Mars 2024

- LÉGISLATION COMPARÉE -

NOTE

sur

LES REPENTIS FACE À LA JUSTICE PÉNALE

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Allemagne - Angleterre et pays de Galles - Belgique - Espagne - Italie - Pays-Bas

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Cette note a été réalisée à la demande de la commission d'enquête consacrée à l'impact du narcotrafic en France et aux mesures à prendre pour y remédier.

Cette note complète l'étude de législation comparée LC n° 124 « Les repentis face à la justice pénale » de 2003

AVERTISSEMENT

Ce document constitue un instrument de travail élaboré à la demande des sénateurs, à partir de documents en langue originale, par la Division de la Législation comparée de la direction de l'initiative parlementaire et des délégations. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat.

1. Synthèse

·  Le champ des infractions visées

En Angleterre et au pays de Galles, la loi sur la grande criminalité et la police, adoptée en 2005, a donné une base légale à la pratique établie par la jurisprudence des « Queen's ou King's evidence ». Le champ d'application du régime des repentis demeure cependant illimité et aucune infraction n'est précisément visée.

Dans les pays d'Europe continentale, depuis l'étude de 2003, le régime des repentis a été graduellement étendu à d'autres infractions en Allemagne, en Belgique et en Espagne

En 2009, l'Allemagne a introduit dans le code pénal une « grande réglementation de la Couronne » à la portée très large, qui renvoie à une longue liste d'infractions graves et punies de lourdes peines privatives de libertés. Ce régime cohabite ainsi avec « la petite réglementation de la Couronne » construite progressivement depuis les années 1970 et qui vise des infractions passibles de peines moins lourdes (blanchiment d'argent, haute trahison, trafic de stupéfiants etc.).

Le régime juridique des repentis introduit en Belgique en 2018 a également un champ d'application très large, couvrant une quarantaine d'infractions parmi les plus graves (concernant notamment la grande criminalité, le terrorisme, l'intégrité physique des personnes, des biens, le trafic de stupéfiants, la corruption ou la fraude informatique).

En Espagne, les dispositions de la loi organique n° 7/2003 du 30 juin 2003 permettant au juge de réduire les peines des criminels acceptant de collaborer avec la justice dans des affaires liées au trafic de stupéfiants et au terrorisme, ont été étendues à d'autres catégories d'infractions (fraude fiscale et sociale en 2012, malversation en 2015 et corruption en 2022).

Aux Pays-Bas, la loi relative aux « témoins de la Couronne », adoptée en 2006, a également un champ d'application large puisqu'elle vise non seulement les infractions commises en bande organisée ainsi que toutes les infractions les plus graves, punissables de peines de prison d'au moins huit ans.

En Italie, le régime des collaborateurs de justice avait déjà été considérablement étendu par la loi du 13 février 2001, visant en particulier les associations mafieuses et le trafic de stupéfiants, et a peu évolué depuis lors.

· La nature de la collaboration et les avantages accordés aux repentis en matière pénale

En Angleterre, en Belgique, aux Pays-Bas et en Italie, un accord écrit doit être établi entre le repenti et le procureur sur les déclarations fournies et les avantages ou promesses consentis en contrepartie de leur collaboration. La loi italienne fixe en outre un délai strict de 180 jours, à compter de l'expression par le repenti de son intention de coopérer avec la justice, pour conclure cet accord. Par ailleurs, en Belgique et aux Pays-Bas, tout ou partie de l'accord entre le repenti et le procureur fait l'objet d'un contrôle par un juge d'instruction, notamment pour apprécier si l'avantage promis est proportionnel à l'importance des révélations.

Les avantages accordés en contrepartie de la collaboration avec la justice sont en règle générale des réductions de peine, des aménagements ou des conditions de détention plus avantageuses (notamment en Italie et en Belgique), voire dans certains cas concernant des infractions mineures une dispense de peine (Allemagne, Espagne, projet de réforme aux Pays-Bas) ou dans certains exceptionnels en Angleterre, une immunité totale ou partielle.

Dans tous les cas, l'ampleur de l'avantage effectivement accordé au collaborateur de justice relève de l'appréciation du juge.

· Des mesures de protection réservées aux repentis particulièrement menacés

En règle générale, les repentis peuvent bénéficier des dispositions en faveur des témoins menacés mais les mesures de protection spéciales sont réservées aux repentis particulièrement menacés. L'octroi d'un traitement pénal favorable n'entraîne pas automatiquement le bénéfice de mesures de protection, dont la mise en place est décidée par les forces de police.

L'exemple néerlandais, où trois proches d'un témoin repenti ont été assassinés entre 2018 et 2021, montre cependant l'importance d'un programme de protection des témoins suffisant pour garantir la viabilité d'un régime de collaboration avec la justice.

· La valeur probatoire des déclarations des repentis

La valeur des déclarations des repentis est généralement laissée à l'appréciation du juge.

En Allemagne, en Angleterre et en Espagne, aucune disposition n'interdit qu'une condamnation soit prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti, même si les juges sont invités à la prudence.

Les déclarations d'un repenti doivent en revanche être corroborées par d'autres éléments de preuve en Belgique, en Italie et aux Pays-Bas.

*

Enfin, il convient de mentionner que des propositions de réforme du régime juridique des repentis ont été présentées par les gouvernements de Belgique en 2023 et des Pays-Bas en 2022 mais celles-ci n'ont pas abouti à ce jour.

2. Tableau synoptique
 

Base juridique

Infractions visées

Nature et forme
de la collaboration

Avantages accordés

Autres conditions

Allemagne

Groâe Kronzeugenregelung
(art. 46b StGB)

et kleine Kronzeugenregelung

Infractions les plus graves punies de lourdes peines privatives de liberté.

Infractions punies de peines moins lourdes (trahison, formations d'associations terroristes, blanchiment d'argent, trafic de stupéfiants etc.)

Pas de procédure formelle concernant l'accord repenti-ministère public.

Déclarations apportant une contribution décisive à l'élucidation, empêchant une infraction ou réduisant un risque.

Réduction de peine, voire dispense (si pas plus de 3 ans de prison), selon l'appréciation du juge et la nature de la collaboration (aide à l'élucidation, à la prévention, « repentir actif » ...).
Encadrement des réductions de peine par l'art. 49 StGB.

Pour la grande réglementation de la Couronne, les informations fournies doivent être « en lien » avec l'infraction commise par le repenti.

Angleterre
et pays de Galles

Serious Organised Crime and Police Act 2005 et Sentencing Act 2020.

Aucune précisément.
Immunité uniquement dans les affaires concernant un crime ou un délit.

Accord écrit.

Renseignements ou preuves en vue d'un procès.

Immunité partielle ou totale, réduction et révision de peine.

Pour les réductions de peine, plaider coupable et avoir été ou en voie d'être condamné par la Crown Court.

Belgique

Articles 216/1 et suivants du code de l'instruction criminelle (introduits par la loi du 22 juillet 2018).

Quarantaine d'infractions parmi les plus graves (dont trafic de stupéfiants).

Mémorandum écrit.

Promesse de réduction de peine soumise au contrôle d'un juge d'instruction.

Déclarations substantielles, révélatrices, sincères et complètes.

Réduction et aménagement de peine (dans ses modalités d'exécution ou concernant la phase de détention), en fonctions de la gravité des faits commis et dénoncés par le repenti.

Prise en compte des principes de pertinence, de nécessité et de subsidiarité, de proportionnalité, d'absence dangerosité et de pondération.

Espagne

Articles 90 et 92 du code pénal (introduits par la loi organique n° 7 du 30 juin 2003).

Infractions relatives au trafic de stupéfiants et au terrorisme.

Fraude fiscale et sociale, malversation, corruption.

Pas de procédure formelle concernant l'accord repenti-ministère public.

Signes non équivoques d'abandon des activités criminelles/terroristes et collaboration active avec les autorités.

Réduction de peine (d'un ou deux degrés par rapport à celle prévue par la loi), libération conditionnelle.
Exonération de responsabilité pénale uniquement pour la corruption ou les comportements frauduleux.

 

France

Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004.

Les infractions de complot

( art. 414-3, code pénal ) ; d'omission de témoignage en faveur d'un innocent

( art. 434-11, code pénal ) ; de faux témoignage
(art. 434-13 in fine, code pénal) et d'association de malfaiteurs

( art. 450-2, code pénal ) ; des infractions de trafic de stupéfiants

( art. 222-43, code pénal ) ; d'enlèvement ou de séquestration (art. 224-4 in fine, code pénal) ;

d'espionnage, trahison et mouvement insurrectionnel 

( art. 414-4, code pénal ) ;

de terrorisme

(art. 422-2, code pénal) ;

de fausses monnaies

( art. 442-10, code pénal )

Les exemptions et les réductions exceptionnelles sont accordées par le tribunal de l'application des peines selon les modalités prévues à l'article 712-7 du code pénal.

Les jugements du tribunal de l'application des peines sont rendus, après avis du représentant de l'administration pénitentiaire, à l'issue d'un débat contradictoire tenu en chambre du conseil, au cours duquel la juridiction entend les réquisitions du ministère public et les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat.

Une exemption ou une réduction de peine (art. 132-78 code pénal).

La réduction de peine peut aller jusqu'au tiers de la peine prononcée (art. 721-3 code pénal).

L'information communiquée par le repenti doit être d'une qualité suffisante pour permettre de faire cesser l'infraction, d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les autres auteurs ou complices.

Italie

Décret-loi n° 59
du 21 mars 1978.
Décret-loi n° 625
du 15 décembre 1979.

Décret-loi n° 8
du 15 janvier 1991, tel que modifié par la loi n° 45
du 13 février 2001.

Infractions terroristes, de subversion de l'ordre constitutionnel et diverses autres infractions graves dont l'association mafieuse, le trafic de stupéfiants, et l'enlèvement à des fins d'extorsion.

« Rapport illustratif » élaboré dans un délai de 180 jours à compter de l'expression du souhait de collaborer.

Reconnaissance des infractions reprochées et renoncement à utiliser la violence.

Réduction de peine (d'un tiers à la moitié pour les peines de prison) selon le régime de la « double voie » prévoyant des circonstances atténuantes pour ceux qui collaborent avec la justice.

Aménagements de peine (notamment traitements pénitentiaires plus favorables avant et après la condamnation).

Signature par le repenti souhaitant bénéficier de mesures de protection d'un engagement (notamment à respecter des règles de sécurité et à coopérer activement).

Pays-Bas

Articles 226 g à 226 k
du code de procédure pénale
(introduits par la loi du 12 mai 2005).

Infractions en bande organisée et infractions les plus graves (passibles d'une peine de prison de 8 ans ou plus).

Accord écrit détaillé, soumis au contrôle d'un juge d'instruction devant s'assurer de la légalité et du bien-fondé de l'accord.

Engagement du repenti à témoigner lors d'une audience et à donner toutes les informations dont il dispose.

Réduction de peine jusqu'à la moitié de la peine d'emprisonnement, aménagement de peine, apprécié par le juge en fonction de l'importance de la contribution.

 
3. Allemagne

Le droit pénal allemand prévoit un régime des repentis acceptant de collaborer avec la justice, qualifiés de « témoins de Couronne » (Kronzeuge). Selon la nature et la gravité des infractions, deux régimes cohabitent :

- d'une part, la « grande réglementation des témoins de la Couronne » : il s'agit d'un régime général introduit en 2009, défini à l'article 46b du code pénal et qui vise un vaste ensemble d'infractions punies des peines les plus lourdes ; il prévoit des réductions, voire l'annulation de peines pour le repenti ayant collaboré activement avec la Justice, selon des conditions précises ;

- d'autre part, la « petite réglementation des témoins de la Couronne », construite progressivement depuis les années 1970 et visant des infractions punies de peines moins lourdes (blanchiment d'argent, haute trahison, trafic de stupéfiants...), avec des conditions et des avantages inégaux selon le type d'infraction.

Outre les avantages sur le plan pénal, les repentis, en Allemagne, peuvent bénéficier d'un programme de protection des témoins, régi par la loi de décembre 2001. Cette loi définit les types de témoins éligibles, l'autorité décisionnelle, la confidentialité des informations, les conditions d'octroi d'une identité de couverture et des indemnités. Elle implique des services spécifiques au niveau fédéral et dans chaque Land, sous la responsabilité de l'Office fédéral de police criminelle.

S'agissant de la valeur probatoire des déclarations des repentis, aucune disposition n'interdit explicitement qu'une condamnation soit prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti, même si la Cour constitutionnelle fédérale exige que ce type de déclaration soit minutieusement vérifiée.

Confrontée au problème du terrorisme, la République fédérale allemande avait adopté une loi accordant un régime pénal particulier aux repentis, la loi du 9 juin 19891(*), qui modifiait notamment le code pénal et le code de procédure pénale. Cette loi est souvent qualifiée de loi sur le « témoin de la Couronne » (Kronzeugengesetz). Cette loi avait initialement été adoptée pour une durée limitée et s'appliquait aux seules infractions relevant du terrorisme. Son champ d'application fut étendu en 1994 à l'association de malfaiteurs et sa durée de validité prolongée à plusieurs reprises, de sorte qu'elle resta en vigueur jusqu'au 31 décembre 19992(*).

Toutefois, dès les années 1970, le législateur allemand avait mis en place un dispositif accordant un régime pénal particulier aux repentis, mais limité à certaines infractions. Ce dispositif, construit par étapes, s'est traduit par une révision progressive et éparse des articles du code pénal, notamment sur le terrorisme et la criminalité organisée (loi du 28 juillet 1981 sur la circulation des stupéfiants3(*) et introduction d'un article du code pénal relatif au blanchiment d'argent en 1992). Ces dispositions toujours en vigueur sont parfois dénommées « petite réglementation du témoin de la Couronne » (kleine Kronzeugenregelung), en opposition à la loi du 9 juin 1989.

Plus récemment, dans les années 2000, le législateur allemand a débattu de l'opportunité d'introduire dans le droit des mesures incitatives plus fortes, afin d'encourager la coopération des criminels dans la résolution et la prévention des crimes les plus graves, en particulier dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée. En effet, le gouvernement fédéral considérait les instruments juridiques de l'époque comme étant trop circonscrits et a donc proposé, en 2007, la création d'une réduction de peine spécifique pour les criminels coopératifs, indépendamment du type d'infraction, afin de faciliter la rupture des réseaux criminels, tout en excluant les auteurs de délits de droit commun4(*). Ce nouveau régime, adopté en 2009, est communément désigné « grande réglementation du témoin de la Couronne » (grosse Kronzeugenregelung).

a) La reconnaissance juridique des repentis
(1) Les infractions visées
(a) Dispositions relatives à la « grande réglementation du témoin de la Couronne »

La réforme de 2007-20095(*) s'est matérialisée par l'adoption de la loi du 28 mai 2009 relative à la détermination de la peine en cas d'aide à l'information et à la prévention6(*). Ce texte, entré en vigueur le 1er septembre 2009, a introduit dans le code pénal un nouvel article 46b7(*), dit de « grande réglementation du témoin de la Couronne » (grosse Kronzeugenregelung) et dont la portée est très large

L'article 46b vise un ensemble très vaste d'infractions et renvoie à une liste fixée au paragraphe 2 de l'article 100a du code de procédure pénale8(*). Il s'agit d'infractions graves et punies de lourdes peines privatives de libertés9(*) allant jusqu'à la réclusion criminelle à perpétuité.

À titre d'exemples, sont visés la corruption d'élus, les crimes contre la défense nationale, contre l'ordre public, la diffusion, l'acquisition et la possession de contenus pornographiques impliquant des mineurs, les homicides ou encore le vol en bande organisée.

Le champ d'application de la législation sur les repentis est limité par le fait qu'un repenti ne peut divulguer que des informations sur une infraction pénale ayant un « lien » avec l'infraction qu'il a commise.

Cette condition a été ajoutée à l'article 46b du code pénal en 2013, le législateur ayant estimé qu'une réduction ou une exemption de peine n'étaient pas appropriées pour des infractions aléatoires qui n'ont aucun lien avec les infractions commises par le repenti10(*).

L'article 46b définit ainsi deux situations attestant du lien entre les informations révélées et l'infraction dont est accusé celui qui souhaite collaborer. En effet, le repenti :

- soit, « a contribué de manière essentielle à la découverte d'une infraction (...) liée à son acte, en révélant volontairement ses connaissances » (alinéa 2) ;

- soit, « révèle volontairement ses connaissances à un service en temps utile pour qu'un acte (...), en rapport avec son acte et dont il sait qu'il est planifié, puisse encore être empêché » (alinéa 3).

(b) Dispositions relatives à la « petite réglementation du témoin de la Couronne »

Elles s'appliquent aux infractions définies par :

- les articles 81, 82 et 83 du code pénal11(*) : la préparation ou la projection, par la violence ou la menace de violence, d'actes de haute trahison contre l'État fédéral ou un pays étranger ;

- l'article 87 du code pénal12(*) : la participation à des actes de sabotage préparés à l'étranger, sur ordre d'un gouvernement, d'une association ou d'un organisme étranger ;

- l'article 89a du code pénal13(*) : la préparation d'un acte de violence grave menaçant l'État (par l'utilisation d'armes et de substances dangereuses) ;

- l'article 89c du code pénal14(*) : le financement d'actes de terrorisme ;

- l'article 98 du code pénal15(*) : les actes de trahison contre l'État, notamment les activités visant à obtenir ou à communiquer des secrets d'État pour une puissance étrangère ;

- les articles 129 et 129a du code pénal16(*) : la constitution d'organisations criminelles et la formation d'associations terroristes ; le premier article vise plus particulièrement la création, la participation, ou le soutien d'une association dont le but ou l'activité est dirigé vers la réalisation de crimes punissables d'une peine d'emprisonnement d'au moins deux ans et s'applique à des groupes ayant un intérêt commun supérieur, en excluant certaines associations politiques ; le second article vise les infractions liées à la création et à la participation à des associations dont les activités s'orientent vers des actes graves tels que le meurtre, le génocide, les crimes contre l'humanité, les dommages physiques ou psychiques graves, ainsi que diverses infractions dangereuses pour la collectivité ;

- l'article 149 du code pénal17(*) : la contrefaçon de monnaie ou de timbres fiscaux ;

- l'article 261 du code pénal18(*) : le blanchiment d'argent lié à la criminalité organisée ;

- les articles 307, 308, 309 et 310 du code pénal19(*) : ces articles visent certains crimes liés à la mise en danger délibérée de la vie, de la santé ou des biens d'autrui par l'utilisation de certaines technologies dangereuses (préparation d'une explosion nucléaire, utilisation d'explosifs, abus de radiations ionisantes ou préparation d'une explosion irradiante) ;

- les articles 315, 315a à 315f, 316, 316a à 316c, 317, 318 et 319 du code pénal20(*) : ces articles visent diverses formes de crimes ou délits liés aux transports, à la circulation routière, aux services publics, à la sécurité des personnes dans les véhicules, et à la protection des infrastructures critiques (notamment la perturbation de la navigation maritime ou du trafic aérien, ou encore l'entrave au bon fonctionnement des installations de télécommunication) ;

- enfin, les articles 29, 29a, 30 et 30a de la loi sur la circulation des stupéfiants21(*) : ces articles sanctionnent l'activité liée aux produits stupéfiants, notamment la culture, la fabrication, le commerce, l'importation, l'exportation, la vente, la cession et l'acquisition de drogues. Ils visent également la possession sans autorisation, la prescription et l'administration illégales, ainsi que la publicité prohibée pour les stupéfiants.

(2) Les personnes concernées

Elles s'appliquent uniquement aux personnes accusées des infractions définies par les articles cités plus hauts, dans la mesure où elles collaborent avec la justice, la nature de leur collaboration déterminant l'ampleur de la réduction de peine.

b) Les avantages accordés aux repentis
(1) Le traitement pénal
(a) L'article 46b : « grande réglementation du témoin de la Couronne »

Le premier paragraphe de l'article 46b prévoit deux possibilités (« variantes ») :

La variante de l'aide à l'élucidation (Aufklärungsvariante)

L'auteur de l'infraction doit avoir contribué de manière décisive à l'élucidation des faits punissables.

Pour appliquer cette variante, le tribunal examine, entre autres, l'étendue et la qualité des révélations de l'auteur, leurs conséquences pour l'élucidation ou la prévention des faits punissables, le moment des révélations, l'étendue de l'aide effectivement apportée aux autorités de police judiciaire, la gravité des actes répréhensibles révélés, ainsi que la relation entre ces circonstances et la gravité de l'infraction et de la faute de l'auteur22(*).

La variante de l'aide à la prévention (Verhinderungsvariante)

L'auteur doit avoir contribué, par ses révélations, à empêcher qu'une des infractions énumérées dans la liste de l'article 100a du code de procédure pénale ne soit commise. D'autres facteurs peuvent s'ajouter, tels que les intérêts de la victime.

Quelle que soit la variante, la collaboration permet au juge d'appliquer une atténuation de la peine, voire une dispense si l'infraction en question est passible d'une peine privative de liberté temporaire, et que l'auteur ne risque personnellement pas plus de trois ans d'emprisonnement.

On peut noter toutefois :

- d'une part, que ces dispositions ne s'appliquent pas si l'auteur d'infraction ne donne des informations qu'après l'ouverture de son procès ;

- d'autre part, que le droit allemand ne dispose pas de règles de procédure régissant la collaboration entre le repenti et la justice, pas plus qu'il ne dispose de règles de procédure concernant les accords. Dans la pratique, des accords sont conclus entre le parquet et le repenti avant que le juge n'applique une éventuelle réduction de peine, mais il n'existe pas de cadre formel prévu par le code de procédure pénale. In fine, seul le juge, indépendamment de tout accord, peut décider de l'atténuation éventuelle de la peine ou de la renonciation à celle-ci. L'accord passé entre le repenti et le parquet n'est donc pas contraignant23(*).

(b) Les menaces contre l'État

· Les articles 81, 82 et 83 du code pénal (Actes de haute trahison contre l'État fédéral ou un pays étranger)

Pour les infractions visées aux articles 81 à 83, l'article 83a24(*) introduit un régime de « repentir actif » (tätige Reue) :

- pour les infractions visées aux articles 81 et 82, il prévoit que « le tribunal peut, selon son appréciation, atténuer la peine voire renoncer à la sanction prévue par ces articles, si l'auteur renonce volontairement à poursuivre l'exécution de l'acte et écarte ou réduit sensiblement un risque qu'il a identifié de voir d'autres personnes poursuivre l'exécution de l'entreprise, ou s'il empêche volontairement la réalisation de l'infraction » ;

- pour les infractions visées à l'article 83, le tribunal peut appliquer la même disposition « si l'auteur de l'infraction renonce volontairement à son projet et s'il écarte ou réduit sensiblement un danger qu'il a provoqué et reconnu, à savoir que d'autres continuent à préparer l'entreprise ou à l'exécuter, ou s'il empêche volontairement la réalisation de l'infraction ».

L'article 87 du code pénal (Activités d'agents à des fins de sabotage)

Pour les activités d'agents à des fins de sabotage, l'article 87 dispose que « le tribunal peut renoncer à la sanction prévue si l'auteur de l'infraction renonce volontairement à son comportement et révèle ses connaissances à un service en temps utile, de telle sorte que les actes de sabotage dont il connaît la planification puissent encore être empêchés ».

Les articles 89a (Préparation d'un acte de violence grave menaçant l'État) et 89c du code pénal (Financement d'actes de terrorisme)

S'agissant de ces infractions, des dispositions identiques s'appliquent. Elles prévoient la possibilité, pour le tribunal, « selon son appréciation, d'atténuer la peine ou de renoncer à toute sanction, si l'auteur renonce volontairement à la poursuite de la préparation de l'acte (...) et s'il écarte ou réduit considérablement un danger qu'il a provoqué et reconnu, à savoir que d'autres continuent à préparer cet acte ou l'exécutent, ou s'il empêche volontairement la réalisation de cet acte ». Elles précisent également que « si, sans l'intervention de l'auteur, le danger désigné est écarté ou considérablement atténué ou si la réalisation de l'acte (...) est empêchée, ses efforts volontaires et sérieux pour atteindre cet objectif suffisent ».

L'article 98 du code pénal (Activité d'agent de trahison)

En l'espèce, la disposition en vigueur est très proche de celle prévue à l'article 87 du code pénal, à savoir que « le tribunal peut, selon son appréciation, atténuer la peine ou renoncer à toute sanction si l'auteur de l'infraction renonce volontairement à son comportement et révèle ses connaissances à un service ».

(c) Les articles 129 (Constitution d'organisations criminelles) et 129a (Formation d'associations terroristes) du code pénal

Le tribunal peut, selon son appréciation, atténuer la peine ou renoncer à toute sanction si l'auteur de l'infraction :

s'efforce volontairement et sérieusement d'empêcher le maintien de l'association ou la réalisation d'une infraction correspondant à ses objectifs ;

révèle volontairement ses connaissances à un service en temps utile, de telle sorte que les infractions dont il connaît la planification puissent encore être empêchées.

(d) La contrefaçon de monnaie ou de timbres fiscaux et le blanchiment d'argent

L'article 149 du code pénal (Contrefaçon de monnaie ou de timbres fiscaux)

En matière de faux-monnayage ou de contrefaçon de timbres fiscaux, l'article 149 permet au juge d'accorder l'immunité à l'auteur de cette infraction qui « renonce volontairement à l'exécution de l'acte préparé et écarte un danger qu'il a provoqué, à savoir que d'autres continuent à préparer l'acte ou l'exécutent, ou empêche la réalisation de l'acte et détruit ou rend inutilisables les moyens de falsification, dans la mesure où ils existent encore et sont utilisables pour la falsification, signale leur présence à une autorité ou les lui remet ».

L'article 261 du code pénal (Blanchiment d'argent)

L'article 261 permet lui aussi au juge d'accorder l'immunité à l'auteur de l'infraction, dès lors que ce dernier, « volontairement, dénonce ou provoque la dénonciation de l'infraction à l'autorité compétente (...) et procède à la saisie de l'objet ».

(e) Les articles 307 à 310 (Mise en danger délibérée de la vie, de la santé ou des biens d'autrui par l'utilisation de certaines technologies dangereuses) et les articles 315 à 319 du code pénal (divers crimes ou délits liés aux transports, à la circulation routière, aux services publics, à la sécurité des personnes dans les véhicules, et à la protection des infrastructures critiques)

À l'instar de l'article 83a du code pénal, les articles 314a25(*) et 32026(*) prévoient des régimes spécifiques de « repentir actif » (Tätige Reue) pour les catégories d'infractions visées respectivement aux articles 307 à 310 et aux articles 315 à 319. Le traitement pénal est inégal selon l'infraction visée ; ces articles prévoient que le tribunal peut, selon son appréciation, et en fonction de l'infraction :

atténuer la peine, si l'auteur renonce volontairement à poursuivre l'exécution de l'acte ou écarte le danger d'une autre manière ;

renoncer à toute peine, si l'auteur de l'infraction renonce volontairement à poursuivre la réalisation de l'infraction, écarte le danger d'une autre manière ou évite volontairement le danger avant qu'un dommage important ne survienne.

Les deux articles, de façon parallèle, prévoient aussi que, si le danger est écarté sans l'intervention de l'auteur de l'infraction, ses efforts volontaires et sérieux pour atteindre cet objectif suffisent.

(f) L'article 31 de la loi sur la circulation des stupéfiants

En matière de sanctions relatives au trafic de stupéfiants, l'article 31 prévoit un régime spécifique d'atténuation ou de dispense de peine.

Le tribunal peut atténuer la peine voire, si l'auteur n'a pas encouru de peine privative de liberté de plus de trois ans, y renoncer, « si l'auteur de l'infraction en révélant volontairement ses connaissances, a contribué de manière essentielle à la découverte d'une infraction visée aux articles 29 à 30a et liée à son acte », ou bien « s'il révèle volontairement ses connaissances à un service en temps utile pour qu'une infraction visée à aux articles 29.3, 29a.1, 30.1, 30a.1, qui est en rapport avec son acte et dont il connaît la planification, puisse encore être évitée ».

Il prévoit en outre que « si l'auteur a participé à l'infraction, sa contribution à l'élucidation (...) doit s'étendre au-delà de sa propre contribution à l'infraction ». La grande réglementation du témoin de la Couronne (article 46b du code pénal) s'applique alors par analogie.

(g) Les règles générales relatives à la réduction des peines

Les articles présentés plus haut et prévoyant des mesures de réduction de peine renvoient à l'article 49 du code pénal, qui encadre les modulations auxquels le juge est susceptible de recourir. En effet, le code pénal prévoit des peines minimales obligatoires et une peine maximale fixe.

L'article 49, paragraphe 1, prévoit trois hypothèses :

- en cas de peine de réclusion à perpétuité et dès lors que la loi permet une réduction de peine, le juge doit ordonner une peine d'emprisonnement de trois ans minimum. Cependant, la disposition générale sur les repentis modifie cette règle, remplaçant la réclusion à perpétuité par une peine d'emprisonnement de dix ans minimum ;

- dans les cas de réclusion à durée fixe, la réduction de peine correspond à un quart de la durée maximale. Ainsi, la peine maximale pour un homicide involontaire est réduite de quinze à onze ans et trois mois ;

- la troisième hypothèse est plus complexe et concerne les peines minimales obligatoires. Elle établit trois possibilités de réduction en fonction de la durée minimale obligatoire de la peine.

Lorsque les deuxième et troisième hypothèses sont combinées dans le cas d'un homicide involontaire (dans le cadre d'une peine normale de cinq à quinze ans d'emprisonnement), le juge peut sanctionner les repentis pour homicide involontaire d'une peine allant de deux ans d'emprisonnement comme minimum obligatoire à onze ans et trois mois d'emprisonnement comme maximum. En outre, le juge peut s'abstenir de toute sanction si le crime est passible d'une peine à durée déterminée et que la peine hypothétique pour le repenti ne serait pas supérieure à trois ans d'emprisonnement selon l'évaluation du tribunal.

En théorie, le régime des repentis n'offre pas d'autres avantages que la réduction ou l'exemption de peine. Toutefois, dans les faits, le juge peut accorder d'autres avantages27(*).

Le second paragraphe de l'article 49 précise par ailleurs que « si, en vertu d'une loi renvoyant à la présente disposition, le tribunal est autorisé à atténuer la peine selon son appréciation, il peut réduire la peine encourue jusqu'au minimum légal ou prononcer une peine pécuniaire au lieu d'une peine privative de liberté ».

(2) Les mesures de protection

Les repentis bénéficient des dispositions sur la protection des témoins.

Les programmes de protection des témoins existent en Allemagne depuis le milieu des années 1980, au cours desquelles ils ont été utilisés pour la première fois dans la ville-État de Hambourg, dans le cadre de crimes liés aux bandes de motards28(*). Dans les années suivantes, ils ont été mis en oeuvre par d'autres Länder et par l'Office fédéral de police criminelle (Bundeskriminalamt).

La loi du 11 décembre 2001 relative à la protection des témoins vulnérables29(*) a été introduite pour harmoniser les conditions et les critères juridiques de la protection des témoins au niveau fédéral et au niveau des Länder. Ses principales dispositions couvrent les domaines suivants :

les types de témoins éligibles au programme, ainsi que les critères d'admission et de révocation respectifs : la loi autorise l'admission des individus exposés à des risques en raison de leur volonté de témoigner dans des affaires de grande criminalité ou de criminalité organisée. Les participants doivent être aptes et volontaires pour rejoindre le programme ;

l'autorité responsable des décisions et de la mise en oeuvre : si la loi dispose que l'unité de protection et le procureur prennent conjointement les décisions d'admission, elle reconnaît également que les unités de protection des témoins doivent jouir d'un pouvoir décisionnel indépendant pour appliquer des mesures, en utilisant des critères tels que la gravité de l'infraction, le niveau de risque, les droits de l'accusé et l'impact des mesures ;

la confidentialité des informations concernant les données personnelles des témoins protégés au sein des unités de protection des témoins ainsi que dans d'autres agences gouvernementales et non gouvernementales : les dossiers des témoins protégés sont conservés par les unités de protection et ne sont pas versés aux dossiers d'enquête, mais ils peuvent être mis à la disposition de l'accusation sur demande ;

les conditions d'octroi d'une identité de couverture et des documents personnels connexes, ainsi que les indemnités à verser pendant la période de protection.

Le programme allemand de protection des témoins s'appuie sur des services ad hoc (Zeugenschutzdienststellen) établis au niveau fédéral et dans chaque Land30(*). L'Office fédéral de police criminelle est responsable de la protection des témoins dans les affaires fédérales et des fonctions de coordination aux niveaux national et international31(*).

c) La valeur probatoire des déclarations des repentis

Aucune disposition n'interdit explicitement qu'une condamnation soit prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti.

Bien que le code de procédure pénale ne prescrive aucune règle de preuve, les tribunaux sont tenus de motiver leurs jugements, ce qui, dans le cas d'un témoignage de repenti, suppose l'obligation d'en examiner la fiabilité. La Cour constitutionnelle fédérale, dans une décision de 201632(*), a considéré que les juges sont bien conscients des risques et utilisent ces déclarations avec prudence, dans la mesure où ils n'ont aucun intérêt à mettre une personne innocente en prison. Elle exige également un examen minutieux de la déclaration d'un repenti33(*).

Par ailleurs, le législateur allemand a prévu un mécanisme pour garantir la véracité des informations fournies par le repenti. Les articles 145d34(*) « Simulation d'une infraction » et 164 du code pénal35(*) « Faux soupçon » prévoient des sanctions en cas de faux témoignages ou la fourniture de fausses informations, sanctions aggravées dans l'hypothèse où le témoin fournit de fausses informations afin d'obtenir une remise totale ou partielle de peine prévue à l'article 46b.

4. Angleterre et pays de Galles

• Auparavant uniquement admis par la jurisprudence, la conclusion d'accords avec des auteurs d'infraction acceptant de collaborer avec la justice, en échange d'un traitement pénal plus favorable, est encadrée par la loi depuis 2005. Ils doivent prendre la forme d'accords écrits.

• La loi sur la fixation des peines (Sentencing Act) autorise le procureur à conclure un accord avec un repenti contenant une réduction de peine, ou s'il purge déjà sa peine, un renvoi en vue d'une révision de peine. La loi sur la grande criminalité et la police (SOCPA) prévoit également la possibilité, dans des cas exceptionnels, d'accorder une immunité totale ou partielle, consistant à ne pas utiliser les déclarations du repenti dans une procédure à son encontre.

a) La reconnaissance juridique des repentis

En Angleterre et au pays de Galles, la loi sur la grande criminalité et la police (SOCPA)36(*), adoptée en 2005, a donné une base légale à la pratique établie par la jurisprudence et admise par la common law des « Queen's evidence »37(*), selon laquelle des réductions de peine ou d'autres avantages peuvent être accordés aux auteurs d'infraction qui plaident coupables et coopèrent avec la justice. L'objectif était de formaliser les arrangements existants, en les rendant plus transparents et plus crédibles grâce à un système d'accords juridiquement contraignants38(*).

En 2020, certains articles de la loi SOCPA relatifs aux repentis (assisting offenders) ont été abrogés et codifiés dans la loi sur la fixation des peines (Sentencing Act)39(*), en vue d'améliorer la transparence juridique. Les dispositions n'ont toutefois pas été modifiées sur le fond.

Les lignes directrices figurant dans le code des procureurs (Code for Crown Prosecutors)40(*) expliquent comment les procureurs du Crown Prosecution Service (CPS)41(*) peuvent utiliser les dispositions légales existantes pour obtenir des informations ou des preuves de la part de délinquants repentis.

Par ailleurs, la loi SOCPA et le Sentencing Act n'interdisent pas aux procureurs d'avoir recours au régime « textuel » de la common law (reposant sur l'interprétation de la jurisprudence et des textes existants) notamment pour les cas qui ne relèvent pas du régime légal, soit parce que l'auteur d'infraction n'est pas disposé à signer un accord, soit lorsqu'il a, avant la condamnation, déjà apporté son aide à la police en ce qui concerne sa propre infraction ou celle d'une autre personne42(*).

(1) Les infractions visées

S'agissant des réductions et révisions de peine (articles 74 et 388 Sentencing Act), les négociations entre l'accusation et la défense sont possibles quelles que soient la gravité et la nature de l'infraction. Elles sont notamment utilisables dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée.

En revanche, les possibilités de faire bénéficier un collaborateur de justice d'une immunité de poursuites ou d'un engagement à ne pas utiliser les informations révélées (restricted use undertaking) dans le cadre d'une procédure pénale à son encontre (articles 71 et 72 SOCPA) sont limitées aux enquêtes ou poursuites concernant un crime (indictable offence) ou un délit (offence triable either-way).

(2) Les personnes concernées

Une distinction est opérée selon les avantages considérés.

Les articles 71 et 72 de la loi SOCPA relatifs à l'immunité de poursuites et à l'utilisation limitée des déclarations peuvent être utilisés par le procureur dans le cadre de négociations avec « toute personne ».

Les accords contenant des réductions de peine (article 74 Sentencing Act) concernent uniquement les auteurs d'infraction remplissant les trois conditions suivantes :

être disposé à conclure un accord écrit avec un procureur concernant la collaboration fournie ou qui sera fournie dans le cadre d'une enquête ou de poursuites ;

- avoir plaidé coupable ou avoir l'intention de le faire ;

- être condamné par la Crown Court (équivalent de la cour d'assises) ou avoir été renvoyé devant la Crown Court pour y être condamné.

Des accords contenant une révision de peine (article 388 Sentencing Act) peuvent également être conclus avec les auteurs d'infraction qui :

- ont déjà été condamnés par la Crown Court ;

purgent encore leur peine ; et

- sont disposés à conclure un accord écrit avec un procureur concernant leur collaboration dans le cadre d'une enquête ou de poursuites.

Ces restrictions s'expliquent par le fait que le droit de la preuve interdit à un accusé d'être entendu comme témoin à charge s'il peut encore être condamné pour une infraction citée dans la procédure en cours43(*).

b) Les avantages accordés aux repentis

En vertu du régime légal en vigueur en Angleterre et au pays de Galles, les auteurs d'infraction décidant de collaborer avec la justice peuvent se voir proposer par le procureur :

- une immunité de poursuites (article 71 SOCPA) ;

- un engagement à ne pas utiliser les informations révélées dans une procédure à l'encontre du repenti (restricted use undertaking, article 72 SOCPA) ;

- une réduction de peine (article 74 Sentencing Act) ;

- une révision de peine pour les personnes déjà condamnées (article 388 Sentencing Act).

Les déclarations du repenti peuvent être destinées à fournir des preuves au tribunal (« King's evidence ») ou à des fins de renseignement (ou les deux).

Les avantages peuvent être négociés par le procureur simultanément ou successivement. Par exemple, une personne qui bénéficie d'un engagement au titre de l'article 72 de la loi SOCPA peut ensuite bénéficier d'une immunité au titre de l'article 7144(*).

Selon les lignes directrices du code des procureurs, « En règle générale, lorsqu'il existe des preuves suffisantes pour offrir une perspective réaliste de condamnation, l'intérêt public exige qu'un complice soit poursuivi, qu'il soit ou non appelé à témoigner. Par conséquent, un accord écrit en vertu de l'article 74 de la loi sur la fixation des peines (ou de l'article 388 de cette loi lorsque la collaboration doit être fournie après la condamnation) plutôt qu'un engagement d'utilisation restreinte des déclarations du repenti devrait être la première option envisagée par les enquêteurs et les procureurs »45(*).

Dans tous les cas, aucun accord avec un collaborateur de justice conclu en application de la loi SOCPA ou du Sentencing Act ne peut contenir de condition permettant d'éviter la saisie et confiscation d'avoirs criminels. Selon le code des procureurs, « cela reviendrait, pour l'accusation à payer pour obtenir des preuves »46(*).

(1) La procédure

La loi SOCPA et le Sentencing Act définissent le contenu possible des accords entre le repenti et le procureur mais ne prescrivent pas la manière dont ces accords doivent être conclus.

Selon le code des procureurs, les procureurs et les enquêteurs doivent travailler ensemble dès le début et convenir d'une procédure adaptée aux circonstances de l'affaire. Le suivi de la procédure décrite ci-dessous est considéré comme une « bonne pratique » :

1. l'obtention par les enquêteurs d'un avis provisoire du procureur (par écrit pour les accords relevant de l'article 72 de la loi SOCPA) : l'enquêteur doit obtenir suffisamment d'informations, soit par l'intermédiaire du représentant légal du futur repenti, soit directement auprès de lui, pour aider le procureur à apprécier si un accord est pertinent ;

2. la réalisation d'un entretien de cadrage avec le collaborateur de justice potentiel : après l'avis provisoire du procureur, l'entretien de cadrage vise à déterminer de façon plus précise les preuves ou renseignements que l'auteur de l'infraction est en mesure de fournir. L'entretien doit être enregistré sur support audio et/ou vidéo et être conduit, de préférence, dans le cadre d'une mesure d'« avertissement » (caution)47(*) par une équipe d'enquêteurs spécialisés (assisting offender team). Il est généralement effectué en présence d'un avocat. Si le repenti potentiel ne souhaite pas parler aux enquêteurs sous le régime de l'avertissement ou s'il est estimé qu'il sera probablement empêché de fournir les informations pertinentes dans ce cadre, le procureur peut choisir d'utiliser une « lettre d'offre » (proffer letter) afin de faciliter sa participation au processus en offrant certaines garanties de confidentialité ;

3. l'autorisation de procéder à l'accord et la préparation du projet d'accord : les enquêteurs doivent obtenir une autorisation écrite du procureur, qui rédige ensuite le projet d'accord. Le document doit décrire précisément les conditions dans lesquelles le repenti offre sa collaboration et tout avantage qui lui est promis. « En cas de recours ultérieur du procureur pour l'examen d'une réduction de peine, la juridiction de jugement devra disposer de preuves sans équivoque de ce qui a été convenu à l'avance afin que le manquement allégué soit clairement démontré »48(*) ;

4. (si nécessaire) l'achèvement du processus de « débriefing » et de « nettoyage » : bien qu'il ne s'agisse pas d'une obligation légale, lorsque la collaboration du repenti consiste à témoigner devant un tribunal, il est de bonne pratique qu'il reconnaisse entièrement ses infractions avant de conclure un accord. Cette étape, couramment appelée « nettoyage », doit faire partie du processus de « débriefing » mené par les enquêteurs, qui consiste à fournir des informations sur le contenu des entretiens qui ont eu lieu avec le futur repenti. La reconnaissance des faits commis (cleansing) n'est pas nécessaire lorsque le repenti fournit uniquement des renseignements (intelligence) ;

5. la finalisation et la délivrance de l'accord écrit : l'accord final doit être signé par les deux parties avant l'audience.

(2) Le traitement pénal
(a) L'immunité (article 71 SOCPA) 

Aux termes de l'article 71 de la loi SOCPA, un procureur habilité49(*) peut aux fins d'une enquête ou de poursuites concernant un crime ou un délit pouvant faire l'objet d'un procès, offrir à une personne une immunité de poursuites (immunity from prosecution) pour toute infraction. Si une personne reçoit une notification d'immunité, aucune procédure pour une infraction décrite dans la notification ne peut être engagée contre elle en Angleterre et au pays de Galles ou en Irlande du Nord (sauf dans les circonstances spécifiées dans la notification). Toutefois, la notification d'immunité cesse de produire ses effets si l'auteur de l'infraction ne respecte pas l'une des conditions prévues dans la notification.

Le code des procureurs rappelle que l'immunité ne peut être proposée que dans des cas exceptionnels50(*). Les critères à prendre en compte ont été définis par l'Attorney General51(*) (appréciation de l'intérêt de la justice, de l'intérêt pour la sécurité publique et de la probabilité que des informations puissent être obtenues sans une offre d'immunité)52(*). En outre, l'Attorney General doit être consulté au moins 14 jours avant la notification d'immunité53(*).

La jurisprudence relative aux immunités a établi que le ministère public n'avait pas le pouvoir d'accorder une immunité « prospective », pour couvrir une infraction future. Par conséquent, les notifications d'immunité ne peuvent être accordées que pour des infractions qui ont déjà été commises54(*).

(b) L'engagement d'utilisation restreinte des déclarations (article 72 SOCPA, restricted use undertaking) 

L'article 72 de la loi SOCPA prévoit que le procureur peut s'engager à ne pas utiliser les déclarations du repenti dans le cadre d'une procédure pénale ou d'une procédure pour « comportement illicite »55(*) à son encontre, en vue d'obtenir sa collaboration. Cet engagement prend la forme d'une notification écrite.

Une notification d'engagement d'utilisation restreinte des déclarations n'empêche pas le repenti d'être poursuivi lorsque d'« autres preuves », justifiant des poursuites deviennent disponibles. Les autres preuves peuvent provenir d'autres sources directes ou indirectes. La notification doit toutefois comporter une réserve expresse à cet effet56(*).

(c) La réduction de peine (article 74 Sentencing Act) 

En vertu de l'article 74 du Sentencing Act, un accord de réduction de peine peut être utilisé par le procureur pour obtenir la collaboration d'un auteur d'infraction. Comme indiqué précédemment, le repenti potentiel doit plaider coupable, être condamné par la Crown Court ou en voie de l'être et être disposé à conclure un accord écrit.

La loi laisse au juge la liberté de définir s'il y a lieu de prononcer une peine moins lourde que celle qui aurait été prononcée en l'absence de collaboration et l'ampleur de cette réduction, en tenant compte de l'étendue et de la nature de la collaboration fournie.

Le code des procureurs précise que les réductions de peine pour collaboration avec la justice peuvent être appliquées à l'élément « tarifaire » d'une peine fixée par la loi ou à une peine minimale obligatoire et s'ajouter à d'autres formes de réduction de peine prévues en cas de plaider coupable. Par ailleurs, « une réduction de peine n'est pas obligatoire (...) bien que les remises de peine soient bien établies dans la pratique, une réduction de peine ne suivra pas automatiquement la fourniture ou l'offre de collaboration. Par conséquent, les procureurs doivent veiller à ménager les attentes. Le choix de la peine est une question qui relève uniquement du tribunal et non d'un accord entre l'accusation et la défense »57(*).

Si le repenti manque à son obligation de collaborer avec la justice alors même qu'il a bénéficié d'une peine réduite, l'article 388 du Sentencing Act prévoit la possibilité pour le procureur de renvoyer à tout moment l'affaire devant la Crown Court en vue de réviser la peine. Si le tribunal est convaincu que l'auteur de l'infraction a sciemment omis de collaborer avec la justice, il peut substituer à la peine initiale une peine supérieure, ne dépassant pas la peine qu'il aurait prononcée en l'absence d'accord de collaboration (ie. le « maximum initial »).

(d) La révision de peine (article 388 Sentencing Act)

L'article 388 du Sentencing Act autorise le ministère public à conclure un accord écrit visant à renvoyer une peine à la Crown Court pour obtenir la collaboration d'un criminel déjà condamné et purgeant sa peine.

Toutefois, cette disposition ne s'applique pas lorsque :

- la peine a déjà été réduite et l'auteur de l'infraction n'a pas fourni la coopération proposée dans l'accord antérieur, en vertu duquel la peine a été réduite ;

- la peine a été fixée par la loi et le délinquant n'a pas plaidé coupable.

Le renvoi n'est pas un appel contre la peine ; il s'agit d'un nouveau processus qui a lieu parce que de nouvelles circonstances apparaissent. Il peut être effectué à tout moment, à condition que la personne purge encore une peine et qu'il soit dans l'intérêt de la justice de le faire.

L'objectif d'un accord écrit de révision de peine est d'encourager les auteurs d'infraction déjà emprisonnés à reconsidérer leur réticence antérieure à collaborer avec la justice. Le code des procureurs met toutefois en garde contre « les accusés qui cherchent à manipuler le système en dissimulant des informations dont ils avaient connaissance au moment de la condamnation initiale. Ils peuvent le faire dans l'espoir d'augmenter leur réduction de peine en s'exposant à des peines plus longues ou en créant leur propre atténuation en transmettant des informations fausses ou fabriquées dans le but de bénéficier d'une réduction de peine a posteriori. Il convient également de prendre en considération les questions d'intérêt public concurrentes concernant le repenti et la ou les victimes des crimes initiaux pour lesquels le repenti purge une peine »58(*).

(3) Les mesures de protection

Dans la mesure du possible, un collaborateur de justice doit bénéficier du soutien et de la protection nécessaires. Les dispositions relatives à la protection des témoins relèvent de la compétence des forces de l'ordre, mais le type de protection doit être discuté entre l'enquêteur et le procureur au stade de la pré-inculpation59(*).

Le chapitre 4 de la loi SOCPA contient des dispositions spécifiques pour la protection des témoins et d'autres personnes, applicables aux témoins repentis60(*). Dans certains cas, le témoin peut être contraint de s'installer dans une autre partie du Royaume-Uni et de changer d'identité. En général, ces dispositions s'adressent aux personnes qui ont fourni des preuves cruciales et contre lesquelles pèse une menace importante.

La protection des témoins pour les personnes considérées comme risquant de subir un préjudice grave est assurée par le service britannique des personnes protégées (UK Protected Persons Service, UKPPS), un réseau d'unités de police régionales, dirigé par l'agence nationale de lutte contre la criminalité (National crime agency, NCA), et regroupées au sein d'un service unique en 201361(*).

c) La valeur probatoire des déclarations des repentis

La loi SOCPA et le Sentencing Act ne prévoient pas de disposition concernant l'utilisation des déclarations des repentis. Les règles de procédure pénale62(*) ne contiennent pas de restriction ou mise en garde spécifique.

Selon la pratique judiciaire, le juge doit prévenir solennellement les jurés du danger d'une condamnation fondée uniquement sur le témoignage d'un repenti. Une fois cet avertissement reçu, les jurés sont libres de prononcer une condamnation sur la base d'un seul témoignage, même non corroboré par d'autres éléments63(*).

5. Belgique

Afin de mieux lutter contre la criminalité organisée, la Belgique a introduit un régime des repentis dans la loi du 22 juillet 2018. Ce dispositif permet au ministère public de promettre à une personne accusée une réduction de peine, des aménagements dans l'exécution de la peine ou sur le lieu de détention, en échange de révélations sur une enquête criminelle. Sur la base d'un mémorandum préparé et négocié entre l'accusé et le parquet, et sous certaines conditions, le juge pénal peut ensuite accorder ces avantages.

D'autres dispositions plus anciennes permettent également d'envisager des mesures de protection spécifiques pour les témoins collaborant avec la justice. Autrefois exclus de ce dispositif, les repentis y sont désormais théoriquement admissibles, depuis 2018.

La contrepartie de la promesse d'avantages implique diverses obligations pour le repenti parmi lesquelles la fourniture de « déclarations substantielles, révélatrices, sincères et complètes ». Toutefois, les déclarations du repenti ne sont pas considérées comme des preuves directes, mais doivent être corroborées.

Un projet de loi présenté en mars 2023, visant à renforcer la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme, propose des modifications majeures au régime des repentis, incluant notamment une phase de négociation approfondie et une clarification des procédures. Toutefois l'examen du projet a été suspendu en raison de la démission du ministre de la Justice en octobre 2023.

Avant 2018, en Belgique, le ministère public disposait d'un pouvoir discrétionnaire d'opportunité des poursuites, permettant éventuellement le classement sans suite d'un dossier. Malgré l'absence de directive officielle, des négociations informelles avec les auteurs présumés étaient possibles et pratiquées. En outre, il existait plusieurs dispositions (notamment dans le code pénal) accordant une exemption ou une réduction de peine à celui qui dénonçait une infraction dont il était le coauteur ou le complice. Cette première forme de contrepartie à une collaboration avec la justice était désignée sous le terme informel de « cause d'excuse », qui était appliquée à des infractions impliquant potentiellement plusieurs auteurs64(*).

L'émergence d'un véritable droit des repentis a pris de l'ampleur dans les années 1990, notamment en réaction aux tueries du Brabant wallon65(*). Plusieurs projets de loi déposés à l'époque visaient à accorder l'immunité pénale aux repentis en échange d'informations cruciales, avec des conditions strictes et des garanties pour les droits de la défense. L'objectif était d'améliorer l'efficacité dans la répression du crime organisé, du grand banditisme et du terrorisme. En 1998, une commission parlementaire chargée d'enquêter sur la criminalité organisée en Belgique recommanda l'instauration d'un régime légal de cause d'excuse, appliqué sous le contrôle du pouvoir judiciaire pour lutter contre la criminalité organisée66(*).

Une proposition de loi, défendue en 200167(*) par l'ancien ministre de la Justice Marc Verwilghen, proposa d'introduire un régime des repentis en Belgique. Le texte établissait des lignes directrices, notamment l'exceptionnalité du régime, des conditions strictes et des garanties pour les droits de la défense. Il prévoyait des avantages pratiques pour les collaborateurs de justice, annulant les poursuites sous conditions. D'autres dispositions traitaient des droits de la défense, excluant le témoignage comme preuve principale et rejetant l'anonymat total. Le texte fut soumis pour avis à un comité d'experts indépendants du Conseil de l'Europe, d'une part, et au Conseil des procureurs du Roi, d'autre part, lesquels l'approuvèrent globalement, tout en soulevant des questions sur l'inclusion des crimes liés au terrorisme et plaidant pour la possibilité de témoigner anonymement. Enlisé dans de longs débats, le texte ne fut toutefois jamais adopté68(*).

De 2001 à 2014, d'autres propositions de loi, reprenant souvent totalement ou partiellement le texte de 2001, ont cherché à instaurer un régime des repentis en Belgique. Des modifications mineures furent apportées, notamment sur le champ d'application et l'anonymat. Les autorités judiciaires se sont également manifestées69(*) et, en 2014, ont ouvertement plaidé pour l'adoption d'une loi régissant les collaborateurs de justice, soulignant les préoccupations éthiques mais justifiant aussi le besoin de défendre les fondements sociétaux face à la criminalité grave70(*).

La loi du 22 juillet 201871(*) a créé un régime légal des collaborateurs de justice au sein du droit pénal belge. Le texte offre un cadre légal pour la négociation avec des personnes impliquées dans des infractions graves, en échange de leur coopération avec la justice. Cette législation vise à renforcer la lutte contre la criminalité organisée en permettant aux repentis acceptant de collaborer avec la justice de bénéficier d'avantages, tels que des réductions de peine, en échange de la fourniture d'informations cruciales. La loi fixe des règles strictes pour garantir la transparence, l'éthique et la protection des droits fondamentaux dans ce processus de collaboration avec la justice.

Cette loi a introduit dans le code de l'instruction criminelle un nouveau chapitre encadrant le régime des repentis72(*). Le chapitre régit les « promesses relatives à l'action publique, à l'exécution de la peine ou à la détention consenties à la suite d'une déclaration »73(*). Il s'agit d'une procédure spécifique, qui fait intervenir le ministère public puis le juge du fond.

a) La reconnaissance juridique des repentis
(1) Les infractions visées

Le nouvel article 216/1 du code de l'instruction criminelle74(*), introduit par la loi de 2018, détermine les catégories d'infractions visées par le régime des repentis, en renvoyant aux paragraphes 2 à 4 de l'article 90ter du même code75(*). La liste correspond à un champ d'application très large, et très fourni, visant une quarantaine de types d'infractions, correspondant aux infractions les plus graves, celles que le législateur belge définit comme « les plus déstabilisantes pour la société »76(*). S'y trouvent notamment :

(a) Les crimes et délits les plus graves, dans le cadre de la grande criminalité ou du terrorisme, notamment :

- les crimes et délits contre la sûreté de l'État ;

- la contrefaçon ou falsification de monnaie, de sceaux, timbres, poinçons et marques ;

- les menaces d'attentat contre les personnes ou contre les propriétés, et les fausses informations relatives à des attentats graves, pour autant qu'une plainte ait été déposée ;

- les atteintes à la protection physique des matières nucléaires et des autres matières radioactives ;

- l'association formée dans le but d'attenter aux personnes ou aux propriétés, existant par le seul fait de l'organisation de la bande, notamment l'association ayant eu pour but la perpétration de crimes emportant la peine de réclusion à perpétuité ou la réclusion de dix ans à quinze ans ou un terme supérieur ;

- certaines infractions liées à de l'association formée dans le but d'attenter aux personnes ou aux propriétés et de l'organisation criminelle ;

- les vols et extorsions de matières nucléaires.

(b) Les crimes et délits les plus graves commis contre l'intégrité physique des personnes, notamment :

- l'arrestation ou la détention illégale et arbitraire d'une personne par un fonctionnaire ou un officier public, dépositaire ou agent de l'autorité ou de la force publique ;

- les crimes relatifs à la prise d'otages ;

- certaines infractions portant atteinte à l'intégrité sexuelle, le voyeurisme, la diffusion non consentie de contenus à caractère sexuel et le viol, notamment sur mineur ;

- certaines infractions relatives à l'exploitation sexuelle de mineurs à des fins de prostitution ;

- le meurtre (homicide commis avec intention de donner la mort, puni de la réclusion de vingt ans à trente ans) ;

- l'assassinat (meurtre commis avec préméditation puni de la réclusion à perpétuité) ;

- l'empoisonnement (meurtre commis par le moyen de substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées, puni de la réclusion à perpétuité) ;

- l'enlèvement et le recel de mineurs ;

- l'atteinte à la vie privée du mineur ;

- la traite des êtres humains ;

- le trafic d'organes humains ;

- le meurtre commis pour faciliter le vol ou l'extorsion.

(c) Les crimes et délits les plus graves commis contre les biens, notamment :

- les vols commis à l'aide de violences ou menaces et des extorsions ;

- le recel, en tout ou en partie, de biens enlevés, détournés, ou obtenus à l'aide d'un crime ou d'un délit ;

- dans certains cas, le déclenchement volontaire d'incendie ;

- la destruction ou la tentative de destruction, par l'effet d'une explosion, des édifices, ponts, digues, chaussées, chemins de fer, écluses, magasins, chantiers, hangars, navires, bateaux, voitures, wagons, aéronefs ou autres ouvrages d'art, constructions ou véhicules à moteur.

(d) D'autres types d'infractions particulièrement graves, notamment :

- le trafic de stupéfiants ;

- la corruption de personnes qui exercent une fonction publique ;

- la corruption privée ;

- la production de faux en informatique ;

- la fraude informatique ;

- l'interception, la prise de connaissance et l'enregistrement de communications non accessibles au public et de données d'un système informatique ;

- les infractions relatives au secret des communications non accessibles au public et des données d'un système informatique ;

- les infractions contre la confidentialité, l'intégrité et la disponibilité des systèmes informatiques et des données qui sont stockées, traitées ou transmises par ces systèmes.

(2) Les autres conditions requises

Outre la commission ou la tentative de commettre certaines infractions, l'article 216/1 du code de l'instruction criminelle sous-entend le respect de plusieurs principes pour envisager une collaboration avec la justice :

- les principes d'adéquation et de pertinence exigent que la collaboration soit appropriée et efficace pour atteindre « la manifestation de la vérité » (article 216/1, alinéa 1). Toutefois, leur démonstration peut être délicate, notamment dans des cas tels que le harcèlement téléphonique. Pour le terrorisme, la collaboration est souvent considérée comme plus efficace ;

- les principes de nécessité et de subsidiarité sont également repris, dans la mesure où l'article 216/1 prévoit que la collaboration n'est possible que « si les nécessités de l'enquête l'exigent et si les autres moyens d'investigation ne semblent pas suffire » ;

- le principe de proportionnalité : les articles 216/5 et 216/6 disposent en effet que le ministère public, peut promettre des mesures de réduction de peine, « en prenant particulièrement en compte la gravité des conséquences possibles » ;

- enfin, le principe de l'absence de dangerosité s'applique lorsque l'avantage concerne l'exécution de la peine. L'article 216/6 exige que le repenti « ne constitue pas un danger pour la sécurité publique ».

(3) Les personnes concernées

Il s'agit des personnes accusées des infractions définies par les paragraphes 2 à 4 de l'article 90 ter du code de l'instruction criminelle, sous réserve que le ministère public engage la procédure de l'article 216/1. En effet, il s'agit d'une faculté offerte au ministère public, et non pas d'un droit garanti à l'accusé.

b) Les avantages accordés aux repentis
(1) La procédure de collaboration avec la justice

Dans un premier temps, le repenti et le ministère public élaborent conjointement un « mémorandum », une forme de document contractuel détaillant leurs engagements respectifs. En général, le futur repenti s'engage à faire des déclarations significatives, sincères et exhaustives concernant les faits auxquels il est lié. De son côté, le parquet précise les peines encourues et les avantages proposés, selon les informations fournies.

Lorsqu'un avantage pour l'accusé se traduit par une réduction de peine, la promesse du parquet doit être approuvée par une juridiction d'instruction (ou de jugement si l'accord intervient plus tard dans la procédure, en dehors de l'instruction). Cette étape vise à évaluer plusieurs critères et à déterminer si l'avantage accordé à l'accusé est proportionnel à l'importance de ses révélations.

Par la suite, une fois la promesse homologuée, le juge du fond doit fixer la peine qui serait appliquée si le repenti ne respectait pas ses engagements. La réduction de peine est susceptible d'être révoquée, dans le cas où le repenti ne respecte pas ses engagements.

(2) Le traitement pénal

Le système belge prévoit trois catégories de « promesses » définies et encadrées respectivement par les articles 216/5, 216/6 et 216/7 du code de l'instruction criminelle. L'accord peut porter sur l'exercice de l'action publique, l'exécution de la peine et le lieu de détention.

(a) Dans le cadre de l'exercice de l'action publique (article 216/5)

La loi du 22 juillet 2018 n'a pas remis en cause la possibilité d'une promesse de classement sans suite pouvant résulter d'une négociation informelle entre le parquet et le repenti, même si cette promesse est considérée comme précaire et dépourvue de sécurité juridique77(*).

L'article 216/5 définit trois types de promesses en matière d'action publique, selon la nature et la gravité de l'infraction :

- pour les crimes avec violence ou menace et les crimes et délits contre la sûreté de l'État (notamment les infractions terroristes), une promesse d'une réduction de peine, fixée selon les échelles de remise de peine de droit commun, prévues aux articles 80 et 81 (crimes) et 85 (délits) du code pénal78(*) ;

- pour les crimes et délits sans violence ou menace (à l'exclusion des crimes et délits contre la sûreté de l'État), la reconnaissance simple de culpabilité, ou une peine inférieure à la peine légale minimale prévue, ou encore une peine sous surveillance électronique, une peine de travail ou une peine de probation autonome ;

- dans tous les cas, et nonobstant une éventuelle promesse de remise de peine, le ministère public peut également « promettre une amende réduite, même en deçà du minimum légal, ou une confiscation spéciale, même en cas de confiscation obligatoire, mais à l'exception de la confiscation des substances et objets qui mettent en danger la sécurité publique ou la sécurité des personnes » (article 216/5).

La loi impose au ministère public le respect d'un principe de pondération dans la négociation des réductions de peine. Trois critères sont pris en compte : la gravité des faits commis par le repenti, la gravité des faits dénoncés et la gravité des conséquences possibles de ces faits. Ce principe vise à individualiser la peine en fonction de ces critères, bien que des questions subsistent quant à son application79(*).

(b) Concernant l'exécution de la peine (article 216/6)

Concernant l'exécution de la peine, le ministère public peut engager deux types de promesses :

- le 1° de l'article 216/6 prévoit la possibilité d'émettre un avis favorable à une modalité d'exécution prévue par la loi du 17 mai 200680(*), telle que la détention limitée81(*), la surveillance électronique, ou la libération conditionnelle. Cependant, des questions subsistent quant à la portée de cette promesse, notamment si elle est valable pour une seule modalité et si elle peut être réutilisée en cas de refus judiciaire82(*) ;

- le 2°, quant à lui, permet au ministère public de promettre de prendre une décision favorable dans le cadre de l'exécution de la peine. Cela peut impliquer de ne pas procéder immédiatement à l'exécution de la peine ou de surseoir à l'exécution sous certaines conditions. Cependant, la légitimité de cette décision favorable est débattue et sa mise en oeuvre est entravée par la pluralité des acteurs impliqués dans l'exécution de la peine83(*).

Les critères légaux du principe de pondération doivent être respectés pour ces promesses, mais les modalités de mise en oeuvre sont moins détaillées que pour les promesses liées à l'exercice de l'action publique. En outre, aucune spécificité n'est prévue pour les repentis ayant commis des infractions terroristes84(*).

(c) Lors de la phase de détention (article 216/7)

S'agissant du lieu de détention, le ministère public peut faire deux types de promesses : soit concernant le placement, soit concernant le transfèrement du repenti vers un établissement pénitentiaire spécifique de son choix.

Ces avantages s'appliquent aux repentis incarcérés dans le cadre de la détention préventive ou de l'exécution de la peine. Ils supposent dans certains cas la proximité familiale et un régime de détention plus flexible. Toutefois, sur ce point aussi demeurent des interrogations, notamment sur la portée de la promesse de transfèrement et son application à plusieurs transfèrements, ainsi que son accessibilité aux internés, excluant apparemment les internés selon la loi85(*).

Le principe de pondération doit également s'appliquer, bien que le critère relatif à la gravité des conséquences possibles ne soit pas explicitement inclus dans la loi. Aucune spécificité n'est prévue pour les repentis ayant commis des infractions terroristes dans ces promesses relatives au lieu de détention.

On peut souligner que la loi du 22 juillet 2018 reste ambiguë sur la possibilité de « cumul des promesses ». En théorie, aucune disposition n'empêche expressément un procureur de promettre des avantages de catégories différentes, laissant une marge de négociation relativement large.

(3) Les mesures de protection

En 2002, la Belgique a adopté une loi spécifique pour la protection des témoins menacés86(*). Ce texte créait notamment une commission de protection des témoins, compétente en matière d'octroi, de modification ou de retrait des mesures de protection et des mesures d'aide financière. Toutefois, jusqu'en 2018, le texte ne s'appliquait pas aux repentis, dans la mesure où il prévoyait que « les mesures de protection octroyées à un témoin menacé sont retirées lorsqu'il est formellement inculpé ou poursuivi par le ministère public pour les faits sur lesquels il fait témoignage »87(*).

La loi du 22 juillet 2018 n'a pas apporté de modification explicite à la définition du témoin en danger énoncée à l'article 102 du code de l'instruction criminelle88(*) pour y inclure formellement les repentis dans le cadre du dispositif de protection. Toutefois, les travaux préparatoires du texte sont sans équivoque quant à la possibilité pour les repentis et leurs familles de bénéficier de cette protection, élargissant ainsi la portée du système de protection des témoins aux personnes collaborant avec la justice89(*).

Ainsi, s'applique en principe l'article 104 du code de l'instruction criminelle qui prévoit différents types de mesures :

une série de mesures de protection dites « ordinaires », telles que la protection des données auprès de l'état civil, un équipement technique préventif, une assistance psychologique, l'organisation de patrouilles policières, l'enregistrement des appels entrants et sortants, un numéro de téléphone secret, une plaque d'immatriculation protégée, une protection physique rapprochée, une relocalisation pour 45 jours maximum, ou encore le placement dans une section protégée de la prison ;

des mesures de protection spéciale (une relocalisation pour 45 jours maximum, le changement d'identité, une identité de protection temporaire) ;

- des mesures d'aide financière ;

- des mesures permettant la préservation des droits sociaux et administratifs du repenti ;

- des mesures imposant à toute personne qui, en raison de sa fonction, a connaissance ou prête son concours à des mesures de protection, de garder le secret.

L'article 104 a été complété par la loi du 22 juillet 2018, laquelle a ajouté un § 4 prévoyant des « mesures de surveillance préventive, en vue de garantir la sécurité, ainsi que l'intégrité physique, psychique et morale des personnes [concernées], après l'octroi de mesures de protection [ordinaire] ».

Enfin, l'article 108 du code de l'instruction criminelle précise les circonstances dans lesquelles les diverses mesures de protection peuvent être révoquées. Ces situations comprennent notamment le moment où la personne n'est plus considérée en danger, lorsqu'elle est suspectée d'avoir commis une infraction postérieurement à l'octroi des mesures de protection, ou si elle est déclarée coupable d'une infraction passible d'une peine d'emprisonnement d'un an ou plus (ou a bénéficié d'une médiation ou d'une transaction pénale). Le retrait des mesures peut également être décidé si la personne a porté atteinte auxdites mesures ou ne respecte pas les termes du mémorandum. Charge à la commission de protection des témoins de prendre la décision de révoquer ces mesures selon des modalités précisées à l'article 109, cette décision n'étant pas susceptible de recours.

c) La valeur probatoire des déclarations des repentis
(1) Des déclarations soumises à certaines conditions

La contrepartie de la promesse d'avantage(s) implique diverses obligations90(*) pour le repenti parmi lesquelles, et avant tout, la fourniture de « déclarations substantielles, révélatrices, sincères et complètes » (article 216/1, alinéa 1). Ces déclarations doivent concerner la participation du repenti ainsi que celle de tiers à des infractions spécifiques définies par la loi.

(2) L'utilisation des déclarations

Aux termes de l'article 216/4, § 2, « Les déclarations faites par la personne visée à l'article 216/1 ne peuvent être prises en considération comme preuve que si elles sont corroborées dans une mesure déterminante par d'autres éléments de preuve ».

L'exigence de corroboration « dans une mesure déterminante » implique que le juge ne peut se fonder en grande partie ou principalement sur la seule déclaration du collaborateur. Ces éléments de preuve complémentaires peuvent être obtenus avant ou à la suite des déclarations du repenti, à travers des techniques d'enquête supplémentaires corroborant ses dires91(*).

Il appartient à la juridiction de jugement d'évaluer la valeur probante des déclarations. C'est pourquoi elle doit être informée du contenu précis de l'accord entre le parquet et le repenti. L'article 216/2, § 5 du code de l'instruction criminelle prévoit qu'une copie certifiée conforme du mémorandum est versée dans chacun des dossiers répressifs, où la déclaration du collaborateur est utilisée. De plus, chaque procès-verbal d'audition du collaborateur doit faire référence au mémorandum.

Bilan de la loi du 22 juillet 2018 et perspectives

À ce jour, la loi du 22 juillet 2018 n'a été appliquée que deux fois : une première fois dans le procès de Dejan Veljkovic, agent de joueurs impliqué dans une affaire de fraude dans le football belge92(*), puis dans celui de Pier Antonio Panzeri, ancien député européen impliqué dans une enquête sur la corruption au Parlement européen93(*). Ce recours limité s'explique par des difficultés procédurales, notamment des lacunes dans la loi concernant la négociation préalable.

En janvier 2023, le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, a déclaré vouloir réformer la loi sur les repentis afin de faciliter son utilisation par le parquet94(*). Un projet de loi, adopté en Conseil des ministres en mars 2023, qui vise à intensifier la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme, prévoit d'apporter plusieurs changements significatifs au régime des repentis, notamment : permettre une phase de négociation approfondie avant l'accord repenti-procureur, améliorant ainsi l'évaluation des déclarations, préciser le début des procédures lors de l'enquête préliminaire, la manière de porter l'affaire devant le juge pénal, et énoncer l'immédiateté du versement des déclarations au dossier pénal. Le projet rend le régime applicable aux peines subsidiaires et instaure un contrôle spécifique des méthodes particulières de recherche95(*).

La démission de Vincent Van Quickenborne en octobre 2023 a toutefois suspendu l'examen du projet de loi.

6. Espagne

Le droit pénal espagnol, largement refondu en 199596(*), ne prévoit pas de dispositions générales tendant à reconnaitre et/ou encadrer un régime spécifique pour les criminels et délinquants repentis, à l'instar de ce qui peut exister dans d'autres pays.

Cependant, à partir de 2003, afin de faciliter le démantèlement de réseaux criminels de différentes natures (terrorisme, trafic de stupéfiants, criminalité organisée, corruption, malversation), le législateur espagnol a progressivement introduit dans le code pénal un ensemble de mesures qui prévoient des réductions de peine et/ou de libération conditionnelle. Par ailleurs, dès 1994 a été introduit un régime de protection des condamnés ayant accepté de collaborer avec la justice.

a) L'absence de reconnaissance d'un statut juridique des repentis mais des possibilités de réduction de peine et de libération conditionnelle
(1) Concernant les infractions relatives au trafic de stupéfiants et au terrorisme

En 2003, le parlement a adopté la loi organique n° 7/2003 du 30 juin 2003 relative aux mesures de réforme pour l'exécution intégrale et effective des peines97(*). Ce texte, dont l'objet visait notamment à réformer les règles relatives à l'exécution des peines, a introduit la possibilité, pour le juge pénal, d'une part, de réduire les peines des criminels acceptant de collaborer avec la justice et, d'autre part, de leur accorder la liberté conditionnelle, sous certaines conditions. Cette réforme s'appuyait sur la volonté d'améliorer l'efficacité de la justice pénale en favorisant la coopération des personnes impliquées dans des activités criminelles et à lutter plus efficacement contre la criminalité organisée.

L'article 90 du code pénal, qui régit l'octroi de la liberté conditionnelle des détenus, prévoit ainsi, dans sa rédaction issue de l'article 1.4 de la loi organique n° 7/2003, que « dans le cas des personnes condamnées pour des délits commis au sein d'organisations criminelles ou pour des délits [de terrorisme], la suspension de l'exécution du reste de la peine imposée et l'octroi de la libération conditionnelle supposent que la personne condamnée montre des signes non équivoques d'abandon des fins et des moyens de l'activité terroriste et qu'elle collabore activement avec les autorités, soit pour empêcher la production d'autres crimes par l'organisation ou le groupe terroriste, soit pour atténuer les effets de leur crime, soit pour identifier, capturer et poursuivre les responsables des crimes terroristes. »

Par ailleurs, l'article 92, révisé par l'article 35 de la loi organique n° 15/2003 du 25 novembre 2003 modifiant le code pénal98(*), complète les conditions de la libération conditionnelle en précisant que « dans le cas des infractions concernant les organisations et groupes terroristes et des infractions terroristes [...], il est également nécessaire que l'auteur de l'infraction montre des signes non équivoques d'abandon des objectifs et des moyens de l'activité terroriste et qu'il collabore activement avec les autorités, soit pour empêcher la commission d'autres infractions par l'organisation ou le groupe terroriste, soit pour atténuer les effets de l'infraction qu'il a commise, pour identifier, capturer et poursuivre les responsables d'infractions terroristes, pour obtenir des preuves ou pour empêcher les activités ou le développement des organisations ou associations auxquelles il appartenait ou avec lesquelles il collaborait ».

Dans le même esprit, le livre II du code pénal définissant les délits et les peines applicables, a été réformé peu après afin de préciser dans quelle mesure le juge peut réduire les peines des criminels concernés :

- s'agissant des délits et crimes contre la santé publique (visant notamment le trafic de stupéfiants), l'article 376 dispose que « [...] les juges ou les tribunaux [...] peuvent imposer une peine d'un ou deux degrés inférieurs à celle prévue par la loi pour le délit en question, dès lors que le prévenu a volontairement abandonné ses activités criminelles et qu'il a activement collaboré avec les autorités ou leurs agents, soit pour empêcher la commission du délit, soit pour obtenir des preuves décisives pour l'identification ou l'arrestation d'autres auteurs, soit pour empêcher l'action ou le développement des organisations ou des associations auxquelles il appartenait ou avec lesquelles il a collaboré. » ;

- s'agissant des délits et crimes contre l'ordre public, et tout particulièrement ceux commis par des organisations et groupes criminels, l'article 570 quater dispose que « Les juges ou les tribunaux [...] peuvent imposer à la personne [qui encourage, constitue, organise, coordonne ou dirige une organisation criminelle] la peine inférieure d'un ou de deux degrés, dès lors que le prévenu a volontairement abandonné ses activités criminelles et qu'il a collaboré activement avec les autorités ou leurs agents, soit pour obtenir des preuves décisives pour l'identification ou l'arrestation d'autres auteurs, soit pour empêcher l'action ou le développement des organisations ou groupes auxquels il appartenait, soit pour empêcher la perpétration d'un crime tenté au sein ou par l'intermédiaire de ces organisations ou groupes. » ;

- s'agissant des actes terroristes, l'article 579 bis (introduit par la loi organique n° 2/2015 du 30 mars 201599(*)), prévoit enfin que « les juges et les tribunaux [...] peuvent imposer une peine inférieure d'un ou deux degrés à celle établie pour le délit en question, lorsque le prévenu a abandonné volontairement ses activités criminelles, se présente aux autorités en confessant les actes auxquels il a participé et collabore activement avec elles pour empêcher la commission du délit, ou contribue effectivement à l'obtention de preuves décisives pour l'identification ou l'arrestation d'autres auteurs ou pour empêcher les activités ou le développement d'organisations, de groupes ou d'autres éléments terroristes auxquels il a appartenu ou avec lesquels il a collaboré. »

(2) L'extension à d'autres catégories d'infractions

Plus récemment, le législateur espagnol a étendu la faculté du juge pénal à accorder des réductions de peine, à octroyer la libération conditionnelle, voire à exonérer de responsabilité pénale, pour d'autres catégories d'infractions.

En matière de fraude fiscale et sociale, depuis 2012, l'article 305 du code pénal100(*) permet au juge pénal d'imposer aux complices d'une fraude d'un montant supérieur à 120 000 euros une peine réduite d'un ou de deux degrés, « à condition qu'ils collaborent activement à l'obtention de preuves décisives pour l'identification ou l'arrestation d'autres coupables, pour l'élucidation complète des actes criminels ou pour la détermination du patrimoine du contribuable ou d'autres personnes responsables de l'infraction. »

En matière de malversation, depuis 2015, l'article 434101(*) permet au juge d'imposer à la personne responsable de l'infraction une peine inférieure d'un ou deux degrés, si celle-ci « a coopéré activement et efficacement avec les autorités ou leurs agents afin d'obtenir des preuves décisives pour l'identification ou l'arrestation d'autres auteurs ou pour l'élucidation complète des actes criminels ».

Enfin, en matière de corruption (notamment dans le cadre de marchés publics), d'une part, et de comportements frauduleux en matière économique, d'autre part, le code pénal a été réformé en 2022102(*), de telle sorte que les personnes reconnues coupables de ces délits « sont exonérées de la responsabilité pénale lorsqu'elles mettent fin à leur participation à ces actes et coopèrent avec les autorités compétentes de manière complète, continue et diligente, en fournissant des informations et des preuves qui manquaient à ces dernières et qui sont utiles à la recherche, à la détection et à la sanction des autres personnes impliquées », sous certaines conditions.

b) Les mesures de protection

Les criminels ayant accepté de collaborer avec la justice peuvent bénéficier des mesures prévues par la loi organique n° 19/1994 du 23 décembre 1994 relative à la protection des témoins et des experts dans les affaires criminelles103(*).

Ce texte, qui n'a fait l'objet d'aucune modification depuis sa promulgation, établit des mécanismes visant à assurer la sécurité et la confidentialité des personnes coopérant avec la justice, notamment les témoins susceptibles d'être exposés à des risques en raison de leur coopération. La loi n° 19/1994 définit les conditions et les modalités de la protection des témoins, notamment les mesures de sécurité mobilisables pour minimiser les risques potentiels pour leur vie et leur intégrité. Elle s'applique également aux personnes impliquées dans le processus pénal, y compris les informateurs, qui peuvent bénéficier de mesures similaires pour assurer leur sécurité. Ces mesures peuvent être étendues aux ascendants, aux descendants, ainsi qu'aux frères et soeurs.

Le texte énonce les critères pour accéder à la protection, parmi lesquels est prévue la nécessité de coopérer dans des affaires de grande criminalité, de criminalité organisée ou de terrorisme. Elle prévoit également des dispositions spécifiques pour les témoins mineurs et impose des obligations aux autorités compétentes pour garantir la mise en oeuvre efficace de ces mesures de protection.

Ces mesures visent à garantir l'intégrité, la liberté et les biens des personnes menacées de représailles à cause de leur collaboration avec la justice. Elles consistent en principe en l'octroi d'une protection policière. Dans les cas exceptionnels, les collaborateurs de justice peuvent, à l'issue du procès et à la demande du ministère public, se voir accorder une nouvelle identité et une aide pour leur permettre de déménager et de changer d'emploi.

Prises par le juge d'instruction, qui agit de son propre chef ou à la demande de l'intéressé, les mesures de protection peuvent ensuite être maintenues, modifiées ou suspendues par le tribunal au moment de l'ouverture du procès.

c) La valeur probatoire des déclarations des repentis

En général, la valeur probatoire des déclarations des criminels acceptant de coopérer avec la justice est complexe et peut dépendre des circonstances spécifiques de chaque affaire. Ces déclarations peuvent être considérées comme des témoignages, mais leur crédibilité et leur poids probant sont souvent soumis à une évaluation attentive de la part des autorités judiciaires.

En l'absence de dispositions explicites sur les modalités de ces déclarations ou sur leur valeur, le seul précepte applicable est l'article 741 du code de procédure pénale104(*), selon lequel le tribunal apprécie « en son âme et conscience les preuves présentées au procès, les motifs invoqués par l'accusation et la défense, ainsi que les déclarations des prévenus eux-mêmes ».

Le Tribunal constitutionnel et le Tribunal suprême105(*) se sont prononcés sur la valeur des déclarations des collaborateurs de justice, auxquelles ils reconnaissent la qualité de témoignages, sous certaines conditions précisées par une jurisprudence complexe, qui soulève des enjeux principalement en matière de présomption d'innocence106(*).

L'utilisation des déclarations des collaborateurs de justice nécessite une évaluation minutieuse, qui implique une analyse approfondie de la personnalité du collaborateur, de ses motivations et de la cohérence de ses récits. La fiabilité des informations fournies est également soumise à des critères tels que la persistance du témoignage et sa corroboration par des éléments de preuve externes. La nécessité de corroboration vise à réduire les risques d'erreur judiciaire en s'assurant que la déclaration du collaborateur est étayée par d'autres sources d'information objectives107(*).

7. Italie

L'Italie a été l'un des premiers pays à mettre en place un régime juridique spécifique pour les criminels et délinquants acceptant de collaborer avec la justice. D'abord réservé aux crimes de terrorisme, le régime a ensuite été étendu aux infractions liées à la criminalité organisée et à un ensemble plus large, couvrant notamment les associations mafieuses et le trafic de stupéfiants.

Le régime cible les criminels fournissant des informations à la justice pour faciliter l'instruction des procédures, même non liées à leur affaire, et ceux reconnaissant leurs infractions tout en renonçant à la violence politique.

La collaboration repose sur une initiative du parquet qui propose au prévenu l'élaboration d'un « rapport illustratif » dans un délai de 180 jours. Le contenu du rapport doit délimiter le périmètre de la collaboration et rappeler les faits essentiels. Le non-respect du délai entraîne la perte des avantages. Les juges décident ensuite l'octroi d'avantages fondés sur la valeur de la contribution.

Les avantages comprennent des réductions de peine, dans le cadre de circonstances atténuantes et des bénéfices liés au traitement pénitentiaire avant et après la condamnation. Les réductions de peine dépendent de la nature des infractions. Le régime pénitentiaire prévoit des aménagements spécifiques avant la condamnation, comme la révocation de la détention provisoire, et pendant la détention, tels que la semi-liberté, les permis de sortie, le travail extérieur, la libération conditionnelle ou la détention à domicile.

La loi exige que les collaborateurs de justice qui souhaitent bénéficier de mesures de protection signent un engagement à respecter des règles de sécurité, coopérer activement, à se soumettre à des actes d'enquête, et s'abstenir de déclarations à des tiers. Les mesures de protection, ordinaires ou spéciales, sont accordées selon le risque. Les collaborateurs peuvent rester dans leur ville d'origine avec une surveillance spéciale. En cas de danger grave, un programme de protection spéciale implique le transfert secret du collaborateur et de sa famille.

Les déclarations des repentis sont versées dans un dossier et utilisées lors du procès, mais le juge évalue leur fiabilité avec prudence, exigeant des éléments corroborants.

L'Italie, confrontée aux problèmes du terrorisme et de la grande criminalité organisée, a été précurseur dans la construction d'une législation favorisant la collaboration avec la justice des personnes inculpées ou condamnées. Le terme même de « repenti » (qui n'a pas de définition juridique précise) vient de l'italien pentito. Il a émergé dans les années 1970, dans le contexte de la lutte contre le terrorisme politique, ainsi que dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée (mafias sicilienne et napolitaine).

Les premières mesures en faveur des repentis résultent du décret-loi n° 59 du 21 mars 1978108(*). Elles concernaient les auteurs d'enlèvements, que ceux-ci fussent réalisés pour l'obtention d'une rançon ou dans un but terroriste. La notion de « collaborateur de justice » fut implicitement introduite avec le décret-loi n° 625 du 15 décembre 1979109(*) et la loi n° 15 du 6 février 1980110(*), connue sous le nom de « loi Cossiga »111(*), d'abord pour les terroristes repentis.

Il faut attendre le début des années 1990 pour que le régime de collaboration avec la justice soit étendu à la lutte contre la criminalité organisée de type mafieux. Le gouvernement italien adopte le décret-loi n° 8 du 15 janvier 1991112(*), qui établit les bases du régime de protection des collaborateurs et témoins de justice confrontés à un danger grave, mais également leurs familles.

Dix ans plus tard, le législateur adopte la loi n° 45 du 13 février 2001113(*). Il s'agit, d'une part, de distinguer les témoins des collaborateurs de justice, et, d'autre part, d'élargir le régime à un plus grand nombre d'infractions. Par ailleurs, la loi précise le cadre des mesures de protection, distinguant des mesures ordinaires et des mesures spéciales. Le texte établit également un principe selon lequel les collaborateurs de justice doivent respecter toutes les obligations qu'ils ont contractées, sous peine de révocation ou de remplacement des mesures de protection. Un délai strict de 180 jours est fixé au collaborateur pour révéler tout ce qu'il sait.

Le cadre législatif et réglementaire relatif aux collaborateurs de justice a ensuite peu évolué. Plusieurs décrets d'application ont été publiés entre 1993 et 2006, notamment sur l'organisation du service central de protection et les modalités d'application des mesures spéciales de protection114(*), le traitement pénitentiaire des personnes qui coopèrent avec la justice115(*) ou encore sur les modalités de paiement et de transfert des avoirs détenus par les collaborateurs de justice116(*).

En 2014, un rapport de la commission d'enquête parlementaire dite « anti-mafia »117(*) a montré la nécessité d'une révision complète du système qui, malgré les différents changements apportés, continue de présenter certaines limites. Ce rapport préconisait notamment de réformer :

- d'une part, le régime des témoins de justice, c'est-à-dire des personnes témoignant spontanément sans être impliquées ou inculpées. Cette préconisation a abouti à l'adoption de la loi n° 6 du 11 janvier 2018118(*) relative aux dispositions pour la protection des témoins de justice ;

- d'autre part, l'article 4-bis de la loi du 26 juillet 1975 relative au système pénitentiaire et à l'exécution des mesures privatives et restrictives de liberté119(*), qui empêchait tout détenu n'ayant pas coopéré avec la justice de bénéficier d'avantages. Entre-temps, la Cour constitutionnelle avait censuré cette disposition120(*) et, récemment, le décret-loi n° 162 du 31 octobre 2022121(*) a modifié l'article en prévoyant que même les personnes qui ne coopèrent pas avec la justice, sous certaines conditions, peuvent accéder à certains avantages.

a) La reconnaissance juridique des repentis
(1) Les infractions visées

Le décret-loi n° 59 du 21 mars 1978 vise les infractions suivantes (dispositions du code pénal toujours en vigueur) : l'enlèvement à des fins de terrorisme ou de subversion (art. 289-bis), les attentats commis contre des installations de services publics (art. 420) et le blanchiment d'argent (art. 648-bis).

La liste des infractions a été étendue par le décret-loi n° 625 du 15 décembre 1979 et sa loi de ratification n° 15 du 6 février 1980 en offrant d'importantes réductions de peine aux terroristes qui acceptaient de fournir à la justice ou à la police des informations sur leur organisation (articles 270, 270-bis et 280 sur les associations subversives contre l'État, les associations terroristes et leurs attentats).

La loi n° 304 du 29 mai 1982 portant mesures pour la défense de l'ordre constitutionnel122(*), qui lui a succédé, visait également les infractions contre l'État. Le champ d'application des dispositions sur les récompenses octroyées aux repentis se limitait aux infractions commises à des fins de terrorisme ou de déstabilisation de l'ordre démocratique.

Le décret-loi du 15 janvier 1991 (article 9 §2) prévoit que les avantages peuvent être accordés aux prévenus collaborant avec la justice concernant « des infractions commises à des fins de terrorisme ou de subversion de l'ordre constitutionnel ou bien des infractions visées à l'article 51, paragraphe 3-bis du code de procédure pénale et aux articles 600-bis, 600-ter, 600-quater (y compris ceux relatifs au matériel pornographique visé à l'article 600-quater.1 et 600-quinquies) du code pénal ».

En l'espèce, il s'agit :

· des associations mafieuses (article 416-bis du code pénal) ;

· des associations ayant pour but le trafic illicite de stupéfiants (article 74 du décret n° 309 du 9 octobre 1990)123(*) ;

· des associations pour la contrebande de produits du tabac (article 291-quater du décret n° 43 du 23 janvier 1973124(*)) ;

· de l'enlèvement à des fins d'extorsion (article 630 du code pénal) ;

· de la rétention ou le maintien en esclavage ou en servitude (dite « selon la méthode mafieuse » (article 600) ;

· de l'association en vue de la prostitution enfantine, de la pornographie enfantine, du tourisme sexuel (articles 600-bis, ter et quater) ;

· de l'association en vue de la traite des êtres humains (article 601 du code pénal), et en vue de l'achat ou l'aliénation d'esclaves (article 602).

(2) Les personnes concernées

Les différentes dispositions en vigueur visent les auteurs d'infractions qui communiquent à la justice ou à la police des informations de nature à faciliter le déroulement d'une procédure, qu'elle soit ou non liée à l'affaire dans laquelle ils sont impliqués, ou à éviter la réalisation de nouvelles infractions.

Elles visent également ceux qui reconnaissent les infractions qui leur sont reprochées et qui renoncent à utiliser la violence dans la lutte politique.

b) Les avantages accordés aux repentis
(1) La procédure de collaboration avec la justice

Conformément à l'article 16-quater du décret-loi n° 8 du 15 janvier 1991, la collaboration prend la forme d'une déclaration, dénommée « rapport illustratif sur le contenu de la collaboration » (verbale illustrativo dei contenuti della collaborazione), devant être consignée dans les 180 jours suivant l'expression de l'intention de coopérer. Ce document revêt une importance cruciale car il constitue le point de départ pour évaluer l'authenticité de la collaboration. Il joue également un rôle déterminant pour l'obtention des remises de peine, des avantages pénitentiaires ainsi que pour l'admission aux mesures de protection125(*).

La législation impose des délais stricts ainsi que des conditions rigoureuses pour l'élaboration du rapport. Lorsque le collaborateur est détenu, l'enregistrement audio et vidéo intégral du rapport est requis. Cependant, cette obligation n'est pas applicable lorsque la personne n'est pas en détention. Bien que la loi ne prévoie pas expressément la nécessité de la présence de l'avocat de la défense lors de l'élaboration de ce document, dans la pratique, celle-ci est presque toujours assurée126(*).

Dans le cas où le collaborateur est en détention, l'article 13 (§14) du décret-loi dispose que le collaborateur est « isolé » des autres détenus jusqu'à la finalisation du rapport. Cette disposition vise à garantir la sincérité de la collaboration et ainsi à empêcher toute collusion ou concertation entre les collaborateurs détenus, en particulier ceux ayant exprimé la volonté de coopérer. Pendant cette période, tout contact avec la famille, y compris les appels téléphoniques et les lettres, est strictement interdit. L'objectif est d'éviter toute influence externe sur la décision du collaborateur, tant de la part d'autres détenus que de sa propre famille127(*).

Le contenu du rapport doit délimiter le périmètre de la collaboration et rappeler les faits essentiels.

Dans le rapport, le collaborateur certifie, entre autres, qu'il n'est pas en possession d'informations pouvant être utilisées par la justice sur d'autres faits ou situations, même s'ils ne sont pas liés ou apparentés à ceux rapportés, d'une gravité particulière ou en tout cas de nature à mettre en évidence la dangerosité sociale de personnes individuelles ou de groupes criminels.

Le délai de 180 jours, contraignant pour le collaborateur et le procureur, revêt des implications majeures en cas de non-respect, privant le collaborateur des avantages légaux et rendant les déclarations postérieures nulles. Ce délai tient compte du fait que l'élaboration du rapport nécessite souvent plusieurs entretiens entre le procureur et le collaborateur, compte tenu de la complexité des récits criminels, étalés potentiellement sur une longue période128(*).

In fine, seuls les juges sont compétents pour décider, d'une part, d'accorder ou non les réductions de peine prévues par la loi et, d'autre part, en cas de décision favorable, de suivre ou non la demande du procureur. Le juge se fonde sur la valeur de la contribution du collaborateur et estime si celle-ci pèse suffisamment pour justifier l'octroi d'avantages129(*).

(2) Traitement pénal

Les articles 16-quinquies (§1) et 16-nonies (§4) du décret-loi de 1991 prévoient que les avantages judiciaires ne peuvent être accordés qu'aux prévenus dont les déclarations ont été consignées dans le rapport dans le délai de 180 jours.

Les avantages pouvant être accordés aux collaborateurs se répartissent en deux catégories : d'une part, les réductions de peine découlant de l'application de circonstances atténuantes par le juge de première instance et, d'autre part, les avantages liés au traitement pénitentiaire dans la phase précédant le procès et après la condamnation.

(a) Les réductions de peine (article 16-quiquies)

S'agissant des réductions de peine, le décret-loi de 1991 renvoie aux circonstances atténuantes énumérées dans le code pénal, aux articles 62 et 62-bis. À cet égard, le cadre juridique italien prévoit un régime dit de la « double voie »130(*) pour différencier les délinquants collaborant avec la justice et les autres.

Ces derniers sont soumis à un traitement beaucoup plus sévère. Par exemple, en ce qui concerne les crimes de terrorisme et de subversion, le décret-loi de 1979 introduit le crime « d'association à des fins de terrorisme » dans le code pénal131(*) et prévoit des peines augmentées de moitié132(*). Cependant, l'article 4133(*) prévoit une circonstance atténuante spéciale pour les délinquants qui, « en se désolidarisant des autres, s'efforcent d'éviter que l'activité criminelle n'ait d'autres conséquences ou aident concrètement les autorités policières et judiciaires à recueillir des preuves décisives pour l'identification ou l'arrestation des complices ». Le cas échéant, le même article prévoit que la peine de réclusion à perpétuité est remplacée par une peine de 12 à 20 ans d'emprisonnement, et les autres peines d'emprisonnement sont réduites d'un tiers à la moitié.

La législation anti-mafia s'est inspirée de cette disposition. L'article 7 du décret-loi n° 152 de 1991134(*) prévoit une circonstance aggravante spéciale applicable à tous les crimes commis par l'utilisation de la « méthode mafieuse » ou visant à faciliter les activités d'une association de type mafieux. La conséquence est une aggravation de peine d'un tiers à la moitié. En revanche, l'article 8 du même décret-loi prévoit un traitement beaucoup plus clément pour les délinquants qui coopèrent avec la justice, qui bénéficient des mêmes réductions de peine que les terroristes collaborateurs (l'emprisonnement à vie est remplacé par une peine de 12 à 20 ans, la réduction des autres peines est d'un tiers à la moitié).

Dans le même esprit, l'article 74 (§7) du décret n° 309 du 9 octobre 1990 relatif aux stupéfiants135(*) établit une circonstance atténuante spécifique pour la collaboration en ce qui concerne le crime d'association pour le trafic de stupéfiants. En vertu de cette disposition, la peine prévue par le même article est réduite de moitié ou des deux tiers pour l'accusé qui « a effectivement oeuvré pour obtenir des preuves du crime ou pour priver l'association de ressources décisives pour la commission des crimes ».

(b) L'aménagement du régime pénitentiaire (article 16-nonies)
(i) Avant la condamnation

Pour les crimes de type mafieux, le code de procédure pénale prévoit la détention provisoire en prison. Sous le régime actuel, réformé par la loi de 2001, la détention préventive ne peut pas être automatiquement révoquée ou remplacée au seul motif que le prévenu a commencé à coopérer avec les autorités136(*). La détention préventive reste donc la règle pour les collaborateurs pendant l'enquête.

Néanmoins, l'article 12 du décret-loi de 1991 prévoit que la détention provisoire peut être révoquée ou remplacée par une mesure moins coercitive lorsque le juge de la détention provisoire estime que la personne en question a renoncé à tout lien avec l'organisation criminelle et, dans le cas où cette personne a fait l'objet de mesures de protection spéciales, qu'elle a rempli les obligations qu'elle avait contractées.

(ii) Pendant la détention

La loi n° 354 du 26 juillet 1975137(*) régit le traitement pénitentiaire des personnes condamnées à une peine d'emprisonnement. L'article 4-bis consacre la règle générale selon laquelle les personnes condamnées pour terrorisme et pour des crimes de type mafieux ne peuvent pas bénéficier des avantages pénitentiaires auxquels ont droit les personnes condamnées pour d'autres crimes. Cette norme est une autre expression claire du régime de la « double voie », qui vise à renforcer la répression du crime organisé. Dans la même logique, la loi sur le système pénitentiaire prévoit une exception pour les personnes condamnées pour terrorisme et pour des crimes de type mafieux qui décident de collaborer avec les autorités. En vertu de l'article 58-ter, les collaborateurs de justice peuvent se voir accorder le bénéfice de semi-liberté138(*), de « permis de sortie sur bonne conduite » (permessi premio)139(*) et de travail à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire140(*), avant même l'expiration des délais de droit commun.

L'article 16-nonies du décret de 1991 prévoit que les collaborateurs condamnés peuvent également bénéficier de la libération conditionnelle141(*) et de la détention domiciliaire142(*) par dérogation aux délais ordinaires, à condition toutefois que la personne ait purgé au moins un quart de la peine, ou au moins 10 ans dans les cas où la personne a été condamnée à une peine de 30 ans de réclusion (ergastolo).

Ces avantages sont accordés par le tribunal de surveillance ou le magistrat de surveillance à la demande du procureur général devant la cour d'appel ou du procureur national antimafia, conformément à l'article 16-nonies du décret-loi de 1991. Ils peuvent être révoqués dans les mêmes conditions que celles qui déterminent la révocation des mesures de protection143(*).

(3) Les mesures de protection

Conformément à l'article 12 du décret-loi de 1991 pour que des mesures de protection soient accordées, la personne est tenue de signer un document dans lequel elle s'engage personnellement « à respecter les règles de sécurité prescrites et à coopérer activement à l'exécution des mesures, à se soumettre à un interrogatoire, à un examen ou à tout autre acte d'enquête, y compris l'établissement d'un rapport illustrant le contenu de la coopération, à remplir les obligations qui lui incombent en vertu de la loi et de leurs obligations contractuelles, à s'abstenir de faire des déclarations à des personnes autres que les autorités judiciaires, les forces de police et leur propre défenseur sur des faits ayant un quelconque rapport avec la procédure pour laquelle elle a coopéré ou coopère et s'abstenir de rencontrer ou d'entrer en contact (...) avec toute personne impliquée dans des activités criminelles, ainsi que, (...) avec toute personne qui coopère avec les autorités judiciaires et à (...) débourser l'argent provenant d'activités illicites. »

Selon l'importance du risque, les collaborateurs peuvent bénéficier d'une protection ordinaire ou spéciale. À ce titre, depuis la réforme introduite par la loi n°45/2001, la loi distingue les mesures de protection ordinaires, les mesures de protection spéciales et un programme de protection spéciale.

(a) Les mesures de protection ordinaires

Les mesures de protection ordinaires sont adoptées par les autorités de police ou bien, lorsque la personne est détenue, par le département de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice144(*).

(b) Les mesures de protection spéciales

Lorsque les mesures ordinaires sont insuffisantes, mais que le danger n'est pas grave au point de nécessiter le transfert de la personne dans une localité protégée145(*), des mesures de protection spéciales peuvent être prises.

Les collaborateurs soumis à ces mesures restent donc dans leur ville d'origine, mais une surveillance spéciale est mise en place pour les protéger, ainsi que leurs familles, leurs propriétés et leurs biens. Ils ne bénéficient d'aucune aide financière, à l'exception de contributions exceptionnelles destinées à la réinsertion sociale. Ces mesures peuvent être étendues aux personnes vivant en permanence avec le collaborateur et, dans des situations spécifiques, aux personnes dont il est établi qu'elles sont exposées à un danger grave et concret en raison de leur relation avec le collaborateur. L'article 13 du décret-loi de 1991 définit une série de mesures de protection :

- des mesures de surveillance et de protection par la police locale ;

- des mesures techniques de sécurité pour le domicile et les biens du collaborateur (caméras de vidéosurveillance ou alarmes à distance) ;

- des mesures nécessaires pour les transferts temporaires vers des localités autres que le lieu de résidence ;

- pour les collaborateurs en détention, des mesures spéciales de garde, de transfèrement et de surveillance ;

- des mesures visant à la réinsertion sociale, y compris un soutien financier ;

- toute autre mesure nécessaire.

(c) Le programme de protection spéciale

Dans les cas où les mesures spéciales de protection seraient inadéquates, compte tenu de la gravité et de la nature concrète du danger auquel le collaborateur est confronté, un programme de protection spéciale146(*) est adopté. Ce programme implique le transfert du collaborateur et de sa famille dans une localité secrète et protégée.

Outre les mesures de surveillance, le programme de protection spéciale implique une modification des registres et des formes d'assistance économique. Ainsi, le programme prévoit des mesures complémentaires, notamment le transfert des personnes (qui ne sont pas en détention) dans un lieu secret et protégé, l'octroi de documents d'identité de couverture, des mesures visant à favoriser la réadaptation sociale du collaborateur et des autres personnes protégées ou encore des mesures d'assistance personnelle et économique (hébergement, frais médicaux, frais juridiques et frais de subsistance147(*)).

Toutes les mesures de protection, quel que soit leur niveau, sont accordées par une commission centrale au sein du ministère de l'Intérieur et mises en oeuvre par un service central de protection au sein de la police148(*).

c) La valeur probatoire des déclarations des repentis
(1) L'utilisation des déclarations lors du procès

En application de l'article 16-quater (§3) du décret-loi de 1991, le rapport contenant les déclarations du collaborateur (verbale illustrativo) est entièrement versé dans un dossier conservé par le parquet. Le rapport est considéré comme un acte d'enquête (atto di indagine). Il est donc soumis aux règles régissant l'utilisation des actes d'enquête lors des procès149(*).

Conformément à l'article 500 du code de procédure pénale, les déclarations des témoins contenues dans le dossier du procureur peuvent être exploitées par les parties pour contester les témoignages lors du procès. Le juge peut les évaluer uniquement dans le contexte de la crédibilité du témoin, à condition que les parties les portent à son attention. Cela signifie que l'avocat des personnes accusées peut contre-interroger le collaborateur après son témoignage, soulignant d'éventuelles contradictions avec le rapport. Le juge peut ainsi établir des conclusions sur la fiabilité du collaborateur, mais ne peut pas considérer automatiquement comme preuve l'une ou l'autre version des faits rapportés par le collaborateur, conformément à la règle générale régissant l'utilisation des déclarations des témoins, y compris des collaborateurs, lors des procès150(*).

Par ailleurs, conformément à l'article 438 du code de procédure pénale, les accusés peuvent opter pour ce que l'on appelle le « procès abrégé ». Selon ces modalités, l'accusé accepte d'être condamné sur la base des éléments contenus dans le dossier d'enquête (y compris les déclarations des témoins ou collaborateurs), en échange d'une réduction de peine d'un tiers151(*).

(2) Le contrôle judiciaire des déclarations

C'est le juge qui décide de la fiabilité des déclarations des collaborateurs présentées par le procureur. Il évalue leurs déclarations, d'abord lors de la phase préliminaire de l'enquête (dans le cas où le procureur demande au juge de l'enquête préliminaire l'émission de mesures coercitives), et, ensuite, dans le cadre du procès.

Aux termes de l'article 192 (§3) du code de procédure pénale, « les déclarations faites par le coaccusé du même délit ou par une personne inculpée dans une procédure connexe (...) sont appréciées avec les autres éléments de preuve qui confirment leur fiabilité ». Cette disposition incite le juge à une certaine prudence pour déterminer la valeur probante d'une déclaration et vise à éviter des condamnations fondées uniquement sur les déclarations des collaborateurs, exigeant des éléments corroborants152(*).

La Cour de cassation a défini une évaluation comportant trois volets153(*) : établir la crédibilité du collaborateur, évaluer la crédibilité intrinsèque des déclarations et vérifier l'existence d'éléments de corroboration externes. Ces éléments doivent être des faits objectifs confirmant chaque segment du récit du collaborateur. Le rôle du juge dans l'attribution d'un « permis de crédibilité » permet l'utilisation des verdicts finaux favorables dans d'autres procès impliquant le même collaborateur, évitant une répétition du premier volet de l'évaluation.

8. Pays-Bas

En vigueur depuis 2006, le régime juridique des repentis autorise le parquet à conclure un accord écrit avec un suspect qui accepte de témoigner dans une affaire pénale concernant une infraction grave (infractions en bande organisée portant atteinte à l'ordre public et infractions passibles d'une peine de prison de huit ans ou plus), en échange d'une promesse de réduction de peine pouvant aller jusqu'à la moitié de la peine d'emprisonnement. Ce régime est également ouvert aux personnes déjà condamnées.

En novembre 2022, le gouvernement néerlandais a annoncé son intention d'élargir le régime des repentis aux « facilitateurs », en permettant d'octroyer une réduction de peine au-delà de la moitié de la peine d'emprisonnement sans sursis, voire d'annuler totalement la peine, pour les repentis dont la peine effective est de six ans au maximum.

a) La reconnaissance juridique des repentis

Le concept de repenti ou « témoin de la Couronne » (kroongetuige) a été introduit dans le droit pénal néerlandais par la loi du 12 mai 2005, entrée en vigueur le 1er janvier 2006, modifiant le code pénal et le code de procédure pénale en ce qui concerne les déclarations de témoins faites en échange d'une promesse du ministère public (dite « loi sur les promesses envers les témoins en matière pénale »)154(*).

Cette réforme fait suite à une recommandation de la commission d'enquête parlementaire sur les méthodes d'investigation, mise en place à la suite de « l'affaire de l'IRT »155(*) 156(*).

Selon le régime prévu aux articles 226 g à 226 k du code de procédure pénale157(*), en lien avec l'article 44 a du code pénal, le parquet peut conclure un accord avec un suspect qui accepte de témoigner dans une affaire pénale contre un autre suspect, en échange d'une promesse de réduction de peine pouvant aller jusqu'à la moitié de la peine d'emprisonnement sans sursis. Un arrangement similaire est possible avec un témoin déjà condamné.

(1) Les infractions visées

Selon l'article 226 g du code de procédure pénale, le procureur peut conclure un accord avec un suspect prêt à témoigner contre un autre suspect dans une enquête pénale concernant :

- des infractions158(*) commises en bande organisée et qui, compte tenu de leur nature ou de leur lien avec d'autres infractions, constituent une atteinte grave à l'ordre public ;

- ou des infractions passibles d'une peine d'emprisonnement de huit ans ou plus.

(2) Les personnes concernées

L'article 226 g du code de procédure pénale vise les suspects qui font des déclarations contre d'autres suspects, dans le cadre d'une enquête pénale sur les crimes énoncés ci-dessus.

Les personnes qui ont déjà été condamnées peuvent également bénéficier d'un accord avec le ministère public.

b) Les avantages accordés aux repentis
(1) L'accord entre le repenti et le procureur

Conformément à l'article 226 g du code de procédure pénale, le repenti (accusé ou déjà condamné) et le procureur concluent un accord écrit contenant une description aussi précise que possible des faits et, si possible, de l'accusé contre lequel le repenti est disposé à témoigner, des infractions pour lesquelles il sera poursuivi dans l'affaire dans laquelle il est lui-même suspecté, des conditions qui lui sont imposées et du contenu de l'engagement du procureur. Le procureur général compétent doit soumettre tout projet d'accord au collège des procureurs généraux159(*).

Selon l'instruction sur les engagements envers les témoins dans les affaires pénales, le procureur général impose au moins deux conditions au repenti : celui-ci doit s'engager à témoigner devant le juge lors d'une audience publique et il doit donner toutes les informations et faire preuve de franchise quant à son rôle dans les infractions sur lesquelles porte son témoignage160(*). En contrepartie du témoignage du repenti, le procureur peut s'engager à réduire la peine de ce dernier dans les limites et conditions décrites ci-après (cf. infra). En revanche, l'accord entre le procureur et le repenti ne peut en aucun cas contenir d'engagements du ministère public concernant le contenu de l'acte d'accusation, l'interruption d'une enquête en cours ou le classement d'une affaire, l'exécution aux Pays-Bas d'une peine de prison prononcée à l'étranger, l'octroi d'une récompense financière, le fait de favoriser d'autres personnes que le repenti ou encore la définition précise de mesures de protection161(*) (qui doivent faire l'objet d'un accord distinct et confidentiel).

Après l'autorisation du collège des procureurs généraux, le juge d'instruction contrôle la légalité et le bien-fondé de l'accord (article 226 h du code de procédure pénale). Il doit notamment s'assurer de la nécessité et de l'urgence d'obtenir la déclaration du repenti, de la fiabilité de ce dernier et de la proportionnalité de l'accord. Si le juge approuve l'accord, il fait prêter serment au repenti puis recueille ses déclarations. S'il s'y oppose, le parquet peut faire appel, mais pas le repenti. Selon la ministre de la justice et de la sécurité, « le contrôle judiciaire préalable par le juge d'instruction a été un choix délibéré du législateur et est une garantie supplémentaire d'une utilisation restreinte et légale de l'instrument »162(*).

L'article 226 j, paragraphe 4, du code de procédure pénale prévoit que le juge d'instruction peut ordonner, à la demande du procureur ou du repenti, que l'identité du repenti soit cachée au suspect pendant un certain temps.

(2) Le traitement pénal

L'article 44 a du code pénal prévoit, qu'à la demande du procureur général, le juge peut octroyer une remise de peine à un repenti ayant conclu avec le ministère public un accord homologué par le juge d'instruction. « En réduisant la peine, le tribunal tient compte du fait qu'en témoignant, une contribution importante a été ou peut être apportée à l'enquête ou à la poursuite des crimes »163(*).

Selon l'article 44 a précité, la remise de peine peut consister en :

- une réduction allant jusqu'à la moitié d'une peine d'emprisonnement sans sursis, d'un travail d'intérêt général ou d'une amende ;

- une conversion d'une partie (au plus la moitié) d'une peine inconditionnelle en peine conditionnelle ;

- un remplacement d'une partie d'une peine d'emprisonnement (au plus un tiers) par un travail d'intérêt général ou une amende sans sursis.

En vertu de l'article 226 k du code de procédure pénale, une personne déjà condamnée peut également bénéficier du régime des repentis. Dans ce cas, le procureur peut conclure un accord s'engageant à émettre un avis positif dans le cadre de la procédure de demande de grâce, en vue de réduire la peine imposée de moitié au maximum.

(3) Les mesures de protection

L'article 226 l énonce que le ministère de la justice et de la sécurité peut prendre des mesures spécifiques pour la protection des repentis. Ils peuvent ainsi bénéficier des mesures de protection pour les témoins menacés, prévues par le décret sur la protection des témoins164(*). Selon l'article 3 de ce décret, des mesures sont prises lorsqu'une menace sérieuse est apparue à la suite de la coopération avec la police et la justice et que cette menace est directement liée à l'action des pouvoirs publics.

Le programme de protection des témoins est mis en oeuvre par l'équipe de protection des témoins (Team Getuigenbescherming TGB), placée sous l'autorité du procureur national chargé de la protection des témoins. Les mesures de protection font l'objet d'un accord spécifique et confidentiel, en dehors de l'accord contenant l'engagement du procureur à une remise de peine165(*). L'accord de protection ne contient que les grandes lignes des mesures prévues et non la manière dont elles seront mises en oeuvre ; il n'est pas examiné par le juge d'instruction et ne fait pas partie de la procédure pénale dans laquelle l'accord avec le repenti est mis en place166(*).

Le système de protection des témoins et le manque de transparence des accords de protection ont fait l'objet de nombreuses critiques à la suite de l'assassinat, en 2018, 2019 et 2021 respectivement du frère, de l'avocat et d'une personne de confiance du repenti Nabil B. 167(*), dans le cadre de l'affaire dite « Marengo », concernant une organisation criminelle néerlando-marocaine168(*). Dans un rapport remis en mars 2023, le Conseil d'enquête pour la sécurité169(*) a notamment souligné le manque de communication entre le parquet et la police et recommandé une réforme du système de surveillance et de protection170(*).

À la suite des conclusions de ce rapport, le gouvernement néerlandais a présenté un plan d'action pour améliorer la protection des témoins repentis comprenant notamment la réalisation d'enquêtes de sécurité plus strictes et l'élargissement du rôle de la commission centrale de contrôle (Centrale Toetsingscommissie), qui est un organe consultatif interne du parquet composé de membres du ministère public et de la police, et qui est chargé de donner un avis sur chaque projet d'accord avec un repenti et de s'assurer que sa sécurité peut être correctement assurée171(*).

c) La valeur probatoire des déclarations des repentis

La culpabilité d'un accusé ne peut reposer sur les seules déclarations d'un repenti, conformément à l'article 344 a, paragraphe 4, du code de procédure pénale. De plus, en vertu de l'article 360, paragraphe 2, de ce même code, le juge doit motiver l'utilisation comme preuve de déclarations provenant d'un repenti.

Dans le procès dit « Passage » qui s'est tenu entre 2009 et 2019 aux Pays-Bas, les preuves d'un certain nombre d'infractions s'appuyaient sur les déclarations de deux repentis (La Serpe et Ros), ainsi que sur la déclaration d'un témoin anonyme. En appel, l'un des accusés avait contesté l'utilisation des déclarations des repentis mais la Cour suprême des Pays-Bas (Hoge Raad) a confirmé la grande liberté laissée au juge dans l'utilisation des déclarations de repentis172(*).

d) Le projet de réforme annoncé en novembre 2022

Dans une lettre à la chambre basse du parlement du 4 novembre 2022173(*), la ministre de la justice et de la sécurité de l'époque, Mme Dilan Yeºilgöz-Zegerius, a annoncé son souhait d'élargir le régime des repentis aux « facilitateurs », c'est-à-dire aux personnes ayant un rôle relativement moins important dans les réseaux criminels mais dont le témoignage peut se révéler important. Pour ce faire, la réduction de la durée de la peine d'emprisonnement sans sursis pourrait aller au-delà de la moitié, voire concerner la totalité de la peine. Ceci ne concernerait que les repentis passibles d'une peine effective inférieure à six ans. Pour ceux contre lesquels la peine effective est supérieure à six ans, la possibilité de réduction de peine resterait limitée à la moitié. Des mesures concernant l'amélioration de la protection et de la sécurité des repentis ont également été annoncées (voir infra).

En juillet 2023, avant les élections législatives de novembre, la ministre de la justice et de la sécurité a confirmé qu'un projet de loi visant à élargir le régime juridique des repentis et s'inspirant de l'approche italienne serait présenté d'ici la fin de l'année174(*). À la date de publication de la présente étude, aucun texte traduisant cet engagement n'avait été déposé devant le parlement, en l'absence de formation d'un nouveau gouvernement.


* 1  Gesetz zur Änderung des Strafgesetzbuches, der Strafprozeßordnung und des Versammlungsgesetzes und zur Einführung einer Kronzeugenregelung bei terroristischen Straftaten.

* 2 Les dispositions de la loi de 1989 sont précisées dans la note de législation comparée n° 124 (juin 2003)

* 3  Gesetz über den Verkehr mit Betäubungsmitteln (Betäubungsmittelgesetz - BtMG)

* 4  https://dserver.bundestag.de/brd/2007/0353-07.pdf

* 5 Voir supra.

* 6  https://dip.bundestag.de/vorgang/dreiundvierzigstes-gesetz-zur-%C3%A4nderung-des-strafgesetzbuches-strafzumessung-bei-aufkl%C3%A4rungs/8746

* 7  Strafgesetzbuch (StGB), § 46b Hilfe zur Aufklärung oder Verhinderung von schweren Straftaten

* 8  Strafprozeßordnung (StPO), § 100a Telekommunikationsüberwachung

* 9 Au sens de l'article 38, paragraphe 2 du code pénal [ Strafgesetzbuch (StGB), § 38 Dauer der Freiheitsstrafe]

* 10 Creijns J.H., Collaboration with Justice in the Netherlands, Germany, Italy and Canada, Universiteit Leiden, 2017, p. 179.

* 11 Strafgesetzbuch (StGB), § 81 Hochverrat gegen den Bund, § 82 Hochverrat gegen ein Land, § 83 Vorbereitung eines hochverräterischen Unternehmens.

* 12  Strafgesetzbuch (StGB), § 87 Agententätigkeit zu Sabotagezwecken.

* 13  Strafgesetzbuch (StGB), § 89a Vorbereitung einer schweren staatsgefährdenden Gewalttat.

* 14  Strafgesetzbuch (StGB), § 89c Terrorismusfinanzierung.

* 15  Strafgesetzbuch (StGB), § 98 Landesverräterische Agententätigkeit.

* 16  Strafgesetzbuch (StGB), § 129 Bildung krimineller Vereinigungen.

* 17  Strafgesetzbuch (StGB), § 149 Vorbereitung der Fälschung von Geld und Wertzeichen.

* 18  Strafgesetzbuch (StGB), § 261 Geldwäsche.

* 19 Strafgesetzbuch (StGB), § 307 Herbeiführen einer Explosion durch Kernenergie, § 308 Herbeiführen einer Sprengstoffexplosion, § 309 Mißbrauch ionisierender Strahlen, § 310 Vorbereitung eines Explosions- oder Strahlungsverbrechens.

* 20 Strafgesetzbuch (StGB), § 315 Gefährliche Eingriffe in den Bahn-, Schiffs- und Luftverkehr , § 315a Gefährdung des Bahn-, Schiffs- und Luftverkehrs, § 315b Gefährliche Eingriffe in den Straßenverkehr, § 315c Gefährdung des Straßenverkehrs, § 315d Verbotene Kraftfahrzeugrennen, § 315e Schienenbahnen im Straßenverkehr, § 315f Einziehung, § 316 Trunkenheit im Verkehr, § 316a Räuberischer Angriff auf Kraftfahrer, § 316b Störung öffentlicher Betriebe , § 316c Angriffe auf den Luft- und Seeverkehr, § 317 Störung von Telekommunikationsanlagen, § 318 Beschädigung wichtiger Anlagen, § 319 Baugefährdung.

* 21 Gesetz über den Verkehr mit Betäubungsmitteln (Betäubungsmittelgesetz - BtMG), § 29 Straftaten, § 29a Straftaten, § 30 Straftaten, § 30a Straftaten.

* 22 Jocelyne Leblois-Happe, Xavier Pin, Julien Walther, Chroniques de droit pénal allemand, in Revue Internationale de droit pénal, mars 2010, pp. 277 à 310.

* 23 Elizabeta Ivièeviæ Karas, Zoran Buriæ, Matko Pajèiæ, Collaborators of Justice: Comparative legal solutions and croatian criminal procedural law, avril 2021, p. 42.

* 24  Strafgesetzbuch (StGB), § 83a Tätige Reue.

* 25  Strafgesetzbuch (StGB), § 314a Tätige Reue.

* 26  Strafgesetzbuch (StGB), § 320 Tätige Reue.

* 27 Creijns J.H., Collaboration with Justice in the Netherlands, Germany, Italy and Canada, Universiteit Leiden, 2017, pp. 185 et suiv.

* 28 Andreas Mischkewitz, Das staatliche Zeugenschutzprogramm in Deutschland, Felix-Verlag, 2014 (p. 16).

* 29  Gesetz zur Harmonisierung des Schutzes gefährdeter Zeugen (Zeugenschutz-Harmonisierungsgesetz - ZSHG)

* 30  Gesetz zur Harmonisierung des Schutzes gefährdeter Zeugen (Zeugenschutz-Harmonisierungsgesetz - ZSHG), § 2 Zeugenschutzdienststellen.

* 31 United Nations Office of Drug and Crime, Good practices for the protection of witnesses in criminal proceedings involving organized crime, 2008.

* 32 BGH 08.06.2016 - 2 StR 539/15, StV 2016

* 33 Creijns J.H., Collaboration with Justice in the Netherlands, Germany, Italy and Canada, Universiteit Leiden, 2017, p. 213.

* 34  Strafgesetzbuch (StGB), § 145d Vortäuschen einer Straftat.

* 35  Strafgesetzbuch (StGB), § 164 Falsche Verdächtigung.

* 36  Serious Organised Crime and Police Act 2005

* 37 Ou « King's evidence », selon que le monarque régnant est un homme ou une femme.

* 38 https://publications.parliament.uk/pa/cm200405/cmbills/005/en/05005x--.htm

* 39  Sentencing Act 2020

* 40 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements.

* 41 Le Crown Prosecution Service (Ministère public) poursuit les affaires pénales qui ont fait l'objet d'une enquête par la police ou d'autres services d'enquête en Angleterre et au pays de Galles.

* 42 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements

* 43 Sénat, Division de la Législation comparée, LC n° 124, Les repentis face à la justice pénale, 2003, p. 20.

* 44 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements

* 45 Ibid.

* 46 Ibid.

* 47 Proche de l'avertissement pénal probatoire prévu en droit français.

* 48 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements

* 49 L'article 71 de la loi SOCPA liste un nombre limité d'autorités parmi lesquelles le directeur du service national des poursuites, placé sous l'autorité du procureur général, le directeur de l'Office de lutte contre la fraude, la Banque d'Angleterre ou un procureur désigné à cet effet.

* 50 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements

* 51 L'Attorney-General est un procureur général qui a rang de ministre et représente la Couronne et l'intérêt général devant les tribunaux.

* 52 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements

* 53 Ibid.

* 54 Ibid.

* 55 Procédures engagées en vertu de la partie 5 de la loi de 2002 sur les produits du crime (Proceeds of Crime Act 2002 - POCA)

* 56 https://www.cps.gov.uk/legal-guidance/assisting-offenders-immunity-undertakings-and-agreements

* 57 Ibid.

* 58 Ibid.

* 59 Ibid.

* 60 https://www.legislation.gov.uk/ukpga/2005/15/part/2/chapter/4

* 61 https://www.nationalcrimeagency.gov.uk/what-we-do/how-we-work/providing-specialist-capabilities-for-law-enforcement/protected-persons

* 62  Criminal Procedure Rules 2020

* 63 Sénat, Division de la Législation comparée, LC n° 124, Les repentis face à la justice pénale, 2003, p. 22.

* 64 Thibaut Slingeneyer, Yves Cartuyvels et Christine Guillain, « Collaborateurs de justice ou repentis en droit pénal belge », Université catholique de Louvain, Groupe de Recherche en matière Pénale et Criminelle (GREPEC), 2020, p. 49.

* 65 Les tueries du Brabant désignent une série de crimes et plus spécialement de braquages sanglants qui eurent lieu en Belgique, principalement dans la province de Brabant, de 1982 à 1985.

* 66 Sénat de Belgique, Commission parlementaire chargée d'enquêter sur la criminalité organisée en Belgique, rapport final fait par MM. Coveliers et Desmedt, session de 1998-1999, 8 décembre 1998 (n°1-326/9).

* 67  Proposition de loi instaurant un régime pour les collaborateurs de la justice (DOC 50 1645/001).

* 68 Thibaut Slingeneyer, Yves Cartuyvels et Christine Guillain, op.cit., p. 10.

* 69 Ch. De Valkeneer, « Quelques réflexions à propos de la prescription de l'action publique et des `repentis' ou collaborateurs de justice », Revue de droit pénal et criminel, 2014, p. 1083 à 1102.

* 70 Ibid.

* 71  Loi du 22 juillet 2018 Loi modifiant le code d'instruction criminelle en ce qui concerne les promesses relatives à l'action publique, à l'exécution de la peine ou à la détention consenties à la suite d'une déclaration dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme.

* 72 Si le terme de « repenti » n'a pas été défini par le législateur belge, il apparait toutefois dans la loi de 2018 ( code de l'instruction criminelle, art. 216/6). La présente note fait donc référence à des repentis plutôt qu'à des « collaborateurs de justice », s'agissant de la Belgique.

* 73  Code de l'instruction criminelle, Livre II (De la justice), Titre Ier (Des tribunaux de police et des tribunaux correctionnels), Chapitre II ter (Des promesses relatives à l'action publique, à l'exécution de la peine ou à la détention consenties à la suite d'une déclaration).

* 74  Code de l'instruction criminelle, art. 216/1.

* 75  Code de l'instruction criminelle, art. 90 ter.

* 76 Chambre des Représentants de Belgique, document n° 3016/1 (session de 2017-2018), p. 24.

* 77 Thibaut Slingeneyer, Yves Cartuyvels et Christine Guillain, op.cit., p. 22.

* 78  Code pénal, articles 80, 81 et 85.

* 79 Thibaut Slingeneyer, Yves Cartuyvels et Christine Guillain, op.cit., p. 24.

* 80  Loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine.

* 81 Il s'agit d'un « mode d'exécution de la peine privative de liberté qui permet au condamné de quitter, de manière régulière, l'établissement pénitentiaire pour une durée déterminée de maximum douze heures par jour » prévu par l'article 21 de la loi du 17 mai 2006 précitée.

* 82 Thibaut Slingeneyer, Yves Cartuyvels et Christine Guillain, op.cit, p. 25.

* 83 Ibid.

* 84 Ibid.

* 85 Thibaut Slingeneyer, Yves Cartuyvels et Christine Guillain, op. cit., 26.

* 86  Loi du 7 juillet 2002 contenant des règles relatives à la protection des témoins menacés et d'autres dispositions.

* 87 Sénat, LC n° 124 : « Les repentis face à la justice pénale », juillet 2003, p. 31.

* 88  Code de l'instruction criminelle, art. 102.

* 89 Chambre des Représentants de Belgique, document n° 3016/1 (session de 2017-2018), p. 40 et 56 à 61.

* 90 En plus de ses déclarations, le repenti doit démontrer sa volonté d'indemniser le dommage causé par les infractions qu'il a commises (article 216/2, § 1, 4°f) ; respecter une série d'obligations futures : il lui est interdit de commettre de nouvelles infractions graves après la conclusion du mémorandum, sous peine de révocation de la promesse d'avantage (article 216/3 2°) ; se conformer aux conditions énoncées dans le mémorandum (article 216/2, § 1) et ne pas entraver la justice pénale : il lui est interdit de tenter de faire disparaître des preuves ou de s'entendre avec des tiers dans le but d'altérer le cours de la justice (article 216/3, § 1, 6°).

* 91 Chambre des Représentants de Belgique, document n° 3016/1 (session de 2017-2018), p. 45.

* 92  https://www.lalibre.be/belgique/judiciaire/2023/01/18/avant-panzeri-il-y-a-eu-dejan-veljkovic-le-premier-repenti-de-lhistoire-judiciaire-belge-5C6YZPS22REMNEDMJDYRANZ6AE/

* 93  https://www.lecho.be/dossiers/qatargate/qatargate-les-limites-du-statut-de-repenti/10441108.html

* 94  https://www.lesoir.be/505246/article/2023-04-03/un-projet-de-loi-pour-eviter-de-faire-capoter-les-dossiers-avec-repentis

* 95  https://www.teamjustitie.be/fr/2023/04/03/un-projet-de-loi-doit-donner-un-nouveau-souffle-a-la-loi-sur-les-repentis/

* 96 En 1995, le parlement espagnol a adopté une refonte totale de son code pénal, notamment pour s'aligner sur les normes européennes, moderniser son système pénal, renforcer la protection des droits fondamentaux et répondre aux changements sociaux. Cette réforme s'est matérialisée par l'adoption de la loi organique n° 10/1995 du 23 novembre 1995 relative au code pénal ( Ley Orgánica 10/1995, de 23 de noviembre, del Código Penal).

* 97  Ley Orgánica 7/2003, de 30 de junio, de medidas de reforma para el cumplimiento íntegro y efectivo de las penas.

* 98  Ley Orgánica 15/2003, de 25 de noviembre, por la que se modifica la Ley Orgánica 10/1995, de 23 de noviembre, del Código Penal.

* 99  Ley Orgánica 2/2015, de 30 de marzo, por la que se modifica la Ley Orgánica 10/1995, de 23 de noviembre, del Código Penal, en materia de delitos de terrorismo.

* 100 Dans sa rédaction telle qu'elle résulte de la loi organique n° 7/2012 ( Ley Orgánica 7/2012, de 27 de diciembre, por la que se modifica la Ley Orgánica 10/1995, de 23 de noviembre, del Código Penal en materia de transparencia y lucha contra el fraude fiscal y en la Seguridad Social).

* 101 Dans sa rédaction telle qu'elle résulte de la loi organique n° 1/2015 ( Ley Orgánica 1/2015, de 30 de marzo, por la que se modifica la Ley Orgánica 10/1995, de 23 de noviembre, del Código Penal).

* 102 Respectivement les articles 262 et 288 bis, tels qu'ils résultent de la loi organique n° 14/2022 du 22 décembre 2022 de transposition des directives européennes et autres dispositions pour l'adaptation de la législation pénale au système de l'Union européenne, et la réforme des délits contre l'intégrité morale, le désordre public et la contrebande d'armes à double usage.

* 103  Ley Orgánica 19/1994, de 23 de diciembre, de protección a testigos y peritos en causas criminales.

* 104  Real Decreto de 14 de septiembre de 1882 por el que se aprueba la Ley de Enjuiciamiento Criminal.

* 105  STS 57/2002, 28 de enero de 2002.

* 106 Mercedes Fernández López, Eficacia procesal de las declaraciones obtenidas en procedimientos de colaboración, in Revista Derecho & Sociedad, N° 50 / pp. 261-276.

* 107 Ibid.

* 108  DECRETO-LEGGE 21 marzo 1978, n. 59 - Norme penali e processuali per la prevenzione e la repressione di gravi reati.

* 109  DECRETO-LEGGE 15 dicembre 1979, n. 625 - Misure urgenti per la tutela dell'ordine democratico e della sicurezza pubblica.

* 110  LEGGE 6 febbraio 1980, n. 15 - Conversione in legge, con modificazioni, del decreto-legge 15 dicembre 1979, n. 625, concernente misure urgenti per la tutela dell'ordine democratico e della sicurezza pubblica.

* 111 Du nom de Francesco Cossiga, président du Conseil des ministres de 1979 à 1980.

* 112 DECRETO LEGGE 15 gennaio 1991, n. 8 - Nuove norme in materia di sequestri di persona a scopo di estorsione e per la protezione dei testimoni di giustizia, nonchè per la protezione e il trattamento sanzionatorio di coloro che collaborano con la giustizia

* 113  LEGGE 13 febbraio 2001, n. 45 - Modifica della disciplina della protezione e del trattamento sanzionatorio di coloro che collaborano con la giustizia nonchè disposizioni a favore delle persone che prestano testimonianza.

* 114  DECRETO 23 aprile 2004, n. 161 - Regolamento ministeriale concernente le speciali misure di protezione previste per i collaboratori di giustizia e i testimoni, ai sensi dell'articolo 17-bis del decreto-legge 15 gennaio 1991, n. 8, convertito, con modificazioni, dalla legge 15 marzo 1991, n. 82, introdotto dall'articolo 19 della legge 13 febbraio 2001, n. 45.

* 115  DECRETO 7 febbraio 2006, n. 144 - Regolamento, ai sensi dell'articolo 19, comma 2, della legge 13 febbraio 2001, n. 45, in materia di trattamento penitenziario di coloro che collaborano con la giustizia.

* 116 DECRETO 24 luglio 2003, n. 263 - Regolamento recante disposizioni attuative degli articoli 19 e 24 della legge 13 febbraio 2001, n. 45.

* 117 Commissione parlamentare di inchiesta sul fenomeno delle mafie e sulle altre associazioni criminali, anche straniere, Relazione sul sistema di protezione dei testimoni di giustizia, octobre 2014.

* 118  LEGGE 11 gennaio 2018, n. 6 - Disposizioni per la protezione dei testimoni di giustizia.

* 119  LEGGE 26 luglio 1975, n. 354 - Norme sull'ordinamento penitenziario e sulla esecuzione delle misure privative e limitative della libertà.

* 120 Corte Costituzionale, sent. 23 ottobre - 4 dicembre 2019, n. 253 (in G.U. 1 s.s. 11/12/2019, n. 50)

* 121  DECRETO-LEGGE 31 ottobre 2022, n. 162 - Misure urgenti in materia di divieto di concessione dei benefici penitenziari nei confronti dei detenuti o internati che non collaborano con la giustizia, nonchè in materia (...) e di prevenzione e contrasto dei raduni illegali.

* 122  LEGGE 29 maggio 1982, n. 304 - Misure per la difesa dell'ordinamento costituzionale.

* 123  DECRETO DEL PRESIDENTE DELLA REPUBBLICA 9 ottobre 1990, n. 309 - Testo unico delle leggi in materia di disciplina degli stupefacenti e sostanze psicotrope, prevenzione, cura e riabilitazione dei relativi stati di tossicodipendenza.

* 124  DECRETO DEL PRESIDENTE DELLA REPUBBLICA 23 gennaio 1973, n. 43 - Approvazione del testo unico delle disposizioni legislative in materia doganale.

* 125 J.H. Crijns, M.J. Dubelaar et K.M. Pitcher, Collaboration with Justice in the Netherlands, Germany, Italy and Canada - A comparative study on the provision of undertakings to offenders who are willing to give evidence in the prosecution of others, Université de Leiden, 2017, p. 244.

* 126 Ibid., p. 245.

* 127 Ibid.

* 128 J.H. Crijns, M.J. Dubelaar et K.M. Pitcher, op.cit., p. 246.

* 129 J.H. Crijns, M.J. Dubelaar et K.M. Pitcher, op. cit., p. 251.

* 130 J.H. Crijns, M.J. Dubelaar et K.M. Pitcher, op.cit., p. 250.

* 131 Article 270.

* 132 Article 1er du décret-loi de 1979.

* 133 L'article a été modifié et codifié en 2018 (article 270-bis.1 du code pénal).

* 134  DECRETO-LEGGE 13 maggio 1991, n. 152 - Provvedimenti urgenti in tema di lotta alla criminalità organizzata e di trasparenza e buon andamento dell'attività amministrativa. L'article a été modifié et codifié en 2018 (article 416-bis.1 du code pénal).

* 135  DECRETO DEL PRESIDENTE DELLA REPUBBLICA 9 ottobre 1990, n. 309 - Testo unico delle leggi in materia di disciplina degli stupefacenti e sostanze psicotrope, prevenzione, cura e riabilitazione dei relativi stati di tossicodipendenza.

* 136 Article 16-octies du décret-loi de 1991.

* 137  LEGGE 26 luglio 1975, n. 354 - Norme sull'ordinamento penitenziario e sulla esecuzione delle misure privative e limitative della libertà.

* 138 Articles 48 et 50.

* 139 Article 30-ter.

* 140 Article 21 (§1).

* 141 Article 176 du code pénal.

* 142 Article 47-ter de la loi de 1975.

* 143 Voir infra.

* 144 Article 9 (§2) du décret-loi de 1991 complété par l'article 3 (§1) du décret n° 161 du 23 avril 2004.

* 145 Article 13 (§4) du décret-loi de 1991 complété par l'article 7 (§4) du décret n° 161 du 23 avril 2004.

* 146 Article 13 (§§ 5 et 11) du décret-loi complété par l'article 8 (§4) du décret n° 161 du 23 avril 2004.

* 147 H. Crijns, M.J. Dubelaar et K.M. Pitcher, op.cit., p. 255.

* 148 Article 10 du décret-loi de 1991.

* 149 H. Crijns, M.J. Dubelaar et K.M. Pitcher, op.cit., p. 249.

* 150 Ibid.

* 151 Ibid.

* 152 Ibid., p. 249.

* 153 Cassazione penale, sez. VI, sentenza 22/02/1993 n° 1653

* 154  Wet van 12 mei 2005 tot wijziging van het Wetboek van Strafrecht en het Wetboek van Strafvordering met betrekking tot verklaringen van getuigen die in ruil voor een toezegging van het openbaar ministerie zijn afgelegd (toezeggingen aan getuigen in strafzaken).

* 155 Brief van de Ministerie van Justitie en Veiligheid aan de Voorzitter van de Tweede Kamer der Statent-Generaal, 4 november 2022, Tweede Kamer, vergaderjaar 2022-2023, 29 911, nr. 380.

* 156 L'affaire de l'IRT (Interregionaal rechercheteam Noord-Holland/Utrecht), révélée en 1994, concernait les méthodes d'investigation d'un service d'enquête spécialisé créé pour lutter contre la criminalité organisée aux Pays-Bas. Il a notamment été reproché à ce service de police d'avoir laissé entrer de grandes quantités de drogues en provenance d'Amérique du Sud.

Voir : https://www.parlement.com/id/vh8lnhrpmxw6/parlementaire_enquete_opsporingsmethoden

* 157 Brief van de Ministerie van Justitie en Veiligheid aan de Voorzitter van de Tweede Kamer der Statent-Generaal, 4 november 2022, op. cit., p. 2.

* 158 Telles que définies à l'article 67, paragraphe 1, du code de procédure pénale.

* 159  Aanwijzing toezegging aan getuigen in strafzaken, paragraphe 7.5.

* 160 Ibid., paragraphe 6.

* 161 Ibid., paragraphe 5.

* 162 Brief van de Ministerie van Justitie en Veiligheid aan de Voorzitter van de Tweede Kamer der Statent-Generaal, 4 november 2022, op. cit. , p. 5.

* 163 Wetboek van Strafrecht, Wetboek van Strafrecht, article 44 a.

* 164  Besluit getuigenbescherming.

* 165 Onderzoeksraad voor Veiligheid, Bewaken en beveiligen, Lessen uit drie beveiligingssituaties, 2023, p. 42.

* 166 Ibid.

* 167 Pour un résumé des faits, voir : Onderzoeksraad voor Veiligheid, Bewaken en beveiligen, Lessen uit drie beveiligingssituaties, 2023.

* 168 https://www.om.nl/onderwerpen/strafzaak-marengo

* 169 Le Conseil d'enquête pour la sécurité (Onderzoeksraad voor Veiligheid) est une agence gouvernementale indépendante néerlandaise chargée de mener des enquêtes sur les accidents aéronautiques, routiers, maritimes, ferroviaires et d'autres types d'incidents graves.

Voir : https://www.werkenvoornederland.nl/organisaties/onderzoeksraad-voor-veiligheid

* 170 Onderzoeksraad voor Veiligheid, Bewaken en beveiligen, Lessen uit drie beveiligingssituaties, 2023, pp. 108 et suivantes.

* 171 Brief van de Ministerie van Justitie en Veiligheid aan de Voorzitter van de Tweede Kamer der Statent-Generaal, 3 juli 2023, Tweede Kamer, vergadejaar 2022-2023, 29 911 , nr 423, p. 13.

* 172 R. A. Hoving, De kroongetuige in het Passageproces, OM-reeks; Vol. 6, 2021, p. 189.

* 173 Brief van de Ministerie van Justitie en Veiligheid aan de Voorzitter van de Tweede Kamer der Statent-Generaal, 4 november 2022, op. cit. , pp. 1 et suivantes.

* 174 Brief van de Ministerie van Justitie en Veiligheid aan de Voorzitter van de Tweede Kamer der Statent-Generaal, 3 juli 2023, op. cit. p. 18.

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