IV- LA GESTION DES MARCHÉS
Les achats de fournitures et services extérieurs représentent un poste non négligeable des charges d'exploitation de l'ANVAR : 18 M€ en 2004, soit le même ordre de grandeur que la masse salariale.
Dans la période 2004-2005, l'ANVAR a passé plusieurs marchés de grande ampleur, comme indiqué dans le tableau suivant.
Principaux marchés passés par l'EPIC ANVAR - 2004 et 2005
Objet |
Procédure |
Montant |
Prestataire retenu |
6 e concours national de création d'entreprises |
Marché négocié, publication novembre 2003 ( 20/1/2004 ) |
600 000 € |
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Réseau national d'interconnexion MPLS (transfert données informatiques) |
Marché négocié, publication janvier 2004 ( 1/4/2004 ) |
130 000 € / an |
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Intégration dans Iris des aides Industrie (« tierce maintenance applicative ») |
Avenant ( 1/4/04 28/5/04 ) |
n. c. |
Capgémini |
Conférences à Bercy (présidence française d'Eurêka) |
Appel d'offres restreint, publication mars 2003 ( 30/4/04 28/5/04 ) |
n. c. |
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Accompagnement du déménagement (déménagement conseil mobilier accompagnement) |
Contact avec prestataire BDPME (conseil) Mise en concurrence simplifiée (déménag.) ( 6/10/2004 20/5/05 ) |
88 000 € (conseil) 180 000 € (déménag.) |
Adyal Euroflash + Conceptor |
Mobilier de bureau |
Marché négocié, publication février 2005 ( 28/1/05 4/3/05 ) |
500 000 € |
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Audit comptable |
Mise en concurrence restreinte sans publication, par voie électronique + choix partagé par ANVAR BDPME Minéfi + commande sans mise en concurrence (audit informatique 36 000 €) + commande sans mise en concurrence (50 000 € calcul provisions) ( 6/10/04 2/12/04 28/1/05 ) |
n. c. |
PWC |
Maintenance du parc matériel et logiciel |
Reconduction mensuelle d'accord triennal ( 2/12/2004 ) |
n. c. |
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Maintenance Iris |
Négociation avec prestataire précédent ( 2/12/04 ) |
n. c. |
Capgémini |
7 e concours national création d'entreprises |
Marché négocié, publication novembre 2004 ( 28/1/05 ) |
600 000 € |
Ernst & Young (Expertises de projets) |
Renouvellement parc informatique |
Publication décembre 2004 puis abandon et choix du fournisseur unique BDPME ( 28/1/05 4/3/05 5/4/05 ) |
900 000 € |
A - L'ABSENCE DE RÈGLES CLAIRES
La réglementation des marchés publics ne s'imposait pas à l'ANVAR, qui était un EPIC. Toutefois, le conseil d'administration avait décidé que les règles suivies par l'ANVAR devraient s' inspirer de cette réglementation.
Les procédures de marchés examinées par la Cour s'apparentent la plupart du temps à la procédure du marché négocié, que le Code des marchés publics soumet à des règles strictes :
avec publicité et mise en concurrence : précédent appel d'offres infructueux, impossibilité de décrire suffisamment précisément les spécifications, travaux de recherche ou d'expérimentation sans finalité commerciale, impossibilité de fixer le prix au préalable, marchés de travaux de faible montant (< 5,27 M€) ;
avec mise en concurrence seule : urgence impérieuse, ou fournitures pour des travaux de recherche ;
sans mise en concurrence : marchés complémentaires ou similaires à une prestation précédente, limités en montant.
Or, dans les conditions n'étaient pas remplies pour les marchés négociés avec publication (1 ère catégorie précitée) passés par l'ANVAR en 2004 et 2005. La nature des prestations demandées ne montrait pas de difficulté particulière pour donner les spécifications objectives du marché ; aucun appel d'offres n'avait été réalisé au préalable (exemple, renouvellement du parc informatique). Les critères du code ne sont donc pas observés.
Dans le cas du marché de l'intégration dans le logiciel Iris des aides Industrie, des travaux complémentaires ont été demandés au prestataire antérieurement retenu mais pour un montant dépassant les seuils définissant habituellement les travaux complémentaires (50 %) seuils qui permettent un marché négocié sans mise en concurrence.
L'absence de publication, que le code accepte pour des achats d'urgence, a été utilisée pour des chantiers qui ne résultaient pas d'évènements inopinés qui n'étaient guère du niveau des catastrophes technologiques ou naturelles mentionnées dans le code.
Le contrôleur d'État présent à la commission de mise en concurrence, qui exerce un rôle consultatif, a attiré l'attention en avril 2004 sur le manque de clarté des règles appliquées par l'ANVAR. Il a conclu qu'on ne pouvait pas dire que les décisions de l'ANVAR s'inspiraient du code des marchés publics, contrairement à ce qui avait été demandé par le conseil d'administration. Admettant la légitimité des dérogations à ces principes, « compte tenu des contraintes de fonctionnement et de calendrier que l'État fait peser sur l'ANVAR » , il a toutefois estimé que leur multiplication aboutissait à l'absence de règles claires et lisibles, et présentait des risques. Le contrôleur a suggéré de faire formuler à la direction juridique des règles de bonne pratique, simples et peu nombreuses, puis de les appliquer et d'y déroger exceptionnellement selon une procédure connue. En mai 2004, cette recommandation a suscité le consensus de la commission de mise en concurrence mais est restée lettre morte.
L'EPIC ANVAR n'a pas appliqué de règles claires, dans la période sous revue, pour ses achats, et ne s'est pas inspirée du code des marchés publics alors qu'elle en avait reçu la mission par son conseil d'administration. Il est difficile de prouver que cette absence de règles ait entraîné un excès de dépenses pour l'établissement (excepté le renouvellement du mobilier, voir infra), qui serait de toute façon d'un ordre de grandeur inférieur aux incertitudes pesant sur la comptabilité.
B - L'INFLUENCE DES DÉCISIONS DE LA BDPME SUR L'ANVAR EN MATIÈRE D'ACHATS
Le rapprochement avec la BDPME a eu pour conséquence que, depuis 2004, les règles des décisions d'achats de l'ANVAR se sont adaptées au nouveau contexte.
A plusieurs reprises, les prestataires retenus par la BDPME (conseil immobilier, déménagement, informatique) ont été retenus par l'ANVAR, indépendamment de l'évaluation objective par cette dernière de la qualité du prestataire par rapport aux autres candidats potentiels.
Dans le cas du renouvellement du parc informatique, la procédure de type « marchés » s'est interrompue pour retenir uniquement le prestataire traditionnel de la BDPME. En ce qui concerne le déménagement et le renouvellement du mobilier, le choix final retenant à chaque fois deux prestataires, l'un familier de l'ANVAR, l'autre de la BDPME, a également résulté d'un compromis de principe plus que d'une analyse objective des offres en présence.
Enfin, le lancement du groupe OSEO, en janvier 2005, a donné lieu à une convention passée par la BDPME mais mise à la charge pour partie de l'ANVAR . La procédure de mise en concurrence a été totalement gérée par OSEO BDPME : rédaction et envoi d'un cahier des charges, brief aux trois agences présélectionnées (Publicis Events, Ogilvy Canaveral et Auditoire), audition des agences, choix du prestataire. La convention a consisté en la présentation animée du rapprochement, des nouveaux logos et du nom de la structure, un dîner spectacle et une soirée. La quote-part de l'ANVAR a finalement été de 197 000 €, sur la base du prorata du nombre d'agents de l'ANVAR présents le 17 janvier (la BDPME comptait environ 1 400 salariés et l'ANVAR 500, soit un ratio d'environ 26 % pour l'ANVAR). Or les structures de l'ANVAR n'ont pas pris part à la décision d'achat 20 ( * ) . Le comptable public de l'ANVAR a refusé de payer cette facture en se fondant sur sa responsabilité de comptable public et sur l'absence des pièces nécessaires de la part de l'ordonnateur. La facture est restée en attente jusqu'à la fin du statut d'EPIC de l'ANVAR, mais la S . A ANVAR a ensuite payé ladite facture.
Le rapprochement BDPME ANVAR a introduit de nouvelles pratiques dans les achats de l'ANVAR, en fin de période, en tendant à uniformiser les fournisseurs et prestataires retenus par les deux futures filiales d'OSEO. Cette pratique a préfiguré, en un sens, la création effective du groupe OSEO, et la possibilité de mutualisation de fonctions que cette création offre. Mais elle a aussi accentué la tendance, déjà présente de l'ANVAR, à s'affranchir de règles simples. Elle a conduit l'ANVAR à assumer des décisions d'achat prises en dehors d'elle, achats pourtant payés sur ses propres crédits.
L'EPIC ANVAR a passé plusieurs marchés d'ampleur significative (concours national de création d'entreprises, renouvellement du parc informatique et du mobilier, déménagement). Il est apparu, en particulier au contrôle général économique et financier, que les décisions prises par l'agence ne suivaient pas des règles claires et lisibles, et a fortiori ne s'inspiraient pas du code des marchés publics, contrairement à ce que le conseil d'administration de l'agence avait décidé. Aucune formalisation de règles propres n'a suivi cette prise de conscience. Cette tendance à ne pas suivre une politique d'achats cohérente s'est maintenue lors du rapprochement entre ANVAR et BDPME. En dépit de l'absence de cadre juridique adéquat - le groupe OSEO n'étant pas encore constitué - l'ANVAR s'est parfois laissé imposer ses prestataires par la BDPME. Une attention soutenue devra à l'avenir être portée au cadrage et à la régularité des procédures d'achat du groupe OSEO. |
* 20 Il appartiendrait à un contrôle éventuel de la BDPME pour l'exercice 2005 de déterminer si cet achat a répondu aux procédures usuelles de la banque, ce qui ne peut rentrer dans le présent contrôle.