SÉANCE

du mardi 4 novembre 2025

10e séance de la session ordinaire 2025-2026

Présidence de M. Alain Marc, vice-président

La séance est ouverte à 9 h 30.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Numerus clausus pour la profession d'orthophoniste

Mme Catherine Morin-Desailly .  - Avec une moyenne de trente professionnels pour 100 000 habitants, la pénurie d'orthophonistes est grave et quasi généralisée ; les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous sont parfois d'un voire deux ans. En janvier 2023, le ministère de la santé a fait de l'augmentation des places en formation initiale une priorité, pour autant le numerus clausus ne répond pas aux besoins. S'y ajoute le manque de moyens alloués aux centres de formation.

Pourtant, certaines collectivités, comme la région Normandie dont je suis une élue, mettent en place une politique volontariste : le numerus clausus est ainsi passé de 35 à 40 places pour les centres de formation de Rouen et de Caen lors de la dernière rentrée, mais cette évolution positive est encore loin de répondre aux besoins du territoire.

Le nombre maximal d'étudiants admis en première année est fixé par les ministères de la santé et de l'enseignement supérieur tous les ans.

Quelles sont les raisons d'un tel blocage ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Depuis quinze ans, le nombre d'orthophonistes en exercice a augmenté de 19 000 à 25 000. Toutefois, des difficultés d'accès aux soins persistent dans tous les territoires et de fortes disparités sont constatées avec 75 % des orthophonistes exerçant en zone urbaine.

Aussi, nous souhaitons augmenter le nombre d'orthophonistes formés. Le nombre de places offertes sur Parcoursup a dépassé les 1 000 étudiants, soit une progression de 28 % en dix ans. La proposition de loi d'Agnès Firmin-Le Bodo, adoptée à l'Assemblée nationale il y a quelques mois, vise à porter les effectifs à former chaque année à près de 1 500 personnes d'ici à 2030.

Avec le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Philippe Baptiste, nous voulons renforcer la formation. Depuis deux ans, les acteurs sont libres de déterminer le nombre de places offertes en fonction des besoins. Avec plusieurs universités, nous oeuvrons à créer de nouveaux centres de formation, comme celui de La Réunion en 2026 et nous créons de postes universitaires.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Débloquons cette situation intolérable !

Identification des intercommunalités vulnérables en matière d'accès aux soins

M. Hervé Maurey .  - Le 27 juin dernier, le Gouvernement a publié la liste des 151 intercommunalités prioritaires censées bénéficier de médecins généralistes dans le cadre de la mission de solidarité obligatoire pour lutter contre les déserts médicaux. Or, alors que l'Eure est un des départements les moins dotés en médecins, ce dont votre prédécesseur, Yannick Neuder, convenait ici même en mai dernier, aucune intercommunalité du département n'y figure...

Cette situation ubuesque résulte des critères absurdes retenus pour le zonage, comme le niveau de vie de la population. Le Gouvernement compte-t-il le revoir ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - En avril dernier, le pacte de lutte contre les déserts médicaux a été déployé : chaque médecin pourra travailler jusqu'à deux jours par mois dans une zone prioritaire. En juin 2025, le ministère de la santé a identifié les 151 premières intercommunalités jugées particulièrement vulnérables selon des critères objectifs comme la densité médicale, le niveau de vie ou l'état de santé de la population.

Cela ne veut pas dire que votre département n'est pas un désert médical ou qu'il ne doit pas bénéficier de mesures de solidarité à l'avenir. Depuis début septembre, ce dispositif démarre, sur la base du volontariat.

En outre, le Premier ministre a annoncé le déploiement du réseau France Santé d'ici à 2027, pour offrir à chaque Français une solution de santé à moins de trente minutes de chez lui et un rendez-vous médical dans les 48 heures ; chaque structure sera soutenue à hauteur de 50 000 euros.

M. Hervé Maurey.  - Comment pouvez-vous soutenir que certains départements ont des besoins plus importants alors que l'Eure figure parmi les trois derniers en matière de présence médicale ? Si je comprends bien, il n'est pas envisagé de modifier la carte établie... La situation est bloquée. Depuis vingt ans, les gouvernements n'osent pas prendre de mesures courageuses. Les maisons France Santé sont une bonne chose, mais ne régleront rien sans médecin à y affecter.

?Situation des Padhue

Mme Marianne Margaté .  - Notre pays externalise les coûts de formation des médecins pour importer à bas coût une main-d'oeuvre médicale qualifiée, tout en organisant la pénurie par le numerus clausus et désormais le numerus apertus.

Dans ce cadre, les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) occupent souvent des postes précaires et sous-rémunérés, effectuent des gardes mal payées et vivent dans des conditions difficiles. Ils ne peuvent être titularisés rapidement en raison de procédures opaques et stigmatisantes, tandis que le renouvellement de leur titre de séjour est incertain.

Au 1er janvier 2024, selon l'Ordre des médecins, 17 619 Padhue exerçaient en France, soit 7,5 % des médecins inscrits. En Seine-et-Marne, l'injustice est à son comble : le Trésor public réclame à cinquante d'entre eux le remboursement de 2,7 millions d'euros de primes versées par le Grand hôpital de l'Est francilien (GHEF). Il faut prévoir des moyens dans le prochain PLFSS pour mettre fin à cette situation ubuesque, mais aussi régulariser les Padhue exerçant depuis plusieurs années !

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour favoriser l'accueil des Padhue.

Le nombre de lauréats admis a augmenté : 4 000 postes ont été ouverts au concours en 2024 et 4 440 le seront cette année. Un travail est en cours pour définir des statuts précis. La loi Valletoux a ainsi créé une attestation d'exercice provisoire et le statut de praticien associé contractuel temporaire (PACT), autorisant le recrutement des Padhue titulaires d'une telle attestation.

Pour la première fois cette année, le concours comportera une voie interne simplifiée permettant l'évaluation des connaissances des Padhue déjà en poste. La ministre de la santé souhaite transformer ce concours en examen, disposition déjà adoptée par le Sénat en mai dernier dans le cadre de la proposition de loi Mouiller.

L'accompagnement des Padhue durant le parcours de consolidation des compétences après la réussite au concours est amélioré.

Mme Marianne Margaté.  - Espérons une application rapide de ces mesures. La situation du GHEF révèle la misère de l'hôpital public et l'exploitation qui est faite des Padhue.

?Délais de traitement des demandes de retraite pour les Français établis hors de France

M. Yan Chantrel .  - La France a signé des conventions internationales afin que les Français établis hors de France puissent jouir de leurs droits acquis en France et dans leur pays de résidence, mais les délais de traitement des dossiers sont longs.

Ainsi, ils doivent activer leurs droits à la retraite dans leur pays de résidence six mois avant de partir ; les pays de résidence mettent un à trois mois pour traiter leur demande, puis la transmettre à la France ; un délai de vingt-quatre mois est alors nécessaire avant de toucher leur pension de retraite.

Cette attente inadmissible plonge une partie de nos compatriotes dans la précarité ; ils doivent souvent continuer leur activité professionnelle sans acquérir de nouveaux droits à la retraite.

La charge de travail supportée par les services de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) sans moyens supplémentaires explique ces délais. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Jean-Pierre Farandou, qui lance la conférence travail-retraites avec les partenaires sociaux.

Le régime général oeuvre à l'amélioration des délais de traitement de l'ensemble des demandes des assurés, mais avec un objectif spécifique pour ceux qui résident à l'étranger : 75 % des demandes devront être traitées en moins de 120 jours d'ici à 2027. S'y ajoutent des cibles annuelles et un objectif de 35 000 dossiers déstockés à la fin de cette année.

Les spécificités de ces dossiers internationaux peuvent allonger les délais de traitement. Une réflexion a donc été lancée pour automatiser certaines tâches. La Cnav a aussi pris des mesures pour améliorer la qualité des échanges.

M. Yan Chantrel.  - Donnons à la Cnav des moyens supplémentaires pour remplir cet objectif !

Mandataires judiciaires à la protection des majeurs exerçant à titre individuel

M. Hugues Saury .  - En France, on recense 800 000 mesures de protection juridique, dont la moitié est assurée par les familles. Or 40 % des 400 000 mesures restantes sont prises en charge par 2 300 mandataires indépendants, qui jouent un rôle essentiel.

Leur charge de travail augmente, tandis que leur rémunération est gelée depuis plus de dix ans. La Fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs (FNMJI) demande, à juste titre, sa réindexation sur le Smic et l'allocation aux adultes handicapés (AAH), comme avant 2014.

Au-delà, l'absence totale de dispositif de remplacement en cas d'indisponibilité temporaire de ces mandataires crée un risque grave de rupture dans la prise en charge des personnes protégées.

Selon la réponse ministérielle du 8 mai dernier de votre prédécesseur, une réforme du financement du secteur était envisagée. Où en est-on ? Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Le Gouvernement reconnaît l'engagement des mandataires judiciaires et la nécessité de leur offrir des conditions d'exercice à la hauteur de leurs responsabilités. Près de 10 000 professionnels assurent chaque année plus de 530 000 mesures de protection.

Le Gouvernement est conscient des attentes en matière de rémunération. Les travaux en cours doivent aboutir d'ici à la fin de l'année pour mieux évaluer la charge de travail et le modèle économique des mandataires individuels comme des services mandataires.

Toute évolution de la tarification devra s'inscrire dans une approche globale, équilibrée et soutenable, et concilier reconnaissance du travail accompli et viabilité du dispositif à moyen terme, car le nombre de personnes à protéger augmentera dans les années à venir, compte tenu du vieillissement de la population.

Enfin, une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale pour moderniser et simplifier la protection juridique des majeurs traite du remplacement des mandataires.

M. Hugues Saury.  - Les mandataires judiciaires exerçant à titre individuel attendent des engagements concrets et un calendrier clair. Leur rôle mérite une reconnaissance à la hauteur de leur mission d'intérêt public.

Présence d'hexane dans les denrées alimentaires

Mme Anne Souyris .  - Il y a de l'essence dans nos assiettes : de l'hexane, solvant dérivé de la pétrochimie. L'ouvrage de Guillaume Coudray et l'enquête de Greenpeace ont révélé sa présence dans les huiles de colza et de tournesol, dans le poulet, voire dans le lait infantile ? pas moins de 64 % de nos assiettes sont contaminées.

Pourtant, cette substance, reconnue neurotoxique et classée cancérogène par l'Agence européenne des produits chimiques, n'est pas considérée comme ingrédient alimentaire ; sa présence n'est donc pas notifiée. Les limites maximales de résidus ont été fixées en 1996 à partir de données industrielles. L'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a reconnu l'insuffisance de ses propres données. Aussi, ces limites maximales ne protègent pas des risques sanitaires.

En France, aucune valeur toxicologique de référence n'existe pour l'ingestion d'hexane, scandale ! Construisons une politique de santé environnementale ambitieuse : l'hexane est le symptôme d'un système malade où la santé humaine et la terre sont toutes deux contaminées.

Qu'attendez-vous pour saisir la Commission européenne, établir une valeur toxicologique claire et informer les consommateurs de façon transparente, voire interdire cette substance ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Les ministères de la santé et de l'agriculture suivent ce dossier depuis plusieurs années. L'hexane est effectivement un solvant potentiellement nocif, pouvant provoquer des troubles neurologiques ou de la fertilité. Son utilisation, notamment pour l'extraction des huiles végétales, est autorisée par la réglementation européenne, qui fixe des seuils stricts de résidus dans les aliments. La responsabilité première revient aux industriels, garants de la sécurité des aliments, conformément au paquet Hygiène. En 2013, l'Anses a évalué les risques liés à l'inhalation d'hexane, mais aucune évaluation n'a encore été menée sur la présence d'hexane dans les aliments. En 2024, l'Efsa a demandé une nouvelle évaluation. La Commission européenne a mandaté une expertise en 2025. L'Efsa a lancé un appel à données ouvert jusqu'au 12 décembre 2025. Nous suivrons de près ces travaux.

Remboursement des cures thermales

M. Jean-Claude Anglars .  - Dans le cadre du plan d'économies présenté en juillet 2025, est prévu un projet de décret visant à limiter à 65 % le remboursement des cures thermales pour les patients atteints d'affections de longue durée (ALD), contre 100 % aujourd'hui.

Cette mesure, si elle entrait en vigueur au 1er février 2026, ferait peser un reste à charge d'environ 200 euros sur des patients déjà vulnérables. C'est une atteinte grave à une médecine préventive reconnue.

Or le coût annuel des cures - environ 350 millions d'euros - ne représente que 0,1 % du budget de l'assurance maladie. Or le thermalisme, ce sont 25 000 emplois et 4,5 milliards d'euros de retombées économiques.

À Cransac-les-Thermes, en Aveyron, 4 000 curistes sont accueillis chaque année, pour des pathologies chroniques. L'établissement emploie 36 salariés permanents et plus de 15 saisonniers.

Cette mesure mettrait en péril une activité essentielle pour l'économie locale. Quelle est la position du Gouvernement ? Allez-vous maintenir le remboursement intégral des cures pour les patients en ALD ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - La France est l'un des derniers pays de l'OCDE à rembourser les cures thermales. Compte tenu des contraintes qui pèsent sur la sécurité sociale et du dérapage des dépenses constaté cette année, le Gouvernement s'interroge sur la pertinence du maintien intégral de ce financement.

La Cour des comptes a recommandé le déremboursement, en soulignant l'absence d'évaluation scientifique. Mais ce n'est pas ce que nous proposons. Deux mesures sont envisagées : ramener le remboursement des patients en ALD à 65 %, comme les autres patients, et abaisser à 50 % le taux de prise en charge des forfaits thermaux. Cela entraînerait 200 millions d'euros d'économies.

Ce n'est pas un déremboursement, mais une révision du niveau de remboursement. Le reste pourra être pris en charge par les complémentaires santé. Nous savons aussi que cette question touche à la vitalité des territoires thermaux, qui devront être accompagnés.

M. Jean-Claude Anglars.  - Je vous invite à mesurer les effets budgétaires de cette économie de court terme et à venir à Cransac-les-Thermes pour comprendre la situation.

Désertification pharmaceutique

M. Christophe Chaillou .  - L'arrêté du 4 août 2025 prévoyait une baisse progressive du plafond des remises commerciales accordées aux pharmaciens sur les médicaments génériques, passant de 40 % à 30 % au 1er septembre, puis à 25 % en 2026 et à 20 % en 2027.

Cette mesure, très contestée, aurait fragilisé l'équilibre économique de nombreuses officines, notamment en zones rurales et périurbaines. Élu du Loiret, je suis interpellé par de nombreux maires à ce sujet.

Les syndicats estiment que ces ristournes représentent jusqu'à 30 % de l'excédent brut d'exploitation des pharmacies. Leur diminution brutale aurait pu provoquer la fermeture de 3 000 à 4 000 officines.

Face à la mobilisation, le Gouvernement a suspendu la mesure pour trois mois par arrêté du 7 octobre, rétablissant temporairement le plafond à 40 %. Ce premier pas ne suffit pas. Une reprise de la baisse au 1er janvier 2026, même différée, fragiliserait de nouveau les officines.

Allez-vous pérenniser cette suspension pour garantir la stabilité économique des pharmacies, maintenir leur présence sur tout le territoire et préserver la dynamique de promotion du médicament générique ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Fin septembre, le Premier ministre s'est engagé à suspendre l'arrêté pour une durée minimale de trois mois. Il s'est aussi engagé à poursuivre le déploiement des nouvelles missions de santé publique confiées aux pharmaciens et à lancer une mission d'inspection sur les flux financiers de la chaîne du médicament, pour plus de transparence.

Les conclusions de cette mission, déjà engagée, nourriront le dialogue avec la profession sur l'évolution de ses compétences et de son modèle économique. Si cette mission devait se prolonger, un nouvel arrêté serait pris : la ministre Stéphanie Rist s'y engage.

D'autres mesures sont prévues dans le PLFSS 2026 : soutien aux biosimilaires, création de pharmacies dans les communes de moins de 2 500 habitants. La réforme du troisième cycle des études de pharmacie renforcera l'attractivité de la profession. Le Gouvernement maintiendra un dialogue soutenu avec les pharmaciens.

M. Christophe Chaillou.  - Nous y veillerons. La mission d'inspection soulève des interrogations : parfois les propositions sont peu adaptées aux territoires. Nous avons besoin de pharmacies de proximité. Je ne doute pas que M. Saury s'associe à ma question et que Mme Rist, élue du Loiret, y sera attentive.

Traitement de l'hypercholestérolémie

M. Jean-François Longeot .  - J'appelle votre attention sur les conséquences pour les patients de la pénurie du Repatha et du Praluent, médicaments utilisés dans le traitement de l'hypercholestérolémie et de pathologies cardiovasculaires graves. De nombreux patients ne peuvent plus suivre leur traitement, faute de disponibilité en pharmacie. Cette situation crée une grande inquiétude. Certains, dans le Doubs, se voient contraints d'aller en Suisse pour se procurer ce traitement vital !

Quelles mesures sont prévues pour garantir leur approvisionnement rapide et sécurisé ? Existe-t-il des alternatives efficaces ? Les traitements achetés à l'étranger sont-ils remboursables ? Quelles actions durables envisagez-vous pour prévenir ces pénuries ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Ces médicaments font effectivement l'objet de tensions d'approvisionnement. La situation s'est améliorée depuis le printemps, grâce à nos échanges avec les acteurs concernés. Dans 80 % des cas, des alternatives thérapeutiques efficaces, disponibles et remboursées existent. Nous suivons de près les 20 % des patients restant sans solution.

Une négociation avec les industriels a permis de sécuriser 20 % de produits supplémentaires d'ici à la fin de l'année.

Deux causes principales expliquent cette pénurie : une production mondiale insuffisante et une baisse des volumes livrés à la France, malgré un accord passé. Ce choix économique est inacceptable. Nous avons engagé de nouvelles discussions pour sécuriser l'approvisionnement.

La prise en charge par l'assurance maladie des traitements achetés à l'étranger est possible, dans les conditions de prescription et de remboursement françaises, ce qui peut entraîner un reste à charge pour les patients.

M. Jean-François Longeot.  - Votre réponse va dans le bon sens, mais je reste inquiet. On a compensé la rupture du Praluent par le Repatha, qui est désormais lui aussi en rupture. Si mes informations sont exactes, c'est bien le prix plus élevé en Suisse - 770 francs suisses contre 250 euros en France - qui pousse les laboratoires à privilégier ce marché, au détriment des patients français ; ils se moquent du monde !

Consultations bucco-dentaires des personnes en situation de handicap

Mme Jocelyne Guidez .  - Signée en juillet 2023, la convention nationale des chirurgiens-dentistes libéraux 2023-2028 vise à améliorer l'accès aux soins des publics les plus fragiles. Elle prévoit notamment la création d'un acte remboursé de séances d'habituation pour familiariser les patients handicapés à l'environnement du cabinet dentaire, la valorisation du bilan bucco-dentaire à l'entrée en établissement médico-social, et la reconnaissance des actes réalisés hors les murs.

Ces mesures répondent aux recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), qui insiste sur la nécessité d'un suivi régulier. Pourtant, certaines structures limitent les consultations à une tous les deux ans, même en cas de besoin identifié, contraignant les familles à solliciter des prescriptions médicales intermédiaires.

Quelles sont les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions ? Quelles consignes ont été données aux structures et aux caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) pour garantir leur effectivité sur l'ensemble du territoire, notamment dans les centres dentaires ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - L'accès aux soins des personnes en situation de handicap reste trop souvent difficile. De trop nombreux patients renoncent encore aux soins bucco-dentaires, pourtant essentiels.

Depuis la signature de la convention signée par l'assurance maladie et les représentants des chirurgiens-dentistes, les CPAM en accompagnent la mise en oeuvre via des campagnes de communication, des webinaires, des visites individuelles menées par les délégués de l'assurance maladie pour faire connaître ces nouveaux dispositifs.

En mai dernier, avec l'ancien ministre de la santé Yannick Neuder, nous avons lancé une mission sur la santé des personnes en situation de handicap. Ses conclusions, attendues prochainement, permettront d'améliorer l'accessibilité de notre système de santé. Il faut souligner qu'une multitude d'initiatives existent dans nos territoires ; elles méritent d'essaimer. Avec Mme Rist, nous serons attentives aux conclusions de la mission.

Le prochain comité interministériel du handicap traitera justement de l'accès à la santé des personnes en situation de handicap.

Mme Jocelyne Guidez.  - J'attends ces conclusions avec impatience, car les soins bucco-dentaires pour les personnes handicapées ne sont pas à la hauteur.

Instabilité de la politique de rénovation énergétique

M. Guislain Cambier .  - La cohérence et la stabilité de la politique de rénovation énergétique interrogent, notamment en matière d'isolation.

Un décret du 8 septembre dernier relatif à MaPrimeRénov' prévoit la suppression, au 1er janvier prochain, de l'aide à l'isolation des murs dans le parcours par geste. Pourtant, l'Ademe évalue les déperditions thermiques par les murs à 25 %. En outre, cette décision a été prise contre l'avis du Conseil national de l'habitat.

Le message économique est préoccupant : le stop and go des aides publiques, avec notamment une reprise timide du parcours « rénovation d'ampleur » jusqu'à la fin de l'année, met en péril de nombreuses entreprises. Quant au message politique, il est dangereux : en décrédibilisant l'isolation au profit d'une électrification massive, vous ne réduisez pas les factures énergétiques et pérennisez des logements insalubres.

Pouvez-vous clarifier votre vision de la rénovation énergétique et nous indiquer quelles mesures immédiates vont être prises pour réintégrer l'isolation des murs dans le dispositif MaPrimeRénov' ?

M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du logement .  - Oui, les acteurs économiques ont besoin de stabilité et de visibilité. Le stop and go subi cette année ne doit en aucun cas se reproduire.

La modification du coefficient de conversion d'énergie primaire pour l'électricité dans le DPE était nécessaire. Il n'était pas cohérent, alors que nous avons une production électrique décarbonée, de ne pas renforcer le vecteur électrique dans ce calcul : nos radiateurs électriques n'ont pas la même incidence sur le climat que ceux utilisés dans d'autres pays.

La réouverture du guichet pour les rénovations d'ampleur est un vrai succès, avec 6 000 dossiers déposés en quelques jours, signe d'une attente forte. Elle s'accompagne de nouvelles modalités visant à mieux cibler les aides, désormais concentrées sur les passoires thermiques et les gestes les plus efficaces. Par ailleurs, les plafonds de travaux sont adaptés pour correspondre aux besoins des professionnels.

L'isolation des murs peut être prise en compte dans le cadre d'une rénovation d'ampleur. En revanche, elle n'est plus comprise dans le parcours par geste, en tout cas pour les deux mois prévus pour la réouverture. La discussion avec l'Agence nationale de l'habitat sera rouverte pour 2026. Nous devons veiller à la fois à l'efficacité de nos politiques publiques et à l'efficience de l'accompagnement des ménages.

Nous maintiendrons les moyens consacrés à la rénovation énergétique des logements à un niveau élevé.

M. Guislain Cambier.  - Je me réjouis que la discussion soit remise sur le métier. Les modalités doivent être les plus logiques possible. Or la meilleure énergie est celle qu'on ne consomme pas : mieux vaut isoler que produire !

Entretien du viaduc de Morlaix

M. Jean-Luc Fichet .  - Le viaduc ferroviaire de Morlaix, propriété de SNCF Réseau, est inscrit à l'inventaire des monuments historiques depuis 1975. Symbole de la « cité du viaduc », son encrassement altère fortement l'image du centre-ville et dégrade la valeur patrimoniale de ce site emblématique du Finistère.

Si la responsabilité de SNCF Réseau en matière de sécurité et de maintenance structurelle ne fait aucun doute, l'entreprise estime ne pas être tenue à un entretien esthétique. Alors que le dernier nettoyage du viaduc remonte à 1989, la Ville de Morlaix s'est déclarée prête à assumer la maîtrise d'ouvrage déléguée pour une telle opération. Hélas, les discussions sont dans l'impasse.

Au regard de l'article L. 621-29-1 du code du patrimoine, quelles sont les obligations de SNCF Réseau en tant que propriétaire d'un monument historique inscrit ? Peut-on lui imposer un nettoyage ou un ravalement lorsque l'apparence du monument est manifestement dégradée et porte atteinte à sa valeur patrimoniale ainsi qu'à la perception du public ? S'agissant du viaduc de Morlaix, l'État compte-t-il demander à SNCF Réseau de nettoyer et vérifier la totalité du système, ainsi que la sécurité de l'édifice, notamment pour les passants du centre-ville ?

M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du logement .  - Philippe Tabarot m'a chargé de vous répondre.

Le viaduc ferroviaire de Morlaix est en effet inscrit au titre des monuments historiques depuis 1975. À la demande de la mairie, SNCF Réseau a mené sur fonds propres une évaluation du coût d'un nettoyage, qui se monterait à 600 000 euros.

SNCF Réseau ne dispose pas d'une enveloppe spécifique pour traiter les aspects esthétiques de son patrimoine, et l'inscription d'un ouvrage n'impose pas au propriétaire des travaux esthétiques. Aucune obligation légale ne pèse donc sur SNCF Réseau en la matière.

Toutefois, les services de l'État et de SNCF Réseau seront facilitateurs pour réaliser le nettoyage de cet ouvrage dans le cadre du bouclage de financement d'une opération dont la maîtrise d'ouvrage pourrait être assurée par la mairie de Morlaix, dans le respect des conditions de sécurité et d'intervention des entreprises ferroviaires.

M. Jean-Luc Fichet.  - Au-delà de son apparence, c'est l'état général du viaduc qui est en cause. Un monument de ce type qui n'est pas régulièrement entretenu se dégrade, et les réparations nécessaires deviennent de plus en plus coûteuses. Voyez le pont de Laroche-Tolay : faute d'entretien, il n'était pas réparable. À Morlaix, il faut agir rapidement et massivement !

Simplification de la réglementation sur l'entretien des cours d'eau

Mme Elsa Schalck .  - La réglementation relative à l'entretien des cours d'eau pose des difficultés à nombre de communes.

L'entretien régulier des cours d'eau réduit la gravité des crues. Face au changement climatique, la prévention des inondations est un défi auquel les communes seront de plus en plus confrontées. Nous le savons, la responsabilité de la collectivité, voire du maire, peut être engagée.

En 2024, la mission d'information du Sénat sur l'adaptation des territoires face aux inondations a dressé un constat implacable : la complexité des règles de prévention des inondations et de gestion des cours d'eau est excessive. Les élus sont soumis à des prescriptions trop nombreuses, relevant de différents régimes juridiques. Ils ne sont pas incités à agir, par peur de commettre une infraction.

Les élus attendent une meilleure information, un conseil éclairé et, surtout, une simplification. Comment comptez-vous les accompagner ?

M. Mathieu Lefèvre, ministre délégué chargé de la transition écologique .  - C'est vrai, les communes sont en première ligne pour la gestion des inondations.

La réglementation impose aux riverains un entretien régulier des cours d'eau non soumis à une procédure au titre de la loi sur l'eau. L'État encadre par une procédure d'autorisation ou de déclaration les interventions plus lourdes. Quant aux collectivités, compétentes en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, elles peuvent mener des opérations groupées, notamment en cas de défaut d'entretien.

Simplifier les règles pour les collectivités, mon ministère y est tout disposé. Il propose depuis fin 2024 une feuille de route pour clarifier la réglementation. Un guide pédagogique sur l'entretien des cours d'eau est en cours d'élaboration : vous pourrez faire partie du groupe de travail, si vous le souhaitez.

Enfin, dans le cadre de la proposition de loi de MM. Rapin et Roux visant à soutenir les collectivités territoriales dans la prévention et la gestion des inondations, adoptée par votre assemblée, le Gouvernement a proposé des simplifications procédurales en matière de déclaration d'intérêt général.

Ventilation du fonds friches

M. Christian Redon-Sarrazy .  - Le fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires, dit fonds vert, a été créé en 2022 pour soutenir des investissements locaux favorisant la performance environnementale, l'adaptation au changement climatique et l'amélioration du cadre de vie. Sa gestion est aux mains des préfets et ses enveloppes sont fongibles entre les différentes mesures proposées. Il est salué par les acteurs locaux comme un outil très performant.

Un quota de financements est destiné à la réhabilitation des friches industrielles, une démarche souvent onéreuse pour les communes. Mais la ventilation de ces fonds manque de clarté. Les critères d'attribution et le pouvoir discrétionnaire des préfets contribuent à l'opacité. En outre, les délais d'attente sont souvent longs pour les collectivités.

À combien se montent les crédits consacrés à la réhabilitation des friches au sein du fonds vert ? Quelle part est-elle fléchée vers les projets des communes ?

M. Mathieu Lefèvre, ministre délégué chargé de la transition écologique .  - Merci de saluer cet outil destiné à financer des projets de transition écologique menés par les acteurs locaux.

Les fonds sont répartis entre préfectures de région en vue d'une gestion déconcentrée. Les projets sont sélectionnés au niveau local et les préfectures peuvent répartir les crédits par mesures en fonction des besoins, une fongibilité qui permet de la souplesse.

En effet, le fonds vert finance depuis 2023 les projets de recyclage foncier, en cohérence avec nos objectifs de sobriété foncière. Il s'agit, concrètement, d'équilibrer des projets de réhabilitation de friches.

L'instruction ministérielle du 28 février dernier fait de la sobriété foncière une priorité du fonds. Cela représente une part importante des crédits accordés : en 2023, 703 projets ont été financés, pour 370 millions d'euros, soit 19 % des crédits du fonds. L'année suivante, 683 projets ont été financés à hauteur de 328 millions d'euros, soit 21 % des crédits. Sur 1 386 projets financés au total, 494 l'ont été dans des communes rurales, pour 146 millions d'euros.

Le Gouvernement prévoit de maintenir cette priorité l'année prochaine. Le montant affecté dépendra des moyens que vous voudrez bien ouvrir, dans le débat budgétaire, au titre du programme concerné.

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Bien que perfectible, cet outil a fait la preuve de son efficacité pour la reconquête du foncier dégradé et la lutte contre l'artificialisation. L'Association des maires de France et de nombreux établissements publics fonciers, dont celui de Nouvelle-Aquitaine, alertent sur les effets négatifs pour le développement des territoires qu'entraînerait sa suppression. Nous défendrons sa préservation dans le débat budgétaire.

Projet de décret sur la police résiduelle au titre de l'article L. 163-9 du code minier

M. Daniel Gremillet .  - Suivant la recommandation de la commission d'enquête sénatoriale sur la pollution des sols, la loi Climat et résilience a étendu à trente ans après l'arrêt des travaux la durée d'exercice de la police résiduelle des mines. L'objectif : permettre à l'État de rechercher la responsabilité des exploitants si de nouveaux désordres ou dommages se font jour. Cette mesure a été encadrée par un décret en Conseil d'État.

Alors que ce dispositif était considéré comme équilibré, un projet de décret mis en consultation publique il y a quelques mois reviendrait sur la prescription trentenaire en instituant une police résiduelle chaque fois que des risques graves ont été identifiés. Un exploitant pourrait donc rester sous le régime de la police des mines pour une durée supérieure à trente ans.

La filière s'inquiète du manque de sécurité juridique et de visibilité économique qui en résulterait. Les investissements dans l'activité minière, essentiels pour notre autonomie stratégique, pourraient en pâtir.

Quelles sont les motivations de ce projet de décret ? Quelles situations seraient concernées ? Allez-vous publier ce décret et, si oui, quand ?

M. Mathieu Lefèvre, ministre délégué chargé de la transition écologique .  - La police résiduelle des mines est essentielle pour garantir la sécurité des populations et de l'environnement. La loi Climat et résilience a permis aux préfets d'imposer, jusqu'à trente ans après la cessation de l'activité, toute mesure nécessaire pour faire face à des dangers ou des risques graves. Idem pour des installations classées depuis plus de vingt ans.

Le décret du 28 novembre 2022 est imparfait : bien que les risques aient été connus au moment de l'arrêt des travaux, ils peuvent demeurer graves du fait de l'insuffisance des mesures prescrites.

Le projet de décret en cours de discussion vise à couvrir des risques et dangers identifiés dans la déclaration d'arrêt de travaux, mais qui demeurent graves en dépit des mesures mises en oeuvre. Il paraît conforme à la loi, qui prévoit la prise en compte des analyses menées au moment de l'arrêt des travaux. Le Conseil d'État a confirmé ce point tout en suggérant au Gouvernement des améliorations destinées à assurer la confiance des opérateurs dans le respect du principe pollueur-payeur.

Je suis conscient des inquiétudes. Une réunion se tiendra prochainement avec la Compagnie des salins du Midi, je vous propose d'y participer. L'attractivité du cadre juridique français est une priorité.

M. Daniel Gremillet.  - Il est essentiel de rassurer les populations, mais aussi les industriels à l'heure de la relance minière. Une concertation s'impose.

Permis de conduire ukrainien

M. Bernard Buis .  - Les réfugiés ukrainiens rencontrent des difficultés pour faire reconnaître leur permis de conduire.

Le code de la route prévoit que les permis de conduire hors Union européenne ou Espace économique européen (EEE) ne sont reconnus que pendant un an après l'acquisition d'une résidence normale en France, sauf accord de réciprocité - qui n'existe pas entre la France et l'Ukraine. Les Ukrainiens réfugiés chez nous sont donc contraints d'obtenir un permis français, une démarche particulièrement difficile alors qu'ils sont en cours d'intégration. C'est d'autant plus injuste que les ressortissants russes peuvent échanger leur permis de conduire en vertu d'un accord bilatéral toujours en vigueur.

En mars dernier, le ministère de l'intérieur s'est engagé à évaluer les modalités de délivrance du permis de conduire en Ukraine. Quelles en sont les conclusions ? Un accord avec l'Ukraine est-il envisageable, comme avec la Moldavie ? Quelles mesures transitoires pourraient être instaurées ?

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - C'est un sujet important de coopération en matière de sécurité routière.

Les Ukrainiens qui bénéficient de la protection temporaire peuvent conduire sur le territoire français avec leur permis ukrainien. Ce régime a été prolongé jusqu'en mars 2027.

Les autres, s'ils sont en situation régulière, peuvent conduire en France avec leur permis pendant un an. Au-delà, ils doivent se présenter aux épreuves du permis de conduire français, mais sont dispensés des vingt heures de formation obligatoire.

Pour les exempter de passer les épreuves, il convient de s'assurer que les conditions d'obtention du permis en Ukraine répondent à nos exigences de sécurité routière. Des progrès ont été accomplis sur l'organisation des épreuves et la lutte contre la fraude, et les travaux se poursuivent. Un projet d'accord est en cours d'élaboration pour permettre l'échange des permis entre nos deux pays, avec une déclaration d'intention signée en juin dernier.

M. Bernard Buis.  - Merci pour ces réponses précises. Nous attendons ces accords.

Incendies dans l'Aude

M. Sebastien Pla .  - Les Corbières, chez moi, ont subi cet été le plus grand incendie que la France ait connu. Dix-sept communes touchées, un mort, vingt-trois blessés, soixante-trois maisons détruites, 17 000 hectares partis en fumée. Plus de faune, plus de flore. Un paysage lunaire. Grâce à la bravoure des sapeurs-pompiers, de l'armée, de la gendarmerie, des services forestiers, des habitants et des élus locaux, nous en sommes venus à bout, après vingt-trois jours de lutte.

À événement exceptionnel, reconnaissance exceptionnelle. Je demande donc la création d'une médaille d'or pour les sapeurs-pompiers qui ont sauvé les habitants au péril de leur vie et d'une croix de la valeur pour tous ceux qui se sont engagés. La nation le leur doit, à l'heure où le volontariat, clé de voûte de notre sécurité civile, est menacé par la directive sur le temps de travail.

Le Parlement a prévu de bonifier la retraite des sapeurs-pompiers ayant accompli plus de dix ans de service, mais les annonces gouvernementales diffèrent... Qu'en est-il ?

Enfin, je vous demande de réviser la clé de financement des départements de la zone sud, dont les budgets consacrés aux feux de forêt explosent, et de mettre en place un fonds d'urgence exceptionnel pour le conseil départemental de l'Aude, auquel l'incendie des Corbières a coûté 1,5 million d'euros !

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - Le Gouvernement est très attaché à la singularité du modèle français de sécurité civile, fondé sur la complémentarité des statuts - professionnels, militaires et volontaires. Les acteurs de la sécurité civile méritent une reconnaissance forte de l'État.

Les attributions de médailles pour actes de courage et de dévouement sont une prérogative des préfets. Celui de l'Aude examine actuellement l'attribution de telles médailles. Nous avons toutefois une réserve sur l'échelon or, attribué à titre posthume. La proposition de loi visant à créer une croix de la valeur des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels a été transmise au Sénat le 15 mai dernier.

Un travail est en cours pour réduire certaines fragilités de notre modèle de volontariat au regard des jurisprudences européennes. Il est également envisagé de revaloriser le taux de l'indemnité horaire, et un nouveau plan d'action est en cours de finalisation.

L'attribution de trimestres supplémentaires pour la retraite des sapeurs-pompiers volontaires, prévue par la loi du 15 avril 2023, a été confirmée par le Premier ministre. À partir de l'année prochaine, ceux qui auront servi au moins quinze ans bénéficieront d'un trimestre supplémentaire, puis d'un trimestre par tranche de cinq ans, dans la limite de trois trimestres.

M. le président.  - Ces questions intéressent tous les départements.

Police municipale

Mme Nathalie Goulet .  - À l'approche des élections municipales, ma question porte sur la police municipale et ses 28 000 agents, son articulation avec la police nationale, sa formation, son équipement.

En mai dernier, la commission des lois du Sénat a suggéré plusieurs pistes : mutualisation, adaptation des prérogatives judiciaires, renforcement du contrôle national, amélioration des formations. Le projet de loi annoncé n'étant pas inscrit à l'ordre du jour, certaines dispositions peuvent-elles être mises en oeuvre sans attendre ?

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - La dernière grande réforme date de la loi Chevènement de 1999. À l'issue du Beauvau des polices municipales, un projet de loi a été présenté en Conseil des ministres, le 29 octobre dernier.

Les policiers municipaux sont déjà autorisés à accéder à certains fichiers - immatriculations, permis de conduire -, mais il n'existe pas d'outil de consultation unifié ni de répertoire national des policiers municipaux : la sécurité et la traçabilité des connexions ne sont pas assurées. Le Gouvernement propose donc la création d'un registre national avec un numéro unique pour les agents.

S'agissant de la verbalisation des infractions aux arrêtés de police du maire, certaines infractions pourraient être créées, mais devraient être très strictement encadrées. Un projet de décret en Conseil d'État en matière de police de la baignade est ainsi à l'étude. Pour les autres arrêtés pris par le maire, il ne peut y avoir d'infraction générique. Il faut a minima que l'arrêté puisse être communiqué à l'officier du ministère public.

L'article 2 du projet de loi, qui vise à étendre les prérogatives de police judiciaire à des agents de police municipale lorsque les communes en font le choix, permettra de constater neuf délits, sans acte d'enquête : vente à la sauvette, occupation illicite de hall d'immeuble, vente d'alcool aux mineurs, notamment.

Les types d'armes des policiers municipaux sont proportionnés à leurs missions. Le maire décide, ou non, d'armer ses agents et détermine leur dotation. Mais les polices municipales n'ont pas à être dotées d'armes longues - il s'agit d'une police de proximité et de tranquillité publique.

M. le président.  - Madame la ministre, vos réponses auraient pu être plus synthétiques...

Mme Nathalie Goulet.  - L'unité de la police républicaine est essentielle. Dans certaines collectivités - par exemple Argentan, dans l'Orne -, les coopérations sont bonnes. Mettons à profit le temps d'attente du projet de loi pour consulter les élus. Gare aux mutualisations au sein des intercommunalités : comment le maire gardera-t-il la main sur sa police municipale ?

Obligations légales de débroussaillement

M. Jean-Yves Roux .  - Le respect des obligations légales de débroussaillement (OLD) est indispensable à la prévention des incendies de forêt. Dans les Alpes-de-Haute-Provence, l'arrêté préfectoral du 1er octobre qui applique la loi du 10 juillet 2023 se heurte toutefois aux réalités du terrain.

Dans les communes forestières, le taux de conformité spontanée des propriétaires est faible. Or les maires manquent cruellement de moyens humains et financiers pour contrôler le respect des OLD. De plus, les règles relatives à la biodiversité rendent le débroussaillement techniquement complexe pour les petites communes. Enfin, les travaux sont coûteux.

Pourquoi ne pas imaginer une récupération du FCTVA dès la première année, une éligibilité au fonds vert ou un crédit d'impôt dédié ? Comment soutenir les maires, désarmés face à l'ampleur de la tâche ?

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - Oui, le débroussaillement est efficace pour prévenir les incendies et protéger tant les personnes et les biens que la forêt et la biodiversité.

En application de la loi du 10 juillet 2023, l'arrêté du 29 mars 2024 a sécurisé l'articulation entre OLD et espaces protégés. D'où l'actualisation des arrêtés préfectoraux.

Le ministère de l'écologie soutient la Fédération nationale des communes forestières : formation, mise à disposition de documents, assistance téléphonique, chantiers-pilotes, et les moyens de l'Office national des forêts (ONF) ont été renforcés ? 118 ETP en 2023-2024 ? pour mieux accompagner les maires.

À l'écoute, ma collègue Monique Barbut a demandé que chaque arrêté soit accompagné d'une notice pédagogique sur les modalités concrètes du débroussaillement attendu. Un retour d'expérience est attendu, et un groupe de travail composé notamment de parlementaires a été mis en place. Sur la base de ce retour d'expérience, de nouvelles mesures seront proposées.

M. Jean-Yves Roux.  - Le coût pour les collectivités est très important. Pourquoi pas un acompte ou une récupération du FCTVA ?

Sapeurs-pompiers volontaires

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Les sapeurs-pompiers volontaires ne perçoivent pas de salaire, mais des indemnités liées à leurs interventions.

Leur engagement, souvent en parallèle d'une activité professionnelle, mérite d'être reconnu à la hauteur de leur abnégation. Or la bonification de trimestres prévue par la loi du 14 avril 2023 est une avancée encore insuffisante. Le Parlement avait prévu son bénéfice dès dix années de service, mais le Gouvernement a retenu quinze ans.

Allez-vous réexaminer cette question, afin de ne pas exclure des sapeurs-pompiers au parcours plus court, mais tout aussi exemplaire ? Comment garantir la pérennité financière de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance (NPFR), dont les équilibres financiers sont bien fragiles ?

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - Le Gouvernement est particulièrement attaché à la valorisation de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires, à la hauteur du sacrifice qu'ils consentent sur leurs vies personnelle et professionnelle. Leur fidélisation est un enjeu de pérennité de notre modèle.

Le Gouvernement entend rendre effective la bonification de retraite - le Premier ministre l'a redit. Le seuil de quinze ans a été retenu par cohérence avec le premier seuil de la NPFR, certains rompant malheureusement leur engagement au bout de douze ans. Une réévaluation sera possible après bilan. La NPFR porte ses fruits : la durée d'engagement moyenne est passée de onze ans et neuf mois à douze ans et cinq mois en deux ans. Le Gouvernement n'entend pas supprimer cette bonification.

Il n'entend pas davantage revenir sur les 50 % qu'il finance dans la NPFR. Mais le financement de cette prestation doit être examiné au regard de la trajectoire budgétaire, avec les collectivités qui cofinancent et l'association qui pilote, afin de trouver le bon équilibre budgétaire.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Nous faisons tous le même constat. Un syndicat de sapeurs-pompiers volontaires vient de déposer plainte. La balle est dans le camp du Gouvernement. Des actes !

Élections complémentaires des conseils municipaux

M. Cédric Chevalier .  - Dans une commune de 100 à 499 habitants, il peut arriver que le conseil municipal ne soit composé que de neuf membres, au lieu des onze prévus par le code électoral. Comment, dans ce cas, apprécier la perte du tiers des membres, qui déclenche, suivant l'article L. 258 du code électoral, l'obligation d'organiser des élections complémentaires, sachant que l'article L. 2121-2-1 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi du 21 mai 2025, indique que le conseil municipal est réputé complet dès lors qu'il compte au moins neuf membres à l'issue d'une élection ?

Faut-il considérer que le conseil a perdu le tiers de ses membres lorsqu'il ne reste plus que six élus, soit le tiers de neuf, ou lorsqu'il n'en reste que sept, soit le tiers de onze ? Cette précision est essentielle pour sécuriser juridiquement l'organisation des élections complémentaires dans les communes concernées. Vous avez deux minutes ! (Sourires)

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - À compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux des 15 et 22 mars 2026, ceux-ci seront réputés complets s'ils comptent jusqu'à deux personnes de moins que leur effectif légal. Les élections partielles complémentaires devront se tenir dans deux cas de figure : la perte du tiers ou plus des membres du conseil municipal - ou de la moitié ou plus dans l'année qui précède un renouvellement général - ou lorsqu'un conseil municipal incomplet doit élire le maire ou les adjoints.

Dans le premier cas de figure, je vous confirme que l'effectif à prendre en compte est l'effectif légal théorique et non l'effectif réel : pour les communes de moins de 100 habitants, quatre sur un effectif théorique de sept ; pour les communes de 100 à 499 habitants, sept sur onze ; pour les communes de 500 à 999 habitants, dix sur quinze.

La circulaire du 19 septembre 2016 rappelle ces seuils en son annexe 2. Ces règles ont d'ores et déjà été diffusées aux associations d'élus. Plusieurs séminaires et webinaires ont été organisés avec les maires afin d'expliciter les conséquences de la réforme. La communication se poursuivra et le futur salon des maires sera également l'occasion d'aborder ce sujet.

M. Cédric Chevalier.  - Merci : c'est très clair !

Maison d'arrêt d'Angers

M. Grégory Blanc .  - La situation qui règne à la maison d'arrêt du Pré-Pigeon à Angers est inquiétante. Cet établissement construit en 1856, conçu pour 216 détenus, 12 arrivants et 38 personnes en semi-liberté, accueillait à l'été 2025 près de trois fois plus de détenus. Le report permanent du projet de nouveau centre pénitentiaire à Loire-Authion ne peut justifier l'absence d'investissement. Les conditions sanitaires y sont déplorables et les tribunaux administratifs ont d'ailleurs condamné l'État en août dernier.

Faute de modulaire sanitaire supplémentaire installé dans la cour, le nombre de prisonniers entrant pour des faits liés à des addictions et sortant sans avoir vu un seul soignant ne cesse de croître, en raison de la surpopulation carcérale, mais aussi de l'augmentation des courtes peines. Dans cet établissement de 216 places, 99 détenus sont sortis sans avoir rencontré le moindre médecin, et le nombre de détenus sans suivi a doublé entre 2021 et 2024. Quand l'État compte-t-il enfin installer un modulaire supplémentaire ?

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - La situation de surpopulation carcérale est avérée à Angers : au 1er septembre 2025, 503 personnes étaient écrouées, pour 266 places. La direction interrégionale des services pénitentiaires (Disp) de Rennes a procédé depuis septembre au transfert d'une trentaine de détenus et sensibilise les services judiciaires à la possibilité de recourir aux placements extérieurs.

L'absence de module sanitaire suffisant n'a été mentionnée, ni par les associations requérantes ni par le juge administratif : l'ordonnance de référé du 12 septembre 2025 enjoint l'administration de renforcer le cloisonnement sanitaire - ce qu'elle a fait - mais précise que l'accès aux soins à la maison d'arrêt est assuré de façon satisfaisante.

Il est vrai que l'unité sanitaire de l'établissement manque de locaux. C'est pourquoi l'administration pénitentiaire, en partenariat avec la direction générale de l'offre de soins et la délégation au numérique en santé, a lancé un appel à projets en avril 2025. Un projet de nouveau modulaire sanitaire est présenté par la Disp, l'ARS et le centre hospitalier d'Angers. Par ailleurs, l'Association ligérienne d'addictologie a recruté un nouvel intervenant, ce qui réduira les délais de prise en charge.

M. Grégory Blanc.  - Il est paradoxal d'entendre le ministre de la justice plaider pour des courtes peines, alors que notre appareil pénitentiaire n'y est pas prêt.

Congé maladie des agents territoriaux

M. Philippe Grosvalet .  - Sans doute par souci d'équité entre agents de l'État et fonctionnaires territoriaux, le gouvernement précédent a réduit l'indemnisation des trois premiers mois de congé de maladie ordinaire de ces derniers à 90 % de leur traitement. Les représentants des collectivités locales au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ont sonné l'alarme : moins d'indemnités, c'est moins de pouvoir d'achat, en particulier pour les agents de catégorie C, et cette nouvelle règle aggrave les problèmes d'attractivité de la fonction publique territoriale.

Ces représentants proposent que les collectivités qui le souhaitent soient autorisées à maintenir une indemnisation à 100 % du traitement principal et des primes de leurs agents. Cela respecte la parité avec les fonctionnaires de l'État, en l'absence de complément de rémunération.

Le 15 octobre dernier, le Premier ministre affirmait ici : « Il faut que l'intelligence locale nous inspire nationalement ». Qu'envisagez-vous pour encadrer les indemnités des agents territoriaux en arrêt maladie tout en respectant le principe de libre administration des collectivités ?

M. Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Depuis le 1er mars 2025, la rémunération des agents publics est effectivement de 90 % pendant les trois premiers mois de congé de maladie ordinaire, puis de 50 % les neuf mois suivants, quel que soit l'employeur.

Le principe de libre administration des collectivités territoriales ne permet pas de déroger à cette règle, ce que les tribunaux administratifs ont confirmé en suspendant des délibérations en ce sens.

Cela traduit un choix de responsabilité face à un absentéisme durablement plus élevé qu'avant la crise sanitaire : en 2024, le nombre moyen de jours d'absence était de 11,1 dans la fonction publique, contre 9,5 en 2019 ; de 13,3 contre 11 dans la fonction publique territoriale.

Le Gouvernement reste pleinement mobilisé aux côtés des collectivités pour réduire l'absentéisme, améliorer les conditions de travail et renforcer la protection sociale des agents. Prévenir, protéger, accompagner, telle est notre ligne de conduite.

Taxe d'aménagement (I)

M. Jean-Raymond Hugonet .  - Les difficultés des conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE) ont mis en lumière les conséquences du transfert de la gestion de la taxe d'aménagement des directions départementales des territoires à la DGFiP. L'objectif était de centraliser pour simplifier - une rengaine hélas bien connue.

Au regard des nombreuses remontées de terrain et de la profusion de questions au Gouvernement, la réforme n'a pas atteint son but. Les communes, déjà pénalisées par une énième déconnexion avec le contribuable, se retrouvent lésées sur le montant restant à percevoir ; s'y ajoute une complexification de la déclaration pour l'usager. Résultat, une incertitude supplémentaire pour les maires dans l'élaboration de leurs budgets. Qu'entendez-vous faire pour que la taxe d'aménagement aussi bien recouvrée que lorsqu'elle l'était directement par les communes ?

M. Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l'industrie .  - En tant qu'élu local, je mesure la portée de vos propos.

La réforme visait à rendre la taxe d'aménagement exigible à l'achèvement des travaux, et non plus au dépôt du permis de construire, afin d'éviter aux collectivités d'avoir à rembourser une partie de l'avance à la fin du chantier - exception faite des projets de plus de 5 000 mètres carrés, conformément à la demande des associations d'élus.

Ce nouveau dispositif a rencontré des difficultés de mise en oeuvre qui ont conduit à un retard dans la collecte, que la DGFiP s'efforce de rattraper. En lien avec les élus, des relances ont été effectuées auprès des contribuables en retard ; un point a été fait avec l'Association des maires de France.

La diminution du produit est également liée à la baisse des mises en chantier et à la réduction de la surface moyenne des constructions. L'État met tout en oeuvre pour améliorer le rendement de cette taxe et simplifier son recouvrement. La DGFiP a d'ailleurs engagé une réflexion à laquelle les élus et les sénateurs seront associés.

M. Jean-Raymond Hugonet.  - La DGFiP a du mal à reconnaître ses torts. Indépendamment de la technique, cette réforme éloigne le contribuable de la commune. Merci de partager le sentiment du terrain.

Taxe d'aménagement (II)

Mme Sylviane Noël .  - Depuis janvier 2022, les communes rencontrent les pires difficultés dans le recouvrement de la taxe d'aménagement, jusque-là automatique mais désormais sujet à des retards. Le manque à gagner est colossal. En 2025, sur 300 000 euros, la commune de Marignier, en Haute-Savoie, n'a perçu que 10 000 euros à la mi-année ; la commune des Houches attend toujours 216 000 euros au titre des permis délivrés en 2021 et 2022.

Cela affecte également les départements, dont la part finance notamment les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE), qui ont vu leurs ressources chuter de 40 %, au point de devoir licencier. Depuis deux ans, je multiplie les alertes, en vain. Monsieur le ministre, je vous en conjure : revenons au dispositif antérieur pour mettre fin à ce bazar !

M. Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Le montant des taxes d'aménagement a fortement baissé, de 2,2 milliards d'euros en 2023 à 1,5 milliard en 2024, et une nouvelle baisse est attendue en 2025. Cela s'explique notamment par la chute du nombre de permis de construire - moins 31 % entre 2022 et 2024 - et par la réduction de la surface moyenne autorisée.

Le nouveau dispositif évite de devoir rembourser plus du quart des sommes collectées - mais sa mise en oeuvre a entraîné un retard important dans la collecte. La DGFiP a engagé de gros efforts de rattrapage ; des échanges récents avec l'Association des maires de France et de nombreux élus ont permis de faire le point. Des montants significatifs seront liquidés dans les prochains mois, avant expiration des délais de prescription.

Enfin, la DGFiP travaille à améliorer la gestion et la lisibilité de ces taxes. Le Premier ministre nous a appelés - élus locaux, membres du Gouvernement, parlementaires - à engager une réflexion sur la décentralisation et la déconcentration. Vos propositions viendront nourrir ce débat, nous les examinerons avec la plus grande attention.

Mme Sylviane Noël.  - Cessez de dire que la baisse du montant recouvré est due à une baisse des mises en chantier ! Les élus savent parfaitement ce qu'ils ont à recouvrer.

Dans mon département, la DGFiP a refusé la taxation d'office, car elle « ne dispose pas encore des instructions qui permettent de le faire et l'applicatif actuel n'est pas encore adapté ».

Le Gouvernement porte une lourde responsabilité. Nous pouvons même craindre de voir des contribuables se prévaloir de la prescription fiscale ! Il y a urgence à revenir au dispositif initial.

Taxe d'aménagement (III)

M. Didier Rambaud .  - M. Julien Polat, maire de Voiron, dans l'Isère, m'a également alerté sur les difficultés de recouvrement de la taxe d'aménagement. Depuis la loi de finances initiale pour 2025, la DGFiP recouvre la taxe d'aménagement sur la base des déclarations effectuées par les propriétaires à l'achèvement des travaux. Or de nombreuses collectivités constatent des retards considérables dans les encaissements, une grande incertitude sur les montants réellement dus et un défaut de visibilité sur les échéances de perception, qui fragilisent les budgets communaux.

Ainsi, les recettes encaissées au 1er septembre 2025 à Voiron ne représentent que 15 % des prévisions budgétaires initiales, soit 90 000 euros encaissés pour 600 000 euros attendus.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour rétablir la fiabilité et la transparence du dispositif ? Les collectivités locales pourraient-elles reporter, à titre transitoire, les produits attendus dans leur compte financier unique pour 2025 dès la transmission valable d'une déclaration d'achèvement ?

M. Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Le nouveau dispositif de collecte de la taxe d'aménagement évite que plus d'un quart des montants perçus ne soient restitués par les collectivités aux usagers. En effet, l'alignement de la taxation sur la réalité des constructions achevées évite l'émission de taxes sur des projets finalement abandonnés, donc des annulations de taxation a posteriori. Ce dispositif a toutefois rencontré des difficultés importantes à son démarrage. Je mesure les questionnements des élus locaux face aux retards. La DGFiP a engagé des efforts importants et échangé avec l'Association des maires de France (AMF) pour faire un point complet sur la situation.

Cette question fait l'unanimité sur les bancs du Sénat. Nous devons pouvoir examiner les situations précises que vous avez évoquées, avec les services de Bercy. S'il y a des améliorations à apporter dans le cadre de la réforme de la décentralisation proposée par le Premier ministre, nous y répondrons avec pragmatisme et sens des responsabilités.

M. Didier Rambaud.  - Je vous remercie de votre réponse, mais faisons vite, car les retards compromettent tant l'équilibre des budgets locaux que les investissements publics prévus avant la fin des mandats municipaux.

Conséquences du Dilico en Seine-Maritime

Mme Céline Brulin .  - Le Gouvernement prévoit de doubler le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico) en 2026. Il serait porté à 2 milliards d'euros, dont plus de 1,2 milliard d'euros à la charge des communes et des intercommunalités. Autant de moins pour les services publics et les investissements locaux !

Le Dilico ne tient compte ni des projets des collectivités, ni de la situation sociale de leur population, ni des efforts qu'elles doivent produire, par exemple pour construire des infrastructures afin de faire face à la fermeture d'une usine. Les modalités de remboursement s'apparentent à une punition collective. C'est pire qu'un retour des contrats de Cahors ! Plus l'État déserte les territoires, plus il accentue le contrôle sur les collectivités. Qui peut croire que le fait de transférer l'endettement national vers les territoires sortira la France du déficit ?

À quelques mois des élections municipales, alors qu'il devient de plus en plus difficile de s'engager comme élu local, quel effet pourrait avoir une nouvelle réduction des leviers d'intervention des équipes communales ? Est-ce votre vision de la décentralisation : décentraliser l'austérité ? Abandonnerez-vous ce dispositif ou vous entêterez-vous ?

M. Lucien Stanzione.  - Bravo !

M. Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l'industrie .  - La position du Gouvernement n'est pas l'entêtement, mais la discussion, l'écoute et le dialogue avec le Parlement. Les modalités de prélèvement du Dilico resteraient identiques à celles de 2025. Le prélèvement serait réparti sur un plus grand nombre de contributeurs, lissé et mensualisé. Le PLF prévoit d'étaler la restitution du Dilico sur cinq ans à partir de 2027 pour l'aligner sur le rythme des cycles électoraux. Une part du reversement, portée à 20 %, continuerait d'abonder un fonds de péréquation pour les collectivités les plus fragiles. Le solde de 80 % serait reversé selon l'évolution des dépenses réelles de fonctionnement et d'investissement de chaque catégorie de contributeur, notamment au regard de l'évolution du PIB.

L'effort serait réparti entre les communes, les intercommunalités, les départements et les régions.

Telle est la proposition du Gouvernement. Au vu de l'attachement du Sénat - et de plusieurs membres du Gouvernement qui sont élus locaux - aux collectivités locales, je ne doute pas qu'elle fera l'objet d'un débat riche, approfondi, susceptible de l'améliorer.

Mme Céline Brulin.  - J'entends votre volonté de dialogue. Mais vous n'avez fait que décrire l'état actuel du dispositif, que nous contestons. Corrigeons-le !

Avenir du pacte Dutreil

M. Cyril Pellevat .  - La Cour des comptes propose une réforme profonde du pacte Dutreil ? dont elle estime qu'il coûterait 4 milliards d'euros par an, bien plus que les 800 millions d'euros annuels estimés par Bercy ? consistant à restreindre voire plafonner les avantages fiscaux accordés.

Or ce dispositif est un levier crucial de pérennité pour les entreprises familiales. Seules 14 % à 20 % des entreprises françaises sont transmises dans un cadre familial, contre plus de 60 % en Italie et 50 % en Allemagne. Ne cassons pas la chaîne qui fait vivre nos territoires. Une telle réforme favoriserait en outre la vente à de grands groupes ou des groupes étrangers au détriment de l'ancrage local.

Alors que la réindustrialisation est affichée comme une priorité nationale, le Gouvernement entend-il suivre l'avis de la Cour des comptes ? Peut-il s'engager à préserver le coeur du pacte Dutreil pour ne pas compromettre la transmission d'entreprises, l'emploi local et notre souveraineté économique, alors même qu'il est considéré comme une potentielle cible de rabotage dans les dernières discussions budgétaires ?

M. Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Nous partageons votre attachement au pacte Dutreil, en vigueur depuis plus de vingt ans. Sa longévité même montre bien que sa conservation fait consensus. Sans ce dispositif, nombre de transmissions n'auraient pas eu lieu. En limiter la portée en le restreignant aux seules TPE et PME n'est donc pas souhaitable, la pérennité d'une société ne dépendant ni de sa taille ni de sa valeur. Les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises sont en outre plus exposées aux risques de démantèlement ou de prise de contrôle étrangère.

Plusieurs amendements au PLF pour 2025 visaient à éviter que cet avantage fiscal ne soit étendu à la transmission de biens étrangers. Le Gouvernement veille à prévenir tout abus. D'autres amendements ont d'ailleurs été adoptés en ce sens hier à l'Assemblée nationale.

Nous devons conforter ce dispositif, tout en corrigeant d'éventuels errements. Nous y reviendrons lors de l'examen du PLF pour 2026.

M. Cyril Pellevat.  - Les dernières déclarations entendues et amendements déposés à ce sujet nous inquiètent. Merci de vos réponses qui sont de nature à rassurer les entrepreneurs. Nous avons besoin d'un système fiscal clair et lisible.

Avenir de la PAC

M. Olivier Bitz .  - Les premières orientations du futur cadre pluriannuel de l'Union européenne pour la période 2028-2034, présentées par la présidente de la Commission européenne le 16 juillet dernier, risquent d'avoir des conséquences importantes pour la politique agricole commune (PAC), dont les crédits baisseraient de 20 %, de 386 à 300 milliards d'euros. La PAC serait en outre intégrée dans un grand fonds comportant d'autres programmes. Cette diminution des aides frapperait plus de la moitié des agriculteurs français.

Depuis ces annonces, les syndicats agricoles, notamment ceux des filières bovine et laitière, expriment leurs vives préoccupations.

Madame la ministre, lors du conseil européen Agripêche du 27 octobre dernier, vous avez déclaré que le budget dévolu à la PAC était, en l'état, insuffisant et compromettait le succès d'une politique faisant la fierté de l'Union européenne. Le lendemain, le Premier ministre s'est entretenu avec Christophe Hansen, commissaire européen à l'agriculture et à l'alimentation, puis a déclaré que les enveloppes de la PAC devaient être intégralement maintenues.

Le Gouvernement est-il pleinement mobilisé pour que la PAC demeure une politique commune d'avenir, pour soutenir le développement de l'agriculture française ? Comment rassurer nos agriculteurs ?

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire .  - Il est indispensable que l'Union européenne continue de se doter d'une PAC robuste, pour garantir notre souveraineté alimentaire, les revenus des agriculteurs et faciliter le renouvellement des générations. La vive inquiétude des milieux agricoles doit être entendue, je la partage.

La proposition d'enveloppe nationale PAC allouée à la France qui découle des dernières déclarations de la Commission européenne suscite une profonde incompréhension.

Nous n'avons jamais eu autant de besoins pour relever les immenses défis agricoles du XXIe siècle. Une clarification rapide de la part de la Commission sur les évolutions budgétaires de la PAC s'impose. La demande initiale de la France et de nombreux États était que la PAC demeure une politique commune à part entière, dotée d'un budget dédié, séparé d'un éventuel fonds unique. Je l'ai redit la semaine dernière lors du conseil Agripêche.

Plus que jamais, nous avons besoin des agriculteurs pour garantir notre souveraineté alimentaire. La nécessaire simplification de la PAC ne saurait constituer un prétexte pour gommer son caractère commun. Le Gouvernement, le Premier ministre et moi-même sommes très déterminés à nous faire entendre à ce sujet.

Renouvellement du certificat médical pour la pratique de la danse

Mme Pascale Gruny .  - Si la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France a assoupli le contrôle médical préalable à la pratique sportive, la danse demeure régie par la loi de juillet 1989. Les élèves doivent donc être munis d'un certificat médical renouvelé tous les ans, contre tous les trois ans pour la pratique du sport. Cette différence de traitement est incompréhensible. Il est de plus en plus difficile d'obtenir un certificat médical, du fait de la pénurie croissante de médecins généralistes dans les territoires.

Le ministère de la culture avait souligné, en réponse à une question écrite posée en 2024, qu'il travaillait à une évolution réglementaire sur ce point. Envisagez-vous d'assouplir la loi de 1989 pour la rapprocher des mesures inscrites dans le code du sport en 2022 ?

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire .  - Les dispositions du code de l'éducation relatives à la danse paraissent datées, au vu des nouvelles mesures contenues dans la loi de 2022. Une évolution réglementaire est envisagée à court terme afin d'harmoniser les pratiques avec celles du sport, tout en tenant compte des spécificités de la danse.

Dans l'attente de cette révision et pour simplifier les démarches des familles et des établissements, le ministère de la culture recommande, en cas d'impossibilité d'obtenir un certificat médical, d'utiliser le questionnaire de santé prévu par le code du sport. Toutefois, certaines contraintes physiques spécifiques, comme la pratique des pointes, n'étant pas forcément prises en compte, l'expertise de l'Ordre des médecins a été sollicitée afin d'élaborer un questionnaire adapté. Le ministère de la culture attend sa réponse avant de finaliser l'évolution du dispositif, l'enjeu étant de concilier simplification administrative, prévention médicale et promotion de la pratique de la danse dans des conditions de sécurité optimales.

Mme Pascale Gruny.  - Nous attendons depuis longtemps, cela devient urgent. Le conseil départemental de l'Ordre des médecins de l'Aisne affirme qu'aucun certificat n'est nécessaire. La responsabilité des écoles de danse risque d'être engagée en cas d'accident. Les textes ne sont pas adaptés.

Panthéonisation de Camille Claudel

M. Lucien Stanzione .  - Camille Claudel a révolutionné son art à une époque où les femmes n'étaient pas reconnues comme créatrices. Collaboratrice de Rodin, mais surtout artiste à part entière, elle a donné à la sculpture une émotion et une liberté nouvelles. La Valse ou L'Âge mûr sont des symboles qui parlent d'amour, de douleur, mais aussi de résistance et d'émancipation.

Pourtant, la société de son temps ne lui a pas pardonné son indépendance. Internée contre son gré en 1913, elle passa plus de trente ans à l'asile des aliénés de Montdevergues, à Montfavet, dans le Vaucluse, avant d'y mourir seule en 1943. Son destin raconte une double injustice : celle faite à une femme artiste, et celle faite à des milliers de malades mentaux abandonnés sous Vichy.

Lui rendre hommage, c'est reconnaître ce que la République a parfois refusé de voir : le génie des femmes, la dignité des fragilités, la mémoire des oubliés. Lui ouvrir les portes du Panthéon serait un geste de réparation, de reconnaissance et de fidélité à nos valeurs républicaines. Une démarche a été entreprise en ce sens auprès du Président de la République. Le Gouvernement entend-il la soutenir, pour que Camille Claudel rejoigne enfin celles et ceux qui ont fait la grandeur et la conscience de notre nation ?

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire .  - J'avais lu avec émotion la biographie d'Anne Delbée sur Camille Claudel, retraçant le destin tragique de cette femme, qui a créé dans l'ombre de Rodin - lequel s'est largement inspiré de son oeuvre - puis a été abandonnée à la solitude et au dénuement.

Camille Claudel est une immense artiste, au rayonnement national et international - l'histoire lui rend justice. Elle symbolise aussi le combat des femmes pour voir reconnaître l'importance de leurs oeuvres.

La panthéonisation ne se justifie pas seulement par la valeur d'une oeuvre, mais par un engagement, un symbole lié aux valeurs de la nation ou de la République. Hugo, Zola, André Malraux, Marie Curie ou Alexandre Dumas sont de grands écrivains ou scientifiques, mais ont été honorés aussi et surtout pour leurs combats civiques ou humanistes. Idem pour les récentes panthéonisations de Missak et Mélinée Manouchian et de Robert Badinter.

L'entrée au Panthéon relève d'un décret du Président de la République. La prochaine cérémonie sera dédiée à Marc Bloch, grand historien et martyr de la Résistance. Au Président de réserver la suite qu'il jugera pertinente à la proposition de transfert des cendres de Camille Claudel, d'autres pouvant également prétendre à cet hommage national.

Programme « Notre école, faisons-la ensemble »

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure .  - En 2022, dans le cadre du Conseil national de la refondation, le programme « Notre école, faisons-la ensemble » a fait l'objet d'une large campagne de communication. L'État invitait les établissements scolaires et les élus locaux à se saisir du dispositif pour bénéficier de financements et mettre en oeuvre leurs projets.

Or, si certains projets ont été concrétisés, de nombreux établissements candidats n'ont jamais été informés des suites données à leur dossier. D'autres ont reçu une réponse favorable, mais n'ont toujours pas obtenu les financements afférents. Dans le Lot, des établissements attendent toujours une réponse à leur candidature. On mesure la déception des personnels éducatifs, au regard du travail fourni pour bâtir les projets et des attentes suscitées.

En 2022, 500 millions d'euros avaient été annoncés sur cinq ans ; en février 2024, seuls 95 millions d'euros avaient été alloués. Où en est-on ? Les aides annoncées par l'État seront-elles, oui ou non, versées aux écoles lauréates ? Vous engagez-vous à apporter une réponse transparente à l'intégralité des établissements ayant sollicité un accompagnement ?

M. Edouard Geffray, ministre de l'éducation nationale .  - Ce programme a été lancé en 2022 pour « faire école » différemment, de manière partenariale, avec les parents d'élèves, la communauté éducative et les collectivités territoriales. Il a suscité une forte dynamique, avec à ce jour 8 600 projets validés. Citons, entre autres : une méthode d'enseignement des mathématiques à La Roche-Posay, qui se traduit par une amélioration des résultats au brevet ; un passeport maritime à Terre-de-Haut en Guadeloupe, qui lutte contre le décrochage scolaire ; une classe opéra à Aix-en-Provence, avec un travail sur l'oral et un projet linguistique.

Les lignes budgétaires dédiées se sont élevées à 123 millions d'euros entre 2022 et 2024.

Deux éléments sont venus modifier le paysage : la contrainte budgétaire, et le fait que, la phase d'initiation passée, la démarche a vocation à s'intégrer dans le fonctionnement normal et à « faire école » sur l'ensemble du territoire.

Malgré le contexte budgétaire, nous avons débloqué cet été une nouvelle enveloppe de 13,4 millions d'euros pour soutenir prioritairement les projets déjà engagés.

J'ai entendu votre alerte. Je veillerai à ce qu'une réponse soit apportée à tous les établissements qui ont déposé une demande. Nous poursuivons bien cette démarche, dans un contexte budgétaire néanmoins contraint.

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure.  - Merci pour cette transparence et cet effort. Nous le devons à nos écoles de proximité, à nos collèges et à nos lycées.

Financement par les communes des frais de scolarité

Mme Annie Le Houerou .  - Selon la loi Carle du 28 octobre 2009, les communes de résidence des élèves ont l'obligation de participer aux dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association pour les élèves scolarisés dans une autre commune, lorsqu'elles ne disposent pas des capacités d'accueil dans leurs propres écoles publiques.

Dans le cadre d'un regroupement pédagogique intercommunal (RPI) porté par un EPCI, si l'ensemble des niveaux d'enseignement du premier degré est proposé et accessible, les communes membres ne sont pas tenues de contribuer financièrement à la scolarisation dans une école privée extérieure. L'offre d'accueil de l'enseignement public est alors appréciée à l'échelle du RPI.

En revanche, lorsque ce RPI est porté par une convention associative entre des communes, l'offre d'accueil est appréciée commune par commune. L'obligation financière s'impose alors pour les classes qui ne sont pas assurées dans la commune de résidence. Ainsi, deux communes dans une situation identique sur le plan de l'offre scolaire se voient appliquer des règles différentes, selon le seul critère du statut de l'organisation de leur RPI.

Pourquoi cette différence de traitement, alors que l'offre d'enseignement public est identique dans les deux situations ? Une évolution de la réglementation est-elle envisageable afin d'assurer une égalité de traitement ?

M. Edouard Geffray, ministre de l'éducation nationale .  - Merci d'attirer mon attention sur ce sujet. Par principe, la commune de résidence est responsable de l'organisation scolaire, sauf lorsqu'elle a explicitement transféré cette compétence à une intercommunalité.

Dans le cadre d'un RPI conventionnel, chaque commune demeure compétente et la capacité d'accueil de l'école publique est appréciée à l'échelle communale. À l'inverse, lorsque l'EPCI assume la compétence scolaire, la capacité d'accueil est appréciée à l'échelle du territoire intercommunal, avec des conséquences sur la prise en charge du forfait pour les élèves scolarisés dans un établissement privé sous contrat.

Cette distinction est liée au degré d'intégration scolaire souhaité au sein des intercommunalités. Pour autant, j'entends qu'elle peut prêter à confusion. Il nous faut mieux communiquer et nous assurer que les communes, lorsqu'elles envisagent de transférer leurs compétences scolaires à des EPCI, soient informées des conséquences.

Je vais par ailleurs demander à mes services de dresser un panorama complet de la situation. Sur cette base, j'examinerai avec la plus grande bienveillance une éventuelle modification des règles en la matière.

Blocages administratifs et pénurie de main d'oeuvre agricole

M. Laurent Burgoa, en remplacement de Mme Christine Bonfanti-Dossat .  - Situation ubuesque dans le Lot-et-Garonne, ou d'autres territoires agricoles : alors que la récolte approche, les producteurs attendent les visas de leurs saisonniers étrangers. Ces derniers ont beau revenir chaque année, avoir des autorisations de travail en règle, les réponses tardent, les refus s'accumulent, l'opacité règne. Pendant ce temps, les fruits restent aux arbres. En 2024, de nombreux arboriculteurs ont perdu une partie de leur récolte. En 2025, le drame se répète.

Nos frontières sont poreuses ? mais on bloque ces quelques dizaines de travailleurs réguliers, identifiés, nécessaires à la survie de nos exploitations ! Ce deux poids, deux mesures alimente la colère et le sentiment d'injustice. Nos producteurs se sentent abandonnés, sacrifiés sur l'autel d'une bureaucratie absurde.

Quelles instructions comptez-vous donner à vos services consulaires et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) pour que ces blocages cessent enfin ?

M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l'Europe .  - La réforme de la main-d'oeuvre étrangère, entrée en vigueur en avril 2021, a simplifié la procédure. L'employeur saisit une plateforme nationale pour obtenir une autorisation de travail, transmise à l'Ofii au Maroc, qui organise les rendez-vous auprès de notre prestataire TLScontact. En bout de chaîne, le consulat général de France à Casablanca instruit les demandes de visa.

Le nombre de visas délivrés tend à baisser, tandis que les titres de séjour pluriannuels augmentent : plus de 10 000 titres « travailleurs saisonniers » en 2024, signe d'une fidélisation croissante des salariés.

Les refus résultent principalement d'un état de santé incompatible avec les travaux agricoles, d'une méconnaissance de l'employeur, d'un recours à des intermédiaires rémunérés, de la présentation de documents douteux ou de taux de retour insuffisants : en deçà de 80 %, une entreprise ne peut plus se faire accorder de nouveaux visas.

Ces garde-fous sont indispensables, mais ne doivent pas fragiliser nos filières agricoles. Un travail interministériel est en cours, en lien avec les organisations professionnelles, pour améliorer la lisibilité et la prévisibilité de la procédure. Il faut concilier les besoins des exploitants avec la maîtrise des flux migratoires.

Comptez sur notre mobilisation pour que l'agriculture française continue à s'appuyer sur une main-d'oeuvre saisonnière encadrée, régulière et respectueuse de nos règles.

M. Laurent Burgoa.  - J'entends ? mais entendez que, pendant que nous sommes ici, les fruits pourrissent et les producteurs s'épuisent ! Nos agriculteurs ne demandent pas une faveur, mais du bon sens.

Enseignement français en Espagne

Mme Évelyne Renaud-Garabedian .  - Quelle ne fut pas la stupeur des enseignants, des familles et des élus des Français de l'étranger en apprenant que la Mission laïque française (MLF) cherchait un repreneur privé pour tout son réseau en Espagne !

Ce n'est que grâce à l'insistance d'une association de parents d'élèves auprès de la direction de la MLF que la manoeuvre a été rendue publique. Pourtant, la MLF se désengage de ses neuf établissements en Espagne, décision lourde prise sans concertation, qui intervient après des années de hausse régulière de frais d'écolage, le déconventionnement de deux lycées et la vente de l'établissement de Séville au groupe Odyssey.

La MLF est sur le point de céder des établissements et du foncier dont la valeur a été construite par les familles et le soutien public.

Pourquoi ce retrait ? Quand aura-t-il lieu ? Comment expliquer cette opacité ? Comment s'assurer que cette cession ne conduise ni à une captation de la valeur par des opérateurs privés, ni à une baisse du niveau de l'enseignement, ni à une hausse des frais de scolarité, ni à des licenciements ?

M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l'Europe .  - Nous suivons la situation avec la plus grande attention. La MLF est une association de droit privé indépendante de l'État. Ses décisions relèvent de son conseil d'administration, dans lequel le ministère siège à titre consultatif. Ses établissements ne perçoivent pas de subventions publiques, hormis les bourses attribuées aux élèves français éligibles, comme dans tout établissement homologué.

Le 16 octobre, la MLF a annoncé ce désengagement, invoquant des difficultés financières importantes, une perte cumulée de 18,2 millions d'euros en dix ans et un déficit annuel estimé à 2,5 millions d'euros. Malgré une hausse de 19 % des frais de scolarité en deux ans, la perte de 630 élèves a fragilisé sa trésorerie. C'est pourquoi elle cherche un repreneur unique avant la fin de l'année scolaire 2025-2026.

Le ministère a regretté de ne pas avoir été informé plus en amont et a appelé à la concertation. La MLF s'est engagée à garantir la continuité pédagogique, la reprise des personnels et le maintien de l'homologation des établissements.

Un point d'étape sur les offres reçues aura lieu le 4 décembre, le choix de l'offre ferme le 19 février et le vote définitif ainsi que la signature des actes de cession en avril, pour un transfert effectif à la rentrée de septembre.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian.  - Vous dites que la seule aide de l'État porte sur les bourses scolaires mais c'est l'État qui rémunère le personnel mis à disposition des établissements de la MLF.

Dotation de solidarité rurale (DSR)

M. Patrick Chaize .  - Je déplore l'opacité des critères de répartition de la DSR, avec des écarts importants entre communes similaires. Ainsi, Polliat, commune de l'Ain de 2 700 habitants, perçoit un montant de DSR inférieur de moitié à la moyenne de treize communes de 2 500 à 3 000 habitants.

Si Polliat n'est pas reconnue comme bourg-centre - critère par ailleurs contestable - elle est néanmoins la deuxième commune la plus peuplée du canton, avec une croissance de 10 % en dix ans ; elle doit faire l'objet d'une reconnaissance en tant que pôle structurant et dispose de nombreux équipements et services.

Dès lors que les critères d'attribution de la DSR ne reflètent plus la réalité du terrain, une réévaluation serait opportune.

Le Gouvernement envisage-t-il de réformer le mécanisme de la DSR afin d'assurer un financement plus équitable et plus en adéquation avec les réalités et besoins de nos communes ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - Je comprends le sentiment d'injustice de nombreux maires ruraux face à des différences qu'ils jugent difficiles à expliquer.

L'attribution de la DSR repose sur un ensemble de critères prévus par la loi, visant à garantir une répartition équitable. Polliat n'est pas éligible à deux des trois fractions de la DSR : la fraction cible et la fraction bourg-centre.

Je partage votre constat : il faut sans doute faire évoluer la fraction bourg-centre, dont les critères ne correspondent pas toujours aux réalités locales. Cette réflexion est engagée dans le cadre des travaux de réforme des dotations, en lien étroit avec les élus.

Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour rendre ces dotations plus lisibles, justes et cohérentes.

M. Patrick Chaize.  - Merci pour cette réponse positive. Nous sommes à votre disposition pour y travailler. Il faut plus de transparence sur les différents critères.

Paiement par le pétitionnaire de l'instruction des permis de construire

M. Laurent Burgoa .  - J'attire votre attention sur les difficultés financières des communes face au coût de l'instruction des permis de construire et autres documents d'urbanisme. Depuis le désengagement des services de l'État, la facture pèse sur les communes, surtout les plus petites qui sont exposées à une forte pression foncière aux abords des grandes agglomérations.

Le coût pour la commune s'élève bien souvent à 10 000 euros par an, soit 500 euros par dossier. De plus, certains pétitionnaires déposent des dossiers mal préparés qui demandent beaucoup de temps d'étude.

Auparavant, la direction départementale de l'équipement (DDE) réalisait cette instruction gratuitement pour les communes.

Il semble légitime que le demandeur d'un permis de construire paie le coût de son instruction.

Quelles modalités le Gouvernement envisage-t-il pour soutenir financièrement les communes confrontées à ce surcoût ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - Depuis le retrait progressif de l'État, beaucoup d'élus ressentent le poids de cette charge nouvelle, souvent disproportionnée. Instruire un permis de construire n'est pas un acte administratif mais relève d'enjeux d'aménagement, de sécurité et de responsabilité.

La loi a posé un cadre clair : ces compétences sont décentralisées. Néanmoins, l'État reste présent pour les communes de moins de 10 000 habitants ne relevant pas d'un grand EPCI ; il peut assurer gratuitement l'étude technique des dossiers.

En outre, la mutualisation entre communes, par des services communs d'instruction, est encouragée. Depuis la loi Elan de 2018, il est également possible de recourir à un prestataire privé.

La loi a exclu de faire porter le coût sur le pétitionnaire. C'est une question de principe. Un permis de construire reste un acte public dont l'instruction relève de la puissance publique.

Pour autant, le Gouvernement n'ignore pas la tension financière. La dotation générale de décentralisation, d'un montant de 26 millions d'euros en 2025, soutient les communes dans l'élaboration de leurs documents d'urbanisme. Il n'est pas question de laisser les maires seuls.

M. Laurent Burgoa.  - Je sais que vous connaissez bien le sujet. Je crois néanmoins qu'il faudrait faire payer davantage l'usager que le contribuable.

Constat d'insalubrité d'un logement

Mme Laurence Garnier .  - J'ai été alertée par le maire de La Chapelle-Glain, petite commune rurale de Loire-Atlantique, qui était sollicité pour réaliser un constat d'insalubrité d'un logement. Effectivement, le maire a la responsabilité de contrôler les règles d'hygiène et de sécurité des logements. Cela signifie visiter le logement, entreprendre une médiation avec le propriétaire ou le locataire, rédiger un courrier ou un arrêté enjoignant d'effectuer les travaux nécessaires, réaliser une visite de contrôle, et signer, le cas échéant, un procès-verbal d'infraction au règlement sanitaire départemental (RSD).

Si la commune dispose d'un service communal d'hygiène et de santé (SCHS), tout se passe bien, en lien avec la préfecture et l'agence régionale de santé (ARS). Mais si la commune est trop petite pour disposer d'un tel service, le maire est souvent mis en difficulté. Pouvez-vous confirmer que le constat d'insalubrité doit être réalisé par l'ARS et non le maire, dans ce dernier cas ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - La salubrité des logements est une question de santé publique, de sécurité et de dignité des habitants. En la matière, la répartition des compétences peut sembler complexe. Le pouvoir de police spécial en matière d'insalubrité relève du préfet, sur le fondement du code de la construction et de l'habitation. Néanmoins, le maire reste toujours en première ligne. C'est lui qui alerte, constate et transmet le signalement.

Lorsque la commune ne dispose pas d'un SCHS, c'est bien à l'ARS de réaliser le rapport.

Les maires ne doivent jamais être seuls. L'État les accompagne systématiquement. Je sais que ces situations sont souvent lourdes. Les maires doivent faire face à la détresse des familles tout en appliquant la loi.

Vous pouvez compter sur les préfets comme sur les ARS.

Mme Laurence Garnier.  - Merci pour cette clarification bienvenue. Je transmettrai cette réponse au maire de La Chapelle-Glain.

Loi SRU et perception des DMTO

M. Max Brisson .  - Les communes de plus de 3 500 habitants sont soumises aux obligations de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), qui leur impose la mise en conformité de leurs politiques en matière de logements sociaux et d'aménagement, alors que le code général des impôts dispose que seules les communes de 5 000 habitants et plus perçoivent directement les droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

De ce fait, les communes de 3 500 et 4 999 habitants doivent assumer les charges et contraintes fixées par la loi SRU, sans bénéficier en retour du levier financier de la perception directe des DMTO, précieux pour assumer des obligations souvent très coûteuses.

Comment expliquer un tel traitement différencié ? Le Gouvernement compte-t-il autoriser la perception directe des DMTO pour ces communes ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - En effet, la situation peut sembler incohérente.

Le régime actuel distingue deux cas. Les communes de plus de 5 000 habitants et celles classées stations de tourisme perçoivent directement les DMTO. Les communes de moins de 5 000 habitants bénéficient d'une attribution via le fonds départemental de péréquation, alimenté par le produit de cette taxe. Ce fonds est réparti par le conseil départemental selon des critères précis et permet à toutes les communes, même les plus petites, de bénéficier d'un levier financier.

Les communes de 3 500 à 5 000 habitants ne sont donc pas privées de tout soutien. Toutefois, certains effets de seuil semblent injustes dès lors que ces communes supportent des obligations nouvelles, notamment au titre de la loi SRU.

Le Gouvernement est attentif à l'équité de ce dispositif et à sa possible évolution. Une réflexion sera menée dans le cadre des discussions sur les dotations locales.

M. Max Brisson.  - Merci pour votre ouverture. Beaucoup de maires de la côte basque seront très heureux de travailler sur une évolution de la législation. Les communes concernées ne sont pas les plus favorisées par le fonds départemental de péréquation.

Recensement de la voirie communale pour le calcul de la DSR

M. Jean-Michel Arnaud .  - La loi de finances (LFI) pour 2025 a modifié le mode de calcul de la voirie communale pour le calcul de la dotation de solidarité rurale (DSR), avec un recensement basé sur la typologie de la voirie et non plus sur sa domanialité. C'est l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) qui produit désormais les données de référence, à partir de données topographiques, excluant de fait les chemins et les routes non revêtues.

Les territoires ruraux de montagne disposent d'un grand réseau de voirie non revêtue, et la minoration du linéaire de voirie communale y est importante. Dans les Hautes-Alpes, la longueur de voirie est passée de 2 838 à 2 520 km, soit une baisse de 11 % depuis 2024, avec un effet significatif sur la DSR. C'est le maire de Molines-en-Queyras qui m'a signalé le problème.

Comment éviter que ces modalités de calculs ne se traduisent par une minoration de la DSR pour les communes de montagne ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - Depuis la LFI de 2025, les données de voirie utilisées pour la répartition de la DSR ne proviennent plus des délibérations communales, mais des bases de données de l'IGN. L'objectif est d'alléger le travail administratif des mairies et des préfectures, de fiabiliser les données et de garantir une égalité de traitement.

Les chemins non revêtus ne sont pas intégrés dans ce nouveau mode de calcul - ils ne l'étaient pas davantage dans l'ancienne méthode - et la longueur de voirie n'intervient qu'à hauteur de 30 % dans le calcul de la DSR.

Je partage toutefois votre inquiétude pour les communes qui ont un habitat dispersé, et donc une voirie communale très étendue.

Dans les Hautes-Alpes, la longueur de voirie recensée par l'IGN n'a finalement baissé que de 1,9 %, tandis que 81 % des communes ont vu leur DSR augmenter entre 2024 et 2025, avec une hausse moyenne de plus de 10 %.

Le Gouvernement restera attentif. Si nécessaire, nous ajusterons les dispositifs, toujours en concertation avec les élus.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Ces chiffres ne sont pas ceux de l'AMF. La voirie non bitumée est spécifique à la montagne, car elle évite les problèmes liés au gel et au dégel. Il faudra vérifier les chiffres et veiller à ne pas pénaliser les communes de montagne.

Arrêté de péril imminent

M. Bruno Rojouan .  - Quand un bâtiment menace de tomber en ruine, l'arrêté de péril imminent permet aux maires de mettre en demeure un propriétaire de réaliser les travaux de sécurisation et autorise la commune à se substituer à lui en cas de carence. La commune doit alors avancer les fonds, avec la possibilité de recouvrer les sommes auprès du propriétaire.

Or, dans la pratique, le recouvrement des sommes est souvent très long, incertain, voire impossible - propriétaires insolvables, domiciliés à l'étranger ou introuvables, biens en indivision, successions non réglées.

En outre, les aides de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) ne financent pas les travaux liés à un arrêté de péril imminent, laissant les communes sans soutien financier immédiat.

Résultat, des communes doivent engager des dizaines, voire des centaines de milliers d'euros sans garantie de recouvrement, au détriment du budget communal.

Le Gouvernement envisage-t-il de sécuriser juridiquement et financièrement les maires ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - Face à ces situations, les maires sont souvent au pied du mur. Protéger les habitants demande d'engager des travaux d'urgence très coûteux, sans garantie de récupérer les sommes engagées.

L'État a agi pour sécuriser juridiquement et financièrement les élus. Depuis l'ordonnance du 16 septembre 2020, le cadre a été simplifié et renforcé. Le comptable public peut être mobilisé pour assurer le recouvrement des créances et les maires bénéficient désormais de garanties légales : la solidarité entre vendeurs et acquéreurs d'un bien ayant fait l'objet de travaux d'office, la solidarité entre co-indivisaires pour éviter qu'une succession bloquée n'empêche le recouvrement. Par ailleurs, l'hypothèque légale garantit la créance de la commune en cas de défaillance du propriétaire.

S'agissant du financement, le fonds d'aide au relogement d'urgence peut être mobilisé, non seulement pour l'hébergement temporaire des occupants évacués, mais aussi pour les travaux d'urgence et de sécurisation. Enfin, dans les cas de mise en sécurité ordinaire, l'Anah peut intervenir jusqu'à 50 % du coût des travaux prescrits.

Le maire n'est pas seul. L'État lui donne les leviers, les garanties et les soutiens financiers nécessaires pour agir sans crainte de mettre en péril les finances de sa commune. Souvent, le problème reste cependant entier.

Vétusté des piscines municipales

M. Fabien Genet .  - La noyade demeure la première cause de mortalité accidentelle chez les moins de 25 ans. L'apprentissage de la natation est donc essentiel et les piscines publiques sont des infrastructures indispensables à la vie de nos territoires. Nombre d'entre elles datent du plan « Mille piscines » des années 1970. Étant vétustes et coûteuses, beaucoup de collectivités envisagent de les fermer ou de réduire leurs heures d'ouverture, notamment dans les territoires ruraux.

En Saône-et-Loire, plusieurs communes, comme Digoin, peinent à maintenir leurs piscines en fonctionnement. Il est urgent de rénover ces équipements, or cofinancer ces travaux est difficile.

Le Gouvernement envisage-t-il un plan de soutien aux équipements de natation en milieu rural, afin de garantir l'égalité d'accès à l'apprentissage de la natation, renforcer la prévention des noyades et accompagner la rénovation énergétique des infrastructures ?

M. Michel Fournier, ministre délégué chargé de la ruralité .  - Depuis 2017, l'État s'est mobilisé aux côtés des collectivités pour créer et rénover des équipements sportifs, en particulier à l'occasion des jeux Olympiques et Paralympiques. La mobilisation se poursuit. Les piscines municipales peuvent bénéficier de plusieurs leviers de financement : DSIL, DETR, dotation politique de la ville (DPV).

En 2024, plus de 80 projets de piscines dans les quartiers prioritaires ont été soutenus, pour environ 18 millions d'euros, dont 49 projets via la DETR. Dans votre département, le chauffage de la piscine de La Clayette a été rénové grâce à une subvention de 21 000 euros.

L'État agit également à travers le plan « 5 000 équipements - Génération 2024 » porté par l'Agence nationale du sport (ANS). Doté de près de 100 millions d'euros en 2025, ce plan vise à créer ou rénover 5 000 équipements sportifs entre 2024 et 2026, en ciblant particulièrement les territoires carencés. Environ 25 % des crédits iront à la construction et à la rénovation de piscines, afin de favoriser la transition énergétique, la sobriété foncière et la réduction des coûts d'exploitation.

M. Fabien Genet.  - Vous avez cité la DSIL ou la DETR. Je ne doute pas que vous serez à nos côtés au cours des débats budgétaires, monsieur le ministre, pour défendre leur maintien.

La séance, suspendue à midi quarante, reprend à 14 h 30.