II. UN PARTENARIAT POLITIQUE RENOUVELÉ DANS LE CONTEXTE DE LA DIVISION DE LA PÉNINSULE CORÉENNE
A. UNE COOPÉRATION MILITAIRE VECTEUR D'INFLUENCE
Trois mille deux cents volontaires français, dont 270 mourront au combat, ont combattu pendant la guerre de Corée (1950-1953), sous le commandement du général Monclar, au sein du 23ème régiment de la 2 ème division d'infanterie américaine. La délégation sénatoriale a pu apprécier la reconnaissance des Sud-Coréens au soutien apporté par notre pays, lors de cérémonies sur le Chipyong-ni, où un monument est dédié au Bataillon Français de Corée, et au cimetière des Nations-Unies, à Pusan. Des gerbes ont été déposées par les sénateurs en reconnaissance des combats menés par les combattants français.
Un chemin de la mémoire sur les lieux (notamment Chipyong-ni, Arrow Head, Yanggu-Crèvecoeur, Hongcheon...) où ont combattu les soldats français achève de se mettre en place en Corée, à l'initiative notamment de notre collègue de l'Assemblée nationale Patrick Beaudoin, député du Val-de-Marne, président du groupe homologue de l'Assemblée nationale. Le site installé dans la zone démilitarisée à Arrow Head, comportant un monument principal et deux stèles dans la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare les deux Corée de part et d'autre du trente-huitième parallèle, rappelant le sacrifice des soldats français, premiers à avoir franchi les lignes adverses, ce qui leur a valu l'estime et la reconnaissance des Américains et des Sud-Coréens. Quelques monuments restent à installer, notamment à Wonju, pour compléter ce chemin de la mémoire et assurer la transmission entre les générations.
Par ailleurs, le site de Arrow Head se trouve dans une zone ayant vocation à devenir un parc national protégé, lieu de mémoire, d'histoire et d'instruction civique et pédagogique, mais aussi de protection de l'environnement et d'un écosystème qui a pu se développer dans le contexte de la division du pays, avec la cessation de certaines activités économiques de par et d'autre de la DMZ. De fait, parmi les différents projets de transformation de la DMZ après la réunification de la Corée (constitution d'une zone économique,...), la création d'un parc naturel, consacré également à la mémoire et à la réconciliation entre les Coréens, est l'option la plus souhaitable, pour laquelle la France disposera à la fois d'une expertise reconnue, et aussi de positions qu'il nous faut conforter dès à présent.
Le soixantième anniversaire du déclenchement de la guerre de Corée, en juin 2010, sera l'occasion de manifestations en Corée du Sud et en France : Chipyong-ni devrait être un des trois sites principaux de commémoration, et pourrait donner lieu à un renforcement de la coopération militaire franco-coréenne, avec l'appui du groupe interparlementaire d'amitié, entre la 20ème division d'infanterie coréenne de Chipyong-ni, gardienne des monuments français de Chipyong-ni et Twin-Tunnels, et le Lycée français de Séoul. Les échanges sont déjà formalisés par une convention écrite en date du 26 septembre 2008, dans la recherche toutefois d'un partenaire français qui permettrait de concrétiser un jumelage. Cette coopération a d'ores et déjà donné les résultats suivants :
- l'organisation d'une journée porte ouverte pour les élèves du Lycée français,
- l'envoi de militaires francophones au lycée (dont des officiers Saint-Cyriens) pour des cours d'histoire,
- en 2009, la fanfare de la 20 ème division a ouvert pour la deuxième fois la Fête de la musique dont le lycée est pilote (concert initial, déjeuner, parade dans les rues du quartier français ayant impliqué la communauté franco-coréenne derrière elle, ouverture de la soirée musicale).
L'action ainsi menée, tout en soutenant la francophonie, tient compte des liens particuliers tissés dans le domaine militaire comme base d'une coopération plus large. La France peut en effet jouer une place particulière en Corée du Sud, où les Etats-Unis restent certes le partenaire majeur - pour preuve les étudiants sud-coréens choisissant en priorité, à moyens financiers comparables, une formation aux Etats-Unis - mais dans une relation complexe avec la puissance américaine, dont les soldats stationnent toujours sur le sol de la péninsule coréenne.
Le groupe interparlementaire d'amitié insiste sur la nécessité de préserver nos intérêts en Corée du Sud, en poursuivant les programmes de formation d'officiers, notamment saint-cyriens (dix depuis 2000), potentiellement menacés par des restrictions budgétaires. A un coût réduit, ces actions assurent le succès d'une diplomatie d'influence, les jeunes officiers formés, ayant reçu une culture francophone, ayant vocation, demain, à occuper des postes-clés dans l'Etat-major sud-coréen. Par ailleurs, l'interruption de ces programmes risquerait d'avoir des conséquences irréversibles sur le financement des professeurs de français dans les académies coréennes, préjudiciable à la défense de la francophonie : le maintien du département de français de l'Académie navale coréenne est ainsi directement corrélé à la poursuite de la formation d'un candidat coréen à l'école navale (le programme en cours couvrant la période 2009-2011).