M. Pierre JOXE
Premier Président
de la Cour des comptes
Mardi 17 juin 1997
M. Pierre Joxe, premier président de la Cour des
comptes,
a tout d'abord rappelé qu'avant la décentralisation,
le contrôle des finances locales relevait de la Cour des comptes pour les
départements et les communes les plus importantes, les trésoriers
payeurs généraux assurant, pour leur part, le contrôle des
autres communes. Il a ensuite souligné que la création des
chambres régionales des comptes était inséparable du
passage de la tutelle a priori au contrôle a posteriori. Il a cependant
précisé que la solution française d'un contrôle des
finances locales exercé a posteriori par des juridictions
financières déconcentrées constituait une
spécificité au sein de l'Union européenne.
Le premier président de la Cour des comptes a noté que ce
contrôle financier représentait une composante indispensable de
l'équilibre nouveau résultant de la décentralisation et
qu'il contribuait à garantir la "régularité,
l'efficacité, la probité et l'équilibre" des gestions
publiques locales. Il a insisté sur la nécessité d'assurer
la transparence de la gestion publique pour garantir une véritable
démocratie locale. Il a ensuite précisé que le
contrôle financier local ne consistait pas en une simple transposition du
contrôle exercé par la Cour des comptes sur les administrations
nationales et qu'il comportait des novations comme le contrôle
budgétaire. S'agissant de l'examen de la gestion,
M. Pierre Joxe
a insisté sur le fait que les juridictions financières
locales jouaient un rôle de conseiller autant que de censeur, leur
objectif étant d'obtenir le redressement des irrégularités
et la correction des dysfonctionnements. Sur ce point, il a relevé que,
dans la très grande majorité des cas, le contrôle de
gestion répondait aux attentes des élus locaux et qu'il faisait,
en général, l'objet de comptes rendus "responsables" dans la
presse. En revanche, il a noté que l'articulation entre le
contrôle de légalité, exercé par l'autorité
préfectorale, et le contrôle de gestion, mis en oeuvre par les
chambres régionales des comptes, s'avérait peu satisfaisante.
M. Pierre Joxe
a ensuite rappelé les nombreuses étapes
législatives ayant conduit à préciser les principes du
contrôle financier local et les procédures applicables en la
matière. A cet égard, il a souligné que la loi
"d'amélioration de la décentralisation" du 5 janvier 1988
avait conduit au renforcement du caractère contradictoire des
procédures, à une définition précise du
contrôle de gestion et à un retour au système de
l'apurement administratif pour les communes les plus petites. Il a ensuite
précisé que la loi du 15 janvier 1990 avait supprimé
la non-application aux travaux issus des délibérés des
chambres régionales des comptes des dispositions de la loi du
17 juillet 1978 sur la communication des actes administratifs. Le
caractère communicable et donc public des observations de gestion
constituant, selon lui, une contribution importante à la transparence
des gestions locales et donc à la régulation de la
décentralisation.
Le premier président de la Cour des comptes a ensuite fait état
de la loi du 6 février 1992 d'orientation sur l'administration
territoriale de la République qui avait, en particulier, ouvert au
représentant de l'Etat et à l'exécutif territorial le
droit d'introduire auprès des chambres régionales des comptes une
demande de vérification d'une gestion locale. Il a ensuite
mentionné la loi du 29 janvier 1993 relative à la
prévention de la corruption et à la transparence des
activités économiques, qui comportait, notamment, la
création d'un droit général à audition dans le
cadre du contrôle financier local, mais aussi la définition d'un
délit d'obstacle au contrôle des magistrats et rapporteurs des
juridictions financières. Il a enfin cité la loi du
8 février 1995, dont certaines dispositions avaient renforcé
les pouvoirs de contrôle des juridictions financières sur les
services publics délégués.
M. Pierre Joxe
a souligné, par ailleurs, que ces textes avaient
dans leur ensemble contribué au renforcement du caractère
contradictoire de la procédure applicable à l'examen de la
gestion. S'agissant des origines administratives des magistrats des chambres
régionales des comptes, il a noté que, malgré le nombre
important de fonctionnaires issus de l'administration du ministère des
finances, la composition de ce corps de magistrats était assez
variée.
A cet égard, il a insisté sur les importants progrès
réalisés dans l'unification de ce corps et dans l'harmonisation
de ses méthodes de travail. Il a rappelé que ces progrès
résultaient en grande partie de la politique de coordination et de
formation menée par la Cour des comptes et les chambres
régionales des comptes.
M. Pierre Joxe
a ensuite relevé que l'important accroissement du
nombre de comptabilités soumises au contrôle des chambres
régionales des comptes ne s'était pas accompagné d'une
progression correspondante de leurs moyens humains, financiers et
matériels. A cet égard, le premier président de la Cour
des comptes a considéré qu'il serait souhaitable de revoir le
ressort territorial des chambres régionales des comptes et d'envisager
le regroupement de certaines d'entre elles, afin de renforcer les moyens
d'action des chambres les plus petites et d'homogénéiser leur
taille.
Il a estimé que cette orientation favoriserait, en outre, une
rationalisation des pratiques et des procédures ainsi qu'une
"homogénéisation de la jurisprudence" des chambres.
M. Pierre
Joxe
a également souligné la nécessité de
prévoir un alignement du statut des magistrats des chambres
régionales des comptes sur celui des magistrats des juridictions
administratives.
S'agissant des préoccupations exprimées concernant l'examen de la
gestion, le premier président de la Cour des comptes a, tout d'abord,
souligné l'intérêt que pourrait présenter en
matière de diffusion et de publication des observations
définitives des chambres régionales des comptes l'obligation d'y
adjoindre les réponses des collectivités locales
concernées, comme c'est le cas pour le rapport public de la Cour des
comptes.
M. Pierre Joxe
a ensuite relevé qu'il ne disposait d'aucune
preuve formelle de l'exercice éventuel par les chambres
régionales des comptes d'un contrôle de l'opportunité des
décisions prises par les collectivités locales.
Il a, en revanche, admis qu'il pouvait exister des différences de
"jurisprudence", ou de rythme des contrôles, d'une chambre
régionale des comptes à l'autre. A cet égard, il a
rappelé que, s'agissant de juridictions, la Cour des comptes ne
disposait d'aucun pouvoir hiérarchique sur les chambres
régionales des comptes.
En définitive,
M. Pierre Joxe
a considéré que les
améliorations du contrôle financier local résulteraient
essentiellement de la pratique.
En réponse aux questions de
M. Yann Gaillard, rapporteur par
intérim,
le premier président de la Cour des comptes a, tout
d'abord, indiqué qu'il était favorable à la
création d'une présidence de chambre au sein de la Cour des
comptes qui aurait pour vocation spécifique le suivi de
l'activité des chambres régionales des comptes. Sur ce point, il
a souligné que les moyens mis à la disposition de la mission
d'inspection des chambres régionales des comptes avaient d'ores et
déjà été renforcés. Il a cependant
souligné la difficulté d'instituer une procédure d'appel
des observations formulées par les chambres régionales des
comptes dans l'exercice du contrôle de gestion, dans la mesure où
il ne s'agit ni de décisions juridictionnelles, ni d'actes faisant
grief.
M. Pierre Joxe
s'est, en revanche, dit favorable au renforcement
du rôle consultatif des chambres régionales des comptes, sous
réserve que leur soient alloués les moyens matériels et
humains supplémentaires pour faire face à ces nouvelles
tâches, sans nuire à l'exercice du contrôle financier.
Répondant ensuite à
M. Paul Girod,
le premier
président de la Cour des comptes a précisé que, loin de
paralyser les initiatives des élus locaux, l'examen de la gestion
possédait une vocation pédagogique affirmée que la Cour
des comptes s'efforçait de valoriser en publiant des rapports
thématiques portant sur certains aspects de la gestion locale. Par
ailleurs, il ne s'est pas opposé à l'idée que les chambres
régionales des comptes et les collectivités locales
concernées déposent une plainte conjointe contre X en cas de
"fuites" médiatisées au cours d'un examen de la gestion d'une
collectivité locale.
Répondant ensuite à
M. Michel Dreyfus-Schmidt,
le
premier président de la Cour des comptes a estimé qu'à
l'instar des juridictions administratives, l'exercice parallèle par les
chambres régionales d'une fonction de contrôle et de
compétences consultatives ne soulevait pas d'objection de principe.
Enfin, en réponse à
M. Jean-Paul Amoudry,
président,
le premier président de la Cour des comptes s'est
déclaré satisfait de la pratique informelle de respect d'un
"délai de neutralité" suspendant pendant les trois ou quatre mois
précédant une élection locale l'envoi de lettres
d'observations définitives. Il a, en outre, admis l'utilité d'une
réflexion sur la suppression éventuelle du caractère
automatique de la sanction d'inéligibilité applicable à un
responsable local ayant été reconnu comptable de fait, tout en
soulignant cependant que cette disposition du code électoral
sanctionnait une infraction grave aux règles de la comptabilité
publique.
M.
Joël THORAVAL
Préfet de la région
Ile-de-France
en sa qualité de
Président de
l'association du corps préfectoral
Jeudi 19 juin 1997
A titre
liminaire,
M. Joël Thoraval
a souligné la complexité
de la problématique du contrôle des finances locales, où
interviennent, d'une part, le représentant territorial de l'Etat pour le
contrôle de légalité et, d'autre part, les chambres
régionales des comptes au titre du contrôle financier. Il a
souligné l'importante évolution du contexte local depuis la
décentralisation engagée en 1982, marqué par
l'élargissement des compétences des collectivités locales,
la forte croissance des budgets locaux et les difficultés
financières rencontrées par certaines collectivités. Il a
insisté sur l'impact de la médiatisation et de la politisation
qui accompagnent la diffusion des observations des chambres régionales
des comptes.
M. Joël Thoraval
a relevé qu'il existait dans ce domaine une
interaction complexe entre la mission de contrôle exercée par les
préfets et la mise en oeuvre du contrôle de la gestion des
collectivités locales par les chambres régionales des comptes. Il
a insisté sur l'importance de la contribution du contrôle
financier local au redressement d'irrégularités qui sont, le plus
souvent, commises de façon involontaire par les gestionnaires locaux. A
cet égard, il a fait état du paradoxe résultant, d'une
part, de la reconnaissance d'une mission de contribution au bon fonctionnement
de la démocratie locale et, d'autre part, d'une contestation de la mise
en oeuvre du contrôle financier.
Analysant le cadre et les enjeux du contrôle financier local,
M. Joël Thoraval
a insisté sur l'importance du
phénomène de "juridicisation" de la société et de
son corollaire, la pénalisation. Il a ensuite expliqué que ce
phénomène favorisait l'émergence d'un sentiment
d'insécurité juridique chez les élus locaux, en raison de
l'augmentation du nombre de dossiers transmis à la juridiction
judiciaire par les chambres régionales des comptes, ce nombre
étant passé de 42 en 1994, à 63 en 1995. Il a
souligné que cette circonstance était renforcée par les
phénomènes de médiatisation et de politisation qui donnent
à ces observations, rendues publiques, un impact mal mesuré par
le juge financier. Il a noté que cette situation était d'autant
plus sensible que les observations formulées par les chambres
régionales des comptes n'étaient pas revêtues de
l'autorité de la chose jugée et qu'elles étaient, en
conséquence, insusceptibles de faire l'objet d'un appel.
M. Joël Thoraval
a néanmoins relevé que la
communication aux personnes intéressées des observations
formulées par les chambres régionales des comptes, dans le cadre
d'une procédure contradictoire, garantissait le respect des droits de la
défense. Il a néanmoins relevé que cette communication
comportait un risque réel de divulgation des observations provisoires,
notamment lorsqu'elles concernent la gestion du précédent
ordonnateur. Sur ce point, il a relevé que la Cour des Comptes
soulignait l'existence d'une asymétrie entre les chambres
régionales des comptes qui doivent prendre toutes les dispositions
nécessaires pour garantir le secret de leurs investigations et les
collectivités locales qui ne sont pas soumises aux mêmes
obligations.
Le président de l'association du corps préfectoral a conclu sur
ce point en insistant sur les conséquences de la médiatisation
des observations formulées par les chambres régionales des
comptes, tout en admettant que cette transparence était
nécessaire au bon exercice de la démocratie locale. A cet
égard, il a insisté sur la nécessité d'organiser
des "contrepoids" à la mise en oeuvre du principe constitutionnel de
libre administration des collectivités territoriales
opérée par les lois de décentralisation. Dans cet esprit,
il a noté que, parallèlement au contrôle de
légalité, les chambres régionales des comptes jouaient un
rôle croissant dans la "régulation de la décentralisation",
alors même, qu'en dehors du jugement des comptes, elles ne
possédaient pas un réel pouvoir de décision.
M. Joël Thoraval
a par ailleurs admis que le caractère
tardif du contrôle de gestion et son autonomie par rapport au
contrôle de légalité étaient susceptibles de faire
naître un sentiment d'insécurité juridique chez les
élus locaux, dans la mesure où une chambre régionale des
comptes peut formuler des observations sur des décisions qui n'ont pas
été critiquées dans le cadre du contrôle de
légalité. Il a reconnu que ce type de situation était de
nature à jeter un doute sur la qualité du contrôle
exercé par les services préfectoraux. Sur ce point,
M.
Joël Thoraval
a tenu à souligner que cette situation
découlait, d'une part, du caractère non décelable de
certaines irrégularités au moment où s'exerce le
contrôle de légalité et, d'autre part, de la
spécificité de ce contrôle qui a pour objet de favoriser un
dialogue confiant entre les élus locaux et le représentant de
l'Etat.
Décrivant l'articulation qui existe entre ces deux contrôles,
M. Joël Thoraval
a, tout d'abord, relevé l'utilisation
par les chambres régionales des comptes des travaux du service
préfectoral à l'appui de leur contrôle de gestion. Il a
ensuite rappelé que le Conseil d'Etat avait jugé que
l'autorité préfectorale n'avait pas l'obligation de
déférer aux tribunaux administratifs les actes des
collectivités locales, dans la mesure où il a reconnu aux
préfets un pouvoir d'appréciation du degré de
gravité de l'irrégularité. Il a estimé que le
contrôle "préfectoral" ne devait pas être "tâtillon"
et qu'il devait tenir compte des réalités locales.
Considérant que les deux contrôles étaient, dans une large
mesure, complémentaires,
M. Joël Thoraval
a
suggéré que soient rééquilibrés les
rôles respectifs des chambres régionales des comptes et du
préfet dans l'exercice de leur fonction de régulation de la
décentralisation. Pour illustrer le caractère
complémentaire du contrôle de légalité et du
contrôle financier, il a tout d'abord rappelé que la loi
prévoyait que les chambres régionales des comptes concouraient au
contrôle budgétaire des collectivités locales, le
préfet statuant au regard des propositions formulées par les
chambres. Ces dernières sont aussi tenues d'informer le préfet
à différents stades des procédures de contrôle
budgétaire, de jugement des comptes ou d'examen de la gestion d'une
collectivité locale.
Le président de l'association du corps préfectoral a
relevé qu'à l'inverse les préfets pouvaient, dans
l'exercice du contrôle de légalité, s'appuyer sur les
analyses et les observations des chambres.
Il a cependant admis l'existence de certaines difficultés,
résultant par exemple de la mise en cause de la qualité du
contrôle de légalité par une chambre régionale des
comptes.
M. Joël Thoraval
s'est élevé contre de telles
pratiques qui traduisent une méconnaissance de la conception
préfectorale du contrôle de légalité, dont l'objet
ne se borne pas à recourir à des voies de droit contraignantes,
et qui tient compte des conditions réelles d'exercice des
compétences des collectivités locales. Il a précisé
que les chambres régionales des comptes devaient contribuer au
contrôle de légalité en apportant une assistance technique
à l'exercice de cette mission. A cette fin,
M. Joël Thoraval
a indiqué que l'association du corps préfectoral souhaitait
renforcer l'administration territoriale en regroupant au sein d'un même
service interministériel des fonctions actuellement dispersées
dans plusieurs services déconcentrés.
M. Joël Thoraval
a ensuite présenté plusieurs
propositions destinées à moderniser les conditions d'exercice du
contrôle financier local. A cet égard, il a, tout d'abord,
recommandé un renforcement du rôle préventif des chambres
régionales des comptes. Il a ensuite souhaité que les
observations des chambres régionales soient accompagnées de
recommandations concrètes destinées à remédier aux
problèmes qu'elles ont relevés dans le cadre d'un contrôle
de gestion. Il a souligné qu'une telle adaptation aurait l'avantage de
mieux associer les chambres régionales des comptes aux
réalités de la gestion locale. Puis il a suggéré de
mettre en place des "missions du contrôle de légalité" qui
seraient composées de magistrats issus des juridictions administratives,
financières et judiciaires, ainsi que de fonctionnaires provenant de
certains services déconcentrés de l'Etat. Enfin, il a
souhaité un "rééquilibrage" des rôles respectifs des
chambres régionales des comptes et des services préfectoraux qui
passe, selon lui, par un renforcement de ces derniers.
En conclusion,
M. Joël Thoraval
a souhaité qu'un nouveau
type de relations se tisse entre les acteurs de la vie publique locale afin de
promouvoir la prévention des irrégularités et de favoriser
la cohérence des différentes formes de contrôle
exercé par les services de l'Etat.
M. Yann Gaillard, rapporteur par intérim
, s'est tout d'abord
félicité de la volonté de renforcer la prévention
et de mieux associer les juridictions financières aux
conséquences de leurs observations. Il a par ailleurs jugé
pertinente l'idée de regrouper les moyens administratifs des services
déconcentrés de l'Etat pour favoriser la cohérence des
différentes formes de contrôle.
Afin de lever toute ambiguïté sur la portée du
contrôle de légalité, il a, par ailleurs,
suggéré qu'à l'issue de ce contrôle, soit
apposée sur les documents "traités" une formule rappelant que le
visa de l'autorité préfectorale ne valait pas quitus au regard du
contrôle financier.
Répondant à une question de
M. Jean-Paul Amoudry,
président,
le président de l'association du corps
préfectoral s'est dit défavorable à une éventuelle
suppression de l'automaticité de la sanction d'inégibilité
en cas de gestion de fait, dans la mesure où cette adaptation risquait
d'être mal perçue par l'opinion publique qui l'analyserait comme
un allègement "suspect" des sanctions pesant sur des élus
"fautifs".
M.
Michel THÉNAULT
Directeur général des
collectivités locales
au ministère de l'intérieur
Jeudi 19 juin 1997
A titre
liminaire,
M. Michel Thénault
a fait observer que les
contrôles opérés par les chambres régionales des
comptes s'inscrivaient dans un contexte caractérisé par la grande
maturité des collectivités locales.
Il a relevé que les collectivités territoriales, qui
exerçaient des compétences très étendues,
intervenaient désormais dans tous les domaines de la vie sociale et que
leurs budgets, qui s'élevaient à 750 millions de francs,
représentaient à peu près la moitié du budget de
l'Etat.
M. Michel Thénault
a néanmoins souligné que les
collectivités locales disposaient de marges de manoeuvre
réduites, que les citoyens étaient désormais très
sensibles à la pression fiscale et que certaines collectivités
locales étaient en proie à des difficultés
financières qui avaient pu sensibiliser l'opinion publique.
Le directeur général des collectivités locales a fait
valoir que les médias se saisissaient des contrôles
opérés par les chambres régionales des comptes alors
même que le débat entre la collectivité locale et la
juridiction concernée n'était pas clos. Il a constaté
l'utilisation par les médias d'éléments du contrôle
financier, qui étaient essentiellement d'ordre technique.
Puis, considérant que le contrôle de légalité et le
contrôle financier étaient la contrepartie logique de la
décentralisation,
M. Michel Thénault
a rappelé que
les chambres régionales des comptes exerçaient trois missions
essentielles, à savoir le jugement des comptes et des comptables, la
contribution au contrôle budgétaire et l'examen de la gestion des
collectivités locales.
Après avoir relevé que les compétences des chambres
régionales des comptes avaient été progressivement
développées ces dernières années, il a fait valoir
que les modalités du contrôle avaient été
également précisées notamment pour ce qui est de la
procédure contradictoire préalable à
l'établissement des observations définitives et pour la garantie
du secret des investigations.
Le directeur général des collectivités locales a alors
souligné que la mission des chambres régionales des comptes en
matière de contrôle de la gestion était de s'assurer de
l'efficacité de la gestion locale sans pour autant se prononcer sur les
choix opérés.
Distinguant le contrôle de gestion de la fonction juridictionnelle
exercée par les chambres régionales des comptes, il a fait valoir
que les observations définitives des chambres régionales des
comptes n'étaient pas assorties de sanctions même si leur
communication à l'assemblée délibérante leur
conférait une portée très importante.
Relevant ensuite que le contrôle de gestion avait pu apparaître,
dans certains cas, comme portant sur l'opportunité des décisions
locales,
M. Michel Thénault
a jugé nécessaire
d'évaluer si ce contrôle de l'opportunité était ou
non fondé sur des considérations juridiques.
S'appuyant sur des exemples d'observations définitives rendues par des
chambres régionales des comptes, il a ainsi noté que
l'attribution d'un marché public, tout en respectant les
procédures de mise en concurrence, pouvait s'appuyer sur des
critères de choix qui n'étaient pas exempts de risques.
De même,
M. Michel Thénault
a indiqué que les
chambres régionales des comptes avaient pu constater que le
fractionnement des services d'une collectivité locale chargés de
la commande publique avait pu avoir un effet sur le dépassement des
seuils permettant le règlement des achats sur simple facture. Il a enfin
précisé que l'examen des interventions économiques
conduisait les chambres régionales des comptes à une
évaluation et à une appréciation de la
régularité du risque.
Tout en reconnaissant que la frontière entre la régularité
et l'opportunité était ténue,
M. Michel
Thénault
a fait valoir que les observations des chambres
régionales des comptes pouvaient correspondre, dans nombre de cas,
à des préoccupations de régularité.
Dans ces conditions, il a jugé nécessaire d'écarter une
approche restrictive du champ d'application du contrôle de gestion. Il a
en effet estimé que si celui-ci devait être réduit, il y
aurait un risque sérieux de faire évoluer le contrôle non
juridictionnel vers un contrôle de type juridictionnel.
Puis, abordant les pistes envisageables en vue d'améliorer le cadre
actuel,
M. Michel Thénault
a tout d'abord estimé
possible de renforcer les conditions d'exercice du contrôle de gestion.
Jugeant nécessaire de rechercher une plus grande confidentialité
dans la procédure contradictoire, il a proposé de
compléter l'article L. 241-6 du code des juridictions
financières afin d'étendre aux chambres régionales des
comptes, la solution d'ores et déjà en vigueur pour la Cour des
Comptes, ce qui garantirait une confidentialité des actes
préalables aux observations définitives.
Examinant ensuite les évolutions possibles de la législation,
M. Michel Thénault
a fait observer que la complexité
de celle-ci était dans certains cas soulignée par les chambres
régionales des comptes.
Il a ainsi jugé nécessaire de réviser l'article
L. 1511-5 du code général des collectivités locales
qui, définissant un cadre conventionnel pour les relations entre l'Etat
et les collectivités locales, était souvent appliqué dans
des conditions critiquables.
De même, le directeur général des collectivités
locales a fait valoir que les critiques émises à l'encontre des
démembrements administratifs justifiaient la recherche de nouveaux modes
de gestion, par exemple avec la mise en place d'établissements publics
locaux.
S'intéressant aux conditions d'exercice du contrôle de
légalité et du contrôle budgétaire,
M. Michel Thénault
a fait observer que le contrôle de
légalité était souvent critiqué soit pour sa
rigueur excessive, soit au contraire pour son laxisme.
Il a néanmoins relevé l'existence d'une demande de plus en plus
forte des élus locaux pour un renforcement de la sécurité
juridique de leurs actes.
Après avoir rappelé que le contrôle de
légalité ne garantissait en aucun cas de manière
définitive la validité juridique des actes des
collectivités locales,
M. Michel Thénault
a
néanmoins jugé souhaitable d'augmenter la sécurité
juridique de ces actes. De même, il a fait valoir que le contrôle
budgétaire devait permettre de prévenir des situations
financières dégradées.
S'interrogeant sur les conditions et l'étendue de ces contrôles,
M. Michel Thénault
a indiqué que sur 5 millions
d'actes transmis aux préfectures en 1995, 2.000 avaient fait
l'objet de déférés aux tribunaux administratifs.
Relevant le faible pourcentage de déférés
préfectoraux,
M. Michel Thénault
a néanmoins
souligné le rôle de la procédure préalable de
concertation entre les élus locaux et les préfets qui permettait,
dans bien des cas, de prévenir un déféré. Il a
néanmoins indiqué que dans des domaines tels que l'urbanisme ou
les marchés publics, le contrôle de légalité faisait
preuve d'une rigueur accrue.
Il a enfin noté que les dispositifs législatifs adoptés en
1992-1993 et 1995 avaient eu pour objet d'étendre le champ de la
transmission obligatoire des actes des collectivités locales et d'
accélérer la procédure de sursis à exécution
de ces derniers.
S'agissant du contrôle budgétaire,
M. Michel
Thénault
a indiqué que sur 340.000 actes
contrôlés, 700 avaient donné lieu à une saisine des
chambres régionales des comptes.
Le directeur général des collectivités locales a alors
jugé nécessaire de renforcer la formation des services
chargés du contrôle de légalité, de mettre à
leur disposition des outils d'analyse et de veiller à une
homogénéité des solutions adoptées.
Il a précisé que la direction générale des
collectivités locales avait développé plusieurs actions
dans ce sens, notamment par l'établissement de recueils de
jurisprudence, en répondant à des questions ponctuelles et en
organisant des sessions de formation sur les marchés publics et sur
l'instruction comptable M.14.
Il a néanmoins considéré que ces actions devraient
être développées en renforçant l'assistance
apportée aux préfectures et en mettant à leur disposition
des instruments d'analyse afin d'accélérer et d'améliorer
les contrôles.
En conclusion,
M. Michel Thénault
a fait valoir qu'il
était possible de rechercher une plus grande harmonisation des solutions
retenues et de développer l'expertise locale.
M. Yann Gaillard, rapporteur par intérim
, a alors jugé
souhaitable que le groupe de travail puisse disposer d'analyses de la direction
générale des collectivités locales sur les observations
rendues par les chambres régionales des comptes.
Il a par ailleurs relevé la suggestion de légitimer dans la loi
les interventions des collectivités locales dans certains domaines. Il
s'est ensuite interrogé sur l'idée de mettre en place des
missions de contrôle de légalité qui seraient à la
disposition des préfets.
Enfin,
M. Yann Gaillard, rapporteur par intérim
,
après avoir noté les inconvénients de la communication
orale à l'assemblée délibérante des observations
définitives des chambres régionales des comptes, s'est
demandé s'il ne serait pas préférable d'instituer une
communication écrite.
En réponse,
M. Michel Thénault
a tout d'abord fait
valoir que certaines observations avaient pu conduire les chambres
régionales des comptes à apprécier des sujets qui
semblaient relever de la pure opportunité.
Reprenant l'exemple de la gestion des commandes publiques dans une
collectivité locale, qui était directement de la
responsabilité de celle-ci, il a néanmoins fait observer que
cette organisation interne pouvait conduire la collectivité locale
à prendre des risques, ce qui soulevait alors un problème de
régularité.
Il a, en conséquence, de nouveau estimé qu'une restriction du
champ du contrôle de gestion pourrait entraîner un glissement de
celui-ci vers un contrôle juridictionnel.
Soulignant ensuite que la confidentialité des observations provisoires
des chambres régionales des comptes devrait être mieux
assurée,
M. Michel Thénault
a de nouveau
suggéré de compléter l'article L. 241-6 du code des
juridictions financières afin de supprimer la distorsion actuelle entre
la procédure suivie devant la Cour des Comptes et celle appliquée
par les chambres régionales des comptes.
S'agissant de la suggestion de mettre en place des missions du contrôle
de légalité,
M. Michel Thénault
a fait valoir qu'il
était avant tout nécessaire d'instituer auprès du
préfet des pôles de compétences pluridisciplinaires.
Il a en revanche jugé nécessaire de ne pas instaurer entre les
préfets et les autorités locales une structure
intermédiaire qui pourrait jouer le rôle d'une sorte de
" parquet " administratif.
Soulignant que dans un contexte de juridictionnalisation, la pression du risque
pénal pesait sur tous les acteurs locaux, il a fait observer qu'une
telle structure risquerait d'enfermer les préfets dans des
compétences liées et de modifier profondément la nature de
leurs relations avec les collectivités locales.
M. Michel Thénault
a en outre jugé souhaitable de ne pas
démobiliser les services permanents des préfectures, même
si la création de pôles de compétences ou le
développement de la mobilité pouvaient être très
utiles.
S'agissant de la communication des observations définitives des chambres
régionales des comptes à l'assemblée
délibérante,
M. Michel Thénault
a estimé que
cette communication était en principe écrite dans la mesure
où la convocation devait comporter ces observations.
M. Patrice Gélard
a alors souligné les difficultés
auxquelles étaient confrontées les collectivités locales
pour recruter des fonctionnaires territoriaux ayant une bonne formation
juridique et donc susceptibles de bien appréhender les problèmes
juridiques auxquels les collectivités étaient confrontées.
En réponse,
M. Michel Thénault
a fait observer que les
compétences de la fonction publique territoriale s'étaient
renforcées. Il a relevé que la filière administrative
avait été mise en place en 1987, à un moment où la
complexité des problèmes juridiques des collectivités
locales était moins sensible. Il a également noté que les
procédures de recrutement avaient eu tendance à
privilégier les aspects sociaux, peut-être au détriment des
aspects juridiques.
Dans ces conditions, le directeur général des
collectivités locales a jugé nécessaire de revoir le
programme des concours administratifs et de permettre une plus grande
" capitalisation " de la formation permanente. Il a également
estimé que les aspects juridiques pourraient être mieux pris en
compte dans le nouveau statut des élèves qui concernait les
cadres supérieurs.
M. Paul Girod
s'est alors interrogé sur l'idée de
prévoir une plainte automatique et conjointe de la chambre
régionale des comptes et de la collectivité locale en cas de
divulgation dans la presse d'observations provisoires. Il a en outre fait
valoir que la mise en cause a posteriori par les chambres régionales des
comptes de la prise de risques pouvait aboutir en pratique à une
paralysie de l'action locale.
En réponse,
M. Michel Thénault,
prenant l'exemple des
interventions économiques des collectivités locales, a de nouveau
considéré que, dans un certain nombre de cas, une clarification
législative permettrait de mettre utilement le droit en
conformité avec la pratique.
M. Yann Gaillard, rapporteur par intérim
, a jugé
nécessaire de prendre en compte les spécificités des
départements d'outre-mer pour lesquels des missions du contrôle de
légalité pourraient avoir une utilité particulière.
M.
Gilles CARREZ
Député
Vice-Président de
l'Association des Maires de France (AMF)
Mardi 24 juin 1997
Faisant
état des résultats provisoires d'une enquête sur les
chambres régionales des comptes menée par l'AMF auprès des
présidents d'associations départementales des maires,
M.
Gilles Carrez
a indiqué que les maires consultés ne
remettaient pas en cause globalement les contrôles exercés par les
chambres régionales des comptes mais qu'en revanche, ils exprimaient le
souci d'une meilleure définition de leur champ d'application. Il a
notamment relevé la préoccupation concernant la distinction entre
le contrôle de régularité et le contrôle de pure
opportunité. Il a également noté une contestation
très localisée à l'encontre de ces contrôles.
Après avoir souligné que les chambres régionales des
comptes étaient des juridictions,
M. Gilles Carrez
a
estimé que le jugement des comptes correspondait à une
procédure ancienne, bien acceptée par les élus et conforme
à la nature juridictionnelle des chambres régionales des comptes.
Faisant néanmoins observer que, dans ce cadre, ces juridictions
pouvaient établir des lettres d'observations concernant la gestion des
ordonnateurs,
M. Gilles Carrez
a considéré que cette
concomitance d'un jugement sur les comptes et d'un avis sur la gestion faisait
apparaître ce dernier comme un véritable jugement. Il a fait
valoir que cette confusion était accentuée par le fait que dans
certains cas, qui relevaient de la gestion de fait, les chambres
régionales des comptes étaient appelées à rendre un
véritable jugement assorti de sanctions.
Puis,
M. Gilles Carrez
a estimé que la nature juridictionnelle
des chambres régionales des comptes rendait difficile une
procédure de consultation préalable à la demande des
collectivités locales. Il a jugé préférable de
prévoir le recours à des pôles de compétences
impliquant les différents services concernés.
M. Gilles Carrez
a par ailleurs fait observer que les chambres
régionales des comptes intervenant postérieurement au
contrôle de légalité, cette situation posait le
problème de la sécurité juridique des actes des
collectivités locales. Il a ainsi relevé le risque de
contradiction entre le contrôle de légalité et le
contrôle financier.
M. Gilles Carrez
a ensuite fait valoir que les interventions des
chambres régionales des comptes à l'égard des ordonnateurs
étaient trop tardives par rapport à l'objectif d'assurer une
bonne gestion locale, notamment pour ce qui est des activités
périphériques telles que les associations ou les
sociétés d'économie mixte. Il a considéré
que si les observations concernant la gestion étaient formulées
au moment du jugement des comptes, elles ne pouvaient pas jouer un rôle
efficace pour remédier à certains dysfonctionnements.
Relevant les problèmes posés par la procédure actuelle,
M. Gilles Carrez
a indiqué que les élus locaux
étaient souvent choqués, moins par le contenu que par la
présentation des observations.
Tout en se déclarant favorable au maintien de la communication des
observations définitives des chambres régionales des comptes aux
assemblées délibérantes,
M. Gilles Carrez
a
néanmoins plaidé pour la mise en place d'une véritable
procédure contradictoire. Il a également souhaité que les
chambres régionales des comptes prennent davantage en
considération les réponses des ordonnateurs à leurs
observations provisoires et qu'elles ne limitent pas leurs observations aux
seuls aspects négatifs de la gestion locale. Enfin, il a souhaité
que les réponses des ordonnateurs soient versées au dossier et
fassent l'objet d'une publicité.
M. Gilles Carrez
a par ailleurs regretté l'absence de
procédures d'audit et de contrôle internes aux
collectivités locales.
En conclusion, après avoir considéré que les
contrôles étaient le corollaire de la décentralisation,
M. Gilles Carrez
a néanmoins plaidé pour un renforcement
des procédures et pour une consultation préalable qui serait
ouverte aux collectivités locales afin de sécuriser leurs
interventions.
M. Paul Girod
a également estimé qu'une procédure
de consultation préalable devrait être envisagée sous une
forme qui restait à définir. Il a considéré que la
mise en oeuvre d'une telle procédure pourrait faire
bénéficier l'ordonnateur d'une présomption de bonne foi.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
soulignant l'intérêt de
l'enquête réalisée par l'AMF, a relevé que celle-ci
ne mettait en évidence aucune remise en cause globale du contrôle
financier mais exprimait le souhait d'une meilleure distinction entre la
régularité et l'opportunité, ce qui relevait à ses
yeux d'un code de procédure financière.
Notant l'existence de contestations localisées du contrôle
financier, il a estimé que celles-ci soulevaient le problème du
rôle régulateur de la Cour des Comptes à l'égard des
chambres régionales des comptes.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
a ensuite rappelé que la
procédure d'examen de la gestion des collectivités locales avait
été souhaitée par le législateur lui-même.
Il a estimé que s'il pouvait être difficile de permettre aux
collectivités locales de solliciter l'avis préalable des chambres
régionales des comptes, la question d'une procédure
préalable aux décisions locales méritait néanmoins
d'être approfondie.
Puis, le rapporteur a fait valoir que l'intervention des chambres
régionales des comptes postérieurement au contrôle de
légalité était inévitable, les juridictions
financières devant se prononcer sur des pratiques qui faisaient suite
à l'adoption d'un acte. Au sujet de la préoccupation
exprimée sur le caractère tardif de ces contrôles, il a
souligné que ceux-ci intervenaient nécessairement a posteriori,
ce qui pouvait contribuer à une certaine sérénité
de la procédure.
S'agissant de la forme des observations définitives,
M. Jacques
Oudin, rapporteur,
a fait valoir que la mission de tout organe
chargé d'une mission de contrôle était de relever les
déficiences de la gestion publique et non pas ses aspects positifs.
Enfin, le rapporteur a souligné que des progrès
considérables pouvaient être réalisés pour
développer des audits internes aux collectivités locales,
notamment grâce à un plus grand recours à l'informatique.
M. Joël Bourdin,
s'interrogeant sur les relations entre le
contrôle de légalité et le contrôle financier, a
souligné que les incohérences entre ces deux types de
contrôles étaient légitimement mal vécues par les
élus locaux.
A propos de la suggestion de mettre en place une procédure d'avis
préalable,
M.
Joël Bourdin
a fait valoir que les
collectivités locales pouvaient toujours solliciter l'avis de
professionnels qualifiés, notamment des universitaires ou des
associations d'élus, lesquelles pourraient, selon lui, jouer un
rôle accru dans ce domaine.
En réponse,
M. Gilles Carrez,
après avoir souscrit
à ces observations, a indiqué, concernant la délivrance
par les services de l'Etat d'avis préalables aux décisions
locales, que la situation était très
hétérogène selon les départements et selon les
services. Il a, par ailleurs, précisé que l'AMF avait mis en
place une procédure de conseil aux élus sur les
délégations de services publics et la gestion de l'eau.
Puis,
M. Gilles Carrez
a fait observer que le contrôle de
légalité pouvait être tatillon sur certains aspects de la
gestion locale et au contraire ne pas se préoccuper d'autres aspects
pourtant tout à fait importants de cette gestion. Il a en outre
relevé que le contrôle de légalité était
très variable d'une préfecture à l'autre.
Tout en émettant des doutes sur les possibilités
d'améliorer ce dispositif,
M. Gilles Carrez
a néanmoins
jugé possible, afin de promouvoir une fonction de conseil aux
élus, de réunir des compétences dans les domaines
financiers, budgétaires ou juridiques. Considérant qu'il serait
difficile de confier la gestion de ce pôle de compétences à
un organisme chargé du contrôle juridictionnel, il a estimé
qu'il serait logique de le rattacher aux préfets.
S'agissant du rôle des associations d'élus pour conseiller les
collectivités locales,
M. Gilles Carrez
a indiqué que
l'AMF était susceptible de donner des informations sur tel ou tel aspect
de la gestion locale mais qu'en revanche, il lui était plus difficile de
développer un pôle de réflexion multicompétent.
Estimant que les compétences qui existaient au sein des administrations
centrales pour assurer une mission de conseil aux élus locaux
étaient souvent mal utilisées, il a proposé de
déconcentrer ces compétences au niveau départemental ou
régional.
Soulignant à nouveau l'intérêt d'un développement de
l'audit interne aux collectivités locales,
M. Gilles Carrez
a
relevé que le débat d'orientation budgétaire qui avait
été prévu par la loi d'orientation du 6 février
1992 pouvait favoriser cette recherche d'une meilleure qualité de la
gestion. Il a en outre fait valoir que la dimension pluriannuelle et
prévisionnelle devrait être davantage prise en compte.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
a alors estimé qu'il serait
difficile de concilier au sein des chambres régionales des comptes
à la fois la mission de délivrer des avis préalables et
celle de rendre des jugements sur les comptes. Il s'est donc interrogé
sur une solution consistant à mettre en place des pôles de
compétences sous la responsabilité des préfets et en
liaison avec les associations d'élus. Il a également
relevé à son tour la possibilité pour les
collectivités locales de recourir aux services de professionnels
extérieurs.
M. Jean-Paul Amoudry, président,
a rappelé que le rapport
d'information établi par M. Daniel Hoeffel au nom du groupe de
travail de la commission des lois sur la décentralisation avait
souligné les insuffisances actuelles du contrôle de
légalité.
Il s'est en outre interrogé sur l'instauration d'un délai de
" neutralité " ayant pour objet de prohiber la
délivrance de lettres d'observations définitives à
l'approche d'une échéance électorale. Il a souhaité
savoir si, lors des dernières consultations, des élus locaux
avaient eu à se plaindre d'une utilisation de ces lettres d'observations
définitives à des fins purement électorales.
M. Jean-Paul Amoudry, président,
s'est enfin demandé si la
sanction automatique de la gestion de fait par l'inéligibilité
n'était pas excessive.
En réponse,
M. Gilles Carrez,
après avoir indiqué
qu'il n'avait pas recensé de plaintes d'élus locaux à
raison de la communication d'observations définitives des chambres
régionales des comptes à l'approche des dernières
élections municipales, a néanmoins craint que le problème
ne se pose à l'occasion des prochaines élections municipales. Il
a en conséquence souhaité l'institution d'un délai d'une
durée minimale de six mois pendant lequel serait interdite la
communication d'observations définitives des chambres régionales
des comptes.
S'agissant de la gestion de fait,
M. Gilles Carrez
a fait valoir que le
caractère automatique de la sanction de l'inéligibilité
était excessif. Il a en effet relevé que dans un certain nombre
de cas la gestion de fait était involontaire.
M.
Camille VALLIN
Président de la Fédération nationale
des sociétés d'économie mixte (FNSEM)
M. Maxime PETER
Directeur général
Mardi 1
er
juillet 1997
A titre
liminaire,
M. Camille Vallin
a rappelé que la loi du 7 juillet
1983 qui organise le fonctionnement des sociétés
d'économie mixte (SEM), avait été adoptée à
l'unanimité par le Parlement et que les SEM étaient
présidées par des élus de toutes tendances politiques.
M. Camille Vallin
a ensuite indiqué que les SEM étaient
des sociétés anonymes soumises à la loi du 24 juillet
1966, et qu'elles dérogeaient à ce droit commun par plusieurs
règles particulières issues de la loi du 16 juillet 1983,
lesquelles règles découlaient de la participation majoritaire des
collectivités locales à leur capital et concouraient à
garantir l'actionnaire public.
Soulignant l'importance et la vitalité des SEM dans le secteur public
local,
M. Camille Vallin
a indiqué qu'il existait 1.400 SEM
réparties dans trois grands secteurs d'activité : la gestion
des services publics locaux (46 %), la construction et la gestion
immobilière (27 %), l'aménagement et le développement
économique (27 %).
Il a précisé que les SEM étaient à l'origine de
55.000 emplois directs dont 20.000 créés depuis 1983 et qu'elles
disposaient de 10 milliards de capitalisation. Il a en outre relevé
qu'elles avaient créé 500.000 logements sociaux ou
intermédiaires et qu'elles réalisaient 18 milliards
d'investissements annuels dans l'aménagement urbain.
M. Camille Vallin
a fait observer qu'entreprises publiques locales, les
SEM étaient logiquement soumises au contrôle des chambres
régionales des comptes. Il a relevé que ce contrôle
était déclenché soit par saisine préfectorale ou
territoriale, soit, le plus fréquemment, à l'initiative de la
chambre régionale des comptes elle-même.
Soulignant que ces contrôles étaient de plus en plus
fréquents et faisaient ainsi des SEM une cible privilégiée
des chambres régionales des comptes,
M. Camille Vallin
a
précisé qu'en 1995 sur 960 lettres d'observations
définitives, 88 avaient porté sur des SEM.
Après avoir indiqué que sa fédération avait
étudié le contenu des observations définitives
formulées par les chambres régionales des comptes sur les SEM,
afin de recommander à ses adhérents les mesures de
prévention requises, il a indiqué qu'elle avait également
analysé les difficultés rencontrées par les SEM lors de
ces contrôles.
Présentant ces difficultés,
M. Camille Vallin
a tout
d'abord fait observer que les contrôles des chambres régionales
des comptes étaient plus larges que l'examen de la
régularité des opérations, mais qu'ils ne pouvaient, en
principe, consister dans une appréciation de l'opportunité des
décisions et des objectifs stratégiques des organismes
contrôlées.
Après avoir rappelé que les dispositions de la loi du 5 janvier
1988 d'amélioration de la décentralisation étaient sans
ambiguïté sur ce point, il a néanmoins fait valoir
qu'à l'épreuve des faits les frontières entre le
contrôle de gestion et le contrôle de l'opportunité
n'étaient pas clairement délimitées. Il a ainsi fait
observer que les chambres régionales des comptes s'interrogeaient
très fréquemment sur l'utilité du recours à des SEM
parce qu'elles considéraient en général que la gestion
directe selon les règles du droit public (en régies ou en
établissements publics) offrait plus de sécurité, sinon
d'efficacité, que la gestion déléguée.
Considérant que cette dérive devait être stoppée,
M. Camille Vallin
a suggéré que la Cour des Comptes et les
chambres régionales des comptes proposent, dans le cadre d'un code
déontologie, des critères objectifs d'appréciation ainsi
qu'une procédure d'appel devant la Cour des Comptes lorsqu'un organisme
contrôlé constaterait qu'une chambre régionale a
outrepassé ses compétences.
Puis abordant la question du caractère contradictoire de la
procédure de contrôle,
M. Camille Vallin
a fait valoir
qu'il serait normal que l'audition préalable à la séance
de la chambre, qui approuve les observations provisoires d'un dirigeant de la
SEM contrôlée, devienne obligatoire et que cette audition fasse
l'objet d'un procès-verbal communiqué à la personne
entendue par la chambre régionale. Il a, par ailleurs, souhaité
que les observations ne puissent être arrêtées
définitivement avant que l'organisme contrôlé n'ait
été en mesure d'y répondre par écrit.
S'intéressant enfin à la question de la publicité des
lettres d'observations définitives,
M. Camille Vallin
a
estimé qu'une adaptation des règles en vigueur était
urgente face à la médiatisation croissante de la
société. Il a ainsi fait observer que les lettres d'observations
définitives, bien que ne faisant pas grief sur le plan juridique,
apparaissaient comme une véritable sentence dont l'impact sur l'opinion
publique pouvait jeter le discrédit sur un élu, sur un projet ou
sur une structure, alors même que les irrégularités
soulevées par la chambre régionale des comptes pouvaient
être de pure forme et ne justifiaient pas, en tout état de cause,
que la probité ou la compétence des élus soient mises en
cause.
Puis, considérant que l'existence d'un contrôle a posteriori des
finances locales, gage d'une bonne démocratie, ne devait pas conduire
à créer un climat de défiance entre les citoyens et les
élus locaux,
M. Camille Vallin
a souhaité la mise en place
de mesures visant à mieux garantir les principes de la procédure
contradictoire et les droits de la défense.
Il a, en premier lieu, plaidé pour que les lettres d'observations
provisoires soient confidentielles car elles étaient couvertes par le
secret professionnel et leur divulgation apparaissait prématurée
en l'absence de réponse de la personne concernée.
Il a, en second lieu, proposé que dans le cas où une lettre
d'observations provisoires serait néanmoins publiée, une
procédure systématique de plainte conjointe de la chambre et de
la collectivité locale, qui aurait un effet suspensif sur la diffusion
des observations, soit envisagée.
Par ailleurs,
M. Camille Vallin
a considéré qu'à
l'instar du rapport annuel de la Cour des Comptes, une lettre d'observations
définitives devrait, pour devenir communicable, reprendre les
réponses définitives de l'exécutif territorial aux
observations provisoires de la chambre.
Enfin,
M. Camille Vallin
a souhaité qu'une harmonisation soit
réalisée dans les pratiques des différentes chambres
régionales des comptes pour ce qui est de la publication d'un rapport
annuel de synthèse.
M. Jacques Oudin, rapporteur
, après avoir relevé la
diversité des SEM, a souhaité savoir si celles-ci avaient
développé des procédures de contrôle interne de leur
gestion.
Il s'est par ailleurs demandé si les observations formulées par
les chambres régionales des comptes, au moment du jugement des comptes,
n'apparaissaient pas trop tardives pour remédier à
d'éventuels dysfonctionnements.
En réponse,
M. Camille Vallin
a indiqué que sa
fédération avait élaboré un code de
déontologie des SEM et qu'une commission de déontologie examinait
les mesures à prendre pour celles d'entre elles qui ne respecteraient
pas les règles contenues dans ce code. Il a, en outre
précisé, que les SEM pouvaient adhérer à une
procédure d'auto-contrôle mise en place par la
fédération et que désormais l'adhésion à
celle-ci entraînait automatiquement l'adhésion à cette
procédure.
M. Camille Vallin
a en outre fait valoir que la FNSEM avait
réalisé de gros efforts de formation à destination des
élus et des personnels des SEM, notamment par l'organisation de stages.
Il a indiqué que des vérifications étaient faites,
notamment au regard des règles déontologiques, sur le
fonctionnement des SEM qui demandaient d'adhérer à la
fédération.
Après avoir souligné que la FNSEM insistait auprès de ses
adhérents sur les conditions de création des SEM, il a
indiqué qu'elle avait mis en place un observatoire national sur le
fonctionnement des SEM d'aménagement qui informait notamment celles-ci
sur les normes nationales à respecter. Il a relevé
également l'existence d'un observatoire des SEM de services.
Puis
M. Camille Vallin
a précisé que la FNSEM souhaitait
une adaptation du dispositif issu de la loi du 7 juillet 1983.
Soulignant que la législation relative aux SEM était complexe,
M. Camille Vallin
a fait observer que les chambres
régionales des comptes ne faisaient pas toujours la différence
nécessaire parmi les règles applicables entre celles relevant du
droit public et celles de droit privé, en privilégiant nettement
les premières sur le secondes.
M. Camille Vallin
a par ailleurs précisé que les SEM
souhaitaient une clarification de leurs relations financières avec les
collectivités locales.
Enfin, s'agissant du contrôle des SEM par les collectivités
locales, il a souhaité que le compte rendu d'activité annuel soit
désormais obligatoirement adopté par l'assemblée
délibérante de la collectivité concernée.
M. Maxime Peter, directeur général de la FNSEM
, a
indiqué que la fédération avait mis au point des guides
méthodologiques à destination de ses adhérents.
Il a précisé que deux guides de comptabilité
étaient destinés aux SEM immobilières et aux SEM
d'aménagement afin de faciliter les contrôles de l'actionnaire et
permettre à celui-ci d'évaluer les risques qu'il prenait. Il a
relevé que ces guides soulignaient les obligations de communication et
de contrôle qui étaient imposées aux SEM. Il a ainsi fait
valoir que les SEM étaient très contrôlées
puisqu'elles cumulaient des contrôles résultant du droit public
avec ceux résultant du droit privé.
Puis, soulignant à son tour la complexité du droit applicable aux
SEM,
M. Maxime Peter
a fait observer que la jurisprudence
était confuse, notamment pour ce qui était des relations entre la
SEM et la collectivité actionnaire.
Après avoir relevé que chaque chambre régionale des
comptes établissait sa propre doctrine en fonction de laquelle elle se
prononçait,
M. Maxime Peter
a regretté
l'hétérogénéité des observations
présentées par les chambres régionales des comptes.
Répondant à
M. Jacques Oudin, rapporteur
, le rapporteur
général de la fédération a précisé
que les guides méthodologiques proposaient en matière de
communication et de contrôle des formules types, en particulier pour
l'élaboration d'un rapport de synthèse qui reprenait l'ensemble
des obligations de communication. Il a fait observer que les mesures de
contrôle interne conseillées par la FNSEM étaient bien
comprises par les SEM.
M. Robert Pagès,
faisant part de ses réserves sur une
telle procédure, a souhaité connaître la position de la
fédération sur l'idée de permettre une saisine
préalable des chambres régionales des comptes par les
collectivités locales.
En réponse,
M. Camille Vallin
, après avoir souligné
la volonté de transparence et de compréhension réciproque
qui animait les SEM, a néanmoins considéré qu'une telle
procédure risquerait d'aboutir au rétablissement du
contrôle a priori.
M. Maxime Peter
a estimé que cette procédure reviendrait
à faire jouer par les chambres régionales des comptes, à
la fois le rôle du juge et celui de la partie mise en cause, les chambres
risquant en outre d'être liées par l'avis préalable
qu'elles auraient délivré.
Faisant néanmoins valoir que les SEM avaient besoin d'une assistance
pour la mise en place de procédures de contrôle interne,
M.
Maxime Peter
a considéré que les chambres régionales
des comptes pourraient jouer un rôle utile dans la mise en place de
telles procédures.
M. Jean-Paul Amoudry
,
président
, a souhaité que le
groupe de travail puisse avoir communication d'exemples de contrôles
opérés par les chambres régionales des comptes sur les SEM
qui paraîtraient relever de la pure opportunité.
Il s'est en outre demandé si les collectivités locales
disposaient de moyens suffisants pour contrôler les SEM et
apprécier les risques financiers qu'elles encouraient.
En réponse,
M. Camille Vallin
a de nouveau souligné que
plusieurs chambres régionales des comptes semblaient mettre en cause
purement et simplement le principe même d'un recours à la formule
de la SEM.
S'agissant du contrôle opéré par les collectivités
locales, il a estimé que le dispositif actuel n'était pas
satisfaisant. Il a, en conséquence, renouvelé sa proposition
tendant à ce que les collectivités locales approuvent le compte
rendu d'activité des SEM.
M. Maxime Peter
, revenant sur la frontière entre le
contrôle de gestion et le contrôle d'opportunité, a
considéré qu'il pourrait être difficile de délimiter
précisément les cas dans lesquels la chambre régionale des
comptes, excédant ses compétences, une procédure d'appel
devant la Cour des Comptes devrait pouvoir être mise en oeuvre.
Il a suggéré que les comptes rendus annuels d'activité des
SEM soient non seulement approuvés par la collectivité locale
mais en outre certifiés par le commissariat aux comptes de la SEM.
En réponse à
M. Jean-Paul Amoudry
,
président
, qui souhaitait savoir quelle avait été
la place de la question des contrôles dans la concertation mise en oeuvre
par le précédent Gouvernement sur une réforme de la loi du
7 juillet 1983,
M. Maxime Peter
a indiqué que la question des
relations financières entre la collectivité locale et la SEM
avait eu une place importante dans cette concertation et que les propositions
formulées par la FNSEM avaient reçu un accueil favorable. Il a
précisé que le nouveau Gouvernement avait été saisi
de ces propositions.
M.
Pierre ROCCA
Conseiller à la chambre régionale des comptes de
Provence-Alpes-Côte d'Azur
Président de l'association
professionnelle des magistrats de chambres régionales des comptes
M. Dominique DELARUE
Conseiller à la chambre régionale des
comptes de Bourgogne
Mardi 1
er
juillet 1997
M.
Pierre Rocca
a, tout d'abord, souligné la très forte
représentativité de l'association professionnelle des magistrats
de chambres régionales des comptes, à laquelle adhèrent
plus de 80 % des 320 magistrats effectivement en fonction au sein des
juridictions financières.
Puis, il a rappelé que le corps des magistrats de chambres
régionales des comptes avait été constitué
très rapidement après la création des chambres
régionales des comptes en 1982.
A cet égard, il a souligné que le recrutement initial des
magistrats avait été caractérisé par l'importance
du nombre de fonctionnaires en provenance de la direction de la
comptabilité publique et plus largement des directions du
ministère des finances.
M. Pierre Rocca
a ensuite indiqué que ce recrutement
s'était depuis lors diversifié et que plus de 20 % des effectifs
du corps des magistrats de chambres régionales des comptes était
aujourd'hui issu de l'école nationale d'administration. Sur ce point, il
a enfin noté que l'évolution de l'origine professionnelle des
magistrats de chambres régionales des comptes avait permis au corps de
passer d'une "monoculture comptabilité publique" à une culture
juridique et financière variée qui constituait une richesse
à préserver.
M. Pierre Rocca
a ensuite indiqué que l'action des chambres
régionales des comptes était très largement reconnue et
appréciée tant par les citoyens que par les élus.
Il a cependant admis que l'exercice de la mission du contrôle financier
s'exerçait dans un contexte général de "complexification"
du droit dont la portée dépassait largement les seules
juridictions financières.
S'agissant de la mise en oeuvre par les chambres de leurs pouvoirs,
M. Pierre Rocca
a insisté sur la spécificité
que constituait l'autosaisine de plein droit des comptes publics suivie de
jugements ou d'observations publiques faisant suite à un examen de la
gestion, qui débouchent par nature sur la mise en évidence de
certaines irrégularités ou défaillances.
M. Pierre Rocca
a estimé que de tels pouvoirs exigeaient, de la
part des magistrats chargés de les exercer, "compétence,
probité et impartialité". Il a précisé que ces
pouvoirs étaient mis en oeuvre avec pondération et que l'exercice
du contrôle financier avait largement dépassé les "erreurs
de jeunesse" qui lui avaient été reprochées en 1987.
M. Pierre Rocca
a ensuite constaté que la prolifération
des normes et l'insuffisante formation juridique des élux locaux
étaient souvent à l'origine des problèmes
rencontrés. A cet égard, il a noté que l'exercice du
contrôle de légalité se heurtait à de réelles
difficultés.
Il a ensuite relevé le problème posé par l'absence de
structures intercommunales habilitées à fournir un conseil
juridique. Sur ce point, il a souligné l'échec que
représentait l'absence de mise en oeuvre de l'article 32 de la loi du 2
mars 1982 qui permettait de créer des agences départementales
chargées d'apporter aux collectivités locales du
département une assistance d'ordre technique, juridique ou financier.
Admettant l'existence de l'important besoin de sécurité juridique
des élus locaux,
M. Pierre Rocca
a précisé que les
différentes modifications envisageables n'étaient pas
nécessairement de nature législative.
S'agissant des missions dévolues aux chambres régionales des
comptes,
M. Pierre Rocca
a tout d'abord noté que la
tâche "historique" du jugement des comptes pouvait être
modernisée, mais qu'elle n'était pas en elle-même une
source de difficultés. Il a cependant noté qu'un consensus
semblait se dégager au sujet d'une suppression éventuelle du
caractère automatique de la sanction d'inéligibilité
applicable en cas de gestion de fait. Il a cependant précisé que
cette sanction ne s'appliquait qu'en l'absence de régularisation dans un
délai de six mois, tout en admettant que ce délai d'apurement
s'avérait souvent insuffisant.
S'agissant de l'examen de la gestion,
M. Pierre Rocca
a souligné
que cette mission constituait un héritage en provenance de la Cour des
Comptes. Il a souligné que l'exercice de cette mission constituait un
apport fondamental pour la démocratie locale puisqu'elle
répondait à l'attente des citoyens en contribuant à
accroître la transparence de la gestion publique locale.
M. Pierre Rocca
a cependant précisé que cette mission ne
pouvait s'exercer sans que de larges garanties soient reconnues aux personnes
concernées par l'examen de la gestion, tout en soulignant que cet examen
ne constituait pas une procédure juridictionnelle.
S'agissant de la mise en oeuvre de l'examen de la gestion,
M. Pierre
Rocca
a tout d'abord souligné la nécessité pour les
chambres régionales des comptes de pouvoir garantir une
égalité de traitement entre les différentes
collectivités. Il a souligné qu'un important effort avait
été engagé à cette fin par la Cour des Comptes et
qu'une commission des méthodes avait été chargée de
veiller à l'harmonisation des procédures d'investigation. Puis,
il a noté que la hiérarchie existant au sein du ministère
public constituait un gage pour l'unité de la "jurisprudence" des
juridictions financières locales. Il a ajouté que cet effort
d'unification se traduisait aussi par la conduite d'enquêtes
"inter-chambres". Il a cependant admis que de nombreux progrès restaient
encore à accomplir pour compléter cet effort d'harmonisation. Il
a noté que ces progrès seraient favorisés par un
renforcement de la formation des magistrats et par le développement de
la concertation entre les juridictions financières locales.
M. Pierre Rocca
a ensuite relevé que les seuils introduits par la
loi du 5 janvier 1988 n'avaient pas été
révisés depuis le vote de ce texte. Il a précisé
que de ce fait sur les 32.000 communes qui avaient été, à
l'époque, soustraites à la juridiction des chambres
régionales des comptes pour être soumises à l'apurement
administratif exercé par les trésoriers payeurs
généraux, seules 29.000 relevaient de cette dernière
procédure.
Il a, par ailleurs, relevé qu'un certain nombre de comptabilités,
comme celles des 19.000 associations foncières rurales et associations
syndicales agricoles et des 8.000 établissements publics d'enseignement,
continuaient à relever du contrôle des chambres régionales
des comptes sans que leur importance ne le justifie.
M. Pierre Rocca
a ensuite analysé le contrôle
budgétaire, dernière mission exercée par les chambres
régionales des comptes. Il a souligné que ce contrôle
constituait une contrepartie naturelle de la décentralisation et a
précisé qu'il s'exerçait de façon "contemporaine"
par rapport au vote du budget des collectivités locales. Il a
relevé que cette mission s'était enrichie puisque son exercice
dépassait les limites du seul contrôle budgétaire pour
s'approcher d'une mission d'audit permettant aux chambres de donner un avis aux
préfets sur les conventions de marché et de
délégation de service public.
S'agissant de l'extension aux collectivités locales des facultés
de saisine pour avis des chambres régionales des comptes ouvertes aux
préfets,
M. Pierre Rocca
a relevé l'existence d'un certain
"consensus administratif". Il a cependant relevé la difficulté
qui pourrait exister à déterminer la nature de l'autorité
qui pourrait prendre l'initiative de cette saisine, selon qu'il s'agisse de
l'assemblée délibérante ou de l'ordonnateur.
Il a ensuite insisté sur la nécessité de délimiter
précisément les domaines dans lesquels cette fonction
consultative des chambres régionales des comptes pourrait s'exercer. Il
a souhaité que cette fonction corresponde au domaine d'expertise des
chambres et porte notamment sur les montages complexes, sur les marchés
d'entreprise de travaux publics ou encore sur les délégations
pour recouvrement de recettes par des tiers.
Il a considéré qu'une mission de conseil plus large des chambres
régionales des comptes n'était "ni souhaitable" ni "possible",
tout en reconnaissant que les chambres fournissaient souvent un "conseil de
proximité" informel. A cet égard,
M. Pierre Rocca
a
rappelé que les collectivités locales pouvaient aussi solliciter
des conseils tant auprès des sous-préfets que des comptables du
Trésor.
Par ailleurs, il a insisté sur les difficultés que pourrait
soulever, au regard du droit européen, le fait de confier à une
institution de contrôle des tâches relevant d'une fonction de
conseil. Enfin,
M. Pierre Rocca
a souligné que pour être
efficace, la fonction de conseil devait être pluridisciplinaire et
qu'elle dépassait, en conséquence, le rôle des seules
chambres régionales des comptes. A cette fin, il a suggéré
la création d'un organisme spécifique rattaché au
préfet de région qui serait chargé de cette fonction de
conseil et qui devrait rester indépendant du contrôle de
légalité et du contrôle budgétaire.
S'agissant ensuite de la procédure,
M. Pierre Rocca
a
souligné qu'une trop grande complexité serait de nature à
paralyser l'activité des chambres régionales des comptes. Il a
cependant admis qu'un certain nombre d'améliorations étaient
souhaitables. A cet égard, il a insisté sur
l'intérêt du renforcement de la collégialité des
décisions au sein de chaque chambre qui pourrait notamment être
étendue au choix de la programmation des travaux de la juridiction.
Il a, par ailleurs, estimé qu'il serait possible de confier aux
présidents de section ou aux commissaires du Gouvernement un rôle
plus systématique de contre-rapporteur, prenant ainsi exemple sur le
modèle de la Cour des Comptes.
En réponse à
M. Jacques Oudin
,
rapporteur
, le
président de l'association professionnelle des magistrats de chambres
régionales des comptes a noté qu'il existait un assez large
recoupement entre les préoccupations du groupe de travail et les pistes
de réflexion qu'il avait abordées dans son exposé.
S'agissant de l'éventuelle redéfinition du ressort territorial
des chambres régionales des comptes,
M. Pierre Rocca
a
indiqué qu'il n'y voyait pas d'obstacle de principe à l'exception
du mécontentement que pourrait susciter la suppression des juridictions
dans certaines circonscriptions.
S'agissant du statut des magistrats de chambres régionales des comptes,
M. Pierre Rocca
a insisté sur la nécessité de
renforcer les moyens humains, ainsi que la formation au sein des juridictions
financières. Sur ce point, il a relevé que toutes les
dispositions tendant à renforcer le caractère contradictoire de
la procédure seraient de nature à allonger la durée des
travaux des chambres régionales des comptes .
En ce qui concerne le respect de la confidentialité au cours d'un examen
de la gestion d'une collectivité locale,
M. Pierre Rocca
a fait
remarquer que certains aspects de la procédure pouvaient constituer des
"failles", qu'il s'agisse de l'obligation de communiquer à toute
personne mentionnée les extraits des lettres d'observations provisoires
qui les concernent ou du principe de la transmission de cette lettre, tant
à l'ordonnateur actuel qu'à celui qui était en fonction au
moment des faits.
M. Dominique Delarue, conseiller
à la
chambre régionale
des comptes
de
Bourgogne
, a pour sa part
relevé les
deux grandes tendances qui s'étaient dégagées des travaux
du colloque organisé par la Cour des Comptes, le vendredi 27 juin 1997 :
d'une part, le sentiment d'insécurité juridique
éprouvé par les élus, et, d'autre part, le manque de
contrôle de gestion interne des collectivités locales. Sur ce
dernier point, il a signalé que la suppression des "comptables internes"
des collectivités locales avait été décidée
par la loi du 14 septembre 1941. Il a ensuite regretté la faible
implication du réseau de la comptabilité publique dans le conseil
aux collectivités locales. Il a ensuite souligné que la
quasi-totalité des lettres d'observation définitives
étaient de nature à rendre service aux élus et que ce
rôle s'apparentait à un audit informel exercé au
bénéfice des collectivités locales. Il a enfin
souligné qu'il convenait de relativiser les difficultés qui
avaient pu surgir à l'occasion de l'examen de la gestion.
M. Yann Gaillard
a pour sa part souligné les difficultés
spécifiques rencontrées par le contrôle financier dans les
DOM-TOM. Il s'est, par ailleurs, inquiété de la
sévérité relative des chambres régionales des
comptes dans l'exercice de la mise en débet.
En réponse,
M. Pierre Rocca
a reconnu les difficultés
particulières rencontrées dans les DOM-TOM, puis il a
souligné qu'il n'y avait que 200 jugements de mise en débet pour
66.000 comptes rendus sur les comptes. Il a précisé que
l'exercice de ce pouvoir avait une vocation "pédagogique". Il a enfin
suggéré une "piste" pour la modernisation du jugement des comptes
en suggérant de substituer des amendes, dont le montant est forfaitaire,
au débet dont le montant est proportionnel à la faute.
M.
Michel GONNET
Directeur de la comptabilité publique au
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie
Mardi 16 septembre 1997
M.
Michel Gonnet
a tout d'abord rappelé que les relations du
réseau de la comptabilité publique avec les chambres
régionales des comptes se situaient quasi exclusivement sur le terrain
juridictionnel.
A cet égard, il a précisé que ses services
n'étaient pas impliqués dans les domaines du contrôle
budgétaire et de l'examen de la gestion. Il a indiqué cependant
que les comptables publics étaient tenus de déférer aux
demandes qui leur étaient adressées par les magistrats des
chambres régionales des comptes, qu'il s'agisse des statistiques
concernant les finances locales ou d'éléments d'information
objectifs sur la situation financière d'une collectivité.
M. Michel Gonnet
a ensuite traité de l'apurement administratif
des comptes auquel sont soumises la plupart des communes.
Sur ce point, il a rappelé que la loi du 5 janvier 1988 avait
confié cette compétence aux comptables supérieurs du
Trésor que sont les trésoriers payeurs généraux et
les receveurs particuliers des finances pour les comptes des communes et des
groupements de communes dont la population n'excède pas
2.000 habitants et dont le montant des recettes ordinaires figurant au
dernier compte administratif est inférieur à 2 millions de
francs.
Soulignant que l'exercice de cette compétence excluait toute approche
subjective, il a considéré que la réforme
opérée en 1988 avait institué un partage des tâches
adapté à la réalité entre les comptables
supérieurs du Trésor et les chambres régionales des
comptes, sous réserve du droit d'évocation dont disposent ces
dernières.
M. Michel Gonnet
a ensuite décrit la mise en état d'examen
des comptes des collectivités locales par les comptables publics,
rappelant qu'il s'agissait là d'une activité administrative
destinée à vérifier le respect des règles formelles
de présentation, la régularité et la
sincérité des comptes ainsi que la cohérence entre le
compte de gestion et le compte administratif.
A cet égard,
M. Michel Gonnet
a souligné que les
32.000 comptes en provenance du secteur public local représentaient
près du tiers des comptes déposés rendus par les
comptables du secteur public local appartenant au réseau de la
comptabilité publique. Il a précisé que la gestion du
secteur public local représentait un enjeu stratégique pour sa
direction, dont elle constituait 50 % de la charge de travail, fondant
ainsi l'existence du service public financier de proximité.
Puis, il a indiqué que les critères de répartition des
compétences entre les chambres régionales des comptes et les
comptables publics méritaient d'être actualisés, et en
particulier le critère du seuil monétaire en deçà
duquel une commune ou un groupement de communes relève de l'apurement
administratif, fixé à 2 millions de francs en 1988 et non
révisé depuis cette date.
Sur ce point, il a précisé que près de
600 collectivités entraient, chaque année, dans le champ de
compétence des chambres régionales des comptes, entraînant
ainsi un recul significatif de l'étendue de l'apurement administratif
souhaité par le législateur en 1988.
M. Michel Gonnet
a ensuite souligné l'aspect juridictionnel de
l'apurement administratif indiquant que ce dernier était
caractérisé par la recherche d'une unité de doctrine et
possédait un caractère préventif.
A cet égard, il a insisté sur la volonté des comptables
publics d'éviter des erreurs dans des domaines tels que les restes
à recouvrer, les admissions en non-valeur, les marchés publics ou
les subventions.
Abordant les sanctions de l'apurement administratif,
M. Michel Gonnet
a
rappelé qu'en cas d'irrégularité grave, la
responsabilité des comptables locaux pouvait se trouver engagée.
Il a cependant précisé que, sur les 40.000 observations
adressées chaque année par les comptables supérieurs du
Trésor aux comptables locaux, seules 2.000 d'entre elles
contenaient des injonctions et que les arrêts de charge provisoire
s'avéraient extrêmement rares.
Par ailleurs, il a souligné le caractère pragmatique du
contrôle exercé sur les comptes des plus petites communes. Puis,
il a rappelé qu'avec 55.000 agents répartis dans
4.000 postes comptables, la densité du réseau de la
comptabilité publique favorisait l'exercice d'un rôle de conseil
auprès des collectivités locales.
Insistant sur le caractère hiérarchique de l'administration de la
comptabilité publique et sur l'application de normes précises par
celle-ci,
M. Michel Gonnet
a relevé que les
dysfonctionnements et les lacunes, mis en évidence par l'apurement
administratif, débouchaient sur des actions de fond destinées
à remédier à ces problèmes et notamment sur une
politique de formation associant le cas échéant les
fonctionnaires de la comptabilité publique et les agents des
collectivités locales.
Il a, en outre, indiqué que la direction de la comptabilité
publique entretenait d'excellentes relations avec la direction
générale des collectivités locales du ministère de
l'intérieur. Puis il a souligné que l'apurement administratif
était mis en oeuvre en synergie avec les chambres régionales des
comptes, dont il a rappelé qu'elles disposaient d'un droit
d'évocation sur l'ensemble des comptes locaux. Il a par ailleurs
signalé qu'un "cadrage" des règles et modalités du
contrôle juridictionnel et, par conséquent, de l'apurement
administratif était déterminé chaque année entre
les trésoriers payeurs généraux et les présidents
de chambres régionales des comptes.
Abordant ensuite l'évolution des relations entre le juge financier et
les comptables au niveau local depuis 1982,
M. Michel Gonnet
a tout
d'abord relevé que le "positionnement initial" des comptables publics
avait été "difficile" en raison, notamment, du prononcé
d'amendes par les chambres régionales des comptes à l'encontre
des comptables publics pour retard dans la date de dépôt des
comptes. Il a indiqué, par ailleurs, qu'une divergence
d'appréciation avait existé sur l'étendue de la
responsabilité des comptables publics, celle-ci se limitant pour la
comptabilité publique au contrôle des comptes, tandis que
certaines chambres régionales des comptes estimaient souvent
nécessaire que les comptables procèdent à des
vérifications supplémentaires des dépenses qui participent
en réalité de l'exercice du contrôle de gestion.
A cet égard,
M. Michel Gonnet
a noté que depuis le
rétablissement de l'apurement administratif pour les petites communes,
les relations entre les comptables publics et les chambres régionales
des comptes étaient devenues plus sereines, en raison notamment de
l'intervention de la Cour des Comptes qui avait contribué à
clarifier la situation en infirmant plusieurs décisions des chambres
régionales des comptes concernant la responsabilité des
comptables et en stabilisant ainsi la jurisprudence des chambres en la
matière.
M. Michel Gonnet
a ensuite insisté sur l'importance du rôle
préventif du contrôle des comptes, dont il a souligné la
nécessité, tout en ajoutant que ce dernier aurait pu être
organisé selon d'autres modalités à l'époque du
vote des lois de décentralisation.
M. Michel Gonnet
a alors soulevé deux questions susceptibles de
faire l'objet d'améliorations.
A cet égard, il a tout d'abord signalé l'existence d'une
revendication de certains comptables destinée à obtenir un
assouplissement du régime de leur responsabilité à
laquelle il a déclaré ne pas souscrire. Puis, il a
évoqué le problème du débet sans préjudice
qui intervient lorsque des paiements sans pièces justificatives
suffisantes sont relevés.
Sur ce point, il a indiqué qu'il existait une difficulté pour
déterminer la notion de préjudice et qu'une modification de
nature législative pourrait être envisagée afin de
clarifier cette notion.
Répondant aux questions de
M. Jacques Oudin, rapporteur
, sur les
conséquences de la nouvelle instruction budgétaire et comptable
M. 14,
M. Michel Gonnet
a indiqué que ce nouveau cadre avait
impliqué un renouvellement de l'ensemble des bases du contrôle
exercé par les comptables publics.
Après avoir insisté sur la volonté de la direction de la
comptabilité publique de veiller à l'unité de la doctrine
du contrôle dans l'ensemble du réseau,
M. Michel
Gonnet
a indiqué que des outils informatiques d'analyse de la
"gestion M. 14" avaient été développés.
M. Jacques Oudin, rapporteur
, s'est interrogé sur la
possibilité pour les collectivités locales d'utiliser ces
logiciels d'analyse de gestion et sur leur contribution potentielle au dialogue
entre les comptables publics et les gestionnaires locaux.
Réservé sur l'utilité pour les collectivités
locales de disposer du logiciel d'analyse financière conçu par la
comptabilité publique, il a souligné que les études
réalisées par ses services étaient systématiquement
mises à la disposition des élus accompagnées des
explications nécessaires.
M. Michel Gonnet
a, par ailleurs,
rappelé que les comptables devaient donner aux décideurs locaux
des informations financières fiables et récentes, mais en aucun
cas se substituer aux ordonnateurs.
S'agissant du contrôle de gestion interne des collectivités
locales, le directeur de la comptabilité publique a souligné que
les grandes collectivités disposaient en général de
services financiers compétents et efficaces.
Notant qu'au sein des petites collectivités, dont la population est
comprise entre 2.000 et 5.000 habitants, il était possible de concevoir
quelques opérations simples de contrôle interne ; il a, en
revanche, souligné que des progrès dans ce domaine étaient
possibles au sein des villes moyennes.
S'agissant de l'amélioration des prestations de Conseil assurées
par les comptables publics,
M. Michel Gonnet
a souligné que
celle-ci s'appuierait sur une meilleure synergie entre les trois niveaux de
gestion du secteur public local (trésorier municipal - service
départemental - ou d'arrondissement des collectivités locales -
département des études économiques et financières
de la trésorerie générale de région) et la
rénovation des missions et de l'implantation des recettes des finances.
Par ailleurs, il a évoqué la création d'un pôle
d'expertise économique et financière au niveau
régional : la mission d'expertise économique et
financière qui fédère les compétences des
administrations financières.
M. Jean-Paul Amoudry, président
, s'est ensuite interrogé
sur les enseignements éventuels qui pourraient être tirés
de ces bonnes relations entre comptables publics et gestionnaires locaux pour
la réflexion sur l'action des chambres régionales des comptes.
M. Michel Gonnet
a, tout d'abord, répondu qu'un important
travail de pédagogie et d'information réciproque était
nécessaire, tout en soulignant la nécessité qu'un minimum
de règles communes soit applicable à l'ensemble des chambres
régionales des comptes.
S'agissant enfin de l'attribution d'une fonction de conseil aux chambres
régionales des comptes, le directeur de la comptabilité publique
a considéré qu'elle ne lui paraissait pas souhaitable en raison
d'une part, des moyens limités de ces juridictions et, d'autre part, du
contestable "mélange des genres" qui résulterait de l'exercice
concomitant de fonctions juridictionnelles et consultatives.
M.
Louis ARBELOT
Trésorier-payeur général du
Rhône et de la région Rhône-Alpes
Président de
l'Association des
trésoriers-payeurs généraux
Mardi 16 septembre 1997
Prenant
l'exemple du département du Rhône,
M. Louis Arbelot
a
indiqué que les collectivités locales représentaient
environ 50 à 60 % de la charge de travail des trésoriers-payeurs
généraux. Il a précisé que 6 % des
collectivités locales relevaient du simple apurement administratif
opéré par les comptables supérieurs du Trésor.
M. Louis Arbelot
a ensuite estimé qu'après une
période assez difficile, les relations entre les comptables publics et
les chambres régionales des comptes étaient désormais
stabilisées.
Abordant la question de l'apurement administratif des comptes des
collectivités locales,
M. Louis Arbelot
a rappelé que les
comptables publics agissaient en l'espèce par délégation
des chambres régionales des comptes pour les collectivités de
2.000 habitants au plus et disposant de recettes ordinaires figurant au dernier
compte administratif inférieures à 2 millions de francs.
M. Louis Arbelot
a fait observer qu'en fonction de l'évolution de
leurs recettes ordinaires, certaines collectivités pouvaient d'une
année sur l'autre être soumises alternativement à la
compétence de la chambre régionale des comptes ou à celle
du trésorier-payeur général. Il a souligné que
cette situation avait pour effet de rendre la procédure plus complexe.
Il a en outre relevé que lorsqu'ils étaient de nouveau
compétents, les trésoriers payeurs généraux ne
pouvaient procéder à l'apurement administratif tant que les
comptes des exercices précédents n'avaient pas été
réglés par la chambre régionale des comptes.
M. Louis Arbelot
a en conséquence suggéré de
réformer le régime de l'apurement administratif soit en
supprimant le critère financier, soit en relevant le seuil de 2 millions
de francs prévu par le code des juridictions financières. Il a
néanmoins fait valoir qu'un développement des compétences
des trésoriers-payeurs généraux en matière
d'apurement administratif devrait s'accompagner d'une augmentation des
effectifs mis à leur disposition.
Abordant ensuite la procédure de jugement des comptes par les chambres
régionales des comptes,
M. Louis Arbelot
a
considéré que le dispositif actuel était très
lourd. Tout en estimant que le développement de l'informatique pourrait
accélérer la procédure et réduire les retards dans
le jugement des comptes, il a néanmoins indiqué que dans le
département du Rhône plus de 600 comptes antérieurs
à 1991 n'avaient pas encore été jugés.
Après avoir souligné que cette situation était
gênante pour les comptables qui ne pouvaient pas obtenir quitus de leur
gestion,
M. Louis Arbelot
a fait observer qu'elle nuisait
également à la crédibilité des jugements
vis-à-vis des élus locaux. Il a néanmoins relevé
que certains efforts avaient été entrepris en liaison avec les
commissaires du Gouvernement.
M. Louis Arbelot
a par ailleurs soulevé le problème des
" circuits " de notification en regrettant que certaines
décisions mettant en cause les comptables soient d'abord
communiquées aux élus locaux, ce qui pouvait avoir pour effet de
déstabiliser les comptables concernés.
M. Louis Arbelot
a enfin regretté que les règles de
dissolution de certains groupements de collectivités locales, tels que
les associations foncières de remembrement soient insuffisamment
claires. Il a en effet souligné que la persistance de groupements
n'ayant plus d'activité effective compliquait la tâche des
comptables.
S'intéressant enfin au contrôle budgétaire,
M. Louis
Arbelot
s'est félicité de la procédure en vigueur qui
permettait aux comptables de dissuader efficacement certains élus de
s'engager dans des procédures qui risqueraient de
méconnaître la légalité.
Il a fait part de ses réserves sur l'exercice d'une fonction de conseil
par les chambres régionales des comptes en estimant que l'intervention
de ces juridictions pourrait mettre en cause la relation de confiance qui
caractérisait la réalisation d'analyses financières par
les comptables au profit des élus locaux.
En réponse à
M. Jacques Oudin, rapporteur,
qui
l'interrogeait sur l'idée de supprimer le critère financier
prévu pour l'apurement administratif de certaines collectivités,
M. Louis Arbelot
a fait valoir que, faute d'adaptation du seuil
financier, le maintien des règles en vigueur aurait pour effet de
réduire progressivement le nombre de collectivités soumises
à la procédure d'apurement administratif par les comptables
supérieurs du Trésor.
Il a en outre partagé le souci du rapporteur qui estimait que les
élus locaux et les comptables du Trésor devraient disposer
d'outils informatiques communs. Il a souligné que, contrairement
à ce qui se passait pour la transmission d'informations aux chambres
régionales des comptes, l'utilisation de l'informatique était
courante dans les relations entre les comptables et les ordonnateurs.
M. Louis Arbelot
a en outre indiqué que les
trésoriers-payeurs généraux considéraient qu'ils
étaient bien armés pour exercer une fonction de conseil
auprès des élus locaux. Il a également plaidé pour
une meilleure formation des magistrats des chambres régionales des
comptes.
En réponse à
M. Jean-Paul Amoudry, président
, qui
se demandait si certains enseignements ne devaient pas être tirés
de l'expérience positive du contrôle exercé par les
trésoriers-payeurs généraux pour améliorer le cadre
d'intervention des chambres régionales des comptes,
M. Louis
Arbelot
a fait observer que les chambres régionales des comptes qui
avaient déjà des difficultés à juger des comptes
dans les délais normaux pourraient difficilement assumer une mission
consultative auprès des collectivités locales.
Il a en outre relevé qu'il pouvait être contestable de faire
prendre en charge par un même organe la fonction juridictionnelle et la
fonction consultative. Il a enfin craint que les chambres régionales des
comptes soient dans ce cas excessivement sollicitées par certaines
collectivités locales qui souhaiteraient se prémunir contre toute
sanction juridictionnelle.
En réponse à
M. Jacques Oudin, rapporteur,
qui souhaitait
savoir si les chambres régionales des comptes exerçaient
fréquemment leur droit d'évocation auprès des
trésoriers-payeurs généraux,
M. Louis Arbelot
a
indiqué que ce droit était en pratique peu mis en oeuvre, ce qui
pouvait s'expliquer par la concertation préalable entre les
trésoriers-payeurs généraux et les chambres
régionales des comptes ainsi que par le compte rendu de l'apurement
administratif qui était transmis à ces dernières.
Il a néanmoins fait observer que les trésoriers-payeurs
généraux devaient logiquement susciter la mise en oeuvre de ce
pouvoir d'évocation par les chambres régionales des comptes
lorsqu'ils observaient des situations anormales.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
ayant souhaité savoir si l'analyse
financière d'une collectivité locale établie par les
trésoriers-payeurs généraux était le cas
échéant transmise aux chambres régionales des comptes,
M. Louis Arbelot
a indiqué que les textes prévoyaient la
communication des informations demandées par ces dernières. Il a
néanmoins jugé préférable que la chambre
régionale des comptes demande elle-même ces documents à la
collectivité concernée, laquelle en avait la
propriété.
Puis
M. Louis Arbelot
, s'agissant des "circuits " de notification,
a précisé que la situation qu'il avait décrite
était désormais en voie d'amélioration.
Il a par ailleurs partagé l'analyse du rapporteur, selon laquelle la
décentralisation entrait désormais dans une phase de
stabilisation de la fiscalité locale et de la croissance des budgets.
Répondant à
M. Jean-Paul Amoudry, président
, le
président de l'association des trésoriers payeurs
généraux a précisé qu'après une
première phase où la très forte augmentation des
dépenses de personnel constituait la préoccupation essentielle,
désormais deux domaines retenaient particulièrement l'attention
des comptables publics : les associations et les marchés publics.
M. Louis Arbelot
a en particulier indiqué qu'un gros travail de
formation des comptables avait été accompli en matière de
marchés publics. Il s'est par ailleurs interrogé sur
l'opportunité d'appliquer dans ce domaine des règles uniformes
à des collectivités de tailles très différentes.
En réponse à
M. Jacques Oudin, rapporteur,
qui soulignait
la bonne adéquation du réseau des comptables publics à
l'exercice d'une fonction de conseil,
M. Louis Arbelot
a fait
valoir que cette fonction devrait s'exercer à un niveau régional,
afin de prendre en compte les contraintes en matière d'effectifs.
M. Philippe de Bourgoing
, relevant la relation de confiance qui existait
entre les comptables publics et les élus locaux, a estimé que la
même confiance n'était pas observée dans les rapports entre
ces derniers et les chambres régionales des comptes.
M. Louis Arbelot
a alors plaidé pour le maintien de la
confidentialité des analyses financières réalisées
par les trésoriers-payeurs généraux, cette
confidentialité lui apparaissant conforme à la déontologie
et de nature à préserver la qualité du dialogue entre
ceux-ci et les collectivités locales.
M.
Alain SERIEYX
Président de la chambre régionale des comptes de
la région Provence-Alpes-Côte d'Azur
M. Philippe
LIMOUZIN-LAMOTHE
Président de la chambre régionale des comptes
de la région Midi-Pyrénées
M. Roger
COMBEL
Président de la chambre régionale des comptes de
Bretagne
Mardi 23 septembre 1997
M. Alain Serieyx
, soulignant le souci des magistrats
des
chambres régionales des comptes d'accomplir efficacement les missions
que le législateur leur a confiées, a regretté que ces
missions ne soient pas clairement précisées.
Après avoir rappelé que les principales missions des chambres
régionales des comptes étaient inscrites dans le code des
juridictions financières adopté par le Parlement en
décembre 1994,
M. Alain Serieyx
a estimé que leur
mission essentielle de juger les comptes des collectivités locales et
des établissements publics dotés d'un comptable public
était devenue assez fictive. Il a en effet souligné que cette
mission n'était pas suffisamment adaptée pour, au-delà de
l'examen de la simple exécution budgétaire, rendre compte de
l'état économique et patrimonial de la collectivité.
M. Alain Serieyx
a par ailleurs regretté que le ministre des
finances intervienne de plus en plus sur requête d'un comptable mis en
débet afin de relever celui-ci de sa responsabilité
financière. Il a fait observer que le ministre des finances
s'exonérait ainsi de dispositions définies en 1964 qui lui
imposaient de se substituer au comptable ou d'obtenir l'agrément de la
collectivité locale afin de considérer que l'Etat n'était
pas débiteur à l'égard de celle-ci.
Puis, énonçant la deuxième grande mission exercée
par les chambres régionales des comptes consistant à s'assurer de
la régularité des opérations réalisées par
les ordonnateurs,
M. Alain Serieyx
a noté que cette mission
avait pu troubler certains élus locaux qui s'étonnaient de voir
mise en cause la régularité d'actes non contestés par le
contrôle de légalité.
M. Alain Serieyx
a ensuite exposé que la troisième
grande mission des chambres régionales des comptes, consistant à
examiner la gestion des collectivités locales, semblait soulever le plus
de controverses.
Il a fait observer que n'existait aucune définition précise du
contenu de cet examen de la gestion, pas plus que de la notion
d'opportunité qu'il n'appartenait pas aux chambres régionales des
comptes de contrôler.
M. Alain Serieyx
a souligné que cette question était
compliquée par le fait que le contrôle opéré par les
chambres régionales des comptes ne reproduisait pas purement et
simplement celui effectué par la Cour des Comptes.
Après avoir rappelé que la Cour des Comptes contrôlait la
gestion de hauts fonctionnaires responsables d'administrations centrales ou
d'établissements publics et que ce contrôle restait confidentiel,
M. Alain Serieyx
a fait observer qu'à l'inverse, les
chambres régionales des comptes contrôlaient le plus souvent la
gestion d'élus et que la loi du 15 janvier 1990 avait prévu
que leurs observations sur la gestion devaient être rendues publiques.
Relevant que ces observations ne constituaient pas des actes faisant grief et
ne modifiaient pas la situation juridique des collectivités locales ni
les situations mises en cause,
M. Alain Serieyx
a néanmoins
souligné qu'elles avaient un poids politique considérable.
Il a donc regretté l'absence d'indications précises sur les
intentions du législateur lorsque celui-ci avait prévu l'examen
de la gestion des collectivités locales par les chambres
régionales des comptes et la publicité des observations
opérées par ces dernières.
M. Alain Serieyx
a fait valoir que dans ces conditions, les
chambres régionales des comptes avaient été amenées
à utiliser les méthodes de la Cour des Comptes consistant
à rechercher les dysfonctionnements de la gestion des
collectivités locales.
Notant que chaque observation de la chambre régionale des comptes
aboutissait à mettre en cause certains aspects de la gestion des
collectivités locales,
M. Alain Serieyx
a
considéré que cette pratique expliquait le sentiment de malaise
parfaitement compréhensible des élus concernés.
En conclusion, il a donc souhaité que les intentions du
législateur soient davantage précisées.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
, après avoir souscrit à ces
analyses, a estimé que les conditions d'intervention des chambres
régionales des comptes pourraient être améliorées
sous trois aspects.
En premier lieu, considérant que le contrôle des chambres
régionales des comptes devrait être mieux compris,
M. Philippe
Limouzin-Lamothe
a fait valoir que certains progrès étaient
possibles sans qu'il soit nécessaire de modifier les textes en vigueur.
D'une part, il a proposé que les observations des chambres
régionales des comptes soient motivées par la mention non
seulement des textes concernés mais aussi des principes
généraux sur lesquels ces observations étaient
fondées. D'autre part, il a suggéré qu'en liaison avec les
associations d'élus, des références communes puissent
être progressivement établies. Enfin, tout en considérant
qu'il serait difficile de confier aux chambres régionales des comptes
une fonction de conseil, il a néanmoins estimé qu'il fallait leur
laisser la faculté de donner ponctuellement leur avis sur des questions
intéressant les collectivités locales.
En second lieu, jugeant que le contrôle exercé par les chambres
régionales des comptes devrait être plus efficace,
M. Philippe
Limouzin-Lamothe
a souligné qu'il serait nécessaire
d'approfondir le dialogue préalable entre ces juridictions et les
élus locaux qui permettait bien souvent de régulariser certains
aspects de la gestion locale avant même la conclusion de l'examen de la
gestion. Il a fait observer qu'une fois cette régularisation faite, la
formulation d'observations pouvait devenir inutile.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a par ailleurs estimé que la
procédure contradictoire devrait être aménagée, afin
notamment de conférer à l'examen de la gestion un
caractère plus collégial. Il a en outre suggéré que
l'entretien avec l'ordonnateur puisse intervenir dès le début de
la procédure de contrôle et s'effectuer avec la formation
collégiale de la chambre régionale des comptes.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a enfin plaidé pour que les lettres
d'observations définitives ne se bornent pas à émettre des
critiques mais formulent également des suggestions, lesquelles
pourraient ensuite faire l'objet d'un suivi par les juridictions.
Puis,
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a fait valoir que le contrôle
exercé par les chambres régionales des comptes devrait susciter
des débats mais pas des controverses. Soulevant le problème de la
confidentialité, il a relevé que la loi imposait la communication
des observations définitives à plusieurs destinataires, lesquels
pouvaient avoir des intérêts contradictoires. Dans ces conditions,
il a souligné que ce problème échappait très
largement aux chambres régionales des comptes.
Estimant qu'il pourrait être envisageable d'ouvrir une action commune
devant les tribunaux à la collectivité locale concernée et
à la chambre régionale des comptes en cas de divulgation des
observations, il a néanmoins relevé que dans ce cas, il
conviendrait que la loi autorise la chambre régionale des comptes
à ester en justice.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
, après avoir rappelé que les
lettres d'observations définitives devaient être obligatoirement
jointes à la convocation de l'assemblée
délibérante, a fait observer que la communication écrite
était d'ores et déjà obligatoire. Il a néanmoins
relevé qu'un débat sur ces observations n'était pas
formellement imposé et qu'il appartenait à l'assemblée
délibérante et à son président de l'organiser, le
cas échéant.
S'agissant de la publicité des lettres d'observations
définitives,
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a fait valoir
qu'une fois ces lettres transmises à l'assemblée
délibérante, la chambre régionale des comptes était
tenue de répondre aux demandes de communication de ces observations
présentées par des tiers.
Relevant enfin la suggestion d'annexer la réponse de l'ordonnateur aux
lettres d'observations définitives,
M. Philippe Limouzin-Lamothe
,
après avoir rappelé qu'une telle procédure était
appliquée pour le rapport public de la Cour des Comptes, a fait valoir
que son extension aux lettres d'observations définitives pourrait
être plus complexe en raison de la pluralité des destinataires. Il
a considéré qu'en toute hypothèse, des délais
devraient être fixés pour la formulation des réponses de
l'ordonnateur afin d'éviter le blocage de la parution des lettres
d'observations définitives.
M. Roger Combel,
examinant les moyens d'assurer une plus grande
confidentialité des lettres d'observations définitives, s'est
interrogé sur le fondement d'une éventuelle action publique en la
matière.
Il a en outre souligné que le problème était plus
délicat lorsque la divulgation de ces observations était le fait
de leur destinataire, celui-ci étant propriétaire desdites
observations et bénéficiant en outre de la protection des
correspondances.
M. Roger Combel
a par ailleurs considéré qu'il n'y avait
aucune raison de s'opposer à la publication des réponses de
l'ordonnateur si ce n'est, le cas échéant, pour des raisons
pratiques en raison du volume de certaines réponses.
Il a cependant noté que les échanges de réponses entre
tous les destinataires étaient susceptibles d'alourdir les
procédures et d'accroître les délais. Dans ces conditions,
il s'est demandé s'il ne pourrait pas être envisagé de
publier le compte rendu des débats de l'assemblée
délibérante en même temps que les lettres d'observations
définitives.
Puis, rappelant qu'une réflexion était en cours sous
l'égide de la Cour des Comptes afin d'harmoniser les pratiques des
chambres régionales des comptes,
M. Roger Combel
a fait
valoir que les critiques émises à l'encontre d'un manque de
cohérence de l'action de ces juridictions financières
méritaient d'être tempérées.
M. Roger Combel
a en outre fait observer que la parution des lettres
d'observations définitives constituait un exercice de communication
difficile dans la mesure où celles-ci étaient utilisées
par une pluralité de destinataires qui les interprétaient chacun
à leur façon.
Enfin,
M. Roger Combel
, après avoir indiqué que les
demandes d'avis présentées aux chambres régionales des
comptes étaient de plus en plus fréquentes, a estimé que
ces juridictions ne pourraient exercer une fonction de conseil sans perdre leur
indépendance. Il a néanmoins rappelé que l'exercice du
contrôle était un moment privilégié du dialogue
entre la juridiction et la collectivité concernée.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
relevant que peu de critiques
étaient émises à l'encontre de l'apurement administratif
exercé par les comptables supérieurs du Trésor, a
souhaité savoir si les critères fixés par la loi pour
l'application de cette procédure paraissaient satisfaisants.
Le rapporteur, rappelant par ailleurs que le Conseil d'Etat ne s'était
pas encore prononcé sur le point de savoir si les lettres d'observations
définitives constituaient des actes faisant grief, s'est
interrogé sur les conséquences éventuelles d'une
jurisprudence administrative qui, reconnaissant à ces documents ce
caractère, aurait pour effet de soumettre les chambres régionales
des comptes au contrôle du Conseil d'Etat.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
s'est ensuite demandé si les
réflexions menées à l'instigation de la Cour des Comptes
avaient d'ores et déjà produit des résultats concrets au
sein des chambres régionales des comptes. Il a souhaité savoir si
le rôle de la mission d'inspection des chambres régionales des
comptes méritait d'être renforcé.
Puis il a interrogé les intervenants sur l'opinion dominante dans les
chambres régionales des comptes en ce qui concerne l'exercice
éventuel par ces juridictions d'une fonction de conseil.
Enfin, il a souhaité connaître leur appréciation sur
l'instauration d'un délai pendant lequel la parution de lettres
d'observations définitives serait suspendue dans les périodes
précédant une élection.
En réponse,
M. Alain Serieyx
, après avoir rappelé
que l'apurement administratif ne concernait que les jugements des comptes des
comptables publics et non pas des ordonnateurs, a estimé que cette
procédure était mise en oeuvre dans des délais très
brefs et de manière peu rigoureuse. Il a indiqué que les seuils
prévus par la loi du 5 janvier 1988 avaient pour effet de soumettre
à la procédure de l'apurement administratif des communes
d'environ 300 habitants. Il a souligné que d'une année sur
l'autre, ces communes pouvaient être alternativement soumises à la
juridiction des chambres régionales des comptes ou à l'apurement
administratif par les comptables supérieurs du Trésor, ce qui lui
est apparu source de confusion.
M. Alain Serieyx
a en conséquence proposé de ne retenir
qu'un critère de population avec pondération, critère qui
n'évoluerait qu'à l'occasion des recensements. Il a en outre
suggéré de ne plus soumettre à la chambre régionale
des comptes les associations syndicales autorisées, lesquelles
n'étaient pas des établissements publics dépendant des
collectivités locales mais des structures sui generis.
Examinant ensuite les conditions de recours contre les lettres d'observations
définitives,
M. Alain Serieyx
a précisé que le
Conseil d'Etat, saisi en appel d'un rejet de recours fait par le tribunal
administratif de Marseille, n'avait pas à ce jour tranché cette
question. Il a relevé que si le Conseil d'Etat décidait que les
lettres d'observations définitives constituaient des actes faisant
grief, cette jurisprudence trouverait à s'appliquer pour un grand nombre
de documents administratifs émis par des organismes administratifs ou
juridictionnels sans que la haute juridiction dispose, dans tous les cas, des
moyens techniques d'examiner lesdits documents.
M. Alain Serieyx
a néanmoins jugé qu'il serait normal que
la juridiction administrative exerce son contrôle sur les
procédures mises en oeuvre par les chambres régionales des
comptes. Il a rappelé que jusqu'à présent le Conseil
d'Etat considérait que ne faisaient grief que les décisions
susceptibles de modifier l'ordonnancement juridique.
S'agissant du bilan des réflexions menées par la Cour des
Comptes,
M. Alain Serieyx
, tout en relevant que ces
réflexions étaient encore récentes, a néanmoins
indiqué que les chambres régionales des comptes avaient
commencé à examiner les moyens de mettre en oeuvre les
orientations ainsi retenues.
Jugeant par ailleurs souhaitable de renforcer le rôle de la mission
d'inspection des chambres régionales des comptes, il a néanmoins
fait observer que celle-ci ne disposait pas à l'heure actuelle des
moyens adaptés. Il a en outre noté que la difficulté
essentielle résidait dans le fait que certaines pratiques étaient
relevées par certaines chambres régionales des comptes mais pas
par d'autres.
M. Alain Serieyx
a en outre considéré qu'il serait
envisageable d'étendre aux élus locaux la faculté de
saisir aux fins de consultation directement les chambres régionales des
comptes dans des domaines limités. Il a néanmoins
réaffirmé qu'il serait contradictoire de faire exercer par un
même organe une fonction de conseil et une activité de
contrôle.
Répondant à
M. Patrice Gélard
qui faisait observer
que le Conseil d'Etat lui-même accomplissait à la fois une mission
de conseil et une mission juridictionnelle,
M. Alain Serieyx
a
noté que ces deux missions étaient mises en oeuvre par des
sections distinctes au sein de la haute juridiction.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a pour sa part souligné que la
fonction consultative du Conseil d'Etat s'exerçait à l'intention
d'autorités dotées du pouvoir réglementaire.
Relevant par ailleurs que les juridictions administratives étaient
saisies de questions de droit particulier,
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a fait valoir que l'exercice d'une fonction consultative était plus
difficilement envisageable dans des domaines non codifiés par le droit
et qui pouvaient se rattacher à des questions très larges.
Il a en outre fait observer que les préfets interrogeaient la
juridiction administrative sur un acte juridique.
M. Alain Serieyx
a à son tour souligné que les questions
juridiques relevaient de la juridiction administrative et que la réponse
à des questions portant sur la gestion soulevait des difficultés
spécifiques.
M. Roger Combel
, souscrivant à cette appréciation, a fait
valoir que les chambres régionales des comptes ne pouvaient donner un
avis que sur des situations susceptibles d'être considérées
comme une gestion de fait.
M. Patrice Gélard
a alors fait observer que les chambres
régionales des comptes avaient été créées
sans que leur soient donnés les moyens de constituer de
véritables juridictions.
Regrettant l'évaluation insuffisante des effets de la loi,
M. Patrice
Gélard
a estimé qu'un code de procédure des
juridictions financières serait nécessaire afin notamment de
préciser le rôle du rapporteur, les conditions de mise en oeuvre
de la procédure contradictoire, le rôle de la
collégialité ou encore de poser le problème du double
degré de juridiction.
M. Patrice Gélard
a ensuite souhaité que la
synthèse des récentes réflexions de la Cour des Comptes
soit adressée aux collectivités locales.
Enfin, après avoir fait valoir que les chambres régionales des
comptes devaient désormais voir leur rôle reconnu,
M. Patrice
Gélard
a déploré que la presse publie les observations
sur la gestion avant même que les collectivités locales les aient
elle-mêmes reçues et que les réponses des ordonnateurs
soient en revanche rarement publiées. Il a par ailleurs estimé
que les avis émis par ces juridictions sur la gestion des
collectivités locales devraient avoir un rôle pédagogique.
En réponse,
M. Alain Serieyx
a rappelé qu'un décret
du 23 août 1995 avait d'ores et déjà établi un code
de procédure. Il a en outre souligné que des aspects importants
des pratiques des juridictions financières étaient difficilement
codifiables.
M. Alain Serieyx
, soulignant que le travail en équipe
était indispensable, a estimé que la procédure applicable
devant les juridictions administratives qui concernait des jugements
n'était pas transposable à des observations qui portaient sur la
gestion. Il a en outre considéré qu'il serait difficile
d'organiser dans le détail les décisions relevant de la
collégialité. Il a néanmoins fait valoir que la
rédaction des lettres d'observations définitives devait exprimer
la position retenue collégialement.
M. Alain Serieyx
a enfin fait observer que les charges imposées
par la loi aux magistrats des chambres régionales des comptes avaient
été sous-estimées lorsque ce corps avait été
créé.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a fait valoir qu'il ne s'agissait pas
seulement d'améliorer les textes existants mais plutôt de
réviser des procédures qui, en l'état, n'étaient
pas satisfaisantes afin notamment de développer la
collégialité.
M. Roger Combel
a à son tour fait valoir que la transposition des
procédures applicables devant les tribunaux administratifs
n'était pas possible, ces derniers tranchant des litiges en apportant
des solutions juridiques alors que les chambres régionales des comptes
examinaient la gestion.
M. Roger Combel
a en outre estimé que la diversité du
recrutement des magistrats des chambres régionales des comptes avait
constitué un atout pour le corps et que la collégialité
permettait de rendre plus équilibrées les appréciations
portées par un seul magistrat.
M. Philippe Limouzin-Lamothe
a alors de nouveau souhaité que la
collégialité puisse s'exercer dès le début de la
procédure.
M. Henri Collard
a relevé qu'il était possible de
souscrire à la plupart des propositions présentées sans
qu'une modification législative soit toujours indispensable.
Il a par ailleurs relevé que les associations syndicales
autorisées posaient également des problèmes aux
collectivités locales qui n'avaient pas les moyens de les
contrôler. Enfin, il a souligné les différences
d'appréciation d'une chambre régionale des comptes à
l'autre.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
ayant soulevé le problème
des associations à caractère social,
M. Philippe
Limouzin-Lamothe
a indiqué que les chambres régionales des
comptes n'étaient le plus souvent pas compétentes pour
contrôler ces associations dans la mesure où étaient en
cause des prestations de services et non pas des subventions.
M. Philippe de Bourgoing
a fait observer que le contrôle
exercé par les trésoriers payeurs généraux
s'exerçait dans des conditions satisfaisantes dans la mesure où
ceux-ci accomplissaient également une fonction de conseil. Il a en
revanche relevé des cas où le contrôle exercé par
les chambres régionales des comptes relevait de la pure
opportunité.
En réponse,
M. Roger Combel
, tout en reconnaissant que
l'apurement administratif se déroulait dans de bonnes conditions, a
néanmoins fait valoir que ce contrôle était essentiellement
formel. Il a donc estimé qu'il n'était pas comparable avec la
procédure mise en oeuvre par les chambres régionales des comptes.
M. Jean-Paul Amoudry, président,
a pour sa part estimé que
les communes avaient de bonnes relations avec leurs trésoriers qui leur
consacraient suffisamment de temps, ce qui n'était pas en revanche le
cas de l'ensemble des agents du Trésor.
M. Alain Serieyx
a alors considéré que la
comptabilité publique n'avait pas adapté ses moyens au
développement considérable des activités
financières des collectivités locales. Il a notamment
relevé l'insuffisance des effectifs et des moyens informatiques.
M. Alain Serieyx
a ensuite indiqué qu'à l'occasion des
élections municipales de 1995, les chambres régionales des
comptes avaient spontanément décidé de ne pas publier de
lettres d'observations définitives dans un délai de trois mois
précédant les élections.
Relevant que la question se posait à l'approche de nouvelles
échéances électorales,
M. Alain Serieyx
a fait
valoir que des lettres d'observation provisoires pouvaient avoir un impact plus
important dans le débat électoral que des lettres d'observations
définitives. Il a en outre fait observer que la multiplication des
élections pourrait, si un tel délai était
généralisé, avoir pour effet de bloquer toute publication
des lettres d'observations définitives.
S'agissant de la sanction d'inéligibilité qui frappait
automatiquement l'élu reconnu gestionnaire de fait,
M. Alain
Serieyx
a fait valoir, à titre personnel, qu'il était
très gênant pour une chambre régionale des comptes de
prendre une décision de gestion de fait qui la rendait juge non
seulement de la régularité comptable mais aussi du mandat de
l'ordonnateur. Il a fait observer que la gestion de fait transformant
l'ordonnateur en comptable public, les mêmes incompatibilités lui
étaient applicables.
M. Alain Serieyx
, rappelant en outre que passé le délai de
six mois permettant à l'ordonnateur de régulariser sa situation,
le préfet devait procéder à sa révocation, a
considéré que cette disposition était très lourde.
Il a en conséquence suggéré une nouvelle disposition qui
interdirait à l'ordonnateur d'exercer ses fonctions pendant la
période précédant la régularisation de sa situation.
M. Alain Serieyx
a souligné que la gestion de fait n'était
pas infamante mais constituait plus simplement une situation techniquement
inacceptable.
Après avoir souscrit à ces observations,
M. Philippe
Limouzin-Lamothe
a fait observer que la gestion de fait était
incluse dans le délit d'immixion, lequel n'était en pratique plus
appliqué. Relevant que le juge pénal avait pour sa part la
faculté de moduler les peines accessoires, il a plaidé pour que
la gestion de fait ne fasse plus l'objet d'une sanction pénale.
M. Roger Combel
, indiquant qu'un consensus existait parmi les magistrats
des chambres régionales des comptes pour s'abstenir de publier des
lettres d'observations définitives dans la période
précédant une élection, a estimé que cette
procédure devrait être de nouveau appliquée pour les
prochaines échéances électorales. Il s'est demandé
si elle ne devrait pas être étendue aux lettres d'observations
provisoires.
Répondant à
M. Jean-Paul Amoudry, président, M.
Philippe Limouzin-Lamothe
a indiqué que dans de nombreux cas, les
situations susceptibles d'être qualifiées de gestion de fait
n'étaient pas déclarées comme telles par les chambres
régionales des comptes car leurs conséquences n'apparaissaient
pas graves et la régularité comptable pouvait être
rétablie.
Maître Jean ANTAGNAC
Avocat
Jeudi 25 septembre 1997
Tout en
dressant un bilan globalement positif du fonctionnement des chambres
régionales des comptes,
Me Jean Antagnac
a néanmoins fait
valoir qu'il était possible d'améliorer les procédures et
pratiques de ces juridictions financières et de renforcer les garanties
accordées aux élus locaux.
Estimant que les chambres régionales des comptes devaient devenir des
juridictions à part entière,
Me Jean Antagnac
a
jugé nécessaire d'harmoniser le statut de leurs magistrats avec
celui des magistrats des tribunaux administratifs.
Il a par ailleurs relevé que les chambres régionales des comptes
constituaient des juridictions hybrides puisqu'elles étaient
appelées à la fois à juger des comptes et à exercer
une fonction administrative d'examen de la gestion.
Puis,
Me Jean Antagnac
a fait valoir que les chambres régionales
des comptes apparaissaient encore comme des services déconcentrés
de la Cour des Comptes.
Me Jean Antagnac
a relevé qu'à la différence des
présidents de tribunaux administratifs, les présidents des
chambres régionales des comptes n'étaient pas issus de la
juridiction elle-même mais de la Cour des Comptes. Il a en
conséquence regretté cette situation, la Cour des Comptes
exerçant par ailleurs une fonction d'appel sur les jugements des
chambres régionales des comptes. Il a en outre fait observer que les
présidents des chambres régionales des comptes n'avaient ainsi
pas le même statut que les autres magistrats notamment en ce qui concerne
le régime des incompatibilités.
Me Jean Antagnac
a alors plaidé pour que le statut des magistrats
des chambres régionales des comptes s'impose à tous les
magistrats de ces juridictions et pour que les chambres régionales des
comptes suivent leur juge de cassation et soient désormais
gérées par le ministère de la justice et non plus par le
ministère des finances. Il a en outre jugé nécessaire de
renforcer la collégialité dans la programmation des travaux.
Puis,
Me Jean Antagnac
a fait valoir qu'il serait souhaitable de
renforcer les garanties accordées aux élus locaux en modifiant,
par la voie législative, les procédures applicables.
Après avoir de nouveau souligné qu'il serait nécessaire de
renforcer la collégialité,
Me Jean Antagnac
a
estimé que les réponses de l'ordonnateur et la lettre
d'observations provisoires devraient être annexées à la
lettre d'observations définitives.
Il a également fait valoir que les chambres régionales des
comptes devraient être davantage structurées par une division en
sections suffisamment nombreuses pour couvrir l'activité totale des
chambres.
Tout en considérant que les lettres d'observations pouvaient avoir un
impact plus grand qu'un jugement,
Me Jean Antagnac
a néanmoins
fait part de ses réserves sur l'ouverture d'une procédure d'appel
à l'encontre de ces observations en raison de la forme et du volume de
celles-ci. Il a au contraire jugé préférable de
développer une procédure contradictoire publique devant les
chambres régionales des comptes.
Me Jean Antagnac
a ensuite énoncé la
nécessité de clarifier la question des lettres d'observations
provisoires par rapport au principe de la communication des documents
fixé par la loi du 17 juillet 1978, d'autoriser les chambres
régionales des comptes à obtenir des informations auprès
de l'autorité judiciaire et, enfin, de préciser la question de la
suspicion légitime.
Il a, par ailleurs, estimé que la gestion de fait ne devrait plus
être sanctionnée par l'inéligibilité.
Renouvelant ses réserves sur la possibilité pour les chambres
régionales des comptes d'exercer une fonction de conseil, il a
jugé préférable que cette fonction soit assurée par
une structure placée auprès du préfet.
M. Jacques Oudin, rapporteur
, a alors relevé la
nécessité de mieux garantir les droits des justiciables en
développant la procédure contradictoire et en renforçant
la collégialité ainsi que la confidentialité des documents
provisoires.
Tout en approuvant l'idée d'aligner le statut des magistrats des
chambres régionales des comptes sur celui des magistrats administratifs,
le rapporteur s'est néanmoins déclaré perplexe sur
l'idée de ne plus faire présider les chambres régionales
des comptes par des magistrats de la Cour des Comptes. Il a au contraire fait
valoir que la Cour des Comptes devrait voir son rôle renforcé
à l'égard des chambres régionales des comptes.
Puis,
M. Jacques Oudin
s'interrogeant sur l'ouverture d'une
procédure d'appel a fait observer que la transformation des observations
des chambres régionales des comptes en jugements constituerait une
innovation considérable.
Il a enfin approuvé l'idée de ne pas confier une mission de
conseil aux chambres régionales des comptes.
En réponse,
Me Jean Antagnac
a estimé que les commissaires
du Gouvernement pouvaient jouer un rôle efficace pour harmoniser les
positions des chambres régionales des comptes à condition que
leur rôle soit renforcé et clairement distingué de celui du
président.
Me Jean Antagnac
a de nouveau considéré que la
définition de garanties supplémentaires au profit des élus
locaux passait par une plus grande indépendance des chambres
régionales des comptes vis-à-vis de la Cour des Comptes qui doit
rester dans l'exercice de sa fonction de juridiction d'appel. Il a enfin fait
valoir que les observations des chambres régionales des comptes
étaient perçues par l'opinion publique comme de véritables
jugements.
Maître Régis de
CASTELNAU
Président de
l'association française des avocats spécialisés dans le
conseil aux collectivités locales
Jeudi 25 septembre 1997
Après avoir précisé que son association
regroupait soixante cabinets spécialisés et 200 avocats,
Me
Régis de Castelnau
a fait observer que de nombreux élus
locaux éprouvaient un sentiment de malaise et d'injustice face au
développement de leur responsabilité pénale et au
contrôle exercé par les chambres régionales des comptes.
S'intéressant au contrôle de gestion opéré par les
chambres régionales des comptes,
Me Régis de
Castelnau
a fait observer que les élus locaux ressentaient un
sentiment d'arbitraire quant aux conditions de mise en oeuvre de ce
contrôle. Il a relevé que celui-ci était
caractérisé par une inégalité temporelle dans
l'intervention des chambres, par l'incohérence entre les
contrôles et par une inégalité spatiale.
Me Régis de Castelnau
a néanmoins estimé que des
efforts étaient actuellement mis en oeuvre par la Cour des Comptes et
par les chambres régionales des comptes pour améliorer cette
situation, notamment en recourant davantage aux procédures
collégiales et en renforçant le rôle du parquet.
Il a également noté que le comité de liaison fonctionnait
assez bien et que la commission des méthodes recherchait une plus grande
harmonisation des procédures. Enfin, il a souligné le rôle
positif de l'association des présidents de chambres régionales
des comptes.
Puis
Me Régis de Castelnau
a fait valoir que le contrôle
des chambres régionales des comptes interférait avec d'autres
types de contrôles.
Il a ainsi relevé que dans l'esprit de beaucoup d'élus locaux
l'absence de mise en oeuvre du contrôle de légalité
conférait à leurs actes une sorte d'immunité juridique.
Or, il a souligné que ce contrôle et celui exercé par les
chambres régionales des comptes n'avaient pas la même nature et
poursuivaient des objectifs différents.
Me Régis de Castelnau
a également relevé
l'existence d'une concurrence entre les chambres régionales des comptes
et la juridiction administrative.
Puis, rappelant que les chambres régionales des comptes avaient
l'obligation de transmettre au procureur de la République les faits
susceptibles de constituer une incrimination pénale,
Me Régis
de Castelnau
a souligné qu'il s'agissait d'un nouveau mode de
déclenchement de l'action publique qui avait une portée
très large en raison des pouvoirs d'investigation des chambres
régionales des comptes.
Il a néanmoins rappelé que, conformément à une
jurisprudence de la Cour de cassation de 1816, le juge pénal ne pouvait
se substituer au juge financier pour se prononcer sur
l'irrégularité de gestion des comptes.
Enfin, relevant que le contrôle des chambres régionales des
comptes devait également être mis en relation avec le
contrôle exercé par les citoyens,
Me Régis de
Castelnau
a estimé qu'il serait souhaitable de mieux définir
la délimitation entre le contrôle de l'opportunité et le
contrôle de la qualité de la gestion.
Me Régis de Castelnau
a ensuite abordé le problème
de la gestion de fait qui ne devait à son sens pas être
assimilée à une mesure de lutte contre la corruption.
Il a en effet souligné qu'il s'agissait d'une technique destinée
à rétablir les règles de la comptabilité publique.
En conséquence, il a jugé nécessaire de prendre en compte
cette caractéristique de la gestion de fait afin de mettre un terme aux
dévoiements actuels.
S'interrogeant par ailleurs sur les grands sujets définis par la Cour
des Comptes dans le cadre de son rapport public,
Me Régis de
Castelnau
a fait observer que le contrôle opéré sur les
structures satellites des collectivités locales mettaient en
évidence la contradiction qu'il pouvait y avoir entre le respect de la
légalité et la recherche de l'efficacité.
Prenant l'exemple de la rémunération des fonctionnaires, il a
souligné que la volonté de remise en ordre des pratiques
actuelles pouvait expliquer un certain sentiment d'arbitraire
éprouvé par les élus locaux.
Présentant ensuite des suggestions destinées à
améliorer le contrôle exercé par les chambres
régionales des comptes,
Me Régis de Castelnau
a tout
d'abord estimé que le corps des magistrats de ces juridictions devait
évoluer.
Relevant l'insuffisance de la culture juridique et judiciaire des chambres
régionales des comptes, il a plaidé pour un renforcement de la
procédure contradictoire et par le développement des pratiques
judiciaires.
Me Régis de Castelnau
a par ailleurs jugé
nécessaire de renforcer les moyens des juridictions financières
notamment en améliorant le statut et la formation des magistrats. Il a
ainsi considéré qu'il serait nécessaire de favoriser
l'intégration de magistrats des chambres régionales des comptes
au sein de la Cour des Comptes. Il a en outre souhaité que la Cour des
Comptes soit plus exigeante à leur égard.
Puis, s'interrogeant sur les moyens d'améliorer la procédure
applicable aux observations des chambres régionales des comptes,
Me
Régis de Castelnau
a proposé que les lettres d'observations
provisoires ne soient plus apostillées par la formation
collégiale. Il a en effet estimé que cette solution permettrait
un véritable débat préalable à la lettre
d'observation définitive.
Me Régis de Castelnau
s'est prononcé pour la suppression
de la sanction d'inéligibilité applicable à la gestion de
fait.
Après avoir fait observer que la règle en vigueur constituait une
application mécanique de l'incompatibilité entre les fonctions de
comptable et celles d'élu, il a suggéré que le comptable
de fait ayant fait l'objet d'un jugement de débet définitif
puisse disposer d'un délai de six mois pour régulariser sa
situation, délai au-delà duquel sa démission d'office
serait prononcée.
S'agissant du maintien du secret des documents provisoires,
Me Régis
de Castelnau
a estimé que les sanctions en la matière
étaient illusoires en raison de la pluralité de destinataires des
documents en cause. Il a en revanche proposé d'interdire la publication
de toute information liée à la procédure provisoire.
Justifiant cette proposition par le fait que la loi organisait la communication
et la publicité des lettres d'observations définitives, il a
suggéré que cette interdiction soit assortie de sanctions
très lourdes.
En conclusion,
Me Régis de Castelnau
a jugé
nécessaire de sortir du débat sur la légitimité des
chambres régionales des comptes. Rappelant que les différents
Etats de l'Union européenne avaient renforcé les
procédures destinées à assurer un plus grand
contrôle et une plus grande transparence des collectivités
locales, il a considéré que la légitimité du
rôle des chambres régionales des comptes serait progressivement
établie. Il a en conséquence jugé fondées les
exigences exprimées à leur égard. Il a enfin estimé
que le problème de l'insécurité des actes des
collectivités locales serait durable.
Après avoir souscrit à ces analyses,
M. Jacques Oudin,
rapporteur
, a relevé une contradiction entre l'affirmation selon
laquelle toute répression des "fuites" serait illusoire et le souci de
mieux sanctionner la divulgation d'informations provisoires des chambres
régionales des comptes.
En réponse,
Me Régis de Castelnau
a souligné que,
selon lui, il serait effectivement illusoire de rechercher les auteurs desdites
divulgations et de les réprimer. En revanche, il a jugé
souhaitable de sanctionner ceux qui publient ces informations provisoires.
Après avoir estimé qu'il était nécessaire d'assurer
le caractère confidentiel des lettres d'observations provisoires et de
sanctionner toute violation de cette règle,
M. Jacques Oudin,
rapporteur
, s'est interrogé sur la jurisprudence de la Cour de
cassation de 1816 interdisant au juge pénal de se prononcer avant le
juge financier sur une irrégularité dans la gestion des comptes.
En réponse,
Me Régis de Castelnau
a précisé
que depuis la création des chambres régionales des comptes la
Cour de cassation n'avait pas confirmé cette jurisprudence. Il a
néanmoins fait valoir que cette dernière appliquée
à la Cour des Comptes pouvait être transposée aux chambres
régionales des comptes.
Puis, il a souscrit à l'observation du rapporteur selon laquelle il
serait difficile pour la juridiction administrative saisie en appel de
reprendre toute la procédure de contrôle de la gestion.
Répondant à
M. Jacques Oudin
et à
M.
Philippe de Bourgoing
qui soulignaient la difficulté pour les
élus locaux d'appliquer des règles de plus en plus complexes,
Me Régis de Castelnau
a fait valoir que l'annulation d'un
marché public ne signifiait pas que l'élu local avait commis une
faute morale compte tenu de l'insécurité juridique croissante et
qui risquait d'être durable.
Il a estimé que les collectivités locales devaient éviter
deux fausses solutions, d'une part se tourner vers l'Etat, ce qui reviendrait
à rétablir le contrôle a priori, d'autre part se tourner
vers le juge, ce qui conduirait celui-ci à exercer à la fois une
fonction de conseil et une fonction de jugement.
Me Régis de Castelnau
a considéré que la loi du 13
mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des
faits d'imprudence et de négligence avait eu un effet positif. Il a en
outre estimé que les élus locaux devaient admettre l'existence
d'une certaine insécurité juridique.
Enfin, répondant à
M. Jean-Paul Amoudry, président
,
Me Régis de Castelnau
a jugé nécessaire de mieux
encadrer les procédures en imposant des délais aux chambres
régionales des comptes.
M.
Lionel FOURNY
Président de l'association nationale des directeurs
de service et directeurs généraux adjoints de service, des
conseils généraux et régionaux
Jeudi 25 septembre 1997
M.
Lionel Fourny
a tout d'abord présenté l'association qu'il
préside en indiquant que, créée en juillet 1995 pour
établir des contacts entre les cadres supérieurs des services de
ces collectivités, cette association réunissait actuellement plus
de 170 membres, soit près des deux tiers de la profession.
Il a ensuite indiqué que l'association avait procédé
à un travail d'analyse de plus d'une centaine de lettres d'observations
définitives publiées entre 1990 et 1996 et concernant
63 départements et 16 régions.
M. Lionel Fourny
a précisé que l'association avait
insisté sur son attachement au principe du contrôle exercé
a posteriori par les chambres régionales des comptes et sur l'importance
de ce contrôle pour garantir la transparence des gestions locales. Il a
néanmoins exprimé le souhait de voir le contrôle financier
local à la fois modernisé et rendu plus pertinent dans son
exercice. Il a noté que, depuis leur création, les chambres
régionales des comptes s'étaient progressivement imposées
dans le "paysage administratif" et qu'elles disposaient aujourd'hui d'une
réelle compétence, à la différence de la situation
qui avait prévalu entre 1985 et 1991.
Il a cependant relevé que plusieurs interrogations subsistaient. A cet
égard,
M. Lionel Fourny
a, tout d'abord, souligné qu'il
n'existait aucune définition juridique de la nature de l'examen de la
gestion, rappelant que l'article L.211-8 du code des juridictions
financières se bornait à énoncer que les chambres
régionales des comptes "examinent la gestion" des collectivités
locales. Il a noté que cette absence de définition précise
débouchait sur une mise en oeuvre peu homogène de l'examen de la
gestion par les différentes chambres régionales des comptes, cet
examen pouvant passer d'un simple audit juridique externe à une
véritable appréciation de la qualité de l'ensemble de la
gestion d'une collectivité locale.
M. Lionel Fourny
a par ailleurs regretté l'absence de
hiérarchie entre les remarques, qui caractérisent
fréquemment le contenu des lettres d'observations définitives,
soulignant l'existence de critiques sévères portant sur des
aspects secondaires de la gestion sans qu'il soit fait référence
à la situation financière d'ensemble de la collectivité
concernée. Sur ce point,
M. Lionel Fourny
a estimé
que le législateur devait rechercher une définition minimale de
la portée de l'examen de la gestion.
Il a par ailleurs souhaité que les lettres d'observations
définitives puissent comporter des suggestions destinées à
remédier aux difficultés relevées à l'occasion de
l'examen d'une gestion. Puis, il a indiqué qu'il serait souhaitable que
les réponses de l'ordonnateur soient automatiquement adjointes aux
lettres d'observations définitives. De façon plus
générale,
M. Lionel Fourny
a relevé la
nécessité pour les chambres régionales des comptes de
hiérarchiser, selon leur importance, les critiques formulées
à l'encontre de la gestion d'une collectivité locale et de
resituer celles-ci au regard de leur impact financier. Il a
considéré que cette orientation permettrait d'atténuer la
vision, parfois réductrice, des observations formulées par les
chambres régionales des comptes.
S'agissant de la confidentialité qui devrait entourer la
procédure des lettres d'observations provisoires,
M. Lionel Fourny
s'est dit favorable, en cas de "fuite", à l'idée du
dépôt d'une plainte conjointe de la collectivité locale et
de la juridiction concernées.
M. Lionel Fourny
s'est par ailleurs ému d'un risque de
politisation des sections de certaines grandes chambres régionales des
comptes. Sur ce point, il a considéré qu'il était
nécessaire de prévoir des règles de procédure plus
strictes destinées à garantir le caractère
collégial des décisions conduisant à la formulation des
observations définitives.
M. Lionel Fourny
a ensuite traité des difficultés
rencontrées par le contrôle financier au regard du contrôle
de légalité. Il a souligné qu'il était difficile
pour les collectivités locales d'admettre que des chambres
régionales des comptes "récusent" des actes ayant passé le
"filtre" du contrôle de légalité. Il a
considéré qu'il était de la responsabilité du
législateur de veiller à renforcer la cohérence entre ces
deux types de contrôle.
S'agissant de la mise en oeuvre de l'examen de la gestion des
collectivités locales par les chambres régionales des comptes,
M. Lionel Fourny
a déploré la tendance du juge financier
à "interpréter" les règles de droit applicables, ce qui
lui paraîssait d'autant plus contestable qu'il s'agissait d'une
procédure à caractère administratif. Il a souligné
que cette "attitude constructive" du juge financier était patente en
matière d'avantages en nature et de régime indemnitaire des
élus locaux et des fonctionnaires territoriaux. Sur ce point, il a
souhaité qu'en cas de doute sur la portée des textes applicables
le juge financier doive surseoir à statuer pour saisir, à titre
préjudiciel, "une autorité compétente" chargée
d'interpréter la règle de droit dont la portée
était incertaine.
M. Lionel Fourny
a, enfin, observé que les chambres
régionales des comptes étaient des juridictions récentes
en comparaison de la Cour des Comptes ou des tribunaux administratifs et que
celles-ci commençaient à trouver un équilibre
favorisé par l'action de la Cour des Comptes en faveur de
l'harmonisation de leur "jurisprudence".
M. Jacques Oudin, rapporteur,
a tout d'abord relevé que la
diversité des tâches dévolues aux chambres
régionales des comptes ne faisait pas des juridictions
financières des exceptions au sein de l'ordre juridictionnel. Rappelant
l'existence de jurisprudences divergentes au sein des juridictions judiciaires
ou administratives, il a insisté sur l'importance de ne pas soumettre
les juridictions financières à un régime d'exception. Il
s'est ensuite interrogé sur la difficulté qu'il y aurait à
assortir les lettres d'observations définitives de propositions de
redressement, considérant qu'il existerait là un risque de
détournement du rôle des chambres régionales des comptes.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
s'est ensuite dit hostile à
l'institution éventuelle d'une forme de question préjudicielle en
cas de doute sur le droit applicable. Il a, en effet, considéré
qu'il serait très difficile de définir l'autorité
qualifiée chargée d'y répondre. Il a en outre
souligné qu'en raison du caractère ambivalent de l'examen de la
gestion et de la difficulté à définir juridiquement la
nature d'une lettre d'observations définitives, il serait très
problématique d'envisager l'institution d'un recours en appel ou en
cassation contre ces documents.
En réponse,
M. Lionel Fourny
a insisté sur
l'intérêt de prévoir l'accompagnement des observations
définitives de suggestions destinées à répondre aux
difficultés soulevées par le juge financier. Il a souligné
qu'une telle solution contraindrait les chambres régionales des comptes
à mieux prendre conscience de la complexité à laquelle
sont confrontés les choix de gestion des élus locaux.
M. Jean-Paul Amoudry, président,
a, pour sa part,
évoqué la difficulté de définir une
frontière entre le contrôle d'opportunité et le
"contrôle de qualité" évoqué par le Premier
président de la Cour des Comptes, M. Pierre Joxe, à l'occasion du
colloque sur les chambres régionales des comptes.
Sur ce point,
M. Lionel Fourny
a indiqué que la centaine de
lettres d'observations définitives analysées par son association
ne permettait pas de mettre en évidence l'existence d'un contrôle
d'opportunité, c'est-à-dire comportant une critique de principe
des choix effectués par les élus locaux. Il a
précisé qu'on ne pouvait confondre une analyse du "bilan
coût-avantage" d'une décision prise par une collectivité
locale et un contrôle d'opportunité. Il a cependant reconnu que
les lettres d'observations définitives faisaient l'objet d'une
rédaction dont la qualité pouvait être variable et de "plus
ou moins bonne foi".
Enfin,
M. Jean-Paul Amoudry, président,
a indiqué que le
rapporteur soumettrait, d'ici à quelques semaines, un rapport
d'étape qui ferait la synthèse des informations recueillies au
cours des auditions conduites par le groupe de travail et présenterait
ses premières propositions avant de proposer un éventuel
complément d'information destiné à approfondir la
réflexion du groupe sur les pistes nouvelles que constituent la gestion
de fait ou les relations des collectivités locales avec les associations.
M.
Maurice DOUSSET
Président de la région Centre
Mardi 10 février 1998
A
titre liminaire
, M. Maurice Dousset
a présenté ses
réflexions sur le contrôle exercé par les chambres
régionales des comptes. Il a souligné que ce contrôle lui
apparaissait "absolument nécessaire" et qu'il contribuait très
largement à l'amélioration de la gestion des collectivités
locales. A cet égard, il rappelé que la région Centre
avait modifié un certain nombre de ses procédures à la
suite des observations formulées par la chambre régionale des
comptes en 1991 comme 1995. Il a souligné que la région
était ainsi parvenue à une certification de ses procédures
opérationnelles de marchés publics aux normes ISO 9002. Il a
insisté sur le fait que la région avait adopté et suivi
une démarche volontariste de renforcement de la transparence
financière de sa gestion et que l'expérience des contrôles
de la chambre régionale des comptes l'avait conduite à instituer
un contrôle interne au sein des services de la région.
M.
Maurice Dousset
a cependant regretté que les
observations des chambres régionales des comptes se bornent, le plus
souvent, à mentionner les seuls points négatifs d'une gestion
locale, sans qu'il soit fait référence à l'ensemble de la
gestion d'une collectivité et à ses aspects positifs. Il a
ensuite noté que les chambres régionales des comptes ne
formulaient jamais de critiques à l'encontre des services de l'Etat,
qui, selon lui, possèdent souvent une responsabilité dans les
choix locaux. Puis, il a insisté sur la nécessité, pour
les juridictions financières, de s'abstenir de toute appréciation
pouvant s'apparenter à un contrôle de l'opportunité des
décisions des gestionnaires locaux. Il a enfin mis en évidence la
gravité de l'impact médiatique des observations formulées
par les chambres régionales des comptes qui tendent à concentrer
l'opinion publique sur les seuls aspects négatifs de la gestion locale.
M.
Maurice Dousset
a ensuite exposé les faits ayant
conduit, au terme d'une procédure de gestion de fait, à son
inéligibilité aux prochaines élections régionales.
A cet égard, il a indiqué qu'un contrôle avait
été engagé par la chambre régionale des comptes du
Centre le 29 juillet 1994.
Rappelant les principales étapes du calendrier de ce contrôle,
M.
Maurice Dousset
a insisté, d'une part, sur la
longueur de la procédure de contrôle et, d'autre part, sur la
brièveté avec laquelle s'était conclue la procédure
de gestion de fait, engagée à son encontre, au sujet de
l'association du personnel de la région Centre. Il a indiqué que
cette association avait pour principale fonction de gérer un
système de retraite supplémentaire en faveur des agents
contractuels territoriaux, qui avait été mis en place en 1986,
à la suite d'études engagées en 1984. Sur ce point,
M.
Maurice Dousset
a relevé que la gestion de cette
association n'avait pas appelé de commentaires particuliers de la
chambre régionale des comptes au terme du contrôle effectué
par celle-ci en 1991. Il a déploré que la juridiction
financière n'ait pas formulé d'observations sur la gestion de
cette association à l'époque, ce qui avait conduit la
région à "persévérer dans l'erreur" pendant quatre
années supplémentaires. Il a indiqué qu'à
l'occasion du second contrôle mis en oeuvre par la chambre
régionale des comptes, la région avait décidé,
dès le 30 juin 1995, de suspendre le système de retraite
complémentaire du personnel et que l'association du personnel de la
région Centre s'était dissoute dès le mois d'octobre 1995.
M. Maurice Dousset
a ensuite rappelé qu'une procédure de
gestion de fait avait été engagée à la fin de
l'année 1995, la déclaration provisoire de gestion de fait ayant
été prononcée le 2 février 1996 et notifiée
le 7 mars, précisant que le mémoire en réponse de la
région avait été transmis à la Chambre
régionale des comptes le 16 juin 1996. Il a ensuite
précisé que la déclaration définitive de la
situation de gestion de fait lui avait été communiquée le
21 janvier 1997, par simple communication téléphonique, et que le
jugement visant le président de la région et les
trésoriers de l'association avait été notifié le 11
février 1997. A cet égard, il a noté que ce jugement
était assorti du prononcé d'une amende de 70.000 francs à
son encontre et de 20.000 francs pour chacun des trois trésoriers.
En définitive, le président de la région Centre s'est
étonné de la "mise en sommeil" de cette procédure entre le
début du mois de juin 1996 et la fin du mois de janvier 1997. Il a
précisé que, sur la recommandation du président de la
chambre régionale des comptes du Centre, il avait fait appel de ce
jugement devant la Cour des Comptes le 8 avril 1997. Il a indiqué
que le conseil régional, à cette occasion, s'était
prononcé pour la seconde fois sur l'utilité publique des
dépenses engagées par l'association du personnel de la
région Centre et que, le 28 mai 1997, la Cour avait admis la
recevabilité de l'appel et prononcé un sursis à
exécution. Il a souligné que le 2 octobre 1997, soit
à peine quatre mois plus tard, la Cour des Comptes avait confirmé
le jugement de la chambre régionale des comptes constatant en
conséquence son inéligibilité pendant six mois, ce qui
faisait ainsi définitivement obstacle à sa candidature aux
élections régionales de mars 1998.
S'agissant des amendes,
M. Maurice Dousset
a souligné que,
malgré la réduction de leurs montants, la condamnation à
une telle peine possédait un caractère infamant aggravé
par un long écho médiatique.
M. Jean-Paul Amoudry, président,
a rappelé que le
problème de la gestion de systèmes de retraite
complémentaire des agents territoriaux constituait une
préoccupation pour de nombreuses collectivités locales et qu'il
convenait de distinguer entre les régimes mis en oeuvre avant 1984 et
ceux constitués après cette date.
M. Jacques Oudin, rapporteur,
a, pour sa part, souhaité que les
chambres régionales des comptes modifient leur conception de l'examen de
la gestion afin de resituer leurs observations au sein d'un bilan global des
contrôles effectués qui relèverait également les
aspects positifs de la question examinée. Il a relevé, par
ailleurs, les grandes différences qui caractérisent la
durée des procédures de contrôle engagées et a
suggéré que celles-ci soient inscrites dans des délais
précis tout en précisant que ceux-ci pourraient être
reconductibles.
M. Paul Girod
a relevé que dans ce domaine il existait un
phénomène de jalousie de la fonction publique de l'Etat envers la
fonction publique territoriale. Il a relevé, par ailleurs, l'importance
des contrariétés de jurisprudence entre différentes
chambres régionales des comptes.
M. Henri Collard
s'est, pour sa part, interrogé sur le
degré de transparence des systèmes de primes allouées aux
fonctionnaires des services déconcentrés de l'Etat.
Interrogé par le
président
Jean-Paul Amoudry
sur
le dépôt d'un pourvoi en cassation, auprès du Conseil
d'Etat, de l'arrêt de la Cour des Comptes,
M. Maurice Dousset
a indiqué qu'il s'en était abstenu dans la mesure où
ce recours aurait fait obstacle à l'obtention du quitus de la
juridiction financière dans cette affaire.
M.
Jacques FERRATON
Président de la chambre régionale des
comptes de Franche-Comté
Mardi 10 février 1998
M. Jacques Ferraton
a indiqué, tout d'abord,
que les
chambres régionales des comptes avaient, depuis leur création,
accomplis d'importants progrès en termes de compétence technique
des magistrats. Il a cependant admis que les modalités d'expression
retenues pour la rédaction des lettres d'observation restaient encore
dans certains cas à parfaire, avant de constater l'absence de
définition légale précise de l'examen de la gestion.
S'agissant de cette forme de contrôle,
M. Jacques Ferraton
a
relevé que les chambres régionales des comptes possédaient
une grande liberté pour sa mise en oeuvre. Il a cependant
précisé que le comité des méthodes et le
comité de liaison créés au sein de la Cour des Comptes
avaient fortement contribué à harmoniser, tant la
méthodologie, que la déontologie applicables à l'examen de
la gestion. Il a noté, par ailleurs, que les chambres possédaient
des moyens limités et qu'elles étaient soumises à un
accroissement des tâches lié au contrôle budgétaire
et aux audits qui pouvaient leur être demandés et qu'il en
résultait une certaine limitation du nombre des comptes examinés.
Il a souligné, qu'à cet égard, les critiques
formulées par les élus locaux avaient contribué à
améliorer les conditions de mise en oeuvre de l'examen de la gestion.
Le président de la chambre régionale des comptes de
Franche-Comté
a, par ailleurs, précisé que si le
contrôle d'opportunité était un sujet dont il ne fallait
pas surestimer l'importance, il constituait néanmoins un risque
réel et que les magistrats des juridictions financières avaient
été sensibilisés à la nécessité de
respecter la frontière entre la légalité et
l'opportunité.
M. Jacques Ferraton
a ensuite admis que les observations
formulées par les chambres régionales des comptes souffraient
parfois d'hétérogénéité, tant sur le fond
que dans la forme. S'agissant du fond, il a noté qu'il s'agissait "d'un
travers inévitable" en l'absence d'un système de
réformation applicable aux lettres d'observation, soulignant qu'en outre
les thèmes de contrôle retenus par chaque juridiction
étaient très diversifiés. S'agissant de la forme, il a
reconnu que les lettres d'observation étaient
caractérisées par le caractère variable de leur longueur
et de leur ton. Sur ce point, il a souligné que, l'existence d'un
support informatique recensant les lettres d'observation émises par les
chambres régionales des comptes depuis 1993 avait contribué
à favoriser une certaine harmonisation des pratiques. Il a
souligné que dans l'exercice de ses fonctions à la tête de
la chambre régionale des comptes de Lorraine, il avait favorisé
l'émergence de règles simples ayant principalement pour objet de
recommander que les secteurs contrôlés soient
précisés, que les observations soient hiérarchisées
et que celles-ci soient replacées dans le contexte de la gestion
d`ensemble de la collectivité concernée. Il a notamment
souligné l'importance de distinguer les simples erreurs de gestion des
éventuelles malversations qui pouvaient être relevées.
S'agissant des problèmes de confidentialité des observations
provisoires des chambres régionales des comptes, il a souligné
qu'il s'agissait d'une question de discipline et d'organisation des
juridictions, mais que le secret ne pouvait être respecté que dans
la mesure où les responsables des collectivités locales
concernées et leurs services se soumettaient aux mêmes exigences
de discrétion. Il a noté que les incidents dans ce domaine
étaient relativement rares et qu'il reviendrait, dans un tel cas,
à la mission d'inspection de la Cour des Comptes d'enquêter si des
cas d'atteinte à la déontologie étaient relevés.
Après avoir estimé que la tradition héritée de la
Cour des Comptes conduisait spontanément les chambres régionales
des comptes à ne relever que les aspects négatifs d'une gestion,
M. Jacques Ferraton
a indiqué qu'il pourrait être
envisagé de travailler autrement et de prévoir que les
contrôles soient organisés dans l'esprit d'un audit global
consacré soit à une opération précise, soit
à un service, soit encore à une politique donnée.
Abordant ensuite l'aspect contradictoire de la procédure de l'examen de
gestion, il a rappelé qu'il existait trois étapes
possibles : l'entretien préalable, les échanges de lettres
ainsi que des auditions. A cet égard, il a souligné la grande
importance de l'entretien préalable pour le bon déroulement d'un
examen de la gestion. Il a en outre indiqué qu'il était utile de
compléter l'entretien avec l'ordonnateur principal par une entrevue avec
le directeur général des services de la collectivité
concernée.
A propos de l'éventuelle adjonction des réponses des
gestionnaires locaux aux observations définitives des chambres
régionales des comptes, lors de la communication de celles-ci à
l'assemblée délibérante,
M. Jacques Ferraton
a
indiqué que s'agissant d'une simple communication des observations de la
juridiction financière, et non pas d'une publication, rien n'interdisait
actuellement, dans la pratique, une publication concomitante des
réponses de la collectivité locale aux observations
formulées par la chambre régionale des comptes.
Analysant ensuite le développement éventuel de la fonction de
conseil des chambres régionales des comptes,
M. Jacques Ferraton
a considéré qu'il serait anormal de refuser par principe la
fourniture d'un conseil à une collectivité locale et a
précisé, qu'à titre personnel, il avait en
général accepté de jouer ce rôle. Il a cependant
considéré qu'il n'était pas utile de
légiférer sur ce point et qu'il était
préférable de laisser une marge d'appréciation aux
juridictions financières.
S'agissant de la gestion de fait,
M. Jacques Ferraton
a reconnu
l'existence d'un "sentiment convergent" des présidents de chambres
régionales des comptes pour constater une disproportion entre les faits
reprochés et l'automaticité de la sanction
d'inéligibilité, sachant que, le plus souvent, la gestion de fait
était la conséquence d'une erreur de gestion, et non pas d'une
malversation. Il a noté que la procédure de la gestion de fait
était un dispositif légal ancien et que celui-ci avait
été modifié en 1990 dans un sens protecteur pour les
élus locaux avec l'institution d'un délai de six mois
destiné à permettre la régularisation de cette situation.
Il a relevé que ces délais étaient cependant devenus "une
arme" pour les chambres régionales des comptes pour l'obtention rapide
de la régularisation des situations de gestion de fait. Il a cependant
reconnu que cette "efficacité" se trouvait fortement limitée dans
les cas, relativement fréquents où il existe une pluralité
de comptables de fait. A cet égard, il a souligné que la
détermination en 1990, d'un "délai couperet" uniforme
était mal adaptée à une procédure
caractérisée par une grande diversité des situations.
M. Jacques Ferraton
a ensuite évoqué le renforcement des
garanties qui entourent la procédure de gestion de fait
opéré par le décret du 23 août 1995. Notant
l'insuffisance du délai de six mois, prévu pour permettre la
régularisation d'une situation de gestion de fait, le président
de la chambre régionale des comptes de Franche-Comté a aussi
relevé qu'il existait dans ce domaine des différences de
rédaction au sein du code électoral, selon qu'il s'agisse des
mandats municipaux ou des mandats départementaux, de même, que
subsistaient des incertitudes quant à la portée territoriale de
l'inéligibilité résultant d'une gestion de fait. Il a
suggéré que des améliorations pouvaient être
envisagées dans ces cas. A cet égard, il a tout d'abord
indiqué que la démission d'office résultant d'une gestion
de fait pourrait être remplacée par une suspension des fonctions
d'ordonnateur, ce qui garantirait ainsi le respect des principes de la
comptabilité publique, tout en incitant l'ordonnateur à
régulariser sa situation. S'agissant de l'inéligibilité,
M. Jacques Ferraton
a relevé qu'une solution était plus
difficile à trouver, mais a néanmoins évoqué
l'idée de la suppression du délai de six mois au profit d'un
dispositif permettant de constater la régularisation, ou l'absence de
régularisation, d'une gestion de fait au moment du dépôt
des candidatures à une élection.
Au total,
M. Jacques Ferraton
a souligné qu'il existait une
quasi unanimité des présidents de chambres régionales des
comptes pour constater la "sévérité" des sanctions
applicables à une gestion de fait.
Citant l'exemple du Futuroscope,
M. Paul Girod
a tout d'abord mis en
évidence la difficulté d'intégrer dans l'examen de la
gestion d'une collectivité, la notion de "risque encouru" dans la mesure
où un certain nombre d'investissements des collectivités locales
constituaient un pari sur l'avenir, dont la rentabilité ne pouvait se
mesurer qu'à moyen ou à long terme. Il a ensuite souligné
la difficulté que pouvaient rencontrer les conseils
généraux dans le contrôle de leurs dépenses sociales
en mentionnant le cas de l'attribution de la prestation spécifique
dépendance pour laquelle le département ne possède aucun
pouvoir de vérification sur l'existence d'une tierce personne.
Le président de la chambre régionale des comptes de
Franche-Comté a admis les difficultés posées par le
contrôle a posteriori tout en soulignant que le rôle des
juridictions financières consistait notamment à rappeler les
précautions à prendre à l'occasion d'une prise de risque
par une collectivité locale.
M. Henri Collard
a souligné qu'il convenait de distinguer la
formulation d'observations par les chambres régionales des comptes de
l'exercice, par celles-ci, d'un éventuel contrôle de
l'opportunité des choix de gestion effectués par les
collectivités locales. Il a par ailleurs relevé que les
situations de gestion de fait ne comportaient que très rarement des
"détournements fautifs".
M. Jacques Ferraton
a indiqué que néanmoins la gestion de
fait avait souvent pour objet de constituer "un trésor de guerre",
soustrait aux règles de la comptabilité publique et au
contrôle de l'assemblée délibérante. Soulignant le
caractère très contestable de ces pratiques, il a cependant
insisté sur la "sévérité excessive" des sanctions
applicables. S'agissant des contrariétés de jurisprudence entre
les différentes chambres régionales des comptes, il a
indiqué qu'il ne lui semblait pas souhaitable de légiférer
en la matière, rappelant à cette occasion que la Cour des Comptes
avait conduit une importante action destinée à favoriser
l'harmonisation des méthodes et des objectifs de ces juridictions
financières.
M. Jean-Paul Amoudry, président
, a souligné la
nécessité de favoriser l'émergence d'instances de conseil
aux collectivités locales. Il a ensuite évoqué le cas
particulier des comités départementaux du tourisme dont la loi de
1992 a prescrit la constitution sous une forme associative.
M. Jacques Ferraton
a tout d'abord répondu qu'il ne lui semblait
pas souhaitable de conférer, par voie législative, une fonction
de conseil aux chambres régionales des comptes et qu'il valait mieux
laisser à celles-ci une marge d'appréciation. Il a, par ailleurs,
relevé que d'autres structures de conseil pouvaient être
envisagées et que cette fonction pourrait être partiellement
assumée par les grandes associations d'élus locaux. S'agissant
des comités départementaux de tourisme, il a
précisé que l'obligation de recourir à une structure
associative n'excluait pas tout risque de gestion de fait. Plus largement, il a
indiqué que le recours à une association ne débouchait pas
nécessairement sur une situation de gestion de fait et qu'il fallait,
pour qu'une telle situation soit constituée, une présence
d'éléments "aggravants" tels que l'opacité de la gestion
ou la dissimulation intentionnelle d'éléments de recettes ou de
dépenses.
M.
Jacques BELLE
Président de la chambre régionale des
comptes de Rhône-Alpes
Mardi 10 février 1998
A titre
liminaire,
M. Jacques Belle
a formulé certaines remarques au
sujet du contrôle exercé par les chambres régionales des
comptes. Il a tout d'abord indiqué, qu'à titre personnel, il
était favorable au développement de la fonction de conseil des
juridictions financières et que cette fonction pouvait être
prévue par la loi dans la mesure où celle-ci en définirait
précisément les limites. Il a cependant souligné que
l'exercice d'une telle fonction supposerait des moyens supplémentaires
et impliquerait un grand effort d'harmonisation. Il a, par ailleurs,
noté que les seuils fixés en 1988 (2.000 habitants et recettes
ordinaires supérieures à 2 millions de francs) pour
déterminer la compétence des chambres régionales des
comptes, s'avéraient aujourd'hui inadaptés. Il a
suggéré que le seuil de 2 millions de francs soit porté
à 10 millions de francs, précisant que le seuil
démographique pourrait alors être supprimé. Il a enfin
relevé qu'une clarification de la législation en matière
de délégations de service public lui apparaissait souhaitable.
S'agissant de la gestion de fait,
M. Jacques Belle
a tout d'abord
souhaité rappeler que cette procédure ne constituait qu'une
très faible proportion de l'activité des chambres
régionales des comptes. Il a en effet souligné que malgré
l'augmentation du nombre de déclarations de situations de gestion de
fait (de 35 en 1993 à 83 en 1996), la tendance actuelle se situait aux
alentours d'une soixantaine de cas par an, le nombre des amendes
prononcées dans ce domaine se situant entre 10 et 20 par an. Il a
cependant précisé qu'il existait un grand nombre de cas où
une gestion de fait était susceptible d'apparaître et notamment,
dans le cadre d'associations parapubliques subventionnées. A cet
égard, il a rappelé que la législation avait
progressivement étendu le champ de compétences des chambres
régionales des comptes puisqu'une subvention de 10.000 francs
constituait un critère suffisant pour que celles-ci puissent exercer
leur contrôle sur les comptes d'une association. Il a ensuite
souligné que ces structures devaient être en mesure de fournir un
certain nombre de documents financiers en fonction de l'importance des
subventions reçues et que, au-delà d'un million de francs de
subventions, existait une obligation de certification des comptes par un
commissaire aux comptes. Il a indiqué que dans la région
Rhône-Alpes, le nombre d'associations recevant une subvention d'un
montant supérieur à un million de francs s'élevait
à 377 et que pour certaines communes, le total des subventions
versées à ces structures pouvait atteindre 10 à 15 %
des dépenses de fonctionnement de ces collectivités.
M. Jacques Belle
a ensuite insisté sur les raisons du
développement du recours à la forme associative par les
collectivités locales, expliquant que cette formule permettait
d'écarter l'application des règles contraignantes de la
comptabilité publique, des marchés publics, de la maîtrise
d'ouvrages publique, ainsi que celles de la fonction publique territoriale. A
cet égard, il a précisé que, dans de nombreux cas, la
déclaration de gestion de fait n'était pas prononcée dans
la mesure où l'engagement d'un contrôle par une chambre
régionale des comptes conduisait à l'adoption de mesures de
redressement dès l'envoi de la lettre d'observations provisoires. Sur ce
point, il a souligné que la procédure de gestion de fait ne
constituait pas, pour les chambres régionales des comptes, une sanction,
mais simplement une mise en oeuvre du principe essentiel de la
séparation des ordonnateurs et des comptables.
Il a, par ailleurs, rappelé que le décret du 23 août 1995
comportait d'importantes garanties de procédure dans le cadre d'une
gestion de fait et que ce texte s'apparentait en réalité à
un véritable code de procédure en la matière. Il a aussi
souligné que la démission d'office et
l'inéligibilité n'était pas prononcées par les
juridictions financières, mais résultaient automatiquement de la
législation en vigueur. Ce sont, en effet, des articles du Code
électoral et non du Code des juridictions financières qui tirent
les conséquences de l'incompatibilité des fonctions d'ordonnateur
et de comptable en matière d'inéligibilité des personnes
déclarées comptables de fait. Il a souligné que les
dispositions en vigueur découlaient de modifications législatives
intervenues en 1991, et il a ajouté que si celles-ci étaient
jugées par trop rigoureuses, il était envisageable
d'aménager les délais. Il a noté qu'il était
possible de prévoir que tout ordonnateur déclaré comptable
de fait, à titre définitif, se trouve automatiquement suspendu de
sa fonction d'ordonnateur jusqu'à l'apurement final de sa gestion. Il a
enfin indiqué qu'une telle disposition pourrait venir simplement
compléter l'article L 231-3 du Code des juridictions financières.
M. Jacques Oudin, rapporteur
, a insisté sur l'explication du
recours croissant des collectivités locales aux structures associatives
indiquant que si, parfois, il pouvait exister une volonté de
détournement, il s'agissait, en général, d'une tentative
de réponse à la multiplication des fonctions
conférées aux collectivités locales et à la
nécessité d'alléger des règles contraignantes
susceptibles de lui faire obstacle à certaines actions. Il a noté
qu'une partie de ces difficultés avaient été
résolues dans le domaine du tourisme par la loi de 1992, mais que ce
problème se posait avec acuité dans le domaine des associations
sportives et culturelles.
En réponse à
M. Jacques Oudin
, le président de la
chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes a rappelé
qu'il était nécessaire de maintenir le principe de
séparation des ordonnateurs et des comptables et que les
facilités de gestion offertes par la structure associative constituaient
un moyen de détourner un certain nombre de règles d'ordre public.
Il a cependant admis la difficulté que rencontraient parfois les
collectivités locales pour le recrutement de collaborateurs de haut
niveau, dans le cadre du statut de la fonction publique territoriale.
Sur ce point, il a souligné qu'un effort de transparence des situations
respectives de la fonction publique de l'Etat et de la fonction publique
territoriale devait être conduit afin que le principe de parité
entre ces deux ensembles soit effectivement respecté.
M. Philippe de Bourgoing
a, pour sa part, souhaité faire
état de la situation d'une petite commune du département du
Calvados soumise à un "conflit de jurisprudences" entre les observations
de la chambre régionale des comptes et un jugement du tribunal
administratif.