IV. UN SECTEUR D'INVESTISSEMENTS INDUSTRIELS POUR SE PROJETER VERS L'AVENIR, À L'AUBE DE CHOIX IMPORTANTS

L'Europe est actuellement impliquée dans plusieurs projets de vol habité, toujours en coopération internationale, principalement avec les États-Unis. Pour améliorer sa position et ses capacités, elle devra agir dans plusieurs directions : le financement du secteur, les compétences et la stratégie à suivre.

A. QUEL FINANCEMENT ?

En matière de vol spatial habité, les budgets sont essentiellement institutionnels, ce qui illustre bien la dimension politique de ces programmes. Certes, aux États-Unis, les dirigeants ont indiqué vouloir passer la main à des opérateurs commerciaux pour les futures stations spatiales en orbite terrestre basse, mais il est apparu très vite que le client final resterait toujours l'institutionnel public.

Ceci n'empêche pas les partenariats public-privé, ni d'ailleurs l'investissement totalement privé, comme le montre The Exploration Company. S'écartant de l'approche habituelle, cette start-up n'a pas attendu un appel d'offres de l'ESA pour se lancer. Au contraire, elle a réuni des investisseurs privés autour d'un projet de conception de capsules spatiales ; c'est ensuite seulement que l'Agence spatiale européenne s'est positionnée comme client d'ancrage en achetant le premier vol. Pour un euro de contrat avec l'ESA, The Exploration Company affirme obtenir jusqu'à cinq fois plus de la part d'investisseurs privés. L'exploration spatiale peut donc être un « business », selon les mots d'Hélène Huby, comme le montrent les 225 millions d'euros levés auprès d'investisseurs privés par cette société.

Quant au financement institutionnel, le budget de l'ESA pour l'exploration humaine et robotique est désormais du même ordre de grandeur que celui consacré aux programmes de lanceurs et il est plus élevé que celui des programmes de télécommunications. Ce n'était pas le cas il y a quelques années. Pour autant, l'ESA dépense actuellement quinze fois moins que la NASA pour son programme d'exploration, ce qui relativise les ambitions européennes actuelles. Didier Schmitt a expliqué que le coût du programme européen relatif au vol habité représente seulement 1,20 euro par personne et par an, alors que les citoyens européens s'en font une idée beaucoup plus élevée.

La participation financière de la France à ce programme est sensiblement moins élevée que celles de l'Allemagne et de l'Italie. Philippe Lugherini rappelle à ce sujet que la France a historiquement toujours mis la priorité sur les lanceurs en refusant que la participation à des programmes de vol spatial habité pénalise la politique d'accès souverain à l'espace. Dans le même temps, des puissances spatiales que l'on peut qualifier de « moyennes », comme la Pologne, ont des participations importantes et en augmentation nette dans le programme habité de l'ESA, preuve de l'intérêt qu'elles y perçoivent.

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