EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Malgré deux réformes en 2006 et 2016, la gestion immobilière de l'État reste très éclatée. Son organisation actuelle manque d'efficacité parce que sa gouvernance est fragmentée.

En effet, chaque ministère est à la fois occupant et quasi-propriétaire de ses emprises. La direction de l'immobilier de l'État (DIE), créée par les précédentes réformes, n'a qu'un rôle de pilotage, ce qui limite son autorité sur les décisions immobilières des ministères.

C'est pourquoi le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale a saisi la Cour des comptes d'une demande d'enquête sur la politique de l'État pour la gestion des 192 550 bâtiments de son parc immobilier (94,4 millions de mètres carrés). Dans son rapport du 7 décembre 2023, la Cour constate l'absence de rationalisation des surfaces de bureaux et signale le retard très important pris en matière de mise aux normes énergétiques et climatiques des bâtiments publics, qui font face à un « mur d'investissement ».

Les juges financiers dressent trois scénarios afin de permettre une meilleure gestion publique, par l'État, de son très important parc immobilier. L'objectif formulé est de dégager des économies durables et d'encourager la rénovation énergétique du parc, son accessibilité aux personnes en situation de handicap et son désamiantage.

Le premier scénario propose de renforcer la direction de l'immobilier de l'État, dans la continuité des dernières réformes. Le second scénario promeut une centralisation des opérations de l'État propriétaire sur une ou plusieurs structures professionnelles. Le troisième scénario, qui est ici privilégié, souligne l'intérêt de créer une véritable foncière d'État à qui serait transférée la propriété des biens. L'État resterait évidemment propriétaire de cette foncière, qui serait soumise à son contrôle.

De nombreuses mises en place de telles foncières ont fait leurs preuves au niveau national (La Poste et la SNCF) comme international (Pays-Bas, Danemark, Finlande).

La création de cette foncière d'État, qui est proposée par l'article unique de cette proposition de loi, permettrait de responsabiliser l'État dans ses deux rôles : comme propriétaire, sur ses missions de rationalisation, de mise aux normes, d'entretien et de valorisation de son patrimoine ; et comme occupant, sur le respect d'un usage approprié et sobre des locaux.

Les services ministériels deviendraient ainsi locataires des espaces qu'ils occupent, les obligeant à rationaliser les surfaces occupées. En effet, malgré trois circulaires en 2003, 2006 et 2023 censées impulser de nouvelles doctrines d'occupation des immeubles tertiaires de l'État, les résultats sont très insatisfaisants, avec une surface utile nette de 14,15 m² par poste de travail et une mutualisation interministérielle des surfaces de bureaux au point mort (4 % des bâtiments).

La rationalisation des espaces de bureau doit permettre de libérer du foncier sous-utilisé afin qu'il puisse être valorisé puis cédé ou, à son tour, loué à d'autres acteurs publics, des collectivités ou des personnes de droit privé. Ainsi, l'État dégagera des marges de manoeuvre nécessaires pour entretenir, rénover et adapter son parc aux enjeux qui sont devant nous.

Le coût des travaux à engager dans le cadre de la seule planification écologique est estimé à un montant compris entre 140 et 150 milliards d'euros d'ici 2050.

Cette réforme, encouragée par la Cour des comptes et appuyée sur des travaux méticuleux de la DIE, a été proposée par le Gouvernement sous forme d'amendement au projet de loi de finances pour 2025, qui a été adopté par le Sénat et maintenu dans le texte définitivement adopté. Cependant, le Conseil constitutionnel a estimé qu'il s'agissait d'un cavalier législatif et a censuré l'article en question.

Il convient donc de remettre l'ouvrage sur le métier pour que cette réforme structurelle soit enfin adoptée et produise, dans les années à venir, des effets bénéfiques pour tous : accessibilité aux personnes en situation de handicap, mises aux normes écologiques et économies budgétaires. Tel est l'objet de la présente proposition de loi.

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