Disponible au format PDF Acrobat
Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.
Table des matières
Résolution sur la prévention de la pollution des mers (Conclusions de la CMP)
M. Philippe Folliot, rapporteur pour le Sénat de la CMP
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie
Création de l'établissement public du commerce et de l'industrie de Corse (Procédure accélérée)
M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation
Mme Olivia Richard, rapporteure de la commission des lois
Impact environnemental de l'industrie textile (Procédure accélérée)
Intitulé de la proposition de loi
Ordre du jour du mardi 3 juin 2025
SÉANCE
du lundi 2 juin 2025
96e séance de la session ordinaire 2024-2025
Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente
Secrétaires : M. Guy Benarroche, Mme Catherine Di Folco.
La séance est ouverte à 15 heures.
Résolution sur la prévention de la pollution des mers (Conclusions de la CMP)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l'article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets et autres matières.
M. Philippe Folliot, rapporteur pour le Sénat de la CMP . - En commission, le Sénat avait adopté à l'unanimité ce projet de loi, mais l'Assemblée nationale l'a rejeté. La CMP l'a finalement adopté largement, par douze voix pour, une voix contre et une abstention.
La Convention de 1972 dite de Londres, l'un des premiers textes internationaux dotés d'une vision environnementale, permettait l'enfouissement sous les océans, après autorisation. Le protocole de 1996 a inversé la logique : une interdiction générale, sauf dérogation ponctuelle. C'est une bonne chose, pour les océans, pour la biodiversité, pour l'équilibre climatique, sachant que 70 % de la surface de la planète est recouverte par les océans. Notre pays dispose du premier domaine maritime au monde, avec 11 millions de kilomètres carrés ; il a donc une responsabilité particulière.
La possibilité d'enfouir du CO2 dans les océans sera précieuse pour certains secteurs industriels - la sidérurgie, la cimenterie ou la chimie, notamment, qui ne peuvent se passer d'énergies carbonées.
La France a un vrai savoir-faire en matière de captage et de transport du carbone, mais nous n'avons pour l'heure aucune solution pour l'enfouir sur notre sol. Ce texte y remédie, en ouvrant des possibilités de stockage dans des pays voisins, notamment en mer du Nord. Le groupe français TotalEnergies dispose du savoir-faire nécessaire et travaille à des solutions de stockage, notamment en Norvège.
La commission a adopté à l'unanimité ce texte qui va dans le bon sens ; je vous invite à la suivre.
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie . - Stocker et exporter le carbone est une absolue nécessité pour l'avenir de nos industries et de nos emplois. Quand on produit du ciment à Montalieu-Vercieu, dans l'Isère, ou de la chaux à Rety, dans le Pas-de-Calais, on libère du dioxyde de carbone. Idem pour la production de produits azotés et d'engrais à Gonfreville ou au Grand-Quevilly, en Seine-Maritime. Des milliers de sites industriels sont concernés, qui produisent du CO2 fatal, lié aux procédés de production eux-mêmes. Ces émissions ne peuvent être réduites que par captage et stockage.
La France vise la neutralité carbone d'ici à 2050. La décarbonation de l'industrie est un défi pour notre compétitivité, nos concurrents internationaux n'étant pas soumis aux mêmes obligations en matière de quotas d'émission. Cette concurrence est aggravée par des pratiques agressives, voire déloyales, qui menacent l'avenir de ces filières stratégiques pour notre souveraineté. C'est donc un enjeu de survie pour nos sites industriels ; des milliers de salariés comptent sur nous.
La décarbonation passe par des mesures structurelles - électrification, recyclage - mais quand les émissions ne peuvent être réduites à la source, la capture et le stockage du carbone sont une solution de dernier recours. Si l'on veut continuer à produire ciment, chaux et engrais en France en 2035, il faut accélérer le développement des technologies de capture, stockage et valorisation du carbone.
Des projets sont en cours, comme dans l'usine Lhoist de Rety. Mais faute d'infrastructure, aucun stockage français, sur terre ou en mer, ne sera opérationnel avant 2030. Il en existe en revanche en Norvège et au Danemark, en mer du Nord. L'export de CO2 est donc essentiel.
J'ai engagé des contacts avec des industriels et avec mes homologues norvégiens et danois. Nos partenaires sont prêts ; nous avons à présent besoin d'autoriser l'exportation du carbone pour passer à l'action. C'est l'enjeu de ce texte.
Heidelberg et Lafarge à Saint-Nazaire, Lat Nitrogen et Yara au Havre, Aluminium Dunkerque, Eqiom et Lhoist à Dunkerque : ces entreprises ont déjà signé des contrats pour du stockage de CO2 en Europe du Nord, obtenu des soutiens publics européens ou nationaux, et attendent cette ratification pour lancer leurs projets de décarbonation.
Pays-Bas, Belgique, Royaume-Uni autorisent déjà l'exportation des flux de carbone. La course est lancée, en Europe et dans le monde. Nos industriels doivent pouvoir investir dès maintenant dans les technologies de capture et de stockage. Sans quoi, nos sites industriels risquent de fermer et nos entreprises de partir pour Anvers ou Rotterdam.
Quelque 439 millions d'euros de financements européens sont conditionnés au démarrage à court terme des projets, et donc à l'autorisation par le Parlement de l'exportation du carbone. Cette décision est notre responsabilité.
Je tiens à vous rassurer sur la sécurité de ces infrastructures. Les technologies de transport et de stockage sous-marins ont fait leurs preuves pour le pétrole et le gaz, et nous exporterons vers des pays qui ont des standards environnementaux de haut niveau.
Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, nous devons commencer à stocker du carbone dès 2030. À court terme, il est essentiel d'autoriser l'exportation des flux de carbone dès aujourd'hui. Ainsi, nous poursuivrons notre combat en faveur de la décarbonation de nos industries, c'est-à-dire de l'emploi et de l'avenir de nos territoires.
Je vous appelle donc à voter en faveur de ce projet de loi.
Vote sur l'ensemble
Mme Marie-Claude Varaillas . - L'enfouissement du CO2 en mer du Nord est souvent présenté comme une technologie phare pour réduire les émissions. Si ce peut être un levier, pour la cimenterie par exemple, sa pertinence pour l'ensemble des secteurs industriels demeure limitée. Il ne peut s'agir que d'une solution ponctuelle pour les industries lourdes - sidérurgie, chimie ou encore métallurgie.
La clé de la transformation de l'industrie française réside dans la réindustrialisation, portée par l'électrification, l'usage du biogaz, l'hydrogène décarboné, et surtout l'innovation. Notre objectif de 91 % de décarbonation d'ici à 2050 en dépend.
Mais miser sur le stockage sous-marin pour compenser les émissions revient à repousser le problème à plus tard. On risque d'entraver la transformation structurelle en favorisant des investissements dans des technologies faciles, mais peu durables, voire risquées à long terme.
Le discours pro-captage et stockage fait prévaloir les activités humaines sur la nécessité de les adapter aux limites planétaires. Transformer les réservoirs géologiques en décharges sous-marines traduit une fuite en avant technologique. L'injection de CO2 est aussi un moyen pour extraire plus de pétrole : 70 à 90 % des projets actuels de séquestration servent à prolonger l'exploitation des hydrocarbures, non à réduire les émissions.
La rentabilité et l'efficacité réelle de ces projets restent incertaines. À 200 euros la tonne, le coût du stockage pousse les industriels à préférer la compensation à bas coût à une transformation structurelle. Les risques de fuite et les échecs techniques se multiplient, à Lacq en France ou à Aliso Canyon en Californie.
Le stockage du CO2 maintient l'illusion d'un progrès technologique qui neutralise les effets de modèles obsolètes, sans en remettre en cause les fondements. Il ne s'agit plus de réduire la consommation d'énergies fossiles, mais seulement d'en masquer les conséquences.
Si le technosolutionnisme peut accompagner certains secteurs à court terme, notamment la cimenterie, il ne saurait remplacer une stratégie ambitieuse de décarbonation intégrale. La transition énergétique industrielle passe par la réindustrialisation, la relocalisation, l'électrification et l'innovation. Miser sur l'enfouissement, c'est prolonger l'ère des fossiles. Notre groupe s'abstiendra sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
Mme Mathilde Ollivier . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Un bel écran de fumée, ainsi peut-on résumer ce projet de loi. En engageant la procédure accélérée, vous pensiez que cette réforme du protocole de Londres passerait inaperçue, vous comptiez ensevelir nos émissions loin des regards... Je remercie nos collègues de l'Assemblée nationale pour leur vigilance ; le retour à la procédure normale nous a permis de sortir de ce brouillard.
Plutôt que de réduire les émissions à la source, certains producteurs préfèrent les enfouir à l'étranger, à vingt mille lieues sous les mers. Les projets se multiplient sous les eaux norvégiennes et danoises, et bientôt sous l'Adriatique avec le projet franco-italien Callisto.
Si ce stockage du carbone peut être un dernier recours, et de court terme, pour certaines activités industrielles, gare aux promesses technosolutionnistes : le risque est de préférer une solution technologique coûteuse et incertaine à une vraie décarbonation.
Le projet Callisto prévoit la construction d'un carboduc de plusieurs centaines de kilomètres de la région lyonnaise au port de Fos-sur-Mer. Le CO2 serait liquéfié à grand renfort d'énergie, puis chargé sur des navires gaziers pour faire le tour de l'Italie et être enfin enfoui au large de Ravenne. Or la région est à fort risque sismique. En cas de fuite, on exposerait les nappes phréatiques à une forte pollution, et les riverains à des séquelles graves, comme dans le Mississippi en 2020.
Sans parler du coût : 3,3 milliards d'euros ont été attribués par l'Union européenne en 2023 à des projets de capture et stockage de carbone et le seul carboduc de la vallée du Rhône coûterait jusqu'à 1,5 milliard d'euros. À l'heure où les budgets écologiques sont rognés de toutes parts, on encourage les industriels à continuer de polluer !
Notre priorité doit être d'accélérer la décarbonation de l'industrie, en accompagnant les entreprises volontaires et en agissant sur les récalcitrantes. Arcelor Mittal touche des aides publiques massives pour enfouir son CO2 en Norvège, mais licencie... Il faut nationaliser cette entreprise stratégique pour planifier sa transition écologique !
Selon l'Ademe, le stockage ne doit intervenir qu'en dernier recours, et se faire à 200 kilomètres maximum de la source de CO2. Écoutons les scientifiques, investissons dans des techniques réduisant les émissions et si nous enfouissons, faisons-le chez nous plutôt qu'à l'étranger ! Opposons-nous à Total, Lafarge ou Arcelor Mittal, qui réclament toujours plus d'aides publiques, mais rechignent à décarboner.
Nous refusons de cautionner cette fuite en avant. Amender le protocole de Londres, à une semaine de la conférence onusienne sur l'océan à Nice, est malvenu. Nous voterons contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST)
M. Jérôme Darras . - Cette ratification autorisera l'échange transfrontalier du CO2 capté en vue d'un stockage sécurisé dans des fonds marins d'États partenaires, notamment en mer du Nord.
La capture et le stockage de CO2 sont essentiels pour atteindre nos objectifs climatiques. Pour l'instant, les producteurs de chaux ou de ciment ne peuvent réduire leurs émissions incompressibles autrement. Par ailleurs, notre pays ne disposera pas de capacités de stockage avant 2030 au plus tôt. Grâce à ce texte, les sites industriels français concernés pourront exporter le CO2 vers des pays proches disposant de sites de stockage.
Deux projets de décarbonation sont en cours dans mon département : la cimenterie Eqiom à Lumbres et l'usine de chaux Lhoist à Rety, pour une réduction des émissions de CO2 d'environ 1,5 million de tonnes par an. Le projet d'Artagnan qui débutera en 2028 met en place des infrastructures pour exporter le CO2 depuis Dunkerque. Leur concrétisation est conditionnée à la ratification de l'amendement.
Le cadre est sécurisé : conclusion d'un accord entre les pays, délivrance de permis, respect des exigences environnementales imposées par le protocole de Londres.
La capture et le stockage ne sont pas privilégiés, ni même favorisés. Le projet de loi ne choisit pas entre le stockage offshore et les autres solutions de décarbonation que sont l'électrification, le recours à la biomasse ou le recyclage ; il ne nous exonère pas de poursuivre nos efforts en matière de sobriété et de transition écologique.
Le captage et le stockage du carbone sont nécessaires pour lutter contre la pollution atmosphérique et honorer nos engagements environnementaux. Ils sont indispensables pour certains secteurs qui n'ont pas d'alternative. Ils complètent la palette des outils existants tant que d'autres solutions viables ne sont pas opérationnelles, et assurent par là même la pérennité des activités concernées.
Dès lors, il faut un cadre juridique adapté : c'est l'objet de ce texte. Le groupe SER votera pour.
M. Cédric Chevalier . - La convention de Londres de 1972 a été l'un des premiers jalons en matière de protection du milieu marin. En 1996, le protocole a inversé la logique : d'une interdiction partielle, on est passé à une interdiction de principe, sauf exceptions strictement encadrées. Il a défini un cadre rigoureux pour le stockage sous-marin et posé les principes d'une gouvernance environnementale fondée sur la précaution, la transparence et la coopération entre États.
Le défi climatique impose d'aller plus loin. La France s'est engagée à réduire de 35 % ses émissions de gaz à effet de serre à horizon 2030 et vise la neutralité carbone en 2050.
La réduction des émissions à la source reste la priorité, mais elle doit être complétée par les solutions captage, de valorisation et de stockage du CO2. Ces technologies ne sont pas des échappatoires, mais s'insèrent dans une stratégie globale.
Signé en 2009 et appliqué à titre provisoire depuis 2019, l'amendement à l'article 6 du protocole de Londres permet l'exportation de CO2 à des fins de stockage sous-marin vers un autre pays, sous réserve d'un accord. En 2024, la France a conclu un tel accord avec le Danemark.
Cette solution n'est pas une alternative, mais une option complémentaire à explorer dans le cadre de la transition écologique.
Dans sa stratégie nationale publiée en juillet 2024, la France n'a pas identifié de capacités souveraines de stockage exploitables. Des études sont en cours, mais la très grande majorité du CO2 capté sur notre territoire devra être exportée. D'où l'accord avec le Danemark.
Comment expliquer que la France, deuxième domaine maritime mondial, n'ait pas lancé de projet de stockage offshore, contrairement à la Norvège, au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas ?
Ce texte doit être un levier pour accélérer le développement d'une filière nationale, structurée et ambitieuse. Il faut développer des projets sur notre propre territoire, notamment en mer. Il y va de notre crédibilité et de notre avenir collectif.
Mme Catherine Dumas . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Depuis l'adoption de la loi européenne sur le climat, notre feuille de route est claire : la neutralité climatique d'ici vingt-cinq ans. Objectif aussi simple à énoncer que complexe à mettre en oeuvre...
Sur les 65 millions de tonnes de CO2 émises l'an dernier, ce sont plus de 10 millions de tonnes que la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) ambitionne de supprimer d'ici cinq ans et 50 millions de tonnes en 2050.
Pour toutes nos industries, la marche est gigantesque. Pour le ciment, l'acier, l'aluminium ou la chimie, la décarbonation à grande échelle des processus de fabrication est techniquement impossible. Dans le même temps, le montant des pénalités s'envole. Sans alternative, ces productions essentielles se trouveront prises au piège d'émissions élevées, incompressibles et de plus en plus coûteuses.
Nous ne pouvons négliger aucune solution. La capture et le stockage du carbone peuvent ainsi permettre à certaines industries de continuer à produire tout en respectant leurs obligations climatiques : on pourrait capter 4 à 9 millions de tonnes de carbone chaque année à partir de 2030, 15 à 20 millions en 2050.
Les technologies de capture sont matures et rentables, leur bénéfice économique et environnemental évident. Encore faut-il pouvoir séquestrer le carbone capté. Le retard de notre pays dans ce domaine est regrettable. Nous ne pouvons qu'exhorter l'État et les acteurs de la filière à résorber ce retard et à déployer une stratégie offensive.
En attendant des sites de stockage sur notre territoire, l'exportation de notre CO2 vers des sites opérationnels en mer du Nord est la seule solution viable.
L'amendement au protocole de Londres la rend possible sans délai. Le groupe Les Républicains en soutient la ratification.
La mise en oeuvre de ces technologies devra faire l'objet d'un suivi environnemental exigeant, mais la nature inerte du CO2, l'expérience technique héritée du secteur énergétique, la robustesse des cadres légaux existants et la rigueur des pays partenaires invitent à la sérénité.
Le stockage du carbone n'est évidemment pas une solution miracle qui nous dispenserait des efforts à fournir. Il ne remplacera pas la sobriété, l'efficacité énergétique ou la préservation des puits de carbone naturels. Mais il constitue un complément utile pour concilier ambition climatique et impératifs socio-économiques. S'en remettre uniquement à cette technologie serait une erreur, s'en détourner par principe serait une faute : le défi climatique exige d'utiliser tous les outils disponibles.
La présente ratification n'est pas un blanc-seing, mais une avancée pragmatique, pour donner à la science et à l'innovation leur juste place dans notre stratégie climatique. C'est un choix de responsabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Georges Patient . - Cet amendement au protocole de Londres permet à un pays d'exporter du dioxyde de carbone capté sur son territoire pour qu'il soit conservé de manière sûre dans le sous-sol marin d'un autre pays. Cet élément d'apparence technique est crucial pour notre stratégie bas-carbone.
Selon le Giec, il nous faudra recourir au captage et au stockage en complément des autres actions - sobriété, énergies renouvelables, électrification. Ce n'est pas une solution de remplacement, mais un outil parmi d'autres pour traiter les émissions incompressibles dans des secteurs stratégiques comme le ciment, la sidérurgie ou la chimie.
La France n'a pas encore de site opérationnel de stockage, contrairement à la Norvège ou au Danemark. Ce texte nous permettra de coopérer avec eux, dans un cadre strictement délimité.
Il ne s'agit pas de se décharger de nos responsabilités, mais de travailler avec nos partenaires.
Sénateur de Guyane, département couvert à 96 % par la forêt, je rappelle qu'il existe une autre méthode, plus naturelle et peu énergivore, pour stocker le CO2 : l'exploitation forestière pour la production de bois d'oeuvre. Avant de brûler, la charpente de Notre-Dame stockait du carbone depuis 800 ans. (M. Philippe Folliot le confirme.)
En incitant le secteur du bâtiment à substituer le bois au ciment ou à l'acier, nous réduirions drastiquement l'empreinte carbone de ce secteur. Un mètre cube de bois séquestre une tonne de CO2 !
Pourtant, à force de précautions et de manque d'ambition, la production de bois stagne. Nous produisons moins qu'en 2018. Avec 80 000 m3 par an, la Guyane produit moins de bois que toutes les régions de l'Hexagone, alors qu'elle abrite huit millions d'hectares de forêts, la moitié de ce que compte l'Hexagone.
Où en sont les plans bois ? Le contrat de filière ? Quels bilans ? En tant que Guyanais, je ne comprends pas qu'une filière aussi stratégique végète de la sorte. J'ai d'ailleurs alerté le Gouvernement sur les risques associés au règlement européen 2023/1115 contre la déforestation importée.
Le groupe RDPI votera ce texte, qui nous donne un levier, mais qui ne doit pas réduire nos ambitions de développement de la filière bois.
M. André Guiol . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Ce texte a été rejeté à l'Assemblée nationale, tandis que le Sénat s'est prononcé en faveur sa ratification. La CMP a permis de surmonter les désaccords initiaux, en clarifiant notamment les objectifs poursuivis.
Il s'agit d'un mécanisme de transition, destiné à rendre possible, à court terme, le recours à des capacités de stockage à l'étranger, faute de solutions domestiques opérationnelles.
Cette ratification n'est pas un blanc-seing donné à une technologie, elle ne règle pas le retard français en matière de stockage géologique. Elle ne saurait être prétexte à un contournement des efforts structurels de réduction des émissions, mais évite le blocage de certains projets industriels déjà engagés.
Le RDSE soutient une transition écologique ambitieuse, mais lucide, qui tienne compte des réalités industrielles et territoriales. Certaines filières comme le ciment ou la chaux manquent d'une solution décarbonée ; il serait irresponsable de les condamner sans alternative. Le captage et le stockage du carbone peuvent constituer une voie d'accompagnement transitoire, à condition d'être encadrés.
Les industriels qui investissent massivement dans la décarbonisation ont en outre besoin de viabilité et de stabilité.
La dérogation au principe de non-exportation des déchets pour immersion est encadrée : elle ne vaut que pour les flux de CO2 destinés à la séquestration géologique, dans le cadre d'accords bilatéraux. Elle doit rester exceptionnelle, proportionnée et temporaire.
Mais restons vigilants. Le stockage ne saurait devenir une solution de facilité. La mer, bien commun fragile, ne doit pas être le réceptacle passif de nos impasses technologiques. La France doit se doter au plus vite d'une stratégie de stockage souveraine.
La tenue prochaine de la Conférence des Nations unies sur l'océan à Nice nous oblige à la cohérence.
Ratifier cet accord, c'est rendre possible une coopération encadrée avec la Norvège ou le Danemark.
Le RDSE votera les conclusions de la CMP, tout en portant une écologie de responsabilité qui conjugue ambition climatique, exigence environnementale et justice industrielle. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe INDEP)
M. Philippe Folliot . - Il faut être cohérent : on ne peut pas se battre pour la réindustrialisation de notre pays et laisser disparaître des activités économiques implantées dans nos territoires. Donnons-leur la possibilité de s'en sortir !
Chers collègues écologistes, préférez-vous faire venir du ciment de l'autre bout de la planète que maintenir cette activité sur notre territoire ?
Oui, nous avons besoin d'une capacité de stockage souveraine. Cédric Chevalier l'a dit, il est regrettable de devoir nous tourner vers le Royaume-Uni, les Pays-Bas ou la Norvège. Mais ces pays sont en avance sur nous, ils ont reconverti des gisements de gaz épuisés pour stocker du CO2.
Nous aurions des opportunités en France : en Aquitaine, autour de Lacq, ou dans le bassin parisien. Notre collègue Ollivier a dit - et cela vaut son pesant d'or : « il faut stocker chez nous plutôt qu'ailleurs ». Vu les réactions des écologistes devant d'autres projets, cela a de quoi surprendre ! Le jour où il y aura des projets de stockage en Aquitaine ou dans le bassin parisien, nous repasserons en boucle vos propos...
Vous vous réjouissez du rejet par l'Assemblée nationale au motif que le Sénat aurait voulu faire passer ce texte en catimini. Les bras m'en tombent ! En commission, les représentants de votre groupe n'ont rien dit, et n'ont pas voté contre le texte. L'article 47 decies de notre règlement permet à tout président de groupe de saisir la Conférence des présidents pour obtenir le retour à la procédure normale. Vous n'avez rien fait ! Rien dit ! Soyons sérieux...
Je ne reviens pas sur les incidents que vous avez cités, sur le coût de l'infrastructure projetée dans la vallée du Rhône. Je ne sais d'où vous sortez ces chiffres. En tant que rapporteur, je n'ai pas réussi à obtenir d'éléments - vous nous les transmettrez !
Je crois surtout que vous voulez jouer sur les peurs...
Mme Mathilde Ollivier. - « Jouer sur les peurs » ? Nous ?
M. Philippe Folliot. - Nous, nous prenons nos responsabilités, au vu des conséquences économiques, sociales et environnementales.
M. Pascal Savoldelli. - Quand vous parlez de « jouer sur les peurs », regardez plutôt de l'autre côté de l'hémicycle !
M. Philippe Folliot. - Le groupe UC votera ce texte avec conviction. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP)
Mme la présidente. - En application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, le Sénat statue par un seul vote sur l'ensemble du texte.
Le projet de loi est adopté.
La séance est suspendue quelques instants.
Création de l'établissement public du commerce et de l'industrie de Corse (Procédure accélérée)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant création de l'établissement public du commerce et de l'industrie de la collectivité de Corse.
Discussion générale
M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation . - Je suis heureux de vous présenter un texte très attendu par la Corse et ses habitants, aboutissement d'un travail collectif qui a mobilisé le Gouvernement et les élus corses ces dernières années.
Une évidence, d'abord : la Corse est une île. (Sourires) Cette spécificité doit être prise en compte dans la plupart des décisions de la puissance publique, qu'il s'agisse de l'État ou de la collectivité de Corse.
Cette géographie impose une attention particulière à la desserte, maritime ou aérienne, et à l'accès au continent - c'est la continuité territoriale.
L'enjeu est aussi économique, car le secteur touristique contribue cinq fois plus à la richesse produite sur l'île que sur le reste du territoire.
La bonne gestion et la sécurité des ports et aéroports de la Corse est un impératif. La maîtrise d'ouvrage doit impérativement revenir à la puissance publique, seule garante d'une vision de long terme soucieuse du bien commun.
Je remercie la rapporteure pour son travail et la qualité de nos échanges. Sur son initiative, la commission a adopté des précisions bienvenues - dont l'une, toutefois, me semble appeler un ajustement, sur lequel je reviendrai.
Ce projet de loi est nécessaire dans le cadre du processus initié par la création, en 2018, de la collectivité unique de Corse, chargée des compétences en matière de développement économique et de continuité territoriale. Prolongeant cette orientation, la loi Pacte de 2019 a prévu une évolution statutaire des chambres consulaires afin de donner à la collectivité de Corse les moyens d'exercer pleinement ses compétences.
Ce projet de loi est attendu : il est le fruit d'une concertation étroite entre l'État, la collectivité et la CCI. Je remercie pour cet effort collectif les présidents des deux dernières, ainsi que les représentants syndicaux. Je salue également l'engagement de Catherine Vautrin, qui a initié ces échanges avec le concours du préfet de Corse.
L'Assemblée de Corse a émis, à l'unanimité, un avis favorable sur ce texte équilibré, de bon sens, sécurisé techniquement et juridiquement. La création d'un établissement sui generis, adapté aux spécificités locales, apporte une triple garantie : garantie de maîtrise d'ouvrage publique des infrastructures ; garantie des intérêts des agents ; garantie de qualité de service pour la population.
Placé sous la tutelle de la collectivité de Corse, le nouvel établissement public reprendra les missions actuelles de la CCI, dont je salue l'action, en particulier dans le domaine de la gestion portuaire et aéroportuaire. Les délégations de service public (DSP) relatives au port de Bastia et aux aéroports d'Ajaccio, Bastia, Calvi et Figari, arrivées à échéance le 31 décembre dernier, ont été exceptionnellement prolongées pour un an, mais cette situation ne peut durer.
La nouvelle structure, qui verra le jour au 1er janvier prochain, permettra une gestion en quasi-régie, garantissant le contrôle de la collectivité sur les grandes décisions stratégiques. Les élus de la collectivité seront majoritaires au sein de son conseil d'administration.
Le Conseil d'État a estimé qu'il n'était pas du ressort de la loi de déterminer la nature administrative ou industrielle et commerciale de cet établissement. Nous laissons les acteurs locaux décider de l'organisation la plus pertinente.
L'établissement public reprendra les missions obligatoires de la CCI ; la gestion des ports et aéroports est explicitement mentionnée. Le personnel et les biens de la CCI lui seront transférés à titre gratuit, sans impôt ni taxe. Financièrement, l'opération est neutre et même bénéfique pour la Corse, puisque l'établissement créé percevra les contributions des entreprises et les transferts du réseau CCI France et que la collectivité bénéficiera d'une compensation pour charges de tutelle.
Le conseil d'administration de l'établissement public sera composé majoritairement de membres de l'Assemblée de Corse, ainsi que de représentants élus des professionnels ; des représentants du personnel y siégeront à titre consultatif.
Je suis favorable aux précisions apportées par la commission en matière de gouvernance. D'une part, la présidence de l'établissement sera exercée par le président du conseil exécutif, qui pourra la confier à un autre membre de ce conseil : le président doit pouvoir assumer de droit la gestion d'une structure de cette importance. D'autre part, les conseillers exécutifs assurant la présidence d'une agence pourront siéger au conseil d'administration avec voix délibérative : il est naturel que les élus chargés du transport, du tourisme et du développement économique soient associés à la gouvernance.
De même, je salue les mesures introduites en commission prévoyant la présence de représentants du personnel avec voix consultative et limitant à vingt le nombre de représentants élus de la CCI. Pour être opérationnel, un conseil d'administration doit être assez ouvert pour être représentatif, mais aussi assez resserré pour garantir la qualité du dialogue.
Enfin, je salue le remplacement en commission du comité social et territorial par un comité social et économique répondant parfaitement aux demandes des partenaires sociaux.
Le Gouvernement n'a déposé qu'un amendement, sur le délai de renégociation des accords unilatéraux conclus au sein de la CCI de Corse, que le texte initial fixait à dix-huit mois. Par souci de sécurisation juridique et pour faciliter le dialogue social, il nous paraît opportun de l'allonger. Un délai de quatre ans semble un bon compromis entre la proposition de la commission et les préconisations du Conseil d'État.
L'éventuelle intégration de la Chambre de métiers et de l'artisanat (CMA) de Corse au nouvel établissement public, esquissée dans la loi Pacte, mérite d'être étudiée techniquement et de faire l'objet d'une concertation de même qualité que celle conduite avec la CCI. Dans l'immédiat, l'établissement public doit être créé dans les meilleurs délais ; cette intégration pourra être envisagée dans un second temps.
Je souhaite que ce texte, nécessaire pour sortir d'une situation juridique qui ne saurait être que transitoire, soit adopté rapidement, en vue d'une création de l'établissement public au 1er janvier prochain. Nous garantirons ainsi que les personnels seront transférés dans les meilleures conditions : je sais que vous y êtes tous attachés.
Mme Olivia Richard, rapporteure de la commission des lois . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Fruit d'un long processus politique de réflexion et de négociation, ce texte vise à permettre le rattachement à la collectivité de Corse de la CCI de l'île, sous la forme d'un établissement public sui generis reprenant en totalité les compétences de cette dernière.
Le président du conseil exécutif, Gilles Simeoni, a souligné devant notre commission l'importance de cette évolution. Je salue sa présence en tribune, ainsi que celles du président et du directeur général de la CCI et de la présidente de l'Assemblée de Corse ; elles confirment l'importance capitale de cet enjeu pour l'île.
Je remercie Paul Toussaint Parigi et Jean-Jacques Panunzi. Les routes corses sont belles, mais peuvent être sinueuses : nos deux collègues m'ont guidée par leurs avis précieux.
Je salue aussi l'engagement du ministre Rebsamen et sa volonté d'aboutir.
La création de ce nouvel établissement garantira le maintien d'une gestion publique des ports et aéroports sans mise en concurrence.
Depuis 2002, la collectivité de Corse dispose de larges compétences, notamment en matière de développement économique et de continuité territoriale. Elle est devenue propriétaire des infrastructures portuaires et aéroportuaires, dont elle a confié la gestion à la CCI pour quinze ans. Cette gestion représente 90 % de l'activité de la chambre et de ses mille salariés.
En 2019, la loi Pacte a prévu une étude conjointe de la collectivité, de l'État et des chambres consulaires, qui a conduit en 2022 à préconiser l'absorption de la CCI et de la CMA au sein d'un nouvel établissement public, sous la tutelle de la collectivité.
Le présent projet de loi traduit cette orientation. L'accélération de son examen répond à l'expiration des actuels contrats de concession, déjà prolongés deux fois. Sans adoption rapide, une mise en concurrence serait nécessaire, dans des délais très contraints. C'est inenvisageable, car la maîtrise du tourisme et des importations est synonyme de liberté pour la Corse.
L'article 1er, relatif aux missions, au statut et aux ressources du nouvel établissement, s'inspire des dispositions générales du code de commerce sur les compétences des CCI. En particulier, il disposera d'une mission générale de représentation des intérêts des secteurs professionnels. L'article 3 lui confie en outre la responsabilité de délivrer les cartes professionnelles d'agent immobilier.
La nouvelle personne morale bénéficiera des mêmes ressources que la CCI, à commencer par la fraction de la taxe pour frais de chambre ; elle sera intégrée au réseau CCI France. Seuls des salariés de droit privé pourront être recrutés par l'établissement, dans les conditions prévues par le code du travail.
À la demande unanime des représentants de la CCI et de la collectivité de Corse, soucieux de conserver leur modèle de dialogue social, la commission a remplacé le comité social et territorial initialement prévu par un comité social et économique de droit commun, compétent à l'égard de l'ensemble des personnels, quel que soit leur statut. L'établissement a vocation à reprendre les 1 026 agents de la CCI, ce qui portera à environ 7 000 le nombre total d'agents de la collectivité de Corse et des organismes placés sous sa tutelle.
Les conseillers à l'Assemblée de Corse seront majoritaires au sein du conseil d'administration, qui comprendra également des représentants élus des professionnels. L'article 1er dans sa rédaction actuelle prévoit que le président de l'établissement public sera désigné par le président du conseil exécutif.
L'article 4 comporte des mesures transitoires destinées à sécuriser la mise en place du nouvel établissement, s'agissant notamment de la reprise des personnels, biens, droits et obligations de la CCI.
La commission a modifié le dispositif sur deux points : reprise par principe des accords en vigueur dans la CCI sans délai de renégociation et réduction de 40 à 20 du nombre d'élus consulaires appelés à siéger au sein du futur conseil d'administration. La collectivité de Corse n'aura ainsi pas à désigner 41 élus pour siéger au sein de ce conseil, pour lequel un effectif de plus de 80 membres aurait posé des difficultés pratiques.
Un constat s'est imposé à notre commission : résultat d'un long processus, ce texte fait l'objet d'un très large consensus autour de la sécurisation d'infrastructures hautement stratégiques, sur une île où le tourisme représente 40 % du PIB et où 80 % des denrées alimentaires consommées sont importées. Gilles Simeoni l'a dit : il est inenvisageable que les portes d'entrée de l'île soient gérées par des entités privées ayant pour seul objectif la rentabilité.
Je recommande donc l'adoption de ce texte, sous réserve de l'adoption des amendements de la commission visant à en améliorer la gouvernance : il s'agit de préciser que l'établissement pourra être présidé par le président du conseil exécutif ou un autre membre de ce conseil et d'associer à sa gouvernance les présidents de l'Agence pour le développement économique de la Corse, de l'Office des transports de la Corse et de l'Agence du tourisme de la Corse, dont les missions sont étroitement liées à son champ d'action. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDSE)
Mme Mélanie Vogel . - Il est peu douteux que ce projet de loi sera adopté dans un large consensus, voire à l'unanimité, et c'est heureux.
Soutenu à l'unanimité par l'Assemblée de Corse en mars dernier, il vise à supprimer la tutelle de l'État sur la CCI de Corse ; cette mission sera transférée à la collectivité de Corse. Il s'agit d'une étape que nous saluons.
L'arrivée à échéance des contrats de concession actuels rend urgent ce transfert nécessaire au maintien d'une gestion publique des infrastructures stratégiques pour l'île. Le nouvel établissement reprendra les missions et les personnels, avec leur statut, de la CCI.
Tout cela est positif, mais nous, écologistes, y voyons un simple jalon, modeste, sur le chemin de notre engagement auprès du peuple corse.
Nous ne devons pas perdre de vue les enjeux globaux : la création de la collectivité unique en 2018, la loi Pacte en 2019 et l'accord conclu en 2024 à l'issue du processus de Beauvau s'inscrivent dans un processus politique global qui doit aboutir pleinement, c'est-à-dire déboucher sur un véritable statut d'autonomie dans la République, conformément aux revendications démocratiques des Corses. Nous avons pour responsabilité d'offrir cette perspective à celles et ceux qui défendent les revendications autonomistes dans le rejet de la violence et le respect de la démocratie.
Ce qui est en jeu, c'est la possibilité de réussir un processus négocié et mature répondant pacifiquement aux aspirations légitimes à l'autonomie, y compris normative. Pour vivre en partie en Belgique, État fédéral, je peux vous dire que les revendications des Corses sont tout sauf déraisonnables et restent même en deçà des compétences de certaines régions d'Europe.
Sortons de la politique des petits pas : sur 72 demandes d'adaptation normative,13 seulement ont été satisfaites par le Gouvernement... Nous ne pouvons décevoir les efforts de consensus entrepris sur place ni échouer à faire évoluer la République pour que s'épanouissent les aspirations légitimes à plus d'autonomie. Avançons vers une réforme constitutionnelle qui réponde démocratiquement aux aspirations populaires des Corses !
Dans l'attente de cette réforme globale, le GEST votera bien évidemment ce texte.
M. Éric Kerrouche . - D'apparence technique, ce projet de loi constitue un moment important pour la Corse, cette île singulière qui résiste au temps et aux interprétations, pour reprendre la formule de Claude Arnaud.
Important, ce texte l'est aussi du point de vue de notre conception de la décentralisation. Il donne corps à une idée forte : les territoires doivent maîtriser les leviers essentiels de leur développement économique.
C'est le sens de cette réforme attendue, issue d'une étude terminée depuis 2022. Elle vise à doter la collectivité de Corse d'un outil adapté à ses spécificités, notamment celles liées à l'insularité. Partout en Europe, elles sont traitées de manière particulière, comme l'a dit Mme Vogel.
L'insularité entraîne notamment une forte dépendance aux secteurs maritime et aérien. La Corse accueille plus de 8 millions de passagers par an et importe 95 % des produits qu'elle consomme ; le tourisme représente près de 40 % de son PIB.
D'où la nécessité d'une gestion publique cohérente et stratégique, au service de l'intérêt général. À cet égard, la gestion des équipements aéroportuaire et portuaire est un enjeu crucial. Elle requiert une gouvernance renforcée et adaptée aux spécificités corses.
Dans cet esprit, le projet de loi crée un établissement public sui generis placé sous la tutelle de la collectivité. Cette formule de quasi-régie permet de préserver la gestion publique sans mise en concurrence. C'est une protection contre la privatisation et un choix politique fort.
Le tissu économique corse subit de plein fouet l'inflation et la pression foncière. Ce nouvel outil est donc opportun pour renforcer l'accompagnement de ceux qui font au quotidien l'économie insulaire.
Le schéma de gouvernance garantit un contrôle effectif de la collectivité sur les activités de l'établissement : c'est une condition essentielle pour bénéficier de l'exception de quasi-régie. Cette organisation équilibrée fait place aussi aux acteurs économiques, dans un cadre public.
Notre soutien à ce texte s'accompagne d'exigences. En particulier, les mesures transitoires doivent garantir la continuité des services et la préservation des intérêts des plus de 1 000 agents concernés, qui sont au coeur de la réussite de la transformation. Cette réforme ne peut se traduire pour eux par des pertes de droits, des incertitudes ou une dégradation des conditions de travail.
Sur le plan financier, nous constatons trop souvent des compensations incomplètes lors des transferts de compétences de l'État vers les collectivités - monsieur le ministre, vous en savez quelque chose. Les conditions fermes posées par l'Assemblée de Corse à cet égard sont légitimes.
Sur la méthode, nous regrettons que la consultation de l'Assemblée de Corse ait été faite dans des délais contraints du fait de l'échéance des concessions : ce calendrier précipité aurait pu être évité, le rapport d'Ernst & Young datant de 2021. Il faut en tirer les leçons dans la perspective des prochains projets de loi relatifs au statut de la Corse - qui devraient être d'une tout autre ampleur...
Ce texte constitue une réponse adaptée aux défis économiques spécifiques de la Corse, qu'il faut savoir traiter de manière particulière. Il renforce la capacité de la Corse de gérer ses infrastructures stratégiques et d'oeuvrer pour son développement économique.
Il est en phase avec notre conception de la décentralisation, consistant à faire confiance aux territoires et à reconnaître leurs spécificités. Il est en phase aussi avec notre conception de la gestion des infrastructures, qui ne peut être systématiquement soumise à la logique du marché : c'est dans le même esprit que nous avions soutenu le référendum d'initiative partagée contre la privatisation d'ADP.
Le groupe SER votera ce texte qui vise à protéger l'intérêt général et à dynamiser le développement économique en Corse.
Mme Vanina Paoli-Gagin . - La France est belle de ses différences, et la Corse est indéniablement différente, en raison de sa culture et de sa langue, mais aussi de son économie.
Son insularité l'explique en partie. L'économie corse souffre d'une trop forte dépendance au tourisme, d'un tissu industriel insuffisamment modernisé et d'infrastructures qui doivent être adaptées aux besoins.
Parce que la Corse est une île, le développement économique y sera toujours délicat, les importations comme les exportations se trouvant renchéries par des coûts de transport élevés. Le relief montagneux de la Corse complique en outre le transport intérieur des biens et des personnes. Mais la Corse a toujours su évoluer et dispose d'atouts liés notamment à sa culture, dont sa gastronomie, même si son commerce et son industrie ne sont pas au niveau qu'on pourrait attendre. Il faut dire que, sa superficie étant très inférieure à celle de la Sardaigne ou de la Sicile, son développement économique sera toujours d'une particulière difficulté.
Avec ce texte, nous confions aux élus corses l'avenir économique de leur territoire : c'est une révolution, car, sauf en Nouvelle-Calédonie, les chambres de commerce et d'industrie ne comprennent pas d'élus locaux. Le nouvel établissement public sera un levier stratégique et un outil opérationnel pour donner un nouveau visage à l'économie corse. La focalisation excessive sur le tourisme concentre l'emploi dans certaines zones et aggrave l'exode rural ainsi que le départ de la jeunesse corse, donc le déclin démographique de l'île.
Ce texte est l'aboutissement d'un travail de plusieurs années : il est grand temps de l'adopter ! Nous ajouterons ainsi une pierre à l'édifice de la souveraineté économique durable de la Corse. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE ; Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
M. Jean-Jacques Panunzi . - Je salue Gilles Simeoni, président du conseil exécutif, et Marie-Antoinette Maupertuis, présidente de l'Assemblée de Corse, ainsi que le président de la CCI et ses collaborateurs, présents en tribune. Bonghjornu !
Ce projet de loi est la conséquence de la loi Pacte, préfigurant le transfert de la tutelle des CCI de l'État vers les régions. Depuis 2022, les ports et aéroports sont la propriété de la collectivité de Corse, qui en a concédé la gestion à la CCI. L'établissement public est la meilleure façon de conserver une gestion publique de ces infrastructures et d'éviter que des groupes internationaux aux pratiques sociales différentes des normes européennes ne remportent ces marchés et ne développent une vision contraire à nos intérêts.
C'est l'argument essentiel qui emporte mon adhésion et me conduit à vous appeler, mes chers collègues, à voter ce texte.
L'allègement transitoire du conseil d'administration, avec seulement 20 représentants des professionnels au lieu de 40, a été entériné en commission. Le nouvel établissement reprendra l'ensemble des missions et personnels de la CCI, sous le contrôle direct de la collectivité, condition indispensable à la qualification de quasi-régie. Le conseil d'administration sera présidé par un membre désigné par le président du conseil exécutif de la collectivité de Corse.
Établissement public, donc. Mais établissement public industriel et commercial (Épic) ou établissement public administratif (EPA), monsieur le ministre ? La logique voudrait qu'il s'agisse d'un Épic, afin de maintenir le statut de droit privé des personnels. Il serait cocasse qu'on impose un statut d'EPA à une structure dont la vocation est à ce point commerciale - la gestion des ports et aéroports représente 90 % de l'activité de l'actuelle CCI. La position défendue par le Conseil d'État m'étonne, et il est souhaitable que le Gouvernement opte pour l'Épic. Le rapport de la commission est rassurant sur ce point. En outre, le texte élargit les compétences de l'établissement au soutien au développement économique et à la formation professionnelle. Il faudra veiller à sa bonne articulation avec les structures existantes, dont l'Agence de développement économique de la Corse.
La dimension financière doit faire l'objet d'une vigilance particulière, pour éviter toute dégradation de la situation de la collectivité de Corse. Si l'on intègre la particularité liée aux concessions qui oblige à tenir compte des amortissements, la CCI dispose de 91 millions d'euros de capitaux propres et de 55 millions d'euros de disponibilités. Mais nous avons besoin de garanties suffisantes en ce qui concerne la compensation des charges transférées. Or, sur ce point, je ne suis pas rassuré : la question semble renvoyée au PLF 2026, dont on sait qu'il se fera dans un contexte contraint et mouvementé. Il n'est pas même certain que la loi de finances soit promulguée avant le 31 décembre, date à laquelle doit s'opérer le changement de tutelle.
Toute chose positive a son revers. Oui, ce texte préserve des infrastructures essentielles à la Corse d'appétits extérieurs aux intentions méconnues ; mais il aggrave aussi la concentration des pouvoirs par une seule collectivité. Avec ce regret, mais beaucoup de pragmatisme, je le voterai.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Ce projet de loi marque une étape importante dans la reconnaissance des spécificités de la collectivité territoriale de Corse. Il lui donne les moyens de piloter des infrastructures stratégiques - ports et aéroports. L'insularité du territoire façonne son organisation économique, ses besoins en transports et ses possibilités d'accès aux biens essentiels : cette réalité constitue un défi en matière de continuité territoriale.
Ces spécificités appellent des solutions différenciées. C'est le sens de ce projet de loi, qui institue un nouvel établissement public, sous la tutelle de la collectivité, en lieu et place de la CCI. L'objectif est de sécuriser la gestion publique des ports et aéroports, portes d'entrée de l'île, pour garantir la continuité territoriale et soutenir l'attractivité du territoire.
Au 31 décembre prochain, les concessions actuelles arriveront à échéance. Il faut garantir un cadre juridique stable dès maintenant, sans quoi une mise en concurrence, contraire à l'intérêt du territoire, ne pourra être évitée.
Ce texte est le fruit d'un processus long et réfléchi amorcé en 2018, conforté par la loi Pacte de 2019 et nourri par les travaux du processus de Beauvau en 2022. Il a été validé par le Conseil d'État et est attendu par les acteurs économiques locaux.
Il garantit une gouvernance adaptée de l'établissement public, nécessaire pour bénéficier de l'exception de quasi-régie. Les agents de la CCI de Corse seront repris dans des conditions respectueuses de leur statut et de leurs droits.
Ce texte ouvre la voie à une plus grande autonomie dans la gestion du développement économique local. Il renforce la capacité d'agir d'un territoire qui a besoin de leviers spécifiques pour surmonter ses contraintes structurelles.
Je suis convaincue que les collectivités ultramarines, sans prendre la Corse pour unique exemple, observeront attentivement l'évolution de cette réforme. Elle traduit un attachement profond à l'unité de la République dans le respect de la diversité de ses territoires ; en reconnaissant pleinement les spécificités corses, elle ne fait pas exception à nos principes, mais leur donne un sens concret. Le RDPI votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Michel Masset . - Disons-le d'emblée : ce texte apporte une réponse attendue pour l'avenir de la Corse. Le RDSE soutient la création de ce nouvel établissement public.
Le dispositif proposé a deux vertus : il crée un schéma institutionnel plus cohérent et lisible de l'action économique régionale et conforte l'oeuvre de décentralisation débutée en 1982.
La collectivité territoriale de Corse n'est pas une collectivité métropolitaine comme les autres - son architecture institutionnelle unique nous le rappelle. La « plus proche des îles lointaines » subit les contraintes de son insularité. Cette réalité justifie des mesures particulières pour assurer la continuité territoriale de l'île, sans quoi les principes d'indivisibilité et d'égalité et la liberté d'aller et venir seraient mis en péril.
Il existe un lien historique entre la CCI de Corse et la gestion des infrastructures portuaires et aéroportuaires : déstabiliser ce modèle aurait des conséquences, notamment financières. D'autre part, ces points d'accès sont vitaux pour le développement de l'île.
Le RDSE est donc favorable à l'application de la quasi-régie, pragmatique et protectrice de l'intérêt général.
Reste que ce texte n'aborde pas la mutualisation des compétences et des moyens entre les chambres consulaires, pourtant essentielle au soutien efficace à l'activité économique - le sort de la chambre de métiers et de l'artisanat est renvoyé à plus tard. Sur la forme, le Parlement a été laissé de côté.
Dans son discours de politique générale, le Premier ministre s'est engagé à faire de 2025 une année d'évolution constitutionnelle sur le statut de l'île. Ce calendrier ambitieux pourra-t-il être tenu, alors que le Sénat et l'Assemblée nationale semblent divisés sur l'accord conclu entre les élus insulaires et le Gouvernement ?
Parce qu'il faut tenir compte de la spécificité de la Corse au sein de notre République, notre groupe votera ce texte à l'unanimité. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Paul Toussaint Parigi . - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP) La Corse porte en elle une histoire institutionnelle faite de luttes pour la reconnaissance, d'aspirations à l'émancipation et de victoires démocratiques.
Nos infrastructures portuaires et aéroportuaires, stratégiques, sont au coeur de cette histoire. Elles sont un enjeu vital pour notre souveraineté économique et les piliers de la continuité territoriale. La CCI s'acquitte de leur gestion avec dynamisme et sérieux.
La réforme du paysage consulaire issue de la loi Pacte appelait pour la Corse un dispositif dérogatoire. La collectivité de Corse, forte de la confiance accordée par ses citoyens, a souhaité un outil à la hauteur de ses ambitions et en adéquation avec la volonté de son peuple, en mesure de conjuguer respect de son identité et exigences nées des mutations économiques et écologiques.
Le projet de loi concrétise la mise en place de cet outil. Il est le fruit d'un dialogue tripartite entre l'État, la collectivité de Corse et les acteurs consulaires, mais aussi avec l'ensemble des forces vives insulaires. L'Assemblée de Corse s'est prononcée à l'unanimité en faveur d'une évolution qui s'inscrit dans la dynamique d'autonomie et de responsabilisation voulue par le peuple corse.
Ce texte témoigne ainsi de la maturité politique et de l'unité des acteurs corses face aux défis économiques de notre territoire.
Il répond à une urgence : la fin des contrats de concession, déjà prorogés à deux reprises et qui arriveront à échéance définitive le 31 décembre prochain.
Ce texte préserve les intérêts économiques de notre territoire de la prédation des entités privées par la création d'un établissement public sui generis, sous la tutelle directe de la collectivité de Corse. Cette architecture juridique permettra à la collectivité de confier au nouvel établissement la gestion de ses infrastructures stratégiques sans mise en concurrence préalable, conformément à l'exception dite de quasi-régie.
Ce choix de souveraineté locale, respectueux du droit européen, consacre la volonté de rapprocher la décision publique des réalités du terrain. Le nouvel établissement reprendra l'ensemble des missions, droits, obligations et personnels de la CCI de Corse. Il pourra aussi participer à la création et au capital de sociétés civiles ou commerciales, ce qui lui permettra de renforcer l'attractivité et la compétitivité du tissu économique insulaire.
Son conseil d'administration sera composé majoritairement de représentants de la collectivité de Corse, tout en associant les milieux consulaires et économiques. Les règles relatives aux personnels et à leur représentation garantissent la préservation des droits acquis.
Je remercie la rapporteure Olivia Richard pour son écoute et sa volonté constante de comprendre les réalités corses. Son travail a donné plus de pertinence encore à la future gouvernance et facilitera le dialogue social. Les mesures adoptées ont renforcé le dispositif initial afin d'assurer une représentation équilibrée de toutes les parties prenantes, y compris durant la période transitoire.
L'attention portée aux personnels et à leurs représentants syndicaux, que je salue, est en outre à souligner. Ils bénéficieront d'une voix consultative au conseil d'administration.
Le comité social et économique remplacera le comité social territorial avec un mode d'élection unifié et des prérogatives étendues à l'ensemble du personnel, quel que soit son statut.
La commission a réaffirmé la priorité donnée aux missions de sécurité et de sûreté des infrastructures aéroportuaires.
Aucun doute ne subsiste sur la nature et l'équilibre des pouvoirs qui structureront le nouvel établissement. Ce point a d'ailleurs été examiné par le Conseil d'État avec la plus grande rigueur.
La collectivité pourra exercer sur l'établissement public un pouvoir analogue à celui d'un adjudicateur, afin de bénéficier de l'exception de quasi-régie.
Les principes de transparence et de pluralisme seront respectés, pour écarter tout risque de monopole décisionnel et favoriser une synergie constructive au service de l'économie corse.
La situation financière du futur établissement sera saine et stable.
En mon nom, au nom de la collectivité de Corse et de la CCI, représentées dans nos tribunes, je remercie le ministre Rebsamen pour son engagement, sa capacité d'écoute et sa détermination. Monsieur le ministre, je salue votre action qui témoigne d'une conception exigeante et généreuse de la mission ministérielle par rapport aux attentes corses.
Je vous invite à voter ce texte avec la même unanimité que celle qui a prévalu à l'Assemblée de Corse. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. François Patriat applaudit également.)
Mme Marie-Claude Varaillas . - Présenté comme une rationalisation, le texte dissimule en réalité une recentralisation préoccupante. Certes, comme le souligne le rapport de la commission des lois, le schéma retenu a été conçu pour que l'exception de quasi-régie puisse jouer, et éviter ainsi la privatisation.
Toutefois, plusieurs points appellent notre attention.
Nous pouvons craindre une gouvernance confiscatoire. La mainmise de l'exécutif de la collectivité étouffe la représentation équilibrée des entreprises. Le lien de confiance entre les entreprises insulaires et leurs instances consulaires pourrait s'en trouver amoindri si les préoccupations locales ne sont pas assez prises en compte. Sans mécanisme indépendant de contrôle, la concentration des pouvoirs économiques et l'absence de transparence risquent d'être vecteurs de fragilité.
Ce projet institutionnalise un modèle vulnérable. La fusion des chambres consulaires entraînera en outre des réorganisations internes, impliquant des mobilités potentiellement sources de contentieux sociaux. Nous devons garantir la continuité des droits des personnels, statutaires ou contractuels.
Le choix d'un Épic au détriment d'un EPA nous interpelle quant aux fondements institutionnels de la représentation consulaire.
Un Épic risque de diluer la mission de représentation des intérêts économiques collectifs et d'ouvrir la voie à une externalisation accrue, voire à une privatisation. L'avis du Conseil d'État recommandant le retour à un EPA devrait être pris en compte.
Malgré la nécessité de moderniser les structures consulaires en Corse, ce projet de loi présente des risques significatifs pour la gouvernance, le personnel et l'intégrité du service public économique. C'est pourquoi nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
Discussion des articles
Article 1er
Mme la présidente. - Amendement n°2 de Mme Richard, au nom de la commission des lois.
Mme Olivia Richard, rapporteure. - Cet amendement précise que la présidence du nouvel établissement sera confiée au président du conseil exécutif de Corse ou à un conseiller exécutif qu'il aura désigné.
M. François Rebsamen, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°2 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°3 de Mme Richard, au nom de la commission des lois.
Mme Olivia Richard, rapporteure. - Il s'agit d'autoriser la présence de membres du conseil exécutif de Corse au sein du conseil d'administration de l'établissement public.
M. François Rebsamen, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°3 est adopté.
L'article 1er, modifié, est adopté.
L'article 2 est adopté.
L'article 3 est adopté.
Article 4
Mme la présidente. - Amendement n°1 du Gouvernement.
M. François Rebsamen, ministre. - L'amendement fixe une date butoir, au 31 décembre 2029, pour prolonger l'effet des conventions, accords et engagements unilatéraux et favoriser la mise en place d'un dialogue social fructueux. Le nouvel établissement public disposera d'un délai de quatre ans pour renégocier, le cas échéant, certaines de ses conventions.
Mme Olivia Richard, rapporteure. - Avis favorable, ce nouveau délai permettant un dialogue social constructif et répondant aux inquiétudes formulées par les représentants du personnel.
L'amendement n°1 est adopté.
L'article 4, modifié, est adopté.
Le projet de loi, modifié, est adopté.
Mme la présidente. - Belle unanimité ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, du RDSE et du RDPI)
M. François Rebsamen, ministre. - Je salue le président de la collectivité de Corse, les représentants de l'exécutif, la présidente de l'Assemblée de Corse, les élus de la CCI et les représentants du personnel.
La décision que vous venez de prendre est une bonne nouvelle. Vous créez un établissement public sui generis : ce n'est donc ni un EPA ni un Épic. Il sera ce que décidera la collectivité. C'est une façon de préserver le statut du personnel, comme le prévoyait le Conseil d'État.
À ceux d'entre vous qui se sont inquiétés pour les finances, j'indique que, si l'on ne peut jamais savoir de quoi l'avenir sera fait, cette année a été exceptionnelle avec 237 millions d'euros affectés à la continuité territoriale, contre 187 millions d'euros précédemment. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, du RDSE et du RDPI)
La séance est suspendue quelques instants.
Impact environnemental de l'industrie textile (Procédure accélérée)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile.
Discussion générale
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche . - Vous avez été nombreux à vous mobiliser pour l'inscription rapide de ce texte important à l'ordre du jour du Parlement, au Sénat comme à l'Assemblée nationale. Je salue la mobilisation des députés Anne-Cécile Violland et Antoine Vermorel-Marques.
Le Gouvernement a choisi d'inscrire ce texte sur son temps législatif : c'est un signal fort pour viser la mode éphémère et ultra-éphémère.
La mode ultra-éphémère constitue la menace la plus immédiate et la plus massive. Nous souhaitons nous attaquer à ce triple fléau : incitation à la surconsommation, désastre écologique et menace pour nos entreprises.
D'abord, l'incitation à la surconsommation. La mode ultra-éphémère combine des vêtements très abordables et un renouvellement incessant des modèles, suscitant du Fomo (Fear of Missing Out) buying, soit la peur de manquer une bonne affaire, particulièrement chez les adolescents, via des pratiques commerciales d'ampleur menées par deux géants. En 2023, Shein et Temu ont investi respectivement 44 et 28 millions d'euros. Près de 22 % des colis de La Poste viennent aujourd'hui de ces deux plateformes, contre moins de 5 % il y a cinq ans, avec des conséquences sur le pouvoir d'achat. Une personne achète 40 % de vêtements en plus qu'il y a quinze ans et les conserve deux fois moins longtemps. En réalité, la mode éphémère ne défend pas le pouvoir d'achat : elle vend l'illusion du pouvoir s'acheter ce dont on n'a pas besoin et qui ne dure pas.
Ensuite, le désastre écologique : Shein a émis 17 millions de tonnes de CO2 en 2023, soit une hausse de 80 % en un an. Il est le premier émetteur mondial de la mode, secteur déjà le plus polluant de tous les secteurs industriels.
Rejet de microfibres plastiques dans les eaux, accélération massive et incontrôlée des déchets textiles non recyclables qui saturent nos filières de tri : les effets négatifs pour l'environnement sont considérables. Produire en 72 heures ce que la planète met un siècle à dégrader, ce n'est pas de l'innovation, c'est de la prédation.
Avec des ventes de 5 milliards d'euros en France en 2024, ces plateformes représentent une concurrence déloyale pour nos entreprises et menacent 20 000 emplois, 50 000 à terme. Ce n'est pas aux ateliers français de payer le prix du dumping mondial !
Pour y faire face, nous ne partons pas de zéro : la Commission européenne a présenté une stratégie pour les textiles durables et circulaires. Grâce à l'influence française dans la directive-cadre relative aux déchets, outre l'impact environnemental des produits, l'impact des pratiques industrielles et commerciales doit désormais être affiché. Le règlement sur l'écoconception des produits durables (ESPR) interdira l'accès au marché européen des produits moins-disant sur le plan environnemental. Cette mesure miroir clé s'appliquera à partir de 2027 au textile.
En France, le Gouvernement a décidé d'un plan de régulation du e-commerce, de l'affichage du coût environnemental des vêtements sur la base du volontariat et d'une réforme de la filière à responsabilité élargie du producteur (REP) Textile pour structurer une filière de collecte, de tri, de réemploi et de recyclage.
Ce texte est cohérent avec ces actions. Il s'attaque frontalement au fléau qu'est la mode ultra-éphémère. Seule une réponse européenne permettra une régulation globale et efficace, ce texte se veut donc aussi un appel à nos voisins.
Pour que ce débat soit utile, évitons deux fausses pistes. Ne lançons pas des sanctions publicitaires qui ne seraient pas opérantes pour des acteurs étrangers. Le cadre européen ne permet pas à la France d'encadrer l'activité commerciale d'entreprises installées dans un autre État membre, comme Shein ou Temu à Dublin. Tel qu'est écrit le texte, il interdira la publicité à des acteurs qui ne sont pas parfaits, mais qui sont mieux disant par rapport aux pollueurs les plus importants.
La notification de la proposition de loi à la Commission européenne, prévue avant la CMP, apportera des compléments à cet égard. Elle fournira des marges de manoeuvre nécessaires pour finaliser les articles 1er et 3 bis sur les sanctions publicitaires.
L'article 2 laisse suffisamment de souplesse sur les écomodulations REP entre les acteurs de la mode éphémère et ceux de la mode ultra-éphémère. Le Gouvernement présentera, par voie d'amendement, une trajectoire minimale de l'impact de ces écomodulations.
Deuxième fausse piste : vouloir cibler également la mode éphémère, et non seulement la mode ultra-éphémère, tant que le sujet européen n'est pas réglé. Nous ne parlons pas d'enseignes classiques qui créent de l'emploi en France. Les acteurs de la mode ultra-éphémère fonctionnent sur une tout autre échelle.
La mode éphémère demeure un enjeu majeur sur lequel nous progresserons collectivement grâce aux écomodulations. Le secteur textile sera concerné pleinement par la réforme de la REP.
Ce texte est opportun pour commencer à soutenir cette réforme. Chaque seconde, près de 100 pièces neuves sont injectées sur le marché français, soit une hausse de 30 % en quatre ans. Ce modèle repose sur l'hyperproduction, l'hypersollicitation et l'hyperconsommation. La mode ultra-éphémère ne s'appuie pas sur la demande, elle l'invente, et la crée. Elle pousse à acheter ce dont on n'a pas besoin et à jeter ce qu'on a à peine porté. L'intensité carbone de ces acteurs est sans équivalent. Ils submergent nos marchés, saturent nos centres de tri et leurs produits, de qualité médiocre, sont rarement recyclables. Résultat, les filières s'effondrent et le cycle de l'économie circulaire est brisé.
Ne restons pas spectateurs de ce phénomène massif, mais agissons. C'est un combat pour l'environnement, mais aussi pour notre souveraineté économique. Avec ce texte, nous faisons un premier pas. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire . - Cette proposition de loi est une pierre à l'édifice plus large que nous bâtissons avec Agnès Pannier-Runacher, l'ensemble du Gouvernement et le Parlement pour protéger notre planète, nos commerçants et nos enfants contre certaines pratiques de plateformes étrangères de e-commerce. Nous voulons lutter contre l'ultra fast fashion ou mode ultra-express.
Fournir un très grand nombre de références n'est pas en soi condamnable, mais cela ne peut être fait en toute impunité quand ces pratiques commerciales affectent notre environnement et notre tissu économique et social. La production et la consommation de textile doivent être compatibles avec le respect de l'environnement.
Ce texte vise à limiter la technique consistant à inonder le marché de produits neufs à très bas coût qui finissent leur vie dans des décharges, sur les plages ou incinérés, par une pénalité financière. Il renforce notamment l'information du consommateur. Dans sa version initiale, il limitait aussi les possibilités de publicité. Nous soutiendrons un retour à cette interdiction large.
L'impact environnemental de la mode ultra-express est 100 fois supérieur pour le fret aérien que pour le fret maritime : lorsque vous multipliez les petits colis et que vous incitez à surconsommer, vous augmentez le trafic aérien. Le nombre de colis importés a doublé entre 2020 et 2022 et de nouveau entre 2022 et 2024. Près de 4,5 milliards de colis sont entrés dans l'Union européenne en 2024, et 6 milliards sont à attendre en 2025 et 2026. Lorsqu'ils s'usent vite et sont peu chers, ces produits ne sont pas réparés. La mode ultra-express incite à acheter un grand nombre de produits textiles, parfois à l'aveugle. S'ils ne plaisent pas, ils sont jetés.
La principale plateforme met en ligne 7 000 nouveaux produits chaque jour : elle a 900 fois plus de références qu'une enseigne française traditionnelle.
Cette technique crée de faux besoins, suscite le désir de consommer, et aboutit à produire des quantités astronomiques, ce qui met en danger notre planète.
À cet objectif vertueux de protection de l'environnement se sont ajoutés d'autres objectifs d'intérêt général. Lutter contre la mode ultra-express, c'est aussi lutter contre des pratiques commerciales déloyales et agressives, parfois trompeuses, qui viennent ruiner nos commerçants, fragiliser les consommateurs et trouer notre tissu social.
Oui à la concurrence, mais loyale, en partant de la même ligne de départ. Or nous assistons à une croissance exponentielle de quelques plateformes étrangères loin de respecter nos règles : mise en ligne de milliers de nouvelles références, usage louche des données personnelles, tromperies... Ces plateformes mettent en danger les consommateurs et les commerçants.
Les chiffres doivent aboutir à une prise de conscience : un quart des colis de La Poste sont ceux de deux plateformes étrangères, contre 5 % il y a cinq ans. L'an dernier, 800 millions de colis de moins de 150 kg sont entrés en France, dont 90 % en provenance d'un seul pays.
Une de ces plateformes a le même chiffre d'affaires qu'un grand acteur français du textile, mais sans les 350 magasins qui vont avec. À l'échelle européenne, à elles deux, les deux principales plateformes détiennent une part de marché supérieure à celle des plus grands acteurs physiques.
Nous devons agir vite. Le Gouvernement est pleinement mobilisé, et tire la sonnette d'alarme ; c'est une mobilisation générale. Une prise de conscience est en train de s'opérer.
Cette proposition de loi est une brique d'un édifice plus large. Pour protéger nos commerçants, nous devons agir à tous niveaux, en même temps.
Ce texte aborde la publicité et le faible prix. Les autres pays, inquiets, nous regardent.
Le 29 avril dernier, le Gouvernement a annoncé plusieurs actions.
D'abord, nous avons triplé les contrôles de la DGCCRF - un seul peut entraîner la disparition de milliers de références.
Nous devons avoir un meilleur ciblage et recentrer les contrôles sur les acteurs qui présentent les risques les plus élevés : si un commerçant commet un manquement, nous vérifierons systématiquement s'il n'en est pas de même sur ces plateformes.
Nous voulons automatiser les échanges entre les douanes et la répression des fraudes, mais aussi être proactifs au niveau européen pour des enquêtes transnationales. La vaste enquête annoncée il y a quelques jours par la Commission doit beaucoup à la DGCCRF - dont je salue les agents. Cette enquête a réuni quatre pays pour agir contre une plateforme étrangère.
Nous oeuvrons pour mettre fin à l'exonération des droits de douane pour les colis de moins de 150 euros et pour instaurer des frais de gestion pour les colis traversant notre frontière. La Commission européenne a fait des annonces en ce sens il y a quelques jours.
La liste des grandes enseignes ayant fermé récemment n'est pas uniquement liée à la mode ultra-express, mais le développement fulgurant de celle-ci aura été le coup de grâce. Les enseignes physiques qui créent de l'emploi, payent des impôts, respectent des règles dont d'autres se jouent ne doivent pas être en difficulté.
Je remercie la députée Anne-Cécile Violland et Antoine Vermorel-Marques, ainsi que la rapporteure du Sénat, Sylvie Valente Le Hir.
Ce texte est une étape importante pour agir au service de notre pays et de notre planète. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions ; Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains et du groupe UC) Dans La Condition de l'homme moderne, Hannah Arendt soulignait avec une lucidité implacable les dérives d'un monde livré aux automatismes technologiques. Nous remplaçons l'oeuvre durable par la consommation instantanée. La vitesse a remplacé le sens et l'abondance, la valeur. Ce n'est pas une question de tendance passagère. Cette consommation interroge notre rapport au temps, au travail et à la nature.
Cette proposition de loi oppose à la logique du jetable une éthique de la durabilité, à l'accumulation frénétique un principe de responsabilité.
Dans le secteur du textile, l'ambivalence de l'innovation prend un sens aigu : le numérique peut prolonger la vie des objets, mais aussi devenir l'instrument qui transforme le vêtement en produit jetable et l'individu en simple clic d'achat.
Le secteur textile est à un moment charnière, traversé par deux dynamiques contraires. Première tendance, la transition vers un modèle circulaire, celle d'acteurs souvent modestes qui réinventent une manière de transmettre. J'ai ainsi visité une entreprise exemplaire qui propose une application mettant en relation des consommateurs avec des couturiers et des cordonniers. Le numérique devient un vecteur de circularité et de lien social.
Deuxième tendance, l'industrialisation massive et dérégulée, c'est-à-dire la mode express ou fast fashion, qui pousse au maximum la consommation compulsive. Des plateformes mettent en vente des milliers de produits dans une spirale de production aux coûts sociaux et environnementaux délétères.
Entre ces deux modèles, notre responsabilité politique est de choisir. Le choix est clair : encourager la mode durable.
Les dégâts de la mode express sont bien documentés. Chaque année, 3,3 milliards de vêtements sont mis sur le marché en France, soit 48 vêtements par habitant. Derrière ces volumes, ce sont des milliers de litres d'eau consommés, des tonnes de CO2 émises et des terres polluées par les produits chimiques.
L'éphémère est devenu la norme ; chaque seconde, ce sont 35 vêtements jetés, soit 600 000 tonnes de textile par an. Ces déchets sont souvent incinérés ou envoyés à l'autre bout du monde où ils saturent les décharges, dégradent les sols, les nappes phréatiques et l'air.
Cela s'accompagne de graves distorsions économiques. Cette mode pratique des prix qui rendent la concurrence impossible. À l'inverse, les enseignes européennes, sans être parfaites, s'efforcent de s'adapter. Elles créent de l'emploi non délocalisable, soutiennent des filières d'insertion. Le tissu économique qu'elles préservent est un bien commun.
La réparation, le réemploi, la seconde main sont compromis par l'invasion de textiles conçus pour être jetés. Quand un vêtement neuf coûte moins cher qu'un vêtement de seconde main, le signal est destructeur.
Cette filière est aussi économiquement vertueuse et joue un rôle de levier d'insertion au niveau territorial.
L'impact culturel de la mode express est lui aussi déplorable : rapport à l'objet marqué par l'instantanéité, accumulation, oubli pour des achats sans désir, à remplacer sans fin. Cette logique délétère s'insinue notamment dans les imaginaires des jeunes, au travers de campagnes publicitaires agressives et le recours massif aux influenceurs.
Nous devons encadrer cette dérive avec lucidité mais sans démagogie. Nous proposons des outils ciblés, proportionnés et juridiquement robustes.
Certains ont présenté ce texte comme allant à l'encontre des plus défavorisés. Défendre la mode express au nom du pouvoir d'achat revient à promouvoir la malbouffe au nom de l'alimentation... Ce n'est pas servir les plus modestes que de leur proposer des produits dangereux pour la santé, inutilisables après trois lavages et fabriqués dans des conditions indignes ; c'est faire preuve de mépris. Le progrès, c'est permettre à chacun d'acheter mieux, pas plus.
Il n'y a eu aucune pression. J'ai entendu tous les acteurs concernés, des associations aux grandes enseignes, en passant par les plateformes elles-mêmes.
Mes amendements ont deux objectifs : sécuriser le texte et éviter que des acteurs français ou européens soient concernés par le dispositif.
L'article 1er prévoit une définition claire de la mode express fondée sur un seuil annuel de nouvelles références pour identifier les entreprises concernées. Il impose l'affichage d'un message de sensibilisation environnementale sur ces plateformes, une comptabilisation des références adaptées en différenciant les plateformes multimarques qui ne jouent qu'un rôle d'intermédiaire des producteurs adoptant le statut de place de marchés par opportunisme juridique.
L'article 2 prévoit une modulation de l'écocontribution pour financer la gestion des déchets.
Le texte initial prévoyait une modulation en fonction de l'affichage environnemental, mais selon un indicateur loin de faire consensus. Nous avons donc préféré des critères extrinsèques, fondés sur les pratiques commerciales plutôt que sur la qualité intrinsèque du produit.
L'article 3 bis que nous avons ajouté encadre la publicité avec une solution plus robuste que celle adoptée par l'Assemblée nationale : interdire la promotion par les influenceurs et insérer une information environnementale synthétique dans chaque publicité.
Ce texte devra s'insérer dans un mouvement européen. Je salue la proposition gouvernementale d'imposer dès 2026 des frais de gestion sur les petits colis expédiés vers l'Europe. J'ai conscience que les plateformes chercheront à contourner les règles et à tout faire pour retarder leur application.
Ce texte a une vertu essentielle : tracer une ligne claire entre la durabilité, la sobriété et l'emploi local que nous défendons, et ce que nous rejetons : la frénésie, l'opacité, le jetable.
Il appartient à chacun de dire quelle société nous voulons bâtir. Ce que nous portons sur notre dos ne doit pas peser sur les générations futures. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
Mme Nicole Bonnefoy . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDSE) Ce texte répond à la nécessité de ramener à la raison un secteur qui cède chaque jour un peu plus à la démesure.
Nous partageons le constat : la mutation du secteur de la mode vers une industrie prédatrice et insatiable, la mode éphémère, qui donne le tournis avec des chiffres incroyables : en France, pas moins de 3 milliards de vêtements neufs sont vendus chaque année, soit 45 nouveaux vêtements par habitant, plus de 100 milliards de vêtements à l'échelle mondiale. Autant de produits devenant presque aussitôt des déchets textiles.
Le rythme est tout aussi affolant, avec des risques pour notre service public de gestion des déchets. À l'opposé du tissu soigné, reprisé ou retouché, est introduite la coutume du vêtement jetable avec 600 000 tonnes de vêtements jetés chaque année, soit 35 vêtements par seconde.
Shein introduit des milliers de références par jour pour inciter à consommer toujours plus avec une publicité ravageuse. La mode éphémère est un leurre. Certes ces plateformes ont pour elles des prix bas, mais elles ne sont en rien des alliées des plus modestes : elles incitent à consommer toujours plus de vêtements moins chers et de mauvaise qualité, par une stratégie hypocrite et pernicieuse.
Elles ouvrent la voie à la surconsommation frénétique et à une surproduction qui s'auto-alimente. Compenser la faible durée de vie par le prix, c'est nourrir une surproduction de déchets. C'est tromper le consommateur qui, pensant s'habiller à peu de frais, prend place dans un manège infernal. Ces prix cassés ont un coût environnemental, économique et social.
En saturant le secteur, les plateformes deviennent les fossoyeurs du textile français. Pas moins de 300 000 emplois, soit les trois quarts du secteur, ont été supprimés depuis 1990. Nos acteurs, qui participent à la vie commerciale de nos communes, sont victimes de ces ogres de la mode.
Le coût environnemental est dramatique : 10 % des émissions de gaz à effet de serre, soit l'équivalent des transports aérien et maritime cumulés, à cause de fibres synthétiques issues des hydrocarbures - le tiers des microplastiques dans les océans. De plus, la fabrication en Asie nécessite des transports lointains : Shein expédie 5 000 tonnes par jour par avion !
Dernier coût caché, le coût social, avec des salaires de misère, des conditions de travail déplorables et parfois à risque : producteurs et consommateurs sont exposés à des substances nocives. Les emplois européens sont menacés par cette concurrence déloyale.
Avec la mode éphémère, tout le monde est perdant : le consommateur victime de la cupidité de plateformes, l'environnement, les acteurs français du textile, les populations ouvrières d'Asie exploitées. Face à de telles pratiques, nous devons apporter une réponse nécessaire, ambitieuse et courageuse.
Le texte initial d'Anne-Cécile Violland allait dans le bon sens : définir la mode éphémère, instaurer une écocontribution, interdire la publicité. Au nom de motifs d'inconstitutionnalité délibérément exagérés, la commission a supprimé l'article 3 ; nous le regrettons, aussi proposons-nous de le rétablir. La publicité sauvage constitue l'un des moteurs de ces plateformes. L'interdiction de la publicité est la clé de ce texte.
Une version moins punitive a été privilégiée à l'article 3 bis, avec une interdiction restreinte aux influenceurs, alors que la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a été saisie pour le lobbying de Shein. Ayons le courage politique de réintroduire l'article 3 !
Nous demandons l'interdiction des mentions abusives, comme la « livraison gratuite » qui invisibilise les coûts. Ces amendements sont issus de travaux transpartisans au sein de notre commission. Nous réclamons la suppression de l'abattement sur les dons des invendus aux associations qui nous ont alertés sur le fait qu'elles étaient submergées par les surplus de la mode jetable. C'est un contournement pernicieux des producteurs, qui rémunèrent leurs dons aux frais de l'État.
Nous devons inclure le nombre d'invendus dans la définition de la mode éphémère.
Enfin, les écocontributions doivent être calculées de manière efficace. Nous proposons de réinsérer la méthodologie de l'affichage environnemental, seule éprouvée et pertinente.
Bien que sujette à amélioration, cette proposition de loi va indubitablement dans le bon sens. Le groupe SER est engagé dans la régulation d'un système d'exploitation qui fait fi des externalités négatives de ses activités.
Il ne s'agit pas de démoder cette mode éphémère, mais de calmer un système de production qui s'emballe. Régulons un capitalisme incompatible avec les nécessités écologistes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; MM. Jacques Fernique et Stéphane Demilly applaudissent également.)
Mme Vanina Paoli-Gagin . - Ce texte pose une question fondamentale : voulons-nous encore être une nation de producteurs ou seulement de consommateurs ? C'est cette question qui décidera de la destinée de l'Europe. Je me réjouis que Mario Draghi et Enrico Letta l'aient posée. Nos choix collectifs nous ont poussés à renoncer à être des pays de producteurs pour devenir des pays de consommateurs. Comme tout choix politique, il est respectable, mais il faut en connaître les implications.
Élue de l'Aube, je les connais : notre territoire a été frappé par le mythe funeste du capitalisme sans usines, qui s'est traduit par des destructions d'emplois. On estime à 18 000 le nombre d'emplois détruits dans l'Aube dans l'industrie textile, soit une baisse de 68 % depuis 1982. Mon département a été précipité dans un cycle infernal menant au chômage de masse, catastrophe sociale qui fait le lit de tous les populismes.
Pourtant, les Français ont doublé leur consommation de vêtements depuis les années 1980. Nous consommons deux fois plus, mais notre balance commerciale se dégrade. Acheter un tee-shirt à 2 euros, c'est soutenir des fermetures d'ateliers et la destruction d'emplois en France, c'est soutenir l'industrie de pays qui subventionnent massivement un pseudo-secteur privé et ne partagent pas nos valeurs, employant des salariés à des conditions proches de l'esclavage.
Aujourd'hui, notre regard a changé avec l'arrivée des millions de colis chinois. C'est une catastrophe et une submersion économique et écologique. Ce ne sont pas des vêtements que nous importons, ce sont des déchets et, pour une part, des déchets ultimes. La fast fashion n'est ni réparable ni recyclable.
Qui paie ? Les collectivités : à chaque colis, ce sont des déchets qui arrivent, des magasins qui ferment.
En quarante ans, la malbouffe a envahi notre quotidien : fast food, sodas, plats préparés... Le pays de la gastronomie s'est laissé empoisonner par une nourriture qui pourrit notre santé et multiplie les déchets.
Cette proposition de loi ne fera pas de nous demain un pays de producteurs, a fortiori si nous en adoptons une version plus amputée de son ambition. Elle ne serait qu'une petite tape sur la joue pour nous remettre dans le match - mais avons-nous encore envie de le jouer ? Voulons-nous concurrencer la République populaire de Chine ou abandonnons-nous le match ? Pour ma part, je soutiendrai toujours l'industrie, comme l'a fait le général de Gaulle dans les années 1960 : soit nous sommes un grand État industriel, soit nous devons nous résigner au déclin.
Le coût complet de la mode éphémère ne se reflète pas dans le prix des produits. Nous ne pouvons nous abriter derrière le seul pouvoir d'achat.
Le Coq sportif, Lacoste, Petit Bateau : l'Aube regorge de champions internationaux et de marques emblématiques. Certaines vont bien, d'autres sont en difficulté. Toutes sont source d'emplois et font vivre un réseau de sous-traitants et de petites mains qui font partie de notre patrimoine industriel. Soutenons-les chaque fois que nous le pouvons.
J'ai cité au début de mon propos Mario Draghi et Enrico Letta : ils ont rappelé que l'existence même de l'Union européenne serait remise en cause si elle renonce à sa promesse de garantir la paix par la prospérité.
Nous proposerons des amendements à cette proposition de loi pour lui redonner son ambition initiale et offrir à nos enfants un autre horizon que des scrolls et des clics. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC ; Mme Sabine Drexler applaudit également.)
M. Loïc Hervé. - Bravo !
M. Didier Mandelli . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est des propositions de loi qui passent inaperçues, tandis que d'autres suscitent l'intérêt des citoyens et des médias. Ce texte entre dans la seconde catégorie. Il a trait à un phénomène qui, à bas bruit, bouleverse notre économie, dans le textile donc, mais aussi dans les secteurs de l'ameublement ou du médicament.
Notre ambition d'une société placée sous le signe du développement durable doit-elle être revue à la baisse ou au contraire réaffirmée ? Notre pays et l'Union européenne doivent être au diapason pour l'imposer.
Comment accepter que 4,5 milliards de colis arrivent chaque année en Europe ? Comment accepter qu'en France quelque 800 millions de colis provenant des deux sites les plus cités soient acheminés par 600 navires cargos quotidiens ? Comment accepter que nous ayons perdu 50 000 emplois en France depuis début 2024 dans la filière du textile et de l'habillement ? Comment accepter toutes les liquidations - Caporal, Sergent Major, Jennyfer, Burton, Naf Naf ?
Une économie de marché doit être régulée, nous ne pouvons accepter un libéralisme échevelé oubliant les exigences sanitaires. La question est : comment passer d'une société entièrement consumériste à une société de consommateurs responsables, conscients des incidences de chaque acte d'achat sur leur famille, leurs voisins, leur pays ?
Par la pédagogie ou l'éducation ? Bien sûr, mais sans faire culpabiliser. « Nos emplettes sont nos emplois », clamait une campagne des chambres de commerce ; elle est plus que jamais d'actualité.
Responsabiliser les acteurs est essentiel, les sanctionner l'est tout autant. Les agents de la DGCCRF sont mobilisés, il faut leur donner les moyens d'agir. Oui aux droits de douane.
Je salue l'engagement de la rapporteure. Ni les interventions du rapporteur de l'Assemblée nationale ni la nomination d'un ancien ministre de l'intérieur, président du port de Marseille, comme ambassadeur d'un leader chinois ne nous ont fait dévier de notre objectif. Il faut mettre fin à un modèle destructeur sur le plan social, environnemental et économique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Marie-Laure Phinera-Horth . - La mode éphémère s'est imposée comme une tendance dominante. Les collections à bas prix rencontrent un grand succès, notamment auprès des plus jeunes. Mais elles ont un coût social environnemental et économique que l'on ne peut plus ignorer.
En dix ans, le nombre de vêtements mis sur le marché a augmenté de 40 %, engendrant des émissions de gaz à effet de serre très importantes. L'industrie textile est la deuxième industrie la plus polluante, représentant 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Près de 3,3 milliards de vêtements sont mis sur le marché français chaque année, portés quelquefois, voire jamais.
Mais la fast fashion met aussi à mal tout un tissu économique local. Elle accentue une concurrence déloyale, au détriment de notre indépendance industrielle.
Des lois ont oeuvré, comme la loi Climat et résilience, mais sans inverser la tendance. Ce projet de loi est essentiel, car, en proposant en définition claire, il encadre la mode éphémère et pénalise les entreprises qui ne respectent pas les règles. L'interdiction de la promotion de la fast fashion par les influenceurs est une bonne chose, mais nous devons veiller à ce que ce texte cible les pratiques que nous voulons viser sans effets de bords pour les entreprises françaises.
Le RDPI proposera quatre amendements visant à définir la fast fashion selon la seule durée de vie, en excluant la durée d'usage, et à mieux circonscrire les malus des écocontributions aux seules entreprises de fast fashion.
Il faut surtout promouvoir l'achat responsable et local. Acheter des vêtements fabriqués en France c'est soutenir l'emploi, la qualité, la traçabilité, c'est aussi dire non aux plateformes qui inondent le marché de produits jetables. Il ne s'agit pas d'interdire de s'habiller, mais de redonner du sens à nos choix de consommation. Ce texte est une réponse proportionnée à des dérives qui ne sont plus soutenables. (Applaudissements sur les travées du RDPI et au banc des commissions)
M. Michel Masset . - Faut-il le rappeler : notre économie dépend de nos modes de consommation. Ce texte les remet en question et nous renvoie à la mesure et à la démesure. La France voit circuler pas moins de 1 milliard de plus de vêtements qu'il y a dix ans sur son territoire. De ces milliards de vêtements découlent des milliers de tonnes de microplastiques dans les océans et des montagnes de déchets.
Tout notre tissu industriel disparaît. Les géants du textile représentent 25 % des ventes en ligne de mode et écrasent la concurrence, notamment les acteurs traditionnels du secteur textile français et européen. Dans le Lot-et-Garonne, plusieurs entreprises ont été les premières victimes de cette expansion numérique.
C'est une question de société. Veut-on supprimer tous les commerces de proximité, rester chez soi sans contacts humains ?
À nous, collectivement, de limiter le champ d'action de certaines entreprises, dont les procédés industriels et commerciaux ont des conséquences catastrophiques pour notre environnement et notre souveraineté économique. L'enjeu de ce texte est d'encourager les acteurs à la sobriété et au recyclage des produits.
Ce vote n'épuisera pas le sujet. Il reste beaucoup à faire, notamment en matière de recyclage et d'économie circulaire. Près de 40 % des déchets soumis à une REP échappent à la collecte, et les sanctions ne sont jamais mobilisées envers les éco-organismes. Le coût public n'est pas négligeable.
Il faut considérer le problème de façon globale et envisager une régulation européenne en matière de biens importés. Quelque 4,6 milliards de colis de moins de 150 kg entrant dans l'Union européenne sont exonérés de droits de douane. La réforme douanière est urgente.
Il faut agir pour limiter les dérives de la fast fashion, qui fait de la surproduction l'alpha et l'oméga de la rentabilité.
Ce sujet complexe nous permettra d'envoyer un signal et de siffler la fin de notre naïveté commune. Nous faisons oeuvre de régulation pour corriger une dérive commerciale néfaste.
Prenons aussi en compte certaines failles : par exemple, améliorons l'offre de grande taille pour ne pas entretenir des marchés captifs.
Nous sommes favorables à cette première étape de régulation, face à des pratiques commerciales qui portent atteinte à l'intérêt général, au mépris des normes européennes. (Applaudissements sur les travées du RDPI et au banc des commissions)
M. Stéphane Demilly . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Cette industrie textile est une des plus polluantes au monde. Elle générerait chaque année plus de 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre. L'essor fulgurant de la fast fashion repose sur un modèle économique aussi séduisant qu'illusoire : produire toujours plus, à des prix toujours plus bas, pour une durée de vie la plus courte possible.
Derrière un tee-shirt à 3 euros ou une robe à 10 euros se cachent des conditions de travail indignes, des salaires de misère et un rythme de travail insoutenable dans des lieux insalubres. Autant de violations des droits humains. Accepter ces prix, c'est soutenir une chaîne d'exploitation silencieuse, violente et polluante.
Cependant, comme dirait Tzvetan Todorov, donner des leçons de morale n'est pas une preuve de vertu. Nous-mêmes sommes aveuglés par les slogans marketing : que celui qui n'est pas concerné me jette non la première pierre, mais le premier tee-shirt.
Chaque année, des milliards de vêtements sont produits puis jetés : un modèle Kleenex qui utilise jusqu'à 10 000 litres d'eau pour un seul jean. S'y ajoutent les microplastiques dans les océans, la pollution des sols et des rivières. Oui, la fast fashion est une catastrophe économique et écologique.
L'industrie textile française subit une concurrence déloyale. Elle ne peut pas rivaliser avec ce modèle jetable. Il est urgent de réguler ce modèle anarchique, notamment par la pédagogie sur le processus de fabrication de ces produits.
C'est un premier pas pour tenter de responsabiliser les consommateurs, notamment par l'affichage environnemental obligatoire, un bonus-malus encourageant l'écoconception et une publicité mieux encadrée. Pour ce faire, ce texte prévoit des dispositions d'accompagnement et des délais d'application raisonnables.
Il faut redonner du sens à notre consommation et sortir de la logique infernale consistant à produire vite, consommer vite et jeter vite.
Le texte s'inscrit dans le respect du pacte vert européen et oeuvre pour une consommation plus éthique et plus durable. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, du RDPI et du RDSE, ainsi qu'au banc des commissions ; M. Jacques Fernique applaudit également.)
Mme Marie-Claude Varaillas . - L'industrie textile est une des plus polluantes au monde ; les émissions de gaz à effet de serre représentent plus de 8 %. Nous nous dirigeons vers 145 millions de tonnes de vêtements d'ici à 2030.
Le remplacement ultrarapide des collections nourrit les appétits de profit des multinationales. Les consommateurs sont envahis de publicité les poussant à acheter. Fournir autant de biens marchands sans possibilité de recyclage ou de réemploi se fait au détriment de la nature et des travailleurs et travailleuses. Chaque année, le jour du dépassement, ce jour où nos consommations dépassent les capacités de la planète, arrive de plus en plus tôt. Cette année, c'était le 19 avril ; c'était le 5 mai en 2024.
Il faut en moyenne 7 500 litres d'eau pour fabriquer un jean, soit toute l'eau bue par un être humain pendant sept ans, selon les Nations unies.
Ce modèle du jetable nuit à la santé des femmes et des enfants, comme au Bangladesh, où le salaire mensuel est de 80 euros. Avec trois fois moins d'emplois en France, cette délocalisation se paie au prix du chômage - voyez les suppressions d'emplois chez Naf Naf.
Il faut interdire la publicité pour la fast fashion, et pas seulement pour les influenceurs. Il faut veiller au réemploi des vêtements. Les géants de la fast fashion bénéficient de millions de réductions d'impôts pour les surplus donnés aux associations, rendant la surproduction rentable. Pour un jean à 12 euros, une ristourne fiscale de 7,20 euros ! Mais au bout de la chaîne, ce sont les associations qui trinquent ; elles doivent détruire les vêtements en trop. Cette logique a conduit à la liquidation de l'association d'insertion La Tresse, en Dordogne, qui a collecté et trié près de 2 700 tonnes de textile par an pendant quinze ans. Les acteurs de l'économie circulaire sont fragilisés. Aussi la création d'un bonus-malus est une bonne chose.
Enfin, nous devons veiller à ce que les conditions de travail et les salaires des ouvriers du textile permettent de bien vivre. La question sociale est tout aussi importante que la question environnementale, pourtant le texte ne s'y attarde pas suffisamment. Sur un tee-shirt vendu 29 euros en magasin, les ouvrières du textile touchent seulement 0,18 euro.
Je salue l'engagement de la rapporteure. Le texte aurait pu aller plus loin, mais nous le voterons. (Applaudissements au banc des commissions)
M. Jacques Fernique . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Cette proposition de loi répond à une nécessité absolue d'agir. Si nous voulons tenir le principe de responsabilité des producteurs, qui exige que soient assumés par les producteurs la collecte, le tri, le recyclage et le réemploi des déchets issus de leurs produits, nous ne pouvons pas rester l'arme au pied face à la déferlante de la fast fashion.
Les lobbyistes de ces plateformes arguent de leurs bonnes intentions et se targuent de faire le bonheur des consommateurs, mais l'impact est désastreux : 26 % des émissions de gaz à effet de serre en 2050 si rien n'est fait, une contribution à près de 20 % à la pollution des eaux. Ces modes de production bafouent l'impératif de vigilance, notamment en matière de droits sociaux : là-bas, c'est le Rana Plaza, et ici ce sont des disparitions d'emplois et des montagnes de déchets, que nos collectivités doivent assumer.
La loi Agec a consolidé les bases de la REP, la loi Climat et résilience a dégagé une avancée nécessaire, mais pas encore concrétisée, l'affichage textile. Ce texte actionne deux leviers : celui de l'écomodulation de la contribution à la REP et celui de l'interdiction de la publicité.
Il a fallu un an pour que le texte revienne au Sénat, puis encore trois mois pour qu'il soit inscrit à l'ordre du jour.
Nous sommes aujourd'hui capables de rendre le texte plus opérationnel. Mais la commission nous propose de laisser dans le vague les mécanismes d'écomodulation, qui seraient définis par décret, et de renoncer à actionner le levier de l'interdiction de la publicité, alors que c'est par elle que la fast fashion pousse à l'hyperconsommation.
Il s'agit d'actionner efficacement le levier des écocontributions. Cela rétablira un peu la compétitivité de nos productions de qualité et relancera la revalorisation des déchets. Et si cette écocontribution n'avait pas que des effets sur Shein, et encourageait aussi les Français et Européens à rectifier le tir, alors tant mieux !
La rapporteure a retiré l'indexation prévue initialement pour l'affichage environnemental. Mais le 15 mai dernier, la Commission européenne a validé le cadre réglementaire afférent. Nous devons intégrer les critères ainsi validés dans le futur décret : ainsi, nous ferons bien mieux que de produire une coquille certes intéressante, mais vide.
Peut-on interdire la publicité pour ces produits textiles ? Comme pour le tabagisme, il y a un motif d'intérêt général. Nos amendements vont dans ce sens, et c'est ce que pensent l'Assemblée nationale et le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER)
Mme Marie-Claire Carrère-Gée . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est des activités qui, derrière l'apparente légèreté d'un produit de consommation courante, cachent de véritables trafics. Le coût humain, environnemental, fiscal, industriel, civilisationnel même, est lourd. C'est une atteinte à nos principes fondamentaux : violation des droits humains, travail des enfants dans des conditions que nos textes qualifient de traite d'êtres humains. En Chine, dans le Xinjiang, le coton récolté par les Ouïghours, sous la contrainte, inonde toujours nos garde-robes. Oui, nous avons des cadavres dans nos placards ! (Exclamations sur les travées du GEST ; Mme Antoinette Guhl applaudit.)
J'exprime aussi ma colère face aux stratégies de communication de ces plateformes. Ce qu'elles proposent en réalité aux Français à faible pouvoir d'achat, c'est un troc ignoble : l'accès à quelques tee-shirts de plus qu'ils ne porteront pas, contre leur emploi, leur salaire, leur avenir. L'économie de ces plateformes est fondée sur une logique d'addiction, qui enrichit seulement quelques communicants et lobbyistes, et qui appauvrit tout le reste du monde.
Je salue les travaux de Sylvie Valente Le Hir et de la commission visant à éviter les effets boomerang potentiels du texte sur nos entreprises qui créent de l'emploi, paient des charges sociales et dont les boutiques animent nos centres-villes - et que nos administrations savent malheureusement seules contrôler.
Nous devons rester lucides. Cette proposition de loi, qui se limite à la filière textile et à la seule dimension environnementale, n'épuise pas les vrais enjeux : la violence systémique de ces plateformes.
L'article 45 de la Constitution ne nous permet pas de la recentrer sur le vrai sujet, à savoir le contournement méthodique de nos normes fiscales et sociales. Avec une exonération incompréhensible des droits de douane en dessous de 150 euros, des tarifs postaux ridicules de l'Union postale universelle - 1 euro pour faire faire le tour du monde à 100 grammes -, notre incapacité à s'assurer que la TVA soit payée et sur le bon montant des ventes, la fast fashion habille les Français et déshabille nos finances publiques.
Je n'accepte pas que nous n'ayons aucun résultat, pour des enquêtes de la DGCCRF lancées il y a trois ans, quand chaque jour des entreprises françaises partent au tapis, et leurs emplois avec.
Nous devons mobiliser nos laboratoires publics et privés pour procéder à des contrôles aléatoires et réguliers. Les phtalates, les colorants azoïques ne sont pas des options esthétiques, mais des risques avérés pour la santé. Les lits superposés pour nos enfants dans lesquels ils peuvent s'étouffer ne doivent pas être commercialisés en France. Or les plateformes ne sont soumises à aucune obligation effective de traçabilité et de transparence.
Madame la ministre, j'ai entendu vos engagements et ceux de la Commission européenne. Mais sur les tarifs postaux, rien ! Dans vos annonces, à part une bonne volonté évidente, je ne vois pas ce qui changera pour les contrôles TVA.
Et attendre 2028 pour d'éventuels droits de douane, et 2026 pour une contribution forfaitaire, ce n'est pas le bon tempo ! Camaïeu, Naf Naf, Habitat, Jennyfer : pour eux, c'est une éternité. Bientôt, toutes nos enseignes de l'habillement et de la maison disparaîtront !
Pour en finir avec un modèle économique fondé sur la prédation, il faut plus de volontarisme. Nous devons nous montrer aussi agiles et adaptables que ces plateformes. Le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du GEST ; M. Sébastien Fagnen applaudit également.)
M. Jean Hingray . - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP) Jusqu'où irons-nous dans l'art de l'éphémère ? Éphémère comme l'enthousiasme soulevé par la version initiale du présent texte. Hélas, pour l'instant - j'espère que cela changera dans les prochaines heures -, ce texte est un simple accessoire de mode et non une révolution vestimentaire.
Quelle protection cette loi offre-t-elle à nos ouvriers et nos entreprises ? Mon département des Vosges a longtemps fait la fierté de l'industrie textile. De nombreux Vosgiens se sont retrouvés sur le carreau, et les pouvoirs publics n'ont rien fait. Il aurait pourtant été simple de suivre Jules Méline, qui avait mis en place, dès 1892, des mesures de protection pour l'agriculture.
Utilisons les besoins du marché et encourageons les coopérations, pour que nos entreprises puissent rivaliser sur la scène internationale tout en respectant nos valeurs écologiques.
Nous devons aller vers une transformation écologique réelle et durable. J'ai déposé un amendement en faveur de nos industries, dans une approche alliant protection économique et écoresponsabilité.
Il faut aussi former les jeunes à comprendre les impacts du textile sur l'environnement, les conditions sociales et leur pouvoir d'achat. C'est un investissement écologique sur le long terme.
Nous devons repenser l'ensemble de ce texte pour qu'il ne soit pas une simple mesure de répression économique, mais porte un véritable changement positif et durable. Quand la politique est éphémère, l'éducation de la nouvelle génération, elle, est durable. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Je vous remercie, car il est rare d'entendre un tel consensus sur une proposition de loi issue du bloc central, qui montre combien écologie rime avec économie et pouvoir d'achat - le vrai, le pouvoir de vivre, et de vivre bien. Il montre aussi combien écologie rime avec emploi. Voilà qui tranche avec des reculs récents qui n'honorent pas notre pays.
Je salue aussi le travail et l'intégrité de Mme la rapporteure, que certains ont voulu remettre en cause. Je salue aussi le président Longeot et les membres de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. En dépit des manoeuvres et des pressions, vous avez tenu bon et maintenu l'intégrité du texte. Nous veillerons à le rendre aussi puissant que possible, tout en assurant sa solidité juridique.
Je salue également la mobilisation du Gouvernement, notamment de Bercy. Il est important d'actionner tous les leviers, vous avez raison, madame Carrère-Gée. Les contrôles sur les colis devront être multipliés par trois, en actionnant les leviers sur la qualité des produits, notamment. Nous devons garantir la sécurité sanitaire de ces produits, pour les textiles comme pour les jouets pour enfants. Ne laissons pas entrer sur notre territoire des produits ne correspondant pas à nos normes sanitaires.
Je salue aussi le travail de ma collègue Amélie de Montchalin, pour augmenter les contrôles des douanes. Les plateformes doivent participer aux coûts de gestion des douanes : cette idée fait son chemin.
Nous agissons sur tous les fronts, et aussi au niveau européen. Ainsi, le 25 mai dernier, la Commission européenne, sur la base des signalements de la DGCCRF et d'autres pays, a interpellé une plateforme coupable d'écarts et de dérives en matière de loyauté commerciale et de respect des droits des consommateurs.
Il y aura bien une trajectoire de malus. Le Gouvernement avait souhaité la renvoyer à un texte réglementaire, ce qui a suscité des inquiétudes. Nous réintroduirons donc un plancher dans le texte.
Sur la publicité, l'amendement gouvernemental, avec d'autres, réintroduira les dispositions initiales du texte, en sachant qu'elles sont juridiquement fragiles. Mais c'est aussi un levier pour la poursuite de la discussion au niveau européen.
J'ai défendu l'affichage environnemental auprès de la Commission européenne. Cette démarche nous a été accordée sur la base du volontariat, à condition qu'elle soit expérimentale. La discussion se poursuit, cet éco-score n'étant pas complètement accepté par la Commission européenne dans le cadre de la réflexion sur le Product Environmental Footprint (PEF).
Le malus concerne tout le monde, tous les acteurs français, européens et non européens, et touche la fast fashion comme l'ultra fast fashion.
Cette loi fera date, mais il faut que l'Union européenne consolide cette approche pour que nous soyons vraiment forts et puissions éviter toute tentation de contournement de ces plateformes, citoyennes de nulle part qui jouent des différences de droit.
Discussion des articles
Article 1er
M. Thomas Dossus . - Je suis un peu moins enthousiaste que la ministre sur ce texte, mais nous avons une centaine d'amendements pour l'améliorer. Pour l'instant, Shein et Temu tremblent peu, mais cela peut changer.
Il faudra effectivement mobiliser l'Union européenne.
On discute de la directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CS3D). L'Europe cherche à imposer un devoir de vigilance élargi, incluant notamment les atteintes à l'environnement.
Madame la ministre, vous avez parlé de reculs récents. Au sommet Choose France, le Président de la République lui-même a exprimé sa volonté d'en finir avec cette directive, appelant à son report sine die, douze ans après le drame du Rana Plaza.
Nous avons aussi eu une révélation récente sur Décathlon, qui fait du surprofit en France - 1 milliard d'euros de dividendes versés l'an dernier - alors qu'il exploite les Ouïghours.
Les propos du Président de la République sont-ils les engagements du Gouvernement ?
Mme la présidente. - Amendement n°63 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Les notions de « nouvelles références » et de « faibles incitations à réparer » restent insuffisantes pour qualifier les acteurs de l'ultra fast fashion. Il faut adapter la définition présente dans la proposition de loi, en y intégrant des critères supplémentaires.
Mme la présidente. - Amendement n°1 rectifié de Mmes Espagnac et Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. - La définition de la fast fashion demande du courage politique. Nous voulons protéger nos entreprises françaises et européennes. La définition établie en commission doit aller plus loin. Il faut parler de « rapidité de mise sur le marché », de « prix trop bas » et de « critères de réparabilité ».
Mme la présidente. - Amendement n°49 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Cet amendement fournit une définition claire et juridiquement opérationnelle de la fast fashion, et trace une ligne rouge. Une gamme supérieure à 10 000 références et un coût de réparation supérieur à 33 % du prix neuf devraient être ajoutés dans les critères. Ne laissons pas la définition des seuils au décret. Cet amendement s'appuie sur la méthodologie Ecobalyse, dont le sérieux est reconnu.
Mme la présidente. - Amendement n°79 de Mme Varaillas et du groupe CRCE-K.
Mme Marie-Claude Varaillas. - Établissons des critères clairs : une gamme supérieure à 10 000 unités et un coût de réparation supérieur à 33 % de la valeur du produit. En laissant le décret en Conseil d'État déterminer ces seuils, nous n'avons pas la garantie d'un niveau satisfaisant. L'amendement prévoit que le Conseil d'État puisse réévaluer le seuil, mais il faut une première définition dans la loi.
Par ailleurs, nous sommes d'accord avec le fait de ne pas inclure les boutiques de seconde main.
Mme la présidente. - Amendement n°50 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Cet amendement de repli conserve le seuil plancher de 10 000 références en catalogue, sans évoquer le critère de réparabilité.
Dix mille références, c'est la fourchette haute définie par la méthodologie d'Ecobalyse. Ce chiffre est le fruit d'un consensus technique validé à l'échelle européenne.
Mme la présidente. - Amendement n°90 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cibler les sanctions sur la mode ultra-éphémère reviendrait à manquer la cible. Une partie des sanctions, notamment sur la publicité, risquent de ne pas s'appliquer, car le pays où sont incorporées les sociétés correspondantes, y compris leur filiale européenne, n'est pas la France - sauf si le droit européen était modifié.
Si les acteurs les plus polluants - dans un facteur 10 ou 100 - ne se voient pas appliquer la règle fixée dans le texte, et si les acteurs français beaucoup moins polluants - même s'ils ne sont pas parfaits - sont les seuls à ne pas pouvoir faire de publicité, on risque de favoriser les premiers au détriment des seconds. D'où la définition que nous avons retenue. Ne créons pas de concurrence déloyale.
À l'article 2, tous les acteurs de la mode seront en revanche concernés par le malus au regard de leur empreinte environnementale.
Mme la présidente. - Amendement n°62 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°117 de Mme Valente Le Hir, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'expression « mode express » est la traduction officielle de la fast fashion adoptée par la commission d'enrichissement de la langue française, validée par l'Académie française, puis publiée au Journal officiel avec la définition suivante : « secteur de la mode qui repose sur un modèle économique caractérisé par le renouvellement très rapide de collections d'articles à bas prix ».
Les termes « mode éphémère » sont donc remplacés par les termes « mode express ».
Mme la présidente. - Amendement n°18 rectifié bis de Mme Jouve et alii.
M. Michel Masset. - Nous complétons la définition de la mode éphémère en visant non seulement les pratiques commerciales, mais aussi les pratiques industrielles.
Cette précision reflète davantage la réalité des stratégies déployées par certains acteurs économiques et assure une meilleure prise en compte des mécanismes contribuant à la surproduction de produits peu durables.
Mme la présidente. - Amendement identique n°64 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°91 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Nous intégrons les pratiques industrielles dans la définition de la mode ultra-éphémère, alors que la proposition de loi ne vise que les pratiques commerciales. Les émissions de gaz à effet de serre de Shein sont à 99 % dans son scope 3. C'est un modèle d'affaires assis sur une consommation non pas désirée, mais provoquée.
Prendre en compte les pratiques industrielles rendra la proposition de loi cohérente avec la directive-cadre Déchets et aligner notre rédaction sur les termes européens nous permettra d'être plus forts au niveau européen.
Mme la présidente. - Amendement n°118 de Mme Valente Le Hir, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Rédactionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°85 de Mme Guhl et alii.
Mme Antoinette Guhl. - Notre amendement complète la définition de la fast fashion en intégrant les conséquences dommageables pour l'environnement et pour les droits humains. Selon Greenpeace, plus de 30 % des produits de Shein contiennent des substances chimiques dangereuses, qui finissent dans nos rivières et nos océans.
Si rien ne change, la part de la mode dans les émissions mondiales atteindra 26 % en 2050. La production s'emballe - 100 milliards de vêtements vendus chaque année - , les microplastiques se retrouvent dans nos machines à laver et les vêtements font des trajets absurdes - parfois plus de 60 000 kilomètres... Il faut aller vers un autre modèle.
Mme la présidente. - Amendement n°94 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Nous améliorons la terminologie, en adéquation avec la directive-cadre Déchets.
Les critères retenus au niveau européen sont la largeur de gamme et la faible incitation à la réparation. En identifiant clairement ces entreprises, nous ferons peser sur elles des obligations fortes - messages de sensibilisation sur les sites de vente et encadrement de la publicité.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°114 de M. Cadec et alii.
M. Laurent Somon. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°35 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
M. Sébastien Fagnen. - Cet amendement de compromis grave dans le marbre législatif le seuil de 1 million de références annuelles, tout en autorisant le Gouvernement à l'abaisser par décret.
Mme la présidente. - Amendement n°17 rectifié bis de Mme Jouve et alii.
M. Michel Masset. - Nous supprimons le critère de la faible incitation à réparer, qui s'appuie sur le coût moyen de la réparation, jugé non représentatif par les acteurs du secteur. Les produits d'entrée de gamme et de moyenne gamme seront les plus pénalisés.
Mme la présidente. - Amendement identique n°23 de Mme Phinera-Horth et du RDPI.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. - Le critère de réparabilité, qui risque d'exclure les produits les plus populaires, ainsi que les produits pour enfants ou bébé, est inadapté. Le prix reflète un positionnement de marque et pas forcément la qualité ou la durée de vie du produit. Aussi, ne conservons que le critère de la largeur de gamme.
Mme la présidente. - Amendement n°42 rectifié de Mme Espagnac et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Les invendus sont l'un des symptômes de la fast fashion. En intégrant ce critère, la définition sera plus rigoureuse et l'encadrement plus efficace.
Mme la présidente. - Amendement identique n°47 rectifié bis de M. Cadec et alii.
M. Laurent Somon. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°95 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Le Gouvernement propose d'utiliser la terminologie européenne de fournisseur de plateforme en ligne, afin d'éviter les contournements.
Il propose en outre de comptabiliser les produits à l'échelle du canal de vente principal de la marque, afin d'éviter les doubles comptes et les contournements.
Cet amendement s'articule avec l'amendement n°93, qui définira plus spécifiquement la mise en oeuvre de l'article 1er pour les plateformes.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Le mieux est l'ennemi du bien : attention à ne pas créer une usine à gaz avec les cinq critères proposés par l'amendement n° 63. Retrait, sinon avis défavorable. Même avis pour l'amendement n°1 rectifié.
L'absence de seuil légal permettra au Gouvernement d'adapter le seuil aux pratiques des producteurs : avis défavorable aux amendements nos49, 79 et 50.
Dans le langage courant, la mode express désigne aussi des acteurs français ou européens. Or le nombre de références est 100 fois plus important sur les plateformes asiatiques. Dès lors, avis favorable à l'amendement n°90. L'amendement n°62 est donc satisfait.
Avis favorable aux amendements identiques nos18 rectifié bis, 64 et 91 qui rapprochent la rédaction de celle de la directive-cadre Déchets.
La mode éphémère est un fléau, mais l'introduction d'un nouveau critère rendrait plus difficile sa caractérisation. Avis défavorable à l'amendement n°85.
La réécriture de l'amendement n°94 ne me semble pas utile : avis défavorable. Même avis pour le sous-amendement n°114 : la notion d'invendus n'est pas suffisamment précise et le taux d'invendus de certaines plateformes n'est pas élevé, car elles adaptent rapidement leur offre à la demande.
L'amendement n°35 rectifié ne laisse pas assez de souplesse au Gouvernement : avis défavorable.
Il est souhaitable d'ajouter un critère prenant en compte le prix, au critère quantitatif du nombre de références, car la mode express ce sont aussi des prix bas. Certains auteurs d'amendements demandent cinq critères, vous n'en voulez qu'un : les deux critères proposés par la commission sont un bon compromis. Avis défavorable aux amendements identiques nos17 rectifié bis et 23.
L'ajout de critères complexifie la définition et le critère des invendus n'est pas pertinent : avis défavorable aux amendements nos42 rectifié et 47 rectifié bis.
La notion de canal de vente principal est essentielle pour éviter des contournements via la multiplication des marques. Mais le 1° de l'amendement n°95, qui prévoit un décret simple - et non en Conseil d'État - , est incompatible avec mon amendement rédactionnel : avis favorable si rectifié, sinon défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Retrait, sinon avis défavorable à l'amendement n°63. Je souhaite que le texte soit le plus juridiquement solide possible. Il faut donc reprendre les deux critères du droit européen : largeur de gamme et faible incitation à la réparation. Même avis sur l'amendement n°1 rectifié, pour les mêmes raisons.
Les formulations proposées par les amendements nos49 et 50 pourraient être contournées. Avis défavorable aussi à l'amendement n°79.
Je vous invite à voter l'amendement n°90, qui solidifie le texte.
Sur l'amendement n°117, le texte de la directive en français parle bien de mode éphémère, et non pas express. Évitons les sources de contentieux inutiles ! Idem sur l'amendement n°62.
Avis favorable aux amendements identiques nos18 rectifié bis et 64.
Retrait, sinon avis défavorable à l'amendement n°118 qui restreint les critères, alors que la directive en prévoit d'autres. Les acteurs vont s'adapter pour contourner les contraintes. En outre, l'amendement supprime l'obligation de tenir un registre de suivi des marques commercialisées, qui est un instrument de contrôle des plateformes.
Avis défavorable à l'amendement n°85, source de contentieux. Il faudrait démontrer les impacts sur les droits humains, même si vous avez raison de les rappeler. Les deux critères de largeur de gamme et de réparabilité sont faciles à apprécier par le juge.
L'amendement n°94 nous permet de retenir une rédaction très proche du droit européen. Avis défavorable au sous-amendement n°114 sur les invendus, qui pénaliserait des marques présentes physiquement sur le territoire et qui est inopérant.
Avis défavorable à l'amendement n°35 rectifié, pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure.
Il est important de conserver l'incitation à réparer, conformément au droit européen : avis défavorable aux amendements identiques nos17 rectifié bis et 23, ainsi qu'aux amendements identiques nos42 rectifié et 47 rectifié bis.
Enfin, je rectifie mon amendement n°95 pour le rendre compatible avec l'amendement de la commission.
M. Yannick Jadot. - Je suis favorable à l'intégration des enjeux sociaux et environnementaux dans la définition. C'est l'éléphant dans la pièce. La fast fashion repose sur un dumping social et environnemental. Elle se construit sur la prédation et l'exploitation.
Nous avons voté la reconnaissance du génocide des Ouïghours. Au Parlement européen, j'ai participé à une étude sur le travail forcé. Nous pourrions exclure du marché européen les produits qui en sont issus.
M. Jacques Fernique. - S'agissant des amendements nos49, 79 et 50, un « tiens » vaut mieux que deux « tu l'auras » : fixer un seuil dans la loi n'empêche nullement le Gouvernement de s'adapter à l'inventivité des plateformes.
L'amendement n°63 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos1 rectifié, 49, 79 et 50.
L'amendement n°90 est adopté.
L'amendement n°62 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°35 rectifié.
L'amendement n°117 est adopté.
Les amendements identiques nos18 rectifié bis, 64 et 91 sont adoptés.
L'amendement n°118 est adopté.
L'amendement n°85 n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement n°114 et l'amendement n°94.
Les amendements identiques nos17 rectifié bis et 23 ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques nos42 rectifié et 47 rectifié bis.
L'amendement n°95 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°93 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cet amendement complète notre amendement n°95 rectifié. Le Gouvernement propose d'utiliser la terminologie européenne de fournisseur de plateforme en ligne. Il s'agit de ne pas pénaliser les plateformes de vente multimarques et de cibler les places de marché textiles qui cherchent à échapper à nos réglementations.
Mme la présidente. - Amendement n°51 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Nous voulons inclure les plateformes de vente et les places de marché multimarques. Les acteurs les plus agiles, comme Shein ou Temu, risquent de passer entre les mailles du filet. Les mêmes règles doivent s'appliquer à tous les acteurs.
Mme la présidente. - Amendement n°3 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Les sites de vente en ligne qui commercialisent leurs produits sous une marque unique pourraient basculer vers un modèle multimarques factice. Pour l'éviter, nous proposons que les références des produits d'une marque soient comptabilisées au titre de la plateforme dès lors que celle-ci constitue le canal de vente principal de cette marque.
Mme la présidente. - Amendement identique n°11 rectifié ter de M. Lefèvre et alii.
Mme Annick Billon. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°30 rectifié quater de Mme Housseau et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°55 rectifié bis de M. Masset et alii.
M. Michel Masset. - Les plateformes risquent de contourner le texte via l'exemption pour les plateformes multimarques. Nous proposons donc que toutes les références soient comptabilisées au titre de la plateforme, dès lors que celle-ci est le canal de vente principal.
Mme la présidente. - Amendement n°70 rectifié ter de M. Menonville et alii.
L'amendement n°70 rectifié ter n'est pas défendu.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Le remplacement de la notion d'interface électronique par celle de plateforme en ligne, proposé par l'amendement n°93, n'est pas souhaitable : certes le droit européen retient la notion de plateforme en ligne, mais celle d'interface électronique est plus englobante. Je suis favorable à la notion de canal de vente principal, également portée par cet amendement, mais d'autres amendements permettront de la prendre en compte. Avis défavorable.
Sur l'amendement n°51, l'inclusion des plateformes multimarques à la définition de la mode express est indispensable. Il est toutefois nécessaire de prévoir une comptabilisation différente pour les producteurs classiques et pour les véritables places de marché. Prévoir le même seuil pour Amazon et pour Petit Bateau n'aurait pas de sens et pourrait amener Amazon à contraindre Petit Bateau à réduire le nombre de ses références. Avec le Gouvernement, nous avons réalisé un travail d'orfèvre et un équilibre a été trouvé. Avis défavorable.
Sur les amendements identiques nos3 rectifié bis, 11 rectifié ter, 30 rectifié quater et 55 rectifié bis, les règles introduites en commission visent à distinguer les interfaces multimarques classiques, simples intermédiaires, des producteurs qui adoptent un statut de place de marché par opportunité et doivent être traités comme n'importe quel producteur. Les amendements nos3 et 11 renforcent la solidité du dispositif prévu par la commission. Avis favorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Je reviens sur l'amendement n°93 du Gouvernement. Dans le Digital Services Act, il est bien question de plateforme en ligne. Cette terminologie, qui donne une assise plus solide au texte, doit être conservée. Demande de retrait des amendements identiques nos3 rectifié bis, 11 rectifié ter, 30 rectifié quater et 55 rectifié bis au profit de l'amendement du Gouvernement. Avis défavorable à l'amendement n°51.
L'amendement n°93 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°51.
Les amendements identiques nos3 rectifié bis, 11 rectifié ter, 30 rectifié quater et 55 rectifié bis sont adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°122 de Mme Valente Le Hir, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Rédactionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°56 rectifié de M. Masset et alii.
M. Michel Masset. - Afin de revenir à l'esprit de la proposition de loi qui porte sur l'industrie textile et non pas seulement sur la mode éphémère, nous étendons l'obligation d'affichage de messages de sensibilisation à l'ensemble des metteurs sur le marché de produits textiles.
Mme la présidente. - Amendement n°78 de M. Dossus et alii.
M. Jacques Fernique. - Cet amendement étend l'obligation d'affichage de messages de sensibilisation à l'ensemble des metteurs sur le marché relevant de la filière REP, et non pas aux seuls acteurs de la mode éphémère.
Pour porter notre message de sobriété, le périmètre des supports concernés doit également être élargi au-delà des plateformes de vente en ligne : affichage, médias, réseaux sociaux.
L'efficacité de nos politiques environnementales doit être renforcée sans incohérence ni demi-mesure.
Mme la présidente. - Amendement n°92 rectifié du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Alors que l'obligation ne concerne que les sites des plateformes en ligne, je propose que les messages soient visibles sur tous les canaux de distribution utilisés, dès qu'un produit est proposé à la vente.
Mme la présidente. - Amendement n°48 rectifié bis de M. Cadec et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - Défendu.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je partage l'objectif des amendements nos56 rectifié et 78, mais je souhaite cibler d'abord la mode express. En étendant les messages de sensibilisation à l'ensemble des acteurs, nous risquons de toucher des acteurs français et européens créateurs d'emplois en France. À terme, nous pourrions néanmoins l'envisager. Retrait, sinon avis défavorable.
Les précisions rédactionnelles de l'amendement n°92 rectifié ne sont pas nécessaires : avis défavorable.
Oui, nous voulons pénaliser les entreprises de la mode express. Un message obligatoire sur toutes les pages est contraignant, mais c'est proportionné. Avis défavorable à l'amendement n°48 rectifié bis,
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Avis favorable à l'amendement rédactionnel n°122.
Avec les amendements nos56 rectifié et 78, le message serait dilué et il n'y aurait plus de différence pour les acteurs ultrapolluants, qui pourraient en outre s'y soustraire. Avis défavorable, même si je partage l'objectif.
Avis défavorable à l'amendement n°48 rectifié bis, car l'objectif est bien de ne pas afficher ce message seulement sur la page d'accueil ou en bandeau, mais à chaque fois que le produit apparaît.
L'amendement n°122 est adopté.
Les amendements nos56 rectifié, 78, 92 rectifié et 48 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Mme la présidente. - Amendement n°36 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Cet amendement, qui prévoit l'information du consommateur sur l'impact environnemental de ses livraisons, traduit l'une des préconisations de la mission d'information sur le transport de marchandises, dont j'étais rapporteure avec Rémy Pointereau en 2021.
Alors que près de 90 % du fret français est assuré par le transport routier, il faut responsabiliser les consommateurs. Commander en ligne ou retourner un produit ne doit plus être un acte banal.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Le modèle économique de la mode express repose sur la commande en ligne et donc la livraison rapide. Le développement des colis venus de Chine est concomitant de celui de la mode express. Le consommateur doit être informé des conséquences environnementales du transport de son colis depuis l'autre bout du monde. Avis favorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Avis défavorable. La livraison de ces produits a un impact environnemental, mais ce n'est pas le seul. La livraison d'un pull en coton produit en Chine ne représente que 9 % de son impact environnemental. Cela risque d'être contre-productif si on ne parle pas au consommateur des 91 % restants.
L'amendement n°36 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°37 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Il s'agit ici encore de traduire une recommandation de notre mission d'information, en interdisant la mention « livraison gratuite », pour ne pas laisser entendre que la livraison n'aurait aucun coût.
Cet amendement ne concerne que la mode éphémère pour éviter l'article 45, mais il faudra l'élargir à l'avenir.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - La mission d'information menée par Nicole Bonnefoy et Rémy Pointereau faisait état du sentiment de dénigrement des transporteurs dont l'activité est invisibilisée par ces pratiques. Toute livraison a un coût économique et environnemental. Une telle interdiction est un premier pas pour responsabiliser le consommateur. Avis favorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - La livraison a un coût, vous avez raison, même si elle peut être « offerte » - plutôt que « gratuite ». Cependant, ce type d'interdiction est contraire à la directive sur les pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs. Il s'agit donc d'un amendement sans portée juridique, de témoignage. (Mme Nicole Bonnefoy manifeste sa désapprobation.) Avis défavorable.
L'amendement n°37 rectifié est adopté.
L'article 1er, modifié, est adopté.
La séance est suspendue à 20 heures.
Présidence de M. Xavier Iacovelli, vice-président
La séance reprend à 21 h 30.
Après l'article 1er
M. le président. - Amendement n°57 rectifié de Mme Romagny et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - Cet amendement vise à rendre visible l'origine géographique du vêtement sur la plateforme numérique ou le site internet où il est proposé, à proximité de son prix. Cette information claire, de nature à orienter la décision d'achat du consommateur, favorisera l'achat de vêtements fabriqués en France ou en Europe, au bilan carbone bien meilleur que ceux produits en Asie.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je comprends votre intention, mais m'interroge sur le coût et la faisabilité de cette mesure, d'autant qu'elle s'appliquerait à l'ensemble de la filière, et pas seulement à la mode express. Des travaux préalables paraissent nécessaires sur l'applicabilité du dispositif. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Sagesse.
Mme Antoinette Guhl. - Le GEST est favorable à cette mesure. Elle demandera certes un peu de travail aux revendeurs et aux plateformes, mais offrira une information de grande importance aux consommateurs.
L'amendement n°57 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°106 rectifié de Mme Schillinger et alii.
L'amendement n°106 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°40 rectifié bis de M. Michau et du groupe SER.
M. Sébastien Fagnen. - Nous voulons supprimer l'abattement de 60 % sur les dons d'invendus aux associations pour les acteurs de la mode éphémère. S'il partait d'une bonne intention, il est devenu pour ces derniers un outil d'optimisation fiscale. Ainsi, Shein peut attendre une ristourne de 7,2 euros sur un pantalon vendu 12 euros ! C'est une impasse du point de vue du bon usage des deniers publics en même temps qu'un encouragement à des pratiques non vertueuses.
M. le président. - Amendement n°109 rectifié de Mme Schillinger et alii.
L'amendement n°109 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°107 rectifié de Mme Schillinger et alii.
L'amendement n°107 rectifié n'est pas défendu.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - J'ai constaté lors de mes auditions une crise du réemploi dans le secteur textile. La prolifération de vêtements de moindre qualité remet en question le modèle des acteurs, qui relèvent souvent de l'économie sociale et solidaire. La possibilité de bénéficier d'un avantage fiscal est ubuesque, et celui-ci n'aurait jamais dû être instauré. Avis favorable à l'amendement n°40 rectifié bis.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cette question n'est pas liée à la loi Agec, mais un vrai problème se pose. Bercy y travaille, sur la base d'enquêtes récentes. Sagesse, car aucune solution n'est encore arrêtée.
L'amendement n°40 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Article 1er bis A
M. le président. - Amendement n°96 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Il s'agit de donner une base juridique aux échanges d'informations entre la DGCCRF et la Cnil, afin de lutter plus efficacement contre les fraudes. Nous devrions nous retrouver sur cette mesure de bon sens.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Face à des acteurs dotés d'une forte capacité de contournement des règles, il ne suffit pas de prévoir des sanctions ; il faut aussi rendre les contrôles plus efficaces. Avis favorable.
L'amendement n°96 est adopté.
L'article 1er bis A, modifié, est adopté.
Article 2
M. le président. - Amendement n°65 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Cet amendement vise à renforcer l'efficacité environnementale de la régulation et à préserver l'équité concurrentielle entre acteurs, français comme internationaux. Il s'agit d'établir une trajectoire commune permettant à l'ensemble des metteurs sur le marché de s'inscrire dans une dynamique de progrès environnemental. Dans un esprit de co-construction, les éco-organismes élaboreraient une feuille de route « Textile durable 2030 » fondée sur les quatre piliers : réparation, réutilisation, recyclage, réduction. Cette feuille de route s'appuierait sur la modulation des contributions REP. On passerait ainsi d'une logique de confrontation à une logique d'engagement partagé.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Merci de me donner l'occasion de rappeler l'importance d'une stratégie pour la gestion des déchets textile. L'État doit y travailler avec l'ensemble des acteurs économiques qui assurent l'existence de débouchés, dans le respect de la hiérarchie des modes de traitement. Mais intervenir au niveau législatif serait trop rigide. Je vous invite à vous mettre en rapport avec Marta de Cidrac et Jacques Fernique, rapporteurs de la mission d'information sur le bilan de la loi Agec : vos réflexions pourront enrichir leurs travaux. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Oui, nous avons besoin d'une feuille de route pour renforcer la circularité. Aujourd'hui, seuls un tiers des textiles usagés sont collectés et un tiers des textiles collectés sont recyclés, majoritairement hors d'Europe. C'est pourquoi j'ai lancé une réforme de la filière REP textile pour améliorer l'écoconception, la collecte, le réemploi et le recyclage en France. La récente révision de la directive-cadre sur les déchets impose la mise en place d'une filière REP textile : nous sommes précurseurs en la matière. Poursuivons le travail engagé au niveau français et européen ; vous pourrez y être associé, monsieur le sénateur. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Jacques Fernique. - L'intention est louable, et l'idée d'une feuille de route partagée me convient. Mais adopter cet amendement qui réécrit l'article 2 viderait le dispositif de sa substance : ce n'est tout simplement pas possible.
À la demande de la commission, l'amendement n°65 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°294 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 1 |
Contre | 340 |
L'amendement n°65 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°34 rectifié ter de Mme Housseau et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - Pour plus de transparence, rendons publics les paramètres entrant dans la définition du coefficient de durabilité, qui intervient dans la méthodologie de l'affichage environnemental. Pour chaque vêtement, ce coefficient est calculé à partir de trois critères : largeur de la gamme, incitation à la réparation et affichage de la traçabilité des étapes de fabrication. Ces informations doivent être portées à la connaissance du consommateur pour éclairer son acte d'achat.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Le projet d'arrêté sur la signalétique détaille la formule de calcul de ce coefficient : son article 6 fixe les critères que vous avez mentionnés et leur pondération. Les paramètres sont donc bien publics. Avis défavorable, l'amendement étant satisfait.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°34 rectifié ter n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°38 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
M. Sébastien Fagnen. - Nous réintroduisons l'application des écomodulations sur la base de l'affichage environnemental, supprimée par la commission au profit de la méthodologie fondée sur la notion de pratiques industrielles et commerciales, trop floue. L'affichage environnemental est en vigueur depuis plusieurs années et embrasse la totalité du cycle de vie des produits. Si nous pouvons entendre les réserves avancées lors des auditions, il nous paraît important d'aller au bout de la logique pour engager un véritable changement de pratiques. La mode jetable doit reculer sur les plateformes étrangères, mais aussi parmi les acteurs français.
M. le président. - Amendement n°19 rectifié bis de Mme Jouve et alii.
M. Michel Masset. - Nous proposons de revenir à l'écriture initiale de l'article 2 en ciblant l'écomodulation sur les entreprises relevant de la mode éphémère, telle que définie à l'article 1er. C'est une mesure de cohérence avec l'objectif du texte. Le dispositif adopté par la commission risque d'affecter des entreprises, y compris françaises, n'appartenant pas au secteur de la mode éphémère.
M. le président. - Amendement identique n°24 de Mme Phinera-Horth et alii.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. - Nous proposons aussi de renvoyer à la définition prévue à l'article 1er pour cibler précisément l'écomodulation. La notion de pratiques industrielles et commerciales est floue et sujette à interprétation. Les entreprises relevant de la mode éphémère sont celles incitant à une consommation excessive et peu durable.
M. le président. - Amendement n°80 de Mme Varaillas et du groupe CRCE-K.
Mme Marie-Claude Varaillas. - L'article 2 prévoit des pénalités pour les entreprises de la fast fashion afin de favoriser un changement de pratiques. La méthodologie de l'affichage environnemental existe déjà, repose sur une analyse du cycle de vie des produits et permet une modulation fine des pénalités. S'appuyer sur cette approche qui a fait ses preuves accélérerait la mise en oeuvre de la loi et garantirait la cohérence du dispositif avec le cadre européen.
M. le président. - Amendement n°4 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Nous précisons la notion de durabilité des pratiques industrielles et commerciales par une référence à la méthodologie élaborée dans le cadre de l'affichage environnemental.
M. le président. - Amendement identique n°73 rectifié ter de M. Menonville et alii.
L'amendement n°73 rectifié ter n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°12 rectifié bis de M. Lefèvre et alii.
Mme Pauline Martin. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°31 rectifié ter de Mme Housseau et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - L'article 2 prévoit une contribution financière des produits en fonction de leur durabilité liée à l'impact des pratiques industrielles et commerciales des producteurs. Cet amendement précise que cette approche s'inscrit dans le cadre du calcul du coefficient de durabilité. Les autres critères de l'affichage environnemental ne sont pas pris en compte, car ils pourraient porter préjudice à des modèles vertueux reposant sur des matériaux responsables, comme la laine et la soie.
M. le président. - Sous-amendement n°116 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Il s'agit de donner une assise plus solide à l'amendement n°31 rectifié ter par une précision rédactionnelle, l'ouverture à la possibilité d'autres pénalités et la mise en adéquation avec la directive-cadre Déchets.
M. le président. - Amendement n°52 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Si cette série d'amendements est longue, c'est parce qu'il s'agit de notre principale occasion d'influer sur le texte. Les critères de l'affichage environnemental offrent un indicateur robuste. L'indexation sur cet affichage a été voté par l'Assemblée nationale à l'unanimité. La commission l'a retiré dans l'attente d'une décision européenne, ce qui pouvait s'entendre. Mais nous savons depuis le 15 mai que la Commission européenne entérine le cadre réglementaire de cet affichage. Fondons-nous sur cette méthode solide, qui permettra une mise en oeuvre rapide.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'affichage environnemental est loin de faire l'unanimité dans l'industrie textile, et son système de pondération conduit à des résultats parfois surprenants. Avant de fonder sur cette approche des modulations financières, il faut plus de recul. Songeons aux limites du Nutriscore, par exemple, pour le comté !
L'affichage environnemental est, en outre, plus large que la durabilité des pratiques industrielles et commerciales. Il inclut la durabilité intrinsèque du produit. Ne pénalisons pas les entreprises au-delà du secteur de la mode express. C'est pourquoi nous faisons référence aux critères de l'article 1er et non à l'affichage environnemental.
Je comprends l'intention des auteurs des amendements identiques nos19 rectifié bis et 24, mais, pour des raisons de sécurité juridique, il est nécessaire de décorréler la définition de la mode express de l'article 1er des critères de modulation de l'article 2.
La notion de durabilité liée à l'impact des pratiques industrielles et commerciales des producteurs est inscrite dans la directive-cadre sur les déchets, ce qui garantit sa compatibilité avec le droit européen.
Aucune entreprise française ne sera concernée par cette définition. Ma ligne est constante : ne pas faire payer un euro aux entreprises qui disposent d'enseignes en France et contribuent à la vie économique de nos territoires.
Retrait, sinon avis défavorable à ces deux amendements.
Avis défavorable aux autres amendements ainsi qu'au sous-amendement, qui font référence à l'affichage environnemental.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Il n'y a pas de décret d'application pour l'article 2. Il y en a un, en revanche, pour l'article 1er, qui concerne l'ultra fast fashion et fait foi pour les articles 3 et 3 bis. L'article 2 établit une écomodulation pour l'ultra fast fashion et la fast fashion.
Le Gouvernement a considéré que cette proposition de loi était suffisamment importante pour l'inscrire à l'ordre du jour de vos travaux sur le temps gouvernemental.
Par notre sous-amendement, nous proposons de rétablir la modulation en la fondant sur le coefficient de durabilité, mais pas seulement lui. Cet éco-score fait l'objet d'une discussion avec la Commission européenne dans le cadre d'une expérimentation. La France est à l'avant-garde dans ce domaine.
Le renouvellement des collections n'est pas mesuré dans l'éco-score, mais nous considérons qu'il devrait être pris en compte dans l'écomodulation. Les modalités de celle-ci seront détaillées dans le cahier des charges, qui n'est pas un décret.
Par notre sous-amendement n°116 à l'amendement n°31 rectifié ter, nous souhaitons appliquer un malus aux pratiques non vertueuses sur le plan environnemental et valoriser les producteurs qui s'engagent dans des démarches vertueuses.
Je sollicite le retrait de tous les amendements, sauf l'amendement n°31 rectifié ter, auquel je suis favorable sous réserve de l'adoption du sous-amendement.
Mme Antoinette Guhl. - Madame la rapporteure, même à l'égard d'entreprises européennes, nous devons pouvoir agir si leurs pratiques ne sont pas vertueuses : le critère de localisation ne peut pas guider nos débats.
L'amendement n°38 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques nos19 rectifié bis et 24.
L'amendement n°80 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos4 rectifié bis et 12 rectifié bis
Le sous-amendement n°116 est adopté.
L'amendement n°31 rectifié ter, sous-amendé, est adopté.
L'amendement n°52 n'a plus d'objet.
La séance est suspendue quelques instants.
M. le président. - Amendement n°123 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cet amendement conforte la trajectoire de pénalités prévue dans la proposition de loi. Le Gouvernement souhaite qu'un malus soit appliqué, mais ce malus serait un plancher, pour garder des marges de manoeuvre : nous pourrions l'augmenter si nous estimons qu'il faut plus de flexibilité dans la mise en oeuvre du cahier des charges REP. La loi est un minimum, nous renvoyons à ce cahier des charges pour fixer des montants adaptés à différentes catégories de produits : il y a une différence entre une pièce importante comme un manteau et du linge de corps.
Quoi qu'il arrive et quelle que soit la nationalité des producteurs, les acteurs qui ont des pratiques non durables devront s'acquitter d'une contribution au titre de la REP.
M. le président. - Amendement n°21 rectifié bis de Mme Jouve et alii.
M. Michel Masset. - L'augmentation du plafond des pénalités concerne, en l'état actuel du texte, l'ensemble des entreprises de la filière à REP pour les textiles, chaussures et linge de maison (TLC). Ciblons les seuls produits de la mode éphémère tels que définis à l'article 1er.
M. le président. - Amendement identique n°26 de Mme Phinera-Horth et du RDPI.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. - Nous voulons aussi mieux cibler les pénalités sur les produits de la mode éphémère. L'objectif de ce texte est clair : lutter contre la fast fashion et l'ultra fast fashion, et non contre les PME françaises. Limitons les effets de bord.
M. le président. - Amendement n°6 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Il s'agit de mettre en cohérence le dispositif des primes avec celui des pénalités en fixant le même critère d'évaluation.
M. le président. - Amendement identique n°14 rectifié bis de M. Lefèvre et alii.
M. Fabien Genet. - Il a été excellemment défendu.
M. le président. - Amendement n°112 rectifié quater de M. Rochette et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Cet amendement augmente de 3 euros par produit le montant des pénalités applicables aux produits de la mode éphémère.
M. le président. - Amendement n°111 rectifié quater de M. Rochette et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Cet amendement de repli augmente de 2 euros par produit ce montant.
M. le président. - Amendement n°110 rectifié quater de M. Rochette et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Même chose avec une pénalité supplémentaire de 1 euro.
M. le président. - Amendement n°20 rectifié bis de Mme Jouve et alii.
M. Michel Masset. - Nous fixons le montant de la pénalité financière conformément à la procédure actuellement prévue pour l'ensemble des écomodulations quel que soit le secteur visé : l'éco-organisme estime les performances, il propose des primes et pénalités au ministre de l'environnement, après consultation du comité des parties prenantes, dont l'accord est réputé acquis en l'absence d'opposition sous deux mois.
M. le président. - Amendement n°25 de Mme Phinera-Horth et du RDPI.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. - Cet amendement précise que le montant de la pénalité financière prévue par la loi constitue un plafond et non un montant fixe, pour assurer la proportionnalité du dispositif. Une paire de chaussettes et un manteau ne sauraient se voir appliquer la même pénalité, sans considération pour leurs coûts respectifs.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'amendement n°123 n'a pas pu être examiné en commission en raison d'un dépôt tardif. Mais le montant plancher garantit des pénalités dissuasives susceptibles d'être relevées si nécessaire. Avis favorable.
Il faut frapper vite et fort, c'est l'objet de cette proposition de loi. Prévoir une définition par l'éco-organisme risque de diminuer le montant des pénalités par rapport à ce qui est prévu, d'autant que le conseil d'administration des éco-organismes est composé de représentants de l'industrie du textile. Avis défavorable aux amendements nos21 rectifié bis et 26.
Avis défavorable aussi aux amendements identiques nos6 rectifié bis et 14 rectifié bis : à ce stade, je suis réticente à adosser d'éventuelles conséquences financières à l'affichage environnemental, qui doit encore faire ses preuves.
Sur les amendements nos112 rectifié quater, 111 rectifié quater et 110 rectifié quater, retrait, sinon avis défavorable : la contribution pourra être réévaluée ultérieurement si les sanctions ne paraissent pas assez dissuasives.
Avis défavorable à l'amendement n°20 rectifié bis.
Je comprends les motivations de l'amendement n°25, mais face à la mode express, il faut frapper vite. Nous devons sanctionner sévèrement les plateformes. En faisant payer une pénalité, même pour une paire de chaussettes, la France se montrera réellement dissuasive ! Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Demande de retrait pour tous les amendements au profit de l'amendement n°123 du Gouvernement, qui fournit un dispositif sécurisant.
L'amendement n°123 est adopté.
Les amendements identiques nos21 rectifié bis et 26 n'ont plus d'objet, non plus que les amendements nos6 rectifié bis, 14 rectifié bis,nos112 rectifié quater, 111 rectifié quater,110 rectifié quater, 20 rectifié bis et 25.
M. le président. - Amendement n°58 rectifié de M. Canévet et alii.
M. Loïc Hervé. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°75 rectifié ter de M. Chevrollier et alii.
Mme Pauline Martin. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°98 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cet amendement vise à articuler les dispositions applicables aux mandataires des vendeurs établis à l'étranger avec celles qui s'imposent aux places de marché au titre des filières REP. Il coordonne cette proposition de loi avec la loi Agec.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - La loi Agec de 2020 a permis de lutter avec succès contre la fraude aux écocontributions. En créant une obligation de désignation de mandataire financier, nous ne voulons pas remettre en cause cet acquis. La rédaction de l'amendement n°98 du Gouvernement me paraît plus claire. Demande de retrait des amendements nos58 rectifié et 75 rectifié ter au profit de l'amendement du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°75 rectifié ter est retiré.
L'amendement n°58 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°98 est adopté.
M. le président. - Amendement n°46 rectifié bis de Mme Havet et alii.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. - Nous voulons affecter les recettes issues de pénalités infligées aux produits textiles relevant de la fast fashion vers le fonds réparation, qui finance notamment le bonus réparation applicable aux produits textiles. Les consommateurs seraient ainsi davantage incités à réparer leurs vêtements.
M. le président. - Amendement n°53 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Cet amendement revient au texte de l'Assemblée nationale en indexant les primes sur l'affichage environnemental.
M. le président. - Amendement identique n°81 de Mme Varaillas et du groupe CRCE-K.
Mme Marie-Claude Varaillas. - L'intérêt de ce texte est de prévoir des bonus pour les entreprises les plus vertueuses. Nous utilisons l'arrêté portant cahier des charges pour la filière REP TLC. Des points sont attribués en fonction de l'écoconception des vêtements.
M. le président. - Amendement n°32 rectifié ter de Mme Housseau et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - Nous mettons en cohérence le dispositif de primes avec celui des pénalités en utilisant à chaque fois le coefficient de durabilité - ce qui évite de porter préjudice à des entreprises utilisant des matériaux responsables.
M. le président. - Amendement n°5 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°71 rectifié ter de M. Menonville et alii.
L'amendement n°71 rectifié ter n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°13 rectifié bis de M. Lefèvre et alii.
M. Fabien Genet. - Défendu.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - La philosophie de l'économie circulaire est claire : il faut privilégier la réparation, mais les financements de la filière textile pour le fonds réparation sont sous-utilisés. Il semblerait que des difficultés administratives pour les artisans réparateurs soient en jeu.
Le fléchage vers la réparation plutôt que le recyclage ne me semble donc pas pertinent.
Avis défavorable à l'amendement n°46 rectifié bis, ainsi qu'aux suivants.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Avis défavorable à tous ces amendements.
À la demande de la commission, l'amendement n°46 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°295 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l'adoption | 6 |
Contre | 319 |
L'amendement n°46 rectifié bis n'est pas adopté.
Les amendements identiques nos53 et 81 ne sont pas adoptés.
À la demande de la commission, l'amendement n°32 rectifié ter est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°296 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 276 |
Pour l'adoption | 46 |
Contre | 230 |
L'amendement n°32 rectifié ter n'est pas adopté.
L'amendement n°5 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°13 rectifié bis.
M. le président. - Amendement n°86 de Mme Guhl et alii.
Mme Antoinette Guhl. - Cet amendement introduit une modulation des primes des entreprises textiles en fonction de leur engagement à garantir un salaire vital aux travailleuses et travailleurs de leur chaîne d'approvisionnement. Le secteur textile est soumis à des salaires très bas. Les salaires versés aux ouvrières et ouvriers du textile sont deux à cinq fois inférieurs à un salaire vital, et 60 millions de travailleuses dans le monde, souvent jeunes, occupent majoritairement les postes les plus précaires. Alors que le devoir de vigilance européen prévoit que les entreprises doivent garantir un revenu décent à leurs fournisseurs, seules 1 % des entreprises communiquent sur ce sujet. Nous nous appuyons sur les évaluations de salaire vital de l'OCDE.
M. le président. - Amendement n°84 de Mme Varaillas et du groupe CRCE-K.
Mme Marie-Claude Varaillas. - Un élément est absent de ce texte : les travailleuses et travailleurs en amont de la chaîne de production, souvent les populations les plus pauvres. Le textile exploite des femmes et des enfants. Moins de 3 % des vêtements vendus en France sont produits en France ; les emplois du secteur textile ont été divisés par trois depuis 1990. L'adoption de cet amendement serait une avancée majeure pour l'environnement, mais aussi pour soutenir les entreprises françaises face à la concurrence déloyale.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'impact social de la mode express est un enjeu essentiel, mais qui doit être traité dans un autre cadre. Un éco-organisme et une écocontribution visent à assurer la transition d'un secteur vers l'économie circulaire, et non à garantir des critères sociaux. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°86 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°84.
M. le président. - Amendement n°7 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Cet amendement prévoit une exemption des pénalités pour les produits composés de matières délicates comme la laine et la soie, soit 1,5 % des volumes produits à l'échelle internationale, qui se trouveraient injustement dévalorisés par le système prévu par le texte. De nombreuses marques et usines françaises sont réputées pour la qualité de leur production - je pense aux pulls marins, par exemple.
M. le président. - Amendement n°15 rectifié bis de M. Lefèvre et alii.
M. Fabien Genet. - C'est un amendement similaire.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Ne perdons pas de vue notre objectif : combattre la mode express, menace environnementale, sociale et économique. Je comprends votre objectif, mais il faut inclure tous les produits de la mode express, peu importe la matière, pour éviter le contournement par les plateformes. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis. Si effectivement, on parle des entreprises qui s'illustrent en utilisant des fibres délicates, elles ne seront pas concernées par les pénalités. Si elles trichent en revendiquant une constitution 100 % soie sans l'être, ce sera différent. J'étais au laboratoire de la DGCCRF à Lyon : beaucoup de plateformes de fast fashion prétendent utiliser de la soie, à tort.
Rassurez-vous, les entreprises auxquelles vous pensez ne seront pas concernées si elles respectent un processus de durabilité.
L'amendement n°7 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°15 rectifié bis.
M. le président. - Amendement n°41 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Nous proposons que les pénalités fassent l'objet d'une publication obligatoire sur les plateformes et sur les factures. Cela renforce la transparence des pratiques commerciales et rend compréhensibles les modulations de l'écocontribution qui peut avoir un impact sur le prix et permet d'opérer un changement des pratiques. Cette publicité peu flatteuse peut inciter à mettre fin à ces pratiques commerciales.
M. le président. - Amendement identique n°54 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Il a été très bien défendu. Cet amendement a été travaillé avec UFC-Que Choisir.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Pour des raisons de lisibilité, il ne me semble pas opportun d'ajouter un élément d'information. Ne perdons pas de vue le but : pénaliser le producteur, et non pas le consommateur. (Marques d'incompréhension sur les travées du GEST)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
Les amendements identiques nos41 rectifié et 54 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°119 de Mme Valente Le Hir, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Coordination légistique.
M. le président. - Amendement n°99 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Je le retire au profit de l'amendement n°119, qui appelle un avis favorable.
L'amendement n°99 est retiré.
L'amendement n°119 est adopté.
M. le président. - Amendement n°8 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Nous réintroduisons la possibilité d'allouer des financements issus de la REP à la gestion des déchets dans des pays hors de l'Union européenne lorsqu'ils reçoivent des produits TLC de seconde main, qui deviennent des déchets ultimes à très court terme.
M. le président. - Amendement n°82 de Mme Varaillas et du groupe CRCE-K.
Mme Marie-Claude Varaillas. - Au-delà de la collecte, les structures qui s'occupent de récupérer des vêtements manquent de moyens. Proposant souvent des emplois d'insertion, elles devraient être mieux rémunérées. Modifions l'article 2 afin d'intégrer les structures de réemploi et de recyclage des vêtements.
M. le président. - Amendement n°44 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Le financement des structures de recyclage est déterminé par décret. La conjoncture est en effet très difficile. Aux Pays-Bas, le soutien par tonne triée est deux fois plus important qu'en France, ce qui réduit la compétitivité du tri français. Cet amendement propose de prendre en compte cette réalité dans le cadre d'un futur décret.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - La commission a prévu que les compléments de contribution soient orientés vers l'industrialisation du recyclage sur le territoire national, plutôt que l'exportation hors Union européenne. Il est primordial que les déchets collectés soient traités en France en renforçant nos capacités de recyclage.
Du point de vue de la justice sociale, il ne semble pas vertueux d'exporter nos déchets dans des pays en voie de développement.
Avis défavorable à l'amendement n°8 rectifié bis.
L'amendement n°82 liste tous les aspects de la filière ; mais il faut cibler le recyclage qui nécessite des investissements. Avis défavorable également.
L'amendement n°44 rectifié soulève la question de l'équilibre entre opérateurs de déchets et éco-organismes. Toutefois, si cet amendement part d'une bonne intention, il ne règle pas le problème. Rapprochez-vous de Jacques Fernique et de Marta de Cidrac qui traitent le sujet dans le cadre d'une mission d'information sur l'application de la loi Agec. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°8 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements nos82 et 44 rectifié.
M. le président. - Amendement n°115 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cet amendement très important va dans le sens de cette proposition de loi pour une meilleure organisation de la filière de réemploi et de recyclage.
Seul un tiers des textiles est collecté, dont 30 % est recyclé, majoritairement hors de l'Union européenne. Nous n'avons aucune donnée fiable sur les exports massifs de déchets.
Par le principe de conventionnement obligatoire défendu dans cet amendement, nous souhaitons améliorer la traçabilité des flux de déchets et favoriser le traitement de proximité.
Cette disposition n'a pas pour but de remettre en cause l'existant vertueux. Nous lutterons ainsi contre les trafics illégaux. Je rends hommage au travail de Marta de Cidrac, qui connaît bien ces sujets, notamment l'insuffisante contractualisation.
Ce levier serait très puissant pour réorganiser les filières.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Cette mesure, non directement liée à la mode express, apporte une modification bienvenue. Je l'ai constaté lors des consultations que j'ai menées, ces mesures sont consensuelles. Avis favorable.
L'amendement n°115 est adopté.
L'article 2, modifié, est adopté.
Après l'article 2
M. le président. - Amendement n°108 rectifié de Mme Schillinger et alii.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. - Défendu.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Les dons de produits de la mode express sont un vrai problème. La surpression de la déduction d'impôt répond à la difficulté. Je m'interroge sur la faisabilité et l'impact sur l'équilibre économique de la filière REP de votre proposition ingénieuse. Qu'en dit le Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Avis défavorable sur cet amendement satisfait. Depuis fin 2023, en application de la loi Agec, il est interdit de mettre en décharge les invendus, qui doivent en priorité faire l'objet d'un réemploi et à défaut d'un recyclage. Les dons sont strictement encadrés. Si une structure de l'économie sociale et solidaire (ESS) accepte les produits dans leur totalité et qu'ils ne sont pas utilisés en totalité, ils deviennent des déchets, et l'éco-organisme est tenu de les reprendre. Votre amendement est pleinement satisfait.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Avis défavorable.
L'amendement n°108 rectifié est retiré.
Article 3 (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°83 de Mme Varaillas et du groupe CRCE-K.
Mme Marie-Claude Varaillas. - La publicité est l'un des moteurs de la consommation. Shein a investi plus de 43,8 milliards d'euros en publicité digitale en 2023 et Temu, 27,5 millions d'euros. Ils étaient les premiers diffuseurs digitaux en 2023. L'article 3 doit être rétabli dans sa rédaction initiale, afin de réduire significativement le nombre de ventes de vêtements.
M. le président. - Amendement n°9 rectifié ter de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Cet amendement réintroduit l'interdiction générale de la publicité pour les produits relevant de la mode éphémère. Une interdiction de la publicité pour des motifs environnementaux n'est pas, en soi, inconstitutionnelle ; elle doit être argumentée pour justifier sa pertinente et sa proportionnalité. Le rapport d'inspection interministériel de décembre dernier constitue une base de travail solide.
M. le président. - Amendement identique n°33 rectifié quinquies de Mme Housseau et alii.
Mme Marie-Lise Housseau. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°72 rectifié quater de M. Menonville et alii.
L'amendement n°72 rectifié quater n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°39 rectifié de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Nous souhaitons rétablir partiellement l'article 3. La question de la constitutionnalité a déjà été posée à l'Assemblée nationale. Selon la rapporteure, députée Horizons, la restriction à la liberté d'entreprendre était « justifiée par la nécessité de limiter la surproduction de produits textiles afin d'en limiter les conséquences pour l'environnement. » L'article 3 bis ne semble pas suffisant. Expliquez-nous : pourquoi l'Assemblée nationale se trompe-t-elle ?
M. le président. - Amendement n°76 rectifié de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Même objectif : nous souhaitons rétablir la disposition adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, mais supprimée, sans que l'on comprenne bien pourquoi, au Sénat. Nous demandons nous aussi des précisions à la rapporteure.
Chacun reconnaît le fléau qu'est l'ultra fast fashion. Pour mettre fin à ce modèle, il faut s'attaquer à son moteur : la publicité, dans l'espace numérique comme dans l'espace public. C'est une question de cohérence.
M. le président. - Amendement n°100 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cet amendement rétablit l'interdiction générale de publicité sur les médias classiques pour la mode ultra-éphémère. L'objectif est d'avoir un texte robuste. Il y a un risque d'inconstitutionnalité, mais il ne me semble pas si fondé quand on examine quel élément d'intérêt général vient justifier une réduction des marges de manoeuvre des acteurs économiques.
Près de sept Français sur dix se disent prêts à changer leurs pratiques d'achat de vêtements pour des raisons de respect de l'environnement. Mais les Français sont aussi exposés à l'omniprésence publicitaire, qui se chiffre en dizaines de millions d'euros, voire plus. Il y a une véritable volonté des Français de basculer vers un modèle plus durable, mais la pression publicitaire conduit à certains achats impulsifs, le plus souvent regrettés. Nous devons rééquilibrer les choses.
Les députés ont voté cette mesure à l'unanimité.
La directive e-commerce repose sur le pays d'origine : les plateformes en ligne sont soumises au droit local - le plus souvent l'Irlande pour les plateformes de vente. Un État membre de destination, par exemple la France, ne peut restreindre la circulation de services provenant d'un pays tiers comme l'Irlande que s'il y a un risque pour l'ordre public, la sécurité publique, la santé publique ou la protection des consommateurs. La protection de l'environnement n'est pas un motif de dérogation. Par ailleurs, il n'est pas possible de prévoir des mesures générales et abstraites à l'encontre de prestataires de services d'information établis dans un autre État membre.
Cependant, quelle stratégie adopter ? Nous allons notifier le texte à la Commission européenne avant la CMP ; ainsi, nous pourrons le rendre plus robuste. Surtout, le plus efficace est d'agir au niveau européen pour moduler la directive e-commerce, comme le suggère un récent rapport de l'IGF, de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) et de l'inspection générale des affaires culturelles (Igac).
Sous réserve de pouvoir mener ce combat à l'échelle européenne, je suis donc favorable à la réintroduction de cette interdiction.
Nous sommes David contre Goliath...
M. Loïc Hervé. - N'oubliez pas que c'est David qui gagne à la fin !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Nous devons agir au niveau français, et ainsi nous donner les moyens d'agir au niveau européen. S'il est défendu par tous les groupes, ce vote sera fort et entendu. Je ne mésestime pas les risques juridiques, mais nous faisons de la politique. Défendons nos valeurs de durabilité et de protection de l'environnement. (Mme Émilienne Poumirol, M. Michel Canévet et Mme Marie-Lise Housseau applaudissent.)
M. le président. - Amendement n°67 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°77 rectifié bis de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Cet amendement a trait à la protection de l'enfance. Nous voulons interdire la publicité pour la fast fashion lorsqu'elle est spécifiquement destinée à un public mineur de moins de 15 ans. Les comportements de consommation se forgent très tôt : agissons à la racine.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Les travaux préparatoires ont mis en lumière un risque d'inconstitutionnalité en cas d'interdiction totale de la publicité pour les produits de la mode express. Selon le Conseil constitutionnel, les mesures d'interdiction doivent rester en lien avec les objectifs de valeur constitutionnelle et la réduction portée à la liberté d'entreprendre doit être proportionnée.
Une interdiction générale pourrait être considérée comme portant atteinte de manière disproportionnée à la liberté d'entreprendre.
La loi Climat et résilience prévoyait deux interdictions de la publicité pour les énergies fossiles et les SUV. Quatre ans plus tard, les décrets d'application ne sont toujours pas parus, en raison - de l'aveu même du Gouvernement - de risques importants de contentieux.
L'article 3 bis propose autre chose.
Je ne veux pas jouer, je fais de la politique. Plutôt qu'une mesure symbolique soumise à des incertitudes juridiques, je préfère une mesure applicable immédiatement.
Avis défavorable à tous ces amendements.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Sagesse sur les amendements nos83, 9 rectifié ter, 33 rectifié quinquies, 39 rectifié et 76 rectifié, même si je vous invite à vous rallier à l'amendement gouvernemental. Sagesse aussi sur l'amendement n°67. Concernant l'amendement n°77, demande de retrait au profit de l'amendement n°100.
J'entends l'argument relatif au risque juridique. Si l'article 3 n'est pas rétabli, l'article 3 bis s'en trouve fragilisé, car il est totalement discriminatoire par rapport à toute une partie de la publicité. Nous risquons de déséquilibrer le texte.
Soit nous adoptons une position de repli, donc de faiblesse, soit nous affirmons quelque chose, en nous exposant à un risque juridique, mais en envoyant un message clair, démocratique et politique à la Commission européenne.
M. Thomas Dossus. - J'entends que vous ne vouliez pas de mesure symbolique, madame la rapporteure. Mais ce que vous proposez sur les influenceurs, c'est bien une mesure symbolique ! Ne pas généraliser l'interdiction de la publicité, c'est capituler devant ces marques.
La liberté d'entreprendre est certes constitutionnellement reconnue, mais elle n'est pas absolue : elle doit se concilier avec d'autres objectifs.
Comme Mme la ministre vient de le dire, s'il le faut, nous devons prendre le risque du contentieux. Si nous ne voulons pas promouvoir ce modèle, il faut en interdire la promotion.
Je constate qu'en matière d'immigration, par exemple, les écarts constitutionnels potentiels gênaient moins une certaine partie de l'hémicycle...
Mme Marta de Cidrac. - Merci à Mme la rapporteure pour ses explications, mais nous devons envoyer un signal fort. L'amendement n°100 est un bon amendement que nous devrions voter.
Je remercie la rapporteure d'avoir rappelé le précédent que nous avions connu dans le cadre de la loi Climat et résilience, mais je voterai l'amendement du Gouvernement.
M. Loïc Hervé. - Très bien !
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Je suivrai la rapporteure. Je ne souhaite pas prendre une décision sur laquelle il faudra revenir demain. L'article 3 bis vient rectifier les choses.
M. Sébastien Fagnen. - Que déplorons-nous depuis le début de l'examen de ce texte ? Une frénésie de consommation presque insoutenable.
Ne dévitalisons pas ce texte en retirant l'interdiction générale de la publicité. Si nous entendons toutefois les arguments de la rapporteure, nous devons mettre un coup d'arrêt à cette machine qui s'est emballée.
Interdisons donc purement et simplement la publicité pour la mode éphémère. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER ; Mme Antoinette Guhl applaudit également.)
M. Michel Masset. - Nous voterons aussi l'amendement du Gouvernement. Secouer le cocotier de l'Europe, cela me va bien !
M. Jacques Fernique. - À l'avenir, le levier de l'interdiction ou de la régulation de la publicité sera actionné, j'en suis persuadé. La messe ne sera pas dite ce soir : il y aura une CMP... Mais ce soir, le Sénat doit envoyer un signal clair.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Si nous ne rétablissons pas l'article 3, l'article 3 bis s'en trouvera fragilisé, car il discrimine clairement les influenceurs. L'inconstitutionnalité est ici beaucoup plus facile à établir que pour une interdiction qui vaut pour tous. (Mme Émilienne Poumirol acquiesce.)
En outre, le texte va faire l'objet d'une notification à la Commission européenne, avant que vous ne repreniez la main en CMP. Entretemps, nous devons peser dans le débat au niveau européen. Face à Goliath, David a besoin du maximum de leviers.
C'est un sujet majeur pour l'environnement, mais aussi pour nos territoires. Je n'aime pas voir ma ville se vider, un magasin après l'autre.
À la demande de la commission, l'amendement n°83 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°297 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 116 |
Contre | 224 |
L'amendement n°83 n'est pas adopté.
À la demande de la commission, les amendements identiques nos9 rectifié ter et 33 rectifié quinquies sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°298 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 334 |
Pour l'adoption | 149 |
Contre | 185 |
Les amendements identiques nos9 rectifié ter et 33 rectifié quinquies ne sont pas adoptés.
À la demande de la commission, l'amendement n°39 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°299 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Pour l'adoption | 116 |
Contre | 206 |
L'amendement n°39 n'est pas adopté.
À la demande de la commission, l'amendement n°76 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°300 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 321 |
Pour l'adoption | 116 |
Contre | 205 |
L'amendement n°76 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°100 est adopté et l'article 3 est ainsi rétabli.
(Applaudissements sur quelques travées du GEST)
L'amendement n°67 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°77 rectifié bis.
Après l'article 3 (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°87 de Mme Guhl et alii.
Mme Antoinette Guhl. - Cet amendement interdit toute publicité de fast fashion fabriquée en violation des droits fondamentaux des travailleurs - je pense particulièrement au travail forcé des Ouïghours. Nous devons sanctionner les entreprises qui tolèrent ces crimes.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je comprends l'intention, mais j'ai concentré mes travaux sur l'aspect environnemental. J'invite cependant le Sénat à travailler sur l'enjeu social. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°87 n'est pas adopté.
Article 3 bis
M. le président. - Amendement n°66 de M. Hingray.
L'amendement n°66 est retiré.
M. le président. - Amendement n°74 rectifié de M. Mandelli et alii.
M. Didier Mandelli. - Nous précisons que la publicité par les influenceurs est interdite, qu'elle soit à titre gracieux ou onéreux et quelle que soit la contrepartie - prêts de vêtements, voyages, etc. Heureusement que ce n'est pas en vêtements : vu les prix pratiqués par les influenceurs, cela ferait beaucoup de containers ! (Sourires)
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Cet amendement renforce la sécurité juridique : avis favorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°74 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°120 de Mme Valente Le Hir, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
L'amendement rédactionnel n°120, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°104 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Rédactionnel.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Cette restriction paraît cohérente et de nature à renforcer la sécurité juridique : avis favorable.
L'amendement n°104 est adopté.
M. le président. - Amendement n°101 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Cet amendement porte sur la sanction des influenceurs, qui jouent un rôle important dans la promotion de la mode ultra-éphémère, souvent à travers des contenus sponsorisés par les marques. La mode, secteur le plus promu sur Meta, représente 15 % de ses investissements publicitaires.
L'amendement prévoit aussi l'habilitation des agents de la DGCCRF.
La sanction envisagée - une amende administrative de 100 000 euros - est cohérente avec la loi Influenceurs concernant les produits financiers et les cryptomonnaies. Elle est également progressive par rapport à la sanction prévue pour non-apposition des mentions obligatoires de l'article 1er : 5 000 euros pour les personnes physiques, 15 000 pour les personnes morales.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Cette sanction est proportionnée et le contrôle est prévu : avis favorable.
Mme Marion Canalès. - La comparaison avec les sanctions prévues pour l'alcool me pose question : 75 000 euros seulement, alors que c'est 350 000 euros pour les pratiques commerciales trompeuses. On ne peut pas avoir des sanctions à géométrie variable, et faisons attention aux jeunes publics.
L'amendement n°101 est adopté.
M. le président. - Amendement n°102 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Nous supprimons une redondance avec la loi Climat et résilience. C'est de la coordination.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Faisons un parallèle : la restauration rapide est néfaste pour la santé publique ; pourtant la publicité pour ce type de restauration n'est pas interdite, un message avertit le consommateur.
Vous présentez cette mesure comme redondante avec l'obligation de faire figurer dans les publicités l'affichage environnemental, prévue par la loi Climat et résilience. Mais nous n'avons pas connaissance du calendrier d'application ni de certitude sur la validation par la Commission européenne.
Dans l'attente, par pragmatisme, prévoyons-le pour la mode express et nous serons heureux de supprimer ce dispositif lorsqu'il sera effectivement redondant.
J'attends beaucoup du décret d'application qui fixera les garanties contre le risque de greenwashing.
Avis défavorable.
L'amendement n°102 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°43 rectifié de Mme Espagnac et du groupe SER.
Mme Frédérique Espagnac. - Nous proposons d'enrichir le message d'information environnementale pour encourager les pratiques plus durables : seconde main et fabrication française. Le rôle des consommateurs est clé. Nous devons promouvoir un modèle économique circulaire, plus sobre et plus responsable.
M. le président. - Amendement identique n°68 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Défendu.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - La régulation est nécessaire pour que le consommateur fasse un choix éclairé. Le message que vous proposez complète opportunément celui qui est prévu et écarte le risque de greenwashing. Les entreprises de la mode express feront de la publicité pour la mode circulaire : c'est tout à fait l'esprit de cette proposition de loi.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Avis défavorable.
Les amendements identiques nos43 rectifié et 68 sont adoptés.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié bis de Mme Jouve et alii.
M. André Guiol. - Nous ajoutons un message à caractère environnemental en complément de l'information sur l'impact environnemental. Pour éviter tout greenwashing, il faut préciser que c'est parce que la marque relève de la mode éphémère qu'elle est contrainte d'afficher le coût environnemental de son produit.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Effectivement, il ne faudrait pas que les entreprises de la mode express paraissent plus vertueuses parce qu'elles affichent une information sur l'impact environnemental de leurs produits ! Mais les amendements nos43 rectifié et 68 évitent ce risque et le décret en Conseil d'État devra préciser que le message à caractère environnemental résulte d'une obligation légale. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°22 rectifié bis est retiré.
Mme Marion Canalès. - Dans de nombreux domaines, les influenceurs mettent au défi nos législations, notamment lorsqu'il s'agit de jeunes, vulnérables. Le marché du marketing de l'influence, c'est 13 milliards de dollars en 2021. Il faut aller vite, car demain les influenceurs, ce sera l'IA. Tout ce qui renforce la promotion de messages positifs - et non des messages normatifs sur ce que c'est d'être jeune - est bon à prendre. Nous voterons cet article.
L'article 3, modifié, est adopté.
Article 4
M. le président. - Amendement n°121 de Mme Valente Le Hir, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
L'amendement rédactionnel n°121, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 4, modifié, est adopté.
Article 5
M. le président. - Amendement n°105 du Gouvernement.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Nous améliorons la lisibilité de l'article du code de la consommation relatif à l'habilitation des agents de la DGCCRF.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Avis favorable.
M. Jacques Fernique. - Il ne me semble pas que cet article traite de l'habilitation de la DGCCRF pour le contrôle de la publicité.
L'amendement n°105 est adopté.
M. le président. - Amendement n°88 de Mme Guhl et alii.
Mme Antoinette Guhl. - Nous renforçons le droit à l'information des consommateurs, notamment sur le respect des droits humains sur toute la chaîne de fabrication. Aujourd'hui, un industriel peut refuser de communiquer sur ces sujets, s'il estime que cela pourrait compromettre ses intérêts. C'est inacceptable lorsque cela sert à dissimuler des conditions de production contraires à la dignité humaine.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je comprends l'intention, mais l'exclusion de toutes les entreprises textile serait une atteinte lourde au secret des affaires, qui pourrait être utilisée par des entreprises concurrentes malintentionnées. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°88 n'est pas adopté.
L'article 5, modifié, est adopté.
L'article 6 est adopté.
Après l'article 6
M. le président. - Amendement n°69 de M. Hingray.
M. Jean Hingray. - Cet amendement complète l'approche régulatrice de la proposition de loi par une action éducative en amont. Il faut former les jeunes à comprendre les impacts du textile sur l'environnement, en insérant la mode écoresponsable dans l'éducation au développement durable prévu dans le code de l'éducation. Sans coercition ni stigmatisation, favorisons des changements de comportements, pour une écologie populaire et inclusive. (M. Loïc Hervé applaudit.)
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je vous remercie pour cet amendement utile qui prévoit une sensibilisation à ces questions pour lutter à long terme contre les pratiques néfastes : nos enfants sont nos meilleurs ambassadeurs. Avis favorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - J'attends de l'école qu'elle apprenne aux enfants à lire, écrire, compter, résoudre des problèmes et exercer leur esprit critique.
Le développement durable est important, en particulier lorsque certains pays remettent en cause la science sur ces sujets. Mais sagesse néanmoins, car vous entrez dans un niveau de précision excessif.
M. Max Brisson. - J'ai suivi la totalité de vos avis, madame la rapporteure, mais je ne suivrai pas celui-ci.
L'amendement de Jean Hingray remplace le conseil supérieur des programmes. Soyons un peu sérieux : le code de l'éducation, loi après loi, devient obèse. Il parle déjà suffisamment de développement durable. Laissons le conseil supérieur des programmes faire son travail.
M. Jean Hingray. - Nous avons eu ce débat avec Max Brisson. Mais ma proposition est une impulsion bienvenue.
M. Max Brisson. - Protégez le code de l'éducation !
L'amendement n°69 est adopté et devient un article additionnel.
(M. Loïc Hervé applaudit.)
Article 7
M. le président. - Amendement n°89 de Mme Guhl et alii.
Mme Antoinette Guhl. - Cet amendement demande une vigilance particulière sur les droits humains dans la filière textile.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'impact de la mode express sur les droits humains nous inquiète tous et renforce notre détermination à la réguler. Notre proposition de loi s'est concentrée sur les impacts environnementaux, mais le rapport demandé au Gouvernement pourrait servir de base à des travaux futurs : avis favorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Oui, l'ultra fast fashion a un impact social dans les pays de fabrication. Mais nous parlons ce soir de l'impact environnemental, plus mesurable et transparent que l'impact social. Je comprends vos intentions, mais cet amendement n'est pas opérant. Avis défavorable.
L'amendement n°89 est adopté.
(Mme Antoinette Guhl applaudit et fait un geste de victoire.)
L'article 7, modifié, est adopté.
Après l'article 7
M. le président. - Amendement n°113 rectifié quater de M. Rochette et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Près de 800 millions de petits colis arrivent en France chaque année ; 7 milliards dans toute l'Europe... Des dispositions sont en cours d'élaboration au plan européen, mais faisons de la politique, en instaurant une taxe de 2 à 4 euros sur ces colis livrés à des personnes physiques, taxe redevable par les places de marché et portails établis hors de l'Union européenne.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Une telle taxation est en cours de négociation à l'échelle européenne, à l'initiative de la France et notamment de la ministre Véronique Louwagie. Mais nous ne pouvons instaurer de taxation nationale. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis. Les ministres Lombard, Montchalin et Louwagie ont obtenu de la Commission européenne qu'elle présente une initiative visant à taxer les petits colis, avec un tarif de 2 euros comme entrée en négociation. Laissons les négociations se poursuivre. L'adoption d'une telle disposition serait vue comme agressive par la Commission européenne.
L'amendement n°113 rectifié quater est adopté et devient un article additionnel.
Intitulé de la proposition de loi
M. le président. - Amendement n°16 rectifié quater de Mme Jouve et alii.
M. André Guiol. - Cet amendement vise à renommer la proposition de loi pour que son intitulé corresponde davantage à son objet : « proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de la mode ultra-express », car ce texte ne s'adresse pas à toute l'industrie textile.
Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Il s'agit effectivement de pénaliser la mode express, mais cela aura un effet considérable sur l'impact environnemental de l'industrie textile. L'intitulé de la proposition de loi me paraît donc approprié. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Même avis.
L'amendement n°16 rectifié quater est retiré.
M. le président. - Les explications de vote et le vote par scrutin public se dérouleront mardi 10 juin 2025, à 14 h 30.
M. Jean-François Longeot, président de la commission. - Je remercie et félicite la rapporteure pour son premier rapport, un travail important réalisé dans des conditions difficiles.
Un regret, toutefois, à l'article 2 : l'introduction d'une obligation supplémentaire, qui pèsera sur toutes nos entreprises françaises et européennes et qui est contraire à notre objectif de simplification.
Je me félicite de l'adoption de l'article 3, mais j'espère qu'il ne connaîtra pas le sort des dispositions de la loi Climat et résilience relatives à l'interdiction de la publicité pour les SUV et les énergies fossiles, qui ne sont toujours pas en vigueur... (Applaudissements)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. - Je vous remercie pour la qualité de nos débats, qui ont fait évoluer le texte d'une façon différente que celle que nous envisagions initialement.
Ce texte est ambitieux et constitue un bon point de départ, même s'il faudra d'autres leviers d'action : au niveau des douanes, de la loyauté commerciale, de la taxation des colis, de la régulation des réseaux, etc.
Je ne crois pas que l'article 2 complexifie : c'est une possibilité supplémentaire, sur la base du volontariat.
Je ne serai pas là pour le vote solennel, étant à la Conférence des Nations unies de Nice, mais Véronique Louwagie sera présente. (Applaudissements)
Prochaine séance aujourd'hui, mardi 3 juin 2025, à 14 h 30.
La séance est levée à minuit dix.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du mardi 3 juin 2025
Séance publique
À 14 h 30 et le soir
Présidence : M. Alain Marc, vice-président, M. Pierre Ouzoulias, vice-président, M. Loïc Hervé, vice-président
Secrétaires : Mme Catherine Conconne, Mme Marie-Pierre Richer
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réformer le mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (n°532, 2024-2025)