V. LA BIODIVERSITÉ UNIQUE DES ÎLES ÉPARSES
A. SITUATION DES DIFFÉRENTES ÎLES
Les îles Éparses sont considérées comme des sanctuaires de la biodiversité tropicale de l'océan Indien. Grâce à leur isolement géographique, leur caractère insulaire et une occupation humaine très limitée, ces îles coralliennes aux écosystèmes naturels majeurs (mangroves, récifs coralliens, herbiers marins) sont de véritables sites de référence en la matière au niveau mondial. Dans le cadre de notre déplacement, nous avons pu découvrir Europa, Juan de Nova et l'île de Grande Glorieuse. Nous avons survolé Bassas da India, mais ne sommes pas allés à Tromelin où seul l'accès par bateau est possible, l'importante population d'oiseaux rendant l'atterrissage d'un avion dangereux. Celle-ci possède en outre une flore pauvre mais reste un site de ponte prisé des tortues marines.
Europa est la plus méridionale des îles Éparses, mais aussi la plus préservée. Ses écosystèmes terrestres et marins, notamment sa mangrove lagunaire et sa steppe salée, au centre, sont dans un état de conservation quasi originel. Au nord de l'île, s'étend une forêt sèche à euphorbes arborescentes Euphorbia stenoclada, et au sud une plaine herbacée. On y trouve également des câpriers, espèce indigène qui doit lutter contre les espèces exotiques végétales telles que le sisal, le filaos ou le choca, mais aussi animales comme la chèvre, introduite par l'homme, qui en fait sa nourriture privilégiée.
Europa héberge huit espèces d'oiseaux marins et cinq espèces terrestres nicheuses dont des frégates ariel et du Pacifique, des pailles en queue à brins rouges et à brins blancs, des fous à pied rouge, des sternes fuligineuses, des zosterops. Elle est également un lieu de migration de flamants roses.
Mais on y trouve aussi au moins trois espèces de lézards dont le scinque aux labiales tachetées (sous-espèce endémique rare), une araignée, la nephile malgache, ainsi que des Bernard-l'hermite en grande quantité le long des plages.
La barrière de corail y est détruite à 80 %, la température de l'eau étant devenue très élevée dans cette partie de l'océan.
L'île d'Europa constitue le site de ponte des tortues le plus important de l'océan Indien (8 000 à 15 000 tortues vertes y viennent chaque année). Nous avons eu l'immense chance de pouvoir observer une ponte sur la plage la nuit venue.
On peut également découvrir dans ses eaux des dauphins, baleines et de nombreuses espèces de requins ou de raies.
Dès le coucher du soleil, il est absolument nécessaire de se protéger contre les milliers de moustiques alors présents. Par ailleurs, des rats sont présents en nombre sur l'île, ce qui n'est pas sans poser problème et nécessite des opérations de dératisation par l'équipe des TAAF. Face à la nécessité de protéger les espèces végétales et animales indigènes contre l'envahissement des espèces exotiques citées précédemment, un premier plan de gestion de la biodiversité a été mis en place par l'administration des TAAF pour 2017-2021, après le classement en site Ramsar en octobre 2011. Des essais de culture pour la multiplication des espèces indigènes sont également réalisés.
Bassas da India, que nous avons seulement survolée - étant un récif corallien dont les terres ne se découvrent qu'à marée basse, elle est inhabitable et n'a aucune piste d'atterrissage -, héberge 340 espèces marines. C'est une zone très sensible et vulnérable, où une forte vigilance est exercée contre les activités illicites de pêche, nautiques, de plongée ou de chasse aux requins.
L'île de Juan de Nova comporte également des arbres importés : cocotiers et filaos. La flore y est d'une très grande diversité, la plus grande sur ces îles. On y trouve notamment une espèce endémique de Juan de Nova et six espèces endémiques de Madagascar. Quant aux oiseaux, on y observe deux espèces marines, dont la plus grande colonie de sternes fuligineuses de l'océan Indien et la sterne huppée, ainsi que dix espèces terrestres indigènes et le héron cendré.
On y déplore là aussi des espèces animales importées : rat noir, souris grise, chat haret. Le corail y est moins détruit qu'à Europa car cette île étant située plus au nord dans le canal du Mozambique, la température de l'océan est moins chaude. 850 espèces marines y ont été recensées dont 12 espèces de requins et 5 de raies. Si elle est moins fréquentée par les tortues marines, elle reste un site de reproduction pour la tortue imbriquée, en voie de disparition.
Concernant l'archipel des Glorieuses et plus particulièrement Grande Glorieuse, nous avons pu y découvrir une flore très riche aux nombreuses espèces dont 72 indigènes, ceci grâce au climat plus clément et arrosé. Mais elle est également menacée par des espèces exotiques comme les cocotiers implantés à partir de 1885 pour l'exploitation de coprah et les filaos.
On y trouve 9 espèces d'oiseaux terrestres (frégates, sternes...), des crabes, des cocotiers, et des rats comme sur Europa. Cette île est un site de ponte des tortues vertes.