b) Les propositions d'harmonisation européenne : les principes du droit européen des contrats
Des projets d'harmonisation au niveau européen du droit des prescriptions sont en cours. Cette volonté est avant tout le fait d'institutions privées , composées majoritairement d'universitaires, et n'a donné lieu à l'édiction d'aucun instrument juridiquement contraignant. Au contraire, ces règles se veulent une source d'inspiration tant pour les législateurs nationaux que pour les négociateurs d'instruments juridiques internationaux. Ils sont le fait de deux instances de travail : la Commission pour le droit européen des contrats et le Groupe de travail sur le code civil européen.
A ce stade, les institutions de l'Union européenne, si elles ont marqué un intérêt réel pour le développement d'un droit européen uniforme en matière contractuelle, n'ont pas adopté de règles spécifiques, si l'on excepte l'hypothèse très circonscrite de la responsabilité du fait des produits défectueux, définie par la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985. La Commission européenne a cependant fait connaître en 2004 qu'elle envisageait d'adopter en 2009 un « cadre commun de référence » qui, parmi d'autres problématiques relatives au contrat, consacrerait des dispositions relatives à la prescription 155 ( * ) .
Le seul projet actuellement abouti est celui de la Commission pour le droit européen des contrats, instituée dès 1980 à l'initiative du professeur Ole Lando, qui a défini des Principes du droit européen des contrats . Ce document comporte, depuis 2003, plusieurs dispositions relatives au régime de la prescription applicable au contrat.
Les Principes du droit européen des contrats retiennent un délai de prescription de droit commun de trois ans , porté à dix ans en cas de créance constatée par un jugement ou une sentence arbitrale.
Le point de départ de la prescription varie selon la nature de la créance. Il est fixé, en principe, au jour où le débiteur « doit exécuter [son obligation] ou, s'agissant d'une créance de dommages et intérêts, de la date du fait générateur de la créance . »
Les Principes prévoient plusieurs causes de suspension du cours de la prescription, notamment l'ignorance par le créancier de l'identité du débiteur ou du fait générateur de sa créance, l'existence d'une procédure judiciaire ou extrajudiciaire ainsi que l'empêchement du créancier.
Ils envisagent par ailleurs des cas de prorogation du délai de prescription. Ainsi en est-il, en particulier, lorsque les parties sont en négociation à propos de la créance concernée, le délai de prescription ne pouvant alors expirer avant l'écoulement d'une année après la dernière communication faite dans le cadre de cette négociation.
En tout état de cause, un butoir est prévu : les éventuelles suspensions ou prorogations ne peuvent conduire à ce que le délai de prescription dépasse dix ans . Ce délai butoir est fixé à trente ans en cas de réparations relatives à des dommages corporels. Il n'est pas applicable lorsque la suspension est liée à une procédure judiciaire ou extrajudiciaire.
Les Principes prévoient des cas de « recommencement » de la prescription en cas de reconnaissance de dette par le débiteur ou de tentative par celui-ci de s'acquitter de son obligation. Le nouveau délai applicable est alors le délai de prescription de droit commun.
Les règles de prescription peuvent être aménagées par les parties sans que le délai de prescription puisse être réduit à moins d'un an ou étendu à plus de trente ans.
* 155 Communication de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil du 11 octobre 2004, « Droit européen des contrats et révision de l'acquis : la voie à suivre », COM (2004) 651 final.