DEUXIÈME PARTIE - LA MILITARISATION DES RELATIONS INTERNATIONALES EN MÉDITERRANÉE
I. LE RISQUE DE RECUL DE L'INFLUENCE OCCIDENTALE
A. LES PAYS MÉDITERRANÉENS DE L'UNION EUROPÉENNE CONVERGENT POUR ÉTABLIR UNE NOUVELLE STRATÉGIE COMMUNE EN MÉDITERRANÉE EN RÉPONSE À L'ÉCHEC DE L'OBJECTIF D'INTÉGRATION ÉCONOMIQUE DU PROCESSUS DE BARCELONE
1. La portée limitée des initiatives européennes successives pour stabiliser la région et engager une intégration économique entre les deux rives de la Méditerranée a porté atteinte à la crédibilité de l'Union européenne dans cette zone
La volonté des pays européens de se doter d'une stratégie commune pour structurer leurs relations avec les pays méditerranéens n'est pas nouvelle et l'année 2022 marque le cinquantenaire de la première politique à vocation économique adoptée par la Communauté économique européenne (CEE) vis-à-vis du bassin méditerranéen, la politique méditerranéenne globale (PMG) 109 ( * ) . Alors que la guerre froide a fait obstacle au développement des échanges à l'échelle régionale, le début des années 1990 est marqué par plusieurs initiatives européennes de coopération à l'image de la Conférence pour la sécurité et la coopération en Méditerranée (CSCM) lancée par l'Espagne et l'Italie et inspirée de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) ; ou du Forum méditerranéen de Tanger, soutenu par la France. Ces initiatives de portée limitée aboutissent avec le lancement à la fin de l'année 1995 du « processus de Barcelone ».
La conférence de Barcelone des 27 et 28 novembre 1995, qui réunit les États membres de l'Union européenne ainsi que douze pays tiers méditerranéens 110 ( * ) , donne naissance au Partenariat euro-méditerranéen (PEM) qui constitue le cadre global de coopération de l'Union dans le bassin méditerranéen se fixant pour objectif ambitieux la constitution d'un espace de paix, de stabilité et de prospérité pour les États de la région. Le partenariat est construit sur trois volets qui visent à favoriser une dynamique d'intégration régionale entre les économies et les sociétés civiles de part et d'autre de la Méditerranée : en premier lieu un partenariat politique et de sécurité pour assurer la paix et la stabilité de la région, fondées notamment sur le respect de la Charte des Nations unies, sur l'adhésion aux accords de désarmement et sur la lutte contre le terrorisme, en second lieu un partenariat économique et financier ayant pour objectif l'instauration à terme d'une zone de libre-échange (ZLE) pour les produits manufacturés, enfin en troisième lieu un partenariat social, culturel et humain fondé sur les échanges culturels et l'association de la société civile au Partenariat euro-méditerranéen (PEM).
Malgré les importantes ambitions affichées au moment de sa création, la portée du Partenariat euro-méditerranéen (PEM) a été limitée d'une part du fait de la difficulté à trouver un consensus entre les pays associés au processus, comme en témoigne l'impossibilité d'adopter la « Charte pour la paix et la stabilité » malgré la relance par la France de ce projet en 1999, et d'autre part du fait de la mise en place par l'Union européenne à partir de 2003 de la politique européenne de voisinage (PEV) qui fixe un cadre politico-juridique unifié pour l'accès à l'aide européenne pour l'ensemble des pays de la périphérie de l'Union, ce qui limite la spécificité du partenariat avec les pays de la rive sud de la Méditerranée.
En réponse à ces critiques et dans l'objectif de redynamiser la coopération euro-méditerranéenne, la France a organisé le 15 juillet 2008, dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union, la conférence de lancement de l'Union pour la Méditerranée (UpM), dont l'objectif est de renforcer le volet politique de l'action des pays européens en Méditerranée en s'appuyant sur six projets concrets 111 ( * ) . Cependant, face aux nouveaux blocages provoqués par les divergences politiques entre les pays du sud de la Méditerranée et du fait de ses moyens financiers limités, l'Union pour la Méditerranée (UpM) n'a pas permis de relancer efficacement le processus d'intégration du bassin méditerranéen soutenu par l'Union européenne depuis le milieu des années 1990 112 ( * ) .
Plus de vingt-cinq ans après le lancement du processus de Barcelone, les rapporteures relèvent que les objectifs ambitieux fixés par les pays européens n'ont pas été atteints. La coopération entre les deux rives a échoué à « faire de la Méditerranée un espace commun de paix, de stabilité et de prospérité, grâce au renforcement du dialogue politique et de sécurité, de la coopération économique, financière, sociale et culturelle » 113 ( * ) , selon les termes de la déclaration finale de la conférence de Barcelone de novembre 1995.
Or, comme l'ont souligné plusieurs des personnalités auditionnées, la crise économique et financière de 2008 puis la crise sanitaire de 2020 ont nourri un sentiment d'éloignement entre les pays méditerranéens et il existe aujourd'hui un risque réel de divergence entre les trajectoires économiques, politiques et sociales des pays de la rive nord et de la rive sud 114 ( * ) . Pour répondre à ce risque, les pays de l'Union européenne peuvent s'appuyer sur l'importance de ses liens économiques avec les pays de la rive sud de la Méditerranée. Alors que dans le cadre du Partenariat euro-méditerranéen (PEM), le programme MEDA a permis le versement d'une aide totale de 10 Md€ entre 1995 et 2006 à destination des pays de la rive sud, l'Union européenne demeure un partenaire économique de référence pour les pays du bassin méditerranéen, notamment au Maghreb où l'Union européenne représente 64% des exportations du Maroc, 45% des exportations de l'Algérie et 71% des exportations de la Tunisie. Par suite, les rapporteures relèvent l'importance cruciale pour l'Union européenne de maintenir sa présence au sud du bassin méditerranéen et à lutter contre les récits diffusés par certaines puissances étrangères qui remettent en cause le caractère mutuellement bénéfique de la coopération euro-méditerranéenne.
Il est en outre à relever que l'inertie relative des initiatives européennes de coopération dans le bassin méditerranéen est notamment liée au fait que les approches globales adoptées par l'Union ont souvent été paralysées par le maintien de dissensions importantes entre les pays riverains de la Méditerranée au sujet de différends d'importance régionale ou globale comme le conflit au Sahara occidental, la question chypriote ou encore le conflit israélo-palestinien. L'efficacité opérationnelle des instruments issus du processus de Barcelone a également été affectée par les conséquences des printemps arabes qui ont mis fin à partir de 2011 au régime de « stabilité autoritaire », selon l'expression de l'ancien ministre des affaires étrangères Hubert Védrine, qui prévalait dans plusieurs pays du sud du bassin méditerranéen 115 ( * ) .
Enfin, parallèlement au processus de Barcelone, plusieurs pays ont lancé en octobre 1990 le groupe « 5+5 » qui réunit des États du sud de l'Europe (Portugal, Espagne, France, Italie, Malte) et du nord de l'Afrique (Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye). Relancé en janvier 2001 à Lisbonne après dix ans de gel, le groupe « 5+5 » est une initiative informelle qui permet d'organiser des réunions au niveau ministériel sans s'appuyer sur un secrétariat permanent. Créé à l'origine dans le domaine des affaires étrangères et dédié essentiellement à des questions de sécurité, le groupe « 5+5 » a créé en 2004 une initiative « 5+5 Défense » et se décline désormais en douze secteurs ministériels 116 ( * ) et permet de nourrir un dialogue utile entre les deux rives de la Méditerranée occidentale 117 ( * ) . Le format du groupe « 5+5 » est à ce titre celui qui a été choisi par la France pour organiser le « Sommet des deux rives » qui s'est tenu à Marseille les 23 et 24 juin 2019 sur le fondement des travaux préparatoires effectués par cent personnalités de la société civile désignées par chacun des États du groupe.
2. La France converge avec ses partenaires méditerranéens de l'Union européenne pour établir une nouvelle stratégie commune en Méditerranée
a) L'Espagne est un allié solide de la France en Méditerranée occidentale
La sortie de son isolement politique à la fin des années 1970, consacrée par l'adhésion à l'Alliance atlantique en 1982 puis à la Communauté économique européenne (CEE) en 1986, a rétabli l'Espagne au rang de puissance régionale qui compte parmi ces sphères privilégiées d'influence, au même titre que l'Amérique latine, la Méditerranée occidentale.
L'Espagne, qui accueille d'importantes communautés originaires d'Afrique du Nord, entretient des relations diplomatiques étroites avec les pays du Maghreb avec lesquels elle a signé une série de traités bilatéraux de coopération : traité avec le Maroc en 1991, avec la Tunisie en 1995 puis avec l'Algérie en 2002. Ces relations diplomatiques se traduisent par des liens économiques forts notamment en matière énergétique qui s'appuient sur d'importantes infrastructures transfrontalières à l'image du gazoduc entre l'Espagne et l'Algérie inauguré en 1996 ou de l'interconnexion entre les réseaux électriques espagnols et marocains au niveau du détroit de Gibraltar 118 ( * ) . Ces liens, au même titre que l'attachement traditionnel de l'Espagne au multilatéralisme, justifient le rôle moteur joué par l'Espagne dans la coopération euro-méditerranéenne illustrée notamment par la promotion faite en 2004 par l'ancien président du gouvernement José Luis Rodriguez Zapatero d'une « alliance des civilisations » 119 ( * ) .
Il est toutefois à relever que les relations des autorités espagnoles entretiennent avec les pays du Maghreb une relation complexe susceptible d'être perturbée par les positions prises par l'Espagne sur certains dossiers de politique internationale dont notamment la question du Sahara occidental. Cette instabilité a été illustrée dans la période récente par la décision annoncée le 8 juin 2022 par les autorités algériennes de suspendre le traité de coopération bilatérale de 2002 en réaction au rapprochement de l'Espagne avec la position du Maroc sur la question du Sahara occidental. Cette décision, assortie de restrictions sur les transactions commerciales qui auront un effet limité sur les livraisons de gaz du fait de l'existence de contrat à long terme dans ce secteur, illustre la marge de manoeuvre réduite de l'Espagne pour maintenir simultanément de bonnes relations avec l'ensemble de ses partenaires nord-africains.
L'Espagne constitue par ailleurs un partenaire solide pour la France dans la région de la Méditerranée occidentale où les deux pays collaborent notamment dans le cadre des différentes formations sectorielles du groupe « 5+5 ». La présence de l'Espagne dans plusieurs projets capacitaires européens auxquels participe la France, dont en particulier le projet d'Eurodone MALE et le projet de système de combat aérien du futur (SCAF), participe au renforcement de la coopération opérationnelle entre les forces armées des deux pays.
Néanmoins, en dépit des nombreuses convergences entre la France et l'Espagne en Méditerranée, il est à relever que l'influence de l'Espagne dans la zone est actuellement oblitérée par un important déficit d'investissement capacitaire dans les forces armées espagnoles. En effet, la crise économique et financière de 2008 s'est traduite par un affaiblissement durable de l'Espagne sur le plan financier qui a eu pour conséquence une importante réduction du budget de défense qui est passé de 15 Md€ en 2008 à 13 Md€ en 2016. Près de quinze ans après la crise financière, le déficit d'investissement continue de peser sur le maintien en condition opérationnelle des équipements de l'armée espagnole et alors que les dépenses militaires ne représenteront en 2022 que 1% du PIB espagnol, le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez a fixé en juin 2022 comme objectif d'atteindre en 2029 seulement le seuil de 2% du PIB qui s'applique à l'ensemble des membres de l'OTAN.
b) Le renforcement récent des relations bilatérales entre la France et l'Italie constitue un levier de consolidation de leur stratégie commune en Méditerranée centrale
La « Méditerranée élargie » 120 ( * ) constitue, avec l'Europe et l'Alliance atlantique, l'un des trois axes principaux de la politique extérieure traditionnelle de l'Italie. Sur le plan économique et commercial, l'Italie a développé des liens essentiels avec les pays de la rive sud notamment à travers les activités de la société énergétique « ENI » qui reste contrôlée par l'État italien et qui opère au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Libye et en Égypte, l'ensemble de ces pays étant des fournisseurs énergétiques, en gaz ou en pétrole, de l'Italie 121 ( * ) . Au-delà de ces intérêts économiques, le passé colonial de l'Italie en Libye explique la sensibilité particulière des autorités italiennes sur le règlement du conflit libyen et la stabilisation de ce territoire, tandis que la Tunisie et l'Égypte constituent deux autres partenaires privilégiés des autorités italiennes en Méditerranée centrale.
Parallèlement à la défense de ses intérêts économiques et commerciaux, l'Italie perçoit également la Méditerranée comme une zone essentielle pour la défense de ses intérêts stratégiques. L'afflux de réfugiés vers l'île de Lampedusa depuis 2015 a fait de la question migratoire l'un des sujets centraux de la vie politique italienne comme en témoigne la campagne électorale pour les élections législatives qui se sont déroulées en septembre 2022.
En matière de défense, la flotte italienne continue de constituer, après la Marine nationale française, la deuxième flotte européenne en Méditerranée. L'Italie continue de s'appuyer par ailleurs sur une alliance solide avec les États-Unis et elle accueille sur son territoire l'état-major de la VI e flotte de l' US Navy à Gaete ainsi que 15 000 militaires américains. Il est cependant à relever que sur le plan budgétaire, l'Italie reste en deçà des exigences de l'Alliance atlantique avec des dépenses militaires estimées à 1,5% de son PIB soit 30 Md€ en 2022 et qui ne devrait atteindre le seuil de 2% du PIB qu'en 2028 selon la trajectoire adoptée par la majorité parlementaire en mars 2022. Ce déficit d'investissement intervient en outre dans un contexte dans lequel les forces italiennes sont mobilisées de manière croissante pour des missions de sécurité civile, ce qui s'est traduit par une importante réduction des effectifs de militaires italiens projetés en opération extérieure qui est passé de 12 000 au début des années 2000 à 5 500 en 2022.
L'Italie est un partenaire essentiel de politique étrangère pour la France, notamment en Méditerranée. La relance des relations bilatérales franco-italiennes, engagée par l'organisation du 35 e sommet bilatéral à Naples le 27 février 2020 et consacrée par la signature le 26 novembre 2021 du traité du Quirinal, constitue une opportunité de renforcer la convergence entre les deux pays pour établir une stratégie commune en Méditerranée. Sur le plan militaire, le traité du Quirinal prévoit notamment la relance du Conseil franco-italien de défense et de sécurité (2+2) qui associe les ministres de la défense et des affaires étrangères des deux pays. Sur le plan diplomatique, l'article 1 du traité consacre expressément la convergence franco-italienne dans la zone méditerranéenne en ces termes « reconnaissant que la Méditerranée est leur creuset commun, les Parties développent des synergies et renforcent leur coordination sur les questions relatives à la sécurité, au développement socio-économique, à l'intégration, à la paix et la protection des droits de l'Homme dans la région, et à la lutte contre l'exploitation de la migration irrégulière. Elles promeuvent une utilisation juste et durable des ressources énergétiques. Elles s'engagent également à favoriser une approche européenne commune dans les politiques de voisinage au Sud et à l'Est de l'Union européenne. » 122 ( * )
c) La France constitue le premier allié de la Grèce et de Chypre face aux risques de tension en Méditerranée orientale
L'absence de traité international de délimitation des territoires maritimes en mer Égée, conjuguée au fait que la Turquie n'a pas signé le traité de Montego Bay, place la Grèce et Chypre au centre des tensions relatives à la territorialisation de la Méditerranée orientale préalablement décrites.
En dépit du partage territorial partiel résultant notamment des stipulations de plusieurs conventions internationales signées au début du XXe siècle, certaines îles en mer Égée continuent de faire l'objet d'un différend territorial entre la Turquie et la Grèce et la question de l'exploitation des ressources en Méditerranée orientale, qui constitue depuis les années 1970 un sujet de tensions entre les autorités grecques et turques, serait facilitée par l'amélioration des relations bilatérales entre les deux pays. Ainsi dès le printemps 1974, le navire turc de recherche océanographique Candarli a mené une mission de prospection à proximité d'îles grecques en étant escorté de 32 navires de guerres turcs et un nouvel épisode de tension est intervenu en mars 1987 lorsque la Grèce a mis ses forces armées en état d'alerte pour répondre à l'envoi du navire de prospection turc Sismik I au large de ses eaux territoriales 123 ( * ) . C'est dans ce contexte que doit être replacé l'envoi en juillet 2020 par la marine turque de 18 navires de guerre pour escorter un navire de recherche d'hydrocarbure au large de Kastellorizo. En réaction à cette manoeuvre, la France, qui constitue l'un des principaux soutiens à la Grèce au sein de l'Union européenne, a déployé au mois d'août 2020 deux avions de combat, le porte-hélicoptère amphibie Tonnerre et la frégate La Fayette en Méditerranée orientale. Enfin en janvier 2021, le parlement grec a adopté une décision étendant les eaux territoriales grecques à 12 milles en mer Ionienne, à l'ouest du territoire.
La pression exercée par la Turquie sur la Grèce par ses revendications maritimes et par les violations répétées de sa souveraineté aérienne et maritime justifie le dynamisme de la diplomatie grecque qui s'appuie sur plusieurs formats de discussion trilatéraux en présence de Chypre, notamment avec l'Égypte, Israël et les Émirats arabes unis. La Grèce est par ailleurs un des membres fondateurs en 2019 du Forum du gaz en Méditerranée orientale (Égypte, Chypre, Grèce, Italie, Israël, Jordanie, Palestine ; France depuis 2021). En parallèle de cette stratégie d'alliance, la tentative de relance du dialogue entre la Grèce et la Turquie illustrée par la visite à Istanbul le 13 mars 2022 du premier ministre grec a été suspendue par des déclarations publiques hostiles du président R. T. Erdogan au printemps 2022 en réaction à l'allocution prononcée par le premier ministre grec devant le Congrès des États-Unis.
En dépit de la déstabilisation durable de l'économie grecque par la crise économique et financière de 2008 et par la crise de l'euro, la Grèce continue d'investir une part importante de son PIB dans le secteur de la défense avec un niveau d'investissement estimé à 3,8% de son PIB en 2022 soit le niveau le plus élevé de l'Alliance atlantique. Les investissements de la Grèce dans le secteur de la défense ont par ailleurs bénéficié aux grands groupes français du secteur au premier rang desquels d'une part Dassault Aviation qui a vendu à la Grèce en mars 2022 six avions Rafale qui s'ajoutent aux 18 appareils acquis en 2018 et d'autre part Naval Group qui a vendu à la marine grecque en mars 2022 trois frégates de défense et d'intervention (FDI) « Belharra » avec une option d'acquisition pour un quatrième bâtiment.
Source : FMES, 2022, Atlas stratégique de la Méditerranée et du Moyen-Orient, (c) P. Orcier
Ces contrats d'armements consacrent la densification et la consolidation des relations bilatérales franco-grecques dans le cadre de l'accord de partenariat stratégique dans le domaine de la sécurité et de la défense entre la France et la Grèce signé le 28 septembre 2021. Ce partenariat, qui a été décliné par l'adoption d'une feuille de route par les chefs d'état-major des deux armées en décembre 2021 suivie notamment d'un nouveau plan de coopération bilatérale entre les marines grecque et française adopté le 10 février 2022, prévoit notamment la participation régulière à des exercices communs et l'établissement d'échanges réguliers entre les centres opérationnels.
La situation géographique de la République de Chypre, ainsi que la partition du territoire de l'île à la suite de l'intervention militaire turque de 1974, place également ce pays en première ligne face aux revendications turques en mer Égée. Alors que la taille limitée de l'île se traduit par un budget militaire réduit à environ 500 M€ annuels, Chypre s'appuie largement sur ses partenariats internationaux en matière de défense et accueille sur son territoire 3 260 militaires britanniques et 1 150 militaires grecs.
Dans un contexte de relative dégradation des relations stratégiques entre la Turquie et les États-Unis depuis leurs divergences sur le dossier syrien et le rapprochement de la Turquie et la Russie sur le plan capacitaire, la diplomatie américaine a annoncé le 16 septembre 2022 la levée complète de son embargo sur les armes qu'elle appliquait vis-à-vis de la République de Chypre depuis 1987. Cette décision intervient dans le sillage de la signature entre Chypre et les États-Unis en novembre 2019 d'une déclaration d'intention ayant pour objet le renforcement des relations bilatérales en matière de sécurité.
En parallèle, Chypre a signé en avril 2017 avec la France un accord de coopération en matière de défense entré en vigueur en 2020 en application duquel la Marine nationale effectue régulièrement des exercices conjoints avec la marine chypriote. Ce partenariat renforcé a en outre été illustré par l'annonce en juin 2022 de l'acquisition par Chypre auprès d'Airbus de six hélicoptères H145M destinés à la garde nationale chypriote.
* 109 À vocation essentiellement économique, la politique méditerranéenne globale (PMG) a été adoptée par les États membres lors du sommet des chefs d'État et de gouvernement organisé à Paris du 19 au 21 octobre 1972.
* 110 Algérie, Chypre, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Malte, Maroc, Syrie, Tunisie, Turquie et Autorité palestinienne
* 111 Dépollution de la Méditerranée, autoroutes maritimes et terrestres, protection civile en réponse aux catastrophes naturelles, université euro-méditerranéenne, énergie solaire, initiative européenne de développement des affaires
* 112 J.-F. Daguzan, hiver 2016, « Les politiques méditerranéennes de l'Europe : trente ans d'occasions manquées » in Politique étrangère, 2016/4
* 113 Déclaration finale de la Conférence ministérielle euro-méditerranéenne de Barcelone, 27-28 novembre 1995
* 114 J.-F. Daguzan, hiver 2020, « La France et l'UE en Méditerranée : entre esprit de système et réalités » in Politique étrangère, 2020/4
* 115 J.-F. Daguzan, hiver 2018, « Les politiques française et européenne face au défi du changement stratégique » in Les cahiers de l'Orient, n°129
* 116 Affaires étrangères, intérieur, transports, défense, tourisme, éducation, énergie et environnement, recherche et enseignement supérieur, agriculture, eau, finances, culture
* 117 A. Benantar, 2021, Le complexe de sécurité de la Méditerranée occidentale
* 118 B. Pellistrandi, été 2019, « L'Espagne et la Méditerranée : les défis d'une politique étrangère pour une démocratie » in Revue Défense Nationale, n°822
* 119 Selon la formule utilisée à la tribune des Nations unies en septembre 2004 à l'occasion de la 59 e session de l'Assemblée générale
* 120 La notion de « Méditerranée élargie », utilisée par les auteurs italiens, couvre les pays de la rive sud du Maghreb jusqu'à l'Afghanistan en incluant la région des Balkans
* 121 J.-P. Darnis, été 2019, « L'Italie en Méditerranée : projection en défense vis-à-vis de la rive sud » in Revue Défense Nationale, n°822
* 122 Traité entre la République française et la République italienne pour une coopération bilatérale renforcée du 26 novembre 2021, art. 1 § 3
* 123 C. Bricout, M. Laville, 2021, « Les relations gréco-turques en eaux troubles » in Les Cahiers de la Revue Défense Nationale, 2021/HS3