de la concertation. Cela dit, la situation est anormale : je m'engage à ce que le sujet avance.

M. Georges Naturel.  - On en reparlera prochainement en Nouvelle-Calédonie.

L'amendement n°II-1297 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1352 de Mme Ramia et du RDPI.

Mme Salama Ramia.  - Cet amendement renforce le soutien aux organismes de logement social en outre-mer, en particulier le Fonds régional d'aménagement foncier et urbain (Frafu). Créé en 2000 par la loi d'orientation pour l'outre-mer, ce dernier joue un rôle central. Il contribue à la mixité sociale et répond aux besoins des populations locales tout en favorisant un développement harmonieux des territoires outre-mer. Cependant, la réorientation des crédits européens a affecté son financement. Les collectivités territoriales ont dû, en conséquence, combler le déficit.

C'est pourquoi cet amendement abonde les crédits du Frafu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Je sollicite l'avis du Gouvernement. Pourquoi un tel arrêt des financements européens ? Quelles sont les actions envisagées ?

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je m'en tiens à ce que j'ai déjà dit : cet amendement renforce les moyens de la LBU. L'aménagement du foncier est un élément essentiel pour la production de logements. Il fait partie des priorités. La LBU est en constante augmentation : avis défavorable.

Je regarderai de près les problèmes liés aux fonds européens.

L'amendement n°II-1352 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1193 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Il s'agit de rétablir les crédits de Ladom, du SMA et de l'Institut de formation aux carrières administratives, sanitaires et sociales (Ifcass).

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Les moyens du SMA ont été sanctuarisés dans ce PLF. En outre, le SMA peut mobiliser des financements européens. Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Les baisses proposées dans le PLF ont été examinées avec les opérateurs du ministère.

Le SMA a des effets très positifs sur notre jeunesse ; je l'ai constaté le 31 décembre dernier à Mayotte : il jouera un rôle important dans la reconstruction.

Votre amendement est satisfait : retrait, sinon avis défavorable.

M. Victorin Lurel.  - Les crédits de Ladom ont été rétablis, mais ceux du SMA ne sont pas sanctuarisés. C'est un sujet important. Toutefois, je retire l'amendement.

L'amendement n°II-1193 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1201 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Les budgets de l'action n°4 baissent de 10 millions d'euros ! L'État n'accompagnera plus les malades atteints d'un cancer. C'est curieux, surtout quand on connaît les chiffres relatifs à la prévalence du cancer de la prostate dans nos territoires - M. Théophile les a rappelés.

Je retirerais volontiers cet amendement, si monsieur le ministre m'indiquait que cela correspond au domaine d'autres ministères... Tout ça, c'est quand même le Gouvernement, mais allez, je le retire pour être agréable au ministre ! (Sourires)

L'amendement n°II-1201 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-832 de Mme Conconne.

Mme Catherine Conconne.  - L'an dernier, nous avions adopté l'aide au retour dans l'article 55 du précédent projet de loi de finances. Nous avons nous-mêmes torpillé le dispositif, pour des raisons que je n'ai toujours pas comprises...

C'est pourtant une priorité en Martinique et en Guadeloupe - désolée d'insister. Entre 1960 et 1981, une aide au départ avait été établie par les lois Debré, qui avait provoqué le départ de milliers d'Ultramarins vers la France. Il a fallu attendre l'arrivée de François Mitterrand pour que cela prenne fin.

Il faut renvoyer l'ascenseur et instaurer une aide au retour. Nous ne pouvons rien développer quand un pays perd entre 4 000 et 5 000 habitants par an.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - J'aimerais donner satisfaction à Mme Conconne, mais il existe déjà un fonds d'aide à la continuité territoriale. Démultiplier les dispositifs n'est pas souhaitable, au risque d'un saupoudrage. (Mme Catherine Conconne ironise.) Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - La baisse démographique est un sujet majeur pour la Martinique et la Guadeloupe. Le dispositif d'aide au retour ne suffirait pas à faire face à cette baisse.

Les textes d'application du dispositif voté l'an dernier sont en cours de publication. Une évaluation devra être menée, avant une réflexion globale dans le cadre du Ciom. Vie chère, formation, violence : autant de raisons qui expliquent aussi la baisse de la démographie.

Mme Catherine Conconne.  - Certains décrets sont éternellement en cours d'écriture ... Le dispositif a été torpillé, car seuls les bénéficiaires de Ladom pourraient bénéficier de l'aide au retour. Quid des générations antérieures - celles du temps du Bureau pour le développement des migrations dans les départements d'outre-mer (Bumidom), par exemple ?

Je travaille sur cette question depuis cinq ans. À contrecoeur, je retire mon amendement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je prends l'engagement de vous associer pleinement à la réflexion sur ce sujet.

L'amendement n°II-832 est retiré.

M. le président.  - Amendement n° II-1208 de Mme Conconne et du groupe SER.

Mme Catherine Conconne.  - Nous sommes la partie du monde qui sera la plus frappée par les effets du dérèglement climatique, alors que nous sommes très peu émetteurs de gaz à effet de serre.

Nous vivons toute une série de malheurs au quotidien, nous cumulons tous les risques, sauf les avalanches et la neige... (Sourires) Il faut abonder le Fonds de secours outre-mer (FSOM) afin de doper la mise aux normes de nos dispositifs de lutte contre les aléas naturels. Là encore, il s'agit d'un sujet prioritaire.

M. le président.  - Amendement n°II-1278 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - D'autres actions sont plus adaptées pour préparer les territoires ultramarins à ces risques : le plan séisme Antilles ou la LBU. Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1208 n'est pas adopté non plus que l'amendement n°II-1278 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°II-1363 de Mme Bélim.

Mme Audrey Bélim.  - Le 16 juin 2023, l'Assemblée nationale a adopté une proposition de loi sur les services express régionaux métropolitains (Serm). Les territoires ultramarins ont été les oubliés du texte, alors que les besoins sont criants. À La Réunion, la dépendance à la voiture individuelle est insupportable ; le tout-routier ne peut être le seul horizon.

La Réunion a déjà prouvé la viabilité d'un réseau ferroviaire de 1892 à 1976 ; relançons-le !

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait : un tel dispositif relève de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », non de la mission « outre-mer ».

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1363 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1196 de Mme Bélim et du groupe SER.

Mme Audrey Bélim.  - Il s'agit de sécuriser les engagements de l'État envers les filières agricoles ultramarines via l'abondement du régime spécifique d'approvisionnement (RSA). Son plafond, fixé à 27 millions d'euros, n'a pas été réévalué depuis 2013. L'importation des matières premières fait l'objet de nombreux surcoûts, qui seront répercutés sur les prix ; or nos compatriotes ultramarins subissent de plein fouet la vie chère. D'où notre proposition d'abonder le RSA de 8 millions euros ; cette mesure est très attendue par toutes les filières.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1323 rectifié de Mme Malet et alii.

Mme Viviane Malet.  - Le plafond du RSA n'a pas été relevé depuis dix ans. Depuis cinq ans, il est saturé. Résultat : 8 millions d'euros de coûts de fret sont indûment supportés par les éleveurs des départements d'outre-mer, dont 5 millions par ceux de La Réunion. Abondons de 8 millions d'euros l'enveloppe de ce régime.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable, car il faudrait modifier le règlement européen.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je suis un peu ennuyé. Sur le fond, je suis d'accord avec Mme Malet, et nous avons obtenu de la Commission européenne l'autorisation d'abonder cette aide de 8 millions d'euros. Mais je suis bon camarade : cela relève de la mission « Agriculture » et il faut en discuter avec Mme Genevard. Sagesse.

Mme Audrey Bélim.  - Voilà bien longtemps que l'engagement a été pris - par le Président de la République et Mme Borne, alpagués au Salon de l'agriculture...

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je sais !

Mme Audrey Bélim.  - On nous renvoie souvent au Poséi, mais ce n'est pas nous, parlementaires, qui le négocions. Je retire l'amendement, mais j'insiste sur la nécessité de sacraliser cet engagement, car nos filières font un travail merveilleux. Les engagements pris doivent être respectés.

Mme Viviane Malet.  - Je retire également mon amendement, au vu des engagements du ministre.

Les amendements identiques nosII-1196 et II-1323 rectifié sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°II-1235 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - À La Réunion, 36 % des familles vivent sous le seuil de pauvreté et la moitié des enfants grandissent dans un foyer pauvre. Cet amendement vise à renforcer le soutien aux étudiants ultramarins à travers un complément de bourse qui prenne en compte la vie chère. Logement, alimentation, frais de transport, dépenses scolaires sont des sujets de préoccupation pour les familles. Les montants des bourses ne sont pas suffisants et l'égalité des chances n'est pas au rendez-vous. Les jeunes sont notre avenir, soutenons-les !

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait, car d'autres dispositifs existent.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1235 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1166 rectifié quater de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - Nous voulons sécuriser une enveloppe annuelle de 7 millions d'euros pour garantir le bon fonctionnement et le développement des Maisons des femmes. En Guadeloupe, douze femmes sont victimes de violences conjugales pour 1 000 habitants, l'un des taux les plus élevés en France. Le rapport de Justine Bénin souligne que la précarité, la dépendance économique et l'isolement social sont des facteurs aggravants des violences conjugales en outre-mer et appellent à une action renforcée contre ce fléau. Le projet de création d'une Maison des femmes en Guadeloupe, prévu pour le 8 mars prochain, témoigne de l'engagement des acteurs locaux.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

M. Dominique Théophile.  - Les explications reçues ne pèsent pas lourd... Le sujet est pourtant d'importance ! Je maintiens l'amendement.

L'amendement n°II-1166 rectifié quater n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1210 de Mme Bélim et du groupe SER.

Mme Audrey Bélim.  - Depuis sa création, en 2008, l'Autorité de la concurrence a rendu vingt-neuf décisions pour pratiques anticoncurrentielles, pour un montant total d'amendes de 162 millions d'euros. Ces chiffres témoignent de l'ampleur des dérives constatées.

Hélas, cantonnée à Paris, l'Autorité de la concurrence ne dispose pas des moyens nécessaires pour contrôler efficacement nos marchés. C'est pourquoi nous proposons la création de 80 ETP spécifiquement affectés aux contrôles outre-mer. Cette équipe d'experts pourra lutter efficacement contre les pratiques anticoncurrentielles dans nos territoires, encore dénoncées dans un récent article de Libération.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Tous les sujets sont importants, monsieur Théophile, mais nous essayons aussi de tenir compte des consignes du président de séance.

Je ne crois pas qu'on puisse se satisfaire de la situation actuelle. Cela dit, avant de créer des ETP, nous devons réfléchir dans le cadre du Ciom au meilleur moyen d'agir contre la concurrence déloyale. Ce n'est qu'ensuite que nous pourrons évaluer les moyens à allouer aux territoires ultramarins. Il ne faut pas les infantiliser, mais leur donner les moyens d'agir concrètement.

Mme Audrey Bélim.  - Ce que j'entends m'incite plutôt à maintenir l'amendement...

M. Victorin Lurel.  - Je comprends qu'il faille avancer dans le débat, mais cette question est centrale. L'Autorité de la concurrence n'a aucune autorité sur les observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR). J'avais proposé d'en ramener le nombre de neuf à deux, mais on m'a dit de laisser tomber... Certes, la question est traitée, mais très irrégulièrement. Le dernier rapport date de 2019 !

Les éléments sont sur la table et nous pouvons vous proposer d'ici à avril un texte complet et efficace. Il faut agir, monsieur le ministre ! Ne repoussez pas cette question aux calendes grecques - ou plutôt ultramarines...

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je suis d'accord avec vous, monsieur Lurel, et n'entends pas reporter le dossier aux calendes ultramarines... Mais j'ai bon espoir d'être encore en fonction dans quelques semaines et je ferai trancher cette question par le Ciom. Nous irons vite.

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°II-1210, mis aux voix par assis et levé, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1211 de Mme Bélim et du groupe SER.

Mme Audrey Bélim.  - Cet amendement renforce de manière importante les moyens de la DGCCRF dans les territoires ultramarins. Quatre lanceurs d'alerte ont saisi la justice sur les marges exorbitantes du groupe Bernard Hayot. Nos territoires sont marqués par les monopoles et les oligopoles, en particulier dans la grande distribution. Envoyons un signal fort aux acteurs qui abusent de leur position dominante.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1211 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1331 rectifié quater de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - Nous abondons de 6 millions d'euros la ligne consacrée au ramassage des sargasses. Cela coûte très cher aux petites communes, par exemple à Marie-Galante.

M. le président.  - Amendement n°II-1332 rectifié quinquies de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - Amendement de repli, portant sur 3 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-1179 rectifié quinquies de M. Théophile et alii.

M. Dominique Théophile.  - Cet amendement est issu du rapport que j'ai eu l'honneur de rédiger à la suite d'une commande d'Édouard Philippe, fondé sur un travail de comparaison internationale. Il s'agit de créer un observatoire régional des sargasses pour anticiper les échouements et optimiser l'usage des ressources publiques.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable, car il existe un plan sargasses.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis. Le sujet est d'importance, mais relève de la mission « Écologie ». Trouvons le bon moyen de concrétiser la mission que vous avez menée.

L'amendement n°II-1331 rectifié quater n'est pas adopté, non plus que les amendements nosII-1332 rectifié quinquies et II-1179 rectifié quinquies.

M. le président.  - Amendement n°II-1279 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1279 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1242 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Nous créons un nouveau programme, doté de 6 millions d'euros, pour développer l'autonomie alimentaire des outre-mer. Le coût de la vie est structurellement plus élevé en outre-mer que dans l'Hexagone, de 40 % en moyenne. C'est pour les produits alimentaires que les écarts sont les plus élevés.

Les circuits courts sont la solution. Ils sont en outre plus vertueux en matière d'émissions de gaz à effet de serre. Tous les territoires d'outre-mer n'en sont pas au même point dans les efforts de souveraineté alimentaire. Un effort de l'État est nécessaire pour développer des productions locales diversifiées.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à cet amendement peu opérationnel et qui risque d'entraîner un saupoudrage des crédits.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Appeler de nos voeux la diversification alimentaire et dire aux planteurs victimes d'une campagne catastrophique de s'orienter vers d'autres cultures sans les accompagner, c'est les envoyer à la faillite. C'est très peu responsable, alors que l'Union européenne soutient la canne !

L'amendement n°II-1242 n'est pas adopté.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances.  - Nous arrivons au moment où il vous faut décider si nous terminons ou non l'examen de la mission ce soir. Je vous signale simplement que, au rythme actuel, une douzaine d'amendements resteraient à examiner dans la nuit de samedi à dimanche, à une heure impossible à prévoir et sans que la présence du ministre compétent soit garantie : ils seraient donc traités dans de mauvaises conditions.

M. le président.  - Amendement n°II-829 de Mme Conconne.

Mme Catherine Conconne.  - À la suite du rapport sur la continuité territoriale, nous souhaitons nous pencher sur les transports internes. En Guyane, il faut prendre l'avion pour se rendre dans les terres. En Guadeloupe, on subit les aléas du transport maritime pour aller à l'école ou se soigner. L'État doit aider les collectivités territoriales.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-829 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-868 rectifié bis de Mme Phinera-Horth et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1236 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

Les amendements identiques nosII-868 rectifié bis et II-1236 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-1214 de Mme Conconne et du groupe SER.

Mme Catherine Conconne.  - Les problèmes de santé mentale se posent avec acuité en outre-mer : la prévalence des troubles est forte en raison de nombreux facteurs, dont l'usage de stupéfiants. L'accès aux soins psychiatriques est particulièrement difficile. On ne peut pas aller dans le département d'à côté : en général, on tombe dans la mer... Il faut des moyens renforcés pour la santé mentale en outre-mer.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable. C'est un vrai sujet, mais je ne crois pas que la bonne solution soit la création d'un fonds spécifique.

L'amendement n°II-1214 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1237 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Cet amendement prévoit un soutien financier accru pour les associations de soutien aux personnes défavorisées en outre-mer. La grande pauvreté frappe en outre-mer cinq à quinze fois plus que dans l'Hexagone. La diminution des crédits n'aura qu'une seule conséquence : accroître les tensions. Ces associations sont le dernier rempart de l'égalité des chances.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Il y a déjà des lignes de soutien aux associations. Avis défavorable.

L'amendement n°II-1237 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-1237 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1202 de Mme Conconne et du groupe SER.

Mme Catherine Conconne.  - Retiré : nous avons déjà eu un débat sur les OPMR, qui doivent être dotés de moyens financiers et humains.

L'amendement n°II-1202 est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1367 rectifié bis de M. Buval et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu

M. le président.  - Amendement n°II-1383 de M. Mellouli et alii.

M. Akli Mellouli.  - Défendu. Nous avions déposé cet amendement avec M. Lurel dans le cadre du PLF 2024. Il avait été adopté, mais avait disparu dans le 49.3. Reprenez-le, monsieur le ministre, en attendant de prendre des mesures !

M. le président.  - Amendement n°II-1286 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu

M. le président.  - Amendement n°II-1244 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Si nous ne revalorisons pas le budget des OPMR, nous laissons les monopoles continuer de vampiriser le budget de nos concitoyens d'outre-mer.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement sur tous ces amendements.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Les crédits ne sont pas tous consommés et il faut plutôt accompagner les observatoires. Avis défavorable.

L'amendement n°II-1367 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements nosII-1383, II-1286 rectifié et II-1244

M. le président.  - Amendement n° II-1243 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Cet amendement porte sur l'allocation aux adultes handicapés (AAH), qui n'est pas un minimum social mais une ressource compensant l'incapacité d'obtenir une rémunération par le travail. De 1 016 euros, elle est inférieure au seuil de pauvreté en outre-mer, de 1 216 euros. Il faut adapter son montant dans ces territoires pour ne pas institutionnaliser la précarité.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait : cela ne relève pas de la mission « Outre-mer » et une telle rupture d'égalité serait anticonstitutionnelle.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1243 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-1329 rectifié quinquies est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1344 rectifié de Mme Petrus et alii.

Mme Annick Petrus.  - Il convient de créer une antenne du RSMA à Saint-Martin, où pas moins de 2 500 jeunes ne sont ni en emploi ni en formation. L'intégration de nos jeunes dans le RSMA de Guadeloupe a montré ses limites. Une structure spécifique à Saint-Martin formerait chaque année 85 jeunes dans les secteurs qui recrutent sur place : bâtiment, nautisme, économie bleue et leur inculquerait, en outre, des valeurs favorables à la cohésion sociale. Investir dans un RSMA à Saint-Martin, c'est investir dans l'avenir de notre jeunesse et la stabilité de l'île.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable : un processus est déjà en cours.

L'amendement n°II-1344 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1305 rectifié bis de M. Rohfritsch et alii.

M. Teva Rohfritsch.  - À mon tour de plaider pour le RSMA, qui a un rôle particulier en Polynésie française, où 19,1 % des 15-29 ans étaient au chômage en 2023. L'ouverture d'une nouvelle antenne sur Hao a été annoncée par le Président de la République. Il faut abonder les crédits en conséquence.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.   - Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Les crédits nécessaires sont déjà prévus. Avis défavorable.

L'amendement n° II-1305 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°II-1345 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1408 rectifié de M. Patient et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis favorable. Je lève le gage.

L'amendement n°II-1408 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1281 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis favorable. Je lève le gage.

L'amendement n°II-1281 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n° II-1283 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-1283 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1306 rectifié de Mme Jacques et alii.

Mme Micheline Jacques.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-1355 de Mme Ramia et du RDPI.

M. Teva Rohfritsch.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Sagesse. Je lève le gage.

Les amendements identiques nosII-1306 rectifié bis et II-1355 bis sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-1366 rectifié bis de M. Buval et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Le narcotrafic est un vrai sujet, mais il est traité autrement. Avis défavorable.

L'amendement n°II-1366 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement n°II-1369 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°II-1430.

M. le président.  - Amendement n°II-1207 de M. Lurel et du groupe SER.

M. Victorin Lurel.  - Il s'agit de rétablir les crédits du plan séisme Antilles.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-1207 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-833 de Mme Conconne.

Mme Catherine Conconne.  - Je tente ma chance, puisque parfois l'argument budgétaire ne prévaut pas. Certains amendements très coûteux passent... Comme l'on dit chez nous, flouze ! (Sourires)

Les violences faites aux femmes sont plus nombreuses de 30 % dans les outre-mer. Les associations qui viennent en aide aux victimes ont besoin d'argent pour payer les hébergements d'urgence. Le rapport de l'association En avant toute(s) a lancé l'alerte. Nous demandons 1 million d'euros. Je sais à quelles portes frapper, depuis plus de vingt ans que je suis élue. Si nous déposons un amendement, c'est que nous n'avons rien obtenu par les autres canaux.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - C'est une source de préoccupation majeure et j'entends en faire un axe prioritaire du Ciom. Mais la création du fonds relève du programme 304 des ministères sociaux.

Mme Catherine Conconne.  - Je maintiens mon amendement, symboliquement, pour les femmes !

L'amendement n°II-833 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1238 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Le nombre de victimes de violences intrafamiliales ne fait qu'augmenter depuis 2016. Depuis novembre dernier, d'après le ministère de l'intérieur, La Réunion est le deuxième département le plus touché par les violences conjugales. Il est impossible de ne pas avoir en tête Gisèle Pelicot et son combat contre la domination patriarcale et ses horreurs.

Renforçons les moyens des centres communaux et intercommunaux d'action sociale. Leurs professionnels doivent être mieux formés au repérage des violences.

Environ 11 % des féminicides ont lieu outre-mer, pour une population qui représente 4 % de la population française. Et je rappelle que, en France, un enfant meurt chaque semaine sous les coups d'un de ses parents !

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait, car une telle formation relève de la compétence des collectivités territoriales.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

M. Marc Laménie.  - C'est un sujet très important et je salue les travaux de la délégation aux outre-mer et de la délégation aux droits des femmes. Mais, objectivement, la question relève de la mission « Solidarités ».

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - L'amendement n'est peut-être pas déposé au bon endroit, mais nous débattons ce soir de l'outre-mer. Nous devons aborder tous les sujets, sans quoi vous ne comprendrez pas la réalité que vivent les familles dans nos territoires. Dire que cet amendement ne devrait pas être défendu ce soir est très regrettable.

Mme Catherine Conconne.  - Très bien !

L'amendement n°II-1238 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1212 de Mme Bélim et du groupe SER.

Mme Audrey Bélim.  - La biodiversité française est en mauvaise santé. Or les territoires ultramarins en concentrent 80 % ! Nous sommes pourtant loin de concentrer 80 % des crédits affectés à sa protection... Cet amendement crée un fonds de préservation de la biodiversité en outre-mer.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-1212 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1284 rectifié de Mme Nadille et du RDPI.

M. Dominique Théophile.  - Cet amendement renforce les moyens de l'aide au transport des corps des défunts en outre-mer. Les distances considérables entre la France hexagonale et les outre-mer occasionnent une charge lourde pour les familles endeuillées. Aidons-les à faire reposer leurs proches dans leur terre d'origine.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1284 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1285 rectifié de Mme Nadille et alii.

M. Dominique Théophile.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1285 rectifié est retiré.

L'amendement n°II-1370 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-1175 de Mme Guidez et M. Marseille.

Mme Jocelyne Guidez.  - Cet amendement rétablit les crédits du fonds mahorais de développement social et culturel au niveau de 2024.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Retrait, car l'amendement est en partie satisfait.

L'amendement n°II-1175 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1295 rectifié bis de M. Naturel et alii.

M. Georges Naturel.  - Défendu.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-1295 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-1240 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Cet amendement vise à accompagner les jeunes étudiants réunionnais dans leur retour au pays en tant que cadres. Le dispositif Cadres d'avenir encourage les jeunes à suivre des formations afin d'occuper des postes à responsabilité. La Réunion doit en faire partie.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Je suis très favorable à ce dispositif, même s'il faudrait mobiliser des crédits supérieurs à 10 000 euros. Cet amendement n'est pas de nature à répondre aux besoins. Néanmoins, je lève le gage, et donne un avis de sagesse.

L'amendement n°II-1240 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-1241 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Nous souhaitons créer un dispositif national de continuité territoriale sportive dédié aux outre-mer. Un vrai vivier de talents est présent outre-mer, mais les coûts de transport font que de nombreux sportifs renoncent à des compétitions.

Un fonds d'échanges éducatifs, culturels et sportifs (Febecs) existe, mais il est sous-doté. Les collectivités territoriales sont obligées d'utiliser leurs propres fonds. Face à l'austérité budgétaire, ce n'est pas tenable.

Les coûts de transport ne peuvent continuer à être aussi discriminants pour les athlètes ultramarins. L'État doit être pleinement engagé dans la réussite des athlètes.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Demande de retrait.

M. Manuel Valls, ministre d'État.  - Ces dispositifs existent déjà. Retrait.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Cela ne coûte qu'un euro ! (Sourires)

L'amendement n°II-1241 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Outre-mer », modifiés, sont adoptés.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 16 janvier 2025, à 10 h 30.

La séance est levée à 01 h 20.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 16 janvier 2025

Séance publique

À 10 h 30, l'après-midi, le soir et la nuit

Présidence : Mme Sylvie Robert, vice-présidente, M. Pierre Ouzoulias, vice-président

Secrétaires : Mme Sonia de La Provôté, M. Mickaël Vallet

. Suite du projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025 (n°143, 2024-2025)

=> Plan de Relance et Investir pour la France de 2030

=> Engagements financiers de l'État

. Compte spécial : participations financières de l'État

. Compte spécial : accords monétaires internationaux

. Compte spécial : prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

et Remboursements et dégrèvements

=> Suite de la mission Relations avec les collectivités territoriales (+ articles 61, 62, 63 et 64)

. Compte spécial : avances aux collectivités territoriales et aux collectivités régies par les articles 73, 74 et 76 de la Constitution

=> Aide publique au développement

. Compte spécial : prêts à des États étrangers

=> Sport, jeunesse et vie associative