2. Les vacances de postes non prises en compte par la chancellerie
Outre ces vacances de postes officielles, les services de la justice sont affectés par des vacances qui ne sont pas prises en compte par l'administration centrale, tout en étant bien réelles. Il s'agit de l'ensemble des absences liées à des congés (congé de maternité, congé de longue durée), à des mises à disposition ou encore à des décharges syndicales ou politiques.
Ainsi, au tribunal d'instance de Mulhouse, l'effectif budgétaire s'élève à 49 fonctionnaires de greffe. Toutefois, depuis mars 2001, non seulement deux postes sont vacants, mais la non compensation des temps partiels correspond de facto à l'absence de presque six personnes tandis que deux personnes sont comptées dans les effectifs alors qu'elles sont en congé de maternité et en congé de longue maladie.
Il convient de remarquer que la féminisation du corps se traduit par une multiplication des absences de plusieurs mois liées à des congés de maternité qui ne sont pas pris en compte par la Chancellerie. Il serait donc temps que cette dernière tire les conséquences de cette situation en augmentant le nombre de magistrats et de fonctionnaires de greffe placés pour pallier ces vacances.
3. La très grande instabilité du personnel
Les tribunaux de grande instance et les établissements pénitentiaires sont confrontés à une très grande instabilité respectivement du personnel de greffe et de surveillance qui nuit à leur bon fonctionnement.
Les tribunaux de grande instance (TGI) du Haut-Rhin souffrent d'une extrême volatilité de leur personnel de greffe. Certains interlocuteurs ont critiqué le nombre annuel de commissions administratives paritaires (CAP), instances où sont examinées les demandes de mutation des agents -soit deux par an- qui sont susceptibles de modifier la composition des effectifs. Ils ont estimé qu'il ne permet pas de mettre en place une organisation durable des services qui se voient régulièrement dépouillées d'une partie non négligeable de leur personnel. Certes, tous les postes ne restent pas vacants, mais ils sont très souvent pourvus par des fonctionnaires qui viennent de terminer leur formation à l'école des greffes et qui doivent donc être encadrés par des collègues plus expérimentés.
Trois facteurs expliquent cette relative désaffection vis-à-vis des tribunaux de grande instance.
D'abord, les contraintes du personnel de greffe sont beaucoup plus fortes en TGI que dans les autres juridictions. Les taux de vacance et l'instabilité du personnel obligent les greffiers en chef chargés de la gestion du personnel à modifier régulièrement la composition des services de greffe afin d'assurer la continuité du service dans toutes les chambres.
Le manque d'effectifs conduit le personnel de greffe à travailler en flux tendu tandis que les impératifs de productivité réduisent au strict minimum les contacts avec les justiciables. Malgré ces efforts, les retards dans les diverses étapes de la procédure s'accumulent, ce qui contribue à accentuer la pression ressentie par ces fonctionnaires.
En outre, les personnels des greffes sont soumis à des horaires particulièrement contraignants et font régulièrement des heures supplémentaires. Certes, ils sont théoriquement en droit de pouvoir les récupérer, mais devant l'encombrement des services dans lesquels ils travaillent, ils y renoncent fréquemment pour éviter d'aggraver les conditions de travail déjà difficiles de leurs collègues.
Dans ces conditions, on comprend que dès que l'occasion se présente, les personnels de greffe quittent les TGI et se « réfugient » soit à la cour d'appel, soit dans les tribunaux d'instance, soit encore dans les conseils de prud'homme.
L'instabilité des personnels s'explique également par la volonté de ces derniers d'être mutés dans leur région d'origine . Les concours de fonctionnaires de greffe ou de surveillants sont nationaux et les candidats alsaciens sont sous représentés en raison du faible taux de chômage observé dans la région et de l'attractivité du marché de l'emploi en Allemagne et en Suisse.
En conséquence, la plupart des personnes affectées dans le Haut-Rhin sortent de l'école nationale des greffes et cherchent ensuite à se rapprocher de leur région d'origine. Elles ont donc tendance à rester un ou deux ans, et, lorsqu'elles sont réellement formées et complètement intégrées dans l'équipe, à demander leur mutation.
Ainsi, pour 4 greffiers sur 20 au tribunal de grande instance de Colmar, il s'agit d'un premier poste.
Enfin, les fréquents changements d'affectation des greffiers en chef résulte d'un particularisme du droit local, à savoir la possibilité pour ces derniers de devenir juges du livre foncier.
En « vieille France », il n'existe pas de passerelle entre la carrière de greffier en chef et de magistrat. Au contraire, en Alsace et en Moselle, les greffiers en chef peuvent devenir magistrats en étant nommés juges du livre foncier 8 ( * ) . La plupart d'entre eux conserve leurs fonctions jusqu'à leur retraite, mais certains réalisent une réelle deuxième carrière au sein du corps de la magistrature. Le Haut-Rhin regroupe 14 bureaux du livre foncier, ce qui rend les possibilités de promotion des greffiers en chef tout à fait réelles. En contrepartie, les mouvements de personnel dans les postes des fonctionnaires de catégorie A sont trop fréquents.
* 8 Le livre foncier constitue également une particularité du droit local. Il correspond à la conservation des hypothèques.