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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions orales

Attaques de loups en Haute-Marne

M. Bruno Sido

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières

M. Stéphane Le Rudulier

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Label « Breizhmer » et loi Égalim

M. Simon Uzenat

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Filière aluminium française

M. Bruno Rojouan

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique

Régime fiscal des chambres d'hôtes

M. Olivier Paccaud

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique

Conditions d'harmonisation de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères

Mme Agnès Canayer

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée, chargée de l'intelligence artificielle et du numérique

Rodéos motorisés à Compiègne

M. Édouard Courtial

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique

Cessation anticipée d'activité liée à l'amiante

M. André Guiol

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

Attaques au couteau

Mme Agnès Evren

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique

Pollution du site du CEA à Moronvilliers

Mme Anne-Sophie Romagny

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

Élargissement de la procédure d'amende forfaitaire aux contraventions

M. Michel Savin

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

Meurtre au centre pénitentiaire des Baumettes

Mme Valérie Boyer

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

Détachements dans le réseau d'enseignement français à l'étranger

M. Yan Chantrel

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Animateurs et AESH

Mme Pauline Martin

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Accompagnement des élèves en situation de handicap

Mme Sonia de La Provôté

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Médecine de montagne

Mme Sylviane Noël

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Stratégie pour l'avenir du Cambrésis

M. Guislain Cambier

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Opération « 1 000 cafés »

Mme Else Joseph

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Encadrement des services de sous-location

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Occupation de la Gaîté Lyrique par des jeunes en attente de recours

M. Rémi Féraud

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Soutien à la mytiliculture

Mme Sylvie Robert

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Chasse au gibier d'eau

M. Mickaël Vallet

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Recyclage des cartouches et bonbonnes de protoxyde d'azote

Mme Michelle Gréaume

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

Souveraineté alimentaire et agricole (Procédure accélérée - Suite)

Explications de vote

M. Vincent Louault

M. Laurent Duplomb

M. Bernard Buis

M. Henri Cabanel

M. Patrick Chauvet

M. Gérard Lahellec

M. Daniel Salmon

M. Jean-Claude Tissot

M. Joshua Hochart

Scrutin public solennel

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Mise au point au sujet de votes

CMP et commission d'enquête (Nominations)

Principe de laïcité dans le sport

Discussion générale

M. Michel Savin, auteur de la proposition de loi

M. Stéphane Piednoir, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

M. Jacques Grosperrin

Mme Samantha Cazebonne

M. Bernard Fialaire

M. Claude Kern

M. Pierre Ouzoulias

Mme Mathilde Ollivier

M. Patrick Kanner

M. Stéphane Ravier

M. Dany Wattebled

Mme Jacqueline Eustache-Brinio

Discussion des articles

Article 1er

M. Olivier Paccaud

M. Jean-Jacques Lozach

Après l'article 1er

Article 2

Article 2 bis

Article 3

Après l'article 3

Vote sur l'ensemble

Mme Sylvie Robert

M. Pierre Ouzoulias

M. Max Brisson

Mme Evelyne Corbière Naminzo

M. Akli Mellouli

M. Jean-Raymond Hugonet

M. Patrick Kanner

M. Bernard Fialaire

M. Michel Savin

M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport

Mises au point au sujet de votes

Ordre du jour du mercredi 19 février 2025




SÉANCE

du mardi 18 février 2025

58e séance de la session ordinaire 2024-2025

Présidence de Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente

Secrétaires : M. François Bonhomme, Mme Catherine Conconne.

La séance est ouverte à 11 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Attaques de loups en Haute-Marne

M. Bruno Sido .  - On observe une recrudescence des attaques de loups en Haute-Marne : 77 bêtes tuées depuis le 26 novembre 2024, 54 en 2025 et 27 blessées. Les loups prolifèrent sans contrôle, avec des conséquences dramatiques : ovins stressés, agnelage compromis...

Les éleveurs, excédés, n'en peuvent plus. Certains veulent vendre leurs troupeaux. L'administration reste sourde à leur détresse. Les moyens de protection prévus par l'État - filets de protection, chiens, tirs de défense - sont insuffisants. Les éleveurs veulent simplement exercer leur métier dans des conditions sereines. Quels moyens l'État compte-t-il mettre en place ?

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - C'est un sujet très difficile. Élue d'un territoire très touché, mon action est déterminée. Pour la première fois, le plan national d'actions 2024-2029 pose une réelle ambition de protection de l'élevage. Les chiffres sont terribles : plus de 4 000 constats d'attaque par an et plus de 12 000 animaux tués.

En 2024, mon ministère a engagé 41 millions d'euros pour soutenir les éleveurs, un effort poursuivi en 2025, malgré les difficultés budgétaires. Nous avons anticipé une augmentation d'environ 50 % des indemnisations, pour 9 millions d'euros. Pour les troupeaux non protégeables, nous souhaitons faciliter la délivrance des autorisations de tirs de défense et les indemnisations, avec un arrêté pris la semaine dernière et l'article 16 du projet de loi d'orientation agricole (PJLOA).

Je suis également pleinement engagée dans le combat européen du déclassement du loup, pour passer d'une logique de défense à une logique de régulation. Parce que l'indemnisation ne résout pas tout : nous voulons moins de prédations.

En Haute-Marne, les attaques sont le fait d'un loup solitaire bien identifié. À ma demande, une brigade de l'Office français de la biodiversité (OFB) va tenter de prélever ce loup qui n'a déjà que trop causé de dégâts.

M. Bruno Sido.  - Merci pour votre réponse. L'administration minimise le nombre d'attaques et les éleveurs demandent des moyens financiers d'urgence pour poser les filets de protection. Sachez que deux jeunes éleveurs sont suivis par la cellule psychologique de la Mutualité sociale agricole (MSA).

Inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières

M. Stéphane Le Rudulier .  - Les services d'inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (Sivep) sont dans une situation préoccupante, particulièrement à Fos-sur-Mer.

Ces services, pourtant essentiels à la sécurité des consommateurs et à la protection de nos filières agricoles et agroalimentaires, manquent d'effectifs. À Fos-sur-Mer, des emplois locaux sont menacés.

Il faut enrayer le report de trafic vers d'autres ports, comme Barcelone. Que comptez-vous faire pour renforcer les moyens humains et matériels de ces services ?

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Il est crucial d'avoir un bouclier sanitaire à nos frontières. Notre objectif est de limiter le temps d'attente des marchandises dans les postes de contrôle, tout en garantissant la sécurité sanitaire. Chaque année, les effectifs de chaque poste de contrôle sont adaptés aux flux réels contrôlés dans les douze mois précédents.

Mais certains contrôles ne peuvent être réalisés que par des vétérinaires, ce qui est problématique en cas de vacance de poste. Depuis 2019, nous pouvons recruter des vétérinaires étrangers et, depuis 2023, proposer un CDI dès le premier contrat.

À Fos-sur-Mer, un dispositif adapté - dématérialisation et appui d'autres postes de contrôle - a permis de rattraper les retards. En outre, le PLF 2025 prévoit une dotation supplémentaire pour ce poste de contrôle.

Label « Breizhmer » et loi Égalim

M. Simon Uzenat .  - L'article 24 de la loi Égalim a fixé un objectif d'au moins 50 % de produits durables et de qualité dans la restauration collective publique. Le décret n 2019-351 du 23 avril 2019 précise la liste des signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (Siqo) entrant dans le décompte de cet objectif.

La région Bretagne souhaiterait que le label-marque « Breizhmer » soit reconnu comme Siqo Égalim. Or seuls les labels officiels ont été retenus dans le décompte de 50 %, et d'autres labels ne peuvent être ajoutés.

Cependant, les acheteurs qui exigent des produits bénéficiant du label « Pêche durable » doivent, conformément au code de la commande publique, considérer les produits « équivalents », c'est-à-dire apportant les mêmes garanties. L'appréciation de l'équivalence est laissée au jugement de l'acheteur. Or l'article 24 de loi Égalim insiste sur la satisfaction des exigences des labels concernés et ouvre donc la voie à une approche multilabels.

Le Gouvernement prévoit-il de modifier le décret du 23 avril 2019 afin de reconnaître de nouveaux Siqo comme « Breizhmer » ? Sinon, l'approche multilabels pour apprécier l'équivalence est-elle la procédure idoine ?

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - On compte cinq Siqo : l'appellation d'origine protégée (AOP), l'indication géographique protégée (IGP), le Label Rouge, la spécialité traditionnelle garantie (STG) et l'agriculture biologique (AB).

Ces labels répondent à une définition précise, suivent un cahier des charges exigeant et sont soumis à des contrôles réguliers, comme l'a rappelé la campagne de communication lancée par l'Institut national de l'origine et de la qualité (Inao) en novembre dernier.

Par ailleurs, les produits durables et de qualité entrant dans le décompte des 50 % doivent répondre à l'un des onze critères précisés à l'article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime. Il est aussi possible de combiner certains critères, ce qui permet de sélectionner des produits locaux, y compris non labellisés Siqo. La liste est déjà à la fois exhaustive et souple, nous n'envisageons donc pas de révision des critères.

Filière aluminium française

M. Bruno Rojouan .  - De nombreuses filières industrielles, comme celle de l'aluminium, font face à des difficultés structurelles qui mettent en péril leur pérennité. Cette situation est illustrée par l'entreprise Sadillek de Montmarault, dans l'Allier, un pilier de l'économie locale spécialisé dans l'affinage.

Tout d'abord, le recyclage : la France manque d'une politique ambitieuse et d'infrastructures adaptées pour retenir ces déchets sur le territoire. Nous exportons près de 500 000 tonnes de déchets d'aluminium non traités par an. Nous privons ainsi nos affineurs de matières premières et restons dépendants des importations de métal.

Ensuite, la compétitivité énergétique : l'affinage de l'aluminium est particulièrement énergivore, ce qui pèse lourdement sur les marges et réduit la compétitivité des entreprises face aux concurrents étrangers, soutenus par des politiques énergétiques avantageuses, comme en Chine.

Toute cette filière stratégique - 10 000 emplois directs, un rôle clé dans l'aéronautique ou l'automobile - est mise à mal. Comment comptez-vous garantir la compétitivité et renforcer la souveraineté de la filière ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique .  - La position de la France est constante : l'aluminium est un métal stratégique, indispensable pour la transition énergétique et la mobilité électrique. La France a défendu la définition au niveau européen de dix-sept métaux stratégiques, dont l'aluminium.

Nous sommes fiers de cette filière, qui représente 10 % de la production européenne, et du site de Dunkerque, le premier en Europe pour l'aluminium primaire. Notre politique de soutien à la filière nous permettra de produire 70 % de nos besoins dès cette année. Nos exportations ont été divisées par deux depuis 2020 et nous ouvrons de nouvelles usines.

Nous devons recycler les déchets au plus près de leur lieu de production, conformément au règlement européen de 2024. Les droits de douane de 25 % annoncés par Trump sonnent l'alarme. La France porte un message de fermeté : l'Union européenne doit sortir de la naïveté.

Sur le prix de l'électricité, le Gouvernement travaille avec EDF pour que notre industrie puisse bénéficier de contrats compétitifs à long terme.

Régime fiscal des chambres d'hôtes

M. Olivier Paccaud .  - La loi du 19 novembre 2024 vise à répondre à un besoin légitime de régulation du marché locatif des logements. En modifiant le régime fiscal des chambres d'hôtes pour les assimiler aux meublés de tourisme, elle porte cependant un coup sévère à une activité essentielle à l'attractivité de nos territoires, notamment ruraux.

Contrairement aux meublés de tourisme, les chambres d'hôtes proposent des services associés comme le petit-déjeuner, le ménage et le linge de maison, et n'ont pas d'impact sur le parc immobilier résidentiel.

La loi diminue donc l'abattement fiscal de 71 % à 50 % et le seuil de revenus annuels de 188 700 à 77 700 euros, ce qui menace la viabilité économique des exploitants, alors que leur implication quotidienne pour satisfaire la clientèle est importante.

Ces exploitants, engagés dans la réhabilitation de bâtiments anciens, jouent un rôle clé dans le soutien de l'économie locale et du tourisme de passage.

Madame la ministre, revoir cet alignement fiscal ne serait que justice. Errare humanum est, perseverare diabolicum.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique .  - Cette modification de l'article 50-0 du code général des impôts est issue des travaux de la commission mixte paritaire sur la loi du 19 novembre 2024.

Ce seuil de 77 700 euros est très supérieur à celui des locations meublées de tourisme non classées - il est désormais de 15 000 euros, avec un abattement de seulement 30 %. Ainsi le législateur a maintenu un abattement différencié au bénéfice des meublés classés de tourisme et des chambres d'hôtes. Ce seuil de 77 700 euros semble suffisamment élevé au regard des besoins des petits propriétaires.

Par ailleurs, il est toujours possible d'opter pour le régime réel afin de déduire ses frais et charges. Le régime micro-BIC est un régime d'imposition simplifié qui ne revêt aucun caractère incitatif.

Enfin, les nouvelles dispositions de l'article 50-0 n'appellent aucun décret d'application et s'appliquent de plein droit à compter du 1er janvier 2025.

Conditions d'harmonisation de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères

Mme Agnès Canayer .  - La loi NOTRe impose aux intercommunalités d'harmoniser leur taux de taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom) dans un délai de dix ans à partir de leur création. En Seine-Maritime, la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole, créée le 1er janvier 2019, a mis en place en octobre 2023 le lissage des taux de Teom sur quatre ans, avec des zones correspondant à des niveaux de services différents, pour une harmonisation totale en 2029.

Cependant, certaines communes estiment que l'on peut retenir des durées de lissage différentes entre communes, et surtout, que le délai de dix ans court à partir de la date de délibération, et non de la création de l'EPCI. Nous avons interrogé le ministre de l'économie et des finances, sans succès. Peut-on appliquer des durées de lissage différentes entre les communes ? Si oui, selon quels critères ? À partir de quelle date court le délai de dix ans ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée, chargée de l'intelligence artificielle et du numérique .  - Un EPCI ayant institué la Teom doit voter un taux unique sur l'ensemble de son territoire. Toutefois, il peut créer des zones de perception avec des taux différents : ceux-ci doivent être justifiés au regard de la réalisation du service rendu, et ne peuvent simplement correspondre aux différences de taux avant fusion.

Lorsqu'un nouvel EPCI issu d'une fusion n'institue pas immédiatement la Teom, les délibérations antérieures continuent de s'appliquer. Le Havre Seine Métropole, créé en 2019, a institué la Teom en 2023, ce qui a mis fin aux délibérations antérieures.

Un dispositif d'unification progressive des taux d'une durée maximale de dix ans est alors applicable. Dans le cas du Havre Seine Métropole, le conseil délibérant a décidé de lisser les taux de Teom sur quatre ans, à compter de 2024. Durant cette période, l'EPCI détermine librement les modalités de l'harmonisation progressive des taux, sous réserve de parvenir, à l'issue de la période de lissage, au taux cible dans chacune des zones. Cette période pourrait être prolongée sur délibération de l'EPCI, sans que la durée totale de lissage ne puisse excéder dix ans.

Mme Agnès Canayer.  - Merci pour ces éclairages.

Rodéos motorisés à Compiègne

M. Édouard Courtial .  - Je salue l'engagement du Gouvernement au service de la sécurité quotidienne, particulièrement l'action de Bruno Retailleau.

M. Michel Savin.  - Très bien !

M. Édouard Courtial.  - Pour lutter contre le fléau des rodéos motorisés, parfois à l'origine de drames, Compiègne a renforcé sa police municipale et intensifié la vidéoprotection. Elle a ainsi récupéré depuis 2020 une cinquantaine de deux-roues, abandonnés par leurs propriétaires. Mais le maire, Philippe Marini, n'a pas de baguette magique ; il a plus que jamais besoin de l'appui de l'État.

Compiègne se propose d'expérimenter l'utilisation de drones par la police municipale, ainsi que le recours au spray et au paintball de peinture codée - ce qui suppose la réquisition du procureur de la République. J'appuie cette demande. Autoriser cette expérimentation locale, c'est se donner des outils pour mieux protéger nos concitoyens.

Nous pouvons laisser les maires seuls face à ce fléau ou leur donner enfin les moyens de lutter. Quelles mesures concrètes l'État compte-t-il prendre pour appuyer les communes ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique .  - Les rodéos motorisés troublent l'ordre public et engendrent un sentiment d'insécurité. La lutte contre ce fléau s'intègre aux stratégies de partenariat et de réappropriation de la voie publique, au coeur de la restauration de la sécurité du quotidien.

À Compiègne, quatorze opérations anti-rodéos ont été organisées par la police nationale l'année dernière. Un travail est mené avec les bailleurs pour identifier les lieux de stockage des engins. Enfin, le système de vidéoprotection permet d'engager des procédures judiciaires.

Compiègne a investi dans la vidéoprotection et sa police municipale et mis en place depuis 2020 le dispositif « Stop Rodéos ». C'est un exemple à suivre. Les résultats sont là : l'an dernier, six interpellations et sept procédures judiciaires ; dans l'Oise, dix-huit opérations anti-rodéos, dix-sept interpellations, vingt-trois procédures judiciaires. La gendarmerie cible les lieux et les moments propices aux rodéos. Elle a saisi vingt-six engins en 2024.

L'emploi des sprays de produit marquant codé a été expérimenté entre 2021 et 2023, notamment pour identifier les auteurs de dégradations. La mesure, peu conclusive, a été abandonnée. Appliquée aux rodéos urbains, elle ne constituerait pas une preuve suffisante.

Le Beauvau des polices municipales reviendra sur ces sujets. Les policiers municipaux doivent avoir les moyens de répondre aux attentes des Français, dans le respect des principes constitutionnels et des prérogatives de l'autorité judiciaire.

Cessation anticipée d'activité liée à l'amiante

M. André Guiol .  - Les agents exposés à l'amiante durant leur vie professionnelle bénéficient d'une cessation d'activité professionnelle et d'une allocation spécifiques, mais l'évolution statutaire de certains établissements du ministère des armées a créé des injustices quant à ces droits.

Corrigées par décret pour les anciens ouvriers d'État, elles perdurent pour les agents relevant d'autres statuts, comme les techniciens supérieurs d'études et de fabrications. Le ministère se heurte à un référentiel réglementaire interministériel.

Pourquoi l'extension du dispositif aux anciens fonctionnaires et anciens agents contractuels imposerait-elle de modifier la loi de finances pour 2016, comme je l'indiquais dans ma première question orale, alors que cela n'a pas été le cas pour les ouvriers d'État ? Quand le décret correctif relatif à l'ensemble des agents du ministère sera-t-il publié ?

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - La décision du Conseil d'État du 10 juin 2020 a étendu le dispositif de cessation anticipée d'activité aux anciens ouvriers de l'État qui ne sont plus agents publics quand ils font leur demande. Ce n'est pas encore le cas des anciens fonctionnaires et des anciens contractuels de droit public qui ne seraient plus agents publics au moment de leur demande.

Le ministre des armées s'est fortement mobilisé pour trouver une solution. Une disposition législative étant nécessaire, celle-ci a été reconduite dans la loi de finances initiale pour 2025. L'ensemble des ministères concernés travaillent de concert pour préparer le décret d'application, qui sera publié très prochainement.

Les agents et anciens agents exposés à l'amiante bénéficieront ainsi de la reconnaissance qui leur est due.

Attaques au couteau

Mme Agnès Evren .  - Depuis plusieurs mois, la France enchaîne les tragédies. Thomas à Crépol, Matisse à Châteauroux, puis Philippine, Élias et Louise à Paris ont eu leur vie arrachée à coups de couteau par des barbares.

Selon l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, en 2020, cent vingt attaques au couteau ont eu lieu par jour en France. Ce sont non plus des faits divers, mais de société. Élue du 15e arrondissement de Paris, je constate que la violence explose dans notre ville : les meurtres y ont crû de 36 % en 2024.

Mme Hidalgo vit dans sa bulle déconnectée du réel et se contente de distribuer des affichettes. Comment peut-on vivre dans un tel déni ? Quelque 10 000 familles quittent Paris chaque année ; certains quartiers sont des coupe-gorges. Quelle est votre feuille de route pour lutter ces attaques ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique .  - J'exprime ma profonde compassion envers les victimes et leurs familles. Ces attaques témoignent d'un ensauvagement qui questionne notre modèle de société. Nous avons besoin d'un continuum de sécurité.

La présence des forces de sécurité intérieure doit être visible, rassurante et dissuasive. Sur le plan interministériel, le 19 novembre dernier, le ministre de l'intérieur a demandé aux préfets d'élaborer des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien. La réponse pénale doit être efficace et sévère ; le garde des sceaux s'y emploie. Le passage en conseil de discipline des élèves en possession d'une arme blanche et d'un signalement au parquet conforte notre volonté d'agir.

Dans l'agglomération parisienne, les vols commis avec armes blanches ont reculé de 22 % entre 2023 et 2024. La vidéoprotection a permis de retrouver l'assassin de la jeune Louise.

Mme Valérie Boyer.  - Tout va bien, alors !

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée.  - Nos policiers et nos gendarmes continueront à agir sans relâche.

Mme Agnès Evren.  - On aimerait sentir davantage de détermination dans vos propos ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

?Pollution du site du CEA à Moronvilliers

Mme Anne-Sophie Romagny .  - Le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) a exploité un site d'essais militaires et d'activité détonique à Moronvilliers dans la Marne, sujet du documentaire Polygone en 2024.

La population s'interroge sur le niveau de pollution et de contamination radioactives des sols et des nappes phréatiques. Mais les élus locaux ne peuvent répondre à ces inquiétudes en raison d'une sorte d'omerta autour de ce sujet.

Le suivi hydrogéologique, instauré depuis 2023, ne concerne que la zone périphérique du site. Or les nappes phréatiques alimentent en eau potable la majorité des habitants de Reims. L'État n'a jamais évoqué la dépollution du site fermé depuis douze ans, aussi les élus locaux cherchent-ils à la financer notamment en dédiant cet espace à la production d'énergies renouvelables.

Le Gouvernement entend-il donner des informations sur le niveau de pollution du site ? Entreprendra-t-il rapidement sa dépollution ?

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - De 1957 à 2013, aucun essai ni expérimentation nucléaires n'ont été menés sur ce site, uniquement des expériences de détonique utiles à la mise au point des armes de dissuasion françaises.

Depuis 2013, une remise en état général est en cours, sous le contrôle du délégué à la sûreté nucléaire et la radioprotection, afin de veiller à protéger la population et l'environnement. Des simulations sont réalisées sur cinq cents ans. Le suivi hydrogéologique indique des concentrations en uranium dans les eaux prélevées quarante fois inférieures à la valeur réglementaire française pour les eaux destinées à la consommation humaine.

Ce travail est fait en transparence avec les élus locaux ; une commission locale d'information créée depuis le 3 février 2017 se réunit annuellement sous la présidence du sous-préfet de Reims. Les résultats des mesures sont transmis par courrier à la préfecture de la Marne et à l'ensemble des maires concernés.

Élargissement de la procédure d'amende forfaitaire aux contraventions

M. Michel Savin .  - Alors que l'intelligence artificielle fait la une des journaux, maires et policiers municipaux restent bloqués à l'âge du papier pour dresser des contraventions. Le code de procédure pénale n'a pas fait sa mise à jour 2.0 : lois et règlements interdisent d'avoir recours à une procédure informatisée pour des infractions à des arrêtés municipaux pris au titre des pouvoirs de police du maire.

Le service public perd en efficacité. Élus et policiers perdent un temps précieux à rédiger à la main procès-verbaux et rapports. Le même code impose que les contraventions soient adressées à l'officier du ministère public qui, débordé, finit par les classer sans suite. Résultat : perte de motivation des agents, perte de confiance des citoyens et renforcement de l'impunité des fauteurs de troubles, incités à récidiver - parfois plus gravement.

Allez-vous élargir la procédure de l'amende forfaitaire à ce type d'infractions ?

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - Le ministère de la justice lutte contre les infractions du quotidien, notamment la violation des arrêtés de police des maires, réprimée par l'article R610-5 du code pénal.

L'article R48-1 du code de procédure pénale énumère les quatre premières classes pour lesquelles l'action publique peut être éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire. Il ne couvre pas toutes les infractions violant les arrêtés de police des maires, extrêmement variées.

Une telle forfaitisation n'est pas nécessaire pour bien sanctionner. Le décret du 15 février 2022 dispose que le non-respect des arrêtés de police du maire constitue une contravention de deuxième classe, et les policiers municipaux peuvent utiliser des imprimés simplifiés au lieu de dresser un procès-verbal. Sont punis de l'amende prévue pour les contraventions de quatrième classe plusieurs faits, comme l'atteinte à la libre circulation sur la voie publique ou l'ouverture d'un point eau incendie. La procédure de l'amende forfaitaire est applicable à ces nouvelles contraventions.

M. Michel Savin.  - Il n'est pas normal qu'un procès-verbal dressé par un policier ou un maire ne soit pas suivi d'effet. Ce sentiment d'impunité crée des tensions. Il est urgent de clarifier la situation.

Meurtre au centre pénitentiaire des Baumettes

Mme Valérie Boyer .  - Le 21 septembre dernier, le jeune Robin Cota tente d'obtenir de la codéine avec une fausse ordonnance. Arrêté, il est incarcéré à la prison des Baumettes.

Les premiers jours, il est optimiste. Puis il est transféré, et son enfer commence. Il alerte trois fois par lettre, sans compter les appels à l'interphone, sur un codétenu. Le 9 octobre, un bruit d'une violence inouïe retentit. Son bourreau l'a presque décapité avec un bol cassé et lui a écrasé le visage. Comble de l'horreur, il a manipulé le corps pour accélérer l'hémorragie. Les parents apprendront les circonstances de la mort de Robin dans la presse.

J'exprime ma compassion à toute sa famille. Les Français attendent des réponses ; nous sommes dans la stupeur, le chagrin et l'incompréhension. S'il ne vous appartient pas de commenter une affaire en cours, faites la transparence sur ce drame, alors que des activités ludiques sont organisées dans certaines prisons, dont des massages gratuits. Le frère d'un détenu du Bataclan, fiché S, se balade tranquillement, assigné à résidence à Lure ; un condamné pour viol a été remis en liberté dans les Yvelines... La liste est longue !

Pourquoi ce jeune homme non dangereux, sans casier judiciaire et qui travaillait, a-t-il été incarcéré ? D'autres solutions n'auraient-elles pas pu être envisagées pour garantir sa sécurité et sa vie ? Pourquoi l'installer dans la cellule d'un détenu ultraviolent ? Qui est son bourreau, et quelles étaient ses motivations ? Pouvons-nous retenir le crime raciste ? Pourquoi les alertes de Robin n'ont-elles pas été prises en compte ? Faut-il avoir des relations pour être protégé en prison ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - Je compatis également à la douleur de la famille. La justice et l'inspection générale de la justice ont été saisies. Les deux procédures, administrative et judiciaire, sont toujours en cours et je ne peux m'exprimer sur celles-ci. Lorsque les conclusions seront rendues, le garde des sceaux en tirera toutes les conséquences pour qu'un tel drame ne se reproduise pas.

Mme Valérie Boyer.  - C'est trop facile !

Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée.  - Vous savez que je ne puis répondre autre chose.

Mme Valérie Boyer.  - Pas du tout ! Pourquoi a-t-il été en prison ? Répondez au moins sur ce point !

Détachements dans le réseau d'enseignement français à l'étranger

M. Yan Chantrel .  - Depuis le 1er septembre 2019, les enseignants détachés dans le réseau français à l'étranger ne peuvent plus être maintenus en détachement au-delà de six années scolaires consécutives, ou neuf en cas de dérogation.

Pour nombre d'entre eux, la période de détachement arrive à échéance à la rentrée prochaine.

La mesure a été prise pour encourager la mobilité du plus grand nombre, mais elle perd largement de son sens aujourd'hui alors que l'éducation nationale fait face à une crise de recrutement et que les rectorats découragent les détachements à l'étranger pour limiter la pénurie de personnel dans l'Hexagone. En outre, le réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) fait aussi face à de grandes difficultés de recrutement.

Dans mon rapport sur la francophonie, j'ai constaté que cette pénurie d'enseignants affaiblissait le rayonnement de notre pays.

Je vous demande de revenir sur cette limitation du détachement à l'étranger à six ans au profit des reconductions tacites qui prévalaient auparavant.

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - La rentrée 2025 marquera le retour des premiers enseignants qui ont atteint la durée maximale de six ans. L'objectif est clair : que le maximum d'enseignants puisse vivre une expérience internationale. Après ces six années, un retour en poste en France pendant trois ans est requis. Une prolongation jusqu'à neuf années est possible exceptionnellement.

Environ 170 enseignants, dont 5 de l'AEFE, devraient rentrer, sur plus de 800. La règle n'a pas entamé l'attractivité du réseau. Dans le premier degré, le nombre de détachés se maintient à 3 300. Dans le second degré, il est en hausse, à 4 946 en 2024 contre 4 442 en 2023 et 4 263 en 2022. La légère baisse de 2022 était due à un gel temporaire des recrutements de l'AEFE.

Il faudra établir un bilan global avec tous les acteurs concernés. En 2024, un accompagnement spécifique a été lancé, avec un guide du retour et des conseillers RH spécialement formés.

M. Yan Chantrel.  - Je me rends disponible pour échanger plus en détail sur ce sujet.

Animateurs et AESH

Mme Pauline Martin .  - Nous constatons une vraie difficulté à recruter des AESH : ces postes sont peu attractifs car rarement à temps complet. Les communes peinent aussi à recruter des animateurs de centre de loisirs. Pourquoi ne pas créer un système de vases communicants permettant aux animateurs d'exercer sur le temps scolaire et aux AESH d'intervenir sur le périscolaire ?

Le Loiret est volontaire pour l'expérimentation d'un module de formation agile et efficace. Afin que les animateurs puissent exercer comme AESH, j'ai déjà sollicité le recteur et le directeur académique des services de l'éducation nationale (Dasen) qui, sous réserve de votre accord, sont prêts à relever ce défi. Bref, il faut du pragmatisme et de l'efficacité de terrain pour répondre à un besoin criant.

Un autre sujet : je suis régulièrement sollicitée par le réseau Espérance banlieues qui souhaite être associé aux actions menées par l'éducation nationale. Où en sommes-nous ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - La formation des AESH est un enjeu central. Dès leur prise de poste, ils bénéficient d'une formation obligatoire de 60 heures par an. Des formations départementales et académiques leur sont également accessibles.

Depuis 2021, 25 heures de formation initiale des professeurs sont consacrées à l'école inclusive, et les plateformes Magistère et Cap École Inclusive proposent des formations en libre accès aux enseignants et aux AESH. Ces derniers peuvent aussi compter sur les professeurs ressources et les conseillers pédagogiques.

Dans le cadre de la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement, un professeur ressource sera déployé dans chaque département d'ici à 2027.

Depuis la rentrée 2024, les pôles d'appui à la scolarité (PAS), expérimentés dans quatre départements, interviennent auprès des enfants. Dès 2025, plus de 200 PAS supplémentaires seront créés afin d'offrir à chaque enfant de France un accompagnement à la hauteur de ses besoins.

Mme Pauline Martin.  - Vous n'avez pas répondu à ma question : pouvons-nous réaliser cette expérimentation avec les animateurs de nos centres de loisirs ?

Accompagnement des élèves en situation de handicap

Mme Sonia de La Provôté .  - Depuis la loi du 27 mai 2024, l'État prend en charge l'accompagnement des élèves en situation de handicap durant la pause méridienne. Or la mise en oeuvre de la loi rencontre de gros problèmes. Dans le Calvados, la mairie de Verson a dû pallier à l'absence de dispositif pendant trois mois dans une de ses écoles qui accueille pourtant une unité localisée pour l'inclusion scolaire (Ulis). Sans nouvelles de l'État, elle a recruté un agent périscolaire, pour un coût de 3 000 euros. Tardivement, le 18 novembre, l'Education nationale a affecté une personne - qui n'est présente qu'entre 11 h 50 et 12 h 40, alors que la pause s'étend de 11 h 30 à 13 h 30. La commune doit donc recourir à un agent périscolaire pour couvrir le reste de la pause. À quel coût et pour combien de temps ?

Ces décalages dans la mise en oeuvre sont inacceptables. Les enfants ont besoin d'être accompagnés et ce, dès la rentrée. Quelles mesures prévoyez-vous pour compenser les carences ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - La loi Vial est une avancée majeure. L'un des enjeux de sa mise en oeuvre repose sur la l'évaluation du besoin d'accompagnement des élèves. C'est l'État qui en décide, en s'appuyant sur une analyse fine des besoins de chaque élève.

Un décret du 21 janvier précise que l'État assume pleinement ses responsabilités d'employeur, y compris sur le temps méridien.

Nous avons fait le choix d'un déploiement renforcé des pôles d'appui à la scolarité : aménagements pédagogiques et éducatifs ; mise à disposition de matériel pédagogique spécifique ; accompagnement renforcé par des professionnels de l'éducation nationale et du secteur médico-social.

L'objectif est de garantir à chaque élève les meilleures solutions et d'éviter aux familles des démarches administratives complexes.

Médecine de montagne

Mme Sylviane Noël .  - Les stations de Haute-Savoie accueillent des millions de visiteurs, dont la pratique sportive génère jusqu'à 140 000 traumatismes par an. Les médecins y assurent une mission vitale, dans des zones isolées. Pourtant, la nouvelle convention avec la Cnam leur impose des contraintes inadaptées : recours obligatoire au centre 15 pour administrer des antalgiques intraveineux, absence de valorisation financière des actes d'urgence et de traumatologie, baisse des majorations MN et MM, limitant leur rémunération malgré des gardes la nuit, les week-ends et les jours fériés.

Ces contraintes menacent la pérennité de l'offre de soins en Haute-Savoie, où les coûts d'exercice sont bien supérieurs à ceux en milieu urbain. Si rien n'est fait, les cabinets fermeront, accentuant la désertification médicale et surchargeant les hôpitaux déjà saturés.

Quelles mesures concrètes et immédiates comptez-vous prendre pour alléger ces contraintes et garantir aux médecins de montagne les moyens d'exercer leur mission dans des conditions adaptées au terrain ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - La convention signée en juin 2024 entre l'assurance maladie et les médecins libéraux doit améliorer l'accès aux soins. Les soins non programmés ont été réorganisés pour éviter les dérives tarifaires et préserver nos ressources médicales, grâce à la régulation par le service d'accès aux soins (SAS) et par la permanence des soins ambulatoires. Désormais, les cotations d'urgence non régulées seront réservées aux cas justifiant une hospitalisation. Il faut privilégier la pédagogie.

Depuis 2015, le dispositif de labélisation en Auvergne-Rhône-Alpes a financé 54 cabinets, à hauteur de 2 millions d'euros. La nomenclature prévoit un supplément pour les actes de radiologie en montagne. L'article 15 bis de la loi de financement de la sécurité sociale permettra de labelliser les centres de soins non programmés, dont les cabinets.

Stratégie pour l'avenir du Cambrésis

M. Guislain Cambier .  - Belle mission que celle d'aménager le territoire : c'est permettre le développement de chacun, tout en assurant la cohésion nationale. Pourtant, si des dispositifs ont été mis en place pour panser les plaies du bassin minier ou pour combler les retards de l'Avesnois, le Cambrésis reste oublié. Or son taux de chômage avoisine les 18 %, les troubles du langage touchent un enfant sur cinq, et je ne parle pas des violences intrafamiliales, de l'accès aux soins et de la mobilité...

Pour y remédier, les élus, l'État et le département ont élaboré la stratégie pour l'avenir du Cambrésis 2027, qui a été signée par le préfet en 2020. Depuis, rien. Quand l'État honorera-t-il sa parole, afin que le Cambrésis puisse se développer ?

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - L'État n'est pas resté inactif dans le Cambrésis : environ mille emplois y ont été créés ; quatorze entreprises ont été accompagnées via une enveloppe de 3 millions d'euros ; le site e-Valley a été installé sur l'ancienne base aérienne ; près de 600 000 euros ont été alloués pour faciliter l'accès à l'emploi ; six communes rurales bénéficient du programme Villages d'avenir. Un troisième poste d'intervenante sociale a été créé pour lutter contre les violences intrafamiliales.

L'État, en lien avec les collectivités territoriales, est mobilisé pour le développement du Cambrésis. Chaque territoire doit avoir une espérance, et chaque citoyen une chance, comme l'a dit François Bayrou.

M. Guislain Cambier.  - Le territoire vous en remercie, mais il faut une stratégie coordonnée et de long terme -  ce que permettait la stratégie pour 2027, malgré les aléas de l'engagement politique. Dans le Cambrésis, nous ne demandons pas mieux que de travailler avec vous.

Opération « 1 000 cafés »

Mme Else Joseph .  - Lancée en 2019, l'opération « 1 000 cafés », initiative privée bénéficiant d'un soutien public, visait à recréer du lien social, à redonner de l'âme à nos petites communes. Le bilan est hélas mitigé, notamment dans les Ardennes. Sur les mille cafés prévus, seuls 80 auraient vu le jour.

Certaines communes se sont heurtées à des retraits inopinés de la part d'opérateurs peu scrupuleux, voire à des pressions injustifiées sur les gérants, alors qu'elles avaient financé et soutenu ces projets. Des cafés promis, elles ne voient ni la couleur, ni l'odeur !

Comment le Gouvernement compte-t-il soutenir ces communes victimes de démarches à la limite de la malveillance, et les aider à poursuivre ces projets ? Je ne voudrais pas conclure, comme Mme du Barry disant à Louis XV : « La France, ton café fout le camp ! »

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - Je sais les efforts déployés par les communes pour accueillir dans leur centre-bourg un lieu social chaleureux comme un café. J'ai récemment reçu la présidente de l'association « 1 000 cafés » ; il existe aussi d'autres initiatives.

Il est délicat de réintroduire des commerces dans les centre-bourgs, car il faut trouver un modèle économique viable. D'où l'essor des cafés associatifs, qui développent des activités annexes, musique, lecture, etc. L'État soutient ces initiatives, et 434 commerces ont été réouverts.

Je suis prête à discuter avec vous de la situation particulière que vous évoquez.

Mme Else Joseph.  - L'association est soutenue par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et par le fonds de soutien au commerce rural. Soyons vigilants sur l'argent public dépensé !

Encadrement des services de sous-location

M. Jean-Michel Arnaud .  - Des entreprises proposent des services de sous-location aux propriétaires de biens immobiliers : en contrepartie d'un loyer assuré, elles sous-louent les biens pour de courtes ou moyennes durées, souvent via des plateformes en ligne.

Ce nouveau procédé, qui vise majoritairement une clientèle touristique, réduit l'offre de logements permanents pour la population locale ; alors que la France pâtit d'un grave manque de logements, il aggrave encore le déséquilibre entre l'offre et la demande. En outre, les sous-locataires ne bénéficient pas des mêmes garanties que les locataires. Pourtant, les entreprises concernées bénéficient d'un régime fiscal avantageux.

Le développement dérégulé de la sous-location concourt à une forme d'ubérisation de la gestion locative. Résultat : dans le Briançonnais comme dans d'autres territoires, les prix du logement sont inaccessibles aux locaux et aux travailleurs saisonniers. Des difficultés se posent aussi en matière de diagnostic de performance énergétique.

Allez-vous assouplir la loi Climat et résilience et encadrer les nouveaux procédés de sous-location ?

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - Vous connaissez la vive attention que Valérie Létard porte à ces enjeux, qui concernent de nombreux territoires.

La loi Le Meur, adoptée en novembre dernier avec le soutien du Gouvernement, instaure de nouveaux outils pour préserver les résidences principales et éviter les distorsions que vous signalez à juste titre. La procédure de déclaration avec enregistrement en mairie est généralisée. Les fausses déclarations et le non-respect par une plateforme d'une injonction de retrait sont sanctionnés.

Par ailleurs, les communes peuvent définir des quotas d'autorisations de meublés touristiques et délimiter des secteurs réservés à la construction de résidences principales. Elles peuvent aussi limiter à 90 jours par an, au lieu de 120, la durée de location.

Enfin, le régime fiscal des meublés touristiques a été rapproché de celui de la location nue.

Ces éléments sont de nature à répondre, certes partiellement, à la situation que vous décrivez. Le Gouvernement est conscient de l'enjeu très fort qui s'attache à l'accès au logement des habitants des territoires concernés, mais aussi des travailleurs saisonniers.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Merci pour ces précisions. L'ubérisation dont j'ai parlé, liée à des sociétés qui louent les biens comme des tranches de saucissons, dénature le marché. Il en résulte de graves problèmes en zone urbaine et dans les territoires de pression touristique, notamment en montagne. Nous devrons en rediscuter.

Occupation de la Gaîté Lyrique par des jeunes en attente de recours

M. Rémi Féraud .  - Depuis plus de deux mois, la Gaîté Lyrique est occupée par plusieurs centaines de jeunes qui n'ont pas été reconnus mineurs mais contestent cette décision devant le juge des enfants. Il faut sortir de cette impasse.

Les pouvoirs publics se montrent impuissants à répondre à une détresse bien réelle, l'État n'assumant pas sa responsabilité.

À Paris, plus de 9 000 jeunes sont évalués chaque année, contre 1 300 il y a dix ans - la situation est la même dans bien d'autres départements. Les jeunes reconnus mineurs sont évidemment pris en charge par la Ville de Paris au titre de la protection de l'enfance, mais les autres se retrouvent à la rue, sans ressources ni perspectives.

La Ville ne peut remplir seule une mission dont la responsabilité incombe à l'État, mais est prête à l'accompagner comme elle l'a toujours fait. Avec plusieurs de mes collègues sénatrices et sénateurs de Paris, j'ai écrit au Premier ministre à ce sujet il y a quelques semaines, sans obtenir de réponse à cette heure.

Quels moyens l'État compte-t-il mobiliser pour proposer rapidement à ces jeunes un hébergement digne et pérenne et pour leur assurer une meilleure protection juridique, le temps que la justice se prononce sur leur minorité ?

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - Vous soulevez une question importante et délicate, qui doit être traitée dans le cadre plus général de l'accueil des étrangers.

L'État est très actif : les capacités d'hébergement ont été accrues de 40 % ces six dernières années en Île-de-France, et 120 000 places sont proposées chaque jour dans la région, dont 46 800 à Paris. Le budget correspondant est de 1,6 milliard d'euros pour la seule région francilienne.

S'agissant des jeunes migrants évalués majeurs mais ayant formé un recours, l'État déploie les moyens nécessaires. Le tribunal administratif vient d'ordonner l'expulsion de la Gaîté Lyrique. Nous sommes dans un pays de droit, où ces procédures doivent être respectées. La préfecture prévoit des orientations vers des hébergements en région. Ces jeunes bénéficieront d'un hébergement jusqu'au jugement de leur demande de recours. En cas de décision défavorable, ils devront quitter le territoire en application du droit.

L'État a répondu présent pour accompagner la collectivité de Paris dans sa mission de prise en charge : en novembre dernier, la préfecture a signé une convention avec la Ville pour l'appui à l'évaluation de la situation, afin de protéger l'enfance et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers d'étrangers. Ce soutien représente 500 euros par jeune pour l'évaluation et 90 euros par jour pour sa mise à l'abri.

M. Rémi Féraud.  - Une expulsion ne peut avoir lieu sans solution d'hébergement pour ces jeunes. Il y a urgence à agir !

Soutien à la mytiliculture

Mme Sylvie Robert .  - J'associe à ma question mon collègue député Jean-Luc Bourgeaux.

Les mytiliculteurs bretons font face à l'augmentation du nombre de prédateurs : oiseaux, daurades et araignées de mer s'attaquent aux moules. Le phénomène prend de l'ampleur en Ille-et-Vilaine, déstabilisant la filière. Or les moyens de lutte contre les prédateurs sont limités et le cadre réglementaire est inadapté : hors pêches expérimentales, la filière ne dispose d'aucun instrument de régulation. Les entreprises sont doublement pénalisées, car la production baisse alors que leurs charges augmentent.

Les aides de l'Union européenne, du conseil régional et des collectivités ne peuvent être débloquées qu'à l'occasion d'opérations collectives ; en outre, elles ne couvrent pas les dépenses engagées par les producteurs.

Le Gouvernement doit réagir avant le mois d'avril, début de la période de prédation de l'araignée de mer. Le cadre réglementaire évoluera-t-il, notamment pour autoriser les effarouchements ? L'État créera-t-il un volet assurantiel pour soutenir la filière et aller au-delà des aides de minimis, qui ne sont toujours pas perçues par les entreprises ?

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - Sous l'effet du réchauffement climatique, les espèces invasives se multiplient. La destruction des naissains et des moules adultes fragilise les entreprises concernées.

Le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (Feampa) finance le matériel contre la prédation. Il pourra contribuer au fonds de mutualisation aquacole, qui doit être constitué par les professionnels ; l'État est prêt à lui apporter son soutien.

Le Feampa prévoit aussi des financements destinés à améliorer nos connaissances sur ces espèces invasives, à l'instar du projet Spider, doté de 1,4 million d'euros. Ce dernier a débuté en 2024 par une campagne de marquage des araignées de mer.

Mme Sylvie Robert.  - Le cadre réglementaire est inadapté : vous pouvez le faire évoluer rapidement.

Chasse au gibier d'eau

M. Mickaël Vallet .  - Fin 2024, le monde de la chasse au gibier d'eau a été sidéré par des recommandations inattendues de la Commission européenne instaurant des moratoires ou des réductions de prélèvements pour certains anatidés, comme le canard souchet ou le fuligule milouin.

Ces conclusions se fondent sur des données partielles, voire biaisées, excluant la Sibérie, zone d'habitat majeur pour ces espèces. Or les chasses au gibier d'eau réalisées dans le cadre de plans de gestion adaptative contribuent à la préservation des espèces.

Quelles démarches le Gouvernement compte-t-il engager auprès des instances européennes pour garantir la fiabilité des données servant de base aux décisions futures ? Nous défendons la gestion adaptative reposant sur des partenariats solides avec les acteurs locaux, plutôt que des moratoires décidés dans l'urgence. Nous avons bien sûr pris contact avec le ministère de la transition écologique, mais tout cela reste confus.

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - Agnès Pannier-Runacher est consciente de l'impact social, économique et culturel de ces recommandations.

La France est une halte de migration pour de nombreuses espèces, dont certaines sont très vulnérables. Or la préservation des écosystèmes de migration joue un rôle central pour leur conservation.

Le ministère suit de près la dynamique des populations : le bilan du comptage Wetlands est plutôt encourageant.

Le Gouvernement plaide pour une prise en compte rigoureuse des données scientifiques disponibles, tout en étant attentif aux impacts sociaux et culturels que vous évoquez. Il défend une approche équilibrée : garantir la conservation des espèces tout en permettant une pratique durable et responsable de la chasse.

M. Mickaël Vallet.  - Je ne suis pas plus éclairé. Si les recommandations européennes sont appliquées, c'est la fin de la chasse au gibier d'eau en France. Cette question ne devra pas faire l'objet d'un marchandage lors des négociations européennes.

Recyclage des cartouches et bonbonnes de protoxyde d'azote

Mme Michelle Gréaume .  - Le protoxyde d'azote, deuxième drogue la plus consommée en France, est un fléau sur le plan sanitaire ; nous en débattrons prochainement.

C'est aussi un fléau sur le plan environnemental : le caractère explosif des contenants implique une prise en charge par des entreprises spécialisées, d'où des dépenses considérables pour les collectivités. Les contenants, jetés avec les ordures ménagères ou dans l'espace public, sont rarement entièrement vidés de leur contenu. Résultat : ils explosent dans les centres de valorisation énergétique (CVE), causant de sérieux dégâts, mettant en danger le personnel, et engendrant des coûts, tant en réparation qu'en baisse de production induite.

Les restrictions de ventes devraient être renforcées, et les industriels être incités à modifier les valves des contenants pour prévenir les explosions. Pourquoi ne pas instaurer une écocontribution ou une filière à responsabilité élargie du producteur (REP), pour ne plus faire peser le coût de traitement de ces déchets sur les structures publiques, et donc sur les contribuables ?

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité .  - Ce problème est commun à tous les pays européens. Plusieurs propositions de loi visant à restreindre la vente du protoxyde d'azote et à prévenir les risques associés seront prochainement examinées par le Parlement. L'une prévoit d'intégrer les bouteilles et cartouches contenant ce gaz à l'actuelle filière REP pour les produits chimiques ; cela semble plus pertinent que de créer une nouvelle filière.

La mise en place d'une soupape de sécurité est une piste intéressante, mais relève de la réglementation internationale relative aux équipements sous pression transportables : son adoption est conditionnée à l'avis favorable de la majorité des pays signataires.

Soyez toutefois assurée de l'attention que porte Agnès Pannier-Runacher à ce dossier.

La séance est suspendue à 12 h 40.

Présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 30.

Souveraineté alimentaire et agricole (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d'orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.

Explications de vote

M. Vincent Louault .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Ce projet de loi d'orientation agricole, dont hélas les agriculteurs n'attendent plus grand-chose, traite d'enjeux cruciaux : souveraineté agricole et alimentaire, intérêt général majeur, intérêt fondamental de la nation, compétitivité, adaptation climatique et environnementale, transmission et pérennité des exploitations, allègement des contraintes.

Hélas, nombre de ces mesures n'ont pas été défendues, par manque de courage et d'ambition. On nous promettait une grande loi d'orientation, et nous voilà devant un périmètre réduit à peau de chagrin. Madame la ministre, vous n'êtes pas responsable de la situation : vous avez fait le job.

Il faut cesser d'opposer agriculture et environnement. Le droit de l'environnement ne doit plus être utilisé seulement pour bloquer les projets. La Charte de l'environnement primera toujours : nulle crainte donc que les vilains sénateurs ne fassent de la régression environnementale !

Je me suis battu pour que prévale l'intérêt général majeur et que l'on définisse la souveraineté agricole, la sécurité alimentaire, la sécurité sanitaire alimentaire : j'ai échoué. Avec mon groupe, nous n'avons pas voté les mesures de complexification, comme sur la haie. La commission mixte paritaire (CMP) a du pain sur la planche. Transformer des milliers de kilomètres de bords de rivières en haies n'est pas acceptable. On a légiféré sur des sujets accessoires -  les haies, les chiens, la laine.

Ce projet de loi n'est qu'une étape. Le coup est parti, alors soyons positifs : j'aime à rêver que c'est un nouveau départ pour l'agriculture, face à la volonté décroissante, fondée sur de pseudo-attentes, inventées de toutes pièces par ceux qui attaquent la France. Mais si nous échouons à modifier nos trajectoires agricoles, rien ne bougera ailleurs.

Cette loi du plus fort que l'on cherche à nous imposer en France et en Europe, doit pourtant tous nous réveiller.

Je veux dire à mes collègues députés que l'ambition n'est pas la régression environnementale, mais la souveraineté et le courage. La régression, ce sont les marchands de peur, la décroissance et l'incrédulité face à la science. Votons, et que ce soir la CMP soit conclusive. Prouvons que les seuls à aimer la France sont ceux qui ont du courage. (Murmures à gauche)

Madame la ministre, merci de votre écoute et de votre ténacité. Continuons d'accélérer les réformes et retrouvons notre souveraineté ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Laurent Duplomb .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Franck Menonville applaudit également.) Jules Romain, originaire de Saint-Julien-Chapteuil en Haute-Loire, écrivait en 2019... (Rires) ... en 1919 : « Je suis né de petites gens/ gagnant peu pour beaucoup de peine./ Mes aïeux ont tiré de terre/ plus de blé qu'ils n'ont eu de pain... »

Nos sociétés modernes ont oublié le lien entre produire sa nourriture et vivre dignement. De famines en disettes, de jacqueries en révolutions, la France a connu plus de périodes de manque que de périodes de stabilité alimentaire. Après la défaite de Sedan, les Parisiens ont mangé les éléphants du zoo ; les tickets de rationnement n'ont que 80 ans ; Rome, à la fin de l'Empire, stockait sept années de besoins. On l'oublie ! On finit par ne plus avoir peur et se dire que l'on pourrait se passer de produire. Comme dans la fable de La Fontaine, certains chantent comme la cigale, en se moquant de la fourmi. On en vient à stigmatiser l'acte de production agricole en faisant des paysans les assassins de la nature.

Après des siècles d'asservissement aux seigneurs, après avoir été la chair à canon de multiples guerres, après avoir, selon les mots de Gambetta, chaussé les sabots de la République, après avoir modelé les paysages de France à la sueur de leur front, les agriculteurs auraient pu avoir enfin gagné la confiance, la liberté, la légitimité. Eh bien non ! Le naturel revient au galop. Contraindre, empêcher, entraver sont les nouveaux maux de nos paysans. On marche sur la tête !

On leur interdit des moyens de production que l'on autorise aux importations. On les traite de productivistes et d'industriels, alors qu'ils vivent sur des exploitations familiales, avec 60 vaches en moyenne, bien loin des 30 000 bovins des feedlots canadiens !

La loi d'orientation agricole fixe un nouveau cap pour l'agriculture française. Loin d'être des enfants gâtés qui oublieraient le passé et se persuaderaient de leurs propres forfaitures, nous allons enfin ériger la souveraineté alimentaire en intérêt fondamental de la nation et veiller à ce qu'elle ne régresse plus. C'est le seul moyen de nourrir toutes les bouches, y compris les plus pauvres.

Il est grand temps de réagir et de reprendre notre destin en main. Il faut stopper ce délire décroissant et cette folie normative, qui nous mettent sur le chemin du déclin. (Protestations à gauche)

Il ne restera bientôt plus rien de notre excédent commercial. Ce que nous exportons, c'est plus qu'une denrée alimentaire, c'est une histoire de paysans, des savoir-faire, un terroir, un labeur.

Ces mauvais résultats nous obligent. Nous ne pouvons plus regarder passivement décliner la France agricole, car avec elle c'est notre histoire que nous injurions, c'est notre patrimoine que nous dilapidons. (Mme Nicole Bonnefoy s'exclame.)

Cet après-midi, j'ai une pensée pour les producteurs de noisettes, de kiwis, de cerises, de pommes, de bananes, d'endives, de betteraves, de pommes de terre (applaudissements qui s'amplifient sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations qui s'amplifient à gauche) mais aussi pour les éleveurs de porcs et de volailles ; la liste n'est pas exhaustive, tant le problème est grave.

Oui, changeons de modèle, mais de modèle de pensée ! (Brouhaha qui s'intensifie à gauche, l'orateur ayant épuisé son temps de parole.)

Jean-Jacques Rousseau disait en 1792 : « L'agriculture est le premier métier de l'homme ; c'est le plus honnête, le plus utile et par conséquent le plus noble qu'il puisse exercer. » (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bernard Buis .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Ce projet de loi aura traversé toutes les saisons. Présenté au printemps dernier en conseil des ministres, il a subi la sécheresse législative de l'été, avant d'être laissé en jachère à l'automne. Son parcours se termine à la fin d'un hiver fertile en sujets agricoles. Sans hésitation, le RDPI le votera, pour trois raisons : parce qu'il apporte des solutions adaptées au défi du renouvellement des générations ; parce qu'il érige la souveraineté alimentaire au rang d'intérêt fondamental de la nation ; parce qu'il introduit des mesures utiles, notamment en matière de haies.

S'agissant du renouvellement des générations, je salue la création des contrats territoriaux, du bachelor agro, du nouveau guichet départemental unique et de l'aide au passage de relais.

Le Mercosur et la pandémie de covid en ont montré toute l'importance de la notion de souveraineté, notamment alimentaire. Mais face aux enjeux environnementaux, le monde agricole a parfois le sentiment d'être relégué au second plan. Il ne s'agit pas de placer l'agriculture au-dessus de l'environnement, mais de trouver un juste équilibre.

Des mesures essentielles ont été introduites dans ce texte -  je pense à l'évolution du cadre juridique applicable à la haie. Je me félicite de l'adoption de mon amendement qui sécurise la réouverture des chemins ruraux et espère que celui qui intègre la proposition de loi de M. Salmon sera maintenu par la CMP.

Ce texte ne réglera pas l'ensemble des problèmes, mais posera des fondements solides pour un sursaut patriote agricole. J'espère qu'il sera complété par d'autres textes, sur le revenu et le foncier. Faisons en sorte que la CMP soit conclusive avant l'ouverture du salon de l'agriculture.

Retissons ensemble le lien de confiance avec celles et ceux qui font de notre agriculture une fierté française. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Henri Cabanel .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) La grande loi agricole promise par Emmanuel Macron en avril 2022 est sur le point de voir le jour. Néanmoins, le contexte et son contenu ont radicalement changé. Le constat est pourtant toujours le même : le déclin de la puissance agricole française.

Si l'objectif d'amélioration de la compétitivité demeure, l'atténuation de l'ambition écologique invite à la vigilance. L'agriculture est pourtant l'un des secteurs les plus dépendants du climat et de l'écosystème. L'objectif d'une agriculture économiquement et écologiquement viable doit être préservé pour sortir de l'opposition entre agriculture et environnement. Or j'ai constaté certaines crispations quand il était question de transition agroécologique.

Le diagnostic des projets agricoles est désormais beaucoup plus économique qu'environnemental et son caractère non obligatoire me pose question, au regard notamment de la performance agronomique des sols. Car en soixante ans, nos sols ont perdu 80 % de leur matière organique et entre 70 et 90 % de leur population bactérienne et fongique. Installer des jeunes sur des sols qui ne fonctionnent pas est une erreur ; le faire en connaissance de cause est irresponsable.

Je regrette le rejet d'une septième mission pour l'enseignement agricole, avec des modules de formation aux tâches administratives, qui représentent jusqu'à 25 % du temps de travail des agriculteurs.

Faire de notre agriculture une grande cause nationale n'est pas une incantation. Recréer un lien entre l'urbain et le rural, entre le travailleur de la terre et le jardinier du dimanche, est nécessaire.

Ce texte apporte des réponses au défi du renouvellement des générations : augmentation du nombre d'élèves dans l'enseignement agricole, meilleure visibilité des filières de formation, mise en place d'un guichet unique. Un grand absent : le foncier agricole. Madame la ministre, vous vous êtes engagée à déposer un projet de loi, mais ne faudrait-il pas une mission en amont ?

La dépénalisation de certaines atteintes environnementales me pose question, même si cela va dans le sens de la simplification. J'attends de la CMP un dispositif plus proportionné, qui respecte le principe de non-régression environnementale. L'équilibre entre souveraineté, simplification, compétitivité, climat et biodiversité ne me semble pas respecté dans le texte, malgré vos efforts, madame la ministre.

Attention à ne pas prendre trop de retard dans la transition vers l'agroécologie, alors que la mission « Agriculture » du projet de loi de finances a été amputée de 200 millions d'euros supplémentaires en CMP : cela prouve que la planification écologique est la variable d'ajustement. J'attends de la CMP qu'elle nous fasse avancer vers un modèle d'agriculture protecteur de l'environnement et plus résilient, en attendant d'être plus rémunérateur.

La majorité du RDSE s'abstiendra en attendant les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du GEST, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

M. Patrick Chauvet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Nous votons un projet de loi important, aboutissement de plusieurs mois de discussions. Il s'inscrit dans un contexte où les attentes des agriculteurs sont pressantes. N'oublions pas ces travailleurs de la terre, ces femmes et ces hommes, qui consacrent leur vie à nous nourrir.

« On marche sur la tête ! » Ce cri de désespoir dénonce les injonctions contradictoires. Les agriculteurs demandent de la reconnaissance. On demande aux agriculteurs de respecter des normes, alors que l'on est tolérant vis-à-vis des produits importés. Nous donnons les moyens à d'autres de produire et non à nos propres agriculteurs...

Chaque semaine, les agriculteurs consacrent neuf heures aux tâches administratives. Ils aspirent à une concurrence à armes égales. Aussi, ils demandent une harmonisation des normes entre États européens et une exception agricole européenne vis-à-vis des pays tiers. La législation française aggrave les inégalités de concurrence : pas moins de 37 % des agriculteurs évoquent un système à bout.

Ce texte s'inscrit dans un contexte difficile. Dès 2022, la commission des affaires économiques alertait sur le décrochage de la ferme France. La situation, déjà préoccupante, s'est encore aggravée. En témoigne la diminution de l'excédent commercial agroalimentaire, qui est passé de 12 milliards à 4,9 milliards d'euros entre 2011 et 2024.

Ce texte manque d'un véritable volet économique. Bien que l'aspect environnemental soit primordial, n'oublions pas que le développement durable de l'agriculture repose sur le triptyque équilibré : humain, économique et environnemental. Or ce texte accorde une place prépondérante au pilier environnemental. (Mme Raymonde Poncet Monge ironise.) Les agriculteurs doivent vivre dignement de leur métier, avec des perspectives économiques claires.

Néanmoins ce projet de loi comporte des avancées, comme le droit à l'essai et le droit à l'erreur. Faisons confiance à nos agriculteurs et laissons-les innover.

Il contient aussi des mesures de bon sens, qui allègent les charges administratives : la facilitation des interactions entre Vivea et le compte personnel de formation (CPF) ; le développement des collaborations entre centres d'apprentissage et centres de formation continue ; des mesures sur les groupements d'employeurs.

L'installation des femmes en agriculture est aussi encouragée, avec de réelles avancées. Les agricultrices ne sont que 100 000 ; elles étaient 1 million à la fin des années 1960.

Mais ce texte est aussi la voiture-balai de diverses propositions de loi : eau et assainissement, gestion des haies, santé des sols, etc. Ce n'est pas une pratique nouvelle, mais cela illustre combien le Gouvernement cherche à légiférer a minima. Cela alourdit les textes et les rend moins intelligibles.

Certains points nécessitent des ajustements : ce projet de loi est censé impulser les installations ; or on voit déjà poindre des débats sur le foncier et le revenu agricole. L'examen s'est parfois concentré sur des points sémantiques ou accessoires, qu'il s'agisse du guichet unique ou des haies. Cela interroge sur les irritants absurdes et sur l'inflation législative.

Malgré cela, ce projet de loi est un pas en avant, car il permet de lever des obstacles bien identifiés et de dégager de nouvelles marges de manoeuvre pour les agriculteurs, en complémentarité avec la proposition de loi Duplomb-Menonville. (Murmures à gauche ; M. Yannick Jadot appelle l'attention du président en levant les bras au ciel, l'orateur ayant dépassé son temps de parole.)

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Patrick Chauvet.  - Le groupe UC votera ce texte et souhaite une CMP conclusive. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Gérard Lahellec .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER) Les hasards du calendrier ont voulu que nos débats coïncident avec les élections aux chambres d'agriculture. Dans le strict respect d'un scrutin qui appartient aux agriculteurs et aux salariés agricoles, on peut dire que la colère continue de s'exprimer dans le monde paysan, et c'est normal. Leur revenu n'est jamais garanti, car les prix agricoles ont été anormalement bas depuis deux ans dans toutes les filières de production. Les aides à l'hectare de la PAC perçues par certains exploitants céréaliers expliquent la colère de nombre de paysans qui vivent sur de petites exploitations.

La loi d'orientation agricole aurait pu infléchir un certain nombre d'orientations et aller dans le sens du développement durable de notre agriculture. Mais il n'en a rien été. Pour ce texte, la planche de salut de notre agriculture serait la compétitivité à tout prix, en s'affranchissant de contraintes réglementaires et de préconisations scientifiques. Cela alimente une fracture entre la société et ses agriculteurs. Certes la paperasserie exaspère les agriculteurs et il faut supprimer les lourdeurs, mais n'en profitons pas pour réduire les normes. Les labellisations, ce sont aussi des normes ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER et du GEST)

Mme Cécile Cukierman.  - Exactement.

M. Gérard Lahellec.  - Pour répondre à l'intensification de la productivité, on met à mal l'agroécologie et l'agriculture bio. Cela crée un clivage opposant agriculture et écologie. (M. Bruno Sido s'exclame.) Certes, l'agriculture de production est indispensable à la survie de l'humanité. Mais nous devons nous remettre en question : il n'est pas question de promouvoir un modèle industriel, avec des unités de 75 000 bêtes qui prennent un kilo par jour, comme au Texas !

Enfin, la mondialisation des prix est une aberration ; or la loi n'en dit rien. À défaut de remettre en cause l'intégration de l'agriculture dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC), il eût été pertinent de travailler sur de nouveaux mécanismes de régulation. Nous touchons aux limites des lois Égalim, mais l'origine des problèmes reste la loi de modernisation de l'économie (LME) de 2008.

Enfin, en matière d'installation et de renouvellement des générations, la question de l'accès au foncier et de sa gestion est essentielle ; pourtant, elle n'est même pas abordée.

Je regrette que la pêche soit très peu évoquée. Nombre de parlementaires bretons l'ont regretté...

M. Max Brisson.  - Pas que bretons !

M. Gérard Lahellec.  - Je regrette aussi la trop faible place laissée à l'élevage. Un proverbe breton dit : la terre est faite pour être entre les pattes des animaux. Si la société a perdu confiance dans l'industrie agroalimentaire, nos concitoyens croient à la sincérité des éleveurs, qui travaillent au contact de la nature et qui façonnent nos paysages.

Voilà pourquoi nous nous opposons à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, du GEST et sur quelques travées du groupe SER ; M. Philippe Grosvalet applaudit également.)

M. Daniel Salmon .  - (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER) Je déplore le calendrier, soudainement accéléré, qui empêche l'examen de ce texte dans de bonnes conditions. (Mme Dominique Estrosi Sassone s'exclame.) Tout cela pour quelques effets d'annonces du Président de la République au Salon de l'agriculture !

Population agricole et biodiversité s'effondrent en même temps, à cause d'un modèle insoutenable - c'est votre bilan !

Ce texte aurait dû refonder ce modèle en direction de l'agroécologie, face au défi immense du changement climatique et à l'effondrement de la biodiversité. Mais il s'emploie à détourner la colère des agriculteurs des véritables responsables, sans répondre à la question centrale des prix rémunérateurs : comment peut-on travailler 70 heures par semaine pour gagner moins d'un Smic ? Il ne relève le défi ni de l'accès au foncier, ni de l'accaparement des terres, ni de la fragilisation de l'élevage, renvoyant ces sujets à de futurs textes.

Aucune réponse à l'aggravation des inégalités dans le monde agricole - qui y a-t-il de commun entre les grands céréaliers qui captent l'essentiel de la PAC et les petites exploitations de polyculture-élevage ou les maraîchers ?

En refusant de donner un cap vers la transition, vers le pluralisme, vous renforcez l'évolution vers l'agro-industrie ; vous nous emmenez dans l'impasse.

En effectuant une lecture fallacieuse des données, en niant les faits scientifiques, vous prenez une lourde responsabilité.

Pendant ces six jours de débat, aucun apport structurant de la gauche n'a été accepté ; c'est rare.

Presque tous nos amendements ont été rejetés, qu'il s'agisse de celui visant à mieux réguler le foncier, mis à la trappe par l'arbitraire article 45, ou de ceux tendant à mieux former les agriculteurs de demain, à assurer un soutien à l'agriculture biologique, à instituer une gouvernance pluraliste et démocratique, à améliorer le revenu ou à relocaliser l'alimentation.

Une seule éclaircie : l'intégration de la proposition de loi en faveur de la gestion durable et de la reconquête de la haie, adoptée à l'unanimité. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

Vous ne voyez la souveraineté alimentaire qu'au prisme de la compétitivité, donc sans respect pour celle des autres pays et en trompe-l'oeil, car sous la dépendance des engrais importés, du soja importé et demain des technologies.

Toute référence à l'agriculture biologique a été supprimée.

Cette loi ignore les grands défis du XXIe siècle. L'agriculture émet 19 % des gaz à effet de serre, mais rien dans ce texte pour qu'elle prenne sa part dans la réduction des émissions. Plutôt que d'agir, vous propagez la défiance à l'égard des agences de l'État comme l'Anses, dont l'expertise scientifique et l'indépendance sont fondamentales en ces temps troublés.

Le principe « pas d'interdiction sans solution » est une attaque délibérée contre la biodiversité et la santé humaine, et ce dispositif ne devrait pas tenir devant le Conseil constitutionnel.

Vous n'êtes pas au rendez-vous des enjeux de l'enseignement agricole. Le bachelor agro, qui formate les agriculteurs à la concurrence, est un entonnoir vers l'endettement et l'agrandissement.

Aucune mesure concrète pour soutenir les installations actuelles en agroécologie pour répondre aux attentes d'une majorité de futurs agriculteurs. Il aurait fallu un vrai pluralisme dans France installations-transmissions. Idem sur le diagnostic modulaire, dont vous avez écarté les aspects sociaux et environnementaux.

Nous sommes toujours sidérés par l'article 13 - une des pires régressions du droit de l'environnement - qui dépénalise la destruction des espèces protégées. Vous allez contre la directive européenne de protection et serez censurés - comptez sur notre vigilance.

L'article 15 ampute la concertation et le débat pour mieux industrialiser l'agriculture.

Nous voterons résolument contre ce texte à contresens de l'histoire. Non, les décisions politiques ne peuvent être dictées par les voix les plus bruyantes ou les intérêts d'une minorité, au mépris du pluralisme et de la démocratie. Nous continuerons à lutter pour la rémunération des paysans et leur capacité demain de produire sur des sols vivants. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Bravo !

M. Jean-Claude Tissot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST) Nous voilà au bout, ou presque, du parcours législatif tumultueux de ce projet de loi d'orientation agricole - six jours de séance et 35 heures de débat.

Nous avions reçu de l'Assemblée nationale un projet bavard et imparfait. (Mme Annie Genevard le déplore.)

Dans une connivence permanente avec le Gouvernement, le Sénat en a fait une loi-fleuve et floue avec une connotation encore plus économique, dans une vision dépassée de l'agriculture.

Ne faudrait-il pas appeler ce texte « projet de loi d'orientation vers une agriculture productiviste » ou « passéiste » ? (Mme Annie Genevard et MM. Laurent Duplomb et Franck Menonville le contestent.)

À coups de dogmes pro-industrie agroalimentaire et anti-environnement, on est loin du grand soir de l'agriculture - sur ce point, monsieur le rapporteur Duplomb, vous avez raison. (On s'en amuse sur les travées du groupe SER et du GEST.)

Vous perpétuez la trajectoire agro-industrielle de l'agriculture, tournée vers le gigantisme, l'accaparement des terres, le productivisme à tout va. Nous soutenons deux modèles qui s'opposent frontalement et je ne vois pas où nos positions pourraient se rapprocher.

M. Laurent Duplomb, rapporteur.  - Ça, c'est vrai !

M. Jean-Claude Tissot.  - Ni la crise sanitaire, ni la crise environnementale, ni le renouvellement des générations ne se voient proposer des solutions à la hauteur. Au bout du bout, ce sont les paysans qui paieront la note.

Je suis très inquiet pour l'avenir de notre agriculture. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie réclame que l'on écoute l'orateur en silence.) Qui peut croire que le modèle hyperproductiviste est attractif pour les jeunes ? Il consacre l'entre-soi d'exploitations gigantesques et incessibles. C'est votre modèle qui nous a conduits ici. (Marques d'approbation sur les travées du groupe SER) Or vous le prolongez.

Votre projet France installations-transmissions n'est pas une mauvaise idée, mais c'est un pansement sur une jambe de bois, madame la ministre - utile uniquement si nous nous orientons vers des exploitations à taille humaine.

Je suis inquiet pour les agriculteurs et leur santé. Le texte revient sur l'interdiction des produits phyto en la conditionnant à des solutions « économiquement viables et techniquement efficaces » - notion floue juridiquement. Mais comme vous refusez toutes les alternatives, vous autorisez !

M. Laurent Duplomb, rapporteur.  - Alternative pendant dix ans.

M. Jean-Claude Tissot.  - Une tribune signée par 1 500 professionnels nous appelait à ne pas faire la même erreur qu'avec l'amiante.

Le sens de l'histoire, c'est de se débarrasser définitivement des pesticides. Que direz-vous à vos petits-enfants qui développeront des cancers ou qui seront infertiles ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Laurent Duplomb, rapporteur.  - Et s'ils crèvent de faim ?

M. Jean-Claude Tissot.  - Les offensives contre l'agroécologie relèvent d'une bataille idéologique des rapporteurs : il ne reste plus que trois occurrences du terme, d'ailleurs.

M. Laurent Duplomb, rapporteur.  - Même pas, on a tout enlevé...

M. Jean-Claude Tissot.  - Aucune mention dans l'article premier, pourtant bavard. La suppression des objectifs de surface agricole en agriculture biologique est un énième signal terriblement décevant.

Vos grands concepts incantatoires seront, au mieux, simplement déclaratifs, mais au pire constitueront des appuis légistiques afin de déroger au respect des engagements environnementaux.

L'article 13 qui allège le régime de répression des atteintes à la biodiversité et l'article 15 qui accélère les contentieux contre les mégabassines et les fermes gigantesques sont deux reculs environnementaux inacceptables.

Je m'interroge sur le passage en force de dispositions controversées. Le Conseil d'État a relevé que les notions d'intérêt fondamental de la nation, d'intérêt général majeur et de non-régression de la souveraineté alimentaire étaient juridiquement floues et donc potentiellement dangereuses. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie réclame de nouveau le silence.) Il a indiqué que l'article 15 présentait des risques d'inconstitutionnalité. La Défenseure des droits a considéré qu'il restreignait, « de manière disproportionnée le droit au recours des opposants. »

Vous avez fait fi de ces avis, comme de ceux de l'Anses et de l'Inrae.

Vous avez profité du contexte pour inclure un panel de mesures érigeant l'agriculture productiviste comme seul modèle. Or le seul modèle viable est celui d'une agriculture raisonnée, à taille humaine, garantissant un revenu agricole digne. Cela passe par une refonte de la PAC, dont la distribution est injuste.

Sans de réelles avancées, nous ne donnerons pas l'envie et l'espoir aux générations futures de s'investir dans ce beau métier de paysan.

M. le président.  - Il faut conclure. (Protestations à gauche ; on s'impatiente à droite, l'orateur ayant épuisé son temps de parole.)

M. Jean-Claude Tissot.  - Nous ne pouvons pas faire autrement que de voter contre ce texte. (« Bravo » et vifs applaudissements à gauche ; Mmes Marie-Pierre de La Gontrie et Laurence Harribey félicitent l'orateur qui regagne sa place.)

M. Joshua Hochart .  - Après des années d'inaction, nous nous réjouissons que les choses bougent. La version sénatoriale du texte comporte des avancées. Certaines de nos propositions sont reprises (on ironise à gauche) : priorité aux agriculteurs français, lutte contre la concurrence déloyale et l'inflation normative... C'est une prise de conscience. Le Rassemblement national l'a toujours dit : la souveraineté alimentaire doit être une priorité.

Mme Cécile Cukierman.  - Ça va !

M. Joshua Hochart.  - Les agriculteurs n'en peuvent plus : fiscalité accablante, normes absurdes, distorsion de concurrence. Pendant que nos paysans se battent pour survivre, l'État les laisse seuls.

Ce texte apporte des réponses, mais ce n'est qu'un début : allègement partiel des charges, meilleure prise en compte des contraintes des agriculteurs, renforcement de la souveraineté alimentaire et du soutien aux filières.

Cela dit, le texte ne s'attaque pas à la racine des problèmes : charges trop lourdes et distorsions de concurrence persistent. Nous aurions voulu des mécanismes plus contraignants pour interdire l'importation de produits qui ne respectent pas nos normes, une refonte plus ambitieuse de la fiscalité agricole et un cadre plus protecteur pour garantir une juste rémunération.

Mme Cécile Cukierman.  - Et vos amis de la Coordination rurale ?

M. Joshua Hochart.  - Nous voterons ce texte, car il serait irresponsable de refuser ses avancées, mais avec lucidité.

Chers collègues de la majorité, vous avez retravaillé le texte qu'avait pour ainsi dire détruit une Assemblée nationale gangrenée par la gauche et l'extrême gauche (protestations et marques d'ironie à gauche), nous le soutiendrons.

Je m'adresse aux membres de la CMP : assumez votre responsabilité, faites en sorte qu'on aboutisse à une version acceptable, afin que les agriculteurs soient écoutés et que leur quotidien soit vraiment amélioré. (Mme Cécile Cukierman ironise.)

Puisse ce texte ne pas être qu'un effet d'annonce... La France ne peut être forte et souveraine sans ses paysans ! (MM. Christopher Szczurek, Stéphane Ravier, Alain Duffourg et Mme Vivette Lopez applaudissent.)

Scrutin public solennel

Le projet de loi Souveraineté alimentaire et agricole est mis aux voix par scrutin public solennel.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°196 :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 325
Pour l'adoption 218
Contre 107

Le projet de loi Souveraineté alimentaire et agricole est adopté.

(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP et sur quelques travées du groupe UC ; MM. Joshua Hochart, Christopher Szczurek et Stéphane Ravier applaudissent également.)

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Je vous remercie de l'adoption de ce projet de loi d'orientation agricole. Vous honorez l'engagement pris auprès des agriculteurs voilà un an. Je remercie Mme la présidente de la commission des affaires économiques, ainsi que les deux rapporteurs, Franck Menonville et Laurent Duplomb. Je remercie tous ceux qui, quels que soient les groupes, ont pris part au débat, dans des positions souvent différentes de celles du Gouvernement. J'ai aussi une pensée pour les députés et l'auteur de ce projet de loi, Marc Fesneau.

Loin des caricatures que j'ai entendues, ce texte nous engage vers un réarmement de notre puissance alimentaire. (Marques d'ironie à gauche) Notre agriculture a été élevée au rang d'intérêt national majeur et le potentiel de notre agriculture à celui d'intérêt fondamental pour la nation. Place des femmes, régénération agricole française, diagnostic modulaire, droit à l'essai, guichet unique, dépénalisation des atteintes involontaires (rires sur les travées du GEST) à l'environnement...

M. Thomas Dossus.  - C'est une honte !

Mme Annie Genevard, ministre.  - ... sont autant d'acquis. Monsieur Salmon, 20 millions d'euros seront débloqués pour la haie.

M. Daniel Salmon.  - Bravo !

Mme Annie Genevard, ministre.  - Nous ne sommes pas hostiles à l'environnement. Opposer agriculture et environnement est une impasse. (On ironise sur les travées du GEST ; applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP et sur quelques travées du groupe UC)

La CMP aura lieu ce soir ; elle devrait aboutir avant minuit. Je ne voudrais pas commencer le salon de l'agriculture en disant aux agriculteurs : « Les parlementaires ne vous ont pas entendus. » (Marques d'ironie à gauche) J'aimerais qu'on leur dise au contraire : « Les parlementaires vous considèrent et reconnaissent votre rôle fondamental ». (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP et sur quelques travées du groupe UC)

M. le président.  - Je remercie les rapporteurs au fort tempérament et la présidente de la commission qui s'est engagée en écoutant tout le monde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes INDEP et UC)

La séance est suspendue quelques instants.

Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente

Mise au point au sujet de votes

Mme Marie-Carole Ciuntu.  - Lors du scrutin public n°191 Marie-Do Aeschlimann et moi-même souhaitions nous abstenir. Lors du scrutin n°196, Alain Chatillon souhaitait voter pour.

Acte en est donné.

CMP et commission d'enquête (Nominations)

Mme la présidente.  - Des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture, ainsi qu'à la commission d'enquête sur les pratiques des industriels de l'eau en bouteille et les responsabilités des pouvoirs publics dans les défaillances du contrôle de leurs activités et la gestion des risques économiques, patrimoniaux, fiscaux, écologiques et sanitaires associés ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Principe de laïcité dans le sport

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport, présentée par M. Michel Savin (applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) et plusieurs de ses collègues.

Discussion générale

M. Michel Savin, auteur de la proposition de loi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Michel Laugier applaudit également.) Je remercie Mathieu Darnaud et le groupe Les Républicains d'avoir inscrit cette proposition de loi à l'ordre du jour. Je remercie notre collègue Stéphane Piednoir pour la qualité de son travail en tant que rapporteur.

L'actualité le rappelle trop régulièrement, la conception française de la laïcité doit être protégée, alors que certains veulent faire vaciller nos valeurs républicaines. Nous constatons, impuissants, l'emprise des valeurs communautaires dans les enceintes sportives, après les écoles. Je partage les propos de Bruno Retailleau : pour lutter contre l'islamisme des Frères musulmans et leur entrisme, il faut étendre le champ de la laïcité à d'autres espaces publics, par exemple aux compétitions sportives.

Si la laïcité garantit la liberté de conscience et la liberté religieuse de chacun, elle pose un cadre à l'exercice de ces libertés, qui est de ne pas troubler l'ordre public.

Différents rapports et enquêtes se succèdent pour souligner la fragilité du sport face à la radicalisation et aux dérives contraires aux principes de la République. Pour ma part, j'ai la certitude que les valeurs de dépassement de soi, d'intégration et d'universalité inhérentes au sport permettront d'étendre son accès à tous, et ce, quelles que soient son origine, sa religion ou ses convictions politiques.

Mme Mathilde Ollivier.  - C'est le contraire !

M. Michel Savin.  - Autant de valeurs essentielles à l'opposé des objectifs poursuivis par les architectes du séparatisme religieux et du prosélytisme, qui cherchent à grignoter méticuleusement du terrain et à éprouver en permanence les limites de nos principes républicains. D'aucuns se réfugient derrière l'idée que ces faits demeurent marginaux. À ceux qui prônent la complaisance, je répondrai qu'un peu c'est déjà trop, et que la progression rampante de ce phénomène suscite l'inquiétude d'un nombre croissant d'acteurs des milieux sportifs.

Deux exemples : une fédération française d'art martial signale des clubs où les filles sont voilées, ont un entraîneur féminin et refusent le moindre contact visuel avec des garçons ; un match de basket féminin dans le Tarn annulé le 6 octobre 2024 en raison de la présence d'une joueuse voilée.

Le port du voile n'est pas explicitement interdit, or il ouvre la porte à l'émergence de clubs communautaires promouvant ouvertement le port de signes religieux.

Dépassés par les pressions et les menaces, les dirigeants sportifs, responsables associatifs et élus locaux pâtissent d'un flou juridique qui nourrit la confusion. Notre mobilisation doit être totale pour assurer leur protection. La loi confortant le respect des principes de la République, adoptée en 2021, a apporté quelques réponses à cette problématique, notamment grâce au Sénat. Mais tous les moyens n'ont pas été mis en oeuvre.

Certaines fédérations sont démunies face à l'absence de normes générales édictées par l'État. Chacun peut exercer librement sa religion ; mais sur un terrain de sport, lors des compétitions, la neutralité s'impose.

M. Thomas Dossus.  - C'est faux.

M. Michel Savin.  - Le Conseil d'État a reconnu aux fédérations sportives délégataires d'un service public la faculté d'interdire les signes religieux ostensibles lors des matchs pour prévenir tout affrontement ou confrontation sans lien avec le sport, mais cela ne suffit plus. Il est temps de sanctuariser le domaine sportif et de réaffirmer haut et fort que la République prime sur la loi religieuse. Il faut donner un vrai soutien législatif aux fédérations.

À ceux qui prétendent que ce texte interdirait à certaines femmes de pratiquer une activité sportive, je réponds que cette proposition de loi se limite aux compétitions organisées par une fédération ayant une délégation de service public - des rencontres officielles où sont représentés un club, une ville, un territoire. Ce texte n'impacte pas la pratique du quotidien.

Mme Mathilde Ollivier.  - Bien sûr que si !

M. Michel Savin.  - Les équipements sportifs ne doivent pas être détournés de leur destination. Le service central du renseignement territorial (SCRT) signale des prières sur les terrains de football à Perpignan, le rejet de la mixité dans certains clubs de sport, des pressions exercées sur les encadrants, des éducateurs fichés comme salafistes utilisant des tapis de prière dans les gymnases, bref un phénomène découlant d'un repli communautaire observé dans plusieurs quartiers où les fondamentalistes religieux ciblent les jeunes, mêlant sport et pratiques religieuses, notamment en transformant les vestiaires et les gymnases en salles de prière.

Autre exemple : en novembre dernier, la préfecture de l'Hérault a demandé à la fédération française de football d'adopter des mesures de suspension à titre conservatoire contre un club pour des rituels de prière accompagnés de musique religieuse diffusée par les joueurs dans les vestiaires à l'avant-match.

Il est anormal que les équipements soient utilisés à la fois pour le sport et la religion. Pratique religieuse ou sportive, il faut choisir. Les prières au sein des équipements sportifs sont incompatibles avec la neutralité exigée par l'État dans le sport.

Il convient aussi de prévoir dans la loi le respect de la laïcité dans les règlements des piscines. Le non-respect des règles communes rompt la promesse d'égalité entre les usagers et peut porter atteinte au bon fonctionnement d'un service public comme une piscine municipale.

Cette vision de la France et de la liberté d'expression n'est pas celle qui est reconnue et promue par la République française. Ces actions ne visent qu'à polariser les comportements de chacun.

Mme Mathilde Ollivier.  - Ça, c'est vous !

M. Michel Savin.  - Il n'est pas satisfaisant que les interdictions en matière religieuse fassent l'objet d'interprétations juridiques divergentes. Il est incompréhensible que le port du burkini soit interdit à Grenoble et autorisé à Rennes. L'absence de cadre législatif paralyse la prise de décision, expose les fédérations et limite le contrôle et les possibilités de sanction.

Ce texte a pour objet de nous doter des instruments nécessaires pour lutter contre le communautarisme et le prosélytisme, opérant un juste équilibre entre préservation des libertés individuelles et respect des principes qui unissent la République. Pour défendre les valeurs du sport au quotidien, il faut lutter contre la propagande religieuse et le repli communautaire.

Cette proposition de loi n'est pas un combat contre une religion, mais contre une idéologie politique qui défigure une religion, divise les individus et déchire une société. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Daniel Chasseing et Stéphane Ravier applaudissent également.)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport .  - La proposition de loi de Michel Savin traite d'un sujet essentiel, la laïcité, un des fondements de la République inscrit à l'article 1er de la Constitution. Elle repose sur un équilibre entre la liberté de conscience dans la sphère privée et la neutralité dans la sphère publique.

Ouvrons les yeux : avec 58 % de licenciés de moins de 20 ans, dont 6,3 millions ont moins de 13 ans, le sport joue un rôle central dans l'éducation, le respect des règles communes et l'égalité. La seule différence admise sur le terrain est celle induite par le sport lui-même. Les revendications politiques ou religieuses n'y ont pas leur place, comme l'atteste la charte de l'olympisme en son article 50.2, selon laquelle « aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n'est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique. »

Dès 2003, le rapport de M. Bernard Stasi signalait l'émergence d'équipes communautaires et regrettait le recul de la pratique sportive féminine dans certains quartiers. Nous ne pouvons accepter cette seule alternative : se soumettre à la nouvelle règle de quelques-uns ou s'exclure et laisser le champ libre au communautarisme. Un précédent a eu lieu à l'école à la fin des années 1980. Il a fallu attendre quinze ans et la loi du 15 mars 2004 pour avoir une réponse. Jugée inopportune et inapplicable à l'époque, elle ne souffre plus de contestations aujourd'hui.

À l'image, selon les mots de Jean Zay, de l'école, « asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas », le sport doit rester la citadelle imprenable sur laquelle les attaques contre la laïcité se fracassent. Or le sport est le nouveau terrain d'expression du séparatisme. Ce phénomène est documenté par plusieurs rapports récents, notamment celui de la commission d'enquête du Sénat de 2020 sur la radicalisation islamiste.

Les atteintes à la laïcité, variées, sont constatées par de nombreux acteurs et remettent en cause le vivre-ensemble et l'universalité du sport. Elles sont difficiles à quantifier, mais quelques chiffres illustrent le phénomène. En cinq ans, 592 alertes ont été rapportées aux cellules de lutte contre l'islamisme radical et le repli communautaire (Clir). En 2021, la ministre Roxana Maracineanu déclarait que 127 associations sportives étaient liées à une mouvance séparatiste, dont 29 tenues par l'islam radical. Seules cinq d'entre elles ont été fermées ; 122 sont encore ouvertes, soit 11 000 sportifs concernés. Comment s'en accommoder ?

Extension du port du voile, prières collectives dans les vestiaires et sur les terrains, refus de saluer l'adversaire, demande de changement des horaires, refus de la mixité sont autant de phénomènes qui ont cours. Les disciplines les plus touchées sont le football, les sports de combat, le tir à l'arc et la musculation. Nous ne pouvons pas occulter ces phénomènes ni rester indifférents à ces alertes témoignant d'une érosion du lien social.

La proposition de loi de Michel Savin est bienvenue, car les outils existants sont insuffisants. Le contrat d'engagement républicain (CER), introduit par la loi Principes de la République du 24 août 2021, trop peu mobilisé, est perçu dans les faits comme une simple formalité administrative. Un seul retrait d'agrément a été effectué au titre du non-respect de ce contrat. Les préfectures et services déconcentrés du ministère des sports manquent de moyens. En 2022 et 2023, seuls 100 contrôles ont été effectués sur la laïcité et ont identifié six cas de séparatisme ; c'est déjà trop.

Sur le plan juridique, la jurisprudence a validé l'extension ciblée du principe de neutralité, opposable dans certains cas aux usagers du service public pour un bon fonctionnement du service. Il faut garantir l'égalité de traitement des usagers. Le Conseil d'État a confirmé cette approche à deux reprises : d'abord, l'interdiction par la Fédération française de football (FFF) de « tout port de signe ou tenue manifestant ostensiblement l'appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale » lors des compétitions. Il rappelle dans cette même décision du 29 juin 2023 l'obligation de neutralité des personnes sélectionnées dans les équipes de France, quel que soit le sport, obligation réaffirmée par la ministre Oudéa-Castéra dans la perspective des JOP.

Ensuite, dans une ordonnance du 21 juin 2022, le Conseil d'État a validé la suspension de l'autorisation du port du burkini à Grenoble.

Plusieurs fédérations, comme celles de football, de basket-ball ou de volley-ball ont adopté des règlements interdisant le port ostensible de signes religieux ou politiques en compétition. D'autres n'ont pas encore statué, et des pressions s'exercent sur elles. Il est temps de mettre en place un cadre pour tout le monde. Quelque 70 clubs de basket franciliens ont adressé une pétition à la suite de l'interdiction de la fédération de porter des signes à connotation religieuse ou politique. Des campagnes sont relayées sur les réseaux sociaux.

Je propose d'adopter la proposition de loi Savin telle que modifiée par la commission. Il s'agit d'interdire le port de signes religieux ou politiques ostensibles lors de compétitions, comme le Sénat l'avait déjà voté en 2021 et 2022. Ce texte interdit aussi tout exercice d'un culte dans les équipements sportifs et fait respecter les principes de laïcité et de neutralité dans les espaces de baignade.

Nous avons complété le texte pour autoriser des enquêtes administratives préalables à la délivrance de la carte professionnelle d'éducateur sportif.

Cette proposition de loi comble un vide juridique et apporte une réponse adaptée, sans stigmatiser ni exclure. Elle rappelle que le sport est un espace d'unité et d'universalité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Michel Laugier applaudit également.) Permettez-moi d'excuser Mme Barsacq qui ne pouvait être à la tribune aujourd'hui. L'été dernier, nous avons accueilli les 33es olympiades modernes dont le succès a transcendé les particularismes. Pendant un mois, la France a accueilli près de 15 000 athlètes qui ont fait preuve de dépassement de soi, mais aussi de solidarité et d'entraide. Nous avons vu les manifestations de joie des vainqueurs et les larmes des perdants.

Le sport est beau quand il nous réunit. Pendant ces JOP, les drapeaux étaient différents, mais l'unité était célébrée.

Alors que le Sénat examine la proposition de loi Savin, gardons à l'esprit que les salles de sport et les terrains ne peuvent être le terrain d'expression du séparatisme. Le sport est un lieu de partage et de fraternité.

Malheureusement, depuis les conclusions de la commission d'enquête sur la radicalisation islamiste, un nombre croissant d'associations et de clubs sportifs sont le terrain de manifestations d'islamisme radical et de manifestations identitaires et religieuses.

De 2019 à 2024, 761 contrôles ont été réalisés et un peu plus d'une dizaine de fermetures ont eu lieu. Le séparatisme est difficile à combattre car il est sournois : il se pare de discours vantant les libertés individuelles et les droits fondamentaux. Les Hijabeuses se sont abritées derrière le principe de non-discrimination pour s'affranchir des règles. C'est le principe de l'entrisme : faire reculer, étape par étape, les garde-fous de l'universalisme pour installer progressivement une société communautarisée et divisée. Ce n'est pas notre tradition et notre histoire.

Nos convictions républicaines sont solides. L'entrisme nous menace partout. La laïcité est un combat premier à mener partout et tout le temps. Nous nous sommes dotés d'instruments. Le vote de la loi du 24 août 2021 a été un moment important. La capacité des services déconcentrés en a été augmentée. En deux ans, 56 agents supplémentaires ont été positionnés pour lutter contre les séparatismes et les violences. Un réseau de référents opérationnels a aussi été mis en place. Enfin, les contrats de délégation sont un instrument de prévention en instaurant des référents de prévention dans les fédérations.

La proposition de loi, que le Gouvernement soutient avec force, apporte une pierre bienvenue à l'édifice qu'ensemble nous devons construire depuis des années contre toutes les formes de séparatisme.

Le Gouvernement a souhaité proposer des modifications rédactionnelles aux articles 1er et 3. L'amendement du Gouvernement à l'article 1er propose de préciser que l'interdiction du port de signes ostentatoires s'impose à toutes les compétitions organisées par les fédérations délégataires de service public, car c'est au nom du service public que le principe de laïcité s'impose.

Sur l'article 3 qui codifie l'interdiction du Conseil d'État du 21 juin 2022 relatif à l'autorisation par la ville de Grenoble du burkini dans ses piscines, notre rédaction est plus conforme avec l'esprit et la rédaction du Conseil d'État et nos principes constitutionnels.

Le sport est un formidable levier d'émancipation et d'inclusion. Ces valeurs ne peuvent être transmises que dans un environnement serein exempt de barrières communautaires.

La proposition de loi Savin répond à cette exigence. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Jean-Marie Vanlerenberghe et Claude Kern applaudissent également.)

M. Jacques Grosperrin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « Oui, aujourd'hui, les clubs sportifs et associations peuvent être des endroits de prosélytisme. On a reçu des signalements et pour moi, c'est une grande inquiétude. » Ainsi s'exprimait Patrick Kanner, alors ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. (On s'en amuse à droite.)

M. Max Brisson.  - Belle référence !

M. Jacques Grosperrin.  - Il ajoutait : « Ma position est très claire, pas de religion dans les clubs et l'État ne reconnaîtra pas et ne versera pas un centime à ceux qui sortent du cadre. » (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Patrick Kanner secoue la tête.)

Depuis, la commission d'enquête de Nathalie Delattre et Jacqueline Eustache-Brinio a aussi rendu ses conclusions.

Le 1er alinéa de la Constitution de 1958 rappelle que la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Nous devons être vigilants et protéger la laïcité, principe cardinal de la République. Face à cela, Les Républicains ont toujours appelé à un débat clair. La proposition de loi Savin et le rapport de M. Piednoir en témoignent.

Notre responsabilité collective est de sécuriser le sport, espace de dépassement. Il ne faut pas que des comportements fragilisent ce lieu. Est-il possible d'accepter que des jeunes filles pratiquent leur sport voilées alors qu'elles ne portent pas ce voile à l'école ? Peut-on accepter que les piscines aient des horaires réservés pour des ressortissants d'une religion particulière ? Non.

C'est le sens de cette proposition de loi : les convictions religieuses doivent s'effacer devant la pratique sportive.

L'absence de réglementation uniforme crée des incohérences. La proposition de loi entend donc harmoniser les règles.

M. Thomas Dossus.  - C'est faux !

M. Jacques Grosperrin.  - Nous pourrons ainsi assurer le bon fonctionnement des services publics et éviter les atteintes à l'ordre public.

L'article 2 vise à sanctuariser les lieux de pratiques sportives.

Sénateur et professeur de judo, je me réjouis que cette proposition de loi permette des enquêtes administratives sur les éducateurs sportifs. Ces professionnels ne doivent pas faire preuve de prosélytisme auprès de nos jeunes.

L'article 3 apporte une réponse législative à la faiblesse de certains élus locaux qui acceptent des tenues aquatiques à caractère religieux dans les piscines. C'est une rupture manifeste de l'égalité de traitement des usagers susceptible de provoquer des troubles à l'ordre public et de nuire au bon fonctionnement du service public avec des créneaux réservés.

La proposition de loi Savin est indispensable pour garantir la neutralité du sport et préserver les valeurs républicaines. Elle protège les élus, les collectivités territoriales et les associations de toute forme de prosélytisme religieux.

Elle réaffirme le rôle du sport dans l'éducation, terrain de partage et non de division. Sur un terrain, on ne se fait pas remarquer par ses vêtements mais par son talent et ses performances. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Claude Kern applaudit également.)

Mme Samantha Cazebonne .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Nous sommes satisfaits de la tenue de ce débat, car nous sommes favorables à une évolution législative sur ce sujet. Toutefois, nous avons quelques réserves. La République garantit la liberté de conscience, dont découle la liberté de manifester ses croyances et convictions dans le respect de l'ordre public.

Le sport doit se soumettre à ces règles. L'exigence de laïcité ne doit pas être source d'exclusion mais permettre à chacun de s'épanouir au travers de la pratique sportive.

L'article 1er tel qu'initialement rédigé présente un risque d'inconstitutionnalité.

Le principe de neutralité ne s'applique qu'aux activités organisées par les collectivités territoriales ou les fédérations agréées chargées d'une mission de service public.

Le groupe RDPI a déposé un amendement de réécriture gommant le risque d'inconstitutionnalité en reprenant les termes de la décision du Conseil d'État du 29 juin 2023, selon lesquels la FFF pouvait interdire pendant le temps des matches le port de signes ou tenues ostensibles.

Les choses sont différentes pour les mineurs. Comme l'école, le sport initie nos enfants à la coopération et au respect de la règle commune. C'est un facteur de cohésion nationale. Je propose de maintenir le dispositif de l'article 1er tout en le limitant aux mineurs. La question de la laïcité dans le sport doit être l'occasion pour chacun de s'épanouir dans un environnement neutre. Il est difficilement concevable que des règles différentes s'appliquent en EPS et en club. Notre position est équilibrée, entre protection des mineurs et absence de fragilité constitutionnelle.

Nous souhaitons supprimer les articles 2, 2 bis et 3 déjà satisfaits par le droit existant.

Les jeunes grandissent dans un environnement libre de toute pression religieuse grâce à la laïcité.

Le RDPI soutiendra ce texte s'il est modifié par nos amendements ; à défaut une grande majorité d'entre nous s'abstiendront. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Bernard Fialaire .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Le RDSE, par son histoire et sa philosophie, se réjouit toujours de l'attention portée à la laïcité, trop souvent négligée.

André Comte-Sponville définit la laïcité comme la volonté de vivre ensemble, pacifiquement et librement, quelle que soit la religion ou l'irréligion de chacun.

La pratique sportive est source d'épanouissement, et apprend le respect. La laïcité dans le sport doit être le respect de celui qui croit comme de celui qui ne croit pas.

Dans sa rédaction actuelle, cette proposition de loi risque de restreindre indûment certaines libertés individuelles.

La laïcité, c'est la garantie de la liberté de conscience, l'égalité devant la loi des croyants et des non-croyants et la neutralité de l'État vis-à-vis des cultes. Le mot d'ordre doit être l'équilibre, afin de préserver chacun de ces principes.

L'article 1er généralise l'interdiction du port de signes religieux ostensibles lors des compétitions. Faisons confiance aux fédérations pour qu'elles les interdisent si elles l'estiment nécessaire. En revanche, cela me paraît pertinent pour les mineurs, comme le RDPI le propose.

L'article 2 interdit les prières collectives dans les locaux mis à disposition par les collectivités territoriales. Or le maire, grâce à ses pouvoirs de police, peut déjà autoriser ou interdire un rassemblement religieux dans un lieu public s'il porte atteinte à l'ordre public. Cette disposition ne me paraît pas nécessaire et nous défendrons sa suppression.

L'article 3 interdit le port de tout signe ou tenue manifestant une appartenance politique ou religieuse pour la baignade. Si cela doit être le cas pour les agents du service public, cela ne s'applique pas aux usagers, au nom de la liberté de conscience. Nous proposerons de supprimer cette disposition.

Alors que les rapports parlementaires ont montré que le sport peut être le terrain du séparatisme, il est opportun de prévoir une enquête administrative préalablement à la délivrance de la carte professionnelle d'éducateur sportif. Ces professionnels forment les esprits des jeunes comme les enseignants.

La visée de cette proposition de loi est de protéger le sport des atteintes à la laïcité, qui se multiplient, selon les acteurs de terrain. Mais n'oublions pas que le repli communautaire trouve son terreau dans la mise à l'écart sociale. (M. Damien Michallet s'en étonne.)

La laïcité ne stigmatise pas mais protège.

Le RDSE ne peut voter ce texte dans sa forme actuelle. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe SER)

M. Claude Kern .  - (Applaudissements sur quelques travées du groupe UC) Ce texte va dans le bon sens. Je salue l'excellent travail de Michel Savin, son auteur, et les travaux du non moins excellent rapporteur Stéphane Piednoir.

Garantir l'égalité de traitement des usagers de l'espace sportif est essentiel pour préserver la cohésion sociale afin d'éviter toute forme de discrimination. Selon le ministère des sports, sur 3 449 contrôles en 2022, plusieurs ont révélé des signes de séparatisme.

La laïcité vise à protéger et non à exclure.

Mme Christine Bonfanti-Dossat.  - Très bien !

M. Claude Kern.  - Trop souvent, laïcité rime avec interdiction chez les jeunes. Mais ce n'en est pas la définition.

Du reste, la proposition de loi Lafon portera sur l'enseignement du principe de laïcité.

Le sport doit être un lieu de rencontre et de partage.

Les incidents tels que les annulations de match montrent la nécessité de règles claires et uniformes.

Certains promoteurs d'une vision radicale et politique de la religion tentent d'imposer une pratique incompatible avec notre société.

L'interdiction du port ostensible de signes religieux ou de tenues religieuses est une bonne chose.

Cela va dans le sens du code de l'éducation et de la décision du Conseil d'État du 29 juin 2023. Nous ne comptons plus les incidents dans des stades à cause du port de tenues ou signes religieux. Plusieurs fédérations ont pris des mesures, comme la FFF ou la Fédération française de basket-ball (FFBB).

L'interdiction optionnelle engendre le risque d'une interprétation différente d'une fédération à une autre.

Autre apport : l'impossibilité de prières collectives dans les locaux sportifs mis à disposition par les collectivités territoriales.

Chacun doit pouvoir pratiquer un sport, quelle que soit sa religion.

La précision du rapporteur incluant les locaux attenants à l'équipement sportif permet d'éviter les comportements exacerbant les divisions communautaires. Ce texte donne au préfet la faculté de suspendre l'agrément d'une association sportive, et c'est une bonne chose.

L'interdiction du port de tenues à caractère religieux dans les espaces de baignade sécurisera les maires, qui se trouvent en première ligne.

M. André Reichardt.  - Très bien.

M. Claude Kern.  - Tout conflit entre les usagers sera ainsi évité.

Le port de vêtements religieux dans les piscines municipales n'est pas respectueux du principe de laïcité.

Il ne faut pas se cacher derrière la salubrité. Ce n'est pas un bon prétexte. Nous sommes dans une république laïque, ce principe doit prévaloir.

Je salue la mesure ajoutée par le rapporteur Piednoir sur la carte d'éducateur sportif.

Le groupe UC votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Pierre Ouzoulias .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER ; M. Francis Szpiner applaudit également.) La Charte olympique reconnaît comme principes fondamentaux le droit de pratiquer un sport sans discrimination, la neutralité politique des compétitions et la liberté d'expression des participants. Aucune démonstration ou propagande politique, religieuse ou raciale n'est autorisée.

C'est parce que les compétitions sont neutres que la liberté d'expression est protégée - comme dans la laïcité française, qui fait de la neutralité de l'État la condition de la liberté de conscience. Certes, la loi de 1905 impose la neutralité aux agents du service public et non aux usagers - mais l'athlète en compétition n'est pas un simple usager.

L'olympisme organise un espace universel par une langue commune fondée sur les seules règles sportives. Alors que partout, l'universalisme est battu en brèche, il appartient à la France de le protéger, elle qui le promeut depuis le congrès de la Sorbonne de 1894.

Il nous faut de surcroît défendre la lex olympica contre le Comité international olympique (CIO) et certaines fédérations internationales, qui ont hélas accepté de la transgresser pour satisfaire des États qui interdisent aux femmes de se vêtir librement. Ces violations de la Charte fragilisent le combat des femmes qui s'en réclament pour se défendre.

M. Michel Savin.  - Très bien !

M. Pierre Ouzoulias.  - Quelle est la liberté d'une athlète iranienne de ne pas porter une tenue religieuse, si l'application du principe de neutralité olympique est laissée à l'appréciation des délégations ? (M. Gérard Lahellec le confirme ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Laure Darcos applaudit également.)

Je veux rendre hommage à Nawal El Moutawakel, à Hassiba Boulmerka, à Habiba Ghribi, médaillées d'or en 1984, 1992 et 2012, qui ont refusé la tenue religieuse que les hommes voulaient leur imposer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Philippe Grosvalet ainsi que MmeLaure Darcos et Gisèle Jourda applaudissent également.) Pour défendre leur liberté, il nous faut défendre la Charte olympique.

Imposer l'obligation de neutralité pour les compétitions était une façon de protéger les fédérations françaises des pressions de ceux qui font primer l'impératif religieux sur la loi commune.

Je regrette que l'article 1er ne retienne que « le port de signes ou de tenues », alors que la charte olympique proscrit les « démonstrations », comme les saluts nazis.

Les fédérations sportives participent au service public pour l'éducation de la jeunesse par le sport. Cette mission leur était explicitement reconnue par l'article 16 de la loi du 16 juillet 1984 ; elle n'est plus mentionnée dans le code du sport, tel qu'issu de la loi du 2 mars 2022. C'est regrettable.

Plusieurs fédérations demandent une loi-cadre précisant les missions de service public que l'État leur confie. Travaillez-y, pour que l'héritage des Jeux ne soit pas seulement matériel, mais aussi moral et législatif. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, CRCE-K, UC, INDEP et du RDSE ; Mme Gisèle Jourda applaudit également.)

Mme Mathilde Ollivier .  - La laïcité s'est imposée en 1905, à l'issue d'un long processus qui plonge ses racines dans les valeurs de la Révolution française. Pour Jean Jaurès, il n'y a pas égalité des droits si l'attachement de tel citoyen à telle croyance, à telle religion, est pour lui une cause de privilège ou de disgrâce.

La laïcité, mal comprise, instrumentalisée par une partie de la classe politique, devient le terrain d'un confusionnisme ambiant. À quoi M. Savin fait-il référence, quand il parle de « neutralité » du sport ? Ce texte va à rebours du principe même de laïcité. Vous n'en êtes pas les protecteurs, mais les fossoyeurs.

La laïcité permet à chaque religion d'être pratiquée en toute liberté. Avec ce texte, vous visez frontalement, lâchement, les femmes de confession musulmane de notre pays. (Protestations à droite) Il s'agit d'exclure les musulmans. (Vives dénégations sur les travées du groupe Les Républicains)

La loi de 1905 est limpide : la neutralité concerne les agents, non les usagers.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Et l'école alors ?

Mme Mathilde Ollivier.  - La laïcité ne saurait légitimer des atteintes aux libertés individuelles, à la liberté de conscience.

Ces femmes n'exercent pas d'activité de service public, elles ne demandent qu'à pratiquer un sport. Vous les stigmatisez, vous les méprisez. À aucun moment vous ne les avez même écoutées. Vous les invisibilisez dans le sport. Et demain, à l'université, au travail ?

Entendez leurs témoignages. Founé : « on me demande de choisir entre ma passion pour le football et ce qui constitue une partie de mon identité. » Hélène : « parfois je n'ai pas la force d'aller encourager mes coéquipières. C'est dur de progresser sans pouvoir jouer en match. C'est vous priver de votre passion. On se sent exclue. Tout le monde sait pourquoi vous ne jouez pas. Être renvoyée du banc aux gradins par l'arbitre, c'est une marche de la honte. » Asma : « je veux continuer à me battre parce que le volleyball m'a beaucoup aidée dans mon rapport au corps ». (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Michel Savin.  - Rien ne l'empêche de jouer !

Mme Mathilde Ollivier.  - « Le sport est un vecteur d'émancipation. »

M. Stéphane Ravier.  - Le voile aussi, c'est bien connu !

Mme Mathilde Ollivier.  - Le sport est le terrain de la solidarité et de la cohésion. Nous refusons qu'il devienne celui de la discrimination.

Le groupe de travail des Nations unies sur la discrimination à l'égard des femmes et des filles a jugé l'interdiction du couvre-chef « disproportionnée et discriminatoire ».

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Ce n'est pas l'avis du Conseil d'État.

Mme Mathilde Ollivier.  - L'héritage des JOP devait être de faire de la pratique sportive la priorité de nos politiques publiques.

M. Michel Savin.  - C'est vrai.

Mme Mathilde Ollivier.  - Or l'héritage du Gouvernement, c'est la baisse des crédits ; celui de la droite sénatoriale, exclure de la pratique sportive les femmes musulmanes. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Evelyne Corbière Naminzo applaudit également ; protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jacques Grosperrin.  - Caricature !

M. Patrick Kanner .  - La question dépasse le cadre du sport. Il s'agit ici de laïcité - d'où la présence au banc du ministre des cultes et non de la ministre des sports.

Quelle laïcité voulons-nous ? Une laïcité éclairée, ou une laïcité instrumentalisée à des fins identitaires et partisanes ? Ce débat interroge notre pacte républicain, notre vision du vivre-ensemble. La laïcité n'est pas une arme mais une source d'équilibre, une architecture subtile. Elle n'impose pas le silence aux convictions personnelles : elle empêche qu'une croyance domine les autres dans l'espace public, dans une démarche prosélyte.

Avec cette proposition de loi, vous en faites un outil d'exclusion, vous travestissez son essence. Notre conception de la laïcité diffère de la vôtre, et de votre course à l'échalote avec l'extrême droite. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jacques Grosperrin.  - On l'attendait ! (On renchérit à droite.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Pas ça, monsieur Kanner...

M. Patrick Kanner.  - En utilisant ce principe fondateur pour servir votre récit antimusulman, vous nourrissez les stéréotypes.

Certains nous qualifieront de naïfs ou de laxistes. (On le confirme sur les travées du groupe Les Républicains.) Nul ne peut me dire, à moi qui étais ministre des sports lors des attentats de 2015 et 2016...

M. Stéphane Ravier.  - Vous vous en vantez, en plus ?

M. Patrick Kanner.  - ... que la gauche républicaine est laxiste. Je récuse les critiques. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) Je suis un laïc de la première heure.

M. Stéphane Ravier.  - L'allié de LFI !

Mme la présidente.  - Taisez-vous, monsieur Ravier !

M. Patrick Kanner.  - Être laïc ne signifie pas être fermé à toutes les religions, ou à une en particulier. Sous couvert de défendre la laïcité, vous tournez le dos à Aristide Briand, souvent cité par le président Larcher, selon lequel « la loi protège la foi à condition que la foi ne veuille par faire la loi ». (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Or les garanties constitutionnelles interdisent non seulement de cibler une religion plus qu'une autre, mais également de porter une atteinte excessive et disproportionnée aux libertés individuelles.

Confrontons votre vision étriquée de la laïcité avec la nôtre, qui construit non pas des murs, mais des ponts, sans angélisme ni amalgame.

Nous nous opposons à cette proposition de loi. D'abord, elle est redondante. La jurisprudence permet déjà aux fédérations de réglementer ces questions de manière équilibrée et réfléchie. Le mouvement sportif n'est d'ailleurs pas demandeur.

M. Jacques Grosperrin.  - Si !

M. Patrick Kanner.  - Elle porte atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales : la jurisprudence du Conseil d'État autorise, sous condition, la mise à disposition de locaux communaux à des associations cultuelles. L'amendement du rapporteur a beau élargir la mesure à l'ensemble des cultes, l'intention initiale est claire. Pourquoi une dérogation pour des fêtes paroissiales, quand la prière musulmane est interdite ? Cette inégalité flagrante nourrit un climat de suspicion vis-à-vis d'une partie de nos concitoyens.

Deuxièmement, ce texte est discriminatoire. En ciblant les signes religieux comme le voile, il marginalise nos concitoyennes musulmanes. On va exclure ces femmes pour qui le sport est un canal d'intégration et de bien-être physique et mental, et les pousser vers l'isolement et le communautarisme. (On ironise à droite.)

Le texte interdit le port de tout signe ou tenue manifestant une appartenance politique ou religieuse. Entendez-vous interdire les campagnes contre l'homophobie, qui se manifestent par le port d'un autocollant sur le maillot pendant les matchs ?

Troisièmement, il est potentiellement liberticide. Le Conseil d'État a souligné que de telles mesures n'étaient ni nécessaires, ni adaptées, ni proportionnées. C'est une violation des engagements internationaux de la France en matière de droits humains.

Au nom de l'attractivité de la France, ces mesures ne s'appliqueraient pas aux événements internationaux accueillis en France : l'interdiction vaut pour les compétiteurs français, pas pour les athlètes internationaux qui ne respectent pas la loi française...

En ces temps d'austérité budgétaire, comment le ministère des sports va-t-il contrôler le respect de ces nouvelles obligations ?

Je regrette l'absence de mesures de prévention, via le renforcement du rôle des éducateurs sportifs - à cet égard, nous sommes favorables à l'article 4, qui permet de passer au crible les éducateurs.

Mais ce texte purement répressif ne se soucie guère d'efficacité.

Protégeons le sport, vecteur d'intégration et de cohésion sociale, préservons cette essence. Le tout-interdiction vire très vite au tout-exclusion. Le respect de l'égale dignité de chacun est le signe de la pluriculturalité de notre société, où unité ne rime pas avec uniformité.

Nous croyons en une laïcité qui protège, qui rassemble, qui soit un bouclier, non une épée dirigée contre une partie de nos concitoyens. Au nom de la liberté, de l'égalité et de la fraternité, notre groupe votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; Mme Evelyne Corbière Naminzo applaudit.)

M. Max Brisson.  - La gauche a bien changé !

M. Stéphane Ravier .  - Karim Benzema « aime » un post Instagram d'une célébrité tchétchène célébrant la décapitation de Samuel Paty - signe de l'emprise islamiste sur le sport français. On commence avec les accommodements raisonnables sur les repas hallal, on finit avec l'apologie du terrorisme. Voilà où mène notre lâcheté face à la politique des petits pas des Frères musulmans, accompagnée des grands pas de la gauche.

La soumission islamiste commence par la victimisation, se poursuit par la revendication, s'impose par l'intimidation. Les tenues islamiques féminines sont leur nouvel étendard de conquête. Comme au judo, ils se servent de notre force pour nous renverser, de notre droit à la non-discrimination pour le retourner, et notre identité avec.

Des clubs de football professionnels se soumettent à la charia, en floutant les genoux de leurs joueurs sur les photos. L'islamisme gangrène une grande partie de la jeunesse musulmane de France. Le voile n'est qu'un prétexte : leur objectif est de nous asservir à leur code religieux, qui est aussi un code civil.

Le législateur doit faire barrage pour protéger les présidents de fédérations, les présidents de clubs et les 16,5 millions de licenciés, pris en otage par un entrisme islamiste victimaire, organisé et menaçant.

Derrière la parenthèse enchantée des jeux Olympiques se cachent les petits maîtres chanteurs qui, dans les clubs de banlieue ou de province, contraignent les arbitres à accepter le voile pour sauver leur peau. Ils prospèrent sur les ruines laissées par les déconstructeurs. Je pense au maire islamo-écolo-collabo de Grenoble... (« Oh ! » à gauche)

Mme Monique de Marco.  - Il ne faut pas exagérer !

M. Stéphane Ravier.  - ... qui soutient l'association des « hijabeuses » ou les créneaux pour burkini à la piscine. Ces élus plaident pour le vivre-ensemble, mais font advenir l'apartheid, la discrimination à l'égard des femmes, le face-à-face.

Même les plus hautes institutions ont capitulé. « La liberté dans le hijab » : cette sentence ne vient pas de Téhéran, mais d'une campagne du Conseil de l'Europe ! Face à ces collabos, la France ne doit rien céder. Interdire le port du voile dans les compétitions sportives est un minimum. Asséchons le courant de ces revendications dangereuses en luttant contre l'hydre islamiste et en stoppant l'immigration !

Mme Monique de Marco.  - Ça suffit !

M. Philippe Grosvalet.  - C'est fini !

M. Dany Wattebled .  - Face au repli communautaire dans le sport, aucun renoncement n'est acceptable.

Il y a vingt ans, le rapport Stasi nous alertait sur la formation d'équipes communautaires et sur le déclin de la pratique sportive féminine. Il y a dix ans, une note du SCRT alertait sur le recrutement religieux dans certains clubs. Régulièrement, des affaires judiciaires et médiatiques éclatent : à Sète, à Grenoble, les fédérations sportives sont confrontées à des revendications communautaires croissantes.

Le renoncement n'est pas une option. En 2021, la loi Principes de la République a créé le contrat d'engagement républicain (CER), dont le non-respect peut être sanctionné par un retrait d'agrément. Ce dispositif est trop peu utilisé. Le 29 juin 2023, le Conseil d'État a validé l'interdiction des signes religieux par les fédérations de football - interdiction généralisée par la ministre des sports pour les athlètes français participant aux JOP. Il y a trois ans, j'avais déposé une proposition de loi similaire, inspirée de la loi de 2004 sur le port de signes religieux ostensibles à l'école.

Cette levée de boucliers doit se poursuivre, car le repli communautaire et le séparatisme n'ont pas leur place dans le sport.

Pierre de Coubertin disait du sport qu'il fait partie du patrimoine de tout homme et de toute femme. Le sport rassemble les Français de toutes origines sociales et culturelles ; c'est un puissant vecteur d'intégration et de cohésion. Les fédérations sportives, où sont inscrits plus de 6,3 millions de jeunes, jouent un rôle clé dans leur émancipation.

Cette proposition de loi propose des mesures concrètes : interdiction du port de signes religieux ostensibles dans les enceintes sportives ; interdiction des prières collectives dans les locaux sportifs mis à disposition par les collectivités territoriales et respect de la laïcité dans les piscines publiques ; enquêtes administratives préalables à la délivrance de la carte professionnelle d'éducateur sportif.

Notre droit présente des insuffisances.

Certains dénoncent un texte d'exclusion, antiféministe, qui empêcherait la pratique sportive des femmes. Cette posture est un renoncement : cela revient à admettre la discrimination de genre imposée par certaines religions. En quoi autoriser le port du voile permettrait-il d'émanciper, d'intégrer et d'assimiler des jeunes femmes ?

M. Max Brisson.  - Très bien !

M. Dany Wattebled.  - On ne répond pas au prosélytisme dans le sport par le renoncement. Ne renonçons pas à faire respecter la laïcité dans le sport, restons fidèles à nos valeurs, refusons toute compromission. Notre groupe votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP ; M. Claude Kern applaudit également.)

Présidence de M. Dominique Théophile, vice-président

Mme Jacqueline Eustache-Brinio .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pourquoi est-il urgent de légiférer pour assurer le respect de la laïcité dans le sport, alors que l'article 1er de la Constitution affirme que la France est une république laïque ? Pourquoi de si nombreux collègues ont-ils cosigné cette proposition de loi ?

Le sport, comme l'école, doit être sanctuarisé et préservé de tout entrisme religieux. Gabriel Attal avait eu un discours ferme ; la ministre des sports doit l'être tout autant. Voile, abaya, burkini, ne sont pas des vêtements culturels, mais des étendards politiques ; ils sont imposés par l'islam le plus rigoriste, qui souhaite instaurer une communauté islamique mondiale, l'oumma. Le port de l'abaya par de plus en plus de petites filles participe d'un effrayant apartheid sexuel.

M. Olivier Paccaud.  - Tout à fait.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - En 1979, le premier geste des mollahs a été de voiler les femmes iraniennes. C'est l'Iran qui a imposé aux jeux Olympiques d'Atlanta une athlète voilée, au mépris de la Charte olympique. C'est en Iran que des femmes meurent parce qu'elles refusent ce voile qui étouffe leur cri : Femme, vie, liberté.

Le sport fait fi de la religion, du milieu social, de la couleur de peau ; il réunit sous un même maillot, avec un même objectif. Préservons ces saines valeurs de dépassement qui animent la jeunesse. Rappelons que les équipements sportifs n'ont pas vocation à être des lieux de culte.

M. Stéphane Ravier.  - Bravo !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Lors de son discours aux Mureaux en octobre 2020, le Président de la République a appelé à s'attaquer au séparatisme islamiste, « un projet conscient, théorisé, politico-religieux, qui se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République, dont les manifestations sont le développement de pratiques sportives, culturelles communautarisées qui sont le prétexte pour l'enseignement de principes qui ne sont pas conformes aux lois de la République. » Quatre ans après, où en sommes-nous ? La situation a empiré. Les précédents gouvernements ont refusé nos amendements à la loi Séparatisme, qualifiés de « textiles », ou à la loi du 2 mars 2022.

Pour conserver ses vertus émancipatrices, le sport doit se pratiquer sans entrave religieuse. Nul ne doit subir l'hydre islamiste - l'expression est du Président de la République - à l'école ou dans ses activités sportives. L'adoption de cette proposition de loi enverra un signal de fermeté. Entre le hijab, le burkini et le sport, il faut choisir. La neutralité dans le sport est une impérieuse nécessité.

Ne soyons pas dupes : le sport est l'un des vecteurs de l'entrisme islamiste, déjà préconisé par le fondateur des Frères musulmans qui y voyait « un moyen ». Il est temps de voir loin, parler franc et agir ferme, comme le disait Pierre de Coubertin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Laure Darcos et M. Claude Kern applaudissent également.)

Discussion des articles

Article 1er

M. Olivier Paccaud .  - « L'important, c'est de participer »... L'essence du sport est sa capacité à rassembler autour d'une même passion des personnes venues d'horizons variés.

Dans une société de plus en plus archipélisée, bunkérisée, escargotisée, le rectangle vert, le stade ou le vestiaire sont parmi les derniers espaces de mixité sociale.

Combien de membres d'une même association sportive ne se seraient jamais rencontrés sans le sport ? Quand on porte le même maillot, les chaînes religieuses, les a priori de classe, les stigmates des quartiers s'effacent. Quand on joue ensemble, quand on perd ou gagne ensemble, on apprend à se connaître, à se comprendre. Le vestiaire peut être un lieu où tombent les préjugés, où naît la fraternité. Faire partie d'une équipe est un formidable moyen d'intégration et de cohésion.

Les clubs sportifs sont d'incomparables lieux d'échange et d'amitié, où la formule mens sana in corpore sano prend tout son sens. Le sport ne divise pas, il rassemble. Que la religion reste aux portes du stade et du gymnase, il y a assez de facteurs de division dans notre société. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Jacques Lozach .  - Nous serons les avocats intransigeants de la laïcité et des valeurs républicaines, dans tous les domaines de la vie publique. Il y a eu 120 clubs signalés, surtout dans le football et les sports de combat. C'est 120 de trop, mais il faut relativiser : cela représente 0,08 % des 160 000 clubs sportifs en France. Quasiment aucun signalement ne s'est traduit par une fermeture.

L'application de la loi du 24 août 2021, qui a instauré le CER, pose problème, car le ministère des sports manque de moyens. Ni le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), structure faîtière du mouvement sportif, ni les fédérations ne demandent un nouveau texte législatif. Les clubs sont en train d'assimiler le CER. Il aurait été judicieux d'attendre une évaluation de la loi avant de légiférer à nouveau.

M. le président.  - Amendement n°4 de Mme Sylvie Robert et du groupe SER.

Mme Sylvie Robert.  - Notre amendement supprime l'article 1er. Il convient d'apporter une réponse proportionnée, entre risques pour l'ordre public et respect des libertés constitutionnelles d'expression, de pensée et d'exercice de sa religion. La loi de 1905 et la jurisprudence du Conseil d'État sont claires. La dérogation apportée par la loi de 2004 pour les élèves, catégorie d'usagers particulière, est amplement suffisante.

Vous visez une religion donnée, quitte à empêcher de nombreuses jeunes filles de pratiquer le sport de haut niveau, pourtant facteur d'intégration. Ce n'est pas au législateur mais aux fédérations d'édicter de telles interdictions - certaines l'ont déjà fait.

M. le président.  - Amendement identique n°9 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Notre groupe s'oppose à l'interdiction générale du port de signes religieux, notamment au niveau amateur. Nous sommes ainsi fidèles à l'esprit de la loi de 1905, qui impose la neutralité aux agents et non aux usagers. L'interdiction ne résout aucun problème ; au contraire, elle alimente la stigmatisation et les tensions au lieu de favoriser un climat de respect et de tolérance. Le sport ne doit pas exclure. Fidèles à notre engagement en faveur des libertés individuelles et du vivre ensemble, nous demandons la suppression de cet article, qui ajoute des exceptions au principe de laïcité.

M. le président.  - Amendement identique n°28 rectifié quinquies de M. Ouzoulias et alii.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je rends hommage à Marie-George Buffet, qui considérait que le sport est le lieu d'apprentissage de la règle unique, à laquelle on ne peut déroger pour quelque motif que ce soit.

Nous sommes insatisfaits de la rédaction de l'article 1er qui transpose à la pratique sportive la loi de 2004 sur l'école. Il n'y a pas que les signes ou tenues, mais aussi les gestes et les démonstrations qui posent problème -  or ils ne sont pas visés par cet article. Je pense à ce joueur de football turc qui a fait le signe des Loups gris sur le terrain : cette proposition de loi ne permettrait pas de le sanctionner, pas plus que les saluts nazis. Les signes de croix, que je ne mets pas au même niveau, n'ont pas leur place sur le terrain. Toutes les expressions religieuses, quelles qu'elles soient, doivent être visées.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Avis défavorable à ces amendements de suppression.

Pourquoi mettre sur le même plan le sport et l'école ? Toutes les auditions confirment que ce sont les deux principaux vecteurs du séparatisme. Madame Ollivier, j'étais enseignant en 2004, lors de la loi sur la laïcité à l'école : les arguments étaient exactement les mêmes ! (M. Max Brisson le confirme.) On fermait les yeux ; heureusement, le Gouvernement de l'époque a pris le taureau par les cornes.

Marie-George Buffet, que nous avons auditionnée, est désormais très favorable à cette proposition de loi.

Au lycée, l'interdiction concerne les agents, mais aussi les usagers, les élèves mineurs comme les élèves majeurs de terminale, de BTS ou de prépa. C'est ce qu'a tranché la loi de 2004.

Les associations sportives sont délégataires d'une mission de service public : c'est à ce titre qu'on est en droit de leur imposer les mêmes obligations qu'à l'école de la République. Imaginez-vous que l'on aurait pu se satisfaire, en 2004, d'une simple possibilité laissée aux écoles d'interdire le port du voile ? Il faut une obligation, une harmonisation. C'est aussi une demande de beaucoup de fédérations sportives.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Avis défavorable aux amendements de suppression. Nous soutenons le principe de l'article 1er.

Le Conseil d'État a jugé que les fédérations sportives, chargées d'assurer le bon fonctionnement du service public, pouvaient imposer à leurs joueurs une obligation de neutralité des tenues lors des compétitions et manifestations sportives. Cet article répond à une demande des fédérations elles-mêmes, qui appellent à une clarification et une harmonisation du droit.

M. Alexandre Ouizille.  - Nous aurions pu vous suivre si vous aviez voulu appliquer l'article 31 de la loi de 1905, qui vise à lutter contre les pressions, car l'inspection générale de l'éducation fait état, en effet, des pressions qui s'exercent sur certains clubs. Mais nous ne pouvons vous suivre si vous remettez en cause les fondements de la loi de 1905.

Cette proposition de loi a quelque chose d'orwellien. Vous mélangez tout : la neutralité de l'État, qui n'est pas celle de l'espace public, et la liberté de conscience. La loi de 2004 a été prise sur le fondement de la liberté de conscience, pour protéger les jeunes esprits en formation.

M. Olivier Paccaud.  - Et c'est tant mieux !

M. Alexandre Ouizille.  - Or cet article 1er, lui, concerne tout le monde, même les adultes. À ce rythme, pourquoi s'arrêter au sport ? Pourquoi ne pas interdire le voile à l'université, ou dans tout l'espace public, comme le propose Mme Le Pen ? On s'éloigne de la laïcité de 1905. C'est dangereux pour la République. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

M. Akli Mellouli.  - Il y a une vraie confusion. Cette loi concerne tout sauf la laïcité ! Qu'entendez-vous par tenues neutres ? Si l'on pousse le raisonnement jusqu'à l'absurde, on peut dire que les couleurs du maillot d'un club ne sont pas neutres ! La loi de 1905 vise à lutter contre le prosélytisme. Or ici, il n'y a aucun prosélytisme.

M. Olivier Paccaud.  - Si !

M. Akli Mellouli.  - Il est faux de dire que toutes les fédérations soutiennent ce texte. Nous ne pouvons vous suivre sur ce terrain mouvant, qui ouvre la porte à des dérives. La loi de 1905 a tranché la question de la tenue vestimentaire dans l'espace public. La laïcité n'est pas le déni de la religion, mais le ciment du vivre ensemble. Elle ne saurait être dénaturée pour stigmatiser. (M. Thomas Dossus applaudit.)

Mme Mathilde Ollivier.  - Qu'entendez-vous par « ostentatoire » ? À Auxerre, l'abbé Deschamps a donné son nom au stade. La loi va-t-elle interdire le maillot d'Auxerre, dont les couleurs bleu et blanc font référence à la patronne du club, Marie ? (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Stéphane Ravier.  - Caricatural ! C'est la haine de soi !

Mme Mathilde Ollivier.  - Quand les joueurs posaient un genou à terre en soutien au mouvement Black Lives Matter, ils envoyaient un message positif de lutte contre les discriminations. Que répondez-vous sur la neutralité politique ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Max Brisson.  - Sachons raison garder. Est-ce le cas quand vous affirmez que nous mettons la République en danger ? Nous ne stigmatisons pas une religion, mais rappelons des principes. Je pense à ces jeunes filles qui tentent de refuser la soumission. (Protestations sur les travées du GEST) La puissance publique doit les aider. Depuis 1905, nous avons évolué. La législation est faite pour les temps actuels.

M. Thomas Dossus.  - Et voilà !

M. Max Brisson.  - Être fidèle à l'idéal des pères fondateurs de la laïcité, aujourd'hui, c'est protéger les jeunes filles qui veulent s'émanciper et refusent ces diktats religieux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Thomas Dossus.  - Rien à voir !

M. Max Brisson.  - Quant au sport, c'est, comme l'école, un lieu de neutralité particulier ; je serai fier que ce soit un lieu de laïcité singulière. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Jean Rochette applaudit également.)

M. Adel Ziane.  - Vous dites ne vouloir stigmatiser personne, mais ces jeunes filles seront les victimes collatérales de ce texte, qui les conduira à sortir de l'espace public.

Les éducateurs n'ont pas été entendus, les pratiquantes non plus. Elles recherchent dans le sport des lieux de socialisation, d'échange. Vous leur demandez de sortir de l'espace public. (On le conteste sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est du moins ainsi que c'est interprété. (M. Stéphane Piednoir proteste.)

Non, nous ne faisons pas preuve d'angélisme. Nous voulons trouver un équilibre pour accompagner des habitants à la recherche d'espaces communs pour vivre ensemble. (Marques d'approbation sur des travées du groupe SER et du GEST)

M. Pierre Jean Rochette.  - Le sport, c'est l'égalité. J'ai moi-même fait du sport, même si cela ne se voit pas beaucoup... (Sourires) Au rugby, après le match, tous prenaient leur douche ensemble, les riches comme les pauvres, les intelligents comme les benêts : là était la force du sport.

Les choses ont changé ces vingt ou trente dernières années : les principes religieux ont cassé cette égalité, et, si vous n'êtes pas dans la mouvance dominante, vous êtes ostracisé.

Ne nous voilons pas la face sur l'état du pays ! Parlez avec les éducateurs et dirigeants sportifs : ils ne disent pas qu'il n'y a pas de problème. La réalité, c'est que la laïcité n'est plus respectée dans le sport ! (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et Les Républicains)

M. Jean-Jacques Lozach.  - Cet article concerne les compétitions organisées par les fédérations. De votre point de vue, chers collègues de droite, il y a un paradoxe, pour ne pas dire une carence : les compétitions qui ont le plus de succès sont celles organisées par des entreprises privées.

Ce qui me gêne dans ce débat, c'est qu'on néglige ce que le sport apporte de meilleur à la société : sa capacité à intégrer des populations très diverses.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Les catholiques n'étaient pas ravis par la loi de 1905...

M. Pierre Ouzoulias.  - Pour le moins !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Ils n'ont pas fait la révolution : ils se sont adaptés.

Nous refusons la mise en cause de nos règles communes, et ce n'est pas stigmatiser des jeunes filles que de vouloir faire respecter ces règles. La vie est faite de choix : que celles qui portent le voile assument ce choix.

La France de 2025 n'est pas celle de 2004 ou des années quatre-vingt : elle subit partout un entrisme qui sépare et clive.

J'avais des potes de gauche qui soutenaient la laïcité. Où sont-ils, aujourd'hui, les grands laïcs de gauche ? (Protestations sur des travées à gauche)

La laïcité ne s'adjective pas ; elle est une et s'applique partout sur le territoire.

M. Pierre Ouzoulias.  - Et en Alsace-Moselle ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Que chacun assume ses choix de mode de vie, mais pas sur le dos de la France et de la laïcité.

La laïcité est une chance pour tous les jeunes Français. J'ai une pensée pour les femmes qui luttent tous les jours dans les quartiers contre les pressions islamistes. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP)

M. Bernard Fialaire.  - Nous défendons tous la laïcité.

M. Olivier Paccaud.  - Pas la même !

M. Bernard Fialaire.  - Que je sache, la loi de 1905 n'a pas empêché les curés de jouer au football en soutane... Le problème est ailleurs.

Oui, depuis trente-cinq ou quarante ans, les choses ont changé. Nous avons été collectivement trop laxistes avec certaines expressions.

Mais ne nous trompons pas d'arme. Faire de la laïcité un outil de coercition et de sanction, ce serait braquer une partie de la population contre ce principe, qu'elle percevrait comme une contrainte. Sur ce sujet, il faut légiférer d'une main tremblante, pour ne pas dévoyer la laïcité. (M. Patrick Kanner applaudit.)

M. Pierre Ouzoulias.  - Des grands laïcs à gauche, il en reste ! Mais vous ne voulez pas les entendre.

J'ai déposé une proposition de loi constitutionnelle pour appliquer la laïcité à tout le territoire national, y compris l'Alsace-Moselle, la Guyane, Saint-Pierre-et-Miquelon et Tahiti, sans être entendu. Vous prétendez défendre la laïcité, mais vous vous accommodez très bien de ces exceptions... (M. Hervé Gillé approuve.)

Ce que vous dites, madame Eustache-Brinio, m'encourage à représenter ma proposition. Comptez sur moi pour le faire. (M. Bernard Buis applaudit.)

M. Michel Savin.  - Nous disons simplement que les religions ne sont pas au-dessus des lois de la République.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Très bien !

M. Michel Savin.  - Si une femme veut porter un signe religieux lors d'une compétition, c'est qu'elle place la religion au-dessus des lois.

M. Yannick Jadot.  - Sérieusement ?

M. Michel Savin.  - On porte sur son maillot les couleurs de son club, de sa ville, mais pas de signes d'appartenance politique, syndicale ou religieuse. Il s'agit de protéger cet espace.

M. Olivier Paccaud.  - Nous voyons un net clivage droite-gauche.

M. Thomas Dossus.  - Extrême droite, plutôt !

M. Olivier Paccaud.  - La gauche prétend que ce texte exclura. Mais l'histoire récente nous offre un précédent qui prouve le contraire : l'affaire du voile dans le bassin creillois, dans les années quatre-vingt. Lorsque nous avons voté la loi de 2004, ...

M. Patrick Kanner.  - Nous l'avons votée aussi !

M. Olivier Paccaud.  - ... d'aucuns affirmaient qu'elle exclurait les jeunes filles du collège. Ces jeunes filles ont-elles quitté le collège ? Non.

L'habit fait le moine et l'abaya, la nonne. (Marques d'amusement à droite)

M. Stéphane Ravier.  - L'abaya fait le militant islamiste !

M. Olivier Paccaud.  - Une pression s'exerce sur les terrains quand certains se livrent à l'exhibition cultuelle. Cette loi dépassionnera ces situations, qui, désormais, feront pschitt !

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Considérez-vous que la laïcité soit en danger à La Réunion ? Chez nous, toutes les communautés vivent ensemble, dans le cadre des lois de la République.

La laïcité ne peut être un épouvantail brandi pour régler les problèmes de radicalisation. Fût-ce avec de bonnes intentions, vous allez abîmer le modèle de La Réunion. Lors du Vendredi saint, de la marche sur le feu hindoue, du Nouvel an chinois ou de la rupture du jeûne, les pratiquants se réunissent sur la voie publique ou des terrains de sport, et la police assure la sécurité du rassemblement.

M. Claude Kern.  - Cela n'a rien à voir !

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Toutes les communautés sont invitées à participer : c'est ainsi qu'on réussit le vivre-ensemble.

Ce n'est pas avec un texte de ce genre qu'on sert la cohésion sociale ! (On s'impatiente à droite, l'oratrice ayant dépassé son temps de parole.) Et comment pensez-vous qu'il puisse être appliqué à Mayotte ?

Mme Cécile Cukierman.  - Oui, il y a encore des femmes et des hommes de gauche qui défendent la laïcité - et même avec intransigeance.

Cette proposition de loi percute un débat de société. Chaque sénateur de mon groupe la reçoit en fonction des réalités qu'il vit sur son territoire. Il n'y a pas les gentils d'un côté, les méchants de l'autre.

Reste qu'il n'y a parfois pas pires fossoyeurs de la laïcité que ceux qui prétendent la défendre. Je ne fais pas partie de ceux qui voient dans le port du voile une nouvelle liberté pour les femmes. (Exclamations à droite) Mais le vrai problème, c'est ce qui n'est pas visible : je veux parler du rapport à la nudité dans les vestiaires. C'est là que s'exerce une emprise religieuse.

Loin des effets d'annonce et de la stigmatisation, il s'agit de savoir comment nous continuons à faire société, notamment par le sport.

M. Yannick Jadot.  - C'est la gauche qui a construit et défendu la laïcité ; c'est encore elle qui la défend aujourd'hui. (On le conteste énergiquement à droite.)

Mme Christine Bonfanti-Dossat.  - Elle ne la défend plus !

M. Yannick Jadot.  - Plutôt que Gilles Kepel, vous devriez lire Patrick Weil. Personne n'a écrit de manière plus intelligente sur la question. Il met l'accent sur la lutte contre le prosélytisme, qui doit tous nous rassembler.

Mais vous préférez stigmatiser une religion. Le clip de l'UEFA, diffusé avant les matchs de Champions League, s'ouvre sur une hijabeuse, au nom de la diversité. Vous êtes réactionnaires dans le débat européen !

M. Stéphane Ravier.  - Tout juste ! Il est temps de réagir !

M. Yannick Jadot.  - Quand la moitié des joueurs brésiliens qui entrent sur terrain se signent, cela ne vous gêne pas...

Lisez Franck Frégosi : il ne faut pas confondre visibilité du fait musulman et une France qui serait en voie d'islamisation. Vos fantasmes, gardez-les pour vous ! Nous gardons la laïcité. (M. André Reichardt s'exclame.)

M. Olivier Paccaud.  - Quelle naïveté...

M. Stéphane Ravier.  - Pourquoi la gauche est-elle si prompte à se mobiliser pour soutenir les femmes iraniennes et afghanes qui souhaitent se libérer du voile et, en France, si prompte à vouloir imposer le voile ? (Protestations à gauche)

M. Yannick Jadot.  - (Interpellant la droite de l'hémicycle) Vous êtes d'accord avec ça ?

M. Stéphane Ravier.  - Pourquoi la gauche se mobilise-t-elle autant pour priver les femmes de la liberté de se passer du voile ?

M. Akli Mellouli.  - Personne ne veut cela !

M. Stéphane Ravier.  - Parce qu'elle est lancée dans une course à l'échalote avec M. Mélenchon et ses amis. Dans les circonscriptions de nombre de ses élus, la pression arabo-musulmane est très forte. Elle caresse donc cet électorat dans le sens du poil.

Vous ne voulez pas reconnaître l'offensive islamiste, parce que ce serait reconnaître l'échec, pourtant flagrant, d'une politique d'immigration massive et incontrôlée qui conduit une partie de la jeunesse à se reconnaître davantage dans la religion musulmane que dans le modèle républicain et français. (M. Thomas Dossus proteste.)

M. Patrick Kanner.  - Oui, nous défendons les femmes afghanes.

M. Stéphane Ravier.  - C'est plus facile quand c'est loin !

M. Patrick Kanner.  - Calmez-vous, monsieur Ravier - ou bien rejoignez M. Trump à Washington.

Nous défendons les femmes afghanes parce que nous combattons les régimes totalitaires.

M. Stéphane Ravier.  - Et le combat contre l'islamisme ?

M. Patrick Kanner.  - Vous devriez prendre un petit Tranxène...

Nous sommes dans un pays de liberté : les femmes musulmanes portent ou non le voile selon leurs désidératas.

M. Olivier Paccaud.  - Et la pression des quartiers, des familles ?

M. Patrick Kanner.  - Vous prétendez leur interdire l'accès aux compétitions. Pourquoi pas aussi aux entraînements ? Et pourquoi pas aux clubs de théâtre ou aux conservatoires ? (Murmures désapprobateurs à droite) Au bout de votre logique, il y a de vraies exclusions.

Tout à l'heure, M. Grosperrin m'a interpellé avec facétie : oui, j'ai été le premier ministre des sports à retirer des agréments pour salafisme. Mais je ne fais pas de confusions. Ce n'est pas parce qu'il y a une, deux, dix ou vingt femmes voilées qu'il y a une menace salafiste. C'est aux services de l'État de mener les vérifications nécessaires, et je regrette qu'ils n'aient pas les moyens de le faire systématiquement. (On s'impatiente à droite, l'orateur ayant dépassé son temps de parole.)

Je rappelle enfin que, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, les socialistes ont voté la loi de 2004. (M. Adel Ziane renchérit.)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Les temps changent...

Mme Catherine Belrhiti.  - Monsieur Ouzoulias, vous avez parlé de l'Alsace et de la Moselle. Je vous rappelle que le Concordat n'est pas une dérogation : il est dans la loi, une fois pour toutes.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je vous expliquerai... (Mme Catherine Belrhiti s'exclame.)

M. Alexandre Ouizille.  - Je...

M. Max Brisson.  - Il a déjà pris la parole ! (M. Olivier Paccaud renchérit.)

M. Alexandre Ouizille.  - Je voulais prendre la parole sur l'article, mais cela m'a été refusé. (Les protestations redoublent à droite, où l'on fait valoir que l'orateur s'est déjà exprimé.)

M. Bernard Jomier.  - Respectez le président !

M. le président.  - C'est à moi de présider la séance.

M. Yannick Jadot.  - Ça suffit, les insoumis !

M. Olivier Paccaud.  - La règle est la même pour tous !

M. le président.  - Monsieur Ouizille, veuillez vous exprimer ; votre temps de parole s'écoule.

M. Alexandre Ouizille.  - Le président Kanner a rappelé que l'objectif doit être de lutter contre les pressions ; nous sommes intraitables sur ce point. Ne nous caricaturez donc pas.

Nous vous rappelons aux obligations découlant de la loi.

M. Max Brisson.  - Commencez par respecter le règlement ! Assez de leçons !

M. Alexandre Ouizille.  - Ce que vous faites est une injustice.

M. Olivier Paccaud.  - Respectez les règles !

Mme Frédérique Puissat.  - Nous demandons une suspension de séance pour que le débat puisse reprendre dans le calme et le respect de chacun. (On renchérit à droite.)

La séance est suspendue quelques instants.

M. Pascal Savoldelli.  - Pour ma part, j'étais déjà apaisé avant la pause... (Sourires)

J'ai étudié de près ce texte, me demandant : qu'est-ce qui entrave la démocratie dans la pratique sportive, qu'est-ce qui entrave la cohésion nationale, le vivre-ensemble ?

Je suis très attaché à la doctrine de l'intégration, mais l'intervention de M. Ravier a été un moment d'éclairage : ce texte est sous-tendu par une doctrine d'assimilation.

Je l'ai vu dans mes fonctions locales : le sport est facteur de cohésion, de socialisation, d'émancipation. Nous devons rester sur une doctrine d'intégration. C'est un fait : nous n'avons pas tous les mêmes pratiques culturelles. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste.) Je suis un môme de la banlieue, je connais ces réalités. C'est pourquoi je suis totalement opposé à la doctrine de l'assimilation.

M. Laurent Somon.  - Rappel au règlement, sur le fondement des articles 36 et 38. Si l'on pouvait faire respecter les temps de parole, cela contribuerait à rendre nos débats plus sereins. D'autre part, il est possible, les avis contraires ayant été entendus, que les orateurs ne puissent s'exprimer qu'en nombre limité, pour éviter que les débats ne s'allongent à l'excès. (On renchérit à droite.)

M. Patrick Kanner.  - Rappel au règlement, sur la base de la sincérité des débats. Il semblerait que l'un de nos collègues, celui qui siège en haut de la montagne, m'ait lancé, pendant que je parlais, l'injure de « collabo ».

M. Thomas Dossus.  - C'est vrai !

M. Patrick Kanner.  - Certains de nos collègues auraient entendu cette interruption. Venant de M. Ravier, c'est un peu le monde à l'envers... Je souhaite une vérification et me réserve d'entreprendre auprès de la présidence les démarches prévues en cas d'insulte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du GEST)

M. Thomas Dossus.  - Je tiens à répondre aux bêtises racistes de M. Ravier. Nous défendons la liberté des femmes afghanes et iraniennes. Nous soutenons d'ailleurs l'octroi de l'asile aux femmes qui fuient le régime des Talibans, dont l'un des premières décisions fut d'interdire la pratique sportive des femmes. (M. Yannick Jadot renchérit.)

Cette proposition de loi constitue une forme de discrimination à l'égard des femmes. L'année dernière, des femmes afghanes réfugiées ont pu participer aux JOP sous la bannière olympique. Les femmes voilées se sentent extrêmement discriminées par ce texte. Hélas, la commission n'a auditionné aucune de leurs représentantes. Les premières concernées, vous n'en avez que faire !

Votre conception de la société a été révélée par M. Ravier : vous ne reconnaissez pas qu'il y a dans notre pays des musulmanes et des musulmans, alors que l'histoire de notre pays est celle de l'assimilation de tout le monde.

Mme Laurence Harribey.  - De l'intégration ! (M. Pascal Savoldelli s'en amuse.)

M. Laurent Burgoa.  - Je préfère résister que collaborer : je confirme que M. Ravier a tenu le propos dénoncé par M. Kanner. (On remercie l'orateur sur plusieurs travées à gauche.)

M. Guillaume Gontard.  - Je m'étonne que nos collègues de droite soient à ce point mal à l'aise qu'ils aient eu besoin de solliciter une suspension de séance.

M. Max Brisson.  - Assez de provocations !

M. Guillaume Gontard.  - À quoi sert ce texte ? Nous sommes tous républicains. Certains portent même ce nom, comme s'ils en éprouvaient le besoin...

M. Max Brisson.  - C'est scandaleux !

M. Guillaume Gontard.  - La loi de 1905 est un texte de liberté. Mais, vous, vous voulez interdire, revenir sur nos principes. Vous avez un problème avec les valeurs républicaines ! (Vives protestations à droite)

Si l'on parle de neutralité, parlons aussi de la publicité, du financement des grands clubs. Un des principaux est financé par un pays qui ne respecte pas les droits humains. Cela aussi nous pose question. Soyez cohérents avec vous-mêmes !

M. Max Brisson.  - Et vous, moins présomptueux !

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Si l'on pouvait rester dans le cadre de la discussion...

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos4, 9 et 28 rectifié quinquies sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°197 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l'adoption 113
Contre 227

Les amendements nos4, 9 et 28 rectifié quinquies ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°17 de M. Dossus et alii.

M. Thomas Dossus.  - Cet article marque une rupture totale avec les principes de la loi de 1905, exclut les musulmanes des terrains de compétition comme des indésirables. Il instrumentalise la laïcité pour en faire un outil de discrimination, alors que l'article L100-1 du code des sports garantit la liberté de pratique sportive.

La Constitution garantit l'égalité devant la loi et la Convention européenne des droits de l'homme prohibe toute discrimination. Au mépris de ces principes, ce texte privera certaines femmes de l'accès aux compétitions sportives au prétexte de leur tenue vestimentaire. Le sport est pourtant vecteur d'émancipation, d'inclusion et d'égalité.

Exclure au nom de la laïcité est un dévoiement, une absurdité ! C'est pourquoi nous proposons de créer un délit d'entrave à l'accès au sport.

M. le président.  - Amendement n°23 de Mme Cazebonne et du RDPI.

Mme Samantha Cazebonne.  - Cet amendement réécrit l'article pour corriger son fort risque d'inconstitutionnalité, lié à sa portée générale et à l'absence de démonstration d'un risque de trouble à l'ordre public. Plus précisément, il s'agit de codifier l'équilibre trouvé par le Conseil d'État dans son arrêt du 29 juin 2023 en visant les fédérations délégataires de service public. En outre, le port d'une tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique ou religieuse serait interdit pour les mineurs. Rappelons que près de 60 % des sportifs licenciés ont moins de 20 ans. Le sport est facteur d'intégration, de mixité et de cohésion nationale.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°17, car les textes en vigueur permettent déjà de combattre les discriminations.

L'amendement n°23 a fait débat au sein de la commission. Nous considérons qu'à l'intérieur d'une enceinte sportive, comme à l'école, il faut interdire le port de tout signe religieux. Avis défavorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Avis défavorables. Le Gouvernement a déposé un amendement d'équilibre visant les fédérations sportives qui exercent une mission de service public, afin de consolider juridiquement le texte.

L'amendement n°17 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°23.

M. le président.  - Amendement n°31 du Gouvernement.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Voici l'amendement que j'annonçais : il limite le champ de l'article aux compétitions sportives organisées par les fédérations délégataires de service public. C'est, en effet, la notion de service public qui permet d'appliquer le principe de laïcité.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Cet amendement restreint l'application de l'article 1er aux fédérations délégataires, soit 86 sur les 118 fédérations agréées. Ces fédérations sont détentrices d'un monopole d'organisation des compétitions dans le cadre d'un contrat de délégation avec l'État. L'amendement ayant été déposé tardivement, la commission n'a pas pu se prononcer. Il ne me paraît pas contraire à l'esprit des auteurs du texte : à titre personnel, avis favorable.

M. Patrick Kanner.  - Je suis curieux de savoir ce que penseront nos collègues de droite de cet amendement du Gouvernement qui atténue la portée du texte...

Reste que, sur le fond, rien n'est changé. L'article entre toujours en contradiction avec notre conception de la laïcité. Nous voterons donc contre l'amendement.

M. Michel Savin.  - L'amendement du Gouvernement restreint le périmètre de l'article. Ne soyons pas naïfs : dans les fédérations qui seront exclues du dispositif, des problèmes se posent aussi - je pense notamment à certaines nouvelles fédérations de sports de combat, qui attirent beaucoup de jeunes. Des transferts d'athlètes pourraient se produire. Nous suivrons la position du rapporteur, mais j'appelle le Gouvernement à une grande vigilance.

M. Max Brisson.  - Je comprends l'appel à la vigilance de M. Savin, mais l'amendement du Gouvernement est intéressant. Soyons pragmatiques : la laïcité, c'est la neutralité du service public. Nous avons prévu une laïcité singulière à l'école. Nous construisons une démarche de cet ordre dans le sport. Il est important qu'elle s'appuie sur la notion de service public, qui suppose un espace neutre.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Monsieur Savin, nous ne sommes pas démunis d'outils juridiques pour poursuivre des associations qui se livreraient à des pratiques séparatistes. Le dispositif que nous proposons est équilibré. Suivons la position du Conseil d'État pour consolider votre texte.

M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.  - L'amendement du Gouvernement est tardif, mais utile - s'il avait été déposé plus tôt, peut-être qu'un certain nombre d'interventions n'auraient pas eu lieu... M. Savin a raison de nous alerter sur la nécessité d'être vigilant quant aux pratiques de toutes les fédérations, mais c'est la notion de service public qui nous permet de légiférer.

M. Alexandre Ouizille.  - Le ministre l'a dit, nous avons d'autres moyens pour agir contre les pressions, notamment l'article 31 de la loi 1905. Dans les faits, cette loi ira à l'encontre des objectifs de ses auteurs : en créant des frustrations, elle fera le jeu des islamistes, comme le montre Hugo Micheron dans La Colère et l'oubli.

L'amendement n°31 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°29 de M. Piednoir, au nom de la commission de la culture.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - C'est une précision : les dispositions de l'article s'appliquent aux acteurs des compétitions.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Avis favorable.

M. Jean-Jacques Lozach.  - Qu'est-ce à dire ? Le code du sport évoque les acteurs du sport, pas les acteurs des compétitions. Les arbitres sont-ils concernés ? Les remplaçants ? Les entraîneurs ? (M. Stéphane Piednoir le confirme successivement.)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - M. Lozach, qui connaît bien le monde du sport, a répondu à sa propre question. Les trois catégories qu'il a citées sont concernées, mais pas les spectateurs.

L'amendement n°29 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié ter de M. Levi et alii.

M. Pierre-Antoine Levi.  - De nombreuses fédérations sportives prévoient déjà des sanctions en cas de non-respect du principe de laïcité -  c'est le cas de la FFF. Nous proposons de généraliser cette pratique et de donner une base légale claire aux dispositifs existants, tout en respectant l'autonomie des fédérations. Le sport, vecteur de cohésion sociale, doit demeurer un espace de neutralité et de fraternité.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - En créant une interdiction, nous nous sommes interrogés sur le contrôle et les sanctions. En commission, j'avais proposé une contravention ; M. Levi nous propose une sanction disciplinaire, définie par chaque fédération. Avis favorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - De prime abord, j'aurais donné un avis de sagesse. Mais je vous propose un avis favorable, si vous précisez qu'il s'agit des fédérations délégataires de service public.

M. Pierre-Antoine Levi.  - J'accepte la rectification.

L'amendement n°8 rectifié quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié quater de Mme Joseph et alii.

Mme Else Joseph.  - Les grandes manifestations sportives constituent un précieux moment d'unité nationale. Étrenner le maillot français, c'est porter nos valeurs. Les sportifs de l'équipe de France participent à une mission de service public, ils sont donc soumis au principe de neutralité, comme l'a confirmé le Conseil d'État dans sa décision de juin 2023 et comme cela a été rappelé lors des JOP de 2024.

Mais la loi est muette et les revendications communautaristes s'engouffrent dans ce flou juridique. Cet amendement applique donc le principe de neutralité aux personnes sélectionnées en équipe de France.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Ces athlètes participent à l'exécution du service public confié à leur fédération. À ce titre, ils doivent respecter le principe de neutralité, ce que le Conseil d'État a confirmé en juin 2023 et qu'Amélie Oudéa-Castéra a réaffirmé lors des JOP 2024.

L'article 1er ne s'appliquait qu'aux compétitions départementales, régionales et nationales. L'amendement complète donc le dispositif. Avis favorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Avis favorable.

M. Thomas Dossus.  - Un des plus grands attaquants de l'équipe de France, Olivier Giroud, affirme que Jésus a joué un rôle dans sa carrière sportive - c'est même tatoué sur son corps. L'équipe de France aurait-elle dû s'en passer ?

M. Olivier Paccaud.  - Il ne joue pas torse nu. (M. Thomas Dossus lève les yeux au ciel.)

L'amendement n°22 rectifié quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°11 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Cet amendement introduit une formation à la laïcité et aux discriminations indirectes pour les membres des instances dirigeantes des fédérations. On voit combien la laïcité est dénaturée et instrumentalisée ici !

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - C'est intéressant. Mais vous laissez entendre que l'application du principe de laïcité pourrait conduire à des formes insidieuses de discrimination. Avis défavorable, donc.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Il est nécessaire de former les acteurs du monde du sport sur la laïcité. Mais le guide sur le fait religieux et la laïcité dans le sport a été actualisé et transmis aux fédérations ; leurs contrats de délégation mentionnent expressément la lutte contre le séparatisme ; le déploiement de référents est en cours. Il revient donc aux fédérations de mobiliser ces ressources. Votre amendement est satisfait : retrait, sinon avis favorable.

M. Akli Mellouli.  - Avez-vous bien compris l'amendement ? Oui, il y a de la discrimination. Avec vous, la laïcité devient un outil de discrimination !

Déjà en 1905, Jean Jaurès et Aristide Briand avaient considéré que la laïcité ne s'appliquait pas à la tenue vestimentaire -  il s'agissait alors de la soutane dans l'espace public. La laïcité est un outil d'émancipation et non de stigmatisation ou de discrimination. Ne portons pas atteinte à la liberté des sportifs.

Mme Mathilde Ollivier.  - Les femmes musulmanes qui se présentent à l'entrée d'un club se heurtent à des personnes qui ne connaissent pas bien le principe de laïcité. Cette formation permettrait de lutter contre ces cas de discrimination. En réalité, monsieur Savin, parce que certains ne connaissent pas bien les règles, l'accès au sport de ces femmes est restreint.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°10 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - C'est une demande de rapport, destinée à connaître les conséquences réelles de cette interdiction. Cette loi risque d'avoir des effets très négatifs sur les femmes et les jeunes filles qui ont déjà du mal à accéder au sport : 49 % des femmes renoncent au sport pour des raisons financières, 46 % pour des raisons familiales et 40 % pour charge domestique. Il serait absurde d'ajouter de nouvelles barrières ! Quelques mois après les JOP, il est honteux de réduire la pratique du sport en France.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Ce bilan viendra en son temps. De plus, vous connaissez le sort que le Sénat réserve traditionnellement aux demandes de rapport. Enfin, vous proposez déjà les conclusions du rapport demandé... Avis défavorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - La pratique sportive féminine progresse, grâce notamment à la dynamique des JOP. L'an dernier, le nombre de licences a progressé plus vite chez les filles que chez les garçons -  en dépit des restrictions vestimentaires déjà édictées par certaines fédérations et confirmées par le Conseil d'État. Le service public ne doit pas renoncer à la laïcité -  essentielle à son bon fonctionnement  - pour être attractif.

Il est trop tôt pour mener une telle évaluation. Avis défavorable.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, l'article 1er, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°198 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l'adoption 223
Contre   92

L'article 1er, modifié, est adopté.

(Mme Jacqueline Eustache-Brinio applaudit.)

Après l'article 1er

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié quinquies de Mme Corbière Naminzo et alii.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Nous demandons un rapport sur les effets de cette loi sur le sport féminin. Alors que nous devrions favoriser l'accès des femmes au sport, la proposition de loi risque d'avoir l'effet inverse. Alors que 38 % des hommes sont licenciés dans un club, seulement 20 % des femmes le sont ; un tiers des licences est détenu par les femmes ; une fille sur deux arrête le sport à l'adolescence, avec les conséquences que l'on sait sur sa santé.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Demande de rapport, donc avis défavorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Laissons le texte s'appliquer pour l'évaluer utilement. Avis défavorable.

L'amendement n°27 rectifié quinquies n'est pas adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié ter de M. Fialaire et alii.

M. Bernard Fialaire.  - L'article 2 est satisfait : supprimons-le. Il empiète sur les compétences du maire, qui peut déjà interdire un rassemblement religieux en cas de trouble à l'ordre, la tranquillité ou la sécurité publics. N'ouvrons pas la porte à des contentieux inutiles et à des décisions discriminatoires.

M. le président.  - Amendement identique n°5 de Mme Robert et du groupe SER.

M. Jean-Jacques Lozach.  - Ce dispositif entre en conflit avec le principe de libre administration des collectivités territoriales, l'esprit de la loi de 1905 et la jurisprudence du Conseil d'État. Nous prenons note de la volonté du rapporteur qui, avec son amendement n°30, a amélioré une rédaction stigmatisante envers une seule religion.

M. le président.  - Amendement identique n°12 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - L'article est satisfait par la jurisprudence constante du Conseil d'État. Inutile, il est symptomatique de cette proposition de loi, qui détourne le principe de laïcité à des fins politiques et discriminatoires. Pourquoi mentionner les salles de prière collective ?

M. le président.  - Amendement identique n°19 rectifié de Mme Cazebonne et du RDPI.

Mme Samantha Cazebonne.  - Nous demandons aussi la suppression de cet article, car le droit est suffisant. Lorsque la collectivité ne respecte pas le principe de neutralité, le déféré préfectoral permet d'y remédier. Lorsqu'une association ne respecte pas la convention de mise à disposition, la collectivité peut aussi agir.

M. le président.  - Amendement identique n°25 rectifié quater de M. Ouzoulias et alii.

M. Pierre Ouzoulias.  - À titre personnel, je me demande si la mise à disposition gracieuse d'un local est bien conforme à l'article 2 de la loi de 1905, qui interdit le subventionnement des cultes.

La jurisprudence du Conseil d'État du 18 mars 2024 est bien plus précise que la rédaction de l'article 2, qui évoque des « conditions préférentielles » -  c'est beaucoup trop vague.

Et l'on ne vise ici que les associations, alors qu'en Alsace-Moselle, le culte est géré par des établissements publics. On imposerait donc à l'Alsace-Moselle le régime des cultes de la « France de l'intérieur », monsieur Kern. Ne traitons pas un point aussi délicat dans un texte sur le sport.

M. Max Brisson.  - Belle défense du Concordat ! (Sourires)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Avis défavorable, sans surprise. Ces interventions m'étonnent : soit vous n'avez pas la bonne version du texte ; soit vous ne l'avez pas comprise ; soit vous l'avez, l'avez comprise, mais en faites un usage politicien. (Mme Sylvie Robert et MM. Bernard Fialaire et Fabien Gay protestent.)

Le texte prévoit que « la collectivité territoriale propriétaire d'un équipement sportif détermine les conditions d'utilisation de cet équipement et des locaux attenants. Leur utilisation pour la pratique sportive est exclusive de tout usage religieux, notamment comme salle de prière collective. »

Le maire pourra ainsi passer un contrat avec une association cultuelle, mais on ne souhaite pas lorsqu'un équipement est confié à une association pour y faire du sport que l'usage soit dévoyé. Nulle entrave aux pouvoirs des élus locaux. On ne veut plus qu'un match de foot s'arrête pour prier dans les vestiaires, voire sur le terrain. (Protestations sur les travées du GEST)

M. Yannick Jadot.  - Mais ça n'existe pas !

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Si l'équipement a été confié pour faire du sport, une association ne doit pas pouvoir y faire autre chose. Les personnes que nous avons entendues relatent des faits très précis qui confirment la pertinence de cette disposition.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Le Gouvernement reste mobilisé pour lutter contre toutes les stratégies de contournement. La loi du 24 août 2021 met à disposition des outils tels que le référé laïcité ou le contrat d'engagement républicain. Sagesse.

M. Pierre Ouzoulias.  - Changeons un peu de religion, cela fera du bien... Vous le savez, étant partisan d'une application stricte de la loi de 1905, je suis hostile à la présence de crèches dans les bâtiments publics. Il existe une fédération sportive chrétienne qui développe sa pastorale par le sport. Elle dispose d'aumôniers mis à disposition par la Conférence des évêques de France. Voulez-vous leur interdire d'aller dans les vestiaires ?

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Pendant le match.

M. Pierre Ouzoulias.  - Ah ! Précision importante.

Ne prenons pas le risque de revenir sur les conditions de mise à disposition des bâtiments publics aux cultes au détour d'un texte sur le sport.

M. Bernard Fialaire.  - Je comprends l'avis de sagesse du Gouvernement. J'ai été confronté comme maire à une association sportive qui interrompait ses matchs pour faire des prières. Nous l'avons menacée de lui retirer le gymnase et elle a arrêté. Nous avons donc déjà les moyens d'arrêter ces agissements. (On le confirme à gauche ; Mme Jacqueline Eustache-Brinio le conteste.)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Oui, mais ce n'est pas une obligation.

M. Bernard Fialaire.  - Il n'empêche, cet article est superfétatoire.

M. Patrick Kanner.  - C'est un article politicien.

Mme Sylvie Robert.  - Comme toute la proposition de loi !

M. Michel Savin.  - J'ai cité, tout à l'heure, les éléments inquiétants relevés par le SCRT. Ces phénomènes existent.

Rien n'empêche un maire de mettre à disposition un équipement sportif pour une manifestation religieuse. Là il s'agit de protéger la pratique sportive quand elle a lieu. Certains maires le font, d'autres ne le font pas. (M. Bernard Fialaire écarte les bras en signe d'impuissance.) Nous avons donc besoin d'un cadre législatif.

M. Claude Kern.  - Cet article ne remet pas en cause le Concordat, Monsieur Ouzoulias : les lieux de culte ne sont pas des lieux de pratique sportive...

M. Pierre Ouzoulias.  - Ce n'est pas ce que j'ai dit.

Les amendements identiques nos2 rectifié ter, 5, 12, 19 rectifié et 25 rectifié quater ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°30 de M. Piednoir, au nom de la commission de la culture.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Nous remplaçons le terme « prière », non défini dans notre droit, par l'expression « exercice d'un culte ».

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°30 est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Article 2 bis

M. le président.  - Amendement n°6 de Mme Robert et du groupe SER.

Mme Sylvie Robert.  - Cet amendement supprime l'ajout redondant de dispositions prévoyant le retrait de l'agrément et donc de l'aide de l'État aux associations qui n'auraient pas fait respecter les interdictions de port de signes religieux. Ce retrait est déjà possible au titre du CER.

Il est paradoxal que la droite sénatoriale qui a bataillé pour imposer ce dernier et qui l'a étendu à toutes les associations sportives propose une nouvelle règle de retrait de l'agrément à ces associations... De plus, en quoi un club pourrait-il être responsable de l'utilisation à des fins de culte d'un local dont la commune, et non lui, est propriétaire.

M. le président.  - Amendement identique n°13 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°20 rectifié de Mme Cazebonne et du RDPI.

Mme Samantha Cazebonne.  - Les associations sportives qui méconnaissent le CER peuvent déjà voir leur agrément suspendu. La solution ne réside pas dans la création de nouvelles règles, mais dans la montée en charge des dispositifs existants. Supprimons l'article 2 bis.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Je ne comprends pas bien les arguments, parce que nous sommes d'accord : l'objet est bien de renforcer le CER, qui est ressenti comme une formalité administrative sur le terrain. Cet article crée une sanction concrète en cas de non-respect de ce texte... que le CER ne pouvait pas connaître, par définition. Avis défavorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Conformément à une jurisprudence constante du Gouvernement, sagesse. (Sourires)

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Ce CER est une simple formalité administrative - un Cerfa. Les préfets n'ont pas assez de moyens pour contrôler le respect des obligations par les associations.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Dominique Vérien et moi-même, rapporteurs de la loi confortant les principes de la République, avons constaté, lorsque nous avons évalué son application, que les contrats d'engagement républicains ne servaient à rien : on signe un papier sans savoir ce qu'il y a dedans, et tout le monde est content... (On ironise à gauche.) Renforcer le dispositif est nécessaire.

Les amendements identiques nos6, 13 et 20 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°14 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - À l'inverse de l'article 2 bis, cet amendement propose un retrait d'agrément lorsqu'une association se rend coupable de discrimination. Plutôt que de stigmatiser, plaçons la lutte contre les discriminations au centre des pratiques sportives.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Les pratiques discriminatoires sont déjà sanctionnées par le code pénal. Même chose pour les saluts nazis, qui sont des appels à la haine. Retrait, sinon avis défavorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Le Gouvernement est favorable aux retraits d'agrément aux personnes physiques et morales qui ne respecteraient pas la loi. Mais l'amendement est satisfait par l'article 225-1 du code pénal. Le CER prévoit bien que l'association s'engage à respecter les principes d'égalité, de liberté, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ce qui est incompatible avec la commission d'infraction de discrimination, et à s'abstenir de toute action portant atteinte à l'ordre public.

Le droit positif suffit. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Yannick Jadot.  - Expliquez-moi pourquoi les chants homophobes continuent dans les stades si c'est un délit. Aucun stade n'a été fermé, y compris quand les chants sont scandés par des associations reconnues par des clubs de football.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

L'article 2 bis est adopté.

Article 3

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié ter de M. Fialaire et alii.

M. Bernard Fialaire.  - En interdisant les signes religieux aux usagers des piscines et baignades, l'article 3 crée une confusion entre la neutralité qui concerne les agents et les usagers. Supprimons cet article qui remet en cause l'équilibre de la loi de 1905, laquelle garantit la neutralité des institutions et la liberté de conscience des citoyens.

M. le président.  - Amendement identique n°7 de Mme Sylvie Robert et du groupe SER.

M. Jean-Jacques Lozach.  - Cet article contredit le principe de libre administration des collectivités territoriales et a une portée plus large que la jurisprudence du Conseil d'État, en l'élargissant aux convictions politiques.

M. le président.  - Amendement identique n°16 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - L'interdiction généralisée des signes religieux dans les piscines municipales va à l'encontre des principes de laïcité et de libre administration.

M. le président.  - Amendement identique n°21 rectifié de Mme Cazebonne et du RDPI.

Mme Samantha Cazebonne.  - L'article 3 est satisfait par le droit existant.

M. le président.  - Amendement identique n°26 rectifié quater de M. Ouzoulias et alii.

M. Pierre Ouzoulias.  - L'ordonnance du 21 juin 2022 est très claire : « lorsqu'il prend en compte pour l'organisation du service public les convictions religieuses de certains usagers, le gestionnaire de ce service ne peut procéder à des adaptations qui porteraient atteinte à l'ordre public ou qui nuiraient au bon fonctionnement du service, notamment en ce que, par leur caractère fortement dérogatoire par rapport aux règles de droit commun et sans réelle justification, elles rendraient plus difficile le respect de ces règles par les usagers ne bénéficiant pas de la dérogation ou se traduiraient par une rupture caractérisée de l'égalité de traitement des usagers, et donc méconnaîtraient l'obligation de neutralité du service public ».

Les principes sont forts : bon fonctionnement du service, respect des règles collectives, rupture caractérisée de l'égalité de traitement des usagers. Or dans votre article, vous oubliez le principe de « respect des règles collectives ». La loi ne doit pas être en dessous de la jurisprudence. Supprimons donc l'article.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - L'article 3 impose le respect des principes de neutralité et de laïcité dans les piscines publiques, conformément à la jurisprudence du Conseil d'État de juin 2022. Il n'est pas possible de prévoir une dérogation aux règles communes. Avis défavorable aux amendements.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Retrait au profit de l'amendement n°32 du Gouvernement, qui reprend la décision du Conseil d'État ayant trait à la ville de Grenoble. Il est précisé que le gestionnaire d'un service public est tenu de veiller au respect de l'égalité : la règle doit être la même pour tous, il n'est pas possible de procéder à des adaptations, y compris pour des raisons religieuses.

Mme Frédérique Puissat.  - À Grenoble et ailleurs dans l'Isère, nous vivons des fortes tensions. Le maire, pourtant d'une sensibilité politique différente de la nôtre, nous a demandé d'être clairs en la matière. Cela fera baisser la tension.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - De quoi parlons-nous ? Du burkini, disons-le. Depuis tout à l'heure, nous ne parlons que des femmes. Pourquoi ? Parce qu'elles sont l'outil majeur des islamistes dans le monde - mais personne n'en parle. Nous savons que les associations à Grenoble étaient dans les mains du collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), qui a été dissous en France. Ne soyons pas dans le déni : les islamistes utilisent les femmes pour construire leur oumma. Opposons-nous à ces amendements de suppression.

M. Guillaume Gontard.  - C'est vous qui stigmatisez les femmes. (On s'indigne à droite.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - On les protège, monsieur.

M. Guillaume Gontard.  - Je suis d'accord, on ne parle que des femmes.

M. Jacques Grosperrin.  - Parce que vous les avez oubliées.

M. Guillaume Gontard.  - À Grenoble, il y a un règlement des piscines, comme à Rennes. Relisez-le : il traite d'une question sportive et sanitaire. Un point c'est tout.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Un point c'est tout ?

M. Guillaume Gontard.  - Il ne stigmatise pas telle ou telle religion. Ce que vous proposez est totalement absurde : la piscine sera interdite à un certain nombre de personnes, et pas celles que vous souhaitez. Vous allez interdire à certaines personnes de couvrir un tatouage religieux, par exemple...

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - N'importe quoi !

M. Guillaume Gontard.  - On entend beaucoup à droite appeler à faire confiance aux maires ; eh bien, faites-le ! Lorsque cela n'allait pas dans le bon sens à Grenoble, le Conseil d'État a remis de l'ordre. À quoi jouez-vous, sinon à réveiller la bête immonde, comme on l'a entendu tout à l'heure...

M. Pierre Ouzoulias.  - Selon les juristes, c'est non pas la laïcité qui a motivé le Conseil d'État, mais le « respect des règles collectives » et « l'égalité de traitement des usagers du service public ». Or la notion de règle collective manque dans l'article 3. Je suis d'accord pour transposer la décision du Conseil d'État, mais intégralement.

M. Michel Savin.  - Cet article est motivé par un certain nombre de situations que nous avons connues et qui ont nécessité la mobilisation des forces de l'ordre.

M. Jean-François Longeot.  - Exactement !

M. Michel Savin.  - Le maire de Grenoble demande que la loi puisse l'accompagner. (M. Guillaume Gontard le conteste.)

C'est à nous, législateurs, de fixer un cadre : les signes religieux ne sont pas admis dans ces lieux. Certaines associations militent pour fragiliser ce cadre. La loi doit être claire.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Très bien !

Mme Mathilde Ollivier.  - C'est la dérogation pour des personnes qui souhaiteraient porter un burkini qui est évoquée dans la jurisprudence du Conseil d'État. Or à l'article 3, vous cherchez à restreindre la liberté de conscience dans un nouvel espace. Il y a une confusion entre des arguments de sécurité, hygiène et bon fonctionnement de l'infrastructure et le principe de neutralité des agents du service public, qui ne s'applique pas aux usagers.

Les amendements identiques nos3 rectifié ter, 7, 16, 21 rectifié et 26 rectifié quater ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Mettons un terme à certaines interdictions abusives de tenues dans les piscines ou les plages. Certaines mairies interdisent le port du burkini sans fondement. Le Conseil d'État a rappelé en 2016 que ces interdictions portent atteinte à la liberté de conscience et à la liberté d'aller et venir. C'est une dérive inquiétante.

Notre amendement propose un cadre clair : les interdictions de tenues de bain ne peuvent être motivées que par des raisons d'ordre public ou d'hygiène.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Avis défavorable à cet amendement qui propose une rédaction alternative pour limiter les tenues de bain, en revenant sur la jurisprudence du Conseil d'État. Restons-en à des motifs d'ordre public et d'égalité de traitement des usagers.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Même avis. Nous nous en tenons à la jurisprudence du Conseil d'État du 17 juillet 2023.

L'amendement n°15 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°32 du Gouvernement.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Défendu.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Le Gouvernement propose « de prohiber le port de signes ou de tenues susceptibles » de contrevenir à la neutralité des services publics et à la laïcité. À titre personnel, j'émets un avis de sagesse.

L'amendement n°32 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

Après l'article 3

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié de Mme Borchio Fontimp et alii.

Mme Patricia Demas.  - Mme Borchio Fontimp souhaite renforcer les contraintes d'honorabilité qui pèsent sur les éducateurs sportifs en contact avec des mineurs. Il est urgent de les protéger du prosélytisme islamiste. Les personnes inscrites au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ne doivent pas pouvoir enseigner, animer ou encadrer une activité physique ou sportive auprès de mineurs.

M. Stéphane Piednoir, rapporteur.  - Le FSPRT, prévu par un décret de 2015, est utilisé par les services de renseignement pour lutter contre le terrorisme. Seuls les destinataires habilités peuvent y accéder. Il a une vocation préventive ; les personnes ne sont pas condamnées. On ne peut donc priver de droits une personne inscrite sur un tel fichier préventif. Cela dit, c'est une question importante. Aussi, en reprenant la proposition des anciens députés Éric Diard et Éric Poulliat lors de leur mission d'information sur les services publics face à la radicalisation, nous souhaitons permettre la réalisation d'enquêtes administratives préalables à la délivrance de cartes professionnelles d'éducateurs sportifs. Retrait, ou à défaut avis défavorable.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - Retrait, car votre amendement sera satisfait par l'article 4.

Mme Christine Lavarde.  - Entraîneure fédérale, je n'ai pas de carte professionnelle. Ma fédération m'autorise à encadrer des groupes d'enfants, car j'ai les bonnes certifications. Cet article ne concerne que les entraîneurs ayant un diplôme d'État et non les entraîneurs fédéraux, or de nombreuses fédérations reposent sur des bénévoles.

M. François-Noël Buffet, ministre.  - La référence à l'article L114-1 du code la sécurité intérieure permet de contrôler l'ensemble des fichiers. Nous profiterons de la navette parlementaire pour étudier cette précision.

L'amendement n°1 rectifié est retiré.

L'article 4 est adopté.

Vote sur l'ensemble

Mme Sylvie Robert .  - J'ai beaucoup regretté la teneur de notre débat cet après-midi. Nous sommes dans une société très polarisée. Les sujets choisis par les collègues Les Républicains ne font que nourrir des propos qui fracturent et divisent. Ils vont à l'encontre de notre vivre ensemble. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste.) C'est la septième fois que l'on tente de légiférer sur le voile. On avait débattu des accompagnateurs scolaires, des CER... Cette proposition de loi est bien politique : vous instrumentalisez la laïcité pour stigmatiser une religion. (On le conteste à droite.) Pensez-vous vraiment que cette proposition de loi va régler les quelques problèmes repérés dans les fédérations ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Les quelques problèmes ?

Mme Sylvie Robert.  - M. Lozach l'a dit, le mouvement sportif n'est pas demandeur. (Vives contestations à droite)

Ce n'est pas en dévoyant la laïcité que l'on fera avancer le sujet. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et du GEST)

M. Pierre Ouzoulias .  - Nous regrettons vivement que la Charte olympique n'ait pas été transposée en droit français. C'est un texte attaqué, qui va l'être encore davantage. Patrie de l'olympisme, la France aurait pu s'en enorgueillir. La FFF en a repris les principes.

La mise à disposition des bâtiments publics pour les cultes doit être retravaillée, tout comme la question de l'égalité de traitement des usagers du service public, notamment dans le sport.

Il faut également revoir la délégation de service public entre l'État et les fédérations, qui ont besoin d'un cadre plus précis.

M. Max Brisson .  - Il y a un clivage. Je le dis à nos collègues de gauche : vous êtes dans le déni.

M. Patrick Kanner.  - Vous remettez encore une pièce...

M. Max Brisson.  - Le mouvement sportif attend d'être épaulé par la loi. Je remercie Michel Savin d'avoir proposé ce texte, le rapporteur de l'avoir amélioré. Il est imparfait, mais il a le mérite de traiter un sujet important.

Mme Sylvie Robert.  - Arrêtons ! C'est facile !

M. Max Brisson.  - Le cadre peut être travaillé, mais il apporte des réponses. Nous avons avancé. Nous sommes fidèles aux pères fondateurs de la laïcité, à ceux qui se sont battus pour elle.

M. Thomas Dossus.  - C'est de l'usurpation et du dévoiement !

M. Max Brisson.  - Les jeunes filles dont nous avons parlé au cours de nos débats, nous ne les stigmatisons pas, nous les protégeons ! (Protestations sur les travées du GEST)

Vous avez oublié ce qui fut le combat de personnes qui étaient plutôt de votre côté de l'hémicycle politique, et dont le combat était de protéger ces jeunes femmes. Ce soir, c'est nous qui l'avons fait ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Evelyne Corbière Naminzo .  - Cette proposition de loi va à l'encontre du droit européen, du droit international, de notre Constitution, du code du sport. Alors que le sport doit être un vecteur d'apprentissage de la citoyenneté, cette proposition de loi exclut des citoyens français de la pratique sportive. Elle est discriminatoire et stigmatise les femmes musulmanes, qui portent le voile et subissent des discriminations tout au long de leur vie : en matière de logement, lors de contrôles de police ou de recherche d'emploi. Comment appliquer ce texte dans les départements majoritairement musulmans, à Mayotte par exemple ? Voulez-vous en faire des zones de non-droit ? À La Réunion, nous avons choisi le chemin du partage et refusons l'instrumentalisation de la laïcité par des lois aux relents racistes et sexistes.

Ce n'est pas en stigmatisant une communauté que nous construirons une société apaisée et laïque.

La voie assimilationniste n'est que le chemin de l'erreur. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER et du GEST)

M. Akli Mellouli .  - Nous allons voter une loi pour intégrer et émanciper les jeunes femmes, mais en commençant par leur interdire l'accès à certains espaces. On nous traite d'idéologues, mais avoir une idéologie n'est pas un problème ; le problème c'est le dogmatisme. Or nous avons affaire à des dogmatiques : où voyez-vous des matchs qui s'arrêtent pour prier ? On fait d'un fait divers la réalité de notre pays. Est-ce la visibilité qui pose problème ? Pour les aider à s'émanciper, il faut aider les femmes à être présentes dans l'espace public, et non les inciter à s'enfermer. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Bientôt, être musulman en France sera un délit...

M. Max Brisson.  - Vous avez déjà capitulé !

M. Akli Mellouli.  - C'est une loi xénophobe et raciste et non pas une loi laïque. (Vives exclamations indignées à droite) Vous galvaudez la laïcité ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Raymond Hugonet .  - Sommes-nous à l'Assemblée nationale ? (M. Hervé Gillé écarte les bras.) La teneur des débats du jour ne m'a pas plu. Cela fait soixante ans que je fréquente les vestiaires, comme pratiquant, dirigeant et père.

Max Brisson l'a dit, c'est un point de clivage. Nos avis diffèrent radicalement ; ce n'est pas une tare, mais la démocratie. Mais je ne supporte pas que l'invective soit portée sur les uns ou les autres.

En 1957, au moment de recevoir son prix Nobel, Albert Camus disait que tout ce qu'il savait de la morale, c'était au football qu'il le devait.

Nous ne vivons pas dans le même monde ; venez assister à des matchs de football le week-end en Île-de-France, vous comprendrez le problème. (M. Akli Mellouli proteste.)

Je remercie Stéphane Piednoir et Michel Savin du travail accompli. Ne nions pas la réalité et traitons le problème ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Patrick Kanner .  - Les propos de Max Brisson m'invitent à prendre la parole. Merci de ne pas nous donner de leçons sur qui seraient les vrais laïcs et ceux qui ne le seraient pas, surtout lorsque l'on vient d'un parti qui a invectivé Briand et Jaurès...

M. Max Brisson.  - Ce n'est pas nous...

M. Patrick Kanner.  - ... ou qui a refusé un grand service public laïc et unifié de l'éducation nationale.

M. Max Brisson.  - Heureusement !

M. Patrick Kanner.  - Si vous êtes cohérent avec vous-même, demandez qu'il n'y ait plus de soutane ni de crucifix dans les écoles privées ! Il faudrait que les enseignements se déroulent dans des lieux où aucun signe religieux n'est présent.

M. Max Brisson.  - Très intéressant ! Les masques tombent.

M. Patrick Kanner.  - Depuis 2017, le bloc central veillait à ne pas être débordé sur certains sujets. Avec l'arrivée de certains ministres au Gouvernement, la situation a changé. Je sens la main de M. Retailleau dans ce dossier (protestations à droite), que cela vous plaise ou non.

Nous vivons un évènement historique. Si cette loi devait prospérer, nous saisirions le Conseil constitutionnel pour vérifier sa constitutionnalité. (Applaudissements à gauche)

M. Bernard Fialaire .  - Mon engagement politique s'inspire également de nos illustres aînés qui s'étaient engagés pour le principe de laïcité. Je ne doute pas que chacun ici souhaite le défendre.

Mais l'enfer peut être pavé de bonnes intentions. Il faut combattre l'oppression, la manipulation des femmes, mais sans dévoyer le principe de laïcité, qui est un principe de protection. En en faisant un outil de contrainte, on braque une partie de la jeunesse qui ne la perçoit plus qu'ainsi. Je salue les efforts du Gouvernement pour édulcorer, voire anesthésier certains articles, mais ce texte n'est pas à la hauteur de l'enjeu et fait courir un risque. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

M. Michel Savin .  - À vous entendre, certains sujets ne pourraient être débattus dans notre assemblée ! Je remercie le groupe Les Républicains d'avoir demandé l'inscription de ce texte. À force de ne pas parler de certains sujets, ...

M. Akli Mellouli.  - Mais on en parle sans cesse !

M. Michel Savin.  - ... la situation nous échappe et nos concitoyens reprochent aux politiques leur mutisme et leur incapacité à décider.

Sur un terrain de sport, il n'y a pas à choisir entre la religion et le sport : seul le sport a sa place. La religion relève de la sphère privée ; elle reste à la porte du vestiaire, du stade.

Beaucoup de fédérations demandent une harmonisation, un cadre juridique : certaines interdisent, d'autres autorisent, d'autres encore ne savent pas quoi faire. Le politique va-t-il se cacher derrière son petit doigt et attendre qu'un phénomène de moins en moins marginal devienne hors de contrôle ?

Je salue le travail du rapporteur et remercie le ministre. J'espère que le texte sera débattu et enrichi à l'Assemblée nationale.

Mme Oudéa-Castéra avait interdit le port de tout signe religieux aux membres de l'équipe de France. Personne ne s'y était opposé. J'espère que ce texte sera voté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport .  - Quel que soit notre engagement, nous sommes tous laïcs, tous attachés à la loi de 1905 et à celle de 2004. Pourtant, dès qu'un texte réinterroge le principe de laïcité, les débats s'enflamment. Mais si on ne le réinterroge jamais, en ce début de XXIe siècle, d'autres le feront à notre place.

Avec François-Noël Buffet, alors président de la commission des lois, j'ai été rapporteur d'une mission d'information sur la laïcité à l'école. Nous avions constaté que les enseignants n'avaient plus ce principe chevillé au corps.

Ce n'est pas un hasard si nous y revenons à travers un texte sur le sport, tant celui-ci a pris une place importante dans notre société, par son effet intégrateur et parce que les jeunes prennent désormais plus pour modèles des sportifs que des savants.

Merci à Michel Savin et Stéphane Piednoir pour leur travail. Le texte a beaucoup évolué.

M. Akli Mellouli.  - Heureusement !

M. Laurent Lafon, président de la commission.  - Il aura fallu neuf mois pour accoucher d'un texte qui, je l'espère, poursuivra son parcours à l'Assemblée nationale. Nous comptons sur le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

À la demande du groupe Les Républicains et du GEST, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°199 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 291
Pour l'adoption 210
Contre   81

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mises au point au sujet de votes

Mme Samantha Cazebonne.  - Lors du scrutin n°198, Georges Patient souhaitait voter contre.

Mme Françoise Dumont.  - Lors du scrutin n°196, Micheline Jacques et Didier Mandelli souhaitaient voter pour.

Acte en est donné.

Prochaine séance demain, mercredi 19 février 2025, à 15 heures.

La séance est levée à 20 h 25.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 19 février 2025

Séance publique

À 15 heures, 16 h 30 et le soir

Présidence : M. Gérard Larcher, président, M. Dominique Théophile, vice-président, M. Pierre Ouzoulias, vice-président

Secrétaires : Mme Alexandra Borchio Fontimp, Mme Véronique Guillotin

1. Questions d'actualité

2. Désignation des dix-neuf membres de la commission d'enquête sur la libre administration des collectivités territoriales, privées progressivement de leurs recettes propres, et sur les leviers à mobiliser demain face aux défis de l'investissement dans la transition écologique et les services publics de proximité (droit de tirage du GEST)

3. Proposition de loi visant à indexer les salaires sur l'inflation, présentée par Mmes Cathy Apourceau-Poly, Silvana Silvani, Céline Brulin et plusieurs de leurs collègues (n°208, 2024-2025)

4. Proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, tendant à l'application en droit français de la directive européenne relative à l'amélioration des conditions de travail des travailleurs des plateformes numériques, présentée par M. Pascal Savoldelli et plusieurs de ses collègues (n°548 rectifié, 2023-2024)