Question de M. KHALIFÉ Khalifé (Moselle - Les Républicains-A) publiée le 17/04/2025

M. Khalifé Khalifé attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la reconfiguration actuelle des alliances économiques à l'échelle internationale et sur l'importance de repenser les partenariats avec plusieurs États, en particulier dans le secteur universitaire.

Face à la décision de Donald Trump d'imposer des tarifs impactant près de 70 % des exportations européennes, E. Macron affirme le 3 avril 2025 que «La réponse doit venir de l'Europe». Autour de deux pôles majeurs, les États-Unis et la Chine, l'Europe se trouve confrontée à un défi stratégique important dans un ordre mondial bouleversé.

Notre relation transatlantique est aujourd'hui fragilisée, y compris dans le domaine académique et scientifique, avec l'interdiction de certains mots aux États-Unis, comme « climat » ou « réchauffement climatique » dans les travaux universitaires subventionnés. Dans ce contexte, il semble primordial de diversifier nos partenariats et de repenser notre stratégie vis-à-vis d'un certain nombre de pays comme l'Inde, le Vietnam ou encore la Turquie, mais aussi la Chine, acteur incontournable de la scène internationale et fortement impacté par l'orientation actuelle du président des États-Unis.

Il est vrai que dans certains domaines, la collaboration avec la Chine s'est avérée complexe. Qu'il s'agisse des investissements économiques, du transfert de technologies ou des échanges en matière d'innovation, les défis sont nombreux, entre risques de dépendance, divergences réglementaires et tensions politiques.
Néanmoins, plutôt que d'opter pour une logique de repli, cette situation pourrait justement constituer une opportunité pour repenser les modalités de coopération avec la Chine, afin de poser les bases d'un partenariat plus équilibré et durable.

Si la relocalisation industrielle apparaît comme l'option la plus évidente, le domaine universitaire constitue également un levier tout aussi efficace. Comme l'a déclaré Nelson Mandela « L'éducation est l'arme la plus puissante qu'on puisse utiliser pour changer le monde ». C'est dans ce sens que renforcer la coopération académique avec la Chine et d'autres pays doit permettre de former une nouvelle génération de dirigeants et d'experts européens pleinement conscients des enjeux sino-européens. Il est essentiel de mieux former pour mieux comprendre et pour mieux agir. Cela doit se faire par le renforcement et par la diversification des partenariats universitaires entre les institutions européennes et chinoises, mais aussi en finançant des projets de recherche collaborative sur les enjeux sino-européens.

Ainsi il l'interroge sur la façon dont le Gouvernement français envisage l'intensification de la coopération universitaire avec la Chine dans le respect des intérêts stratégiques et académiques de la France et de l'Union européenne.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 11/09/2025

La visite du Président de la République en 2023, quelques mois après la réouverture des frontières chinoises après la crise sanitaire, a permis d'acter la volonté de nos deux Présidents de relancer les échanges humains entre la France et la Chine. Cela s'est traduit par la tenue, dès novembre 2023 à Pékin, de la 6e édition du Dialogue de haut niveau sur les échanges humains, qui a donné lieu à l'adoption de cinq déclarations d'intention, dont une portant sur le renforcement de la coopération en matière d'enseignement supérieur et de recherche. En outre, la 15e édition de la Commission mixte franco-chinoise en sciences et technologie s'est tenue en mars 2024 à Paris. La priorité donnée aux échanges humains a été confirmée lors venue du président Xi Jinping en France en mai 2024. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a coprésidé avec son homologue chinois la 7e édition du Dialogue sur les échanges humains, à Paris début juillet. La France s'inscrit dans une approche volontariste pour développer des liens via le renforcement de ses coopérations scientifiques et universitaires dans des domaines ciblés et dans un cadre permettant d'assurer la prise en compte des intérêts de chacun. La Chine s'est aujourd'hui imposée dans le paysage mondial de l'enseignement supérieur et de la recherche comme un partenaire incontournable, avec lequel il est dans notre intérêt mutuel de travailler. La coopération universitaire et scientifique est essentielle pour renforcer les liens entre nos deux pays et faire face ensemble aux grands enjeux globaux, dans un contexte international de bouleversements accrus. Elle est aussi un instrument pour rapprocher nos peuples, nos cultures et nos savoirs, et pour renforcer la compréhension mutuelle. Nous avons deux priorités : le développement de partenariats scientifiques servant les intérêts offensifs de la France, et le renforcement d'une mobilité étudiante réciproque. En matière de coopération scientifique, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères s'est montré particulièrement actif ces deux dernières années pour renforcer les coopérations dans des thématiques d'intérêt commun comme le changement climatique, la neutralité carbone ou l'environnement. Plusieurs programmes de soutien aux mobilités de chercheurs ont été relancés dès avril 2023 (Partenariat Hubert Curien « Cai Yuanpei » et programme Jeunes Talents France Chine) et un Centre de Neutralité Carbone franco-chinois a été créé en novembre 2023 pour soutenir la coopération en recherche dans ce domaine. Nous soutenons également, dans une démarche d'ouverture et de compréhension mutuelle, le renforcement de la recherche dans le domaine des sciences humaines et sociales, avec l'objectif de la formation d'une nouvelle génération de spécialistes de la Chine. C'est là la mission confiée à notre Centre d'études français sur la Chine contemporaine, basé à Hong Kong. Comme avec tous nos partenaires, nous veillons à ce que ces coopérations servent nos intérêts nationaux, stratégiques et industriels, dans le respect de notre politique de protection du potentiel scientifique et technique (PPST) de la nation. Notre approche se veut à la fois nationale et européenne, notre souveraineté ne pouvant s'envisager autrement que dans un cadre européen. A cette fin, nous entretenons ainsi un dialogue régulier et étroit, en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, avec nos établissements d'enseignement supérieur et nos organismes de recherche concernant le suivi et le développement de leurs partenariats avec des établissements chinois. S'agissant des mobilités étudiantes, nous oeuvrons à encourager davantage d'étudiants chinois à se rendre en France pour leurs études, et ce dans tous les domaines : c'est primordial si nous souhaitons former une future génération de décideurs chinois francophones et francophiles. Les mobilités d'étudiants chinois vers la France ont bien résisté à l'impact de la crise sanitaire, avec un retour dès 2024 à un niveau proche des volumes d'avant 2020. Cela n'aurait pas été possible sans l'investissement de nos établissements, qui bénéficient de l'aide de nos postes diplomatiques en Chine et du soutien des ministères. Nous nous appuyons en particulier sur les 21 Instituts franco-chinois (IFC), projections en Chine de nos établissements d'enseignement supérieur. Ces IFC jouent un rôle clé comme sources de mobilité pérenne et de qualité, et contribuent à entretenir une francophonie vivante au sein de la jeunesse chinoise. Nous sommes enfin particulièrement mobilisés pour insuffler une nouvelle dynamique à la mobilité d'étudiants français vers la Chine. Ces mobilités ont fortement chuté du fait de la fermeture des frontières chinoises et peinent à retrouver un nouvel élan : on compte actuellement moins d'un millier d'étudiants français en Chine continentale. Cette réalité contribue à un déficit accru de connaissance de la Chine par notre jeunesse, et prive nos jeunes d'un accès aux savoirs de pointe et aux infrastructures de qualité dont dispose la Chine. La Chine a montré qu'elle partageait notre préoccupation face à ce déséquilibre via l'annonce par le Président Xi Jinping lors de la visite d'Etat en France en mai 2024 d'objectif de « 10 000 étudiants français en Chine d'ici 3 ans ». Le dialogue institutionnel mené avec les autorités chinoises, en particulier dans le cadre du Dialogue de haut niveau sur les échanges humains, vise justement à encourager la mobilité de nos étudiants vers la Chine et à offrir à nos jeunes professionnels davantage d'opportunités d'une première expérience en Chine.

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