Question de M. JOYANDET Alain (Haute-Saône - Les Républicains) publiée le 03/10/2024
M. Alain Joyandet attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur le développement de la filière bois et le respect des massifs forestiers. En effet, la France s'est engagée à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 à travers un plan climat et des orientations stratégiques « bas carbone ». De façon générale, le bois est un vecteur stratégique pour y parvenir, avec la séquestration et le stockage du carbone dans les écosystèmes forestiers et par la production de matériaux ou d'énergies biosourcées ou renouvelables se substituant aux produits d'origine fossile. Pour maximiser ces effets de substitution et de stockage du carbone, la récolte accrue du bois doit s'articuler avec les enjeux de préservation de la biodiversité. Ces objectifs sont au coeur du programme national de la forêt et du bois qui encadre la politique forestière, qui encourage une augmentation de la mobilisation du bois dans le cadre d'une gestion durable de la forêt par des pratiques respectueuses de l'environnement : protection de la biodiversité, des sols, des ressources en eaux et des paysages. Cependant, selon des universitaires ou chercheurs, sur le terrain la réalité serait assez éloignée. Par exemple, le travail de recherche mené actuellement dans le cadre de la labellisation par l'organisation des nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) des mille étangs en Haute-Saône révèle de très nombreuses atteintes au relief des massifs forestiers, impactant de manière définitive certains paysages voire certains sites pourtant reconnus à l'échelle internationale. Aussi, il lui demande comment le Gouvernement envisage d'assurer le développement de la filière bois dans une perspective de décarbonation mais également dans le respect d'une démarche durable respectueuse des ressources naturelles.
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Transmise au Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche
Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 01/05/2025
Le code forestier précise les objectifs d'un développement durable de la filière forêt-bois et la nécessité de bien prendre en compte, lors des actions de gestion forestière, les multiples services écosystémiques assurés par les massifs forestiers. Le code forestier précise dans son article L. 121-1 que « La politique forestière a pour objet d'assurer la gestion durable et la vocation multifonctionnelle, à la fois écologique, sociale et économique, des bois et forêts ». Il précise que l'État veille notamment à l'optimisation du stockage de carbone dans les forêts, dans le bois et les produits fabriqués à partir du bois, afin de contribuer à l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050 énoncé à l'article L. 100-4 du code de l'énergie. L'État est également chargé de veiller au maintien des équilibres et de la diversité biologiques, ainsi qu'à l'adaptation des forêts au changement climatique. Le puits de carbone forestier séquestre en forêt (dans les arbres et dans le sol) du carbone soustrait à l'atmosphère. Ce stockage présente cependant une certaine vulnérabilité, celle d'être soumis aux aléas climatiques et sanitaires. Le puits forestier est complété par le puits de carbone des produits bois. En stockant durablement du carbone hors atmosphère et hors forêt, ces derniers contribuent à la stratégie nationale bas-carbone. Avec les forêts, les produits bois compensent les émissions atmosphériques de carbone fossile issues des autres secteurs économiques, notamment des plus émetteurs (transports, industrie lourde et construction). Le développement de la filière bois peut jouer un rôle structurant dans la décarbonation fossile de l'économie. Pour ce faire, il convient de privilégier les usages du bois à longue durée de vie, dans la construction notamment. Le programme national forêt-bois (2017-2026) articule la production du matériau renouvelable bois avec une gestion forestière durable et multifonctionnelle, respectueuse de la biodiversité et des multiples services écosystémiques rendus par les forêts françaises. Il prévoit simultanément l'adaptation des forêts françaises à leurs nouvelles conditions climatiques. Cette articulation est également au coeur du contrat stratégique de la filière bois 2023-2026. Ce dernier s'appuie sur une gestion forestière qui doit concilier les dimensions économique, environnementale et sociale des forêts. Une attention particulière est accordée à la préservation de la biodiversité et des habitats, la qualité des sols et de l'eau, l'amélioration des capacités d'accueil du public, la protection contre les risques naturels. Le code forestier exige que toutes les forêts publiques bénéficient d'un document de gestion forestière durable approuvé par les services de l'État. Il en va de même pour toutes les forêts privées d'au moins 20 hectares. Ces documents de gestion constituent des garanties de gestion forestière durable validées par les services de l'État. Pour les forêts privées de moins de 20 hectares, les politiques publiques encouragent la massification de la gestion forestière, le regroupement des propriétaires, afin de lutter contre l'extrême morcellement de la propriété forestière privée. Le regroupement volontaire permet de mutualiser les investissements et de favoriser la mise en gestion des massifs forestiers, ce qui s'avère très stratégique en contexte de risques climatiques et sanitaires croissants. À cet effet, l'État porte une ambitieuse politique d'aide au renouvellement des forêts françaises, à la suite d'importantes mortalités, dépérissements et feux de forêts constatés ces dernières années. A la suite du plan de relance et de France 2030, un nouveau guichet renouvellement forestier, France Nation Verte, a été ouvert le 5 novembre 2024. Sa grande nouveauté est d'être un fonds pérenne dédié à l'adaptation en continu des forêts françaises au changement climatique. Le cahier des charges intègre des exigences renforcées en matière de protection de la biodiversité et de diversification des essences forestières. Il s'agit pour l'Etat de renforcer la résilience des forêts et leur capacité à surmonter les épisodes climatiques extrêmes. S'agissant du territoire forestier des Mille-étangs, situé en Haut-Saône, faisant l'objet d'un projet de demande de labellisation auprès de l'organisation des nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), celui-ci a été très fortement touché par une prolifération incontrôlée de scolytes typographes, des insectes subcorticaux ayant provoqué la mort de la grande majorité des épicéas du secteur. Ce phénomène est directement lié aux canicules et sécheresses estivales de ces dernières années. Les impacts paysagers sont significatifs. Il s'agit désormais de planter la future forêt de ce territoire, qui devra être composée d'essences forestières plus résistantes à la sécheresse et aux périodes de canicule. Pour une meilleure compréhension et acceptation sociale des coupes de bois, un effort de communication a été entrepris par la filière forêt-bois pour expliquer la durabilité de sa gestion, attestée au niveau national par des indicateurs de gestion forestière durable publiés tous les cinq ans par l'institut national de l'information géographique et forestière (IGN). Le cycle forestier constitue un temps long, dans lequel les variations soudaines du paysage sont rares. C'est lors des coupes définitives, en particulier lors de dépérissements massifs, que la pédagogie et la communication sont essentielles pour expliquer au grand public que la récolte des bois est suivie du renouvellement de la forêt et du début d'un nouveau cycle de croissance des arbres. La modification temporaire du paysage, lors de l'exploitation forestière, est aussi un moment stratégique, où s'engage le renouvellement du peuplement pour adapter la forêt à ses futures conditions climatiques, en évolution de plus en rapide.
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