II. LE CONGO : LE DÉFI DE LA RECONSTRUCTION
L'unité du Congo, compte tenu de la diversité de
la géographie et du peuplement du pays, ne peut procéder que
d'une volonté politique.
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Les contrastes de la géographie
Si le fleuve Congo et son affluent, l'Oubangui, tracent sur la frontière
orientale du Congo un puissant axe nord-sud, le nord du Congo, dominé
à l'est par des terres alluviales couvertes par la forêt dense et
à l'ouest par un relief d'altitude moyenne (le mont Nabemba dans la
région de la Shanga culmine à 1100 mètres) demeure
inhabité et peu actif. La population se concentre en fait, au sud du
pays, entre la plaine côtière, zone sablonneuse riche en
pétrole et gaz naturel et la région du Pool, autour de
Brazzaville. La construction du chemin de fer "Congo-Océan" (CFCO)
achevée en 1934 a favorisé l'essor de cette région.
Brazzaville et Pointe-Noire, la capitale économique du pays, regroupent
la moitié de la population congolaise.
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La diversité ethnique
La population congolaise (plus de 2,5 millions d'habitants) se partage en trois
groupes : les Kongos -48 % de la population-, les Tékés dans
le centre (22 %) et les Mbochis dans le nord (13 %). Les Kongos se
reconnaissent surtout dans l'un des sous-groupes auxquels ils sont
rattachés -les Laris (région du Pool), les Bembés
(Bouenza), les Vilis sur le littoral.
Les rapports de force ont placé successivement ces différentes
ethnies au devant de la scène, sans toutefois que les groupements
partisans s'identifient de façon exclusive aux ethnies. Ainsi, les Vilis
ont été les premiers au contact des Européens. Les Laris
ont dominé les premières années de l'indépendance
marquée par la présidence de l'abbé Fulbert Youlou. Enfin,
les Mbochis, bien qu'isolés au nord du pays, ont joué un
rôle déterminant à partir de la prise du pouvoir par
l'armée.
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L'héritage de l'histoire coloniale
Au moment où le premier Européen, Diego Cao, débarque
à l'embouchure du fleuve Congo en 1482, le territoire actuel du Congo se
partage entre plusieurs royaumes placés dans l'orbite du royaume du
Kongo. Le développement de la traite des esclaves donne bientôt
à ces royaumes vassaux -notamment le Loango situé dans la
région de l'actuelle ville de Pointe-Noire- une influence politique
accrue, avant que l'abolition de la traite n'entraîne un déclin et
parfois même l'éclatement de ces royaumes en entités plus
ou moins autonomes. Ce moment est mis à profit par l'explorateur Pierre
Savorgnan de Brazza qui, en 1880, signe avec le roi Makoko du
Batéké les traités par lesquels la France prend possession
de cet ensemble de territoires. Brazzaville devient, en 1910, la capitale de
l'Afrique équatoriale française (AEF). En 1940, le Congo sert de
point de ralliement à la France libre, avec la création, par le
général de Gaulle, à Brazzaville, du Conseil de
défense de l'Empire. L'indépendance est proclamée le 15
août 1960.
L'unité léguée par la période coloniale demeure
fragile et la sauvegarde de la cohésion du pays, dans le respect des
équilibres ethniques du pays, apparaît comme le principal enjeu de
l'histoire contemporaine marquée par des convulsions
répétées et la tentation du pouvoir autoritaire.
En 1963, un mouvement populaire conduit à la chute de l'Abbé
Fulbert Youlou, président de la République depuis le
28 novembre 1958. Un régime socialiste se met en place. Ce
"socialisme scientifique" fondé sur le parti unique devait perdurer
jusqu'en février 1991, au moment où le président
Sassou-Nguesso ouvre
une conférence nationale
souveraine
chargée de fixer la date des élections pluralistes.
Jusqu'en 1991, les changements politiques avaient toujours
procédé d'une action violente : départ de Fulbert Youlou
en 1963, démission d'Alphonse Massemba-Debat, initiateur du Mouvement
national de la révolution, à la suite de manifestations
populaires en 1968, assassinat de Marien Ngouabi, président de la
république congolaise, en mars 1977. Denis Sassou-Nguesso demeure le
seul chef d'Etat a avoir organisé, dans un contexte international
marqué, il est vrai, par la chute du mur de Berlin et sous la pression
conjuguée des églises et des syndicats notamment, un transfert de
pouvoirs conforme aux principes démocratiques.
La transition démocratique s'est toutefois soldée par un
échec. Pourquoi ? Quelles leçons peut-on tirer de cette
expérience pour la nouvelle période qui s'ouvre dans l'histoire
du Congo ?