EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Cette proposition de loi reprend les dispositions de la proposition n° 925, déposée à l'Assemblée nationale par la députée Annie Genevard, qui n'a pas pu être inscrite à l'ordre du jour.
Si l'État dispose d'un monopole de distribution de tabac, le volume des achats réalisés en dehors de ce monopole ne cesse de croître.
Bien que l'offre légale permette de garantir le contrôle de l'État sur la fabrication, aujourd'hui, 30 % des cigarettes sont achetées sur le marché parallèle. La population doit être consciente qu'en s'approvisionnant sur le marché noir, la santé des fumeurs est davantage mise en danger.
En outre, ce marché parallèle met à mal les politiques publiques visant à réduire la consommation de tabac. En effet, les fumeurs qui se fournissent sur ce marché sont par définition « hors champs » d'une politique de santé et ce pour diverses raisons :
- Les campagnes d'information incitants les fumeurs à réduire leur consommation ne les atteignent pas ;
- Les risques d'être atteint de cancer ou d'addiction sont plus élevés ;
- Les politiques fondées sur l'augmentation des prix en France les laissent indifférents.
Les buralistes sont, par ricochet, victimes de cette situation et sont ainsi de plus en plus nombreux à fermer leur établissement. Ces fermetures sont néfastes pour le pays en termes d'emploi mais également en termes de service à la personne et de cohésion sociale. Dans de nombreuses communes les tabacs sont les derniers commerces de proximité et dans les départements frontaliers, des milliers de débits ferment car délaissés par les fumeurs. Ainsi, le manque à gagner pour les buralistes est d'environ 250 millions d'euros.
Pour l'État, il s'agit d'environ 3 milliards d'euros de recettes qui sont perdues chaque année. En outre, les trafics aux frontières, la vente à la sauvette, la vente de produits de contrebande ou encore la multiplication des sites de vente sur internet discréditent l'autorité publique, impuissante à faire respecter la loi.
Le commerce illégal nuit également aux habitants de ces lieux de trafic. Ce dernier génère très souvent des troubles à l'ordre public.
Ainsi, cette proposition de loi vise à lutter contre le commerce illicite des produits de tabac afin de préserver, notamment, l'activité des buralistes tout en agissant pour la santé de la population et la tranquillité publique.
L'article 1er crée une circonstance aggravante pour le vol lorsqu'il porte sur les produits de tabac manufactureì.
L'article 2 est relatif aÌ l'infraction de commerce de marchandises contrefaites. Il est proposé de créer une circonstance aggravante de l'infraction pour les produits du tabac manufacturés.
L'article 3 crée une circonstance aggravante pour le recel lorsqu'il porte sur les produits de tabac manufactureì.
L'article 4 traite de la contrebande. Il est proposé de durcir les peines pour le commerce illicite des produits du tabac afin de créer un véritable effet dissuasif, en intégrant ce type de commerce aÌ ceux qui concernent des « marchandises dangereuses pour la santeì, la moralité ou la seìcuriteì publiques ».
Les articles suivants sont relatifs aÌ la vente aÌ la sauvette qui touche bien souvent les jeunes. C'est un aveu d'impuissance des autorités et une réalité sanitaire dramatique (vente aux mineurs, tabac de contrebande ou de contrefaçon). La volonté affichée de limiter l'entrée des jeunes dans le tabagisme devrait trouver dans la répression de la vente aÌ la sauvette sa manifestation la plus forte.
Très occupés par leur mission de seìcuriteì aggravée par les contraintes du plan Vigipirate, les policiers et gendarmes n'ont pas suffisamment de temps aÌ consacrer aÌ ces trafics du quotidien. Il est donc proposeì d'élargir aux policiers municipaux et agents de la ville de Paris l'habilitation aÌ contrôler la vente aÌ la sauvette : la vente et l'achat (article 5).
L'article 6 crée une nouvelle contravention en cas d'achat d'une faible quantité de produits de tabac manufactureì vendus dans les circonstances de vente aÌ la sauvette. Il s'agit en l'espèce de sanctionner l'acheteur qui se verrait contraint aÌ payer une amende. Il serait judicieux que le montant de cette contravention soit de 68 euros et graduelle afin d'éviter toute récidive de la part des acheteurs. Actuellement, c'est le revendeur qui est sanctionneì pour de tels actes. Mais bien souvent, ce moyen de répression n'a pas d'effets concrets. Par exemple, dans le quartier de La Chapelle-Marx Dormoy aÌ Paris, ouÌ la problématique complexe de la migration est un vivier de tensions, le commerce illégal de tabac issu de la contrebande est éminemment présent. Les revendeurs ne sont pas solvables et continuent ce trafic en toute impunité sans qu'aucune solution n'endigue véritablement le problème. Instaurer une répression aÌ l'égard des consommateurs est un moyen de dissuasion efficace pour mettre fin aÌ une situation nuisible tant pour la santeì des Français que pour l'économie du pays. C'est également un moyen de soutenir les buralistes dont l'activité se voit mise aÌ mal par ce commerce parallèle des produits du tabac.
L'article 7 vise aÌ évaluer la consommation réelle de tabac. La consommation réelle de tabac par les Français est bien souvent confondue avec les ventes officielles dans le réseau des buralistes : on occulte de ce fait la consommation de produits provenant du marché parallèle. AÌ ce jour, le marché parallèle est évalué chaque année par une étude privée. Or, par souci d'efficacité de la politique de santeì publique, il est urgent de compléter et corroborer ces chiffres en confiant aÌ un organisme spécialisé et officiel l'établissement de statistiques incontestables.