b) La constitution afghane du 4 janvier 2004

Après la réunion de la Loya Jirga constitutionnelle, une nouvelle constitution afghane a été adoptée le 4 janvier 2004. Elle établit un régime présidentiel avec un contrôle parlementaire fort.

La structure des pouvoirs place le président sous forte dépendance parlementaire

Elu pour 5 ans au suffrage universel direct, et secondé de deux vice-présidents, le président est investi des pouvoirs traditionnellement dévolus à cette fonction : veiller au respect de la Constitution, présider le Conseil des ministres ; commandant en chef des armées, il est responsable de la sécurité et de l'intégrité du territoire ; il peut convoquer une Loya Jirga et provoquer un référendum sur des sujets majeurs.

Surtout, ses pouvoirs spécifiquement politiques seront strictement encadrés par l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le Parlement afghan, composé de deux Chambres. Ainsi, pour déterminer les orientations politiques nationales fondamentales du pays, le Président devra recevoir l'aval de l'Assemblée. De même pour ses pouvoirs de nomination du directeur général de la police, du gouverneur de la Banque centrale, du chef de la sécurité nationale, du président et des membres de la Cour suprême, où ses propositions doivent être acceptées par la chambre du peuple (wolesi jirga). Le Président devra donc négocier lui-même -en l'absence de fonction de Premier ministre- la totalité de ses projets, et chaque nomination au cas par cas avec une assemblée (wolesi jirga) qu'il n'a par ailleurs pas le pouvoir de dissoudre.

La nomination des ministres -par le Président- doit également être approuvée par la wolesi jirga. Les ministres sont responsables devant elle, qui peut voter une motion de censure à leur encontre, à titre individuel, après une interpellation.

LE PARLEMENT AFGHAN
est composé de deux Chambres :

- La Chambre du peuple (Wolesi Jirga) comptera 249 sièges dont 68 réservés à des femmes. Les députés seront élus pour 5 ans au suffrage universel direct. La loi prévoit que le système électoral retenu sera celui du vote unique non transférable.

- Le Sénat, Chambre des anciens, (Meshrano Jirga) comptera 102 sièges. Un tiers d'entre eux, dont 50 % de femmes, étant désigné pour 5 ans par le Président de la République, un tiers pour 4 ans par -et parmi- les assemblées régionales à raison d'un par région, un tiers, pour 3 ans, par les assemblées de districts (cette dernière désignation sera -pour des raisons pratiques- différée de plusieurs mois du fait du report des élections des assemblées de district elles-mêmes). Le Sénat ne siègera donc pendant un temps qu'avec la moitié de ses membres, et non les 2 /3, à la suite d'une décision de la Cour suprême afghane soucieuse d'atténuer l'influence du Président sur cette assemblée.

Pour l'élection à la Wolesi Jirga, (comme d'ailleurs aux assemblées provinciales) le système de vote unique non transférable a l'avantage de la simplicité puisque chaque électeur vote pour un candidat qui se présente à titre individuel. Dans le cas de circonscriptions où plusieurs sièges sont à pourvoir cependant, le système présente une difficulté : si un nombre important d'électeurs portent leurs voix sur un candidat donné, il sera élu mais, in fine, de nombreux votes auront été gaspillés alors que des électeurs moins nombreux pourront s'arranger pour faire élire plusieurs candidats. Ce système suppose donc une organisation partisane sophistiquée permettant à chaque parti d'apprécier, dans chaque circonscription, ses chances potentielles, d'y présenter en conséquence un nombre adapté de candidats et de faire passer ses consignes à ses électeurs.

En l'absence d'une telle culture partisane, ce qui est le cas en Afghanistan, le vote relève plus de la « loterie » que de la stratégie. Il favorisera en revanche davantage les consignes de votes suggérées par les chefs de clans, de groupes tribaux ou, in fine, un choix communautaire, ce qui ne constituera pas, pour cette première législature, un signal positif pour l'ancrage démocratique.

Le cadre institutionnel va permettre aux Afghans de participer à des élections régulières, nationales et locales. Cet élément, en réalité quasiment inédit dans le pays, constitue à lui seul une rupture majeure. La participation des Afghans aux élections présidentielles, l'assistance populaire aux réunions d'information préparatoires aux élections législatives et locales démontrent que les Afghans ont approuvé la nouvelle règle du jeu politique désormais établie, qui leur permettra de mieux décider de leur destin.

Pour autant, des éléments historiques et culturels peuvent contribuer à freiner ce processus ou à le détourner.

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