EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Selon l'Observatoire national des violences faites aux femmes, en 2019, 213 000 femmes ont été victimes de violences physiques et sexuelles commises par leur partenaire ou ex-partenaire, 146 femmes ont été tués par leur partenaire ou ex-partenaire, 7 victimes sur 10 déclarent avoir subi ces faits de manière répétée, et 80 % d'entre elles déclarent avoir également été soumises à des atteintes psychologiques ou des agressions verbales. Pendant le premier confinement, la plate-forme de signalement en ligne des violences sexuelles et sexistes a enregistré une hausse de 40 % des appels de victimes, cette augmentation était de 60 % lors du deuxième confinement.
Dans certaines situations, les enfants constituent des co-victimes, soit parce qu'ils sont témoins des actes de violences, voire du meurtre, soit parce que l'agresseur leur porte atteinte également. En 2018, 21 décès d'enfants dans ce contexte sont à déplorer.
Pour éviter une progression de ces situations intolérables, il semble indispensable de mettre en place un dispositif permettant aux femmes de quitter le domicile plus simplement, et avec leurs enfants pour ne pas les exposer à des risques de violence décuplés.
Ce texte n'a pas vocation à se substituer à un éloignement du conjoint violent, conformément à la loi du 12 décembre 2005 mais à parer aux situations où celui-ci n'est pas possible compte tenu de l'urgence.
L'un des principaux freins au départ du domicile, outre l'emprise exercée par le conjoint, est le manque de ressources financières. En effet, il est fréquent que ces femmes n'aient pas accès au compte bancaire du foyer, ou qu'elles n'aient pas de source de revenus personnelle. Dès lors, il leur est impossible, en cas de départ du domicile conjugal, d'assurer pour elle et pour leurs enfants les achats de première nécessité : produits de puériculture, produits hygiéniques et menstruels, denrées alimentaires,...
La mise en place d'une aide financière d'urgence aux victimes de violences conjugales permettrait d'encourager cette démarche de départ. Versée en urgence aux femmes fuyant le domicile en cas de risque pour leur sécurité ou celle de leurs enfants, elle serait accessible à toute personne de nationalité française ou étrangère en situation régulière, de plus de 25 ans ou moins de 25 ans avec enfant à charge comme cela existe déjà dans les critères de l'attribution du RSA.
Elle serait attribuée sous forme d'avance sur droits supposés du RSA sous certaines conditions et versée soit directement à la personne ou à la structure d'hébergement d'urgence avec une régularisation à la suite d'un délai de 3 mois.
Le versement à titre personnel de l'avance est conditionné à l'ouverture d'un compte bancaire au seul nom de la femme quittant le domicile conjugal. Afin de permettre la création rapide du compte bancaire, nonobstant l'historique bancaire de la personne.
Le fait de passer par une avance sur droits supposés du RSA correspond totalement à l'objectif de cette proposition de loi, qui est une aide immédiate à l'intégration économique et sociale de ces femmes ou ces familles victimes de violences, dont la vie est à reconstruire.
Enfin, afin d'apporter à la femme victime et à ses enfants le soutien nécessaire à pérenniser le départ du domicile conjugale, le versement de l'aide serait complété par un dispositif d'aide psychologique et sociale.
D'après l'estimation basse de l'étude menée par PSYTEL parue en 2014 dans le cadre du quatrième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, les répercussions économiques des violences au sein du couple et leur incidence sur les enfants en France sont estimées aÌ 3,6 milliards d'euros.
Le coût des dépenses qui pourraient être engendrées par ce texte, ou en donnant aux associations le milliard d'euros nécessaire à une lutte efficace contre les violences faites aux femmes et aux enfants, resterait quoi qu'il en soit inférieur à cette estimation.
Pour mettre fin aux violences conjugales et familiales, il est important d'investir massivement dans la prévention et la protection des femmes et enfants victimes de violences, afin d'éviter qu'elles ne se reproduisent de génération en génération.
Tel est le sens de notre proposition.