Service des études juridiques (mars 2009)

ITALIE

Le nouveau code de procédure pénale, entré en vigueur en 1989, a entraîné la transformation de la procédure, qui est devenue principalement accusatoire, même si quelques éléments de type inquisitoire ont été réintroduits ensuite.

Lors de l'entrée en vigueur du nouveau code de procédure pénale, le juge d'instruction et la phase de l'instruction ont été supprimés .

Au lieu de l'instruction, se déroule une phase d'investigations préliminaires, menée par le ministère public . Le juge d'instruction a été remplacé par le juge des investigations préliminaires, qui n'a aucun pouvoir d'initiative, mais qui valide et autorise les actes d'information les plus susceptibles de porter atteinte aux libertés.

1) Les acteurs de l'instruction

Le ministère public est chargé de l'enquête préliminaire, qu'il réalise avec l'aide de la police judiciaire et sous le contrôle du juge des investigations préliminaires ( giudice per le indagini preliminari ).

L'article 109 de la Constitution place la police judiciaire sous la subordination du ministère public : « L'autorité judiciaire dispose directement de la police judiciaire ». Par conséquent, les officiers de police judiciaire travaillent sous la direction du ministère public quel que soit leur corps d'origine (police nationale ou gendarmerie, rattachées respectivement aux ministres de l'intérieur et de la défense).

Le juge des investigations préliminaires est le garant du respect de la légalité : il valide les mesures attentatoires aux libertés que le ministère public a la possibilité de prendre en cas d'urgence et les autorise dans les autres cas. Il n'est pas saisi du dossier, mais il se prononce sur certaines questions particulières.

Le juge met également en oeuvre, à la demande du ministère public ou de la personne mise en examen, la procédure dite de l'incident probatoire , qui permet, à titre exceptionnel, de recueillir des éléments de preuve pendant l'enquête préliminaire et de déroger ainsi au principe général selon lequel les éléments de preuve sont recueillis exclusivement pendant la phase de jugement.

2) Le statut du ministère public

Le ministère public se caractérise par son indépendance à l'égard des autres pouvoirs et par son autonomie interne.

D'après l'article 104 de la Constitution, « La magistrature constitue un corps autonome et indépendant de tout autre pouvoir ». Par ailleurs, l'article 107 de la Constitution donne aux membres du parquet la même indépendance qu'aux magistrats : « Le ministère public jouit des garanties établies à son égard par les règles relatives à l'ordre judiciaire ». Le parquet n'est donc pas placé sous l'autorité du ministre de la justice. La Cour constitutionnelle a affirmé à plusieurs reprises l'indépendance de la magistrature, et notamment du parquet, par rapport aux autres pouvoirs.

Comme en France, les carrières de juge et de procureur ne sont pas séparées : les passages de la magistrature assise à la magistrature debout, et inversement, sont fréquents.

Le Conseil supérieur de la magistrature garantit l'indépendance des juges et des procureurs . L'article 105 de la Constitution lui attribue en effet la compétence sur toutes les décisions relatives à la carrière des magistrats et des membres du parquet : « Les nominations, les affectations et les mutations, les promotions et les mesures disciplinaires concernant les magistrats sont du ressort du Conseil supérieur de la magistrature, selon les règles de l'ordre judiciaire », tandis que l'article 110 limite les attributions du ministre de la justice aux questions d'organisation et de fonctionnement : « Sous réserve des compétences du conseil supérieur de la magistrature, il appartient au ministre de la justice de veiller à l'organisation et au fonctionnement des services relatifs à la justice . »

L'autonomie de l'ensemble du ministère public se double d'une forte indépendance de chacun de ses membres , car les pouvoirs hiérarchiques formellement attribués aux chefs de parquet ont souvent été contestés - et avec succès - devant le conseil supérieur de la magistrature depuis le début des années 70. En cas de désaccord sur le déroulement d'une enquête, un procureur ne peut pas obliger un substitut à accomplir certains actes. Toutefois, le code de procédure pénale permet au procureur général près la cour d'appel de se substituer au magistrat désigné pour mener une enquête, mais il ne peut le faire que dans certains cas limitativement énumérés et par un acte qui doit être motivé. Cette disposition vise notamment à empêcher toute inertie de la part du ministère public.

Malgré l'introduction de nombreux éléments du modèle accusatoire dans la procédure pénale, le principe de légalité des poursuites , consacré par l'article 112 de la Constitution, a été maintenu. Il est scrupuleusement respecté et protège les membres du parquet de toute injonction hiérarchique tendant à empêcher que des poursuites soient engagées.

La loi n° 150 du 25 juillet 2005, qui donne délégation au gouvernement pour réformer l'organisation judiciaire, prévoyait notamment de limiter l'autonomie des membres du ministère public. D'après ce texte, le procureur de la République devenait le « titulaire exclusif de l'action pénale », et les autres membres du parquet recevaient des délégations « pour la réalisation de certains actes ». La même loi organisait aussi la séparation des carrières de juge du siège et du parquet. Les décrets nécessaires à l'exercice de cette délégation n'ont pas été adoptés.

3) L'indépendance de l'organe d'instruction

Lors de l'enquête préliminaire, le ministère public dispose de prérogatives étendues et peut requérir la police pour la réalisation de tous les actes qu'il estime utiles, qu'il s'agisse de l'activité générale d'enquête ou d'actes spécifiques (perquisitions, saisies, etc.).

Le code de procédure pénale encadre toutefois l'activité du ministère public pendant cette phase de la procédure :

- il l'oblige à instruire à charge et à décharge ;

- il prévoit que le juge des investigations préliminaires contrôle ceux de ses actes qui mettent le plus gravement en cause les libertés individuelles (placement en détention provisoire, écoutes téléphoniques, interceptions électroniques, etc.) ;

- il limite la durée de l'enquête à six mois (un an pour les affaires les plus graves ou les plus complexes), mais prévoit que ce délai peut être prolongé. Les demandes de prolongations doivent être motivées et présentées au juge des investigations préliminaires, qui les accorde par tranche de six mois . La durée totale de l'enquête préliminaire est limitée à dix-huit mois ou à deux ans selon la nature de l'infraction.

4) La séparation de l'instruction et du jugement

Lors de la révision du code de procédure pénale, le législateur a souhaité séparer au maximum l'enquête préliminaire du jugement : les preuves doivent être établies devant un juge qui ignore les actes de procédure, et l'enquête préliminaire menée par le ministère public n'a aucune valeur probatoire.

Par conséquent, le juge qui décide de l'ouverture du procès ne doit pas avoir participé à l'enquête préliminaire et ne doit pas participer au jugement, tandis que le juge de l'enquête préliminaire ne peut pas non plus participer au jugement. Enfin, le jugement doit en principe se fonder sur les seuls éléments de preuve recueillis pendant l'audience .

À l'issue de la phase d'enquête, le ministère public demande le classement si les conditions d'exercice de l'action pénale ne sont pas remplies (dénonciation infondée, impossibilité d'identifier l'auteur de l'infraction, etc.). Si le juge des investigations préliminaires estime que la requête de classement formulée par le ministère public n'est pas justifiée, il peut demander que l'enquête soit poursuivie en fixant un délai à cet effet ou imposer au ministère public de formuler l'accusation dans le délai de dix jours.

Si le ministère public estime qu'il y a lieu de poursuivre l'infraction, il remet au juge de l'audience préliminaire ( giudice dell'udienza preliminare ) une demande de renvoi en jugement. Un débat contradictoire entre le ministère public et la défense a alors lieu en présence du juge de l'audience préliminaire, qui décide le non-lieu ou l'ouverture du procès. Le juge de l'audience préliminaire ne peut pas être la même personne que le juge des investigations préliminaires. En effet, le juge des investigations préliminaires, bien qu'il ne participe pas directement à l'enquête préliminaire, a connaissance de certains éléments, par exemple s'il a autorisé des écoutes téléphoniques ou a autorisé un placement en détention provisoire. C'est seulement lorsque le rôle du juge des investigations préliminaires dans l'enquête préliminaire s'est limité à des actes portant sur la procédure stricto sensu (autorisation de reprise de l'action publique par exemple) ou sur des éléments « neutres » (autorisation donnée à un détenu de consulter à ses frais un médecin de son choix par exemple) que ce dernier peut tenir l'audience préliminaire et jouer le rôle du juge de l'audience préliminaire.

Le code de procédure pénale exclut que le juge de l'audience préliminaire et le juge des investigations préliminaires puissent faire partie de la juridiction de jugement. C'est seulement dans le cas, précédemment évoqué, où le rôle du juge des investigations préliminaires dans l'enquête préliminaire a été limité qu'une exception à cette règle est possible et que le juge des investigations préliminaires peut prendre part au jugement.

Comme le jugement doit se fonder sur les éléments de preuve recueillis pendant l'audience , au moment du renvoi en jugement, deux dossiers sont formés : le dossier pour les débats, communiqué à la juridiction de jugement, et le dossier du ministère public, transmis aux parties, mais dont la juridiction de jugement n'a pas connaissance. Ce dispositif empêche les juridictions de jugement de se trouver dans une situation de « pré-jugé ». Les procès verbaux des actes de l'enquête préliminaire doivent donc rester dans le dossier du ministère public.

Le dossier pour les débats comprend les actes relatifs à l'exercice de l'action publique et de l'action civile, les procès-verbaux des actes d'information qui ne peuvent pas être répétés ainsi que ceux réalisés pendant la procédure de l'incident probatoire, les éléments matériels constitutifs de l'infraction et l'extrait du casier judiciaire de la personne qui va être jugée.

La procédure dite de l'« incident probatoire » permet de faire exception à cette règle. Elle se déroule pendant l'enquête préliminaire sous la direction du juge des investigations préliminaires (ou pendant l'audience préliminaire sous la direction du juge de l'audience préliminaire) et permet à la personne mise en cause ou au ministère public d'obtenir des éléments de preuve qui ne peuvent pas être recueillis par la voie normale pendant l'audience, par exemple le témoignage d'un mourant ou l'expertise d'un objet périssable. Cette procédure constitue donc une parenthèse juridictionnelle pendant l'enquête préliminaire. De façon à éviter toute utilisation dilatoire, le code de procédure pénale comprend une liste limitative des preuves justifiant la mise en oeuvre de l'incident probatoire. Les éléments de preuve qui sont alors recueillis sont transmis à la juridiction de jugement.

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