Refondation de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Après l'article 8
M. le président. - Amendement n°31 rectifié quinquies de Mme Goulet et alii.
L'amendement n°31 rectifié quinquies n'est pas défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Je le reprends.
M. le président. - Amendement n°167 de Mme Canayer, au nom de la commission des lois.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Cet amendement reprend les dispositions de l'article 48 du projet de loi Immigration, censuré par le Conseil constitutionnel au motif qu'il s'agissait d'un cavalier législatif.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Sagesse.
L'amendement n°167 est adoptéet devient un article additionnel.
Article 9
M. le président. - Amendement n°1 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Nous supprimons l'article 9 qui vise à lutter contre les filières des passeurs, car le dispositif prévu n'empêchera pas les flux financiers frauduleux et pourrait même aboutir à augmenter les bénéfices des filières illégales.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable. Lutter contre les transferts d'argent liquide est une étape importante. Cet article n'empêchera pas la criminalité organisée, mais tel n'est pas son objectif. Je ne comprends pas votre opposition, sauf à considérer les flux issus de la diaspora comorienne en situation irrégulière comme une aide au développement déguisée.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cette mesure est capitale pour entraver les flux financiers des passeurs et les flux illégaux depuis Mayotte, mais aussi pour lutter contre l'immigration irrégulière.
L'article vise les opérations les plus concernées par la criminalité financière. Les virements bancaires seront encore possibles, mais feront l'objet de contrôles poussés par les opérateurs. Parallèlement, les forces de l'ordre poursuivent et intensifient le démantèlement des organisations criminelles. Avis défavorable.
L'amendement n°1 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°39 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Cet amendement introduit une limite raisonnable au contrôle des transferts d'argent, en fixant un seuil de 300 euros. La mesure initiale risque de pénaliser les personnes les plus précaires, qui envoient 30 ou 50 euros à leur famille restée au pays. Concentrons les moyens de contrôle là où ils sont nécessaires.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Cela viderait l'amendement de sa substance, car les personnes concernées pourraient fractionner les transferts d'argent.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°39 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°164 de Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois.
L'amendement rédactionnel n°164, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 9, modifié, est adopté.
Article 10
M. le président. - Amendement n°63 de Mme Guhl et alii.
M. Daniel Salmon. - L'article 10 renforce les pouvoirs de police spéciale dans la lutte contre l'habitat informel à Mayotte. Il réduit le délai d'exécution de l'ordre d'évacuation des bidonvilles, met fin à l'obligation pour le préfet de proposer un hébergement d'urgence et réduit le droit de recours. Il s'agit de détruire plus facilement les bidonvilles à Mayotte en dehors du droit commun, mais sans régler le problème de l'habitat insalubre. Supprimons cet article !
M. le président. - Amendement identique n°82 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - C'est un des points noirs de ce projet de loi. Refonder oui, mais pas au détriment des fondements de notre République. Le Conseil d'État le note dans son avis : il n'y a pas assez de places pour héberger ou reloger les personnes dont vous voulez détruire l'habitat insalubre.
Quelque 77 % des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté et 40 % dans des logements en tôle. Détruire les bidonvilles sans offrir de solution de relogement revient à reproduire la situation d'après-Chido. Personne n'habite un habitat de fortune par choix.
Enfin, créer une dérogation au droit commun pour dix ans est contraire au Préambule de 1946.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. Le renforcement des pouvoirs de police administrative en matière d'évacuation et de démolition répond à la demande des élus. Il serait irresponsable de supprimer cet article, que la commission a sécurisé.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis défavorable. L'habitat illégal et informel est l'un des fléaux qui ronge Mayotte. La destruction d'habitations illégales n'est ni techniquement ni humainement facile, mais c'est une décision fondée sur le droit. Il y va de la sécurité, de la salubrité publiques et de la dignité humaine. On peut se questionner sur l'efficacité de ces politiques au regard de la reconstruction rapide de ce type d'habitat après Chido, mais je réfute l'expression « point noir ».
La démolition prévue de 73 cases, en avril, à Dzoumogné, permettra de construire une école de 26 classes et de s'attaquer à un foyer de délinquance. La coopération avec les associations qui réalisent des enquêtes sociales et qui proposent des solutions de relogement n'est pas remise en cause.
Ne caricaturez pas les opérations conduites dans le cadre de la loi Élan. Le terme « décasage » est réducteur, car ces opérations supposent un fin travail préparatoire, associant élus, forces de sécurité intérieure et associations. En 2024, six opérations ont eu lieu.
Dès le lendemain du passage de Chido, les élus ont demandé la destruction des bidonvilles - certains en demandaient même l'interdiction, alors que par principe ils sont interdits...
Oui, nous devons mener un travail de fond sur le relogement. Mais, de grâce, nous avons besoin de cet article. Nous sommes attendus sur sa mise en oeuvre, pas sur sa suppression.
Mme Antoinette Guhl. - Dire que nous allons détruire les bidonvilles à Mayotte n'a pas de sens : Chido l'a déjà fait. Résultat : ils sont déjà tous reconstruits. La solution est de développer le logement et de réaménager l'île pour en faire un espace polycentré.
Rendre les conditions de vie encore plus indignes n'arrangera rien. Je conteste l'efficacité et l'humanité de la mesure.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous voulons donner à l'État les moyens de reloger les personnes. Il n'est pas question, après Chido, qu'un cyclone Macron ou Valls rejette à la rue des personnes en situation de précarité ! Mettons en place une vraie politique de relogement.
M. Saïd Omar Oili. - On vote des textes symboliques qui ne s'appliquent pas. Après avoir voté l'interdiction de la tôle dans la loi d'urgence, j'ai demandé un bilan de la vente de la tôle, désormais soumise à la présentation d'une pièce d'identité avec enregistrement dans chaque magasin... Faisons d'abord ce bilan, avant de parler des bidonvilles.
Les amendements identiques nos63 et 82 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°113 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - L'habitat informel est presque la norme à Mayotte : 40 % des logements de Mayotte sont en tôle, même si tous ne sont pas illicites et ne seront pas détruits.
Avant d'envisager la démolition, voyons s'ils ne peuvent être améliorés en les raccordant aux réseaux, par exemple. Autorisons des modifications temporaires mais vitales, plutôt que de procéder à des expulsions. Si l'hébergement ou le relogement ne sont pas possibles, soyons pragmatiques, sans oublier le besoin de constructions neuves, car nous devons loger les 77 % des habitants vivant sous le seuil de pauvreté.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. Pourquoi ajouter une charge administrative à un État qui manque déjà de moyens ? Ces habitats de fortune sont souvent édifiés sur des terrains non constructibles, au terrassement sommaire, ce qui les expose à des risques graves. Les épidémies - choléra, typhoïde, poliomyélite, hépatite A - liées à ces mauvaises conditions de vie expliquent 10 % des passages à l'hôpital.
Si vous aviez, comme nous, visité ces bidonvilles, vous n'auriez pas la même vision. (Mme Antoine Guhl le conteste.) Leur évacuation est ordonnée à cause de ces risques.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°113 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°13 de Mme Artigalas et du groupe SER.
Mme Viviane Artigalas. - Cet article 10 prévoit deux dispositions pour lutter contre l'habitat informel.
Le premier permet d'agir immédiatement pour empêcher l'extension des bidonvilles existants ou la création de nouvelles zones d'habitat informel, en augmentant le délai de flagrance et en élargissant la liste des agents habilités à constater les infractions.
Le second vise à traiter de larges zones d'habitats informels, installés parfois depuis plusieurs années, en supprimant pendant dix ans l'obligation de relogement ou d'hébergement et en ramenant le délai accordé pour évacuer et démolir les locaux à quinze jours au lieu d'un mois. Ces deux exceptions ne paraissent ni justifiées ni opérantes pour lutter contre l'habitat informel installé de longue date. Voyez les opérations d'évacuation et de destruction, inefficaces ! Sans accompagnement, les familles n'ont d'autre choix que de s'installer dans de nouveaux lieux informels dans des conditions toujours plus précaires.
Maintenons une proposition de relogement ou d'hébergement et des délais raisonnables pour accompagner les familles. Nous rétablissons aussi tous recours.
M. le président. - Amendement n°40 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°83 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Voilà ce qu'aurait dû comporter l'article 10 : l'interdiction des bidonvilles, avec relogement systématique des personnes qui y vivent. Nous comprenons le trouble créé par les bidonvilles, mais c'est avant tout un drame pour ceux qui y vivent.
Notre amendement tend à régler le problème à la source, en éradiquant le mal-logement. Mais il faut commencer par respecter le principe d'égalité : l'État doit respecter son obligation de relogement.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Avis défavorable aux trois amendements.
La commission souhaite le maintien de délais réduits, pour répondre au sentiment d'impuissance des élus. Elle a encadré l'assouplissement des obligations de relogement, qui doivent être justifiées au regard des circonstances locales. Le parc d'hébergement, avec seulement 1 241 places, est en suroccupation chronique à 130 %. Cette dérogation est aussi circonscrite dans le temps : dix ans, c'est long, mais cela correspond à la réalité du terrain, car Mayotte est dans une situation économique et sociale dramatique. À Saint-Martin, sept ans après l'ouragan Irma, tout n'est pas reconstruit... La commission a limité le recours suspensif au référé-liberté, qui permet un délai de réaction rapide du juge, sous 48 heures.
Ce sont des évolutions équilibrées.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - J'ajoute : pour lutter contre l'habitat informel, il faut augmenter les pouvoirs de police administrative spéciale. Ensuite, il faut effectivement plus de logements adaptés, pour reloger. Mais avec ces amendements, vous démunissez l'État. Bien entendu, il s'agit aussi d'humain, les services sociaux sont là pour ça. Mais nous devons démontrer que nous voulons mettre fin à ce phénomène - et ce sera long, car c'est ancré dans une réalité locale. Avis défavorable.
L'amendement n°13 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos40 rectifié et 83.
L'article 10 est adopté.
Après l'article 10
M. le président. - Amendement n°45 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Le sujet de l'assurabilité des biens est primordial pour la refondation durable de l'île. Après un sinistre, l'assurance favorise la résilience d'un territoire et de ses habitants. Nous devons donc améliorer la couverture assurantielle à Mayotte.
Aujourd'hui, seuls 6 % des logements sont assurés à Mayotte, contre 96 % en métropole et 50 % dans les autres outre-mer. Cette situation tient à deux dynamiques : un faible réflexe assurantiel et une intensification des risques. Attaquons-nous à une partie du problème en diffusant une culture assurantielle sur l'île.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Je partage votre préoccupation, relayée à plusieurs reprises par la délégation sénatoriale aux outre-mer. Je pense notamment à notre rapport de 2022, qui préconisait d'autoriser l'assurance des opérations d'autoconstruction et d'autoréhabiliation.
Mais le caractère normatif de votre amendement, à la formulation très générale, n'est pas évident. Il accroît la charge de l'État à Mayotte, alors que ses moyens y sont structurellement déficitaires ; la commission des affaires économiques l'a constaté lors de son déplacement début mai. Je suis favorable à une réforme plus structurelle, prenant en compte les spécificités assurantielles ultramarines.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°45 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°72 rectifié de M. Hochart et alii.
L'amendement n°72 rectifié n'est pas défendu.
L'article 23 (appelé en priorité) est adopté.
Après l'article 23 (Appelé en priorité)
M. le président. - Amendement n°47 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Henri Cabanel. - L'amendement prévoit une évaluation au terme de la période 2026-2031 pendant laquelle Mayotte bénéficie d'un régime fiscal et de zonage quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) dérogatoire.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Il faut certes mieux évaluer les effets du classement en QPV, mais ne multiplions pas les demandes de rapports. Le comité de suivi de la loi de programmation en rendra compte au Parlement et un rapport intermédiaire sera remis d'ici au 1er juillet 2028. Pour éviter les doublons, je demande le retrait de cet amendement, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°47 rectifié est retiré.
L'article 24 (appelé en priorité) est adopté.
Article 11
M. le président. - Amendement n°108 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous vous invitons à interdire la retenue des mineurs dans le cadre des visites domiciliaires pour la recherche d'armes. Vous prévoyez que le mineur doit être assisté par son représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée - ce qui manque de clarté. Gare aux dérives ! C'est contraire aux exigences constitutionnelles sur la clarté de la loi et sur la justice des mineurs qui implique l'atténuation de leur responsabilité pénale.
M. le président. - Amendement n°153 de Mme Vogel et alii.
M. Daniel Salmon. - Cet article prévoit un régime de retenue administrative à domicile. Prévu en matière de terrorisme, il serait étendu ici de manière très large. Nous voulons prévoir la présence obligatoire des représentants légaux des mineurs, car la mesure, coercitive, est déséquilibrée.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nous parlons de trouble grave à l'ordre public et de personnes jugées dangereuses.
La retenue des mineurs serait soumise à autorisation du JLD et à la présence du représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée.
L'amendement n°108 évoque une possible inconstitutionnalité. Or une décision du Conseil constitutionnel du 29 mars 2018 a validé le principe tel qu'il est ici proposé.
La présence des parents demeure le principe, mais si elle n'est pas possible, elle ne doit pas pouvoir faire échec à la visite domiciliaire.
Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le projet de loi encadre la retenue d'un mineur : accord exprès du JLD et présence du représentant légal. La retenue ne peut concerner que la personne ayant justifié la visite.
Ce n'est pas une mesure judiciaire, mais administrative. Les jurisprudences citées sont donc inopérantes : il ne s'agit pas de sanctionner, mais de retenir une personne susceptible de fournir des renseignements sur les armes recherchées ou découvertes.
C'est la reprise à l'identique du cadre des visites domiciliaires en matière de terrorisme, que le Conseil constitutionnel a jugé conforme à notre loi fondamentale. Avis défavorable à l'amendement n°108.
Même chose pour l'amendement n°15, car pour faire échec à la mesure, il suffirait pour le parent de se rendre injoignable.
L'amendement n°108 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°153.
L'article 11 est adopté.
L'article 12 est adopté.
Article 13
M. le président. - Amendement n°109 Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous avons, nous, un regard bienveillant sur la jeunesse, axé sur la prévention et l'éducation ; vous, vous privilégiez la sanction, tous les textes récents le montrent.
Cet article autorise la traversée des bangas qui enclaveraient les locaux professionnels afin de renforcer la lutte contre l'emploi de personnes en situation irrégulière, et ce pour quinze jours. C'est disproportionné au regard du droit à la vie privée et familiale et du droit à la tranquillité. Cet amendement réduit la durée d'autorisation de traversée à deux jours.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Sur réquisition du procureur de la République, les agents compétents, officiers de police ou Urssaf, peuvent contrôler les locaux listés dans la réquisition. En métropole, le délai est d'un mois. Quinze jours, c'est proportionné.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°109 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°41 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - L'ordonnance du JLD doit reposer sur des indices sérieux, afin de prévenir les dérives liées à des contrôles exploratoires. Il faut maintenir un haut niveau de justification des interventions, car les opérations de police administrative dans les quartiers précaires peuvent exacerber les tensions.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Les interventions du JLD sont toujours pour des raisons sérieuses et préservent les droits des personnes.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°41 rectifié n'est pas adopté.
L'article 13 est adopté.
Article 14
M. le président. - Amendement n°77 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°77 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°121 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Le recensement de la population est nécessaire ; il doit aussi être l'occasion d'identifier les personnes en état de précarité, notamment hydrique, car l'accès à l'eau est un enjeu essentiel. Nous proposons ici d'articuler le recensement général avec un diagnostic territorial d'accès à l'eau.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Le diagnostic territorial d'accès à l'eau pourra être réalisé par les collectivités immédiatement après le recensement. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°121 n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
Article 15
Mme Silvana Silvani . - Depuis 2011, Mayotte est le cent unième département français, mais les Mahoraises et les Mahorais ne bénéficient toujours pas des mêmes droits sociaux que les Français de métropole. Les règles applicables ne sont pas les mêmes : le Smic équivaut à 75 % de celui de la métropole, le RSA à 50 % et l'aide médicale de l'État (AME) ne s'applique toujours pas.
Ce système à double vitesse est ancien. La Cour des comptes estimait en 2022 que l'État dépensait à Mayotte 6 000 euros par habitant et par an, moins que dans tous les autres départements d'outre-mer. Pour le journaliste Rémi Carayol, c'est le signe que la situation coloniale perdure.
Le Gouvernement propose d'accélérer le processus de convergence des droits de 2036 à 2031 - c'est un petit pas. Nous souhaitons que cette avancée s'accompagne d'une généralisation de l'ensemble des droits pour enfin sortir les Mahorais de la précarité.
Mme Evelyne Corbière Naminzo . - La commission des affaires sociales a exclu l'AME des prestations sociales pour lesquelles le Gouvernement s'est engagé à harmoniser les conditions d'accès. C'est contraire aux recommandations du rapport d'information de 2021, qui préconisait d'étendre à Mayotte la protection universelle maladie (PUMa), la CMU et l'exonération du ticket modérateur, et de réfléchir à la prise en charge des frais de santé des personnes en situation irrégulière, ainsi qu'à la possibilité de l'AME.
Mme Annie Le Houerou . - À Mayotte, l'égalité des droits est encore lointaine. Les allocations familiales perçues par une famille mahoraise sont trois à quatre fois inférieures à celles perçues à La Réunion ou en métropole, d'où un taux de pauvreté élevé et des inégalités importantes. Ainsi, 94 % des familles monoparentales, surtout des mères isolées, sont pauvres.
L'allocation de soutien familial n'est pas versée à Mayotte. La prestation d'accueil du jeune enfant ne l'est que partiellement ; la prime de naissance ou d'adoption ne le sont pas. Les montants versés sont inférieurs à ceux pratiqués ailleurs. Comment supporter de telles inégalités, s'agissant de moments de vulnérabilité comme la naissance et la petite enfance ? Laisser des familles françaises dans de telles situations est inacceptable. Il faut vraiment accélérer la convergence des droits sociaux et des prestations sociales.
Mme Raymonde Poncet Monge . - Sur les trente-quatre articles du texte, seuls quatre concernent les affaires sociales. La refondation de Mayotte appelait portant des mesures sociales fortes, plutôt que des mesures antimigratoires... L'égalité des droits n'est pas la priorité du Gouvernement.
Selon l'Insee, le système de redistribution publique ne réduit le taux de pauvreté à Mayotte que de deux points, contre sept dans l'Hexagone et dix dans les autres outre-mer. La convergence est repoussée aux calendes grecques.
La commission a adopté un amendement pour exclure l'AME, en invoquant le risque d'appel d'air. Quantité de rapports démontrent pourtant que c'est un mythe. Dans quel but, au nom de quelle idéologie le véhiculez-vous ? La France a une responsabilité. Le régime d'exception à Mayotte doit cesser.
Mme Audrey Bélim . - J'insiste sur la nécessité de poursuivre l'engagement de l'État. Mayotte a besoin d'un regard bienveillant.
La loi pour l'égalité réelle outre-mer, que vous avez portée avec Ericka Bareigts, monsieur le ministre, comportait un titre entier sur Mayotte : accélération du rythme de convergence des allocations familiales vers le montant pratiqué dans les DOM, complément familial et complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, minimum contributif pour revaloriser les petites retraites... Malheureusement, cette loi, adoptée à l'unanimité en 2017, a été peu ou mal appliquée. Les plans de convergence se résument à de simples plans État-région, élaborés sans concertation.
Ces mesures sont pourtant indispensables. Nous le devons à Mayotte, qui a besoin d'un véritable soutien de la nation française.
M. le président. - Amendement n°15 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Mayotte est le seul département où l'AME ne s'applique pas, alors que ce territoire compte la plus forte proportion de personnes vulnérables. Selon l'Insee, un habitant sur neuf s'estime en mauvaise santé. La mortalité infantile atteint 9,6 %, contre 3,8 % dans l'Hexagone. La malnutrition touche 10 % des enfants de 4 à 10 ans et l'espérance de vie est inférieure de huit ans à celle de la métropole.
Il y a donc urgence à lutter contre le renoncement aux soins en généralisant la PUMa et les exonérations de ticket modérateur.
Les personnes immigrées renoncent souvent aux soins pour des motifs économiques : la participation forfaitaire demandée pour consulter au centre hospitalier de Mayotte, de 10 ou 25 euros, est une vraie barrière. D'où l'intérêt de généraliser l'AME à Mayotte.
Les droits sociaux sont constitutifs de la citoyenneté. L'argument de la maîtrise de l'immigration ne saurait justifier le maintien de droits différenciés selon le territoire.
M. le président. - Amendement identique n°43 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°85 de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - L'article 15 prévoit la convergence des droits à Mayotte d'ici à 2031 - à l'exception de l'AME.
Mayotte est le seul département exclu de l'AME, alors qu'il concentre la plus forte proportion d'étrangers en situation irrégulière. Depuis le 1er janvier 2005, l'accès aux soins n'est gratuit que pour les affiliés à la sécurité sociale ; les non-affiliés - souvent les personnes en situation irrégulière, donc les plus précaires - doivent payer un forfait.
Avec 89 médecins pour 100 000 habitants, Mayotte est le plus grand désert médical de France. Privés d'accès à la médecine de ville, ces patients se tournent massivement vers les urgences du CHM, qui assure 72 % de l'offre de soins - et creuse son déficit.
Nous ne souhaitons pas que Mayotte devienne le laboratoire de ce qui pourrait arriver sur le reste du territoire. Toute personne dont la santé est en danger doit pouvoir être soignée. N'excluons pas l'AME de la convergence des droits. La République est une et indivisible ; tous ses habitants doivent bénéficier des mêmes aides pour vivre dignement.
M. le président. - Amendement identique n°141 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'AME est une mesure essentielle de santé publique : en garantissant l'accès aux soins vitaux des personnes en situation irrégulière, on préserve la santé de tous les habitants du territoire.
Refuser l'AME à Mayotte, c'est porter atteinte au principe constitutionnel d'égalité, à la solidarité nationale, et aggraver les coûts sanitaires à terme. C'est une aberration financière, médicale et un manque d'humanité. Mettons donc fin à cette différence de traitement discriminatoire à l'égard des résidents de Mayotte.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable à ces amendements qui réintroduisent la possibilité d'étendre l'AME à Mayotte, supprimée en commission. La convergence doit tenir compte des spécificités mahoraises. Or le fort afflux de migrants déstabilise l'ordre public et la reconstruction à l'oeuvre. Ne créons pas d'effet incitatif supplémentaire.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Ce texte est équilibré, fort et dynamique. Le réduire aux questions migratoires et sécuritaires serait passer à côté de l'essentiel - voire montrer qu'on ne l'a pas lu. L'article 1er, c'est 4 milliards d'euros d'engagements, des investissements attendus depuis dix ans. Cela n'avait jamais été fait jusqu'ici !
Mme Bélim a évoqué la loi que nous avons portée avec Victorin Lurel puis Ericka Bareigts. Sept ou huit ans après, me voilà à nouveau devant vous pour essayer de mettre en oeuvre ses objectifs.
Le présent texte est le fruit d'un travail interministériel, d'une concertation avec les élus mahorais et la société civile, de la proposition de loi de la députée Estelle Youssouffa, du travail de mes prédécesseurs. Il comporte une programmation financière, des outils pour lutter contre l'habitat illégal et contre l'immigration irrégulière.
La convergence sociale s'appuiera sur la négociation avec les partenaires sociaux ; nous la mettrons en oeuvre à partir du 1er janvier 2026, à partir du rapport que me remettront le général Facon et le préfet Bieuville.
La commission a exclu l'AME du champ des prestations sociales pouvant être étendues par ordonnance. Aujourd'hui, l'AME n'est pas applicable à Mayotte. La prise en charge des étrangers est principalement assurée par le CHM, grâce au dévouement des soignants. Une prise en charge par la médecine de ville est peu réaliste, l'offre de ville étant embryonnaire ou saturée. L'extension de l'AME sera appréciée après 2031, en tenant compte de la situation de l'offre de ville et d'une éventuelle évolution du dispositif national d'AME d'ici là.
Avis défavorable aux amendements.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Même s'il y a des problèmes de temporalité ou de conditionnalité, rien n'obligeait à exclure l'application de l'AME à Mayotte. Vous avez bien reporté la convergence de nombreuses prestations aux calendes grecques ; pourquoi cette démarche active d'exclusion ?
Que le panier de soins soit revu, c'est une chose, mais plusieurs rapports ont conclu à la nécessité de maintenir l'AME. Vous l'avez dit vous-même, les malades ne disparaissent pas : ils vont à l'hôpital, dont on aggrave le déficit, leurs dépenses de santé n'étant pas remboursées.
Exclure l'AME, c'est un fil rouge idéologique, ce n'est pas rationnel.
Mme Silvana Silvani. - Je vous rassure : nous avons lu le texte et reconnu un certain nombre d'avancées. Votre position est incompréhensible. Les Mahorais sont-ils français ou pas ?
Les amendements identiques nos15, 43 rectifié, 85 et 141 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°137 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Cet amendement harmonise les conditions de durée de séjour entre Mayotte, la métropole et les autres départements d'outre-mer.
Une personne étrangère résidant dans l'Hexagone peut obtenir l'Aspa avec un titre de séjour de dix ans, contre quinze ans à Mayotte. Le RSA n'est pas accessible aux personnes régularisées depuis moins de quinze ans. La condition de régularité du séjour est plus excluante qu'ailleurs et l'attribution de prestations familiales à des familles étrangères est exceptionnelle, dit le Haut Conseil de la famille. La moitié des personnes étrangères n'ont pas de titre de séjour.
La redistribution ne réduit la pauvreté que de deux points à Mayotte, contre dix points dans les autres outre-mer, car la majeure partie de la population pauvre n'est pas éligible aux prestations sociales. Levons ces restrictions, sources de pauvreté et de précarité.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. À Mayotte, certaines prestations sont soumises à des durées de séjour plus strictes, car la moitié de la population est étrangère. Il faut tenir compte de cette spécificité démographique.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°137 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°84 de Mme Le Houerou et alii.
Mme Annie Le Houerou. - À Mayotte, le taux de pauvreté atteint 77 %, contre 14 % en France métropolitaine, le PIB par habitant est le plus faible de France, le taux de chômage atteint 37 %. Au regard de cette situation, il est impératif d'accélérer le calendrier de convergence des droits sociaux.
Le rapport annexé prévoit une convergence pour le RSA et l'allocation aux adultes handicapés (AAH) à l'horizon 2031. C'est trop lointain. Nous proposons de fixer la date butoir au 1er janvier 2027.
M. le président. - Amendement n°16 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - La délégation aux outre-mer a publié un rapport sur la lutte contre la vie chère outre-mer. Selon l'Insee, le taux de pauvreté est de 77 % à Mayotte, contre 36 % à La Réunion et 14,5 % en métropole. Les enfants sont exposés à la malbouffe et on compte 1 600 évacuations sanitaires annuelles vers La Réunion.
Les gouvernements ont toujours été réticents à accorder les mêmes droits à Mayotte qu'en Vendée, par exemple. Le processus de convergence entamé en 1996 devait aboutir en 2036 - le Gouvernement prévoit de l'accélérer à 2031 ce qui est déjà positif. Face à l'urgence, nous proposons d'avancer au 1er janvier 2028 la publication des dernières ordonnances de convergence des droits.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable : l'habilitation prévoit que les ordonnances sont prises dans les douze mois suivant la promulgation de la présente loi, soit avant le 1er janvier 2027 et le 1er janvier 2028.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - J'ai été sensible à la référence à la Vendée. Vous pensiez sans doute à Clemenceau, et à son grand livre de 1895, La Mêlée sociale...
L'amendement n°84 propose d'anticiper la convergence au 1er janvier 2027, dans dix-huit mois ; l'amendement n°16, au 1er janvier 2028. Or le texte fixe déjà la date limite de publication des ordonnances à douze mois suivant la promulgation de la loi.
Surtout, vos propositions ne tiennent pas compte de la situation socio-économique du territoire ni de la capacité à tenir de tels délais.
La convergence sociale porte à la fois sur les droits sociaux et sur les obligations, donc les prélèvements sociaux, qui doivent être soutenables pour les entreprises et les salariés. La hausse importante attendue des minima sociaux ne doit pas entraîner d'inflation, déstabiliser l'économie locale ou pénaliser l'emploi. C'est pourquoi je souhaite une convergence progressive, privilégiant l'activité, soutenable pour la compétitivité des entreprises. Je m'engage sur ce qui est possible, pas sur des promesses irréalistes. C'est une question de considération vis-à-vis des Mahorais.
Je préfère donc un calendrier crédible et opérationnel jusqu'en 2031 ; si l'on peut aller plus vite, plus loin, tant mieux. Donnons-nous ces cinq années pour réussir cette convergence sociale. Avis défavorable.
L'amendement n°84 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°16.
L'article 15 est adopté.
Après l'article 15
M. le président. - Amendement n°70 de M. Hochart et alii.
M. Christopher Szczurek. - Défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à cet amendement qui prévoit des conditions de durée de séjour dérogatoires pour le versement des prestations non contributives telles que le RSA, l'AAH et les allocations familiales. Il semble inopportun de nous substituer au Gouvernement. Au demeurant, cet amendement comporte un risque d'inconstitutionnalité.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°70 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°75 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'écart persistant entre les droits sociaux à Mayotte et le reste du pays nourrit un sentiment d'injustice et bafoue le principe constitutionnel d'égalité.
L'information de la représentation nationale est parcellaire. Il serait souhaitable d'éclairer le débat par un rapport analysant les trajectoires possibles de convergence, ses coûts et bénéfices. Il faut éviter l'inflation et la déstabilisation de l'économie, dites-vous ? Statuons sur des bases objectives, pour que l'égalité de droits se traduise en égalité de fait.
Nous appelons le Gouvernement à clarifier l'objectif de convergence intégrale entre les prestations sociales versées à Mayotte par rapport à celles versées dans l'Hexagone et les autres départements d'outre-mer.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Conformément à sa doctrine, la commission a émis un avis défavorable à cette demande de rapport.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°75 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°115 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il ne faut pas que la doctrine devienne doctrinaire : encore une fois, nous demandons un rapport sur les trajectoires pour aligner le Smic mahorais sur le Smic de droit commun.
Vous l'avez dit, monsieur le ministre, il faut éviter les effets de bord ; eh bien, qualifions-les !
L'égalité de rémunération demeure un impératif. Des dérogations durables ne sauraient être justifiées que sur la base d'éléments chiffrés.
Nous partageons la soutenabilité économique ; partagez aussi le progrès social pour tous les Mahorais.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°115 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°142 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'extension de l'AME à Mayotte est un enjeu décisif pour l'efficacité de nos politiques de santé publique et pour l'égalité réelle entre les territoires. Son exclusion est une aberration financière, médicale et humaine. Le Parlement a besoin d'une analyse chiffrée pour décider en connaissance de cause - je ne comprends pas ce qui a justifié la décision de la commission. Cet amendement charge donc le Gouvernement de remettre un rapport dans un délai de six mois évaluant les coûts et les bénéfices de la convergence du dispositif. Quid de l'impact potentiel sur les urgences, aujourd'hui sursollicitées ?
Ce rapport permettra de dépasser les représentations approximatives, voire fantasmatiques, et fera prévaloir l'égalité.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Notre groupe votera cet amendement : l'objectif de Mme Poncet Monge est simplement de nous documenter. Nous n'arrêtons pas d'entendre que Mayotte est un territoire exceptionnel qui appelle des exceptions. Nous avons ici l'occasion d'aller au fond des choses, mais la commission donne des avis défavorables... Va-t-on continuer à légiférer à l'aveugle, au doigt mouillé ?
Sénatrice d'un territoire ultramarin, je pense aussi que nous devrions avoir à notre disposition plus d'informations sur la santé. Lorsque nous acceptons que des monopoles s'installent, on abîme la santé de la population.
Nous devons savoir quels éléments combattre en matière de santé publique. Votons cet amendement qui ne mange pas de pain.
Mme Silvana Silvani. - Très bien.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. - Je vous propose de saisir les commissions qui peuvent sans difficulté mener ces enquêtes. On sait bien que 90 % des rapports prévus dans les textes ne sont pas réalisés. Vous avez raison de mettre ce sujet sur la table, c'est un point essentiel.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - C'est le moins que l'on puisse faire !
Mme Lana Tetuanui. - Cela fait deux jours que j'entends : il faut des rapports... À quoi servons-nous, nous les parlementaires ? À demander à chaque fois des rapports au Gouvernement ? Prenons notre rôle au sérieux !
Ma chère collègue de La Réunion, moi, si j'étais plus près de Mayotte, je prendrais la pirogue pour aller voir sur place.
Un adage dit : qui paie contrôle. C'est à nous de contrôler. Prenez vos responsabilités : vous êtes parlementaire...
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - C'est fait !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Mais oui, enfin, prenez votre pirogue, madame Corbière Naminzo !
Mme Lana Tetuanui. - Allez vous-même sur place. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Stéphane Fouassin applaudit également.)
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission. - Il nous appartient, dans le cadre de notre pouvoir de contrôle, de vérifier ce que nous voulons connaître. Le Parlement ne peut pas donner d'ordre au pouvoir exécutif (Mme Christine Bonfanti-Dossat le confirme), ce serait inconstitutionnel : aussi ne pouvons-nous pas lui demander de rapport.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Lorsque vous avez supprimé l'AME, c'est donc que vous avez pris la pirogue pour connaître sur place les données épidémiologiques pour justifier une telle décision. La démagogie a ses limites ! (Applaudissements à gauche ; Mmes Evelyne Corbière Naminzo et Silvana Silvani renchérissent.)
M. Saïd Omar Oili. - Je peux témoigner que Madame Corbière Naminzo est venue me voir en pirogue à Mayotte. Nous avons fait le tour de l'île.
Mme Lana Tetuanui. - (Écartant les bras) Donc il n'y a plus besoin de rapport ! (Rires ; applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
Mme Silvana Silvani. - Soyez sérieux, nous parlons de Mayotte !
L'amendement n°142 n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
Article 17
M. le président. - Amendement n°86 de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - L'objectif de cet article est d'assurer une meilleure couverture des besoins en santé, notamment en augmentant le nombre d'officines de pharmacie, qui jouent un rôle crucial en fournissant médicaments, mais aussi conseils de santé, vaccinations, dépistages... Étendons les services à un plus grand nombre de personnes et réduisons le temps de déplacement et d'attente.
Mais cet article prévoit la délivrance d'une licence de pharmacie d'officine sur avis conforme de l'ordre des pharmaciens ; nous craignons qu'il soit un frein, supprimons-le.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Les deux syndicats représentatifs et l'ordre des pharmaciens étaient opposés à une dérogation, ...
Mme Corinne Narassiguin. - Évidemment ! C'est bien là le problème !
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - ..., jugeant qu'elle pourrait déstabiliser le réseau officinal.
Dans l'archipel, de nombreux médicaments sont distribués par l'hôpital. La commission a prévu que l'ARS ne pourrait user de telles dérogations qu'avec l'accord de l'ordre (Mme Annie Le Houerou ironise.). La commission demeure attachée à cet équilibre. Avis défavorable, dès lors.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement s'est engagé à augmenter le nombre de pharmacies, car développer l'offre de soins de ville est essentiel. C'est l'un des rares désaccords que j'ai avec Mme la rapporteure pour avis.
Cet amendement supprime l'avis conforme de l'ordre, qui peut s'apparenter à un veto. Sagesse, car une rédaction plus large serait préférable.
Une voix à gauche. - Quel courage !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Oui, la sagesse, c'est le courage.
L'amendement n°86 n'est pas adopté.
L'article 17 est adopté.
Après l'article 17
M. le président. - Amendement n°49 de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Cet amendement toilette le code de la sécurité sociale en supprimant la référence à l'ARS de l'océan Indien, car Mayotte dispose depuis janvier 2020 de sa propre ARS.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - En effet, la référence est obsolète : avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°49 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°78 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°78 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°143 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'article 17 prévoit la prise en compte de l'intercommunalité comme référence pour l'autorisation des ouvertures d'officines de pharmacie, afin de lutter contre les inégalités dans l'accès au médicament.
Nous y ajoutons une possibilité de faire sa première année d'études en santé sur l'archipel. L'article 3 de la proposition de loi de Guillaume Garot, adoptée le 7 mai à l'Assemblée nationale, prévoit cette possibilité dans tous les départements - éventuellement en distanciel. En attente de la navette, nous souhaitons inscrire cette mesure pour Mayotte. Cela permettrait d'augmenter le nombre de professionnels de santé.
L'amendement n°143, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Article 18
M. le président. - Amendement n°65 de Mme Imbert.
Mme Corinne Imbert. - Cet amendement réécrit l'article 18 en précisant que les représentants des professionnels exerçant à Mayotte siègent au conseil d'administration de l'union régionale de professionnels de santé (URPS) de l'archipel. Quoi de plus logique quand Mayotte dispose d'une ARS ?
Dans votre texte, monsieur le ministre, vous précisez que le décret en Conseil d'État serait pris après avis des organisations représentatives des professionnels. Ils se sont déjà exprimés : ils réclament une URPS.
Je connais votre réticence : la densité serait insuffisante. Et alors ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Les représentants des professionnels de santé et de l'ARS ont formulé cette demande. Toutefois, le faible nombre des professionnels risque de rendre délicate la création d'une URPS dédiée. Sagesse bienveillante.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Vous proposez la création d'une URPS à Mayotte plutôt que d'améliorer la représentation des professionnels au sein de l'URPS de l'océan Indien. Madame Imbert, je reprends l'argument que vous redoutiez : créer une URPS à Mayotte pèserait sur les ressources médicales disponibles.
Retrait, sinon avis défavorable... avec un peu de sagesse. (Sourires)
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Il faut cesser de raisonner en comptable dans les territoires ultramarins. Chaque territoire a ses spécificités, je voterai l'amendement de Mme Imbert.
Mme Corinne Imbert. - Il y a une profession dont la densité est importante : les sages-femmes. Ne faisons pas de caricatures sur le nombre de professionnels de santé : cette mesure est dans l'intérêt de Mayotte.
M. Alain Milon. - J'ai eu l'honneur d'être le rapporteur de la loi Hôpital, patients, santé et territoires, qui a créé les URPS, pour que les professionnels de santé puissent participer au conseil de surveillance de l'ARS.
Après la création de l'ARS à Mayotte, il faut créer une URPS. Les professionnels de santé sont peut-être en nombre insuffisant, mais, au moins, respectons la loi.
M. Philippe Mouiller, président de la commission. - J'ai organisé une rencontre voilà deux mois avec les professionnels de santé mahorais. Avec ce système, il ne peut y avoir que des représentants de La Réunion au conseil de surveillance de l'ARS. (Mmes Evelyne Corbière Naminzo et Silvana Silvani protestent.)
L'amendement n°65 est adopté et l'article 18 est ainsi rédigé.
Article 19
M. le président. - Amendement n°14 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le projet de loi prévoit d'accélérer les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique, via une procédure dérogatoire permettant de prendre possession des terrains dès que la déclaration d'utilité publique (DUP) a été prise, même si les propriétaires n'ont pas été identifiés.
Cette mesure inquiète la population mahoraise. Les élus locaux y sont totalement opposés.
Nous refusons toute mesure d'exception sur ces sujets sensibles pour deux raisons : le désordre foncier perdure à Mayotte et plus de 50 % du foncier relève du domaine public. Supprimons l'article 19.
M. le président. - Amendement identique n°18 rectifié de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - L'article 19 est perçu à Mayotte comme un moyen de faire main basse sur le foncier détenu par la population. Supprimons cet article et recourons à une procédure d'expropriation classique, qui sécurise les droits des propriétaires.
M. le président. - Amendement identique n°42 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - La dérogation prévue par l'article 19 viderait de sa substance le principe pluriséculaire de l'expropriation qui veut qu'une personne ne puisse être expropriée que pour utilité publique, moyennant une juste et préalable indemnité.
Cette dérogation générale pour dix ans, excessive, créerait une rupture d'égalité qui fragiliserait l'État face à des procédures contentieuses.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nos collègues relaient une inquiétude répandue à Mayotte, mais qui ne nous paraît pas fondée. L'article ne change rien ni à l'identification des propriétaires ni à la nécessité de passer par une procédure de déclaration d'utilité publique.
Il s'agit simplement d'aller plus vite pour réaliser les infrastructures dont Mayotte a besoin.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cet article a pour objet d'accélérer les procédures d'expropriation sans en élargir le champ. Il permet le recours à la prise de possession accélérée pour réaliser les infrastructures urgentes : transports, eau, hôpital. La liste a été resserrée à la demande des élus.
C'est pourquoi je ne comprends pas ces demandes de suppression. L'article tient compte des difficultés pour identifier les propriétaires à Mayotte. Il permet de prendre possession des terrains pour ne pas bloquer les travaux, tout en garantissant les droits attachés à la propriété privée.
La maîtrise foncière est un enjeu crucial pour réaliser ces aménagements utiles à la population. Compte tenu du morcellement urbain, il est impossible de mobiliser uniquement le foncier urbain. Cette mesure de prise de possession anticipée a déjà été utilisée en Guyane ou pour la construction de réacteurs nucléaires, entre autres.
Il s'agit non pas d'élargir le champ de l'expropriation ou ses conditions de justification, mais d'accélérer les choses.
Nous ne modifions en rien la procédure de la DUP. Celle-ci est mise en oeuvre de façon protectrice pour les personnes qui pourraient revendiquer ces terrains. Elle concerne uniquement des projets déclarés d'utilité publique. L'autorisation de possession anticipée intervient uniquement en cas de difficulté. Elle est autorisée par un décret après avis conforme du Conseil d'État. Le juge peut prononcer une indemnisation spéciale. Une indemnité prévisionnelle d'expropriation est versée au propriétaire - si l'on ne peut identifier ce dernier, celle-ci est consignée. Enfin, cette disposition est valable pour un délai de dix ans : la mesure est donc extrêmement encadrée.
Dès lors, avis défavorable à ces amendements. Je vous invite à faire preuve de responsabilité collective. Le Parlement ne peut pas voter des crédits, attendus par les élus et la population, pour réaliser des infrastructures essentielles et ne pas se donner les moyens juridiques de le faire rapidement.
Je comprends l'histoire de Mayotte, et les peurs. C'est pourquoi je suis précis, afin de lever les inquiétudes ; je m'adresse non seulement aux élus, mais aussi à tous les Mahorais qui pourraient nous écouter.
M. Saïd Omar Oili. - L'objet de cet article est le même que celui de l'article 10 de la loi d'urgence.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Non !
M. Saïd Omar Oili. - Les Mahorais n'en veulent pas. Mme Ramia et moi-même avons transmis leurs demandes. Si l'on ne nous écoute pas, qui écoutera-t-on ?
À la demande du groupe SER, les amendements identiques nos14, 18 rectifié et 42 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°291 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 135 |
Contre | 206 |
Les amendements identiques nos14, 18 rectifié et 42 rectifié ne sont pas adoptés.
L'article 19 est adopté.
Après l'article 19
M. le président. - Amendement n°157 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement souhaite que le projet de piste longue de l'aéroport bénéficie du dispositif de DUP foncière, qui permet une acquisition rapide des terrains nécessaires à la réalisation d'une opération d'aménagement.
L'aéroport actuel est exposé à des risques naturels. Cette procédure permet de conduire l'enquête publique sans étude d'impact, alors que le projet n'est pas encore complètement défini.
Toutefois, celui-ci fera bien ultérieurement l'objet d'une nouvelle enquête publique. Cette DUP foncière devra ensuite être complétée par une étude d'impact. Il s'agit d'accélérer la maîtrise du foncier en gagnant deux ans par rapport à une procédure de DUP classique.
Sans l'adoption de ce dispositif, ces travaux ne pourront pas débuter avant fin 2028.
M. le président. - Amendement n°158 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cet amendement précise les conditions de clôture de la concertation avec le public.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Le Gouvernement nous propose de lui donner les moyens pour réaliser un équipement dont Mayotte a besoin rapidement : avis favorable.
Les amendements nos157 et 158 sont adoptés et deviennent des articles additionnels.
L'article 20 est adopté.
Article 21
M. Marc Laménie . - L'article 21 concerne le recours aux marchés de conception-réalisation pour la construction d'établissements scolaires et universitaires et de résidences universitaires à Mayotte. Ces marchés permettent de gagner du temps.
À la rentrée 2024, plus de 115 000 élèves sont scolarisés sur le territoire, dont 23 700 dans le premier degré, 50 000 dans le second et 1 230 dans l'enseignement supérieur.
Le territoire compte 220 écoles primaires, 22 collèges, 11 lycées, autant d'infrastructures saturées, alors qu'entre 6 000 et 10 000 enfants sont déscolarisés.
Notre groupe votera cet article, qui facilite la construction d'infrastructures scolaires et universitaires.
M. le président. - Amendement n°111 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Les lauréats des marchés de conception-réalisation auront beaucoup de travail pour reconstruire ce qui a été détruit par Chido, mais aussi pour combler ce qui manquait avant le passage du cyclone.
Avec cet article, le Gouvernement souhaite désigner un seul lauréat via un marché unique pour les bâtiments scolaires et universitaires. En effet, cela accélérera les constructions.
Mais répondre à l'urgence ne doit pas conduire à l'aggravation de la situation économique de l'île, en offrant un monopole de la reconstruction à de grands groupes, alors que de nombreuses entreprises locales ou d'artisans pourraient participer aux travaux. C'est là l'occasion de corriger le retard de développement de Mayotte.
Il faut veiller à la bonne répartition des emplois et des salaires qui vont avec. Cet amendement reprend une disposition intégrée au projet de loi d'urgence prévoyant un montant minimum de 30 % pour les micro-entreprises, les PME et les artisans, afin d'éviter que les grandes entreprises ne captent ces marchés.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - La commission considère qu'il s'agit d'un dispositif proportionné : avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°111 est adopté.
L'article 21, modifié, est adopté.
Après l'article 21
M. le président. - Amendement n°161 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'amendement complète l'article 17 de la loi du 24 février 2025 d'urgence pour Mayotte. Les établissements scolaires et universitaires de Mayotte ont besoin d'infrastructures temporaires pour accueillir les élèves. Les constructions modulaires ne sont pas nécessaires à la reconstruction stricto sensu et ne peuvent donc pas bénéficier de la dérogation prévue par la loi d'urgence, mais elles restent nécessaires à la continuité des services publics d'enseignement. Les besoins temporaires ne sont pas tous identifiés, et des marchés seront passés dans les mois à venir.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement n°161 est adopté et devient un article additionnel.
Article 22
M. le président. - Amendement n°3 de M. Lurel et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Cet amendement prolonge pour cinq ans le dispositif proposé par l'article 22 qui crée une zone franche globale à Mayotte. En portant de cinq à dix ans l'expérimentation, nous donnerons plus de visibilité aux acteurs de Mayotte.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Avis défavorable : la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 préconise de limiter les dépenses fiscales à trois ans. Il serait préférable d'évaluer le dispositif au bout de cinq ans avant d'envisager sa prolongation. Mayotte bénéficiera d'une zone franche d'activité nouvelle génération existant dans d'autres outre-mer.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°3 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°2 de M. Lurel et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Cet amendement introduit une évaluation de dispositions fiscales introduites par l'article 22, dans l'hypothèse d'une suppression ou d'une prorogation. Le groupe SER votera cet article, mais il nous faut une information utile pour jauger du futur de ce dispositif.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Avis défavorable, comme c'est l'usage en matière de rapports.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°2 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°46 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Henri Cabanel. - L'impact budgétaire du dispositif de l'article 22 s'élève à 90 millions d'euros. Aucun dispositif de pilotage n'est prévu pour ce dispositif. Sans feuille de route définie, le cap de reconstruction sera difficile à suivre. Mettons en place un comité de suivi ad hoc sous l'autorité du préfet.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Une année, c'est un peu court. Il serait plus pertinent de dresser un bilan en 2030. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°46 rectifié n'est pas adopté.
L'article 22 est adopté.
Après l'article 22
M. le président. - Amendement n°4 rectifié bis de Mme Malet et alii.
Mme Viviane Malet. - En attendant la refonte du dispositif de charges patronales applicable à Mayotte, nous proposons un rehaussement du plafond du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) de 2,5 à 3,5 Smic. Le plafond actuel dissuade les employeurs d'augmenter les employés. Cet amendement a été travaillé avec la Fédération des entreprises des outre-mer (Fedom).
M. le président. - Amendement identique n°23 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Cet amendement permet aux entreprises mahoraises de bénéficier du CICE pour les salariés qui ne dépassent pas le plafond de 3,5 Smic.
La zone franche prévue à l'article 22 bénéficie uniquement aux entreprises qui font des bénéfices, ce qui n'est pas le cas des petites entreprises.
Les outre-mer bénéficient du dispositif Lodéom, qui autorise des charges patronales réduites. Les entreprises mahoraises, elles, paient des charges salariales plus importantes que tous les autres territoires outre-mer ; aucun dispositif ne les accompagne.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Amendement de repli : nous proposons de limiter le dispositif dans le temps.
M. le président. - Amendement identique n°55 rectifié de Mme Malet.
Mme Viviane Malet. - C'est un amendement de repli qui borne la mesure au 31 décembre 2026.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Quel est l'avis du Gouvernement ? La convergence des droits sociaux implique l'augmentation des cotisations patronales. Comment le Gouvernement compte-t-il pallier les conséquences de l'augmentation du Smic prévue pour 2026 ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement partage votre préoccupation : nous devons accompagner les entreprises mahoraises.
Alors que nous menons un chantier de convergence, il paraît contre-intuitif de renforcer un dispositif dérogatoire à Mayotte, à savoir le CICE. Je préconise d'autres leviers pour atteindre l'objectif.
Retrait, sinon avis défavorable.
Les amendements identiques nos4 rectifié bis et 23 rectifié bis ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques nos22 rectifié bis et 55 rectifié.
M. le président. - Le Gouvernement nous a fait savoir qu'il demanderait une courte seconde délibération. Afin d'achever l'examen des amendements, j'appelle chacun à la concision.
M. le président. - Amendement n°5 rectifié bis de Mme Malet et alii.
Mme Viviane Malet. - Nous supprimons l'effet cliquet du CICE.
M. le président. - Amendement identique n°21 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°20 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°54 rectifié de Mme Malet.
Mme Viviane Malet. - Défendu
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis que tout à l'heure : retrait, sinon avis défavorable.
Les amendements nos5 rectifié bis, 21 rectifié bis, 20 rectifié bis et 54 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°56 de Mme Malet.
Mme Viviane Malet. - Défendu.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Le dispositif de soutien aux entreprises est pertinent et bien ciblé. Les pertes d'activité sont chiffrées à 484 millions d'euros. Le Gouvernement était passé par le décret, et il envisage de faire de même pour les mois de février et mars. Il est préférable de procéder ainsi. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°56 est retiré.
L'article 25 est adopté.
Article 26
M. le président. - Amendement n°73 de M. Hochart et alii.
L'amendement n°73 n'est pas défendu
M. le président. - Amendement n°79 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°79 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°122 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°122 n'est pas adopté.
L'article 26 est adopté, de même que les articles 27, 28 et 39.
Article 30
M. le président. - Amendement n°165 de Mme Canayer et M. Botz, au nom de la commission des lois.
L'amendement rédactionnel n°165, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 30, modifié, est adopté.
Article 31
M. le président. - Amendement n°11 de M. Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. - Il s'agit de procéder à une élection avec liste unique sans sections, conformément au voeu unanime des membres du conseil départemental. Cela permet de choisir un projet politique pour Mayotte et d'assurer une gouvernance plus stable.
Les déséquilibres constatés entre les données démographiques et le nombre d'inscriptions sur les listes électorales n'assurent pas une bonne représentativité.
M. le président. - Amendement n°12 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - M. Omar Oili a défendu la position des élus de Mayotte. Le groupe SER dépose un amendement de repli pour revenir à cinq sections. Il n'est pas justifié d'établir un découpage en treize sections, qui morcellent excessivement le territoire. Restons cohérents avec les règles en vigueur en Guyane et en Martinique, qui ont respectivement huit et quatre sections.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable sur ces deux amendements. Nous préférons treize sections, conformément aux travaux de notre ancien collègue Thani Mohamed Soilihi. Cela permettra aux cantons actuels de disposer d'au moins autant d'élus qu'aujourd'hui et de dégager une majorité claire pour conduire les politiques au sein du département.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement avait imaginé, après discussion avec les élus, un scrutin basé sur une circonscription unique et cinq sections. Nous respectons le travail du Sénat et des rapporteurs : sagesse sur l'amendement n°12 et avis défavorable sur l'amendement n°11.
L'amendement n°11 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°12.
L'article 31 est adopté, de même que l'article 32.
Article 33
M. le président. - Amendement n°166 de Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois.
L'amendement rédactionnel n°166, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 33, modifié, est adopté.
L'article 34 est adopté.
Seconde délibération
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Sur le fondement de l'article 43, alinéa 4, du règlement, le Gouvernement demande une seconde délibération sur l'article 1er et son rapport annexé.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis favorable.
La seconde délibération est ordonnée.
M. le président. - Conformément à l'article 43, alinéa 5, lorsqu'il y a lieu à une seconde délibération, le texte est renvoyé à la commission qui doit présenter un nouveau rapport.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - La commission y est prête.
Article 1er (Rapport annexé - Seconde délibération)
M. le président. - Amendement A1 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Chacun l'a compris, cet amendement concerne la réalisation de la piste longue à Mayotte, attendue et nécessaire à la continuité territoriale.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'avis de la commission était favorable lors du premier vote ; il le reste.
M. Saïd Omar Oili. - C'est un scandale : le Sénat a voté de manière éclairée sur l'article 1er. Nombre de nos amendements ont été rejetés, mais nous n'avons pas demandé une seconde délibération. La population de Mayotte, que Mme Ramia et moi-même avons défendue, sera témoin de cette procédure. Nous le ferons savoir ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER)
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Le Sénat, chambre des territoires, a entendu les arguments des deux sénateurs de Mayotte. Nous avions déjà dénoncé cette procédure sur le projet de loi de finances ; nous le faisons ici encore.
Mme Salama Ramia. - La demande des élus mahorais n'a pas été respectée. (Applaudissements à gauche)
Mme Frédérique Puissat. - Il y a 34 articles dans ce projet de loi.
Nous délibérons à nouveau sur un article, car il y a eu une erreur manifeste d'appréciation. (Fortes protestations à gauche)
Nous avons travaillé jusqu'à minuit quatorze avec sérieux, dans l'intérêt des Mahorais, que certes vous représentez, mais que nous représentons tous dans cet hémicycle.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement peut demander une seconde délibération, le Sénat en décide. Le mot de scandale est excessif.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous ne sommes pas à l'Assemblée nationale !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je suis au Sénat, que je connais bien et que je respecte.
Il s'agit d'un projet majeur d'aéroport, qui implique un engagement fort de l'État et qui sera un élément de développement pour Mayotte. S'ajoutent des projets de compensation pour Petite-Terre. Je m'y suis engagé sur place, le Président de la République aussi.
Tout le monde sait qu'il y a un débat dans l'archipel ; je demande donc une seconde délibération. Chacun est libre de voter comme bon lui semble dans cette assemblée qui a toujours manifesté son indépendance. (Mme Evelyne Corbière Naminzo proteste.)
L'amendement n°A-1 est adopté.
M. Guy Benarroche. - On peut revoter ?
L'article 1er, modifié, est adopté.
Mme Silvana Silvani. - Mascarade !