C. UNE PROCÉDURE ELOIGNÉE DE SON SUPPORT LÉGISLATIF
Telle
que définie par la circulaire du 31 mars 1992, la procédure
d'élaboration des troisièmes CPER est éloignée du
texte, comme de l'esprit des dispositions de la
loi du
29 juillet 1982
relatives aux contrats de plan
Etat-Région, et dans une moindre mesure du texte du décret
n°83-32 du 21 janvier 1983 relatif aux contrats de plan (cf.
comparaison de la procédure annoncée avec les textes reproduits
dans l'encadré ci-après).
Cet écart s'est d'ailleurs encore creusé en cours de
procédure en raison de l'abandon de la planification nationale à
partir de 1993, comme de ce que nombre de Régions n'ont pas
élaboré un plan régional. Le lien entre la planification
régionale et les contrats de plan avait pourtant été
réaffirmé par la jurisprudence (cf. encadré
ci-après).
Comme le souligne la Cour des Comptes
14(
*
)
, la loi de 1982 est ainsi
"
contournée dans son principe et obsolète dans ses
dispositions pratiques
", de sorte "
qu
'
il est
difficile, dans ces conditions, de qualifier de contrats de " plan "
le résultats des accords passés entre l'Etat et ses
partenaires
".
LES
DISPOSITIONS DE LA LOI DU 29 JUILLET 1982 RELATIVES
AUX CONTRATS DE PLAN
ETAT-REGION.
CHAPITRE Ier
Le contenu du plan de la Nation
- ART. 4. - La seconde loi de plan...indique l'objet et la portée des contrats de plan que l'Etat se propose de souscrire avec les régions, conformément aux dispositions du chapitre III du présent titre.
CHAPITRE III
L'exécution du Plan de la Nation et les contrats de plan
-
ART. 11
. - L'Etat peut conclure avec les collectivités locales,
les régions, les entreprises publiques ou privées et
éventuellement d'autres personnes morales, des contrats de plan
comportant des engagements réciproques des parties en vue de
l'exécution du plan et de ses programmes prioritaires.
Ces contrats portent sur les actions qui contribuent avec la réalisation
d'objectifs compatibles avec ceux du plan de la Nation. Ils définissent
les conditions dans lesquelles l'Etat participe à ces actions.
Le contrat de plan conclu entre l'Etat et la région définit les
actions que l'Etat et la région s'engagent à mener conjointement
par voie contractuelle pendant la durée du plan. Il précise les
conditions de conclusion ultérieure de ces contrats.
Des contrats particuliers fixent les moyens de mise en oeuvre des actions
définies dans le contrat de plan. Le représentant de l'Etat dans
la région est chargé de préparer pour le compte du
gouvernement le contrat de plan et les contrats particuliers entre l'Etat et
les régions.
Les contrats conclus entre l'Etat, d'une part, et des collectivités
territoriales, des entreprises ou d'autres personnes morales, d'autre part,
doivent être communiquées aux régions concernées...
-
ART. 12.
- Les contrats de plan sont conclus suivant une
procédure fixée par décret en Conseil d'Etat. Ils ne
peuvent être résiliés par l'Etat, avant leur date normale
d'expiration, que dans les formes et les conditions qu'ils stipulent
expressément. Ils sont réputés ne contenir que des clauses
contractuelles.
Dans la limite des dotations ouvertes par la loi de finances de l'année,
correspondant, le cas échéant aux autorisations de programmes
prévues par l'article 4 de la présente loi, les dotations en
capital, subventions, prêts, garanties d'emprunts, agréments
fiscaux et toutes aides financières sont accordées en
priorité par l'Etat dans le cadre des contrats de plan...
-
ART. 13
. - Chaque année, avant la fin du premier trimestre, le
Gouvernement dépose au Parlement un rapport qui retrace l'ensemble des
actions engagées au cours de l'exercice précédent et rend
compte de l'exécution des contrats de plan (alinéa modifié
par l'article 6 de la loi n°96-62 du 29 janvier 1996).
Ce rapport est établi après consultation de la Commission
nationale de planification.
A compter de la deuxième année d'exécution du plan, il
dresse le bilan détaillé des résultats obtenus...
PRINCIPALES DISPOSITIONS DU DECRET DU 21 JANVIER
1982
RELATIF
AUX CONTRATS DE PLAN.
- ART.
1
er
. - Le contrat de plan et les contrats particuliers entre l'Etat
et la région sont élaborés par le président du
conseil régional au nom de la région et par le commissaire de la
République au nom de l'Etat...
- ART. 2. - ...L'avant projet de contrat de plan est soumis au comité
interministériel pour les problèmes d'action régionale et
d'aménagement du territoire, qui se prononce au moins quatre mois avant
la fin de l'année précédant l'entrée en vigueur du
Plan. Le comité interministériel...vérifie notamment la
compatibilité des objectifs retenus avec ceux fixés par la
première loi de plan.
- ART. 3. - Le projet de contrat de plan est établi sur la base des
engagements retenus respectivement par l'Etat dans la deuxième loi de
plan et par la région dans son plan...
- ART. 8. - Des contrats de plan entre l'Etat et les départements, les
communes ou leurs groupements sont élaborés et signés par
le président de l'organe délibérant de la
collectivité ou de l'établissement public et par le commissaire
de la République du département après approbation des
engagements de l'Etat par le comité interministériel pour les
problèmes d'action régionale et d'aménagement du
territoire...
- ART. 10. - Pour l'exécution des contrats de plan et des contrats
particuliers prévus aux articles précédents, les
autorisations de programmes inscrites dans les lois de finances pour les
investissements publics à caractère national sont
déléguées au commissaire de la République de la
région. Ce dernier fait rapport au ministre chargé du Plan et de
l'aménagement du territoire, avant le 31 janvier de chaque année,
de l'exécution, au cours de l'année qui précède,
des contrats de plan et des contrats particuliers....
L'arrêt du T.A. de Montpellier du 8 juillet 1985 M.
Willy
Dimeglio
c/ Conseil régional du Languedoc-Roussillon.
L'article 15 de la loi du 29 juillet 1982 portant
réforme de
la planification, modifié par l'article 27 de la loi du 7 janvier 1983,
disposait que " le plan de la région est élaboré et
approuvé selon la procédure déterminée par chaque
conseil régional qui doit prévoir la
consultation
des
départements, des communes chefs-lieux de départements, des
communes de plus de 100 000 habitants ou des communes associées dans le
cadre de charte intercommunale de développement et d'aménagement,
du comité économique et social régional et des partenaires
économiques et sociaux de la région ".
Faute de consultation préalable des assemblées
délibérantes des conseils généraux le tribunal
administratif de Montpellier, saisi par un conseiller général de
l'Hérault, avait ainsi annulé dans un arrêt du 8 juillet
1985, aussi bien la délibération du 16 mars 1984 par laquelle le
Conseil régional avait adopté le plan régional, que la
délibération du conseil régional en date du 16 avril
portant approbation du contrat de plan : dans un arrêt il est vrai
elliptique, le T.A. de Montpellier avait estimé que l'annulation du plan
régional emportait annulation de la délibération
approuvant le contrat de plan, puisqu'aux termes de l'article 3 du
décret du 21 janvier 1983, "
le projet de contrat de plan est
établi sur la base des engagements retenus respectivement par l'Etat
dans la deuxième loi de plan et
par la région dans son
plan
".
Cet arrêt affirmait donc
qu'il ne saurait y avoir contrat de plan sans
plan
.
Il est d'ailleurs symptomatique que les contrats de plan, lorsqu'ils
mentionnent des
visas
, ne visent qu'exceptionnellement la loi
précitée ou son décret d'application
15(
*
)
. Encore ne le font-ils alors que de
manière partielle, à l'instar du contrat de plan
Etat-Région Pays de la Loire pour 1994-1998, dont l'article 2,
"
du cadre législatif et réglementaire
",
stipule que "
ce contrat constitue un contrat au sens de l'article 11
de la loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification. Il est
établi suivant les dispositions du décret 83-32 du
21 janvier 1983 relatif aux contrats de plan entre l'Etat et les
collectivités territoriales et des personnes morales autres que les
entreprises publiques ou privées
"
16(
*
)
.
Cet état de fait est doublement
préjudiciable
:
- les administrations centrales ont l'entière maîtrise du
calendrier et des règles du jeu, ce qui concourt à
déséquilibrer
la négociation ;
- l'éloignement de la procédure de CPER de son support
législatif entretient le
flou
sur la nature et la portée
des CPER.