SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Convention fiscale avec le Pakistan.
- Adoption d'un projet de loi (p.
1
).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action
humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances ; Guy Fischer, Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Question préalable (p. 2 )
Motion n° 1 de Mme Luc. - MM. Robert Pagès, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet par scrutin public.
Article unique (p. 3 )
Adoption de l'article unique du projet de loi.
3.
Avenant à l'accord fiscal du 25 juillet 1977 avec Malte.
- Adoption d'un projet de loi (p.
4
).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action
humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances ; Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
4.
Convention fiscale avec Israël.
- Adoption d'un projet de loi (p.
5
).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action
humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances ; Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
5.
Convention fiscale avec la Bolivie.
- Adoption d'un projet de loi (p.
6
).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action
humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances ; Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
6.
Avenant à la convention fiscale du 19 décembre 1980 avec la Norvège.
- Adoption d'un projet de loi (p.
7
).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action
humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
7.
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire du Kazakhstan
(p.
8
).
8.
Accord fiscal avec le Panama.
- Adoption d'un projet de loi (p.
9
).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action
humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances ; Robert Pagès, Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
9.
Déclaration de l'urgence d'un projet de loi
(p.
10
).
10.
Candidatures à une commission mixte paritaire
(p.
11
).
Suspension et reprise de la séance (p. 12 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
11.
Rappel au règlement
(p.
13
).
MM. Robert Pagès, le président.
12.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
14
).
13.
Candidature à la délégation parlementaire pour l'Union européenne
(p.
15
).
14.
Réglementation des télécommunications. -
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
16
).
Discussion générale
(suite)
: MM. Gérard Delfau, Michel Pelchat, Pierre
Hérisson, Claude Saunier, Pierre Lagourgue, François Fillon, ministre délégué à
la poste, aux télécommunications et à l'espace ; Gérard Larcher, rapporteur de
la commission des affaires économiques.
Clôture de la discussion générale.
15.
Nomination d'un membre de la délégation parlementaire pour l'Union
européenne
(p.
17
).
16.
Réglementation des télécommunications. -
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
18
).
Exception d'irrecevabilité (p. 19 )
Motion n° 138 de M. Delfau. - MM. Gérard Delfau, Gérard Larcher, rapporteur de la commission des affaires économiques ; François Fillon, ministre délégué à la poste, aux télécommunications et à l'espace. - Rejet par scrutin public.
Question préalable (p. 20 )
Motion n° 57 de Mme Luc. - MM. Félix Leyzour, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet par scrutin public.
Demande de renvoi à la commission (p. 21 )
Motion n° 67 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le ministre délégué, le rapporteur. - Rejet par scrutin public.
Suspension et reprise de la séance
(p.
22
)
Article additionnel avant l'article 1er (p.
23
)
Amendement n° 139 de Mme Pourtaud. - Mme Pourtaud, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Article 1er (p. 24 )
MM. Adrien Gouteyron, Claude Billard, le rapporteur.Amendements n°s 79 à 83 de
M. Billard. - MM. Pagès, Fischer, Mmes Bidard-Reydet, Luc, MM. Leyzour, le
rapporteur, le ministre délégué. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement
n° 79 ; rejet des amendements n°s 80 à 83.
Adoption de l'article.
Article 2 (p. 25 )
MM. Félix Leyzour, Robert Pagès.
Amendements n°s 84 à 88 de M. Billard et 140 à 143 de Mme Pourtaud. - Mme
Bidard-Reydet, M. Fischer, Mme Pourtaud, M. Pagès, Mme Luc, M. Leyzour.
Suspension et reprise de la séance (p. 26 )
PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
Amendements n°s 84 à 88 et 140 à 143
(suite) ;
amendements n°s 1 de la
commission, 144 et 145 de Mme Pourtaud. - MM. le rapporteur, Delfau, le
ministre délégué, Leyzour. - Rejet des amendements n°s 84, 85, 140, 86, 142,
141, 88, 144 et, par scrutin public, des amendements identiques n°s 87 et 143 ;
adoption des amendements n°s 1 et 145.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.
Article 3 (p. 27 )
Amendement n° 2 de la commission. - Adoption. - Amendement n° 134 rectifié de
M. Bourges. - MM. Courtois, le rapporteur, le ministre délégué, Leyzour,
Delfau. - Adoption.
M. Félix Leyzour.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 3 (p. 28 )
Amendement n° 206 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué, Delfau. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 4. - Adoption (p.
29
)
Article 5 (p.
30
)
M. Guy Fischer.
Amendement n° 89 de M. Billard. - MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Article L. 33 du code des postes et télécommunications. -
Adoption
(p.
31
)
Article L. 33-1 du code précité
(p.
32
)
Amendement n° 90 de M. Billard. - Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. le
rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements n°s 146 de Mme Pourtaud et 196 de la commission. - MM. Delfau, le
rapporteur, le ministre délégué, Fischer. - Rejet de l'amendement n° 146 ;
adoption de l'amendement n° 196.
Amendements n°s 91 de M. Loridant et 147 de Mme Pourtaud. - MM. Loridant,
Delfau, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet, par scrutin public, de
l'amendement n° 91 ; rejet de l'amendement n° 147.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Amendement n° 92 de M. Billard. - MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Amendement n° 148 de Mme Pourtaud. - MM. Delfau, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L. 33-2 du code précité (p. 33 )
Amendement n° 93 de M. Billard. - MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre
délégué, Pelchat. - Rejet.
Adoption de l'article du code.
Article L. 33-3 du code précité. - Adoption
(p.
34
)
Article L. 33-4 du code précité
(p.
35
)
Amendements n°s 94 de M. Billard et 6 rectifié de la commission. - MM. Fischer,
le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet de l'amendement n° 94 ; adoption de
l'amendement n° 6 rectifié.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L. 34 du code précité. - Adoption
(p.
36
)
Article L. 34-1 du code précité
(p.
37
)
Amendement n° 149 de Mme Pourtaud. - MM. Delfau, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article du code.
Article L. 34-2 du code précité (p. 38 )
Amendement n° 77 rectifié de Mme Bardou. - Mme Bardou, MM. le rapporteur, le
ministre délégué, Delfau, Leyzour. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L. 34-3 du code précité (p. 39 )
Amendement n° 167 de M. Trégouët. - MM. Trégouët, le rapporteur, le ministre
délégué. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L. 34-4 du code précité (p. 40 )
Amendements n°s 95 de M. Billard, 96, 97 de M. Loridant, 150 à 152 de Mme
Pourtaud, 7 de la commission et sous-amendement n° 153 de Mme Pourtaud ;
amendement n° 168 de M. Trégouët. - MM. Leyzour, Loridant, Delfau, Trégouët, le
rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 168 ; rejet des
amendements n°s 95, 96 et 150, 151, 97, 152 et du sous-amendement n° 153 ;
adoption de l'amendement n° 7.
Adoption de l'article du code, modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
17.
Transmission de projets de loi
(p.
41
).
18. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 42 ).
19. Dépôt de rapports (p. 43 ).
20. Ordre du jour (p. 44 ).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures cinquante.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CONVENTION FISCALE AVEC LE PAKISTAN
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 225, 1995-1996),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention
entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la
République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de
prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu
(ensemble un protocole). [Rapport n° 386 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la
convention conclue entre la France et le Pakistan le 15 juin 1994 qui est
aujourd'hui soumise à votre approbation tend à éviter les doubles impositions
entre la France et le Pakistan en matière d'impôts sur le revenu. Elle
remplacera la convention actuelle, qui date de 1966.
Comme toutes les conventions fiscales conclues par la France, ses dispositions
sont inspirées du modèle de l'OCDE. Toutefois, afin de tenir compte des
différences de développement économique entre nos deux Etats, certains articles
sont repris du modèle de l'ONU. Ainsi, en ce qui concerne l'imposition des
bénéfices des entreprises de navigation aérienne, la France a accepté de
déroger à la règle habituelle de l'imposition de ces bénéfices exclusivement
dans l'Etat du siège de direction effective. Ces bénéfices seront donc
imposables également dans l'Etat de la source.
Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant
à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet Etat.
Toutefois, l'Etat de la source pourra imposer à la source à un taux n'excédant
pas 15 p. 100. Le principe est le même pour les intérêts et redevances, à la
différence que la retenue à la source ne pourra excéder 10 p. 100.
Cette convention devrait permettre à nos relations économiques de se
développer. En effet, le Pakistan occupe pour l'instant une place modeste dans
notre commerce extérieur puisqu'il n'est que notre soixante-douzième
fournisseur et notre quatre-vingt-quatorzième client. Toutefois, grâce à la
libéralisation de l'économie pakistanaise et au processus de privatisation en
cours, des perspectives intéressantes devraient s'offrir à nos entreprises. A
cet égard, je rappelle que nos échanges ont augmenté l'année dernière de 42 p.
100, notamment grâce à l'implantation d'entreprises du secteur de l'énergie ou
des télécommunications.
Si nos relations économiques sont encore faibles, nous nous félicitons en
revanche du climat politique confiant, qui s'est d'ailleurs renforcé depuis le
retour au pouvoir de Mme Bhutto. Par ailleurs, les relations
franco-pakistanaises sont particulièrement étroites dans le domaine militaire,
comme en témoigne la vente, à l'automne dernier, de sous-marins français à
Islamabad. Il convient, en outre, de souligner que la fraternité d'armes
existant entre les soldats de nos deux pays à l'occasion des opérations de
maintien de la paix, naguère au Koweït, au Cambodge, en Somalie et aujourd'hui
en Bosnie, est un sujet de satisfaction pour nos deux gouvernements.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention
fiscale franco-pakistanaise qui fait l'objet du projet de loi soumis à votre
approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Pakistan, qui compte une population
de 130 millions d'habitants, est dirigé depuis deux ans par Mme Benazir Bhutto,
qui doit faire face à une opposition très vive.
Des troubles agitent régulièrement le Pendjab, la province clé du pays avec 60
millions d'habitants, la province frontière du nord-ouest et le
Baloutchistan.
La situation politique intérieure reste donc difficile. Il en va de même pour
la politique extérieure pakistanaise, toujours confrontée à la question des
relations avec le voisin indien et marquée par des contacts forts, mais non
dénués d'ambiguïté avec la Chine et l'Iran.
Le malaise politique et social constitue un handicap pour le développement
économique du pays.
Le taux de croissance, 4,7 p. 100 en 1994-1995, dépend très étroitement des
résultats de la production agricole et en particulier de la récolte de
coton.
Le niveau des investissements reste insuffisant, ce qui explique la pauvreté
de ce pays.
Les relations bilatérales entre la France et le Pakistan sont confiantes comme
le démontrent les visites de Mme Bhutto à Paris et l'engagement du Pakistan aux
côtés de la France dans nombre d'opérations de maintien de la paix menées sous
l'égide de l'ONU.
En ce qui concerne les aspects économiques, si le Pakistan n'est qu'un
partenaire modeste - il occupe le cinquante et unième rang de nos fournisseurs
et le cinquantième rang de nos clients - la France est le neuvième fournisseur
du pays et son huitième client.
Les flux d'échange se sont développés et dégagent le plus souvent un excédent
en notre faveur.
Les exportations françaises sont constituées de produits industriels tandis
que nos importations sont concentrées sur les produits textiles, l'habillement,
le cuir et les chaussures.
En ce qui concerne les investissements directs, notre présence au Pakistan est
faible. Elle n'est pas à la hauteur des six protocoles financiers passés avec
ce pays pour un total de 2,1 milliards de francs ces quatre dernières
années.
J'en viens aux dispositions techniques de l'accord.
Comme toutes les conventions que nous allons examiner ce matin, sauf une, il
s'agit de la reprise de la convention type OCDE et ce n'est qu'une variation
par rapport à cette convention type qui fait donc l'objet des négociations.
Dans le cas précis, il s'agissait de mettre à jour la convention fiscale de
1966. La convention est du type le plus classique et n'appelle pas de
commentaire particulier.
C'est la raison pour laquelle, la commission unanime s'est prononcée pour la
ratification de cette convention et vous invite, mes chers collègues, à faire
de même.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
dans la présentation qui nous a été faite par M. le ministre et M. le
rapporteur, on s'aperçoit que les échanges entre notre pays et le Pakistan,
s'ils restent faibles, progressent néanmoins de manière substantielle.
Ainsi, l'an passé, avons-nous conclu des contrats dans les domaines de
l'énergie et des télécommunications. Nous sommes favorables à ce que de tels
échanges puissent se multiplier.
Pour autant, concernant ce pays et les accords que nous pouvons signer, nous
avons quelques interrogations auxquelles nous aimerions que le Gouvernement
apporte des réponses.
Bien entendu, le problème du travail des enfants sur lequel sera fondée la
question préalable déposée par notre groupe est le point majeur de ces
interrogations.
Mais il en est un autre sur lequel nous ne pouvons rester silencieux, il
s'agit de la production, du commerce de la drogue et du blanchiment de l'argent
des revenus de ce trafic. Chacun d'entre nous le sait : c'est une question
primordiale qui secoue notre planète. Or le Pakistan est une plaque tournante
du trafic de l'opium.
Aujourd'hui, l'économie mondiale de la drogue, cela représente de 300 à 500
milliards de dollars. C'est une organisation criminelle à l'échelle planétaire.
Ce sont des pays qui vivent au rythme de cet or blanc.
Ce que l'on voit dans notre pays n'est bien souvent que le bout de la chaîne
entre des revendeurs et des consommateurs. Car cette économie mondialisée de la
drogue est parfaitement structurée. Elle est typiquement capitaliste, exploite
le paysan producteur des pays du Sud, manipule le consommateur, enrichissant
une cohorte d'intermédiaires parasitaires : grossistes et détaillants, parrains
et financiers, ainsi que leurs protecteurs, policiers, juges, militaires et
politiciens. Comment pourrait-on ignorer la place du Pakistan dans ce trafic
?
C'est ce que montre M. Christian de Brie dans
le Monde diplomatique
lorsqu'il écrit : « Dans certains pays - Pakistan, Birmanie, Panama, Pérou
- pour lesquels on peut parler de narco-régimes ou de narco-dictatures, c'est
tout l'appareil d'Etat ou de larges secteurs de l'armée, de la police et des
services secrets qui sont gangrenés. Dans tous ces pays, le système bancaire
participe activement au blanchiment et au recyclage de l'argent de la drogue,
en particulier par l'intermédiaire de filières et de correspondants implantés
sur l'archipel mondial des paradis fiscaux. »
Vous le voyez, mes chers collègues, le Pakistan n'est pas épargné.
Mais c'est tout le système de développement planétaire qui est en cause. En
effet, le rôle de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international n'est
pas neutre. Ces deux institutions imposent et font respecter des plans
d'ajustement destructeurs pour les économies fragiles des pays du Sud.
Quoi de plus normal, pour les paysans, que de rechercher les activités les
plus lucratives ?
Les institutions financières internationales jouent également un rôle trouble
en matière de blanchiment.
Prenons l'exemple des pays de l'Est, qui sont brutalement passés d'une
économie étatisée au libéralisme le plus effréné. On leur a sans cesse
recommandé de procéder à une privatisation massive, voire totale de leur
économie, sans leur fournir les fonds nécessaires. Que s'est-il passé ? Eh
bien, ces pays, et particulièrement la Hongrie, sont devenus des lieux de choix
pour le blanchiment de l'argent sale.
Bien entendu, l'existence et la recrudescence de paradis
off shore
ne
sont pas fortuites. Ce sont des lieux où le brassage des capitaux est tel, où
les circuits empruntent de si nombreux dédales que personne ne s'y reconnaît
plus. Mais, comme le dit l'adage populaire, « l'argent n'a pas d'odeur ».
En fait, la dualité de l'économie mondiale et l'accroissement des inégalités
entre le Nord et les populations d'un grand nombre de régions du Sud, en
Amérique latine, en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud-Ouest et du Sud-Est,
en Europe centrale et en ex-URSS, ainsi que dans le Bassin méditerranéen, ne
peuvent que continuer à favoriser le développement de la culture et de la
production de drogues.
L'argent de la drogue est aussi un élément central des conflits régionaux. Or
le Pakistan, que ce soit en Afghanistan ou au Cachemire, est impliqué dans de
tels conflits.
C'est pourquoi il nous semble que, en nous proposant d'approuver cette
convention, on passe à côté de l'essentiel. Certes, cette convention bilatérale
ne vise qu'à régler le problème des doubles impositions et à prévenir l'évasion
et la fraude fiscales entre notre pays et le Pakistan. Mais on ne peut plus se
contenter de dire que le Pakistan fait des efforts, que son économie se
renforce, que la démocratie avance dans ce pays et fermer les yeux sur des
questions fondamentales au regard des droits de l'homme.
C'est la raison pour laquelle, contrairement à l'usage généralement observé,
les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre le
texte autorisant l'approbation de cette convention.
Bien entendu, ce n'est pas au peuple pakistanais que nous nous en prenons en
agissant ainsi ; c'est à tous ceux qui vivent du commerce de la drogue.
Nous souhaitons également, par ce geste, interpeller le Gouvernement - et je
suis certain, monsieur le secrétaire d'Etat, que, compte tenu de vos activités
passées et présentes, vous serez sensible à notre message - pour qu'il agisse
avec plus de vigueur qu'il ne l'a fait auprès des instances internationales et
des Etats les plus impliqués. Le Pakistan, qui forme avec l'Iran, l'Inde et
l'Afghanistan ce que l'on nomme le « croissant d'or », est de ceux-là.
Il est urgent, mes chers collègues, de prendre la mesure de ce trafic et de
nous y attaquer avec force, de nous opposer résolument au travail des enfants.
C'est pourquoi je vous invite à vous prononcer contre ce texte.
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en
tant que vice-président du groupe d'amitié France-Pakistan, je souhaiterais
apporter un « bémol » aux propos que vient de tenir M. Fischer.
Il est exact qu'il existe au Pakistan des problèmes liés à la drogue et au
travail des enfants. Ces deux maux ont, à juste raison, été longuement évoqués
lors de la visite qu'a effectuée Mme Benazir Bhutto dans notre pays. De même, à
l'occasion de notre dernier voyage à Islamabad, nous avons pu nous en
entretenir avec nos homologues du Parlement pakistanais et leur dire à quel
point cet état de choses nous paraissait répréhensible et dommageable.
Toutefois, il faut le dire, le Pakistan est très loin d'être le seul pays à
produire de la drogue ou à blanchir l'argent de la drogue. Nous pourrions en
désigner une dizaine, au moins, où s'observent les mêmes pratiques.
Quant au travail des enfants, il est notoire que les « dragons »
d'Extrême-Orient y ont recours : bien des chaussures et des produits textiles
venant de ces pays sont fabriqués dans des conditions qui n'ont rien à voir
avec celles qui prévalent en Europe et qui sont tout à fait condamnables. Il en
résulte d'ailleurs pour nos industries une concurrence déloyale et extrêmement
grave, à laquelle nous ne devons pas cesser d'être très attentifs.
Il reste que le Pakistan ne peut pas être présenté seulement sous ce jour
sombre.
Nous avons eu, avec ce pays, des échanges commerciaux importants, qui n'ont
pas cessé d'être favorables à notre balance extérieure. Notre flux d'échanges
est de l'ordre de trois milliards à quatre milliards de francs par an.
Par ailleurs, dans l'optique de la suppression du service national en France
et de la réorganisation des usines travaillant pour la défense nationale, nous
ne devons pas négliger certains pays qui ont passé avec nous des commandes
assez importantes.
Bien sûr, nous ne saurions, pour des raisons économiques, faire l'impasse sur
les droits de l'homme et ignorer certains aspects de la situation politique et
sociale qui prévaut dans tel ou tel pays. Mais nous ne pouvons ignorer non plus
que nous avons, avec certains d'entre eux, des échanges tout à fait favorables,
qu'il serait préjudiciable d'interrompre.
J'ajoute que le demi-millier de Français qui résident au Pakistan y vivent
dans de bonnes conditions et participent très largement à nos exportations
ainsi qu'au rayonnement de notre pays dans cette région du monde.
Tels sont les éléments positifs que je voulais souligner concernant le
Pakistan, après le tableau très sombre qu'a brossé M. Fischer, même si les
points sur lesquels il a insisté ne peuvent être niés : nous les déplorons
comme lui.
Nous pensons, cependant, que le fait de repousser ce texte ne changerait rien
au problème de fond.
En revanche, cette convention nous permettra de poursuivre nos échanges avec
ce pays dans des conditions favorables pour nos compatriotes du Pakistan, en
même temps qu'il nous mettra en position d'agir pour essayer de faire en sorte
que des règles de travail plus morales et plus normales soient instaurées
là-bas.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Question préalable
M. le président.
Je suis saisi, par Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et
citoyen, d'une motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide
qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté
par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le
Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir
l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un
protocole) (n° 225, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative
ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour
quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond
et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée
n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Pagès, pour défendre la motion.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
convention fiscale entre notre pays et le Pakistan qu'il nous est proposé
d'entériner aujourd'hui est des plus classiques. Elle est similaire à bien
d'autres conventions qui concernent, en particulier, la question de la double
imposition.
En règle générale, personne, dans cet hémicycle, ne trouve à redire à de tels
textes, qui reprennent le modèle de l'OCDE, retouché par l'organisation des
Nations unies, et qui permettent de mieux prendre en compte la réalité du
développement de certains pays. Comment pourrait-il en être autrement alors que
de tels accords bilatéraux sont essentiellement techniques et font en sorte,
fort heureusement, que les légisations nationales de chacune des parties soient
respectées ?
Toutefois, l'attitude qui prévaut habituellement et qui consiste à laisser
passer sans réaction particulière une convention telle que celle dont nous
sommes saisis ne peut ête, selon nous, observée aujourd'hui.
En effet, dans le cas du Pakistan, la question centrale du travail des enfants
ne saurait être ignorée. Ce serait un déshonneur que de passer sous silence
cette réalité.
Certes, ce pays n'a pas le monopole de cette infamie, mais chacun sait combien
certains industriels peu scrupuleux de cet Etat ont institutionnalisé
l'exploitation des plus jeunes, parfois dès l'âge de quatre ans.
La discussion de ce texte bilatéral est donc bien une occasion privilégiée
pour que notre pays fasse entendre sa voix auprès des autorités pakistanaises
et réaffirme la plus ferme condamnation de ce servage des temps dits « modernes
».
Sur la planète, selon les diverses estimations des organisations
internationales, ce sont 100 à 200 millions d'enfants de moins de quinze ans
qui exercent une activité économique. Ils le font, bien entendu, pour survivre,
pour faire survivre leur famille, mais aussi, bien souvent, sous la contrainte,
après avoir été achetés. Des cas récents ont révélé les mauvais traitements
auxquels sont soumis ces enfants, pouvant aller jusqu'aux sévices sexuels.
Vous savez, mes chers collègues, que les sénateurs du groupe communiste
républicain et citoyen oeuvrent avec beaucoup d'énergie pour que les droits des
enfants soient reconnus et respectés. D'autres, bien sûr, le font avec nous.
C'est d'autant plus nécessaire que l'exploitation qui frappe les plus jeunes
n'est qu'une des manifestations extrêmes des formes d'exploitation existant sur
un marché du travail soumis aux thèses les plus libérales et antisociales.
Quand on ne respecte pas la dignité et la vie des enfants, comment les droits
sociaux les plus élémentaires pourraient-ils être reconnus ?
C'est pourquoi nous tenons à alerter l'opinion sur le Pakistan, où la
situation à cet égard est insupportable.
Selon le Bureau international du travail, sur 62 millions d'enfants de moins
de seize ans, 20 millions travailleraient, dont 7,5 millions en servitude ! On
mesure l'ampleur de la tâche qui incombe à notre pays, entre autres, pour faire
en sorte que cesse ce véritable trafic.
Et quand on parle du Pakistan, on ne peut oublier l'histoire tragique du jeune
Iqbal Massih mort, voilà un peu plus d'un an d'avoir dénoncé ce sytème et ceux
qui en profitent.
Iqbal Massih avait pris la tête d'un combat qui ne peut laisser personne
indifférent. Il avait décidé de rompre le silence et racontait, de par le
monde, comment vivent des centaines de milliers d'enfants pakistanais dans les
filatures, les pêcheries, les briquetteries, les ateliers de tapisserie, les
verreries, etc.
L'assassinat du jeune Iqbal montre, s'il en était besoin, combien une telle
action peut déranger ceux qui vivent de cette exploitation honteuse. Cela doit
renforcer la volonté de la France de dénoncer en toutes circonstances des
pratiques ausi indignes. Je le répète, l'occasion nous est donnée de le faire
aujourd'hui.
C'est d'autant plus décisif que le président du front de libération contre le
travail forcé des enfants au Pakistan, Eshan Ullak Khan, explique que
l'assassinat d'Iqbal est sûrement le fait de la « mafia du tapis », la
toute-puissante association des fabriquants et exportateurs de tapis du
Pakistan.
Cette mafia est si puissante dans ce pays qu'elle parvient à justifier
l'exploitation des enfants par une prétendue « tradition nationale ».
Ainsi, une soi-disant « commission des droits de l'homme » pakistanaise,
saisie du problème du travail des enfants dans l'industrie du tapis, a conclu
que « le tissage fait partie des traditions nationales » et qu'il serait «
imprudent d'appliquer la loi interdisant le travail des enfants dans les
conditions de la concurrence internationale ».
C'est à ce genre de phrases que l'on peut mesurer la volonté réelle d'un
partenaire. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les industriels
pakistanais ne semblent pas enclins à abandonner leur trafic !
Une autre affaire, du même acabit, doit également susciter, plus que des
remous, une réprobation de toute la communauté internationale.
Le championnat d'Europe des nations de football, chacun le sait, s'ouvre à la
fin de cette semaine en Angleterre. Le football draine une grande partie de la
jeunesse, qui trouve dans les joueurs des exemples et dans ce sport des espoirs
et du rêve. Cette compétition est donc un moment très attendu par toute la
jeunesse d'Europe.
Mais que penseraient nos jeunes s'ils savaient que les ballons avec lesquels
ils jouent, comme ceux avec lesquels jouent leurs idoles sont fabriqués par des
enfants, et dans des conditions inadmissibles. En effet, 80 p. 100 des ballons
de football utilisés dans le monde proviennent du Pakistan, principalement de
la ville de Sialkot.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen tiennent à se faire
l'écho des propos de la fédération internationale des travailleurs du textile,
du cuir et de l'habillement.
Par la voix de son secrétaire général, M. Neil Kearney, les travailleurs du
textile, du cuir et de l'habillement ont, le 28 mai dernier, demandé à la
fédération internationale de football et à l'union européenne de football
d'examiner les conditions d'esclavage des enfants pakistanais qui fabriquent
les ballons utilisés lors de la prochaine compétition.
Selon M. Kearney, « ces ballons sont fabriqués par des enfants dont certains
ont à peine six ans. Ils travaillent péniblement, dans des ateliers mal
éclairés... Ils sont vendus et revendus comme des pièces de rechange, marqués,
battus et parfois aveuglés ». Excusez mon émotion mais j'ai des petits-enfants
de cet âge.
« Le monde du football, poursuit M. Kearney, devrait être honteux que
l'élément central de ce sport soit produit par une industrie où presque chaque
usine possède un local de punition pour les enfants..., où ils sont pendus par
les genoux, tête en bas, affamés, frappés à coups de bâton ou fouettés. »
« L'industrie du football, conclut-il, s'est enrichie sur le dos de ces
enfants ; elle devrait à présent faire amende honorable. »
Il nous semble évident que de telles déclarations de la part de la fédération
internationale des travailleurs du textile, du cuir et de l'habillement ne
peuvent rester sans réponse de notre part.
Ce serait d'autant plus intolérable que le Parlement français, sur proposition
du groupe communiste républicain et citoyen du Sénat et de nos collègues du
groupe communiste et apparenté de l'Assemblée nationale, a décidé, voilà peu,
d'accorder une place particulière aux droits de l'enfant. J'ai d'ailleurs été
le rapporteur de ce texte.
Or si le 20 novembre prochain sera une journée dédiée aux enfants, il reste
qu'il nous faut donner du corps à cette journée, pour qu'elle ne soit pas une
coquille vide.
Je suis persuadé qu'une intervention immédiate auprès de la fédération
internationale de football pour que les ballons utilisés lors de l'Euro 96
soient produits de manière légale et dans des conditions décentes serait
appréciée de tous les enfants du monde.
Dans le même temps, monsieur le secrétaire d'Etat, notre groupe souhaiterait
une intervention du Gouvernement auprès des institutions internationales et des
autorités pakistanaises sur ce point précis.
En conclusion, il faut trouver les solutions qui permettront d'éradiquer cette
exploitation scandaleuse.
La première réponse pourrait consister à imposer un label sur certains
produits importés avec un système d'étiquetage certifiant qu'aucun enfant n'a
été impliqué dans la production. C'est le combat des associations
internationales, combat que le Gouvernement français pourrait porter devant les
organismes internationaux, relayant ainsi efficacement les efforts de ceux qui
n'acceptent pas le statu quo.
La deuxième réponse est européenne. Notre pays pourrait intervenir pour que
l'Union européenne crée une taxe spécifique et dissuasive à l'importation de
produits provenant de pays où la protection sociale minimale et l'interdiction
du travail des enfants ne seraient pas assurées.
La troisième réponse est nationale et hautement symbolique. Elle consiste à
mettre à chaque fois sur la table, la question du travail des enfants lorsqu'un
pays est le lieu d'un tel trafic. Cela commence, pour ce qui nous concerne
aujourd'hui, par repousser ce texte en adoptant la question préalable que je
viens de défendre.
En agissant ainsi, c'est non pas à l'égard du peuple pakistanais que le Sénat
manifesterait sa défiance, mais à l'égard de ceux qui se croient à l'abri de
toutes remarques et qui plongent les enfants dans la vie active en leur volant
leur jeunesse. Par un tel choix, le Sénat adresserait un message d'espoir à
celles et à ceux qui, au péril de leur vie parfois, se battent pour que la
dignité et le respect de la personne humaine l'emportent sur la barbarie.
C'est pourquoi, mes chers collègues, au nom des sénateurs du groupe communiste
républicain et citoyen, je vous invite à adopter cette question préalable,
symbole du refus de l'exploitation des enfants. Ce serait tout à l'honneur du
Sénat et de la France que de délivrer un tel message.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Y a-t-il un orateur contre ?...
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Chaumont,
rapporteur.
La commission des finances n'a pas eu à connaître de cette
question préalable. Ayant été saisie, par le Gouvernement, de l'examen d'une
convention tendant à éliminer les doubles impositions entre la France et le
Pakistan, elle n'aurait de toute façon pas eu à se prononcer au fond sur cette
motion. Je m'exprimerai donc à titre personnel.
Les questions qui ont été soulevées par nos collègues du groupe communiste
républicain et citoyen sont très importantes, et tous les parlementaires sont
sensibles à la très grande gravité des faits qui viennent d'être évoqués.
Je tiens simplement à rappeler que le Parlement a ratifié la convention
internationale sur les droits de l'enfant. La France a d'ailleurs été l'un des
premiers pays à ratifier cette convention due à l'initiative du professeur
Robert Debré, qui fut l'un des fondateurs de l'UNICEF.
Bien entendu, le champ d'application de cette convention reste quelque peu
décevant dans la mesure où il est difficile de parvenir à des résultats
concrets, mais, dans un certain nombre de domaines, y compris dans celui qui
est très sensible de la prostitution enfantine, la pression morale exercée par
le biais de cette convention a permis d'obtenir certaines améliorations dans
les pays les plus concernés.
Je suis persuadé que c'est par le biais de l'action internationale et des
conventions, en particulier celle sur les droits de l'enfant, qu'il est
possible d'exercer une véritable pression et d'améliorer le sort de ces
enfants.
D'une manière plus générale, tant en ce qui concerne le travail des enfants
qu'en ce qui concerne leurs conditions de vie et la prostitution enfantine, il
n'est pas de solution en dehors d'une véritable lutte contre la pauvreté pour
mettre fin à cette misère, qui est le fondement même de tous ces maux.
Il s'agit donc d'un problème considérable auquel le Gouvernement français, de
nombreuses organisations non gouvernementales, les ONG, et les organisations
internationales se sont attelés.
Je n'irai pas jusqu'à dire que j'approuve totalement les propos de mes
collègues du groupe communiste républicain et citoyen sur les ajustements
structurels, l'action de la Banque mondiale et celle du Fonds monétaire
international mais il est clair que la brutalité des méthodes mises en place
sous l'influence de la pensée anglo-saxone a parfois provoqué de véritables
drames et qu'il faut introduire une plus grande humanité dans la manière de
traiter les problèmes du sous-développement et de l'amélioration des conditions
de vie des plus pauvres.
Par conséquent, sur l'essentiel, je ne partage peut-être pas l'analyse de nos
collègues du groupe communiste républicain et citoyen, mais je comprends les
préoccupations qui les animent. Toutefois, je n'inviterai pas le Sénat à ne pas
ratifier cette convention. Il s'agit, en effet, d'un texte mineur très précis.
En outre, le problème évoqué aujourd'hui concerne certes le Pakistan mais aussi
un nombre considérable de pays.
Je veux bien que nous débattions de ce problème dans son ensemble, mais ne
montrer du doigt que le Pakistan serait, me semble-t-il, une manière dévoyée de
le traiter.
M. Robert Pagès.
Il ne s'agit pas de cela !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cette
motion. Certes, j'aurais des choses à dire, mais tel n'est pas l'objet du
projet de loi qui vous est soumis.
(M. Pagès proteste.)
M. le président.
Quelqu'un demande-t-il la parole pour explication de vote ?...
Je mets aux voix la motion n° 1, repoussée par la commission et par le
Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°88 :
:
Nombre de votants | Nombre de votants |
Nombre de suffrages exprimés | 218 |
Nombre de votants | Nombre de suffrages exprimés |
Nombre de suffrages exprimés | 218 |
Nombre de votants | Majorité absolue des suffrages exprimés |
Nombre de suffrages exprimés | 110 |
Nombre de votants | Pour l'adoptiion |
Nombre de suffrages exprimés | 15 |
Nombre de votants | Contre |
Nombre de suffrages exprimés | 203 |
Nous passons à la discussion de l'article unique.
M. le président. « Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un protocole), signée à Paris le 15 juin 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
M. Robert Pagès.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Le projet de loi est adopté.)
3
AVENANT À L'ACCORD FISCAL
DU 25 JUILLET 1977 AVEC MALTE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 224, 1995-1996),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant
(ensemble un échange de lettres) à l'accord du 25 juillet 1977 entre le
Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de
Malte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale
en matière d'impôts sur le revenu. [Rapport n° 385 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la France
et Malte sont liés depuis le 25 juillet 1977 par une convention visant à éviter
les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur
le revenu.
Depuis la conclusion de cet accord, le gouvernement maltais a créé une zone
d'activité dite
off shore
assortie d'une zone portuaire franche.
Afin d'éviter tout risque d'évasion fiscale, nous avons souhaité négocier un
avenant à la convention de 1977 de manière à exclure de son champ d'application
les sociétés établies dans la zone
off shore.
Les autorités maltaises,
comprenant nos préoccupations, ont accepté d'engager rapidement des
négociations. Celles-ci ont abouti à l'accord qui est aujourd'hui soumis à
votre approbation et qui a été signé le 8 juillet 1994 par M. Lamassoure lors
de sa visite officielle à La Vallette.
La négociation de cet avenant a également été l'occasion d'actualiser la
convention. Ainsi, l'article 7 prévoit une nouvelle méthode d'élimination des
doubles impositions. Alors que dans l'accord actuel les revenus de source
maltaise sont exonérés sous réserve de la règle du taux effectif, ils seront
désormais imposables en France lorsqu'ils sont reçus par un résident de France.
La double imposition est éliminée par l'octroi d'un crédit d'impôt égal à
l'impôt payé à Malte, dans la limite de l'impôt français correspondant à ces
revenus.
Enfin, l'impôt sur la fortune fait dorénavant partie des impôts couverts par
l'accord de 1977.
Très faibles jusqu'en 1987, nos relations avec Malte commencent à se
développer. La France est, aujourd'hui, le troisième client de Malte, soit 10,3
p. 100 des exportations maltaises, devant le Royaume-Uni, et son quatrième
fournisseur, soit 8,3 p. 100 des importations maltaises. La politique de
réalisation de nouvelles infrastructures menée actuellement par Malte nous
ouvre la perspective de grands contrats dans les domaines de l'énergie, de
l'aéronautique, des équipements sanitaires et des télécommunications.
Grâce à l'avenant à l'accord fiscal de 1977, nous pouvons espérer que nos
sociétés qui iront s'implanter à Malte ne le feront pas dans le seul but
d'échapper à l'impôt en France, puisque seules les véritables implantations
industrielles et commerciales créatrices d'emploi à Malte continueront à
bénéficier de l'accord de non-double imposition.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
principales observations qu'appelle l'avenant à l'accord fiscal franco-maltais
qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, indépendante depuis 1964, la République
de Malte est une démocratie calquée sur le modèle britannique, avec un parti
travailliste et un parti conservateur. Ce dernier est au pouvoir depuis 1987
et, ce qui est important, c'est que l'un des thèmes de ce parti est l'adhésion
de Malte à l'Union européenne.
Compte tenu de la position géographique privilégiée de la République de Malte
dans la Méditerranée, la France ne peut se désintéresser de ce pays. En effet,
son produit intérieur brut par habitant s'élève à quelque 70 000 dollars et se
situe au même niveau que celui de la Grèce et du Portugal. Il n'y a
pratiquement pas de chômage et le taux de croissance est de l'ordre de 5 p. 100
par an. De plus, souhaitant se développer sur le plan économique, ce pays a
décidé d'instituer des zones offshore et un certain nombre de facilités
fiscales.
Comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat, nous entretenons avec ce pays des
relations privilégiées dans le domaine commercial. Nos échanges sont, pour
l'essentiel, nourris par la société SGS-Thomson composants électroniques qui
assurerait 13 p. 100 du produit intérieur brut maltais et 48 p. 100 des
exportations de ce pays.
Compte tenu des mesures que vient de prendre le gouvernement maltais, avec la
création d'une zone franche et d'une zone d'activité
off shore,
cette
convention est nécessaire pour contrecarrer les risques d'évasion fiscale. M.
le secrétaire d'Etat vient de rappeler les conditions de ces mesures.
Il faut signaler que l'avenant inclut dans le dispositif conventionnel l'impôt
français de solidarité sur la fortune. Cela est important en matière d'évasion
fiscale. Les Maltais ont accepté cette disposition. Pour le reste, cette
convention est de type très classique. C'est la raison pour laquelle la
commission des finances, unanime, a adopté le projet de loi visant à en
autoriser l'approbation et vous invite, mes chers collègues, à faire de
même.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Comment ne pas rappeler, à l'occasion de l'examen d'un projet de loi
autorisant l'approbation d'une convention fiscale entre la France et Malte, ce
que fut, pendant sept siècles, du xie au xviiie, la présence française dans ce
pays ?
Cette présence, commencée sous la dynastie normande de Sicile au xie siècle,
s'était poursuivie avec les Angevins de Naples. En 1530 arrivèrent les
Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem qui, bientôt, devenus chevaliers de
Malte, contrôlèrent à partir de cette petite île la Méditerranée tout
entière.
Sur soixante-dix-huit grands maîtres de « l'ordre souverain » de Malte, une
cinquantaine étaient Français. Cet ordre constitua une force spirituelle et une
puissance maritime et financière tout à fait remarquable. Les chevaliers
créèrent à Malte un centre naval de première grandeur et, dans le même temps,
accomplirent une oeuvre civilisatrice exceptionnelle.
Aujourd'hui, il y a moins de deux cents Français à Malte, nos intérêts y sont
très faibles. Dans la capitale, qui porte toujours le nom de son fondateur Jean
Parisot de La Valette, les traces visibles de cette époque sont les magnifiques
hôtels des chevaliers de Malte. Après cet instant de nostalgie, nous aurons au
moins la consolation d'aller faire du tourisme là-bas.
Nous nous réjouissons de cet accord qui fixe les modalités des échanges,
actuellement bien limités, entre notre pays et cette petite île, dont la
renommée fut si grande dans le passé, en rassemblant souvent le meilleur de la
France.
M. Jacques Chaumont,
raporteur.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique
. - Est autorisée l'approbation de l'avenant (ensemble
un échange de lettres) à l'accord du 25 juillet 1977 entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République de Malte tendant à
éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière
d'impôts sur le revenu, signé à La Valette le 8 juillet 1994, et dont le texte
est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
4
CONVENTION FISCALE AVEC ISRAËL
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 289, 1995-1996),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention
entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat
d'Israël en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la
fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. [Rapport
n° 388 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, la France et Israël ont conclu,
le 31 juillet 1995, une nouvelle convention fiscale en vue d'éviter les doubles
impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. Ce texte se
substituera à l'actuelle convention du 20 août 1963, devenue inadaptée en
raison de l'évolution de nos législations internes respectives et de la
structure de nos échanges économiques.
Engagées en juillet 1992, les négociations se sont déroulées dans un excellent
climat. La nouvelle convention est, dans son ensemble, conforme au modèle de
convention fiscale élaboré par l'OCDE, que vous connaissez. Je me bornerai donc
à ne mentionner que ses aspects originaux par rapport au modèle de l'OCDE,
résultant de la spécificité de la législation fiscale française et de la
pratique conventionnelle propre à notre pays.
C'est ainsi que les titres de sociétés immobilières sont assimilés aux fins
d'imposition à des biens immobiliers et que plusieurs dispositions visent à
éviter l'usage abusif des clauses conventionnelles. Par ailleurs, l'exonération
des dons et legs consentis au profit d'un Etat, de ses collectivités locales et
de ses organismes à but non lucratif, tient compte des spécificités des
législations des deux Etats.
Enfin, certains dividendes de source israélienne, payés à des résidents de
France, donneront droit à un crédit d'impôt fictif ou forfaitaire pendant une
période de sept ans, alors que cet avantage était accordé, par l'actuelle
convention, sans limitation de durée. Cette clause permet en réalité de ne pas
imposer des revenus qui, en Israël, sont exonérés pour faciliter le
développement économique.
J'ajouterai que l'évolution de nos échanges commerciaux avec Israël est
satisfaisante. Ces derniers ont progressé de 14 p. 100 en volume en 1995 et la
France a réalisé un excédent commercial de 470 millions de dollars. La présence
économique française dans cet Etat est relativement faible. Ce pays semble ne
représenter pour nos entreprises qu'un marché de commerce courant. En effet,
seule une dizaine d'entreprises françaises, parmi lesquelles l'Oréal ou le Club
Méditerranée, y ont des délégations ou des implantations commerciales. De
nombreux contacts ont été engagés depuis deux ans, tant sur le commerce courant
que sur les projets d'infrastructures, et paraissent prometteurs.
La nouvelle convention fiscale du 31 juillet 1995 permettra donc un
renforcement de nos relations économiques en fournissant un cadre sûr et stable
aux investisseurs des deux Etats.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
principales observations qu'appelle la convention entre la France et l'Israël
en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et
sur la fortune, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre
approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'Etat d'Israël compte une population
de 5,5 millions d'habitants qui vivent sur un territoire, contesté en
permanence, de 20 700 kilomètres carrés. Malgré les crises qui jalonnent son
histoire, Israël a su construire une économie solide. En effet, le produit
intérieur brut par habitant s'élève à 12 700 dollars. Il est pratiquement le
double du PIB grec et supérieur d'un quart au PIB espagnol. La croissance
économique est constante, bien qu'elle soit largement tributaire des relations
extérieures du pays.
Faute de matières premières, Israël connaît un déficit commercial structurel
permanent et vit dans un état de dépendance constant en ce qui concerne les
approvisionnements extérieurs. Toutefois, il bénéficie d'une aide extérieure
non négligeable - 5 millions de dollars en 1992 - provenant, pour une bonne
part, des Etats-Unis.
Les relations entre la France et Israël sont empreintes d'amitié. Quelque 500
000 résidents israéliens sont francophones, soit près du dixième de la
population. En outre, nombre de Français, souvent doubles-nationaux, vivent en
Israël. On en estime le nombre à 50 000. D'où la nécessité d'avoir avec ce pays
des conventions fiscales.
Comme l'a rappelé M. le secrétaire d'Etat, nos investissements sont très
discrets et se situent généralement dans le secteur du tourisme.
La convention qui nous est soumise aujourd'hui a pour objet d'aménager la
convention fiscale du 20 août 1963. Elle s'écarte relativement peu de la
convention type de l'OCDE, sauf en ce qui concerne les taux de retenue à la
source. M. le secrétaire d'Etat a donné à ce sujet les explications
nécessaires.
Sur le plan technique, cette convention ne soulève pas de difficulté
particulière. C'est la raison pour laquelle la commission des finances a émis,
à l'unanimité, un avis favorable sur le projet de loi visant à autoriser
l'approbation de cet accord et vous invite, mes chers collègues, à la suivre
sur ce point.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
cette convention était vivement souhaitée par nos compatriotes d'Israël, qui
sont, selon les chiffres officiels du ministère des affaires étrangères, au
nombre de 46 000, les trois quarts d'entre eux étant immatriculés dans nos
consulats.
La convention signée il y a plus de trente ans, en 1963, devenait obsolète et
il convenait en effet de l'actualiser. Cela a été fait. La présente convention
porte sur les rapports entre, d'une part, la France et ces Français d'Israël
qui, en effet, sont souvent binationaux et, d'autre part, Israël. Le champ en
est assez vaste, puisque les impôts qu'elle couvre sont, en France, non
seulement l'impôt sur le revenu, mais aussi l'impôt sur les sociétés, la taxe
sur les salaires et l'impôt de solidarité sur la fortune.
Nous approuvons cette convention dans la mesure où elle recueille l'aval de
nos compatriotes résidant en Israël. Ces derniers sont d'ailleurs représentés
en force, étant donné leur nombre, au Conseil supérieur des Français de
l'étranger, puisque trois délégués d'Israël y siègent.
Au demeurant, il était bon de préciser les rapports fiscaux entre la France et
Israël, puisque la question va se poser, sur deux points particuliers, pour la
Communauté européenne tout entière. Je rappelle que, lors de la séance du 23
mai 1996, a été déposée au Sénat une proposition d'acte communautaire
concernant la conclusion de deux accords entre la Communauté européenne et
l'Etat d'Israël sur les marchés publics et les marchés des
télécommunications.
Par conséquent, il était tout à fait opportun d'examiner aujourd'hui cette
question et que la France, pour ce qui la concerne, mette nettement les choses
au point, ce que prévoit cette convention. C'est pourquoi nous voterons le
projet de loi visant à en autoriser l'approbation.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique
. - Est autorisée l'approbation de la convention entre
le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat
d'Israël en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la
fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à
Jérusalem le 31 juillet 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi.
»
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
5
CONVENTION FISCALE AVEC LA BOLIVIE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 223, 1995-1996),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention
entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la
République bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole). [Rapport n°
384 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la
convention franco-bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 15 décembre 1994, a été
négociée, à la demande des autorités boliviennes, en complément de l'accord sur
la protection des investissements et immédiatement après la conclusion de
celui-ci. Ces négociations avec la France s'inscrivent dans le cadre de la
politique d'ouverture de l'économie bolivienne aux capitaux étrangers. Cette
politique vise aussi bien les Etats européens que les Etats de la région comme
les membres du Pacte andin ou du MERCOSUR.
Cet accord respecte, dans ses grandes lignes, le modèle de convention élaboré
par l'OCDE. Cela représente une évolution considérable pour la Bolivie qui,
tout comme les autres Etats du Pacte andin, n'acceptait pas certains principes
de ce modèle. Ces Etats, en effet, se sont toujours opposés à l'imposition des
revenus par l'Etat de résidence du bénéficiaire et ont toujours été partisans
d'une taxation aussi large que possible par l'Etat de la source.
La convention fiscale, faite de concessions réciproques, établit donc un
équilibre entre deux conceptions opposées.
Désormais, la Bolivie admet, avec quelques aménagements, la notion
d'établissement stable qui restreint le droit d'imposer de l'Etat dans lequel
s'exerce l'activité.
Pour tenir compte des préoccupations boliviennes, l'Etat d'où proviennent les
dividendes, intérêts et redevances pourra taxer ces revenus au taux maximum de
15 p. 100. Dans le modèle de l'OCDE, en revanche, la taxation des dividendes et
intérêts est de 5 p. 100, alors que les redevances sont imposables
exclusivement dans l'Etat où est située la source.
La méthode d'élimination des doubles impositions est, pour la Bolivie, celle
de l'exemption et, pour la France, celle du crédit d'impôt qui permet de
sauvegarder la progressivité de l'impôt.
L'intérêt de cette convention réside dans la nécessité d'encourager les
échanges économiques franco-boliviens. En effet, si le dialogue politique avec
la Bolivie se renforce, comme en témoigne une récente rencontre à Paris entre
le Président de la République française et le président bolivien, M. Sanchez de
Lozada, nos échanges économiques mutuels restent néanmoins modestes et
déficitaires. La Bolivie est une source non négligeable de minerais pour la
France, mais notre pays détient moins de 1 p. 100 du marché bolivien. Or ce
pays s'est engagé dans de grandes réformes de structures, comportant une
libéralisation de l'économie, une restructuration du secteur public, une
réforme fiscale et un important programme de privatisations lancé en 1992 et
accentué en 1995, ouvrant ainsi une large place à l'investissement étranger.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention
en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et
sur la fortune, signée avec la Bolivie, et dont le Gouvernement vous recommande
d'autoriser l'approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la Bolivie représente deux fois la
France en superficie mais ne compte que sept millions d'habitants, dont la
plupart vivent dans l'Altiplano.
La vie politique de ce pays, indépendant depuis 1825, a été marquée par un
rythme soutenu de coups d'Etat de 1825 à 1982. Depuis cette dernière date, la
Bolivie a effectué un retour à la démocratie, qu'il convient d'aider et de
maintenir. Ce pays, en effet, s'est engagé dans un grand programme de réformes,
que M. le secrétaire d'Etat a évoqué à l'instant. Il continue néanmoins à être
très pauvre puisque le revenu par habitant n'excède pas, selon les dernières
estimations, 920 dollars par an.
Les performances macro-économiques actuelles de la Bolivie sont plutôt
satisfaisantes, avec un taux de croissance de 3,5 p.100 par an et une inflation
de 6,5 p. 100, ce qui est relativement modéré. Il n'en demeure pas moins qu'en
matière de développement économique la Bolivie est, sans doute avec Haïti, l'un
des pays les plus défavorisés.
Si la détention de Régis Debray, l'assassinat de l'ambassadeur de Bolivie à
Paris et, plus récemment, l'affaire Klaus Barbie ont constitué, à certaines
époques, des contentieux délicats entre la France et la Bolivie, les relations
actuelles entre ces deux pays sont néanmoins tout à fait amicales. Le nombre
des résidents français en Bolivie et des résidents boliviens en France est
d'environ cinq cents de part et d'autre.
Nos échanges sont peu importants : les flux cumulés représentent quelque 500
millions de francs par an, ce qui est très modeste. L'intention du Gouvernement
est cependant de tout mettre en oeuvre pour aider la Bolivie, dans un contexte
très difficile, à mettre en place les réformes nécessaires.
C'est dans cet esprit qu'a été signée le 15 décembre 1994, à La Paz, cette
convention, qui reprend pour l'essentiel les solutions du modèle de convention
de l'OCDE. Toutefois, une particularité figure à l'article 23, lequel fixe le
recours à la méthode du crédit d'impôt pour éliminer les doubles
impositions.
M. le secrétaire d'Etat a bien voulu expliquer toutes les modalités techniques
de cet accord parfaitement classique. La commission des finances, unanime, a
approuvé ce dispositif et vous invite, mes chers collègues, à faire de même.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous pourrions faire à propos de la Bolivie des déclarations et des réserves
analogues à celles qui ont été exprimées pour le Pakistan. En effet, depuis que
la Colombie s'est efforcée de supprimer les plantations de cocaïne et s'est
attaquée au cartel de Medellin, la Bolivie est devenue l'un des centres
essentiels de production de la drogue.
Nous estimons néanmoins qu'il s'agit là d'un autre problème, qui ne concerne
pas les conventions fiscales dont nous discutons ce matin.
Par ailleurs, intervenant pour la dernière fois ce matin, je tiens à remercier
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, de la pertinence
de ses rapports dans lesquels il a mis toutes ses connaissances d'ancien haut
fonctionnaire du Quai d'Orsay, ainsi que la concision et la clarté dont il a
toujours fait preuve dans ses fonctions sénatoriales.
Nous voterons naturellement le présent projet de loi.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique
. - Est autorisée l'approbation de la convention entre
le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le
revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à La Paz le 15
décembre 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
6
AVENANT À LA CONVENTION FISCALE
DU 19 DÉCEMBRE 1980 AVEC LA NORVÈGE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 286, 1995-1996),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à la
convention du 19 décembre 1980 entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement du Royaume de Norvège en vue d'éviter les doubles
impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir des règles d'assistance
administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune
(ensemble un protocole et un protocole additionnel), modifiée par l'avenant du
14 novembre 1984. [Rapport n° 387 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'avenant
à la convention fiscale franco-norvégienne du 19 décembre 1980 en vue d'éviter
les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu, signé à Oslo le 7
avril 1995, est étroitement lié à un autre accord franco-norvégien déjà soumis
à votre examen : je veux parler de l'accord franco-norvégien sur le transport
par gazoduc du gaz du plateau continental norvégien vers la France, signé à
Paris le 27 mars 1995.
Négocié à la demande du ministre de l'industrie en 1994, cet avenant fiscal a
bien évidemment pour objectif principal de définir le régime d'imposition du
nouveau gazoduc, dans la mesure où la convention fiscale franco-norvégienne en
vigueur ne contenait aucune stipulation particulière sur ce type
d'activités.
Un intérêt majeur s'attachait à ce que la France soit choisie pour être le
pays d'atterrage de ce nouveau gazoduc à destination de l'Europe continentale.
C'est pourquoi elle a accepté que l'avenant fiscal permette une imposition
exclusive, en Norvège, des bénéfices retirés de l'exploitation du gazoduc, par
cet Etat ou les sociétés qui y ont leur siège, y compris pour sa partie située
dans les eaux territoriales françaises et pour son terminal situé en France.
Je tiens à préciser que des conditions analogues avaient déjà été consenties à
la Norvège, pour la réalisation de ce projet, par nos concurrents directs, à
savoir la Belgique et l'Allemagne.
L'avenant sauvegarde toutefois les droits de la France d'imposer les bénéfices
revenant à des sociétés françaises, retirés de l'exploitation du gazoduc, pour
sa partie située dans les eaux territoriales françaises, ou de l'exploitation
de son terminal situé en France.
Mais l'intérêt de cet avenant ne réside pas seulement dans la définition du
régime fiscal applicable au nouveau gazoduc franco-norvégien. L'occasion de
cette négociation a également été saisie pour « moderniser » quelque peu la
convention fiscale franco-norvégienne de 1980. C'est ainsi qu'a été supprimée
la faculté de retenue à la source sur les dividendes payés par les filiales à
leur société mère et sur les intérêts. Cette suppression est en effet conforme
à la politique conventionnelle suivie par la France avec ses partenaires de
l'OCDE.
Telles sont donc les principales observations qu'appelle l'avenant à la
convention fiscale franco-norvégienne du 19 décembre 1980.
J'aimerais toutefois conclure en rappelant que, si nos échanges commerciaux
avec cet Etat demeurent lourdement et structurellement déficitaires, en raison
du volume de nos importations d'hydrocarbures, la France est néanmoins le
troisième investisseur étranger en Norvège.
La convention fiscale franco-norvégienne, telle qu'elle a été rénovée pour
tenir compte de la réalisation d'un projet majeur, constitue donc un instrument
bilatéral fondamental pour le développement et la sécurité de nos échanges avec
cet Etat.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'avenant à la
convention franco-norvégienne en vue d'éviter les doubles impositions, de
prévenir l'évasion fiscale et d'établir les règles d'assistance administrative
réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. C'est pourquoi
le Gouvernement vous recommande d'autoriser l'approbation du présent avenant à
cette convention.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Parlement a adopté un projet de loi
visant à approuver un accord sur le transport par gazoduc du gaz du plateau
continental norgévien vers la France. C'est donc, en fait, la réalisation de ce
gazoduc qui fait l'objet de cette convention fiscale.
Cet accord a fait l'objet d'un excellent rapport, au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées, de notre collègue
Maurice Lombard, qui a souligné l'importance de cette réalisation et de la
construction d'installations d'atterrage à Dunkerque.
Je rappellerai que le tracé de ce gazoduc et son point d'aboutissement ont
suscité des concurrences sévères, et que la France a obtenu l'implantation de
la station terminale à Dunkerque. Voilà qui explique le caractère un peu
particulier de cette convention, qui, lue sous un angle totalement neutre et
détachée de son contexte, pourrait être considérée comme quelque peu
dérogatoire et trop favorable à la Norvège.
Cette convention comporte au moins trois dispositions pouvant paraître
défavorables à notre pays. J'en citerai deux.
Ainsi, il est prévu que les bénéfices tirés soit par l'Etat norvégien, soit
par une société norvégienne de la possession ou de l'exploitation d'un gazoduc
ne sont imposables qu'en Norvège. Il est précisé que ces stipulations
s'appliquent également s'agissant du terminal du gazoduc, qui, lui, est
installé en France, à Dunkerque.
Par ailleurs, une certaine inégalité de traitement entre la France et la
Norvège provient de la quotité de capital à partir de laquelle une société qui
la détient est considérée comme mère de la société dans laquelle elle est
détenue. La retenue à la source est supprimée en France dès lors que les
sociétés mères norvégiennes détiennent 10 p. 100 du capital de leurs filiales,
tandis qu'elle ne l'est, en Norvège, qu'à condition que le seuil de détention
soit au moins égal à 25 p. 100.
Ces dispositifs quelque peu dérogatoires s'expliquent, je le répète, par la
concurrence acharnée que se sont livrés différents pays.
Telle est la raison pour laquelle la commission des finances a décidé à
l'unanimité d'approuver cette convention et vous invite à la suivre.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique. -
Est autorisée l'approbation de l'avenant à la
convention du 19 décembre 1980 entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement du Royaume de Norvège en vue d'éviter les doubles
impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir des règles d'assistance
administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune
(ensemble un protocole et un protocole additionnel), modifiée par l'avenant du
14 novembre 1984, signé à Oslo le 7 avril 1995, et dont le texte est annexé à
la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
7
SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
DU KAZAKHSTAN
M. le président.
J'ai le plaisir de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une
délégation du Parlement de la République du Kazakhstan conduite par M.
Djoldasbekov Omirbecque, président du comité du développement socioculturel,
qui effectue une visite de travail à Paris.
Au nom de la Haute Assemblée, je lui souhaite la bienvenue et je forme le voeu
que son séjour à Paris soit le plus constructif possible et que les relations
entre nos deux pays continuent à se développer de façon harmonieuse.
(M. le secrétaire d'Etat, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et
applaudissent.)
8
ACCORD FISCAL AVEC LE PANAMA
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 160, 1995-1996)
autorisant l'approbation de l'accord fiscal sous forme d'échange de lettres
entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la
République du Panama. [Rapport n° 383 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'accord
fiscal sous forme d'échange de lettres conclu entre la France et le Panama en
avril et en juillet 1995, qui est soumis aujourd'hui à votre approbation,
paraît être, en raison de sa brièveté, de portée mineure.
Cependant, bien que ne ressemblant pas ou peu, dans sa forme ou dans son fond,
aux conventions en vue d'éviter les doubles impositions que vous avez
l'habitude d'examiner, cet accord revêt un très grand intérêt pour la France.
Son objectif essentiel est, en effet, de mettre fin à un risque important
d'évasion, voire de fraude fiscales.
Comme vous le savez, la fiscalité panaméenne présente la particularité d'être
extrêmement attrayante pour les sociétés qui n'exercent pas leur activité au
Panama. La constitution même d'une société est au Panama une formalité simple
et rapide, ce qui explique qu'actuellement plus de cent sociétés y sont créées
chaque jour par des étrangers.
Or, profitant des clauses de la nation la plus favorisée et d'égalité de
traitement avec les nationaux contenues dans deux accords franco-panaméens
antérieurs, la convention d'établissement du 10 juillet 1953 et l'accord sur la
protection des investissements du 5 novembre 1982, de nombreuses sociétés écran
constituées au Panama et agissant en France, dont les actionnaires jouissent de
l'anonymat garanti par la législation panaméenne, peuvent bénéficier
actuellement, de manière économiquement abusive, des mêmes avantages fiscaux
que ceux qui sont consentis aux sociétés françaises.
C'est pour mettre fin à ce risque d'évasion fiscale que le présent accord ôte
toute portée fiscale aux conventions franco-panaméennes précitées, et abroge,
notamment, l'article 7 de la convention franco-panaméenne d'établissement.
Par la même occasion, nous avons précisé, conformément aux principes définis
par l'OCDE, le régime fiscal applicable à certaines activités ou à certains
revenus. C'est ainsi que l'article 3 de l'accord traite de l'imposition des
compagnies aériennes ou que l'article 4 rappelle le principe de l'imposition
des traitements et pensions publics par l'Etat dont le bénéficiaire est un
national.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord fiscal sous forme
d'échange de lettres entre la France et le Panama, dont le Gouvernement vous
recommande d'autoriser l'approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Panama est un petit pays de 75 000
kilomètres carrés, peu peuplé - 2,5 millions d'habitants - et qui est
indépendant depuis 1903. Il a toujours entretenu avec notre pays d'excellentes
relations, mais celles-ci sont relativement faibles sur le plan économique.
Bien qu'il s'agisse d'un partenaire commercial peu important, les arriérés du
Panama à l'égard de la France s'élèvent actuellement à 100 millions de
francs.
Le nombre de Panaméens vivant en France est de quatre-vingts et celui des
Français résidant au Panama de cinq cents. Une quarantaine de sociétés
françaises sont présentes dans le pays, essentiellement dans le secteur
bancaire et financier.
L'importance du Panama est liée non seulement au canal, mais également à une
position tout à fait exceptionnelle dans le domaine financier et bancaire. En
effet, le secteur tertiaire représente actuellement 75 p. 100 du produit
intérieur brut du pays ; il s'est développé à partir de la zone franche de
Colon, qui est la deuxième au monde, immédiatement après Hong Kong, avec 10
milliards de dollars d'opérations chaque année. Le secteur bancaire est le
principal moteur économique du pays.
La législation panaméenne, se caractérise par un très bas niveau d'imposition
et, même, pour les sociétés
off shore
qui n'excercent pas d'activités
économiques dans le pays, par l'absence de toute imposition.
Il convient d'ajouter - ce point n'est pas dépourvu d'intérêt - que le secret
des opérations financières et commerciales est absolu au Panama.
De tout cela, il résulte que plus de 35 000 sociétés sont créées chaque année
au Panama, soit, comme l'a dit tout à l'heure M. Emmanuelli, près de cent
sociétés nouvelles chaque jour.
Compte tenu du secret qui entoure les opérations et de la quasi-absence
d'imposition, le Panama peut constituer une source d'évasion fiscale tout à
fait exceptionnelle.
La lecture de la presse française pourrait laisser entendre que cette idée ne
serait pas totalement dénuée de fondement.
Par conséquent, malgré sa portée extrêmement faible sur le plan fiscal, cette
convention a une forte incidence psychologique : c'est la première convention
de non double imposition qui lierait le Panama à un autre pays. A l'heure
actuelle, il n'existe pas d'autre convention de ce type.
Cette convention a été conclue par un échange de lettres les 6 avril et 17
juillet 1995. C'est la France qui a pris l'initiative de la négocier.
Nous sommes liés avec le Panama par deux traités qui contiennent une clause
d'égalité de traitement avec les nationaux. Ce dispositif était gênant, car il
favorisait l'évasion et la fraude fiscales. Le présent projet de loi permet de
rééquilibrer cette clause.
Au terme d'une négociation extrêmement facile, nous sommes parvenus à un
résultat satisfaisant.
La convention compte huit articles. Le plus important est l'article 5, qui ôte
toute portée fiscale aux conventions de 1953 et de 1992.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, ce texte est de portée modeste.
Néanmoins, compte tenu de son côté novateur - il constitue, je le répète, une
première en matière de double imposition - et des objectifs fixés, la
commission des finances vous invite à l'adopter.
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de
cette convention fiscale entre la République française et la République du
Panama nous conduit à nous interroger sur plusieurs questions fondamentales en
matière de coopération fiscale internationale, de coopération économique au
sens large, et nous entraîne, naturellement, à nous interroger sur la réalité
de l'Etat contractant avec notre Gouvernement cette convention fiscale.
Evidemment, l'économie du Panama et en grande partie dépendante de l'activité
de la zone du canal et des relations privilégiées entretenues avec les
Etats-Unis.
La communauté panaméenne vivant aux Etats-Unis est relativement importante,
tandis que l'essentiel de la dette extérieure - comme, d'ailleurs, du déficit
commercial panaméen - se trouve en Amérique du Nord.
Cette dette est d'ailleurs élevée : plus de 3,7 milliards de dollars, soit
plus de 1 450 dollars par habitant, et plus de la moitié du produit intérieur
brut.
Il convient de noter que le déficit du commerce extérieur panaméen se situait
; à la fin de l'année 1992, à hauteur de 1 545 millions de dollars, les
exportations ne couvrant les importations qu'à hauteur de 24 p. 100 environ.
Le Panama enregistre ainsi plus de 1 050 millions de dollars d'importations en
provenance des Etats-Unis ou de la zone du canal et ne peut exporter que pour
un peu plus de 140 millions de dollars environ.
Les deux tiers du déficit sont donc constatés dans la relation directe avec
les Etats-Unis.
Les années quatre-vingt ont été marquées par la tentative de retour d'Arnulfo
Arias - à près de quatre-vingts ans ! - mais aussi par la naissance, sur
l'instigation, notamment, de la République du Panama, du groupe de Contadora,
organisme informel des gouvernements sud-américains destiné à émettre des
propositions de résolution des conflits de la zone.
A partir de 1987 apparaît la figure, pour le moins trouble, du général
Noriega, qui cumulera bientôt les fonctions de trafiquant de drogue, d'agent
des services secrets nord-américains et de porte-parole de l'indépendance
nationale.
Le général Noriega a ainsi renversé le présidentDelvalle en février 1988 puis,
sous la pression américaine, a accepté l'organisation d'élections en 1989.
Cependant, ces élections ont été marquées par de graves incidents qui
servirent, finalement, de point d'appui aux Américains pour mettre en oeuvre
l'opération appelée « juste cause » et qui consista essentiellement à briser
les manifestations populaires, à se saisir de la personne du général Noriega et
à assurer l'accession au pouvoir du candidat le plus proche des Américains, le
président Guillermo Endara.
Il n'y a hélas ! pas loin à penser que la montée en puissance, la disgrâce du
général Noriega, puis l'installation du président Endara au pouvoir n'avaient
finalement qu'une seule finalité : la remise en cause des accords de 1979.
La situation en est aujourd'hui arrivée à ce point, et il y a fort à parier
que les Etats-Unis « freineront des quatre fers » pour aboutir aux objectifs de
ce traité.
Economiquement, nous avons souligné certaines des données propres à l'Etat de
l'isthme.
Il convient toutefois d'y ajouter certaines données relativement connues et
qui donnent une spécificité particulière à la situation panaméenne.
Le Panama est une zone franche fiscale de taille relativement importante, où
peu de contraintes pèsent sur les entreprises susceptibles de s'y implanter.
Il est également le lieu de résidence d'un nombre considérable de navires
marchands, le pays étant spécialisé dans le pavillon de complaisance.
A la fin de l'année 1992, le Panama immatricule plus de cinq mille navires
marchands, ce qui représente un tonnage de près de quatre-vingts millions de
tonneaux de jauge brute.
Cela signifie que, derrière le Libéria, autre création des Etats-Unis, le
Panama dispose de la seconde marine marchande de la planète, ce qui pose
d'insolubles problèmes de sécurité et de droit du travail pour les équipages de
la flotte considérée.
Personne ne peut d'ailleurs oublier que cette situation de pavillon de
complaisance, largement encouragée par les grandes compagnies pétrolières
américaines, est à l'origine de quelques-unes des plus célèbres marées noires
que la planète ait pu connaître.
Autre particularité significative de la situation panaméenne : servir
aujourd'hui de « lessiveuse » d'argent sale et, singulièrement, d'argent issu
du narcotrafic.
L'une des motivations de l'opération « juste cause » fut de lutter contre le
fait que le général Noriega avait assis une part importante de sa fortune sur
le rendement du trafic de drogue.
Il ne faut jamais oublier ici que le Panama, pays de faible administration
fiscale, largement dominé par l'ombre de l'aigle américain, est parfaitement
placé : il se trouve à proximité de la zone antillaise, simplement gagnée par
la fièvre de la déréglementation fiscale, mais aussi juste à côté de
quelques-uns des pays de production, tous devenus des narco-Etats.
Il permet aussi, dans le cadre de son droit commercial pour le moins exotique,
de constituer, sans trop d'interrogations sur l'origine des capitaux investis,
de puissantes féodalités financières.
Nul doute également, puisque la chose a été largement expérimentée par
certaines sociétés françaises, et peut-être pour le compte d'un certain nombre
de nos partis politiques, que les effets de la révolution informationnelle, de
la libéralisation des marchés de capitaux et de la délocalisation et de
l'optimisation fiscale constituent une force d'attraction importante pour de
nombreux investisseurs.
Ces réflexions nous conduisent évidemment à nous interroger sur le sens de la
convention fiscale que l'on nous propose aujourd'hui de ratifier.
Pour prendre une expression anglo-saxone, disons que, pour certains aspects,
fiscalité et Panama ne riment pas vraiment et qu'il y a en la matière «
nonsense
», comme disent nos amis.
Le Panama est un paradis fiscal et constitue donc l'un des facteurs de
déstabilisation des normes fiscales communément admises.
Il s'agit ici d'éviter les doubles impositions en ces deux matières, ce qui
procède, dans le cas de l'impôt sur les sociétés panaméen, d'une contrainte
pour le moins allégée.
Le texte de la convention prévoit d'ailleurs, à l'article 3, une application
spécifique aux compagnies de navigation aérienne, avec une imposition dans
l'Etat où se situe le siège de la compagnie exploitante.
Il conviendrait peut-être d'aviser de ces dispositions le président d'Air
France, d'autant que les mesures relatives à la navigation aérienne
s'appliqueront également aux opérations réalisées en groupement, en
exploitation commune ou dans le cadre d'un organisme international.
Sous la présidence de Bernard Attali, Air France avait déjà délocalisé son
établissement d'achat d'aéronefs en crédit-bail. Pourquoi ne pas utiliser le
Panama demain ?
Cela pose, en fait, d'incontestables questions. C'est en effet à un véritable
pavillon de complaisance aérien que l'on nous demande de donner quitus.
De surcroît, nous venons juste de voter un texte de loi soumettant certains
investissements réalisés à partir de capitaux détenus par des personnes morales
de droit panaméen à la levée du secret bancaire lorsqu'est supposée l'origine
frauduleuse de ces capitaux.
La coopération avec la République de Panama doit, à notre sens, trouver
d'autres applications.
Fiscalement parlant, il est sans doute plus que temps qu'une large
consultation internationale, incluant les pays qui, à l'instar de Panama,
offrent aujourd'hui les moindres contraintes, soit entreprise sur la chasse aux
profits tirés de commerces illicites ou parallèles et sur les limites à poser
en termes de libéralisation de la circulation des capitaux.
Il est d'ailleurs en partie paradoxal que la République de Panama soit
endettée sur les marchés internationaux de capitaux et favorise concurremment
le développement de la spéculation monétaire internationale.
Il est surtout déterminant, de notre point de vue, que nous aidions la
République de Panama à acquérir la pleine maîtrise de ses rentrées fiscales et
la pleine connaissance des circuits financiers qu'elle abrite aujourd'hui.
Il importe surtout que le Panama puisse effectivement recouvrer pleinement sa
souveraineté nationale en obtenant réellement la cession de la zone du canal et
le départ des forces armées nord-américaines.
Les 2 600 000 Panaméens résidents et les 560 000 Panaméens de l'extérieur ont
légitimement droit à la pleine maîtrise de leur territoire et des revenus tirés
de l'exploitation de la liaison transocéanique. En effet, la République ne
perçoit encore aujourd'hui que moins du quart des redevances de passage
acquittées par les navires empruntant le canal.
La seule cession du canal représenterait un revenu pour la République
équivalant à plus de la moitié du service de la dette publique nationale.
Cette situation justifie, en dernière instance, que nous nous refusions à
adopter ce projet de loi autorisant l'approbation de l'accord fiscal entre la
République française et le Gouvernement de la République du Panama, dans les
termes où il nous est présenté.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne
pensais pas intervenir dans ce débat, mais l'exposé de M. Pagès me conduit à
prendre la parole, surtout à cause des conclusions qu'il a tirées de ses
réflexions.
Rappelons d'abord qu'il y a cent ans le Parlement français et la nation tout
entière étaient bouleversés par le « scandale » de Panama, mais rappelons aussi
que le canal de Panama était une initiative française courageuse, difficile,
dans laquelle notre pays s'était investi complètement.
Ferdinand de Lesseps, qui s'était couvert de gloire en creusant le canal de
Suez, avait entrepris les travaux avec des centaines d'ingénieurs comme Gustave
Eiffel, et des milliers d'hommes s'étaient attaqués à une oeuvre
gigantesque.
Il existe, près de Panama, un cimetière où je suis souvent allé et où sont
enterrés 8 000 travailleurs français venus des Antilles. Nous avons été vaincus
non par les difficultés techniques, mais par la malaria. Aussi, lorsque nous
avons cédé le canal aux Américains, ils ont commencé par envoyer des médecins
pour trouver la parade à la maladie et aux épidémies. Ils ont ensuite pu
terminer ce que nous avions commencé.
En 1903, c'est un Français, Bunau-Varilla, qui a créé le drapeau panaméen en
plaçant différemment les trois couleurs de la France. Nous avons donc là-bas
des souvenirs !
Mais venons-en à la période contemporaine.
Je suis un peu surpris, monsieur Pagès, de vous entendre parler aujourd'hui du
général Noriega avec un certain enthousiasme...
M. Robert Pagès.
L'enthousiasme était mitigé !
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Vous ne nous avez pas bien entendus !
M. Jacques Habert.
... en disant qu'il avait finalement été, en quelque sorte le symbole de la
volonté d'indépendance du Panama contre la mainmise américaine, alors qu'il
était, tout le monde le reconnaît, le responsable principal, le pivot du trafic
de la drogue venue du Sud, en Amérique centrale.
M. Robert Pagès.
C'est ce que j'ai dit, mon cher collègue !
M. Jacques Habert.
Examinons maintenant le texte de l'accord qui nous est soumis.
Il est vrai qu'il existe une situation et une législation tout à fait
anormales qui font de Panama, à beaucoup d'égard, un refuge fiscal. Mais cette
situation vaut pour d'autres pays ! Pour s'en convaincre, il suffit de voir ce
qui se passe du côté des îles Caïman et du Liechtenstein. Ce problème
nécéssiterait donc une réflexion internationale importante.
Vous avez justement dénoncé les pavillons de complaisance et les graves
conséquences qui en découlent. Cela vaut dans le domaine maritime comme dans le
domaine aérien,...
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Tout à fait !
M. Jacques Habert.
... il y a là une dérive à laquelle nous devons être très attentifs.
La discussion du présent texte était une bonne occasion de le rappeler ; vous
avez bien fait de le faire. Mais je ne pense pas qu'il faille en attribuer la
responsabilité au gouvernement américain.
L'accord qui nous est soumis aujourd'hui constitue un premier pas qui permet à
la France d'atténuer une situation proprement panaméenne. L'échange de lettres
qui y est annexé permet d'apporter des précisions à cet égard. Il offre une
base de réflexion et un texte à partir duquel il sera possible de construire
une action.
Voilà pourquoi je pense que cet accord constitue une avancée. Il ne s'agit pas
de protéger des fraudeurs ! Les 500 Français qui sont installés là-bas et
défendent, pour la plupart, des intérêts bancaires ou maritimes le font fort
honnêtement.
Ce qu'il faudrait voir de près, au-delà des pavillons de complaisance, ce sont
peut-être les adresses de complaisance. N'existe-t-il pas des compagnies ou des
individus qui sont censés être là-bas et qui n'y sont jamais ? Ce ne sont pas
les Français de l'étranger, mais des faux résidents à l'étranger
qu'éventuellement il faudrait poursuivre ! Toute une réflexion pourrait être
menée au plan international à ce sujet.
L'accord fiscal entre la France et Panama contient des dispositions qui
répondent à cette préoccupation. Il constitue donc une avancée qui nous
permettra de poursuivre dans le bon sens. Aussi, nous voterons le projet de
ratification qui nous est soumis.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique.
- Est autorisée l'approbation de l'accord fiscal sous
forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et
le Gouvernement de la République du Panama, signé à Paris le 6 avril 1995 et à
Panama le 17 juillet 1995 et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
9
DÉCLARATION
DE L'URGENCE D'UN PROJET DE LOI
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« Paris, le 5 juin 1996.
« Monsieur le président,
« J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'en application de l'article 45,
alinéa 2, de la Constitution le Gouvernement déclare l'urgence du projet de loi
relatif à l'entreprise nationale France Télécom, déposé sur le bureau du Sénat
le 29 mai 1996 (n° 391).
« Veuillez agréez, monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération.
« Signé : ALAIN JUPPÉ »
Acte est donné de cette communication.
10
CANDIDATURES
À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation m'a fait connaître qu'elle a procédé à la
désignation des candidat qu'elle présente à la commission mixte paritaire
chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du
projet de loi de modernisation des activités financières.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission
mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
L'ordre du jour de ce matin étant épuisé, le Sénat va maintenant interrompre
ses travaux ; il les reprendra à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures,
sous la présidence de M. Jean Faure.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
11
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. Robert Pagès.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l'article 36 de notre
règlement et tend à vous prier d'excuser l'absence de certains de nos collègues
à la reprise de cette séance.
Mes amis Marie-Claude Beaudeau, Nicole Borvo et Louis Minetti sont en effet
présents aux côtés de dizaines de milliers de salariés d'EDF-GDF - plus de 50
000 - qui manifestent contre le projet de déréglementation du système
énergétique français.
Ce projet européen, que les ministres de l'Union européenne vont examiner le
20 juin prochain à Bruxelles, entraînerait, si, par malheur, il était appliqué,
la privatisation d'une part importante du marché de l'électricité.
Ce grand service public, devenu propriété de la nation à la Libération, serait
ainsi livré aux appétits des financiers, au détriment de l'intérêt général.
Nous considérons que l'acceptation de la directive européenne conduirait tout
droit à l'éclatement de l'entreprise et à la mise en pièces de ses missions de
service public.
France Télécom aujourd'hui, EDF-GDF demain et la SNCF après-demain : le
Gouvernement de M. Juppé s'attaque à l'un des éléments clés de la spécificité
française, à savoir de grands services publics exercés par des entreprises de
secteur public.
Ce sont des valeurs essentielles de la République, la défense de l'intérêt
général et non des intérêts financiers, que vous tentez de détruire.
Comme l'indique Robert Hue dans cette importante lettre datée du 4 juin : «
Les enquêtes d'opinion montrent tout l'attachement des Françaises et des
Français à leurs services publics. Plusieurs initiatives d'action sont
envisagées et suscitent un large écho. Le parti communiste français, pour sa
part, ne manquera pas de les soutenir. »
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen appellent, pour leur
part, le Gouvernement et la majorité sénatoriale à écouter enfin le peuple de
France, les salariés qui n'acceptent pas que soient ainsi bradés les
formidables outils pour le développement économique et pour le progrès social
que sont ces fleurons de notre économie.
Le débat qui s'est ouvert depuis hier au Sénat et qui se poursuivra jusqu'à la
fin du mois de juin au Parlement sur France Télécom revêt dans ce contexte une
grande importance ; c'est pourquoi nous y prendrons toute notre place pour
faire entendre dans cet hémicycle la voix des salariés, la voix des usagers,
voix auxquelles le Gouvernement et sa majorité restent sourds.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
Je vous donne acte de votre déclaration, monsieur le sénateur.
12
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept
membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un
texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de
modernisation des activités financières.
La liste des candidats établie par la commission des finances, du contrôle
budgétaire et des comptes économiques de la nation a été affichée conformément
à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Christian Poncelet, Philippe Marini, Charles Jolibois, Henri
Collard, Alain Lambert, Jean-Pierre Masseret et Paul Loridant ;
Suppléants : M. Denis Badré, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Guy Cabanel,
Emmanuel Hamel, Jean-Philippe Lachenaud, Jacques Oudin et Alain Richard.
13
CANDIDATURE À LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
POUR L'UNION EUROPÉENNE
M. le président.
L'ordre du jour appelle la nomination d'un membre de la délégation
parlementaire pour l'Union européenne, en remplacement de M. Jean-Pierre
Tizon.
J'informe le Sénat que le groupe des Républicains et Indépendants a proposé la
candidature de M. Jean-Paul Emorine.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée s'il n'y a pas d'opposition
dans le délai d'une heure.
14
RÉGLEMENTATION
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 357,
1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de
réglementation des télécommunications. [Rapport (n° 389, 1995-1996).]
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en
préambule, je voudrais moi aussi saluer les dizaines de milliers de
manifestants qui défendent aujourd'hui un autre service public aussi
fondamental que celui des télécommunications, celui du gaz et de l'électricité.
Si je suis à cette tribune pour remplir le mandat qui m'a été confié, mon coeur
est avec ceux qui défilent. Qu'un peu de leur énergie inspire et éclaire nos
débats !
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre, nous abordons aujourd'hui le premier volet d'un ensemble
législatif qui, s'il était mené à son terme dans les conditions que vous
souhaitez, pourrait avoir le même effet dévastateur que la privatisation de
TF1, sous le gouvernement de M. Chirac, en 1986. Il s'agissait, disait M.
Léotard, alors en charge du dossier, d'une ouverture maîtrisée à la
concurrence.
Dix ans plus tard, le secteur public de l'audiovisuel est rongé par la course
au profit que vous avez instaurée, comme vient de le montrer la crise qui
secoue France 2 ainsi que France 3 ; et plus personne n'oserait invoquer sans
rire le « mieux disant culturel » que la famille Bouygues s'était engagée à
respecter devant le Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Le même scénario s'enclenche, à présent, pour les télécommunications. Le
paradoxe, c'est que ce soit vous, monsieur Fillon, qui en soyez le
porte-parole, alors qu'au fond de vous-même, sans aucun doute, vous le
désapprouvez.
Vos deux textes de loi constituent bien une intervention majeure dans
l'organisation économique et sociale. Ils peuvent ruiner les acquis d'un siècle
d'efforts pour bâtir un secteur performant des télécommunications.
Rappelons-en les grandes dates. Au départ, il y eut la loi de nationalisation
des sociétés privées de téléphone, en 1889, voilà plus d'un siècle ; elle fut
complétée par l'instauration du budget annexe des PTT, en 1923 ; enfin,
l'édifice fut modernisé par la loi Quilès de 1990, créant deux opérateurs
publics autonomes : La Poste et France Télécom.
Aujourd'hui, nous débattons de la loi de « déréglementation » et de «
dérégulation » des télécommunications. La semaine prochaine, si le scénario ne
se grippe pas, vous demanderez, en première lecture au Sénat, de privatiser
France Télécom et de laisser le champ libre à la famille Bouygues, une fois de
plus, à deux compagnies fermières de l'eau - l'une et les autres connues du
grand public par de récents démêlés judiciaires - ainsi qu'à quelques firmes
étrangères.
Le géant américain ATT, l'Anglais BT et des nouveaux venus asiatiques
attendent que le repas soit prêt. Ils risquent bien d'ailleurs de réécrire à
leur façon la fable de
L'huître et les plaideurs
et de mettre ainsi d'accord malgré eux, les
Français.
Quelle que soit l'issue, ce sont les citoyens de notre pays qui en feront les
frais.
Or, l'enjeu n'est pas seulement, ni même d'abord, économique : privatiser,
dans de mauvaises conditions, les télécommunications, c'est s'attaquer au coeur
de notre démocratie et c'est brader un peu de notre histoire.
En cette fin de siècle, l'information circule à travers de multiples canaux
interconnectés. Le fil entre des points fixes, le câble, l'hertzien et le
satellite servent de supports. Les domaines du téléphone, de l'informatique et
de l'audiovisuel sont interdépendants. Comme le disent les auteurs de l'ouvrage
Les Télécoms en question,
signant sous le pseudonyme A. Leray : «
L'information est un bien immatériel qui échappe aux notions ordinaires de
propriété ou de marchandise. Elle a une valeur d'usage plus qu'une valeur
d'échange : c'est par sa circulation plus que par son accumulation que
l'information prend de l'importance. Ainsi, ce sont les réseaux de
télécommunications qui sont l'élément dominant de ce que lon peut appeler le
"nouvel ordre communicationnel".
Justement, ce sont ces supports que vous voulez achever de privatiser, après
la brèche importante introduite par le ministre Longuet, sous le gouvernement
Balladur, en 1993 : celui-ci avait ouvert à la concurrence le téléphone mobile
et tenté de transformer le statut de France Télécom ; seule la très vive
réaction des salariés l'avait empêché d'avancer dans cette direction.
Fixons au passage un point d'histoire, monsieur le ministre : pour introduire
ce débat, vous vous retranchez sans cesse derrière l'argument de la directive
européenne qui fixe au 1er janvier 1998 la libéralisation des services et des
infrastructures de télécommunications. Mais cette décision est de votre seule
responsabilité ! Ce sont, en effet, les conseils des ministres réunis à
Bruxelles le 16 juin 1993 et le 17 novembre 1994 qui ont décidé à l'unanimité,
donc avec l'accord de la France, l'ouverture à la concurrence, d'une part des
services vocaux et, d'autre part, des infrastructures filaires de téléphonie au
1er janvier 1998. C'est le gouvernement Balladur qui a accepté ce
calendrier.
Dès lors, il était mis un terme au compromis de 1989, négocié sous la
présidence de M. François Mitterrand, qui avait su trouver un juste équilibre
entre l'ouverture à la concurrence des services à valeur ajoutée et le maintien
du monopole sur la téléphonie vocale entre points fixes, ainsi que sur celui
des infrastructures publiques, payées par les contribuables. Un simple coup
d'oeil sur la chronologie remarquablement établie par notre collègue Gérard
Larcher, dans
L'Avenir de France Télécom : un défi national -
j'ai de bonnes lectures...
!
M. Gérard Larcher,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Excellentes !
M. Gérard Delfau.
... le montre clairement.
Dans la foulée fut pensée et votée la réforme Quilès, en 1990, qui assurait
sur des bases solides le noyau dur du service public : un opérateur public
autonome, ayant le monopole du réseau et de la téléphonie filaire, le reste
étant ouvert à la concurrence. Cela n'avait pas si mal marché, tant du point de
vue de la cohésion sociale que sous l'angle stratégique et financier : 9,2
milliards de francs de bénéfices en 1995 ! C'est cette construction équilibrée
que vous faites voler en éclats.
Pourquoi tant de précipitation ? Sans recommander forcément l'attitude
actuellement adoptée par la Grande-Bretagne vis-à-vis de ses partenaires
européens, on aurait pu attendre d'un gouvernement nommé par M. Jacques Chirac
un peu plus de circonspection et un peu plus de fermeté à Bruxelles.
Surtout, pourquoi tant de zèle ? En effet, s'il est vrai que la Commission
européenne exige une concurrence totale entre prestataires de services, à une
date rapprochée, elle s'interdit d'émettre un avis sur la nature juridique de
l'opérateur public et sur la propriété du réseau. Ces choix relèvent
exclusivement de l'Etat national.
Or, loin de préserver ces marges de manoeuvre, vous allez au-devant de
l'industrie privée, comme s'il y avait d'autres raisons à cette mise en
concurrence complète et à cet affaiblissement délibéré de France Télécom. Parmi
celles-ci, il en est une qui inquiète la majorité parlementaire elle-même : il
ne vous suffirait pas que la recette attendue de la privatisation vienne
combler les déficits du budget.
L'Etat vend ainsi son patrimoine, à la façon d'un fils de famille prodigue, ce
qui, simultanément, n'interdit pas à M. Arthuis de fustiger la « hausse de la
fiscalité locale », ni au Premier ministre de déplorer la « mauvaise graisse »
de la fonction publique. Il est d'étranges donneurs de leçon !
Mais un autre « coup tordu » budgétaire - permettez-moi l'expression - se
prépare : est-il vrai, monsieur le ministre, que Bercy envisage d'inscrire en
recettes ordinaires les 50 milliards de francs que France Télécom devra verser
à l'Etat pour provision de la retraite de ses agents, au lieu de mettre ces
sommes dans un fonds de pension, comme l'aurait fait un Pierre Bérégovoy ? Si
tel était le cas, on se trouverait devant un tour de passe-passe qui ne
manquerait pas d'intéresser la Cour des comptes et d'étonner les observateurs
étrangers, attentifs aux signes de rigueur financière.
J'ai beau chercher, je ne vois pas d'arguments qui justifient l'ampleur de ce
démantèlement, eu égard à nos engagements européens. Existe-t-il au moins une
rationalité économique ? Même pas ! C'est pour pallier les carences - ou les
faillites - d'entreprises privées que s'est bâti, peu à peu, depuis un siècle,
un vaste secteur d'entreprises publiques.
Et la vague de privatisation qui a déferlé depuis les années quatre-vingt, sur
les Etats-Unis et la Grande-Bretagne notamment, n'a pas eu les résultats
bénéfiques que certains attendaient ! Les chantres de la « déréglementation »
doivent admettre qu'une autorité de régulation peut se montrer plus tatillonne
et plus prodigue en textes qu'une administration.
Les adeptes de la « dérégulation » sont contraints de s'interroger sur la
baisse de sécurité qui affecte le transport aérien, pour ne citer que cet
exemple.
Quant à la fin des « monopoles », il est piquant ou triste - on choisira - de
les voir se reconstituer à grande vitesse, par rachats et concentrations, mais
cette fois sous forme privée.
Je ne résiste pas au plaisir de citer le journal
Le Monde
des 2 et 3
juin 1996, pourtant favorable à l'ouverture à la concurrence des entreprises
publiques. La journaliste écrit : « Sous le couvert des autorités de tutelle,
les fameux « régulateurs » ou la commission des fusions et monopoles, la
Grande-Bretagne continue à suivre la marche de ses anciennes protégées dans les
secteurs de l'eau, de l'électricité ou du gaz, que ce soit pour empêcher une
trop forte concentration qui nuirait à la concurrence ou pour faire baisser les
tarifs et préserver les intérêts des usagers pris en otage par les nouveaux
propriétaires ». C'est rudement dit !
On peut suivre aussi avec intérêt, et avec beaucoup de craintes, la montée en
puissance d'ATT, le géant américain, que la loi anti-trust avait obligé à
s'amputer d'une partie de son implantation locale, il y a une vingtaine
d'années.
M. Michel Pelchat.
Il y a dix ans !
M. Gérard Delfau.
Apparemment, il est en voie d'occuper une position hégémonique et, cette fois,
à l'échelle planétaire, ce qui représenterait un danger mortel pour notre
civilisation. Faut-il vraiment lui faciliter la tâche en lui ouvrant le marché
français et, surtout, en démembrant France Télécom ? Etrange attitude de la
part de votre Gouvernement !
Tout se passe, en effet, comme si le projet de loi sur la « déréglementation »
avait pour objet non seulement d'abolir la position dominante de l'entreprise
publique - ce qui est condamnable - mais encore de lui faire financer ses
propres concurrents - ce qui est stupéfiant !
En effet, l'article 34 du projet de loi semble avoir été rédigé de la plume de
quelques opérateurs privés. D'ailleurs, ils ne s'en cachent pas. Cela porte
même un nom bien français : le
lobbying.
Et cette pratique détestable n'est pas pour rien dans certaines dérives des
hommes politiques... Je me souviens de mon indignation lors d'une réunion que
vous présidiez, monsieur le ministre, en entendant les représentants de British
Telecom, de Bouygues, de la Lyonnaise des eaux et de la Générale des eaux
tenter de nous apitoyer sur leur sort dans le combat qu'ils avaient à livrer
face au « requin » - le mot fut prononcé - France Télécom. Les voilà sans doute
rassurés par le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale !
Ils auront accès, de plein droit, en tant que câblo-opérateurs et prestataires
de services, au réseau national de France Télécom, qui a été financé pour
l'essentiel par l'argent du contribuable, à hauteur de 100 milliards de francs,
pendant les années soixante-dix et quatre-vingt, ce qui n'est pas rien !
Certes, il est concédé qu'ils devront payer au propriétaire une « juste
rémunération », qui « couvrira le coût des prestations fournies et des
investissements réalisés ». Mais qui croira que, ne pouvant refuser l'accès à
son réseau, France Télécom aura les moyens d'imposer un « juste » retour sur
investissement ? Le tenterait-il qu'il serait désavoué par l'autorité de
régulation, qui aura pour mission et pour idéologie d'ouvrir au maximum à la
concurrence le secteur des télécommunications.
C'est un géant que l'on livre pieds et poings liés au marché international.
Américains et Asiatiques remportent là, sans combattre et sous pavillon
européen, une belle victoire. C'est un crime contre l'intérêt supérieur de la
France.
Le même esprit préside à la mise en oeuvre de l'interconnexion qui vise à
construire ce que vous appelez le réseau « sans couture » entre différents
opérateurs. Ce problème est au coeur de l'ouverture à la concurrence du secteur
des télécommunications.
Il n'est pas envisageable que soit construit un nouveau réseau pour lequel 150
milliards de francs seraient nécessaires. Actuellement, seules existent les
infrastructures détenues par la SNCF, les sociétés d'autoroute, EDF, les
oléoducs, la RATP, les téléports. Au passage, remarquons qu'il s'agit en
général d'entreprises publiques entre lesquelles il aurait été facile pour
votre Gouvernement d'établir un accord de renforcement mutuel avec l'opérateur
principal face à la concurrence étrangère.
Voilà une proposition que nous vous soumettons puisqu'il paraît que nous
serions muets sur l'avenir de France Télécom et crispés sur le
statu quo
!
En ce qui concerne l'interconnexion, le projet de loi traite l'opérateur
public national comme s'il était non seulement en position dominante, mais
encore coupable d'abus de position dominante.
En effet, seul France Télécom, de fait, sera obligé de se plier aux exigences
des autres opérateurs privés. Qui plus est, en ouvrant le droit à
l'interconnexion, non seulement aux exploitants de réseaux mais aussi aux
services, on ouvre le marché à des entreprises dont le seul objectif sera de
pratiquer l'« écrémage », en s'attaquant aux sections les plus rentables en
tant que simples revendeurs de capacité, sans pour autant devoir supporter la
charge financière des investissements réalisés.
Enfin, les principes de tarification de l'interconnexion sont renvoyés à un
décret. Là encore, il y a fort à parier que l'opérateur public sera lésé, le
Gouvernement ayant refusé, à l'Assemblée nationale, un amendement socialiste
disposant que les tarifs d'interconnexion devaient être évalués en fonction des
investissements réalisés par l'opérateur offrant l'interconnexion.
Nous défendrons à nouveau cet amendement. Aurons-nous plus de chance ou
allons-nous, ici, au Sénat, accepter cette disposition discriminatoire ? La
future autorité de régulation est-elle mise en place pour servir de cheval de
Troie aux concurrents de France Télécom ? C'est une lourde responsabilité que
vous prendriez, mes collègues de la majorité.
C'est après cet ensemble de mesures concernant l'ouverture à la concurrence
qu'arrive, sous le titre « le service public des télécommunications »,
l'article 35, chef-d'oeuvre, je dois le reconnaître, d'hypocrisie, festival de
double langage !
Cet article commence par énoncer les grands principes fixés par les juristes
de l'école du service public : égalité, continuité, adaptabilité. Il découpe
ensuite la notion de service public en trois composantes : le service
universel, notion directement importée de Bruxelles ; les services obligatoires
de télécommunication - en quoi sont-ils obligatoires ? Nul ne le dit ! - enfin,
les missions d'intérêt général, terminologie, jusqu'ici réservée aux
prestations les plus éloignées du coeur du service public, concernant dans ce
projet de loi les fonctions régaliennes de l'Etat. Comprenne qui pourra !
Reprenons d'abord les grandes lignes d'une architecture si complexe que, même
avec beaucoup de bonne volonté, on s'y perd. Peut-être est-ce intentionnel !
Il y a d'abord le « service universel » défini comme la fourniture à tous d'un
service téléphonique de qualité à un prix abordable.
Viennent ensuite les « services obligatoires » de télécommunication,
c'est-à-dire l'accès au RNIS, les liaisons louées, la communication de données
par paquet, les services avancés de téléphonie vocale, le télex.
Sont rappelées, enfin, les « missions d'intérêt général », à savoir la
défense, la sécurité publique, la recherche et l'enseignement supérieur, qui
sont confiées à l'Etat.
Voici une première remarque fondamentale : ce découpage préfigure la mort de
la notion de service public.
La caractéristique spécifique de cette lente construction juridique et
économique, c'est d'avoir posé en principe la mutabilité et l'adaptabilité. A
partir de cette conception, chaque génération a pu exprimer ses besoins vitaux,
à charge pour l'opérateur public d'y apporter une réponse satisfaisante.
C'était la contrepartie de la situation de monopole et du statut d'agent de la
fonction publique concédés à l'entreprise. Celle-ci a toujours conçu sa mission
comme devant, non seulement répondre à cette demande sociale, mais encore comme
étant susceptible de l'anticiper : l'exemple de l'invention et de la
généralisation du Minitel est typique de cet état d'esprit dans l'histoire de
France Télécom.
Désormais, un tel miracle ne pourra se reproduire, puisqu'une telle merveille
ne pourrait être mise à la disposition des bénéficiaires du « service universel
», ce service du pauvre.
Le découpage du service public des télécommunications en trois strates fige
une situation et, par là même, il la rend obsolète. Bien sûr, les technologies
continueront à progresser à grande vitesse, mais au bénéfice exclusif de ceux
qui auront les moyens de payer ces prestations coûteuses. C'est l'esprit même
du service public, sous sa double approche traditionnelle, égalité et
adaptabilité, que vous reniez.
De plus, vous en donnez une définition restrictive, dans le cadre d'un service
dit « universel » qui se résume aux services de base de la téléphonie fil à
fil. Or, celle-ci n'est plus l'avenir des télécommunications, vous le savez. Le
téléphone mobile se répand comme une traînée de poudre. Le réseau filaire, le
câble et l'hertzien se combinent. L'image rejoint le texte. Téléphone,
télévision, informatique se rencontrent.
Une autre configuration des télécommunications se met en place sous nos yeux.
Vous en excluez le plus grand nombre. Vous refusez l'accès à la modernité à
ceux qui en auraient le plus besoin, les plus pauvres et les plus marginalisés,
sans oublier les petites entreprises. C'est en cela, surtout, que votre texte
est celui d'une majorité de droite.
Au fond - et pour en venir à ma conclusion - c'est ma grand-mère, qui n'use
guère du téléphone, c'est le Lozérien, si éloigné de la capitale, c'est
l'artisan de ma commune qui paieront pour l'habitant de l'Ile-de-France et pour
l'homme d'affaires pressé de donner ses ordres à la Bourse de Hong kong !
(Murmures sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Après cette analyse sans concession de votre projet de loi de «
déréglementation » des télécommunications - ce sera ma conclusion - vous
imaginez bien, monsieur le ministre, que, avec le groupe socialiste, je me
battrai pied à pied pour vous faire renoncer à ce funeste dessein.
Si vous parveniez, malgré tout, à vos fins, sachez qu'un jour, une autre
majorité reprendrait le débat, et sur des bases radicalement différentes, car
l'histoire du service public est liée à l'histoire de la France. Et je ne
désespère pas qu'elle infléchisse même celle de l'Europe !
Aujourd'hui vouée au culte du marché et de la concurrence, notre Union
européenne doit s'ouvrir aux notions de « puissance publique » et de « société
d'économie mixte ». Elle retrouvera ses racines face à une autre conception du
monde que celle qu'inspire l'ultra-libéralisme.
C'est ce combat que j'ai choisi de mener en priorité désormais, avec des
parlementaires de toutes les formations politiques, y compris au sein de notre
assemblée.
De grâce, monsieur le ministre, ne nous rendez pas la tâche impossible.
Relisez le remarquable rapport du député M. Didier Borotra sur « l'Europe et
les services publics », publié en octobre 1995. Que, dans ce débat, il vous
inspire ! Ce sera ma dernière proposition.
(Applaudissements sur les travées
socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais bien
entendu vous proposer de ne pas poursuivre le discours que nous venons
d'entendre...
M. Guy Fischer.
Cela ne nous étonne pas !
M. Michel Pelchat.
... et d'essayer de trouver d'autres façons d'éclairer notre assemblée que la
lampe à huile !
(Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux.
Et surtout la démagogie !
M. Claude Estier.
Cela vous va bien ! C'est nous, la lampe à huile ? Franchement !
M. Michel Pelchat.
Je vous propose de changer de fréquence.
Mon cher collègue, que cela vous plaise ou non, vous ne m'empêcherez pas de
dire ce que je pense et de donner mon interprétation du discours précédent.
Je vous propose de changer de fréquence, de passer sur Radio-France et
d'écouter la différence, comme disait Roland Faure voilà quelques années.
Une fois de plus, en France, contrairement à ce qui a été dit précédemment, le
fait aura précédé le droit, car le projet de loi portant sur la réforme des
télécommunications ne vient que confirmer ce qui existe déjà dans ce secteur,
l'avènement de la concurrence, simplement en l'organisant et en assurant à la
France et à France Télécom une place prépondérante dans ce nouveau système qui
est d'ores et déjà en place.
Certes, nous sommes encore dans une situation de monopole de l'opérateur des
télécommunications, mais nul n'ignore aujourd'hui les façons de détourner ce
monopole. Les exemples sont déjà nombreux, et ils iront en se multipliant !
L'ouverture à la concurrence, à laquelle la France prépare le secteur des
télécommunications aujourd'hui, représente une avancée majeure pour le
développement de notre économie nationale. En effet, les télécommunications
sont présentes dans tous les secteurs économiques, elles jouent un rôle majeur
dans la compétitivité de nos entreprises sur les marchés internationaux, et
elles occupent une part croissante des richesses produites par les économies
développées.
Du cercle de la concurrence, dans lequel il s'agit aujourd'hui de faire entrer
les télécommunications, nous attendons, en premier lieu, une baisse des
prix.
En effet, nos prix sont 30 p. 100 plus élevés en France que dans les pays
ouverts à la concurrence. Nos tarifs peuvent même être jusqu'à six fois à huit
fois plus élevés, lorsque l'on considère des services particuliers comme la
location de liaisons spécialisées.
Ces tarifs élevés, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, rendent notre marché particulièrement vulnérable à une concurrence
étrangère, concurrence qu'aucun moyen juridique ne peut entraver et que les
progrès technologiques des prochaines années ne peuvent qu'accélérer.
A titre d'exemple, une communication téléphonique d'une minute entre Paris et
Biarritz est facturée à 2,22 francs TTC par France Télécom. Si vous faites
appel à des sociétés de
call back
- permettez-moi de vous faire
remarquer que je préfère l'expression française « rappelez-moi », qui signifie
la même chose, mais qui est moins usuelle dans le langage courant - elles
proposent des tarifs aux alentours de 1,82 franc pour la même communication
sans passer par le monopole de France Télécom, ce qui correspond à 30 p. 100 de
moins.
Par ailleurs, des pages de télécopie, par exemple, pour une liaison entre
Brest et Strasbourg qui durerait trois minutes, seraient facturées 5,93 francs
TTC par France Télécom, sans compter l'abonnement, alors que sur Internet ces
mêmes pages peuvent être transmises par courrier électronique pour le coût
d'une communication locale, soit 1,48 franc TTC les trois minutes, c'est-à-dire
quatre fois moins cher.
Voilà ce qui existe aujourd'hui ! Voilà la réalité à laquelle il faut faire
face et dans laquelle il faut se positionner pour demain !
Rappelons que les tarifs professionnels dans les pays ouverts à la concurrence
ont baissé entre 1990 et 1994 de 8,6 p. 100 tandis qu'ils baissaient seulement
de 3,1 p. 100 dans l'ensemble des pays ayant conservé le monopole.
Rappelons aussi que les tarifs résidentiels dans les pays ouverts à la
concurrence ont baissé de 3,1 p. 100 entre 1990 et 1994, alors que, au
contraire, dans les pays ayant conservé le monopole du service téléphonique,
les mêmes tarifs résidentiels ont augmenté de 8,7 p. 100 sur la même
période.
Ces exemples illustrent, monsieur le président, monsieur le ministre, mes
chers collègues, la nécessité de baisser les tarifs des télécommunications qui,
sous le régime du monopole, ont été maintenus à un nivreau particulièrement
élevé.
Il faut rappeler qu'il y aura aussi une amélioration de la qualité des
services et une augmentation du nombre de ceux-ci.
En effet, la baisse des prix n'est pas uniquement une nécessité pour faire
face aux différentes formes de concurrence qui se développent sur ce marché.
Nous en attendons également une hausse de la consommation avec, notamment,
l'émergence, de nouveaux services et aussi une meilleure utilisation des
infrastructures existantes. Ces infrastructures doivent ainsi pouvoir
contribuer davantage au développement des régions, grâce, par exemple, au
télétravail, au télé-enseignement, véritables atouts en terme d'aménagement du
territoire.
Là encore, du point de vue de l'aménagement du territoire, nous ne pouvons que
souligner le handicap que représentent jusqu'à présent les tarifs trop
élevés.
Il faut en particulier constater que les télécommunications représentent, dans
les pays qui ont conservé le monopole, une part du produit intérieur brut
inférieure à celle que l'on constate dans les pays qui ont d'ores et déjà
procédé à la libéralisation de ce secteur. Ainsi, les télécommunications
représentent 1,6 p. 100 en France contre 2,1 p. 100 au Royaume-Uni, 2,2 p. 100
aux Etats-unis et 2,4 p. 100 en Suède. Ce moindre développement du secteur se
manifeste généralement par plusieurs signes : prix plus élevés que dans les
pays cités, moindre diversité des services offerts, taux de croissance et
niveau de consommation moins élevés.
La baisse des tarifs va favoriser le développement de nouveaux services et de
l'ensemble du marché des télécommunications en France.
Grâce à cela, de nouveaux opérateurs français vont pouvoir émerger, à
l'échelle tant nationale qu'internationale, et ceux-ci seront naturellement
créateurs de nouveaux emplois. On estime que la croissance des emplois dans le
secteur des télécommunications en France serait comprise dans une fourchette de
70 000 à 135 000 emplois dans les cinq prochaines années.
Tels sont les bénéfices que l'on est en droit d'attendre de cette ouverture à
la concurrence, qui permettra à la France de continuer à occuper une place de
premier rang, sur un secteur aux dimensions de plus en plus internationales et
où, partout, les monopoles cèdent la place au dynamisme du marché.
Et l'enjeu du projet de loi sur la réglementation des télécommunications est
bien là, monsieur le ministre, mes chers collègues : faire en sorte que, dans
cet environnement international et concurrentiel, nos opérateurs nationaux
occupent demain les premiers rangs européens et mondiaux.
Ce texte a été enrichi à l'Assemblée nationale de deux avancées majeures.
Premièrement, a été introduite une date butoir pour achever la résorption du
déséquilibre tarifaire de France Télécom.
Ce déséquilibre représente à ce jour, selon l'exposé des motifs du projet de
loi qui nous est présenté, de 9 milliards à 14 milliards de francs de charge
pesant sur l'ensemble du secteur des télécommunications. Il s'agit là d'un
lourd handicap pour tous les opérateurs et il serait utile, pour permettre
l'essor attendu de l'ouverture à la concurrence, que ce déséquilibre soit
résorbé le plus rapidement possible. Il peut l'être pour les deux raisons
suivantes.
D'abord, le relèvement de 20 francs environ de l'abonnement téléphonique
qu'exige la résorption du « déficit d'accès » serait compensé par la baisse
globale des tarifs de communications.
Ensuite, des dispositions du projet de loi, dans le cadre du fonds de service
universel, permettraient, notamment aux foyers les plus démunis, de bénéficier
d'une réduction, par exemple de moitié du prix de l'abonnement. De la sorte,
les effets de la hausse de l'abonnement seraient totalement compensés par la
baisse des tarifications.
Par ailleurs, l'élimination du « déficit d'accès » contribue à assainir
l'économie entière du secteur des télécommunications, comme l'a souligné le
groupe d'experts présidé par le directeur général de l'INSEE.
En effet, on constate le poids que représente la contrainte économique du «
déficit d'accès » avec l'illustration du développement tardif du téléphone
mobile en France.
On ne peut que regretter que, au termes d'abonnés, la France, avec 2,54 p.
100, arrive derrière des pays comme l'Irlande, le Portugal, l'Espagne et la
Grèce.
On voit là combien le handicap du déséquilibre tarifaire de France Télécom,
qui a représenté jusqu'à 50 p. 100 des prix pratiqués par les opérateurs de
téléphone mobile, freine le développement dynamique de notre marché des
télécommunications. Le résorber représente donc aujourd'hui une urgente
priorité.
La résorption du « déficit d'accès » est également d'une urgente priorité pour
l'opérateur public, comme le dit d'ailleurs son président, car il se retrouve
désormais face à une concurrence qui ne manquerait pas de profiter des tarifs
trop élevés de France Télécom pour écrémer le marché interurbain et lui prendre
la place importante qu'il occupe aujourd'hui sur ce secteur et qui ne demande
qu'à se développer.
Dans l'attente de ce rééquilibrage, pour permettre le dynamisme nécessaire au
développement des nouveaux services de radiocommunications mobiles, l'Assemblée
nationale a adopté une seconde mesure sage : elle consiste à exonérer les
opérateurs nationaux de radiocommunications mobiles des versements dus au titre
du déséquilibre tarifaire.
Cette mesure ne constitue nullement un cadeau que nos collègues députés
auraient offert aux opérateurs. Elle représente simplement la juste
contrepartie du développement du trafic téléphonique qu'engendrent les
communications mobiles et représente une initiative salutaire car, en allégeant
les charges qui pèsent sur les opérateurs, elle est susceptible de permettre à
la France de rattraper son retard ; il est donc nécessaire que cette mesure ne
soit pas remise en cause au Sénat.
M. Gérard Delfau.
Merci pour elle !
M. Michel Pelchat.
Je vous en prie, mon cher collègue !
Ce retard est aujourd'hui, monsieur le président, monsieur le ministre, mes
chers collègues, vous le savez bien, dommageable à l'aménagement du
territoire.
Il convient donc de trouver un juste équilibre entre les contraintes que
subissent actuellement ces opérateurs - je pense notamment au niveau élevé des
charges d'interconnexion - les engagements que nous souhaitons leur voir
prendre et la très rapide évolution des technologies. A ce sujet, j'aurai
d'ailleurs l'occasion de défendre un amendement lors de l'examen des
articles.
Au-delà de tout cela, cette loi, monsieur le président, monsieur le ministre,
mes chers collègues, possède un caractère tout à fait original. Il en faudrait
d'autres de la même veine !
En effet, alors que tout le monde se pose de grandes questions pour favoriser
l'emploi, vous nous proposez, monsieur le ministre, une loi qui va produire
trois effets, trois effets qui, jusqu'à présent, ont toujours été jugés
contradictoires, mais qui, pour cette fois, sont complémentaires et même
s'additionnent, à savoir la création d'emplois, l'augmentation de la
consommation et les prélèvements obligatoires.
Commençons par le premier effet, la création d'emplois.
Nous l'avons vu, dans les cinq prochaines années, la croissance des emplois
dans le secteur des télécommunications devrait être comprise entre 70 000 et
135 000 emplois.
M. Guy Fischer.
C'est à prouver !
M. Michel Pelchat.
Sur le marché du téléphone mobile, notamment, la création d'emplois devrait
être très importante.
A titre d'exemple, citons le Royaume-Uni. Le bilan de l'ouverture à la
concurrence montre que l'emploi a augmenté du fait du succès grandissant de la
téléphonie mobile. En effet, dans ce pays, qui compte environ 5 millions
d'abonnés, les emplois liés directement ou indirectement à cette activité et
qui étaient au nombre de 42 000 en 1994 pourraient passer à 90 000 d'ici à l'an
2000, c'est-à-dire doubler !
J'en viens au deuxième effet, l'augmentation de la consommation.
Les études qui ont été menées en 1993 pour le ministère des
télécommunications, vous le savez, monsieur le ministre, ont montré qu'à
l'horizon 2000 le marché des télécommunications devrait, dans notre pays,
connaître une croissance de près de 7 p. 100 par an pour l'ensemble des
services, ce qui est considérable.
Enfin, le troisième effet est la réduction des prélèvements obligatoires.
Avec la mise en concurrence des opérateurs de télécommunication, on va
abaisser le coût des communications, et donc réduire les prélèvements
obligatoires. M. Larcher, dont je salue le rapport admirable, ...
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Merci !
M. Michel Pelchat.
... nous le dit bien : la baisse des tarifs « devrait favoriser l'allégement
des charges des entreprises ».
Création d'emplois, réduction des prélèvements obligatoires, augmentation de
la consommation, voilà, monsieur le ministre, un triptyque que l'on n'arrive
jamais à réaliser sans que cela coûte de l'argent public. Eh bien ! là, vous
l'avez fait, et vous êtes le premier !
Pourvu que de nombreuses lois comme celle-ci nous soient présentées, non pas
pour notre satisfaction personnelle, mais pour l'avenir de notre pays. Merci,
monsieur le ministre.
Merci, mes chers collègues, de voter cet excellent texte. Pour ce qui les
concerne, les Républicains et Indépendants le feront avec joie !
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, concilier
service public et concurrence, voilà une tâche difficile mais nécessaire. Il
nous appartient de trouver un équilibre entre ces deux réalités au bénéfice des
utilisateurs et des clients.
Je ne reviendrai pas, dans mon intervention, sur les points de détail qui ont
été très bien exprimés dans l'excellent rapport de notre collègue M. Gérard
Larcher.
Monsieur le ministre, pour nous, France Télécom, entreprise majeure, ne doit
pas, dans ce nouveau contexte, subir les aléas du marché mondial, et non plus
seulement européen, comme on veut bien le dire, sans disposer, et c'est bien là
l'essentiel pour sa pérennité, des armes indispensables à l'ouverture à la
concurrence.
Il ne s'agit en aucun cas de démanteler l'opérateur national. L'adaptation
sera le gage de son avenir et non pas seulement de sa survie. Je crois que le
changement de statut doit être accompagné d'un changement de culture. Il faudra
bien qu'il se traduise en termes de maintien d'emplois, mais aussi de créations
d'emplois. En fait, il aura comme conséquence d'amener sur le marché de la
concurrence une entreprise comme les autres.
A ce propos, monsieur le ministre, j'aurai l'occasion de défendre un
amendement qui permettra, je l'espère, à cette entreprise redevenue une
entreprise normale de s'acquitter de sa taxe professionnelle au profit des
collectivités locales, comme cela devrait être le cas aujourd'hui, j'en profite
pour vous le rappeler, monsieur le ministre.
Si vous pouviez nous donner l'assurance, au moment où M. le Premier ministre
s'est engagé à procéder à une réforme de la taxe professionnelle, que ce
problème sera réglé à l'occasion de ce projet de loi, ce serait un gage de la
volonté du Gouvernement de revoir notre fiscalité.
Le projet de loi que vous nous soumettez définit clairement la notion de
service public. Il se place dans une perspective d'évolution et d'adaptation
conformes aux principes fondamentaux constituant le coeur même de la notion
d'un service public.
Celui-ci ne devrait-il pas, tout simplement, rechercher la satisfaction de la
clientèle, et c'est bien là l'essentiel pour une entreprise sur le marché de la
concurrence ? « Le client est le personnage le plus important de l'entreprise
», cela a été dit avant moi, mais mérite d'être répété.
Notre service public ne peut pas ignorer l'Europe ; c'est bien là toute la
question.
Nous assistons à l'éclosion d'un nouveau concept : le service universel, qui
pourrait devenir une sorte de service public européen. Sa définition s'appuie
sur quatre éléments : couvrir des besoins vitaux et fondamentaux ; être
accessible à tous ; fournir des prestations abordables ; fournir des
prestations de qualité.
On pourra objecter que le service universel n'est pas public et que ses points
d'application envisagés - énergie, télécommunications, services postaux -
doivent s'entendre dans un environnement concurrentiel.
A quoi l'on peut rétorquer que, si le service universel n'est pas
obligatoirement public, il peut l'être parce que sa finalité première est
d'être un instrument de cohésion sociale.
Si le développement futur de l'Union européenne accorde une priorité aux
préoccupations sociales et à une amélioration de l'harmonie sociale, rien
n'interdit de penser que, par affinements successifs, service public et service
universel finiront par se ressembler. Le service public à la française est
aujourd'hui un bon article d'exportation qui justifie que l'on s'y attarde.
La qualité du service universel exige une observation attentive de l'évolution
des comportements et des besoins des usagers.
Il est de l'intérêt public de préparer notre économie aux nouvelles conditions
du marché par un rééquilibrage des tarifs du service du téléphone, tout en
respectant les exigences de l'aménagement du territoire.
Si, à l'heure de l'ouverture à la concurrence, c'est-à-dire au 1er janvier
1998, il apparaît que l'équilibre économique et financier du service universel
ne pourra être atteint en raison des règles imposées aux opérateurs autorisés,
il sera alors indispensable de simplifier et de limiter dans le temps les
mesures visant à compenser une charge plaçant France Télécom dans une situation
inégale.
Dans le cadre du monopole, la loi avait confié à la commission supérieure du
service public des postes et télécommunications, à laquelle j'ai l'honneur
d'appartenir, le soin de cette mission. Le projet de loi que nous examinons la
maintient tout naturellement dans un marché ouvert. Cette commission, par sa
composition, doit apporter les garanties d'expertise et de neutralité
suffisantes et demeurer ainsi une sorte de « conscience du service public ».
J'ai déposé un amendement visant à accroître la représentation du Parlement au
sein de la commission supérieure du service public des postes et
télécommunications, afin d'assurer la parité entre les deux chambres, qui
seront représentées, chacune, par sept membres.
Le monde est bel et bien devenu un village planétaire : ce projet de loi
scelle la convergence entre les télécommunications, l'informatique et les
médias électroniques.
Le secteur des télécommunications est certainement l'un des rares secteurs
dont la croissance est plus que prometteuse. En dix ans, le trafic mondial a
été multiplié par 2,5. Dans moins de cinq ans, plus de 800 millions de lignes
auront été installées sur l'ensemble du globe.
Si la transmission de la voix représente et représentera encore 80 p. 100 des
recettes, il ne faut pas négliger la forte demande de transmission de données
aux entreprises qui s'installe de manière de plus en plus évidente.
La France a, dans le domaine des technologies de transmission des données, des
images et du son, une avance importante. Elle est en mesure de jouer un grand
rôle.
Nous ne devons à aucun moment refaire l'erreur que nous avons commise avec le
cinéma. Nous avons laissé aux Américains le soin de traduire en une industrie
prospère l'idée géniale des frères Lumière. Ne laissons pas l'industrie des
nouvelles technologies de l'information aux mains monopolistiques des
Américains, sous le seul prétexte qu'ils sont à l'origine de la création
d'Internet.
Nous ne sommes pas dépourvus d'atouts. Cinquante ans après sa création, le
CNET - le Centre national d'études des télécommunications - peut se vanter
d'être l'un des principaux centres de recherche mondiale. Il peut également
être fier d'avoir lancé très tôt des programmes de recherche dans le domaine de
la télétransmission, de la transmission et de la commutation numérique. Cette
démarche originale a permis de gagner une génération de matériel et, surtout,
de passer d'une position de « retardataire » à une position de pointe, si ce
n'est de leader.
Le CNET doit désormais s'adapter à un nouveau contexte. Pour autant, il doit
pouvoir poursuivre la voie engagée et demeurer un laboratoire performant dans
une entreprise appelée à être déréglementée.
Aujourd'hui, tous les exploitants sont conscients de l'importance du marché
des liaisons spécialisées. Les alliances sont, en ce domaine, fondamentales
pour proposer à une clientèle stratégique mondiale les services qu'elle attend.
France Télécom, avec ses partenaires de demain, disposent de grands atouts sur
ce créneau qu'il convient d'exploiter sans tarder.
Il sera alors temps de définir des règles relatives aux nouveaux services
ouverts au public, notamment dans le domaine du multimédia. Ainsi
conviendra-t-il de clarifier la répartition des compétences entre l'autorité de
régulation des télécommunications et le Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Ce projet de loi qui vise à réglementer les télécommunications permet surtout
de prévoir plus facilement quel sera l'avenir de la future société France
Télécom.
L'usager consommateur du service public n'est pas encore devenu roi, mais il
n'est plus un quelconque sujet. Il s'agit d'une évolution spectaculaire, que
mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même approuvons totalement.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous voterons le projet de loi qui nous
est soumis.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Saunier.
M. Claude Saunier.
Avant de développer mon argumentation, je voudrais vous dire, monsieur le
ministre, dans quel état d'esprit j'aborde personnellement, tout comme un
certain nombre de mes collègues, ce débat. Nous ne l'abordons pas avec la
frilosité de parlementaires soucieux de défendre des droits acquis, de
maintenir un ordre établi et de pratiquer une obstruction inspirée
essentiellement par l'immobilisme et le conservatisme. Non, monsieur le
ministre, nous l'abordons, les uns et les autres, avec la passion de ceux qui
ont mesuré l'importance de la révolution technologique, économique et
culturelle majeure qui éclate littéralement sous nos yeux.
Nous l'abordons aussi - je le dis avec regret - en constatant que notre
société, en particulier la classe politique, n'a peut-être pas, au cours de ces
dernières années, accordé suffisamment d'intérêt à la réflexion collective sur
ce qui est le creuset du monde de demain.
Je l'aborde enfin avec un esprit qui tente, depuis quelques années, de
comprendre le sens de ce qui se prépare sous nos yeux, avec une curiosité
permanente sur l'innovation, avec une sorte de fascination sur le génie
inventif de l'humanité, qui s'exprime au travers de ce que nous découvrons
chaque jour, mais aussi avec lucidité et perplexité devant ce que la seule
technologie nous apporte de meilleur et de pire.
Si j'évoque très librement cet état d'esprit, c'est non pas évidemment pour
étaler des impressions personnelles, mais parce que je sais que cette approche
est largement partagée par un grand nombre de nos collègues sur les différents
bancs de notre assemblée.
Monsieur le ministre, c'est au nom de cette passion, au nom de cette
conviction que je vous livre mes impressions quasiment au terme de ce débat et
non pas à la lumière de je ne sais quelle lampe à huile que l'on a évoquée
voilà quelques instants.
Monsieur le ministre, nous ne sommes pas favorables à votre proposition.
Nous ne le sommes pas, d'abord parce que vous avez utilisé une méthode
contestable. Hier, ici même, vous nous avez présenté votre projet de loi comme
un texte uniquement technique, guidé par les circonstances, en un mot
anodin.
M. François Fillon,
ministre délégué à la poste, aux télécommunications et à l'espace.
J'ai
dit le contraire !
M. Claude Saunier.
Ce n'est pas la première fois, monsieur le ministre...
M. François Fillon
ministre délégué.
J'ai dit qu'il s'agissait d'une réforme historique !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Il ne vous a pas écouté !
M. Claude Saunier.
Nous avons déjà eu l'occasion d'entendre des propos de même nature, ici même,
voilà quelques semaines.
Ainsi, le texte qui nous est soumis, sous une apparence de grande complexité
technique, est en fait un texte éminemment politique. Il l'est par ses
origines. Il l'est par son inspiration. Il l'est par les conséquences
considérables que son application entraînerait dans la vie de nos concitoyens,
pour le développement des entreprises et pour l'avenir de la nation.
Or nous constatons en fait un véritable décalage, voire un grand écart, entre
l'importance du sujet abordé et la présentation, presque anodine, de
dispositions techniques.
Cela relève d'une méthode législative que nous contestons, monsieur le
ministre et qui soulève un certain nombre de questions, questions qui ont
également été posées par vos propres amis politiques.
En effet, en quelques mois, le Parlement a été invité à se prononcer sur une
série de textes qui, tous, sont présentés comme des mesures techniques de
circonstances.
Ainsi, le 20 février nous avons examiné un texte autorisant les
expérimentations. Ayant participé au débat, j'ai le souvenir de la façon dont
vous l'avez abordé vous-même.
Cette semaine, nous discutons de la future réglementation des
télécommunications.
La semaine prochaine, nous débattrons du statut de France Télécom.
Hier soir, monsieur le ministre, vous nous avez annoncé l'intention du
Gouvernement de définir quelques règles de déontologie, en effet
indispensables, pour l'exploitation d'Internet.
Enfin, dans quelques semaines, c'est le chantier de la télévision numérique
que nous allons ouvrir.
En un mot, alors que le secteur des télécommunications entre dans une phase
radicalement nouvelle de son histoire, alors que notre société dépend de plus
en plus de ces nouvelles technologies, qu'il s'agisse d'aménagement du
territoire, de formation, de culture, d'économie, le Gouvernement refuse, de
fait, d'organiser le grand débat parlementaire qu'exige l'ampleur du sujet.
Le débat que nous venons d'avoir depuis hier soir témoigne de cette
contradiction entre l'affichage purement technique et le véritable enjeu de ce
projet de loi.
A l'évidence - et c'est, je crois, un point de vue assez largement partagé -
le Gouvernement n'a pas saisi l'opportunité d'un grand débat d'intérêt
national. Il a choisi, excusez-moi l'expression, le bricolage législatif. Il
navigue à vue, sans stratégie.
C'est donc, d'abord, sur le plan de la méthode que nous contestons
formellement votre projet de loi. Mais nous le contestons, bien entendu aussi,
sur le fond, sur son contenu, que nous considérons comme dangereux.
Vous justifiez votre texte par des impératifs européens. L'explication est un
peu courte !
Le calendrier européen n'imposait nullement la hâte avec laquelle vous nous
proposez la dérégulation, puisque le rendez-vous est fixé au 1er janvier
1998.
Ce délai aurait pu permettre à la France d'ouvrir, au sein de l'Europe, le
grand débat politique qu'exigerait un tel sujet. Pourquoi tant de hâte ?
En réalité, nous avons la réponse. Nous l'avons entendue ici même. Cette hâte
traduit une attitude de soumission à la logique libérale, qui constitue
l'idéologie de référence du projet de loi.
Il est permis de s'interroger sur les grandes déclarations relatives auservice
public à la française faites par les voix les plus autorisées de l'Etat alors
que, dans le même temps, nous assistons au démantèlement systématique de ce
service public.
Nous ne sommes pas loin, j'ai le regret de le dire, du double langage.
Alors, on invoque des raisons techniques, et ces arguments méritent, en effet,
d'être examinés attentivement.
On nous dit que le monopole actuel de France Télécom tombera de toute façon
très rapidement, du fait de la mise en place de nouveaux services portés par la
conjonction du numérique et des constellations de satellites à orbite basse,
par exemple.
Il s'agit effectivement là d'une donnée technique dont j'ai eu l'occasion,
voilà quelques jours, de vérifier la réalité, avec quelques-uns de mes
collègues, M. Trégouët en particulier, au CNES, chez Matra Space et chez
Alcatel Space. Nous avons vu ce que les ingénieurs et les techniciens étaient
en train de nous préparer : une nouvelle révolution, un nouveau bouleversement,
dont il faut tenir compte.
Fallait-il pour autant, par l'organisation de la dérégulation dans les
services existants, prendre le risque de déstabiliser l'opérateur public
français ?
Fallait-il introduire le loup dans la bergerie, par l'ouverture massive des
services classiques à des groupes privés de taille internationale ?
Sur ce point, ni vos arguments, monsieur le ministre, ni ceux du rapporteur de
la commission, M. Gérard Larcher, ne nous ont convaincus, c'est le moins que
l'on puisse dire !
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. Claude Saunier.
J'en viens à ce que je considère comme la déstabilisation d'un bon service.
Nous aurions pu être un peu plus sensibles aux vertus de l'ouverture à la
concurrence si notre opérateur public avait été mauvais ; après tout, il s'agit
de l'intérêt national ! Si France Télécom avait fait preuve d'immobilisme, de
mauvaise gestion ou d'incapacité à innover, on aurait pu, en effet, se poser la
question.
Or tel n'est pas le cas. D'ailleurs, dans les propos de tous les orateurs, à
quelque groupe qu'ils appartiennent, comme dans les vôtres, monsieur le
ministre, ce ne sont qu'éloges sur l'efficacité technique et commerciale de
notre opérateur public.
Alors, encore une fois, pourquoi en organiser la déstabilisation ? Et dans
l'intérêt de qui ?
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Claude Saunier.
S'agissant de l'aménagement du territoire, les témoignages, les
interrogations, les souhaits ont été nombreux au cours du débat, et pas
seulement sur les travées de l'opposition. Vous y répondez par le principe du
service public universel. Fort bien, mais tel que celui-ci est aujourd'hui
entendu, la réponse est un peu courte !
On a parlé du « RMI du téléphone ». La formule est cruelle, mais éloquente.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Elle est facile !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Elle est surtout cruelle pour son auteur !
M. Claude Saunier.
Le service universel tel que vous nous le présentez est en effet bien maigre
pour entrer de plain-pied dans la société de l'information que l'on nous
annonce en respectant les principes de l'égalité républicaine.
Concrètement, on le sait, les entreprises, y compris les plus petites, vont,
demain, consommer non pas de la téléphonie vocale mais, massivement, des
capacités de transport d'information.
La dérégulation qui nous est proposée, parce qu'elle est intrinsèquement
fondée sur une vision financière pour les opérateurs qui vont s'emparer des
nouveaux réseaux, ne peut manquer depénaliser lourdement les zones rurales et
les régions excentrées.
Des collègues ont, par ailleurs, bien mis en relief les conséquences de la
dérégulation sur la tarification et sur l'emploi, en particulier à la lumière
des expériences étrangères.
S'agissant de l'emploi, nous devrons faire preuve de beaucoup de
circonspection pour apprécier avec justesse les effets du bouleversement
technique et organisationnel qui nous attend.
A plusieurs reprises, on a évoqué les grands talents des ingénieurs du CNET.
Je voudrais justement, avant de conclure, vous interroger, monsieur le
ministre, sur l'avenir de la recherche et de la formation à France Télécom.
La seule logique financière que l'Etat impose à son grand opérateur dispense
celui-ci de missions d'intérêt général comme la recherche et la formation.
Puisqu'on lui impose de faire de l'argent, sa mission n'est plus ni de chercher
ni de former.
On sait pourtant que notre avenir collectif, notre avenir national, se joue
pour une part dans les laboratoires du CNET ou du CCETT, le centre commun
d'études de télédiffusion et de télécommunications.
Nous souhaiterions savoir précisément quelles sont, sur ce point, les
intentions du Gouvernement.
Vous l'avez deviné, monsieur le ministre, notre opposition au projet que vous
nous soumettez est déterminée.
Cette opposition tient autant à l'approche et à la méthode que vous avez
retenues qu'au contenu d'un texte qui organise la dérégulation, autant aux
multiples conséquences négatives de ce choix pour la nation qu'à la nature
idéologique profonde de cette option.
Je le dis très clairement : notre position n'a rien à voir avec un quelconque
conservatisme. Nous mesurons comme vous les enjeux technologiques, économiques
culturels et sociaux, enjeux considérables, qui se profilent derrière des
questions apparemment techniques. C'est précisément pour cela que nous vous
demandons de revoir votre méthode et votre projet de loi.
Monsieur le ministre, il s'agit d'un enjeu majeur pour notre pays. Ne
continuez pas à jouer à la roulette russe avec l'avenir de la nation !
(Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Robert Pagès applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. Lagourgue.
M. Pierre Lagourgue.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 1er
janvier 1998, le secteur des télécommunications sera ouvert à la
concurrence.
La fin du monopole de l'Etat résulte, certes, des engagements européens de la
France mais aussi et surtout de l'évolution technologique qui, développant
chaque jour davantage les possibilités offertes par les communications
satellitaires ou par les réseaux hertziens, a rendu nécessaire la
libéralisation du marché, de manière que les attentes du public soient mieux
satisfaites et que la compétitivité de nos entreprises soit renforcée dans ce
domaine.
Cette étape se trouve franchie avec ce projet de loi qui fixe les règles du
jeu appelées à s'appliquer à partir de 1998.
L'intitulé du projet indique bien qu'il s'agit de définir les conditions
d'exercice d'un service public des télécommunications dans un secteur qui sera
ouvert à la concurrence.
Fort heureusement, France Télécom est confirmé dans sa vocation d'entreprise
de service public puisqu'il est nommément désigné comme l'opérateur du «
service universel des télécommunications », c'est-à-dire celui qui est chargé
de fournir à tous un service téléphonique de qualité et à un prix abordable.
En l'état actuel, seul France Télécom est capable d'assurer, dans sa totalité
et sur l'ensemble du territoire, la prise en charge de ce service universel des
télécommunications, dont le cahier des charges détermine notamment, aux termes
de l'article L. 35-2 du code des postes et télécommunications, « les
obligations tarifaires nécessaires, d'une part, pour permettre l'accès au
service de toutes les catégories sociales de la population et, d'autre part,
pour éviter une discrimination fondée sur la localisation géographique ».
Ce dernier point m'amène directement à l'objet principal de mon propos : la
tarification des communications dans les départements d'outre-mer.
La discrimination fondée sur la localisation géographique existe encore, hélas
! à l'encontre de l'outre-mer, bien que, techniquement, elle ne se justifie
plus. En effet, l'utilisation des satellites a quasiment aboli le coût lié à la
distance, comme l'a reconnu le rapport de l'inspection générale des
télécommunications que vous m'avez communiqué, monsieur le ministre.
Permettez-moi de citer brièvement quelques extraits des conclusions de ce
rapport, qui portait sur « l'offre de services et la tarification dans les
départements d'outre-mer » :
« Le constat que nous avons fait est que le tarif des communications entre la
métropole et la Réunion est élevé, trop élevé, si l'on se réfère aux tarifs
internationaux et aux tendances tarifaires dans lesquelles la chute des coûts
de la transmission conduit à tenir de moins en moins compte de la distance.
« Dans un contexte de libéralisation des télécommunications, des offres
alternatives et concurrentes à celles de France Télécom ne manqueront pas
d'apparaître si une nouvelle stratégie n'est pas fixée par et pour France
Télécom à l'horizon de 1998.
« S'il est une partie du territoire national où la notion de "service
universel" a un sens, c'est bien dans les DOM, plus que partout ailleurs,
et la Réunion n'y fait pas exception. »
Certes, plusieurs baisses tarifaires sont intervenues à la suite de mes
interventions, et je saisis cette occasion pour vous en remercier, monsieur le
ministre. Cependant, les tarifs des communications interurbaines et
internationales demeurent élevés.
Ainsi, certaines communications internationales coûtent plus cher à partir de
la Réunion qu'à partir de l'île Maurice. De même, les communications entre la
métropole et la Réunion sont souvent plus coûteuses que les communications
internationales.
Je ne défends pas aveuglément la position de France Télécom, car la
libéralisation du secteur des télécommunications est réalisée avant tout dans
l'intérêt des consommateurs, qui attendent, à juste titre, une baisse des
tarifs. Mais je trouverais regrettable que France Télécom, par un comportement
malthusien, que nous avons rencontré chez d'autres sociétés de service public,
ne se donne pas les moyens de conserver la place excellente qui est la sienne
parmi les opérateurs mondiaux. En tout cas, je souhaite que cette place soit
maintenue.
Je tenais simplement, monsieur le ministre, à attirer votre attention sur la
nécessité absolue de poursuivre et même d'accélérer la politique d'alignement
des tarifs téléphoniques, afin que cet alignement soit achevé avant l'échéance
de 1998, faute de quoi les départements d'outre-mer risqueraient fort de
s'adresser à d'autres opérateurs, ce qui serait vraiment regrettable. Je
rappelle d'ailleurs que cet alignement avait fait l'objet d'un engagement de la
part de M. Jacques Chirac lors de la campagne pour l'élection
présidentielle.
Je crains en effet que, du fait de l'irruption de la concurrence, les liaisons
avec les DOM n'échappent à l'opérateur public. Je serais le premier à le
regretter.
Le président de France Télécom a estimé que ce projet de réglementation des
télécommunications contenait de très bonnes dispositions qui permettront à ce
secteur de s'intégrer parfaitement dans son environnement mondial.
C'est en tout cas avec cette conviction que je voterai ce texte.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et des Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je voudrais tenter de répondre aux très nombreuses
questions qui ont été posées par les différents orateurs au cours de ce débat
extrêmement riche, qui avait, il est vrai, été ouvert par un rapport de très
grande qualité, présenté par M. Gérard Larcher.
Je m'adresserai d'abord à M. Saunier, à propos de la méthode. Je ne sais pas
si, hier soir, vous m'avez écouté ; en tout cas, je suis certain que vous ne
m'avez pas entendu.
M. Claude Saunier.
Vous ne m'avez pas convaincu !
M. François Fillon,
ministre délégué.
J'ai essayé, tout au long de la présentation de ce
texte, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, d'en souligner le caractère
essentiel ; j'ai même utilisé, de manière peut-être un peu excessive, le mot
d'« historique ». Je n'ai donc jamais tenté de présenter ce projet de loi comme
anodin. J'ai, au contraire, pris soin de montrer qu'il constituait un tournant
considérable dans l'histoire des télécommunications françaises, puisqu'il tend
à mettre fin au monopole de l'Etat en matière de téléphonie.
J'ai veillé à ce que ce texte fasse l'objet d'une consultation publique très
large. Organisée par la direction générale des postes et télécommunications,
elle a duré près d'une année. Jamais une telle consultation n'avait été
organisée sur un sujet comme celui-là. Elle a ainsi permis à tous les acteurs
du secteur des télécommunications de s'exprimer.
Enfin, j'ai veillé à ce que ce texte soit négocié - j'emploie ce terme à
dessein - avec les organisations syndicales qui l'ont souhaité.
Je tiens à vous faire remarquer, à ce propos, qu'une seule organisation
syndicale - il faut lui rendre cet hommage - s'est opposée au projet de loi de
réglementation des télécommunications. Elle avait d'ailleurs, en avril dernier,
appelé à la grève les personnels concernés. Il n'en va pas de même pour le
changement de statut de France Télécom, dont nous débattrons prochainement.
J'en viens aux questions qui ont été soulevées au cours de ce débat.
MM. Trucy et Hoeffel ont tout d'abord évoqué la portabilité des numéros,
c'est-à-dire la possibilité donnée aux usagers de conserver tout au long de
leur existence leur numéro de téléphone, qu'ils changent de domicile ou
d'opérateur. Voilà qui permet de faciliter l'ouverture à la concurrence.
La portabilité des numéros, qui est une disposition très importante, sera mise
en oeuvre en deux phases pour des raisons qui sont essentiellement d'ordre
technique.
Lors de la première phase, qui s'étendra entre 1998 et l'an 2000, la
portabilité sera autorisée en cas de changement d'opérateurs mais non en cas de
changement de domicile. Cette portabilité sera fondée
a priori
sur la
technologie du transfert d'appel sous réserve que, d'ici là, une autre
technologie plus efficace ne se développe. Les coûts de cette première phase
seront entièrement supportés par le nouvel opérateur choisi par l'abonné qui
souhaitera avoir accès à la portabilité.
Dans une deuxième phase, à partir de 2001, lorsque les ingénieurs et les
techniciens auront mis au point les logiciels permettant d'adapter les
terminaux à cette portabilité des numéros, cette dernière sera généralisée.
Elle sera fondée sur ce qu'on appelle « la technologie des réseaux intelligents
» et son coût sera négligeable puisque cette technologie sera intégrée dans la
conception des futurs réseaux et des futurs centraux.
M. Trucy a évoqué les critères qui permettront de déterminer les catégories
spécifiques susceptibles de bénéficier d'un tarif privilégié. Ces critères ne
sont pas aujourd'hui précisément arrêtés, mais je puis d'ores et déjà indiquer
qu'ils reposeront sur des conditions de ressources et sur l'existence de
handicaps.
Nous voulons corriger les inconvénients de l'actuel tarif appliqué par France
Télécom aux abonnés ayant peu de communications. En effet, attribué sans
condition de ressources, ce tarif était surtout avantageux pour les
propriétaires de résidences secondaires. Tel n'était pas l'objectif recherché à
l'origine par l'opérateur.
MM. Trucy, Hérisson et Saunier se sont interrogés à la fois sur l'avenir de la
recherche, notamment du CNET, et sur celui de l'enseignement supérieur.
S'agissant du CNET, je tiens à rassurer le Sénat, en particulier ceux d'entre
vous qui ont évoqué cette question. Le CNET est et restera l'organisme de
recherche et de développement de France Télécom. D'ailleurs, l'essentiel de son
activité est aujourd'hui lié à la stratégie de l'opérateur et ses équipes
demeureront au sein de l'entreprise.
De même, France Télécom restera dans les mains de l'Etat puisque celui-ci
conservera 51 p. 100 du capital et continuera de faire l'objet d'un contrat de
plan, dans lequel seront reconduites ses actuelles obligations en matière de
recherche.
Parallèlement, la loi prévoit que les missions de recherche publique dans le
domaine des télécommunications, c'est-à-dire celles qui, au fond, ne relèveront
plus de l'opérateur, seront exercées par l'Etat ou pour le compte de celui-ci
et sous sa responsabilité, dans le cadre de contrats qui préciseront les
programmes et les moyens de financement.
Le CNET pourra naturellement être partie prenante dans cette recherche
publique au côté d'autres organismes, tels que l'Institut national de recherche
en informatique et en automatique, l'INRIA, les laboratoires universitaires, le
CNRS et certains laboratoires industriels.
S'agissant de l'enseignement supérieur, les choses doivent être très claires.
L'enseignement supérieur relèvera exclusivement de la responsabilité de l'Etat
si le Sénat, après l'Assemblée nationale, vote le projet de loi qui lui est
soumis.
J'ai confié à l'inspection générale des finances et à l'inspection générale
des postes et télécommunications une mission sur la future organisation du
service public de l'enseignement supérieur des télécommunications.
Cette mission, qui s'est achevée, a permis de préciser les charges financières
afférentes à cette mission de service public. Je puis donc vous préciser que
les écoles seront organisées en un établissement public administratif qui sera
placé sous la tutelle du ministre chargé des télécommunications. Chacune de ces
écoles sera, en outre, dotée de l'autonomie nécessaire à l'accomplissement de
ses missions.
En outre, la loi prévoit explicitement que le financement de l'enseignement
supérieur, à compter de l'exercice budgétaire de 1997, sera assuré par l'Etat.
Celui-ci veillera à ce que les crédits octroyés garantissent la haute qualité
de l'enseignement dispensé.
Enfin, les personnels participant à ces missions seront mis à la disposition
de l'établissement public. M. Trucy s'est inquiété de l'application du droit de
la concurrence au secteur des télécommunications. Il s'est demandé si nous
n'étions pas en train de développer un droit spécifique de la concurrence en ce
domaine.
Je veux, sur ce point, vous rassurer, monsieur le sénateur. Un droit
spécifique ne sera pas créé. Il sera simplement fait application du droit
général de la concurrence. Celui-ci s'appliquera pleinement et aucune autorité
responsable de son élaboration ou du contrôle de son application ne sera
dessaisie.
L'autorité de régulation n'a pas pour mission de définir un droit sectoriel de
la concurrence. Elle aura cependant la faculté de saisir le conseil de la
concurrence, pour avis ou au contentieux, si elle a un doute sur le respect des
règles de la concurrence.
A court terme, il faudra veiller à développer la concurrence et le marché
mais, à long terme, cet objectif deviendra moins essentiel.
M. Trucy s'est également inquiété de la non-fixation par la loi des coûts
d'interconnexion. Celle-ci précise effectivement qu'ils seront déterminés par
un décret d'application. La loi, comme le prévoit la Constitution, pose un
principe général. Elle précise que, pour les exploitants qui devront publier
leurs tarifs d'interconnexion, ces tarifs devront rémunérer l'usage effectif du
réseau de transport et de desserte et refléter les coûts correspondants.
Elle prévoit, ensuite, qu'un décret déterminera plus précisément les principes
de tarification auxquels les accords d'interconnexion devront satisfaire.
Enfin, l'autorité de régulation veillera au respect des règles générales
fixées par l'Etat.
Vous comprendrez bien, monsieur Trucy, qu'il n'était pas possible de trancher,
dans la loi, des questions économiques complexes, telles que les calculs de
coûts à long terme.
M. René Trégouët s'est inquiété du raccordement des écoles aux autoroutes de
l'information et aux nouveaux réseaux. Ce point constitue effectivement - et
nous avons souvent eu l'occasion d'en parler ensemble - une priorité pour le
Gouvernement.
Je soutiens donc pleinement la proposition de M. le rapporteur et de M.
Trégouët tendant à faire préciser, par le schéma sectoriel des
télécommunications prévu par la loi d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire du 4 février 1995, les moyens qui permettent
d'assurer à ces établissements un accès préférentiel à ces services.
Je vous rappelle d'ailleurs que j'ai déjà pris un certain nombre de décisions
en ce domaine, notamment à l'occasion d'une communication en conseil des
ministres en mars dernier. Il s'agit de mettre en réseau, d'ici à la fin de
1996, via le réseau national de recherche Renater, 700 établissements
d'enseignement secondaire répartis dans treize académies et de permettre
l'accès de tous les collèges et lycées de France au réseau Numéris pour le coût
d'une ligne téléphonique classique.
M. Trégouët a également posé le problème de l'inclusion de l'accès au RNIS et
à la téléphonie mobile dans le service universel. Nous aurons l'occasion de
revenir sur ce sujet lors de l'examen des articles, mais j'indique d'ores et
déjà que nous avons choisi d'inclure l'accès au RNIS parmi les services
obligatoires, c'est-à-dire parmi ceux qui seront disponibles, comme
aujourd'hui, sur l'ensemble du territoire et dans le respect des principes du
service public.
Cette proposition répond, me semble-t-il, à vos interrogations, monsieur
Trégouët, puisque toutes les entreprises, qui étaient visées dans votre
question, pourront avoir accès à ce service au même coût si elles sont placées
dans des conditions identiques. En effet, le principe de l'égalité du service
public sera respecté. Ainsi, à structure de communications identique, une
entreprise accédera à un service au même coût, qu'elle soit située à Paris ou à
Brive-la-Gaillarde.
J'avais moi-même envisagé d'inclure le RNIS dans le service universel, mais
j'y ai renoncé pour deux raisons. D'abord, l'offre de services, sur le RNIS est
aujourd'hui, il faut bien le reconnaître, encore réduite. Je souhaite que cette
situation évolue, mais, pour l'instant, c'est la réalité.
Ensuite, l'inclusion du RNIS dans le service universel reviendrait au fond à
forcer France Télécom à pratiquer des tarifs abordables pour toutes les
catégories d'utilisateurs, y compris les particuliers. En réalité, cette mesure
reviendrait donc à subventionner massivement le RNIS, puisque c'est là la
différence essentielle entre les services obligatoires et le service
universel.
Je préfère, pour ma part, en rester à la démarche du Gouvernement, qui est, me
semble-t-il, ambitieuse, et qui permet de répondre aux besoins des entreprises
et d'amortir progressivement les investissements réalisés sur le RNIS, en
créant ainsi une baisse progressive des tarifs d'accès à ce réseau. C'est ainsi
qu'il faut, à mon sens, préparer l'élargissement futur du service universel. Je
souhaite que nous puissions ensemble, au cours de ce débat, éclaircir ce
point.
Quant à l'inclusion du téléphone mobile dans le service universel, là aussi,
je comprends la logique qui sous-tend votre proposition. Le service public
intégrera un jour la téléphonie mobile, mais après cette phase
d'investissements lourds, nécessaire pour développer les réseaux mobiles, dans
laquelle nous sommes encore aujourd'hui.
Au préalable, il faut tenir compte du développement des nouvelles
technologies, telles que la téléphonie mobile satellitaire. Vous avez, d'une
certaine manière, opposé celle-ci aux dispositifs existants aujourd'hui. Vous
avez craint une sorte de concurrence entre ces deux technologies.
Cette technologie constitue une chance formidable en termes d'aménagement du
territoire, puisqu'elle permettra de desservir les zones les plus reculées à
moindre coût. Elle constitue également une chance pour nos opérateurs puisque,
comme vous le savez, France Télécom et Alcatel participent aujourd'hui au
projet Global Star qui permettra la mise en oeuvre de ce service de téléphone
mondial.
Votre proposition, si je l'ai bien comprise, présenterait un double effet
pervers. D'une part, elle ne ferait peser de très lourdes charges
d'investissement que sur France Télécom, alors que, dans ce secteur, c'est le
développement de la concurrence qui doit permettre d'atteindre l'objectif
recherché, au besoin en l'y incitant un peu, comme le propose M. le
rapporteur.
D'autre part, votre proposition aboutirait probablement à privilégier des
technologies moins coûteuses en investissement que la technologie numérique,
mais obsolètes ou en voie de l'être, et aux tarifs prohibitifs.
M. Cluzel a longuement analysé la convergence de plus en plus grande entre les
services audiovisuels et les services de télécommunication, d'une part, et
entre les supports utilisés dans ces deux secteurs, d'autre part. Le projet de
loi tire plusieurs conséquences de cette situation en créant une agence des
fréquences pour mieux gérer la ressource hertzienne et en prévoyant la
possibilité de développer les services de télécommunication sur le câble.
J'ajoute que la proposition que j'ai évoquée en ce qui concerne le contrôle du
contenu sur les réseaux en ligne va dans le sens de la logique développée par
M. Cluzel et fondée sur une autorité chargée de la régulation économique et une
autorité chargée en quelque sorte du contrôle du contenu. Nous aurons
l'occasion de revenir sur ce point au cours de la discussion des articles.
M. Billard n'a pas posé de question. Mais qu'il me permette de lui dire qu'il
a commis de nombreuses erreurs dans l'analyse qu'il a faite de ce projet de
loi.
M. Claude Billard.
Ce n'est pas la même que la vôtre !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Monsieur Billard, je vous ai écouté, laissez-moi au
moins développer mes arguments !
D'abord, l'ouverture à la concurrence a pour objet non pas de faire le jeu des
multinationales, mais de faire bénéficier nos concitoyens de la baisse des
tarifs qui s'est manifestée partout dans les pays qui ont libéralisé. Nos
factures de téléphone doivent donc baisser dans les quatre ou cinq ans qui
viennent d'au moins 30 p. 100, et pour toutes les catégories d'usagers.
Le projet de loi qui vous est soumis prévoit très clairement que ce que l'on
appelle le rééquilibrage de la structure tarifaire de France Télécom,
c'est-à-dire la hausse d'une vingtaine de francs de l'abonnement, doit se faire
dans le cadre général d'une baisse globale des tarifs, y compris des tarifs
locaux. C'est la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale sur ce
texte.
Du reste, monsieur Billard, vous avez voulu citer des exemples de pays qui
auraient pâti de la libéralisation tarifaire. Permettez-moi de vous dire que
vous n'avez cité que des pays qui n'ont précisément pas libéralisé, à savoir la
Belgique, les Pays-Bas, l'Italie, qui sont sous monopole. Quant au Canada, les
communications locales et internationales n'y sont pas encore libéralisées,
mais l'abonnement inclut un forfait gratuit de communications locales.
Enfin, vous n'avez pas pu m'indiquer l'évolution des emplois dans le secteur
des télécommunications aux Etats-Unis. Ils ont diminué, m'avez-vous dit.
Puisque vous ne m'avez pas fourni de chiffres, je vais, moi, vous les donner.
Sachez qu'entre 1988 et 1992, si 6 000 emplois ont bien été supprimés aux
Etas-Unis dans le secteur longue distance qui avait été libéralisé, dans le
même temps, 19 000 emplois étaient créés par les concurrents de ATT, MCI et
Spring, qui sont arrivés sur ce marché.
Dans une étude d'impact, qui est forcément imparfaite puisque ce n'est qu'une
estimation, nous avons prévu à hauteur de 70 000 le nombre d'emplois
directement créés par les nouveaux opérateurs dans les cinq prochaines années.
Comment sommes-nous arrivés à ce chiffre ? Tout simplement en considérant ce
qu'ont fait les nouveaux opérateurs de téléphone mobile qui, depuis leur
installation dans notre pays, ont créé un grand nombre d'emplois.
Quant au fameux 30 000 départs en préretraite qui pourraient intervenir à
France Télécom dans les prochaines années, monsieur Billard, et qui d'ailleurs,
au fil des débats, gonflent, passant à 40 000 puis à 50 000 pour maintenant
atteindre dans la presse 70 000, ils ne sont pas destinés à réduire les
effectifs de France Télécom. Sachez que chaque départ à la retraite est
compensé par un recrutement, afin de rajeunir la pyramide des âges de France
Télécom. Celle-ci s'est en effet dégradée, pour la raison simple que, depuis
plusieurs années et pas seulement depuis deux ans, monsieur Billard, France
Télécom ne remplace pas tous les départs en retraite. D'ailleurs, vous le savez
bien, puisque France Télécom recrute, bon an, mal an, depuis 1990, entre 1 500
et 2 000 personnes par an, alors qu'il y a plus de 3 000 départs à la retraite
chaque année.
Le président de France Télécom s'est engagé, notamment vis-à-vis de plusieurs
organisations syndicales, à signer un accord sur l'emploi prévoyant,
parallèlement à la mise en place de ce système de préretraite, le recrutement
de 3 000 jeunes salariés chaque année à France Télécom. Cette possibilité nous
est offerte aujourd'hui parce que France Télécom est une entreprise productive
dont, plusieurs d'entre vous l'ont souligné, le ratio nombre de lignes-employés
est tout à fait excellent ; il devrait s'améliorer encore dans la mesure où
notre pays accuse un certain retard en matière de consommation de téléphone et
de trafic, retard que l'arrivée de la concurrence et de nouveaux services doit
permettre, en partie, de combler.
Madame Pourtaud, je ne sais pas si nous parlons du même projet de loi. Vous
avez évoqué les services obligatoires en indiquant qu'il était scandaleux que
leurs prix soient désormais libres. Ils le sont déjà ! Nous ne proposons pas de
changer le système. La téléphonie vocale traditionnelle est au coeur du service
public, de même que les services de liaisons loués, le télex, les réseaux
numériques. Mais ces derniers sont financièrement équilibrés. France Télécom
fixe les tarifs en fonction de ses coûts sans pratiquer de péréquation sociale.
C'est la situation que vous avez trouvée normale pendant des années et des
années. Aujourd'hui, vous voudriez tout d'un coup que la vieille dame de la
Lozère...
M. Michel Pelchat.
De Sablé-sur-Sarthe !
M. François Fillon,
ministre délégué.
... puisse avoir accès au télex, aux liaisons louées,
aux réseaux numériques à intégration de services et à toute une série de
produits qui sont, en réalité, destinés aux entreprises et que ces dernières
paient en fonction du service.
M. Gérard Delfau.
Exactement !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Nous ne proposons pas autre chose que de maintenir ce
qui existe depuis des années dans ce domaine, sauf si le Parlement estime, dans
un délai qu'il lui reviendra de fixer, qu'il convient d'ajouter à la définition
du service universel un certain nombre de services nouveaux dont, à l'évidence,
nous ne connaissons pas encore la nature puisqu'ils n'existent pas encore. Le
choix du Gouvernement de confier au Parlement et à lui seul le soin, à
intervalles réguliers, tous les quatre ans proposez-vous, d'enrichir la
définition du service universel me semble être la meilleure des garanties que
ce service universel évoluera en fonction des progrès technologiques.
Vouloir introduire aujourd'hui de nouveaux services dont on ne sait pas, par
définition, quelle technologie permettra de les mettre en oeuvre ne me paraît
pas très réaliste.
Une question se pose effectivement pour les réseaux numériques à intégration
de services. Nous aurons l'occasion d'en débattre de nouveau.
Mme Pourtaud a également envisagé l'augmentation de la facture des petits
consommateurs, après beaucoup de ses collègues. Le projet de loi prévoit, dans
son article 6 pour l'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications,
que le rééquilibrage tarifaire aura lieu dans le cadre de baisses globales des
tarifs pour l'ensemble des catégories d'utilisateurs, notamment pour les
particuliers. En outre, des conditions tarifaires spécifiques seront proposées
aux personnes à faibles ressources ou à handicap.
Mme Pourtaud a longuement évoqué certains pouvoirs qui seraient donnés à
l'autorité de régulation. Ces pouvoirs n'existent que dans son imagination. Le
pouvoir réglementaire est entre les mains du Gouvernement, le pouvoir
législatif restant évidemment entre les mains du Parlement. Quant aux
négociations internationales, relisez le texte, elles relèvent clairement du
Gouvernement. L'autorité de régulation n'intervient dans ce domaine que pour
conseiller le ministre chargé des télécommunications. Elle peut participer à la
représentation de la France au plan international si le Gouvernement le lui
demande. Elle n'a aucun pouvoir propre dans le domaine des négociations
internationales.
Par ailleurs, il n'est nulle part question de porter l'abonnement à 90 francs
hors taxes. Je connais la méthode, elle a été utilisée à plusieurs reprises,
qui consiste, pour effrayer les Français, à augmenter, de débat en débat, les
chiffres qui sont fournis, en particulier dans l'étude d'impact de ce texte. Il
n'est nullement question de porter l'abonnement à 90 francs hors taxes ; le
seul chiffre public figure, d'ailleurs, non pas dans le projet de loi, mais
dans le rapport Champsaur. On pourra considérer le prix de l'abonnement comme
équilibré lorsqu'il aura atteint 65 francs hors taxes, ce qui représente
environ les 20 francs qui ont été évoqués par plusieurs d'entre vous. Ce
rééquilibrage, je l'ai indiqué, se fera progressivement.
Enfin, Mme Pourtaud a évoqué l'inscription des fondements du service public
dans le traité sur l'Union européenne. Je n'aurai pas la cruauté de rappeler
que ce sont des gouvernements socialistes qui ont négocié le traité sur l'Union
européenne.
(M. Gérard Delfau proteste.)
Monsieur Delfau, ce sont bien des gouvernements socialistes qui ont négocié le
traité sur l'Union européenne, n'est-ce pas ? Et ils l'ont négocié après avoir
donné leur aval aux premières directives de libéralisation des services publics
dans les domaines des transports aériens et des télécommunications.
(Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux.
Vous avez la mémoire courte, monsieur Delfau. Ayez le courage de ce que vous
avez fait !
M. Michel Pelchat.
Bravo !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Nous nous efforçons d'agir pour inscrire les principes
du service public dans le traité sur l'Union européenne et, à cet
égard,monsieur Delfau, vous avez fait preuve pour le moins d'une mémoire
sélective. Vous ignorez, semble-t-il, que, entre 1987, date à laquelle la
France a ouvert à la concurrence le radiotéléphone analogique, et 1993,
plusieurs gouvernements socialistes se sont succédé qui, tous, ont accompagné
le mouvement dans le sens d'une plus large concurrence. Comment cela a-t-il pu
vous échapper ?
C'est M. Quilès qui a organisé, au printemps 1991, la concurrence sur le
radiotéléphone numérique GSM en attribuant deux licences, l'une à France
Télécom, l'autre à SFR, la filiale de cette Générale des eaux que vous n'avez
cessé de fustiger tout au long de ce débat.
M. Gérard Delfau.
L'essentiel était préservé !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Cette décision, monsieur Delfau, n'était à l'époque
nullement imposée par une directive européenne, puisque ce n'est qu'en 1995
qu'un texte européen est intervenu pour rendre obligatoire une telle ouverture
à la concurrence. De même, le gouvernement de Michel Rocard a, en 1989, permis
l'adoption, sous présidence française, d'une directive européenne libéralisant
l'ensemble des services des télécommunications, à l'exception de la téléphonie
fixe fournie au public,...
M. Gérard Delfau.
Et de la propriété des infrastructures !
M. François Fillon,
ministre délégué.
... et c'est en application de cet engagement qu'il a
très logiquement ouvert à la concurrence, le 1er janvier 1993, les services
supports, mettant ainsi Transpac en concurrence avec British Telecom, la
Compagnie générale des eaux, Sprint, Unisource et un grand nombre de
fournisseurs de capacités de transport.
M. Christian de La Malène.
Voilà !
M. Jean Chérioux.
Très bien !
M. Emmanuel Hamel.
Il faut inverser la tendance !
M. Gérard Delfau.
Vous n'avez pas répondu à ma démonstration !
M. Jean Chérioux.
Ils sont amnésiques !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Telle est la réalité, monsieur Delfau.
Pour ma part, je préfère la position du groupe communiste républicain et
citoyen qui, lui, est fidèle à sa ligne et ne trahit pas ses engagements,...
M. Michel Rufin.
Il faut se reporter au
Journal officiel !
M. François Fillon,
ministre délégué.
... alors que, vous, vous n'avez eu de cesse de
libéraliser le secteur des télécommunications...
M. Gérard Delfau.
Cela vous va bien de dire cela !
M. François Fillon,
ministre délégué.
... Et, aujourd'hui, vous nous expliquez que nous
sommes en train de faire une erreur historique en continuant l'action que vous
avez entreprise ? J'avais d'ailleurs rendu hommage à cette action en ouvrant ce
débat, car je pense que c'est grâce à la continuité de la position des
gouvernements français successifs depuis dix ans que, progressivement, l'idée
du service universel, reprenant les principes du service public à la française,
est en train de s'imposer au sein de l'Union européenne.
M. Jean Peyrafitte.
Ce n'est pas vrai !
M. Gérard Delfau.
Non, en effet, cela n'a rien à voir !
M. Christian de La Malène.
Vous avez bonne mine !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Monsieur Lagourgue, nous nous sommes déjà souvent
entretenus de la question des tarifs de France Télécom dans les départements
d'outre-mer. Je suis d'accord avec vous pour reconnaître qu'il y a encore
beaucoup de progrès à faire dans ce domaine.
Si le prix de l'abonnement et des communications locales y est le même qu'en
métropole, en revanche le prix des communications longue distance est
anormalement élevé, vous avez eu raison de le souligner. Depuis deux ans, nous
résorbons cet écart, à raison de cinquante centimes environ chaque année ; la
dernière baisse est intervenue au début du mois de mars, conformément
d'ailleurs aux engagements que j'avais pris devant vous, dans cet hémicycle. Je
vous indique d'ores et déjà qu'une prochaine étape sera franchie cet été, avec
une nouvelle baisse de cinquante centimes.
Par ailleurs, à la suite des différents contacts que vous avez eus avec mon
ministère, plusieurs décisions ont été prises. D'abord, d'ici à la fin de
l'année, nous alignerons le prix des communications de l'annuaire électronique,
le 11, sur le prix pratiqué en métropole. Ensuite, nous introduirons la formule
Primaliste, qui permet d'appeler à tarif réduit trois numéros, comme c'est le
cas en métropole. Nous introduirons également la possibilité d'identifier
l'appelant.
Au début de l'année 1997, nous procéderons à l'alignement des tarifs Numeris
concernant pour la transmission des données sur les réseaux Numeris pour la
téléphonie vocale. De même, nous introduirons des modulations tarifaires
horaires identiques à celles du téléphone pour les services Numeris, pour
l'utilisation de la carte téléphonique et pour celle des messageries
télématiques.
Enfin, cette fois dans le courant de l'année 1997, nous introduirons les
numéros verts, qui ne peuvent pas aujourd'hui être proposés dans les
départements d'outre-mer, ainsi que la possibilité d'accéder à Internet au prix
d'une communication locale.
Soyez assuré que je serai extrêmement vigilant sur ce point et ferai en sorte
que les départements et les territoires d'outre-mer soient traités
équitablement par rapport à la métropole.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, loin d'être anodin,
le texte que vous examinez constitue au contraire une réforme historique, comme
est historique le contresens qui, me semble-t-il, caractérise la démarche du
groupe socialiste. Ce contresens a été sanctionné par 70 p. 100 des Français,
qui se prononcent pour l'ouverture à la concurrence du secteur des
télécommunications, et par les salariés de France Télécom, dont les deux tiers
ont désormais compris la nécessité des évolutions proposées par le
Gouvernement.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Mon rapport oral serait incomplet si je ne donnais pas
maintenant, comme je m'y étais engagé, les conclusions des travaux que la
commission a achevés ce matin même sur le contrôle du contenu des réseaux en
ligne qu'évoquait tout à l'heure M. le ministre.
La commission vous proposera un amendement tendant à insérer, après l'article
11, un article additionnel qui comporte trois volets.
Le premier, c'est la nécessité, selon nous, d'imposer aux fournisseurs d'accès
des dispositifs techniques - verrouillage ou accès sélectif - permettant de
bloquer l'accès à certains services. Ainsi, des parents pourront contrôler
l'accès de leurs enfants à certains services.
Le deuxième volet, qui rejoint les préoccupations exprimées, notamment, par M.
Cluzel, et que l'on retrouve chez nombre de nos collègues de toutes les
commissions, au premier rang desquelles la commission des affaires culturelles,
c'est la déontologie du contenu et de la mise en place d'un organisme chargé de
donner son avis sur le contenu des services proposés.
Enfin, le troisième volet, c'est la condition d'exonération de responsabilité
pénale des fournisseurs d'accès, notamment s'ils ne respectent pas les
dispositifs techniques prévus pour contrôler les accès, ou les avis du conseil
de surveillance qui serait créé.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter, mes chers
collègues, avant que le débat ne se poursuive.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
15
NOMINATION D'UN MEMBRE
DE LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
POUR L'UNION EUROPÉENNE
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe des Républicains et Indépendants a présenté
une candidature pour la délégation parlementaire pour l'Union européenne.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Paul
Emorine membre de la délégation parlementaire pour l'Union européenne, en
remplacement de M. Jean-Pierre Tizon.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
16
RÉGLEMENTATION
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de réglementation des
télécommunications.
Exception d'irrecevabilité
M. le président.
Je suis saisi d'une motion n° 138, présentée par M. Delfau, Mme Pourtaud, MM.
Charzat, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés, et
tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare
irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après
déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (n° 357,
1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative
ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour
quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie
au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une
durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Delfau, auteur de la motion, pour quinze minutes au
maximum.
M. Gérard Delfau.
Je suis bâillonné !
M. le président.
Je vous fais confiance, on ne bâillonne pas M. Delfau !
(Sourires.)
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre, l'ensemble législatif que vous nous présentez, deux
projets de lois, modifie substantiellement l'organisation économique et sociale
de la nation, puisqu'il vise à la déréglementation des télécommunications et à
la privatisation de l'entreprise publique France Télécom.
Or, l'enjeu n'est pas seulement, ni même d'abord, économique. Privatiser dans
les pires conditions les télécommunications, c'est s'attaquer au coeur de notre
démocratie et c'est brader un peu de notre histoire. Enfin, c'est enfeindre
l'esprit du préambule de la Constitution, confirmé par plusieurs décisions du
Conseil constitutionnel, depuis sa création.
Etablissons d'abord l'enjeu du débat. A la veille du xxie siècle,
l'information circule à travers de multiples réseaux interconnectés. Elle est à
la fois le moyen par excellence du lien social et le moteur du développement
économique. Qui détient la propriété des supports - le fil entre les points
fixes, c'est-à-dire la téléphonie classique, le câble ; l'hertzien ; le
satellite - imposera sa loi à nos sociétés, pour peu que nous ne nous soyons
pas prémunis contre les dérives.
Toute position dominante dans ce domaine fait prendre le risque d'un retour à
la barbarie, si ces nouveaux maîtres ne sont pas étroitement contrôlés par la
puissance publique.
Nos anciens, à la fin du siècle dernier, s'étaient déjà trouvés devant une
situation analogue : la mise en place d'un nouveau mode de production - le
capitalisme - performant sur le plan technique, engendrait des dégâts humains
insupportables. Ils inventèrent en tâtonnant la notion de service public et
décidèrent de nationaliser la production des biens chaque fois qu'il y avait
une urgence de type stratégique ou social. Cela ne se fit pas sans controverse,
comme le montrent les échanges entre juristes éminents et les affrontements
politiques.
Parmi ces décisions hautement symboliques, figure la loi de nationalisation
des entreprises privées de téléphone, en 1889. Vous nous proposez aujourd'hui
de renoncer à cette position en privatisant France Télécom et en déréglementant
les télécommunications.
Le voudrions-nous, que nous ne le pourrions pas, mes chers collègues, car nous
n'en avons pas le droit. C'est ce que je voudrais démontrer maintenant.
Ce qui est en jeu, en effet, c'est la notion même d'Etat, telle que l'a forgée
notre histoire et que les textes fondateurs l'ont constituée, et telle que sur
les travées de cet hémicycle nombre d'entre nous et d'entre vous y avons
adhéré.
Sur cette histoire qui lie étroitement la mise en place d'un Etat républicain
et celle du service public, je ne me lasse pas de revenir à un petit livre
remarquable, celui du professeur Jacques Chevallier, dont je pourrais lire,
mais je ne le ferai pas, tout un chapitre au titre très révélateur : « Le
service public comme soubassement de l'Etat ».
Voilà ce que vos deux projets de loi, inconsidérément, entreprennent
d'ébranler. En avez-vous conscience ? Cette conception a mis des décennies pour
émerger, et un moment crucial de notre histoire l'a définitivement inscrite
dans le coeur des Français et dans le texte constitutionnel qui restaurait,
enfin ! la République, je veux parler de la Libération et des premières
décisions prises par le général de Gaulle au nom du Conseil national de la
Résistance en 1945.
Ces faits que je rappelle sont notre bien commun. En altérer l'esprit
reviendrait à une forme de trahison. Or, je le dis avec force, le secteur des
télécommunications, c'est-à-dire, de proche en proche et sous l'angle des
supports, le téléphone, l'informatique, l'audiovisuel, constitue le système
nerveux de notre société.
Le soustraire au contrôle de la puissance publique, c'est modifier
radicalement le concept d'Etat qui est le nôtre, c'est même commencer à
l'abandonner au profit d'une autre conception jusqu'à présent tenue en lisière
chez nous : celle du libéralisme, illustrée par la tradition anglo-saxone.
Avez-vous estimé toutes les conséquences de ce tournant ? Est-ce bien à vous,
monsieur Fillon, de tenter de nous le faire prendre ?
Or, vos deux textes respirent cette idéologie libérale et tournent le dos à
notre tradition : il est facile de le démontrer. Je pourrais d'abord me
reporter à votre intervention liminaire. Vous y répétiez le mot « concurrence »
avec une obstination et une application qui faisaient peine à voir, car j'ai de
l'estime pour vous, monsieur Fillon, et pour vos proches. La concurrence,
disiez-vous, stimulera l'innovation. Cela est contraire à toute notre histoire
économique ; il suffit de citer le Minitel et le TGV. Elle fera baisser le coût
des télécommunications téléphoniques, ajoutiez-vous. Toute l'expérience prouve
l'inverse, chiffres à l'appui quand vous le voudrez. Il suffit d'ailleurs de
prendre rendez-vous ici même dans cinq ans si vos projets sont adoptés et mis
en oeuvre.
Par ailleurs, vous avez dû péniblement, difficilement défendre l'idée de
création d'une autorité de régulation. Outre que l'exemple britannique dans ce
domaine n'est guère probant, vous savez qu'en démembrant ainsi l'Etat vous
portez atteinte à l'organisation des pouvoirs au sein de la République. Dans le
débat ancien entre libéraux et partisans du service public, d'une manière
schématique entre Européens du Sud et Anglo-Saxons, l'existence ou non d'un
pouvoir indépendant de l'Etat et du Parlement est la pierre de touche. Vous
avez choisi votre camp, qui n'est pas celui de la majorité des Français.
Et ne venez pas nous dire que cette autorité de régulation des
télécommunications n'aura qu'une influence limitée. Telle que vous l'avez
conçue, elle sera forcément le porte-parole des intérêts privés, fussent-ils
étrangers, au-delà de l'Europe, contre l'opérateur public France Télécom.
Au coeur, enfin, de notre conception de l'Etat et des services publics, il y a
la présence de l'usager. Son existence a mis longtemps à s'affirmer entre le
rôle du sujet sous l'Ancien Régime et le statut de client, typique de l'époque
moderne. Cette notion a-t-elle d'ailleurs produit tous ses effets ? Je ne le
crois pas.
Pour le dire autrement, nos services publics sont-ils des exemples achevés de
démocratie participative ? Non, hélas ! Et le syndicalisme au sein des
entreprises publiques paie aujourd'hui, quand soufflent les vents contraires,
son insuffisante attention à cette dimension consubstantielle du mode
d'organisation économique qu'il défend légitimement.
Mais cet inachèvement du modèle ne peut en aucune façon justifier son abandon,
ou alors c'est un prétexte qui cache d'autres motivations.
Il faudrait évidemment beaucoup de temps pour approfondir cet échange. Quand
on touche ainsi à l'assise même de la nation, il n'est pas facile, ni même
pertinent, monsieur le président, de faire bref, de faire vite. Je dois
pourtant, faute de temps, m'en tenir là pour ce premier faisceau
d'arguments.
Mais il est une deuxième raison qui motive notre position. Vos deux projets de
loi, monsieur le ministre, ruinent les bases des trois principes du service
public élaboré par notre tradition : égalité des citoyens, continuité et
mutabilité du service. Or ces principes forment un droit garanti par le
préambule de la Constitution et confirmé par plusieurs décisions non équivoques
du Conseil constitutionnel.
Je me référerai de nouveau à l'éminent juriste Jacques Chevallier : « Depuis
1958, le problème se pose en termes différents. D'une part, la création des
services publics, ne figurant pas explicitement à l'article 34, ne relève plus
de manière générale de la loi : le législateur n'est compétent que dans la
mesure où cette création touche à des matières énumérées à l'article 34 », ce
qui n'est pas le cas, je le précise. « D'autre part, ajoute le juriste, le
Parlement ne dispose plus d'une entière liberté d'appréciation en matière de
création, ou de suppression, d'un service public : son pouvoir est désormais
limité par l'existence "de principes ou règles de valeur
constitutionnelle", dont le Conseil constitutionnel assure le respect ; le
Conseil a été ainsi conduit à délimiter un noyau dur d'activité, des services
publics "par nature", que l'Etat est constitutionnellement tenu
d'assurer. »
Il me serait facile de prouver que les principes d'égalité, de continuité et
de mutabilité ne sont pas satisfaits par les dispositions de vos projets de
lois. Le cadre horaire qui m'est imposé m'empêchera de reprendre cette
argumentation, mais elle fut développée sur toutes les travées, je dis bien «
toutes », car la défense et la promotion du service public ne sont pas -
heureusement ! - l'apanage de la gauche.
Revenons à la question centrale : avez-vous le droit de nous demander de
démanteler le service public des télécommunications, fût-ce au nom de l'Europe
? Je ne le crois pas. Je pense même qu'il y a là conflit de compétence et de
légitimité, et je voudrais citer une dernière fois Jacques Chevallier. Nous
avons établi avec lui que le Parlement n'est pas totalement souverain
s'agissant du domaine protégé par la Constitution.
Réexaminons à présent comment le Conseil constitutionnel a tenu, à trois
reprises, y compris après la signature de l'Acte unique, à conforter le service
public. « Ce régime de service public, explique l'auteur, s'est trouvé conforté
par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui a érigé le principe
d'égalité en principe de valeur constitutionnelle s'imposant au législateur
lui-même. » - 12 juillet 1979. Il ajoute : « Ainsi le principe bénéficie-t-il
d'une double protection, le Conseil constitutionnel interdisant l'institution
de discriminations légales, non fondées sur une différence objective de
situations, et la juridiction administrative veillant à son respect au niveau
et de l'organisation et du fonctionnement concret du service. Quant au principe
de continuité, il a été rangé au nombre des "principes fondamentaux
reconnus par les lois de la République"- 25 juillet 1979 -, ce qui
implique que le droit de grève dans les services publics doit être concilié
avec lui, selon la décision du 28 juillet 1987. »
Voilà quelques rappels utiles et quelques faits incontestables !
Vous tenterez sans doute d'invoquer votre bonne foi, monsieur le ministre -
elle n'est pas en doute - et les multiples précautions que vous avez prises
pour assurer « un minimum de minimum de minimum » de service public. Mais le
débat a montré et montrera que ni par le contenu du service dit universel ni
par son financement, le fonctionnement stable du service public des
télécommunications n'est assuré par vos projets de loi.
Comment, pour le dire d'une autre formule, pourriez-vous nous convaincre que
vos propositions permettront de garantir à tous les Français, même aux plus
pauvres, même aux plus éloignés des agglomérations urbaines, les deux
conditions qui caractérisent un service public, à savoir l'optimum économique
et le maximum de cohésion sociale ? Qui pourrait prétendre que ce projet de loi
satisfait à ces deux exigences dont dépend la consolidation de la République
?
Telles sont, entre autres, les raisons pour lesquelles le groupe socialiste
demande au Sénat de voter cette motion tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité, sur laquelle il souhaite, pour que chacun prenne ses
responsabilités, un vote par scrutin public.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, je ne reviendrai que sur deux mots utilisés par M. Delfau, à savoir
« barbarie » et « barbare ». Or - je parle ici sous le contrôle de personnes
beaucoup plus cultivées que moi - selon la première acception de ces mots,
étaient barbares ceux qui n'étaient point Grecs !
A priori,
le retour de
la barbarie était déjà annoncé puisque l'opérateur public grec ne me paraît pas
devoir jouer, demain, un rôle dominant sur le marché mondial des
télécommunications, bien que, nous le lui souhaitions !
(Sourires.)
Je crois donc qu'il faut laisser à ces mots la signification
que la démocratie leur a conférée, signification empreinte d'un fort caractère
historique ou émotif.
Il faut, tranquillement, replacer les choses à leur niveau et à leur place.
Il est précisé, dans l'objet de la motion n° 138, que « ce projet de loi ne
permet pas le respect des principes d'égalité, de continuité et de neutralité
». C'est à cet égard que je souhaite m'exprimer pour justifier l'avis
défavorable de la commission des affaires économiques et du Plan.
S'agissant des principes constitutionnels d'égalité et de continuité du
service public, l'article 6 du projet de loi dispose, notamment dans le texte
proposé pour l'article L. 35 du code des postes et télécommunications, que « le
service public des télécommunications est assuré dans le respect des principes
d'égalité, de continuité et d'adaptabilité ».
Quant au principe de neutralité, je rappellerai quatre dispositions du
texte.
Tout d'abord, à l'article 5, le texte proposé pour l'article L. 34-10 du code
des postes et télécommunications dispose que la loi garantit un accès simple et
égal au service téléphonique. A l'article 2, dans le texte proposé pour
l'article L. 32-1 du même code, il est prévu que « le ministre chargé des
télécommunications et l'autorité de régulation des télécommunications
veillent... à l'exercice... d'une concurrence effective, loyale ».
L'indépendance de l'autorité de régulation des télécommunications est assurée
par le texte proposé pour l'article L. 36-1 du code des postes et
télécommunications.
Enfin, le texte proposé pour l'article L. 34-8 de ce même code prévoit que
l'interconnexion est de droit ; elle « ne peut être refusée si la demande est
raisonnable ».
Voilà pourquoi les principes d'égalité, de continuité et de neutralité
inhérents au service public sont clairement présents dans ce projet de loi et
pourquoi cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité ne nous
paraît pas recevable.
La commission, sur un sujet aussi important, demande également un vote par
scrutin public.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Voilà une étrange motion tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité ! En effet, elle prétend avec bien de la peine trouver dans la
Constitution ou dans notre tradition juridique des arguments ou des
contre-indications que la seule lecture du projet de loi permet de dissiper
!
Tout d'abord, le projet de loi, loin de remettre en cause le service public,
le définit et le conforte. Monsieur Delfau, existait-il, avant ce projet de
loi, un texte rappelant aussi clairement les trois principes du service public
que sont l'égalité, la continuité et l'adaptabilité ? Ces trois principes sont
écrits dans le projet de loi qui vous est soumis.
Y a-t-il, en Europe, un texte qui définisse de manière aussi large, aussi
généreuse, aussi ouverte sur l'avenir le contenu du service public et du
service universel ?
M. Michel Pelchat.
Non !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Existait-il, avant ce projet de loi, un seul texte
garantissant à chacun d'entre nous le droit à des tarifs abordables de manière
que personne, quels que soient ses ressources ou son handicap, ne soit exclu du
droit au téléphone ?
A propos de l'autorité de régulation, il me semble, là encore, monsieur
Delfau, que vous n'avez pas lu le projet de loi. Où avez-vous vu que cette
autorité de régulation serait dotée de pouvoirs réglementaires ? Vous savez -
vous n'ignorez pas, en effet, que vous menez là un combat très largement
tactique -...
M. Gérard Delfau.
Comment ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
... que l'autorité de régulation n'a pas d'autre
mission que de mettre en oeuvre la réglementation découlant de la législation
que le Parlement aura votée et de servir d'instance d'arbitrage. C'est l'Etat
qui conserve l'intégralité des pouvoirs législatifs, réglementaires et de
contrôle du contenu et des tarifs du service public.
Je considère donc, monsieur le président, qu'il n'y a évidemment pas lieu
d'adopter une telle motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
M. le président.
Je vais mettre aux voix la motionn° 138.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre, il existe au moins un point sur lequel nous sommes
d'accord, à savoir le caractère historique de ce texte. Effectivement, tel peut
être le cas.
J'ajoute que je n'ai pas l'habitude de faire de la tactique avec l'histoire !
C'est même profondément contraire à ma conception de la vie publique.
Par ailleurs, j'ai trouvé inélégant - je pèse mes mots - que vous preniez en
otage les personnels qui n'ont pas fait grève hier. Lorsqu'ils sauront comment
vous vous prévalez de leurs hésitations, de leurs souffrances, de leurs
difficultés face aux pressions d'une certaine hiérarchie, que vous avez en
partie téléguidée pour contrecarrer des consignes de grève, je suis sûr qu'ils
n'apprécieront pas la parole malheureuse que vous avez eue, parole aussi
malheureuse que celle du Premier ministre, s'agissant de la fonction
publique.
En fait, vous exprimez une forme de mépris - mais peut-être n'est-ce pas tout
à fait volontaire de votre part - vis-à-vis d'une partie des salariés de ce
pays qui donnent le meilleur d'eux-mêmes...
M. Michel Rufin.
Propos scandaleux ! C'est n'importe quoi !
M. Gérard Delfau.
... et qui, n'en déplaise aux tenants de la lampe à huile, ont su démontrer
qu'ils étaient en avance non seulement en France, mais aussi par rapport aux
innovations technologiques du monde entier.
J'en viens maintenant à vos très faibles objections à la motion tendant à
opposer l'exception d'irrecevabilité.
Bien sûr, les principes du service public sont énoncés dans le projet de loi,
dites-vous. Mais que valent les énoncés de principes si le fond des procédures
ne répond pas à cette formulation, si le fond s'ingénie même à démonter par
avance l'application au niveau le plus bas de ce que vous prétendez préserver
et parfois même - j'avoue que j'en reste songeur - promouvoir ?
S'agissant de l'Europe, nous n'avons pas attendu la déclaration que vous avez
faite voilà quelques instants, monsieur le ministre, pour remarquer que la
France est effectivement en avance sur le thème des services publics. Je n'ai
pas attendu ce débat pour organiser un groupe interparlementaire composé d'une
trentaine de parlementaires européens de toutes formations politiques et de six
nationalités, groupe qui a siégé voilà deux mois au Parlement européen. Je
m'étais effectivement rendu compte, monsieur le ministre, que nous étions plus
exigeants que la moyenne. Comme je ne suis pas complètement analphabète et que
l'histoire m'intéresse, je me suis souvenu que la notion de service public -
j'ai essayé de le montrer à ma façon tout à l'heure - était liée à notre
histoire.
Par conséquent, pourquoi voudriez-vous que nous soyons affectés par le fait
que notre conception du service public soit plus exigeante que tout ce que vous
avez pu dire et, surtout, faire depuis votre retour à la tête de la France ?
D'ailleurs, monsieur le ministre, puisque vous parlez de l'Europe,
voudriez-vous me dire et, au-delà, dire au peuple français, où en est la
conférence intergouvernementale ? Où en sont les proclamations martiales sur la
protection des services publics, sur votre caractère offensif dans la
négociation ? Je crains que le Gouvernement, à moins que ce ne soit le
Président de la République - mais là, je ne puis percer ces secrets - n'ait dit
à nos partenaires européens que, sur ces questions-là, finalement, la France ne
bougerait pas.
Enfin, s'agissant de l'autorité de régulation, j'ai rappelé les débats
juridiques qu'a suscités cette question dans notre histoire ; monsieur le
ministre, j'ai dit qu'il s'agissait d'un affrontement de civilisations : il y
a, d'une part, les Anglosaxons et, d'autre part, l'Europe du Sud, d'autre part.
Nous n'avons pas la même conception, je le dis très tranquillement. Et cela
vous gêne.
M. le président.
Monsieur Delfau, je vous prie de conclure.
M. Gérard Delfau.
Sachez, monsieur le ministre, que ce débat rebondira !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 138, repoussée par la commission et par le
Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une du groupe
socialiste, l'autre de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
89:
Nombre de votants | 315 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 94 |
Contre | 221 |
Question préalable
M. le président.
Je suis saisi d'une motion n° 57, présentée par Mme Luc, MM. Billard, Leyzour,
Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant
à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide
qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi adopté
par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, de réglementation des
télécommunications (n° 357, 1995-1996). »
Je rappelle qu'en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son
représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze
minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au
fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote pour une durée
n'excédant pas cinq minutes à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Leyzour, auteur de la motion.
M. Félix Leyzour.
Monsieur le ministre, hier, vous nous avez informé qu'Ariane 5 avait explosé
en vol soixante-six secondes après son départ. Le mouvement fulgurant de la
science et de la technologie n'échappe pas à l'incertain, à l'accidentel.
L'accident n'a, heureusement, pas fait de blessés ; il n'a pas non plus
entraîné de conséquences graves pour l'environnement.
Le tribut à payer est, certes, budgétairement lourd, mais il ne s'est trouvé
aucune voix autorisée pour réclamer la fin de l'aventure, et c'est heureux.
L'épopée d'Ariane, née il y a vingt-trois ans, constitue en effet une réussite
exceptionnelle. L'apprivoisement de l'espace n'est ni vain ni fou.
Comme l'écrivait ce matin l'éditorialiste de
L'Humanité
: « Il fait
reculer nos limites matérielles et mentales et change à la fois les données de
la vie la plus quotidienne. Il contient comme un appel à une civilisation plus
humaine. »
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Félix Leyzour.
La fabrication d'armes toujours plus meurtrières et les obscurs circuits de la
spéculation financière nous font payer un tribut autrement plus lourd.
L'accident malheureux d'hier est une épreuve dans l'odyssée française de
l'espace. Mais aucun échec n'est insurmontable.
Quand vous dites, comme vous l'avez fait hier, que nous allons préparer le
deuxième vol d'Ariane 5 et mettre tout en oeuvre pour que la grande aventure
spatiale reste celle du succès, nous approuvons.
M. René Trégouët.
Très bien !
M. Félix Leyzour.
En effet, cette grande aventure spatiale n'est pas sans rapport avec le projet
de loi de réglementation des télécommunications que nous examinons
aujourd'hui.
En 1973, il fallait passer par les Américains pour envoyer dans l'espace des
satellites européens expérimentaux. S'affranchir de cette tutelle permit à la
France, en toute indépendance politique et technologique, d'être partie
prenante de l'essor des télécommunications et méthodes d'observation spatiale
des années quatre-vingt.
Le domaine qui retient notre attention permettant les interconnexions, j'en
viens au texte qui nous est soumis. A ce propos, vos dernières réponses ne nous
ont pas convaincus.
Depuis des mois, on suit la chronique d'une marche dissimulée vers la
privatisation de France Télécom. Cette marche est réglée en tenant compte à la
fois de la situation de la France et de la place qu'occupe le service public
dans l'esprit de l'ensemble des Français, notamment des salariés.
Un sondage de la SOFRES, réalisé les 8 et 9 septembre 1995, fait ressortir que
92 p. 100 des usagers de France Télécom et 80 p. 100 de ceux de La Poste
considèrent que ce service public fonctionne bien.
Mme Hélène Luc.
Mais oui !
M. Félix Leyzour.
Il est donc difficile, d'emblée, d'en finir avec un tel service public. Alors,
on présente les choses comme si l'on voulait presque le sauver en le dégageant
du monopole qu'il exerce aujourd'hui.
L'objectif d'étape, avec le présent projet de loi, est donc de circonscrire la
place de France Télécom : l'opérateur public serait transformé en société
anonyme ouverte au capital privé, l'Etat restant momentanément majoritaire avec
51 p. 100 du capital. Ainsi, France Télécom aurait à assurer, sur l'ensemble du
territoire, un service public reposant sur un trépied : le service universel de
télécommunications, les services obligatoires de télécommunications, les
missions d'intérêt général dans le domaine des télécommunications.
Ce que vous prévoyez est en rupture avec la conception française du service
public. C'est, en quelque sorte, le modèle anglo-saxon et américain qui nous
vient de Bruxelles.
En réalité, ce service public aux ailes coupées abandonnerait l'essentiel des
activités rentables - elles seront très nombreuses - aux opérateurs privés.
Rendu prudent en raison de ce qui s'est passé dans d'autres domaines touchés
par la déréglementation, le Gouvernement n'utilise plus ce terme de «
déréglementation », pas plus qu'il ne parle d'engagement sur la voie menant à
la privatisation.
Il parle de nouvelle réglementation, de fin du monopole du service public et
d'ouverture à la concurrence.
Pour parachever la mise en place du nouvel édifice, un projet de loi relatif à
l'entreprise nationale de France Télécom viendra en discussion dans le
prolongement immédiat de celui-ci.
Tout cela, il faut bien le dire, ne relève pas de l'improvisation, mais est
très cohérent. La cohérence qui transparaît est celle de l'exigence des groupes
économiques et financiers qui veulent maîtriser à leur profit le secteur des
télécommunications, qui se trouve au centre d'enjeux considérables.
Après la séparation de La Poste de France Télécom, la nouvelle étape est celle
de la « démonopolisation » du secteur des télécommunications, qui s'accompagne
à la fois de la nouvelle définition du secteur public et de la réglementation
de la concurrence.
La fin du monopole public est présentée comme étant nécessaire en raison des
engagements européens de la France et de la rapidité de l'évolution des
technologies. C'est quelque chose d'inéluctable, a-t-on dit ici. S'y plier, ce
serait faire preuve de réalisme, ce serait être moderne, ce serait souscrire à
la voie du progrès. S'y opposer, ce serait faire preuve de conservatisme. C'est
à voir... Et si c'était le contraire !
Votre démarche, monsieur le ministre, a sa logique, mais, à cette logique,
nous en opposons une autre : au lieu de limiter le champ d'intervention de
France Télécom et de préparer son démantèlement à terme, nous proposons
d'adapter l'entreprise publique, de la rénover, de la démocratiser pour qu'elle
réponde encore mieux aux besoins d'aujourd'hui et à ceux de demain.
Les échéances européennes ne nous laissent-elles aucune autre issue que celle
que vous proposez ? L'argument qui est souvent invoqué est celui de l'échéance
de 1998 pour la dérégulation européenne des infrastructures et des services
associés.
C'est avec une certaine délectation que vous avez, monsieur le ministre,
monsieur le rapporteur, dit et répété, comme pour vous justifier, que le
processus que vous voulez achever avec cette réforme a été engagé sous les
septennats précédents par deux gouvernements de sensibilité politique
différente, et de citer les noms des premiers ministres, MM. Rocard et
Balladur.
Le processus auquel vous faites référence, et contre lequel nous nous étions
élevés, ne crée pas nécessairement l'obligation d'aller plus loin. A l'échelon
européen commencent même à s'exprimer des exigences nouvelles sur lesquelles on
peut prendre appui pour corriger des trajectoires qui se révéleraient
contraires à nos intérêts et pour contribuer à réviser certaines politiques.
L'échéance de 1996 pour la révision des traités européens offre à la France
l'opportunité d'y introduire une définition plus large, plus ouverte et plus
riche des services publics. A partir des résultats qui pourraient être obtenus,
une révision de la politique européenne en matière de télécommunications
deviendrait nécessaire. Notre pays peut jouer un rôle à ce niveau s'il en a la
volonté politique.
J'évoquerai également l'argument selon lequel la rapidité de l'évolution des
technologies exige qu'il soit mis fin au monopole du service public et qu'il y
ait ouverture à la concurrence.
En France, le service public n'est pas sans mérite. Il a répondu à des
nécessités économiques et sociales, à des besoins de développement économique,
d'aménagement du territoire et de satisfaction à grande échelle des besoins de
la population : il avait une obligation de mise à la disposition des
populations, aux meilleures conditions, des produits de première nécessité ou
socialement indispensables ; il avait une obligation de desserte de l'ensemble
du territoire et d'égalité de traitement des usagers. C'est dans ces conditions
que France Télécom a su se hisser au quatrième rang mondial.
Ce service public n'a pas été sans subir des contraintes, notamment celle que
constitue la double tutelle financière de l'Etat et des banques. Depuis 1982,
via des prélèvements divers, France Télécom a versé plus de 160 milliards de
francs à l'Etat, tandis que sa dette s'élève à 95 milliards de francs.
De telles contraintes ont privé cette entreprise nationale d'une partie des
moyens dont elle aurait eu besoin pour améliorer son fonctionnement, pour
satisfaire les revendications de ses personnels et pour l'accomplissement de
ses missions.
Pourquoi le monopole du service public se justifierait-il ici ?
A l'origine, le monopole fut un moyen de réserver le service postal et
télégraphique au Gouvernement. La justification du monopole public a évolué
avec le développement du service public des postes et télécommunications.
Aujourd'hui, il se révèle nécessaire, d'abord pour des raisons économiques. En
effet, il garantit des économies d'échelle - on ne finance pas plusieurs fois
des réseaux concurrents, ce qui permet de préserver les péréquations tarifaires
- et la cohérence de l'offre : un même service est offert partout.
Le monopole permet également de réaliser des économies d'envergure en offrant
une gamme élargie de services, car les services rentables financent ceux qui le
sont moins.
A y réfléchir, est-il préférable, à l'échelle du pays, de la collectivité
nationale, de disposer de monopoles publics nationaux ouverts à la coopération
ou de subir la loi de quelques monopoles privés multinationaux ? La question
mérite d'être posée !
Si l'on poursuit la logique de la déréglementation, à terme, ne subsisteront
que quelques grands coursiers mondiaux à dominante américaine, quelques grands
opérateurs de télécommunications. La domination du monde passerait par ces
réseaux privés : Etats, gouvernements, peuples seraient dominés par ces
quelques multinationales.
Dans une telle perspective, comment s'autoriser à traiter le monopole public
de « ringard » ? C'est le contraire qui est vrai ! Il est la condition
d'exercice des missions de service public : péréquation tarifaire, aménagement
du territoire, maîtrise et cohérence des réseaux, interconnexion.
Pour que la société d'information bénéficie à tous les usagers, il faut un
monopole de droit, renforcé.
J'évoquerai une autre question d'importance : la recherche.
En quoi le service public représenterait-il un obstacle à la modernisation ?
France Télécom, entreprise exemplaire du service public à l'échelon
international, avec un statut du personnel unique en son genre, peut
s'enorgueillir d'un réseau de télécommunications les plus modernes du monde.
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Félix Leyzour.
Les laboratoires du Centre national d'études des télécommunications, le CNET,
notamment à Lannion - mais pas seulement - ont, les premiers, inventés les
techniques qui ont permis à France Télécom de se doter d'un réseau à
commutation temporelle à 100 p. 100 par une sorte de mariage entre informatique
et télécommunications, tous les centraux étant des ordinateurs permettant
d'augmenter le nombre de communications sur un même support.
En fait, un opérateur de service public offre la possibilité de procéder à un
investissement sur une durée plus longue que le privé.
Dans la perspective de la déréglementation, les recherches sur les équipements
comme ceux qui ont permis de créer la commutation temporelle risquent d'être
réduites et la priorité pourrait être donnée aux recherches à court terme sur
les services, avec une rotation plus rapide des programmes. Bilan : une perte
sèche de la recherche industrielle qui n'est pas reprise par l'industriel.
Il est à craindre - de nombreux chercheurs le ressentent ainsi - que ce projet
de loi ne programme le recul des investissements dans la recherche et
l'industrie, le déclin de l'innovation et de l'emploi qualifié.
Avec un champ d'intervention bloqué, France Télécom aura moins d'ambitions et
de possibilités dans le domaine de la recherche, et les réponses que vous avez
apportées à l'instant, monsieur le ministre, ne lèvent pas nos inquiétudes.
Le projet de loi que vous nous soumettez n'est pas la seule voie offerte aux
télécommunications, et l'engagement sur le chemin de la privatisation des
opérateurs publics apparaîtra bientôt comme anachronique.
C'est la raison pour laquelle les sénateurs du groupe communiste républicain
et citoyen demandent au Sénat de refuser de discuter de ce projet de loi en
adoptant notre motion tendant à opposer la question préalable. Si cette motion
est adoptée, nous ne serons pas devant le vide : nous serons en présence d'un
service qui existe, qui a fait ses preuves et qui, au lieu d'être affaibli,
pourra être développé et modernisé.
C'est une question de choix, une question de volonté politique, et c'est la
raison pour laquelle nous demandrons un vote par scrutin public.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cette motion tendant à opposer la question préalable ne nous
surprend pas.
Mme Hélène Luc.
Elle est logique !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Elle s'inscrit en effet dans la ligne des positions prises
depuis 1990...
Mme Hélène Luc.
Absolument !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
... - à l'occasion, alors, de l'examen d'un projet de loi
présenté par M. Quilès - par nos collègues du groupe communiste républicain et
citoyen, positions réaffirmées depuis lors de nos discussions sur ce sujet au
sein de la commission des affaires économiques et du Plan.
L'objet qui sous-tend sa forme écrite apparaît un peu simplificateur, mais les
arguments développés n'en sont pas moins autant d'affirmations péremptoires, et
je souhaite y répondre.
Ces arguments, qui sont cinq condamnations articulées dans l'objet de la
motion, peuvent-ils être retenus par le Sénat ?
En premier lieu, l'accusation d'atteinte au service public était un peu «
téléphonée d'avance », pardonnez-moi cette expression.
M. Félix Leyzour.
Vos réponses aussi : elles étaient dactylographiées avant même que
j'intervienne !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Mais que prévoit le projet de loi ?
France Télécom demeure l'opérateur du service universel. Le projet comporte, à
cet égard, une définition très précise, très complète du service public, avec
trois composantes : le service universel, les services obligatoires et les
missions d'intérêt général, dont la recherche, que vous avez évoquée, mon cher
collègue, à propos du CNET, et pas simplement à Lannion, comme vous l'avez
dit.
La discussion de ce projet, dont le groupe communiste républicain et citoyen
prétend nous priver cet après-midi, devrait pouvoir l'enrichir autour d'un
service universel conforté dans sa dimension sociale et mieux réparti sur
l'ensemble du territoire, ainsi que la commission des affaires économiques et
du Plan vous les proposera, mes chers collègues.
Seconde affirmation péremptoire en forme d'accusation : l'atteinte au droit
des citoyens à communiquer.
Cela me paraît relever un peu d'un procès en sorcellerie. En effet, à quoi
aboutira l'ouverture de la concurrence, sinon à une multiplication des moyens
de communication dont nous allons disposer ? C'est la diversité qui engendre la
richesse !
M. Félix Leyzour.
La richesse du capitalisme !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Bien loin d'empêcher les citoyens de communiquer, le projet
de loi devrait les y aider.
Quant à l'accusation d'atteinte aux usagers, elle m'apparaît elle aussi
relever de la contrevérité. Quand on constate ce qui s'est passé dans les pays
étrangers où une démonopolisation des télécommunications a été opérée, on voit
bien qu'il n'y a pas d'atteinte aux usagers ! La croissance des
télécommunications y a même été plus forte que dans les pays où le monopole a
subsisté. Par conséquent, non seulement, les usagers ne sont pas moins bien
servis, mais, le plus souvent, ils sont aussi bien, voire mieux que chez nous,
notamment en matière tarifaire.
Sans doute fallait-il s'attendre à ce que l'on fasse reproche à ce projet de
loi de porter atteinte à l'emploi - nous y reviendrons sûrement au cours du
débat - et l'argument mérite réflexion, car il s'agit là d'une question très
importante qui nous préoccupe tous, sur quelque travée que nous siégions.
Je ne saurais, au nom de la commission, me dérober à un débat sur ce point.
Il faut d'abord distinguer le cas de France Télécom du secteur des
télécommunications en général. Si l'on raisonne par référence à ce qui s'est
passé dans des pays comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne ou la Suède,
notamment au niveau de la productivité par ligne, on s'aperçoit que France
Télécom est en meilleure position que British Telecom près de douze ans après
l'évolution de cette dernière, ou encore que ATT aujourd'hui même ; nous avons
globalement, par rapport à nos concurrents européens, une productivité qui est
de 10 p. 100 supérieure.
Cela étant, on ne peut partir des exemples des opérateurs britanniques ou
américains et ne pas prendre en compte la qualité et la fiabilité de France
Télécom. Ce serait, pour reprendre ce que disait notre collègue M. Hérisson
tout à l'heure, ne pas croire en l'avenir de France Télécom, en sa capacité à
conquérir de nouveaux marchés et à se diversifier.
France Télécom et ses fonctionnaires sont-ils pour autant menacés de perte
d'emploi, de licenciement dans le présent projet de loi ?
M. Félix Leyzour.
Nous en reparlerons la semaine prochaine !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La réponse est clairement négative. Dans le plus mauvais des
scénarios - c'est-à-dire au cas où cette entreprise ne saurait pas s'adapter à
la donne internationale - la stabilisation des effectifs serait opérée au prix
du non-remplacement lors des départs à la retraite.
Mais pourquoi cet
a priori
défaitiste ? Pourquoi continuer à faire
nôtre ce que nous trouvons dans les tiroirs de France Télécom depuis 1990,
c'est-à-dire un projet de non-remplacement de près de 30 000 agents au cours
des années 1990 à 1992 ?
Mme Hélène Luc.
Ce n'est pas une raison pour continuer !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Si France Télécom est pugnace, si nous lui donnons les moyens
de la réactivité et les moyens de nouer des alliances internationales, non
seulement cette société pourra ne pas perdre d'emplois, mais elle pourra en
créer, soit directement, soit indirectement, ainsi que M. le ministre le disait
hier en parlant de 70 000 emplois qui pourraient à terme être créés dans le
secteur des télécommunications.
M. Guy Fischer.
Il faudra le prouver !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Quant au secteur des télécommunications en général, il faut
être un économiste pessimiste pour ne pas voir qu'il profitera de la
démonopolisation.
M. Robert Pagès.
Le privé en profitera !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Reste la question de l'équilibre des finances publiques.
C'est un argument auquel nul parlementaire ne saurait être indifférent. Est-il
pour autant opportun de l'invoquer dans le présent débat ?
En quoi la modification de la réglementation des télécommunications et la fin
des monopoles peuvent-elles être considérées comme menaçant l'équilibre des
finances publiques ? La commission des affaires économiques ne le perçoit pas.
Faut-il en effet comprendre que l'entreprise France Télécom pourrait être
considérée par nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen comme
une « vache à lait budgétaire » ? Souvenons-nous de l'époque où de précédents
gouvernements l'ont obligée à investir dans le secteur des assurances, par
exemple, la ponctionnant par des décisions budgétaires et la détournant de son
objet !
En réalité, si la question financière doit être posée, ce ne peut être qu'à
propos du texte relatif à France Télécom, à son statut et à sa transformation
en entreprise nationale. Je vous proposerai donc de revenir la semaine
prochaine sur cette question.
M. Félix Leyzour.
Vous pouvez y compter !
Mme Hélène Luc.
Vous ne parlez pas des réalisations techniques des télécommunications ou du
service public !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Au total, la motion tendant à opposer la question préalable
nous apparaît mal-venue.
La commission y est donc défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je veux d'abord remercier M. Leyzour des mots très
justes qu'il a employés au sujet de l'accident d'Ariane 5, que j'ai eu
l'occasion de commenter hier dans cet hémicycle.
Il me permettra simplement de lui rappeler que cette grande et belle aventure
d'Ariane est une aventure européenne et que nos partenaires y sont très
étroitement associés. J'espère d'ailleurs qu'il y demeureront - mais j'en suis
sûr - très étroitement attachés.
M. Paul Loridant.
Mais la France est chef de file dans Ariane !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Il ne faut pas oublier, surtout en ce moment, la
participation capitale de nos partenaires allemands et italiens, par exemple,
qui sera bien nécessaire pour nous permettre de poursuivre ce programme, malgré
l'incident de parcours que nous venons de rencontrer.
M. Félix Leyzour.
Nous sommes toujours pour les coopérations !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je veux aussi remercier M. Leyzour du soin avec lequel
il a rappelé, comme je l'avais fait moi-même avant lui, la très grande
continuité de l'action des gouvernements français depuis dix ans au sujet de la
libéralisation des télécommunications.
Deux logiques s'affrontent, monsieur Leyzour : la vôtre - vous êtes pour le
monopole des télécommunications et vous avez défendu les arguments qui vous
conduisent à cette position - et la nôtre - nous sommes pour l'ouverture à la
concurrence du secteur des télécommunications, parce que nous pensons que le
monopole prive aujourd'hui les Français d'un certain nombre de services de
télécommunication avancés auxquels les citoyens d'autres pays développés ont
droit et parce que le monopole maintient des tarifs élevés qui ont pour
conséquence une moindre consommation de services téléphoniques dans notre pays
par rapport aux autres pays développés.
Voilà, monsieur Leyzour, un service public devant lequel chacun s'extasie,
mais qui n'est utilisé par les Français que huit minutes par jour quand, aux
Etats-Unis, ce même service est utilisé vingt minutes par jour et qu'il l'est,
en Grande-Bretagne et en Italie, entre quinze et dix-sept minutes par jour.
Nous pensons qu'il faut renforcer l'offre de services et qu'il faut aboutir à
des tarifs beaucoup plus bas pour permettre à chacun de pouvoir utiliser les
nouvelles techniques de l'information, en particulier les services en ligne,
dont je disais au début de ce débat qu'ils ne se développeront dans ce pays que
le jour où les communications locales seront presque gratuites dans le cadre
d'un forfait, comme c'est le cas dans un certain nombre de pays libéralisés.
M. Delfau parlait tout à l'heure de mépris, mais j'ai, pour ma part, le plus
grand respect pour les personnels de France Télécom, et c'est précisément pour
cette raison que je ne veux pas les laisser sans armes devant une concurrence
qui, de toute façon, s'installe à la fois du fait des décisions européennes,
comme cela a été rappelé, mais aussi du fait des évolutions technologiques.
Et c'est bien parce que j'ai le plus profond respect pour eux que, depuis des
mois, monsieur Delfau, je négocie avec leurs organisations syndicales.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 57, repoussée par la commission et par le
Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une du groupe
communiste républicain et citoyen, l'autre de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
90:
Nombre de votants | 316 |
Nombre de suffrages exprimés | 316159 |
Pour l'adoption | 93 |
Contre | 223 |
Demande de renvoi à la commission
M. le président. Je suis saisi d'une motion n° 67, présentée par M. Loridant, Mme Beaudeau, MM. Billard, Leyzour et Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et tendant au renvoi à la commission.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide
qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires économiques et du Plan
le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
de réglementation des télécommunications (n° 357, 1995-1996). »
Je rappelle qu'en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son
représentant, un orateur d'opinion contraire, le président ou le rapporteur de
la commission saisie au fond et le Gouvernement. Aucune explication de vote
n'est admise.
La parole est à M. Loridant, auteur de la motion.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais
d'abord m'excuser auprès de vous de n'avoir pu être suffisamment présent cet
après-midi dans ce débat. En effet, j'ai dû, au sein de la commission des
finances, présider des auditions sur le devenir de la profession bancaire.
La motion de renvoi en commission présentée par le groupe communiste
républicain et citoyen, que j'ai l'honneur de défendre en tant que membre du
Mouvement des citoyens, s'appuie sur deux arguments essentiels.
Tout d'abord, sur un texte de cette importance, le moins que l'on puisse dire,
c'est que le travail a été mené au pas de charge : sauf erreur de ma part, de
tous les avis sollicités, seul le Conseil national du patronat français a
exprimé sa satisfaction.
Ensuite, les implications financières pour le budget de l'Etat ne semblent pas
avoir été étudiées au fond. Je m'étonne d'ailleurs - et c'est l'objet de cette
motion - que, sur un sujet de cette importance, et compte tenu des implications
sur les finances de l'Etat, la commission des finances n'ait pas été saisies
pour avis de ce texte.
Partant de là, mes chers collègues, je vais vous démontrer combien ce projet
de loi mériterait plus d'attention et une étude plus approfondie.
Le service public est le ciment de notre République. Il est toujours l'objet
d'une fierté nationale et c'est bien légitime. Quel Français ne s'est pas
enorgueilli de chemins de fer performants, d'un réseau d'électricité et de gaz
sûr et reconnu, d'une diffusion des télécommunications alliant l'intérêt
général et les défis de la haute technologie tant il est vrai que l'entreprise
France Télécom a su mener à bien la modernisation de ce secteur ?
Aujourd'hui, c'est cela que la majorité tente de réduire : ce service public à
la française qui découle de grandes victoires ou de grands mouvements sociaux.
Je pense bien sûr à la Révolution mais aussi, plus près de nous, à l'esprit qui
a soufflé dans notre pays au moment de la Libération.
C'est si vrai d'ailleurs que, un temps, le Premier ministre actuel avait songé
à introduire dans la loi fondamentale, notre Constitution, la notion de service
public à la française, et puis cela a disparu.
Le débat, mes chers collègues, n'est pas entre les modernes, qui ne jureraient
que par la déréglementation-privatisation, et les archaïques, qui prôneraient
le maintien à tout prix du service public. Non, le débat est ailleurs. Il est
entre ceux qui estiment que, dans ce pays, dans notre Europe, tout est
marchandise - et je crois que c'est effectivement le cas d'un grand nombre de
parlementaires de la majorité - et ceux, dont nous faisons partie, qui estiment
que certains secteurs de l'économie ont une telle importance qu'ils doivent
rester au service de la nation, en tout cas qu'il existe des domaines dans
lesquels l'Etat, en tant que tel, usant de son pouvoir régalien d'intervention,
doit pouvoir dire clairement où est l'intérêt général.
Oui ! votre volonté de privatiser France Télécom nous paraît, d'abord et avant
tout, idéologique. Je dirai que les gesticulations du Gouvernement et de sa
majorité sur l'inéluctabilité de ce processus tiennent plus de la méthode Coué
que d'autre chose. Comme le dit l'adage : « Qui veut tuer son chien l'accuse de
la rage. »
France Télécom, mes chers collègues, ne souffre pas de la rage mais d'une
volonté de mainmise par un certain nombre de grands groupes, qu'ils soient
nationaux ou internationaux, qui n'ont que faire du service public, mais qui
aimeraient bien pouvoir pénétrer davantage encore les seuls segments
intéressants pour eux, c'est-à-dire ceux qui ont une rentabilité à court
terme.
Avec la déréglementation du service des télécommunications, c'est la guerre
économique que l'on tente de mettre en place là où le monopole public a,
jusqu'à présent, favorisé la diffusion, la recherche, et pourrait former un
cadre pour des opérations de coopération sans domination.
S'il est un exemple de réussite du secteur public, c'est bien l'entreprise
France Télécom ! Je reviendrai sur ses résultats financiers, mais comment ne
pas souligner dès maintenant le haut degré de satisfaction des usagers, les
outils remarquables de recherche, je pense notamment au Centre national
d'études des télécommunications ?
En agissant comme vous le faites, vous laissez de côté tout ce qui fait la
grandeur du service public, à savoir la mission d'entraîner toute l'économie,
le secteur public mais aussi le secteur privé, vers des objectifs de société :
le progrès social, l'amélioration du cadre de vie, les technologies de pointe
au service de tous, et l'intervention citoyenne dans l'organisation de ces
services.
Ce qui vous gêne, monsieur le ministre, ce qui gêne les membres de votre
majorité, c'est de voir que le secteur public peut être économiquement
performant tout en assurant des missions sociales largement au-dessus de la
moyenne. Il faut bien reconnaître que, dans ce tableau, dans ce modèle
néo-libéral qui est préconisé aujourd'hui, qui est très à la mode, qui fait
partie de ce qu'on appelle la « pensée unique », France Télécom fait quelque
peu désordre.
Mais, sans doute, ce dont vous n'avez pas pris la mesure, c'est que l'esprit
de service public est largement répandu parmi nos concitoyens. Les mouvements
sociaux de novembre et décembre dernier, la sympathie qui les a accompagnés
dans la population en sont plus qu'un indice : c'est une preuve flagrante de
cet attachement.
Mes chers collègues, les citoyens veulent rester des usagers ; ils se refusent
à n'être que des consommateurs.
Alors, avec constance et application, tous les promoteurs de ce projet -
Gouvernement, majorité - s'appliquent à montrer que le service public n'est pas
remis en cause, que ce serait un mauvais procès, et M. le rapporteur s'est
livré à l'instant à cet exercice.
Monsieur le ministre, vous êtes allé jusqu'à dire, au cours du débat à
l'Assemblée nationale, que seule la CGT en tant qu'organisation syndicale
s'opposait au texte. Aujourd'hui, force est de constater que cela ne correspond
pas tout à fait à la réalité : les syndicats les plus représentatifs au sein de
France Télécom sont hostiles à votre texte.
M. François Fillon,
ministre délégé.
Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le
sénateur ?
M. Paul Loridant.
Je vous en prie.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Monsieur le sénateur, je vous défie de trouver une
motion appelant à la grève contre le projet de loi de réglementation des
télécommunications émanant d'un autre syndicat que la CGT.
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur Loridant.
M. Paul Loridant.
Je ne veux pas jouer sur les mots, monsieur le ministre, mais je serais étonné
que Force ouvrière ou que le syndicat SUD aient exprimé leur accord avec les
orientations de ce projet de loi. En tout état de cause, c'est ce qui m'a été
rapporté et ce que j'ai entendu de la part des responsables syndicaux, au moins
du syndicat SUD.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Regardez !
M. Paul Loridant.
J'ai plutôt tendance à croire ceux qui vivent cette déréglementation de
l'intérieur !
Un autre point démontre, si besoin était, votre volonté de supprimer le rôle
de la puissance publique dans la politique nationale des télécommunications :
c'est la création de l'autorité de régulation des télécommunications.
Je dois dire que, sur un certain nombre de travées, et pas seulement sur
celles de l'actuelle majorité, cela devient une obsession que de créer des
autorités dites indépendantes, mais qui ont comme socle commun des normes
libérales importées des Etats-Unis et reprises régulièrement par les autorités
de Bruxelles.
Vous connaissez ma réticence, voire mon aversion, pour tout ce qui dessaisit
les citoyens de leurs prérogatives. Nous avons là un bel exemple. On confie à
un groupe d'experts le soin de définir la politique des télécommunications,
comme si le Gouvernement voulait fuir ses responsabilités. Les représentants du
peuple sont évincés, et ne parlons pas des citoyens !
On appelle cela un exemple type de technocratie, laquelle était d'ailleurs si
violemment mise au banc des accusés par l'actuel Président de la République
alors qu'il se trouvait en campagne électorale. Il est vrai qu'il serait plus
facile de comptabiliser les promesses tenues que celles qui ne l'ont pas été.
Cela irait plus vite !
Verra-t-on bientôt un « M. Trichet
bis
» des télécommunications
expliquer que la péréquation tarifaire n'a plus lieu d'être ? On peut le
craindre, mes chers collègues.
Le parallèle avec le gouverneur de la Banque de France et le Conseil de la
politique monétaire n'est pas fortuit, car, chacun aura pu le constater, cette
autorité indépendante, comme on dit, est le porte-parole le plus puissant de
l'orthodoxie en matière monétaire, et même en matière budgétaire, domaine où
elle n'est pourtant pas compétente. En effet, c'est bien le gouverneur de la
Banque de France qui a enjoint au Gouvernement et à sa majorité d'accélérer la
réduction des dépenses publiques. Il ne me semble pas qu'il ait de pouvoir en
ce domaine, mais il se pare de toutes ses fonctions pour expliquer que, si l'on
ne va pas à la monnaie unique, le pays court à la catastrophe.
Avec cette autorité de régulation, j'ai le sentiment que c'est un peu la même
opération qui se renouvelle. Mon ami Georges Sarre vous l'a dit à l'Assemblée
nationale, monsieur le ministre : quel rôle jouerez-vous, dans ces conditions,
vis-à-vis du secteur des télécommunications ? Avez-vous à ce point le sens du
sacrifice que vous renonciez à vos propres fonctions, ou tout au moins à ce qui
fait l'essence même de votre autorité de ministre dans ce domaine ?
Enfin, le troisième argument que je tiens à évoquer pour expliquer pourquoi il
est nécessaire de conserver le domaine des télécommunications au sein du
secteur public est largement connu de la population.
Les principaux opérateurs sur les segments ouverts sont les mêmes - c'est un
exemple pris au hasard - que ceux qui travaillent sur le marché de l'eau.
Mes chers collègues, n'y aurait-il pas lieu de craindre quelques excès dans ce
domaine, comme nous en avons connu avec le marché de l'eau ? Pour éviter tel ou
tel problème d'entente ou plus que cela, le monopole est parfois le meilleur
rempart.
Comme vous le constatez, mes chers collègues, les arguments de privatisation
de France Télécom sont essentiellement idéologiques, d'autant plus que cette
privatisation va à l'encontre de l'objectif affiché de réduction des dépenses
publiques.
Examinons très attentivement les résultats de l'entreprise.
Avec plus de 9 milliards de francs de résultats en 1994 et en 1995, France
Télécom est l'entreprise qui réalise le plus gros bénéfice en France, devant le
secteur bancaire.
Avec plus de 35 milliards de francs d'investissement en 1994 et plus de 32
milliards de francs en 1995, France Télécom est le plus gros investisseur de
notre économie.
Avec plus de 130 milliards de francs de chiffre d'affaires, c'est la deuxième
entreprise de services du pays. C'est également le cinquième employeur.
A ces chiffres connus de tous, je voudrais en ajouter quelques-uns.
La valeur ajoutée créée, en 1994, est de 101 milliards de francs, soit environ
70 p. 100 de son chiffre d'affaires. Cela montre à la fois les performances de
France Télécom et de son personnel, ainsi que la grande profitabilité qui
existe dans ce secteur. Ceci explique sans doute cela !
Par ailleurs, comment ne pas insister sur ce que reçoit l'Etat chaque année de
la part de France Télécom ? De 1981 à 1995, ce sont quelque 180 milliards de
francs qui ont été prélevés par l'Etat sur le budget des télécommunications.
Or, la mise sur le marché de la moitié du capital de cette entreprise pourrait
rapporter au budget environ 65 milliards de francs, soit la moitié des fonds
propres consolidés.
La dichotomie saute aux yeux : l'Etat va retirer de cette privatisation
l'équivalent de cinq années de prélèvements ; mais ensuite, mes chers
collègues, ce sera terminé car la privatisation est un fusil à un coup.
Quel que soit l'avis des uns ou des autres en matière de privatisation du
secteur public, chacun devrait convenir qu'il s'agit d'une mauvaise affaire
pour l'Etat, conséquence d'une politique budgétaire à courte vue.
Qui plus est, France Télécom est actuellement soumis à l'impôt sur les
sociétés, ce qui signifie qu'il contribue aux finances de l'Etat. Qu'en
sera-t-il après la privatisation ? Nous demandons à voir, connaissant la
possibilité pour les grands groupes de répartir leurs résultats dans des
processus de mondialisation et de répartition entre les différents pays où ils
sont implantés.
Enfin, la question de la pérennité de la recherche et de l'enseignement
supérieur liés à France Télécom est directement posée. D'autres l'ont fait
avant moi, mais je me permets d'y insister : au sein même de France Télécom,
existent des établissements d'enseignement supérieur très performants. Il
existe des centres de recherche au Centre national d'études des
télécommunications, le CNET ; il y a des établissement d'études à Rennes et à
Caen ; il y a le centre d'études de TDF. On sait qu'ils dépendent de France
Télécom. L'Etat a-t-il prévu, monsieur le ministre, de les prendre en charge
directement sur son budget ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je l'ai dit !
M. Paul Loridant.
Si tel est le cas, expliquez-nous comment cela se fera dans un contexte où,
par ailleurs, il est demandé de réduire les dépenses nouvelles ? C'est en effet
une charge nouvelle pour l'Etat, sauf à dire que le Gouvernement se propose de
les supprimer ou de les restructurer.
Vous le voyez, mes chers collègues, le choix de la privatisation est, malgré
les apparences, un mauvais coup pour nos finances publiques.
Mes chers collègues, vous qui êtes si attachés à ce souci de réduction des
dépenses publiques, quelle est votre position ?
En tout état de cause, rien ne me semble avoir été suffisamment étudié, et les
pistes que j'ai exposées dans cette motion mériteraient d'être explorées.
La commission des finances a reçu M. Bon mais n'a pas étudié le projet de loi.
C'est pourquoi, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et
citoyen et en mon nom personnel, en qualité de membre du Mouvement des
citoyens, j'invite le Sénat à adopter cette motion de renvoi à la commission
des finances afin que le coût réel de la déréglementation à court terme, à
moyen terme, mais aussi à long terme soit connu et rendu public afin que la
Haute Assemblée puisse mesurer l'exacte portée de la décision qu'elle est
appelée à prendre.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, il est proposé un renvoi à la commission au motif qu'il serait
nécessaire « d'examiner les conséquences inévitables et importantes de
l'évolution de la réglementation des télécommunications sur les finances
publiques ».
Notre collègue a commencé son exposé en disant que tout cela était fait au pas
de charge !
Mme Hélène Luc.
C'est exact, puisque ce texte est examiné en urgence !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je le renvoie au rapport
L'Avenir de France Télécom : un
défi national.
C'est le fruit d'un travail de la commission des affaires
économiques et du Plan commencé en novembre. Il est paru en mars, après 200
auditions. Il s'agit d'une étude approfondie. Ce n'est pas un rapport de
technocrates ! Si l'on peut dire que je suis un « techno » de la vétérinaire,
je ne suis en aucun cas un « techno » des télécommunications !
La seule similitude, c'est la puce électronique dans un cas et la puce du
lapin dans l'autre, celle qui transmet la myxomatose
pulex pulex.
Quoi qu'il en soit, il n'est pas question ici de pas de charge. La tactique
évoquée par M. Delfau est comparable à un pas de valse !
Par ailleurs, monsieur Loridant, vous avez mentionné l'exemple de l'eau.
J'appelle de mes voeux une autorité de régulation dans ce domaine, comme dans
celui des télécommunications.
Enfin, monsieur le sénateur, vous avez parlé de l'enseignement supérieur
dépendant de France Télécom et de son transfert à l'Etat. Dois-je vous rappeler
que, lorsque vous siégiez sur un banc un peu plus à droite de la partie gauche
de cet hémicycle, vous avez voté la loi de 1990, qui prévoyait le transfert des
charges relatives à l'enseignement supérieur à l'Etat ?
Il est vrai que les décrets n'ont jamais été pris, mais ce qui est transféré
aujourd'hui était bel et bien contenu dans la loi de 1990.
Permettez-moi maintenant de présenter quelques remarques qui rappelleront aux
membres de la Haute Assemblée les travaux de la commission des affaires
économiques et du Plan parus au mois de mars dernier.
Tout d'abord, s'agissant des collectivités locales, notre commission a analysé
les conséquences du système de la redevance d'occupation. Son plafond sera fixé
par décret en Conseil d'Etat, mais il appartiendra aux conseils généraux et aux
conseils municipaux d'en fixer le montant, qui, d'après une première
estimation, serait d'environ 150 millions de francs, ressources et recettes que
ne prévoyait pas la loi de 1990.
Ensuite, monsieur Loridant, je vous renvoie à l'étude d'impact que le
Gouvernement a transmise à la Haute Assemblée, étude consacrée notamment à
l'analyse des incidences financières du projet de loi.
S'agissant des recettes fiscales de l'Etat, qui atteignaient - vous l'avez
d'ailleurs rappelé, mais on retrouve cette donnée dans le rapport de la
commission que j'ai déjà évoqué - 13 milliards de francs en 1995, qui est le
dernier exercice connu, elles devraient être stables si l'on compare avec les
entreprises étrangères déjà soumises à la concurrence, et à la condition, bien
sûr, que France Télécom fasse face à cette concurrence, se diversifie et se
développe.
S'agissant de la valeur de France Télécom et, donc, des intérêts patrimoniaux
de l'Etat, les exemples étrangers montrent que l'ouverture à la concurrence a
plutôt développé les marchés sur lesquels interviennent les opérateurs
historiques. Comme M. le ministre l'a rappelé tout à l'heure, si la durée des
communications est de huit minutes par jour en France, elle est de vingt
minutes aux Etats-Unis. Il doit y avoir une exception chez moi, à Rambouillet ;
mais il s'agit là d'une considération strictement personnelle !
S'agissant des taxes et des redevances, l'étude d'impact apporte des
précisions : tout d'abord, il n'est pas envisagé d'augmenter le montant de la
taxe de constitution de dossier de demande d'autorisation ; ensuite, le produit
des redevances pour le plan de gestion de numérotation et le contrôle que les
opérateurs devront acquitter atteindrait entre 5 millions de francs et 7
millions de francs ; enfin, le produit des redevances pour mise à disposition
des fréquences radioélectriques, qui sont de 400 millions de francs
aujourd'hui, pourrait croître de 100 millions de francs.
S'agissant de l'impact budgétaire de la création des nouvelles structures,
notamment de l'autorité de régulation, un transfert de charges devrait être
opéré en faveur de cette autorité de régulation à partir des effectifs en
personnel du ministère en faveur des opérateurs par une rémunération des
prestations et obligations imposées par l'Etat au titre de la défense et de la
sécurité.
Enfin, un prélèvement sur la taxe d'apprentissage de 400 millions de francs
permettra de financer l'enseignement supérieur qui relèvera désormais de
l'Etat.
Dans ces conditions, mes chers collègues, le renvoi en commission n'est
nullement nécessaire. C'est pourquoi, au nom de la commission ainsi que de bon
nombre de collègues qui se sont intéressés à cette question depuis longtemps,
ont analysé et préparé cette réforme importante, je souhaite que nous
poursuivions la discussion de ce projet de loi. Je demande d'ailleurs que le
Sénat se prononce par scrutin public.
Mme Hélène Luc.
Le groupe communiste républicain et citoyen également.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 67, tendant au renvoi à la commission, repoussée
par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une de la
commission, l'autre du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
91:
Nombre de votants | 316 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 93 |
Contre | 223 |
Monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'aborder la discussion des articles, je vous propose d'interrompre nos travaux pendant quelques instants. (Assentiment.)
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures trente.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de réglementation des
télécommunications.
Nous passons à la discussion des articles.
Article additionnel avant l'article 1er
M. le président.
Par amendement n° 139, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier,
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant
l'article 1er, un nouvel article ainsi rédigé :
« La présente loi porte réglementation et développement du service public des
télécommunications.
« Les télécommunications sont régies par les principes du service public. A ce
titre, elles satisfont au principe d'égalité, de continuité, d'adaptabilité, de
neutralité, de participation, de transparence, de simplicité et
d'accessibilité. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Par cet amendement, nous avons souhaité faire du service public le pivot de la
réglementation des télécommunications. En effet, le service public est à nos
yeux au coeur du pacte républicain. Il est de ce fait indispensable, car il
participe au renforcement de la cohésion sociale et au développement solidaire
des territoires.
Le service public, c'est un élément fort de notre démocratie de par les
principes qu'il recouvre. Ces principes sont au nombre de huit. Nous avons tenu
à tous les décliner.
Le premier est le principe d'égalité. L'égalité est un principe
constitutionnel. Il est au coeur de notre devise mais, malheureusement, je
crains qu'il ne soit mis à mal par ce texte. Je prendrai un seul exemple. La
définition en trois composantes que vous faites du service public, créant ainsi
deux catégories de citoyens : ceux qui devront se contenter du service
universel et ceux qui auront les moyens d'avoir accès à ce que vous appelez «
les services obligatoires », à savoir les modes de télécommunications les plus
avancés. De ce traitement inégalitaire, nous ne voulons pas. C'est pourquoi
nous proposons d'énoncer clairement que le service public des
télécommunications doit respecter le principe d'égalité.
Le deuxième principe est celui de continuité. Il s'agit, là encore, d'un
principe très important, car c'est en son nom que les pouvoirs publics se
doivent de mener une politique volontariste d'aménagement du territoire afin
que tous les citoyens puissent avoir accès, quel que soit le lieu où ils
résident, à un service téléphonique de haute qualité. Dans la loi d'orientation
pour l'aménagement et le développement du territoire, il est prévu la
réalisation d'un schéma sectoriel des télécommunications, notamment des réseaux
interactifs à haut débit. C'est un objectif ambitieux auquel nous souscrivons.
Mais, là encore, en plaçant la concurrence au coeur de la réglementation, je
crains que ce schéma ne voit jamais le jour.
Le troisième principe est celui d'adaptabilité. Là encore, nous touchons à un
point clé de notre débat. Le service public doit-il rester figé dans une
définition arrêtée à un moment donné ? Nous ne le pensons pas et nous ne sommes
pas les seuls. Il nous a semblé que, sur toutes les travées, a été défendue la
nécessité de donner un égal accès au téléphone mobile et au réseau à haut débit
pour tous les citoyens et donc de considérer ces éléments comme partie
intégrante du service public.
Si nous n'y prenons garde, votre service public réduit au service universel ne
respectera pas ce principe d'adaptabilité. Le projet de loi prévoit, certes,
une clause de révision, mais tous les cinq ans. L'Assemblée nationale et notre
rapporteur ont proposé un rendez-vous plus rapproché. Cela sera-t-il suffisant
compte tenu de la rapidité des progrès technologiques dans ce secteur ? Nous ne
le croyons pas. Le service public des télécommunications doit aussi satisfaire
à ce principe en permanence.
Le quatrième principe est celui de neutralité. Je crois, monsieur le ministre,
que vous y êtes sensible, puisque c'est en quelque sorte en son nom que vous
proposez de créer une autorité de régulation. Nous ne pensons pas, pour notre
part, que ce soit le meilleur moyen de faire respecter ce principe. Sa mise en
application relève plutôt, à nos yeux, des prérogatives de la puissance
publique. Qui mieux qu'elle peut en effet garantir un tel principe ? N'est-ce
pas là l'objet de l'Etat ? Les fonctionnaires n'ont-ils pas obligation d'agir
en vertu de ce principe ? J'ai bien peur que, en donnant à une autorité des
compétences en matière réglementaire qui relèvent normalement des missions de
pouvoirs publics, nous ne bousculions le principe de neutralité.
Le cinquième principe est celui de participation. Il permet à tous les usagers
- personnels, collectivités locales, entreprises - d'avoir leur mot à dire.
C'est la parole donnée au citoyen, pour un meilleur fonctionnement de ce
service public.
Le sixième principe est celui de transparence. Là encore, ce principe est
souvent cité dans le projet de loi. Vous nous dites qu'il ne peut y avoir de
concurrence loyale sans transparence. C'est vrai. Pourtant, ce projet de loi ne
met pas en oeuvre ce principe. Je ne prendrai qu'un exemple : l'interconnexion.
Pourquoi seul France Télécom aura, de fait, une offre tarifaire et technique à
publier ?
Le septième principe est celui de simplicité. Un service public doit être un
service simple, dont tout le monde comprend l'usage. Le système que vous nous
proposez est un vrai maquis. La loi que vous avez écrite est extrêmement
complexe. Elle est source, pour les entreprises, d'insécurité juridique, car la
frontière entre les compétences de l'Autorité de régulation des
télécommunications, du Conseil supérieur de l'audiovisuel et du Conseil de la
concurrence n'a pas été suffisamment précisée. De plus, elle met le simple
citoyen au coeur de la lutte sauvage à laquelle risquent de se livrer les
opérateurs pour gagner des parts de marchés, sans que ses droits de
consommateur soient respectés.
Enfin, le huitième et dernier principe est celui d'accessibilité. Il doit
permettre à tous d'accéder au service téléphonique. Là encore, ce principe ne
sera plus appliqué, nous semble-t-il. J'en donnerai deux exemples : la hausse
programmée de l'abonnement et le fait que les mobiles et les réseaux à haut
débit donnant accès aux fameuses « autoroutes de l'information » ne seront pas
accessibles à tous.
Construire la nouvelle réglementation des télécommunications avec, en son
centre, le respect des principes du service public, tel est l'objet de cet
amendement que nous vous demandons d'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement n° 139.
Nous avons déjà répondu à beaucoup d'arguments. A force de dialoguer ainsi
sans être entendu, je finis par me poser quelques questions !
Rappelez-vous que la clause de révision existe. Nous proposerons que le «
rendez-vous » soit avancé d'une année.
Des dispositifs d'engagements sont prévus au cours de l'année 1997 pour un
certain nombre de services nouveaux ; je pense aux mobiles, même s'ils sont
hors du service public.
Enfin, l'article 35 du code des postes et télécommunications, tel qu'il est
rédigé à l'article 6, énonce clairement les principes de service public. Voilà
pourquoi c'est à l'article 6 que nous examinerons les conditions d'un service
public de qualité, y compris les clauses de révision qui prévoient que le
service public n'est pas figé. Je rappelle qu'aujourd'hui le réseau numérique à
intégration de services n'est pas dans le service public.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Nous devons nous entendre sur une méthode pour ce
débat. Ou bien aucun des arguments apportés par le Gouvernement et par la
commission n'est pris en compte par l'opposition et, dans ce cas, il n'est pas
utile de continuer à argumenter. Ou bien Mme Pourtaud veut bien examiner
quelques-uns des arguments que j'ai eu l'occasion de défendre et qu'elle semble
encore ignorer.
Le service universel, c'est le service du téléphone. Il faut y ajouter
d'autres services, me dites-vous. Lesquels ? Les services à haut débit ? Quels
sont aujourd'hui les services que l'on trouve sur les réseaux à haut débit qui
seraient de nature à entrer dans le service universel ? Je veux qu'on me le
dise ! Quel est le service qui peut être apporté aujourd'hui - je ne dis pas
demain - à un usager de France Télécom, quelque part en France, qui ne puisse
être rendu sur le réseau téléphonique actuel ? Y a-t-il aujourd'hui des
services qui sont offerts par France Télécom sur des réseaux à haut débit qui
s'adressent aux usagers que nous sommes, les uns et les autres ?
M. Delfau, comme beaucoup, a évoqué la vieille dame de la Lozère qui va être
privée du service public du téléphone. A-t-elle besoin des liaisons louées à
haut débit ? A-t-elle besoin du télex ? A-t-elle besoin du réseau numérique à
intégration de services ?
Mme Hélène Luc.
Mais il n'y a pas qu'elle en Lozère !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Il y a là une très grande hypocrisie ! Le service
public que nous proposons, c'est le service du téléphone avec l'ensemble des
composantes auxquelles les Français sont aujourd'hui habitués et attachés.
Si, demain, le Parlement estime qu'il faut intégrer une nouvelle technologie
dans la définition du service universel, par exemple le réseau numérique à
intégration de services parce qu'il permettrait d'avoir l'image sur le poste
téléphonique - mais vous reconnaîtrez qu'aujourd'hui ce service n'existe pas -
il le décidera !
Vous continuez de répéter inlassablement que la définition du service
universel est figée alors que le Parlement en a la maîtrise ! Comment
pourrait-on mieux rendre évolutive la définition du service universel ? Le
Gouvernement proposerait de conserver la possibilité de faire évoluer ce
service universel, je comprendrais votre argumentation. Le Gouvernement
confierait à l'autorité de régulation la possibilité de faire évoluer la
définition du service universel, je comprendrais aussi votre argumentation.
Mais là, c'est le Parlement qui se saisit directement !
Vous souhaitez une révision tous les quatre ans. L'Assemblée nationale a
proposé une révision au moins tous les cinq ans, ce qui permettrait peut-être
au Parlement de se saisir en fonction des évolutions technologiques. Nous
aurons un débat sur ce point tout à l'heure. En attendant, on ne peut pas dire
que nous offrons aujourd'hui un service public minimum !
L'amendement que vous nous proposez revient à élargir à l'ensemble des
opérateurs de télécommunications les principes du service public. C'est tout le
contraire de ce que nous voulons faire, précisément parce que nous voulons
protéger le service public et surtout l'opérateur public en charge du service
universel. Vous voulez, vous, que tous les opérateurs - par conséquent, tous
les opérateurs privés puisque le projet de loi ouvre les services des
télécommunications à la concurrence - respectent les obligations de service
public. Il faudrait donc que tous les opérateurs privés participent à l'offre
du service public. C'est ce que nous ne voulons pas parce qu'il faut, selon
nous, que ce soit France Télécom, l'opérateur public, qui maîtrise l'offre de
service public.
Certains pays ont fait d'autres choix. L'Allemagne, par exemple, a choisi de
mettre en concurrence le service public. Nous, nous voulons que France Télécom
reste le seul opérateur du service public.
Les arguments que vous avez évoqués à propos de la « jungle » à laquelle sera
confronté l'utilisateur ne résistent pas à l'examen, notamment en raison des
mesures que j'ai énoncées tout à l'heure : par exemple, s'agissant de la
portabilité des numéros, qui n'existe pas aujourd'hui, on ne peut pas faire
mieux en matière de simplicité puisque chaque usager aura son numéro de
téléphone et le conservera quel que soit son lieu d'habitation ou son
opérateur. Cela me fait dire que, pour l'usager, cette ouverture à la
concurrence sera simple d'emploi et qu'elle se fera dans la transparence.
Enfin, vous continuez à vouloir faire croire que l'usager devra supporter une
hausse du coût du service téléphonique, notamment pour les communications
locales, alors que le texte précise clairement que la hausse de l'abonnement ne
pourra se faire qu'à l'occasion d'une baisse globale des tarifs. Cela signifie
que le solde entre la hausse de l'abonnement et la baisse des tarifs devra
bénéficier à l'usager.
Dans ces conditions, vous comprendrez que le Gouvernement soit défavorable à
cet amendement qui va contre le service public.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 139, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - L'article L. 32 du code des postes et télécommunications est
ainsi modifié :
« I. - Les 3°, 7° et 9° sont ainsi rédigés :
« 3° Réseau ouvert au public.
« On entend par réseau ouvert au public tout réseau de télécommunications
établi ou utilisé pour la fourniture au public de services de
télécommunications. » ;
« 7° Service téléphonique au public.
« On entend par service téléphonique au public l'exploitation commerciale pour
le public du transfert direct de la voix en temps réel au départ et à
destination de réseaux ouverts au public commutés, entre utilisateurs fixes ou
mobiles. » ;
« 9° Interconnexion.
« On entend par interconnexion les prestations réciproques offertes par deux
exploitants de réseaux ouverts au public qui permettent à l'ensemble des
utilisateurs de communiquer librement entre eux, quels que soient les réseaux
auxquels ils sont raccordés ou les services qu'ils utilisent.
« On entend également par interconnexion les prestations d'accès au réseau
offertes dans le même objet par un exploitant de réseau ouvert au public à un
prestataire de service téléphonique au public. »
« II. - Après les mots : "équipements terminaux", la fin du deuxième
alinéa du 12° est ainsi rédigée : ", la protection des données, la
protection de l'environnement et la prise en compte des contraintes d'urbanisme
et d'aménagement du territoire".
« III. - Il est ajouté un 15° ainsi rédigé :
« 15° Opérateur.
« On entend par opérateur toute personne physique ou morale exploitant un
réseau de télécommunications ouvert au public ou fournissant au public un
service de télécommunications. »
Sur l'article, la parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les temps
changent. Le service public demeure et il évolue. C'est bien naturel !
C'est l'objet du projet de loi qui nous est soumis.
Entre une représentation devenue inactuelle des modalités de fonctionnement du
service public et l'idéologie libérale à tout va, ce texte vise à concilier les
intérêts des différentes catégories d'usagers, et ce de manière satisfaisante,
bien que les situations soient multiples et les attentes souvent
contradictoires, en combinant liberté d'entreprise et astreintes, dans un
schéma qui traduit bien ce que peut être aujourd'hui l'intérêt général dans le
domaine des télécommunications.
Les solutions apportées à ces problèmes sont conçues comme durables, sans quoi
nous ne légiférerions pas, mais nous savons bien que le secteur est en pleine
évolution, et même en pleine recomposition.
Les prochaines années seront marquées par la fusion de l'audiovisuel, de
l'informatique et des télécommunications, sous l'influence des techniques
numériques, qui permettent de traduire images et sons en données informatiques,
de les stocker et de les transporter en quantité.
A terme, on doit s'attendre et se préparer à une utilisation indifférenciée
des supports existants.
Depuis longtemps, les satellites de télécommunications sont utilisés à des
fins de communication audiovisuelle, et voici que les opérateurs du câble vont
pouvoir offrir à leurs abonnés des services de téléphonie vocale entre points
fixes. Le moment viendra où les réseaux de télécommunications autorisés par le
ministre chargé des télécommunications pourront proposer des services de
communication audiovisuelle tels que la vidéo à la demande.
Le projet de loi que nous examinons repose largement sur cette séparation
entre télécommunications et audiovisuel qui deviendra fictive à l'horizon de
trois, cinq ou dix ans. Vous avez soigneusement préservé, monsieur le ministre,
la délimitation du champ et du régime juridique respectifs des
télécommunications et de la communication audiovisuelle opérée par la loi du 30
septembre 1986, comme si, devant les bouleversements difficiles à analyser,
même par certains aspects, à prévoir, qui commencent pourtant à poindre, vous
aviez retenu le souffle du législatif et de l'exécutif.
Or, quand les programmes de TF 1, de France 2 ou des bouquets de chaînes
thématiques seront distribués sur le réseau téléphonique, qu'est-ce qui
distinguera celui-ci des réseaux câblés ? Qu'est-ce qui justifiera d'appliquer,
en matière d'autorisation d'établissement des réseaux, le régime juridique des
télécommunications plutôt que celui de la communication audiovisuelle ?
Des questions graves se posent, en matière de contrôle des contenus
particulièrement : les services de communication audiovisuelle actuellement
diffusés sur le réseau téléphonique comme sur les réseaux de type Internet sont
non pas contrôlés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel mais soumis au
régime juridique de la télématique, qui est, disons, moins exigeant que le
dispositif mis en place par la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de
communication. Verra-t-on à terme un même service de communication
audiovisuelle soumis à des régimes juridiques différents selon tel ou tel
support exploité ?
D'ores et déjà se pose de façon aiguë le problème du contenu des services de
communication audiovisuelle diffusée sur Internet. La faiblesse du régime
actuel de la télématique a de très nombreuses implications en matière de
promotion de la francophonie et de l'industrie française des contenus comme
pour la préservation de certaines règles d'ordre public. Je pense à la
protection de l'enfance et de l'adolescence, à celle des consommateurs, à celle
de la vie privée, tout simplement à celle du citoyen.
Vous avez, monsieur le ministre - vous aussi, monsieur le rapporteur - déposé
un amendement qui tend à instaurer un contrôle déontologique du Conseil
supérieur de l'audiovisuel sur ces services télématiques et qui permet de
mettre en cause la responsabilité pénale des fournisseurs d'accès.
Cet amendement tranche de façon un peu impromptue une partie des problèmes que
suscite l'évolution technologique.
Sa discussion permettra, je l'espère, de préciser les procédures qu'il met en
place, les pouvoirs qu'il institue, les responsabilités qu'il crée.
J'ai dit qu'il tranchait de manière un peu impromptue. Permettez-moi d'y
insister.
A de très nombreuses reprises, devant la commission des affaires culturelles,
M. le ministre de la culture a été interrogé sur les problèmes que je viens de
rappeler. Nous lui avons demandé quelles étaient ses intentions et celles du
Gouvernement. Il nous a répondu qu'il allait engager une concertation à
l'échelon européen. Fort bien !
Lorsque le projet de loi est arrivé sur le bureau du Sénat, nous nous sommes
demandé si la commission des affaires culturelles ne devait pas se saisir pour
avis. Nous y avons renoncé, considérant que la matière telle qu'elle était
présentée ne ressortissait évidemment pas du domaine de la commission des
affaires culturelles.
Or voilà qu'est déposé un amendement, de manière impromptue, disais-je, qui,
de toute évidence, en ressortit, lui.
Je souhaite, monsieur le ministre, que la discussion de l'amendement éclaire
notre assemblée et ne laisse pas dans l'ombre un certain nombre de questions
qui se posent et que j'aurais souhaité énumérer au cours de cette intervention,
forcément trop brève, puisque limitée par notre règlement.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, je prends date en vous demandant de
profiter de ce débat pour apporter les éclaircissements que, non seulement la
commission des affaires culturelles du Sénat, les membres de la Haute
Assemblée, mais le pays attendent sur un sujet qui est fondamental.
M. le président.
La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le premier
article de ce projet de loi est essentiel. Il définit les procédures et les
acteurs sur le marché des télécommunications dans le cadre choisi par le
Gouvernement. Les concepts retenus tournent le dos au service public et
traduisent une démarche fortement inégalitaire dont les usagers auraient, si ce
texte entrait en application, à pâtir gravement.
Il ne faut pas hésiter à le dire, ce premier article est la pierre angulaire
de la destruction du service public « à la française » dans le domaine des
télécommunications. Et, l'on ne redira jamais assez combien les discours
gouvernementaux tenus lors du mouvement de novembre et décembre sur le service
public n'étaient en fait que des tentatives de désamorcer une volonté de
préserver et rénover les atouts de la France.
M. Gérard Delfau.
C'est vrai !
Mme Hélène Luc.
Absolument !
M. Claude Billard.
L'article 1er est ouvertement défavorable à l'entreprise publique. Notre
groupe y reviendra lors de la discussion des amendements de suppression qui
seront l'occasion de souligner que ce que vous faites est un pillage du secteur
public national au profit de grands groupes privés qui ne jurent que par les
dividentes et la rentabilité financière à court terme.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont une tout autre
conception du rôle et du devenir de la télécommunication. C'est une question
primordiale, à l'heure où l'on parle de révolution informationnelle et où
nombre d'activités professionnelles et domestiques sont parties prenantes de
cette révolution.
L'enjeu est bien la maîtrise des réseaux de télécommunications qui, chacun le
sait, seront les artères du développement économique et social de notre pays.
Bien entendu, avec de telles transformations, le service public dans son
ensemble, et qui plus est les télécommunications, doivent relever les défis qui
leur sont posés. Il n'est donc nullement question, comme je l'ai dit hier soir,
de préconiser un statu quo !
Mais rénover le public, ce n'est pas copier le privé ! Ce serait faire preuve
d'un manque d'imagination qui, on le voit sans peine, aboutit dans notre pays à
une déliquescence de nos atouts.
Une réelle rénovation du secteur public permettrait d'allier les intérêts des
salariés, des usagers, de la nation à la réponse aux nouveau défis
technologiques.
Pour rénover le secteur public, il faudrait commencer par développer ses
critères et ses règles spécifiques. La France a une tradition originale de
gestion publique. Elle a été capable, à chaque période où un nouveau
développement du public s'imposait, de créer et de promouvoir une gestion
originale.
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Claude Billard.
C'est aujourd'hui aux télécoms de trouver la meilleure réponse aux défis à
venir. Mais quel gâchis ce serait d'abandonner les critères et les règles du
service public à la française pour la solution paresseuse qui consiste à copier
le privé !
Oui, une gestion plus autonome, plus décentralisée, avec l'intervention des
salariés et des populations est nécessaire. C'est tout autre chose que d'avoir
un service minimum dévolu au public car non rentable et une multitude d'acteurs
sur les segments porteurs qui se font la guerre et donc gâchent des fonds et
des possibilités de développement. Faire intervenir les salariés et les
populations, c'est le gage de la démocratie et donc de l'efficacité.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 1er est liberticide
pour l'avenir de France Télécom. Il organise le démantèlement de l'entreprise
qui réalise le plus gros bénéfice de France, toutes entreprises confondues, ce
dont nous sommes fiers. C'est le résultat d'une politique de développement
public qui allie, depuis la Libération, l'égalité de traitement, l'unicité du
service public à un travail remarquable des agents de l'Etat.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous confirmons notre opposition
résolue à ce texte.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je souhaiterais ajouter quelques mots aux propos tenus par M.
Gouteyron.
M. le président de la commission des affaires culturelles a eu bien raison de
dire que l'émergence du multimédia était en train de bouleverser les
frontières, héritage technique et historique de nos pratiques, et que, entre
l'autorité de contrôle de l'audiovisuel et, demain, l'autorité de régulation de
télécommunications, il y avait sans doute à définir des frontières qui
puissent, à la manière de ce qui s'est passé pour Schengen, être plus
perméables et déterminer un secteur moins segmenté.
Certes, comme l'a dit M. Gouteyron, est intervenu un impromptu qui n'avait pas
vocation à trancher mais à essayer de résoudre un certain nombre de problèmes
que les réseaux nouveaux, que les fournisseurs d'accès à ces réseaux nouveaux
et que le contenu de ces réseaux étaient en train de nous poser. En effet,
l'actualité récente, au travers de l'inculpation de deux fournisseurs d'accès,
nous a démontré qu'il nous manquait les outils permettant, à la fois, de
limiter l'accès et de mettre en place une déontologie.
Je suis certain que la commission des affaires culturelles approfondira le
chemin que nous avons souhaité tracer et que les faits imposeront d'apporter
des réponses encore plus adaptées et plus larges que celles qui sont
actuellement apportées.
En l'occurrence, nous n'avons pas voulu rester dans le vide quant au contrôle
du contenu, vide que nous avons longtemps connu à propos du kiosque
télématique, vide qui a motivé nombre d'interventions en vue de maîtriser et de
contrôler tout ce qui était véhiculé en termes de négation de la dignité
humaine.
M. le président.
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les cinq premiers sont présentés par MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite, et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 79 tend à supprimer l'article 1er.
L'amendement n° 80 vise à supprimer le paragraphe I de l'article 1er.
L'amendement n° 81 a pour objet :
A. - De supprimer les deuxième et troisième alinéas du paragraphe I de
l'article 1er.
B. - En conséquence, dans le premier alinéa du paragraphe I de cet article, de
supprimer la référence : « 3° ».
L'amendement n° 82 tend :
A. - A supprimer les quatrième et cinquième alinéas du paragraphe I de
l'article 1er.
B. - En conséquence, à supprimer, dans le premier alinéa du paragraphe I de
cet article, la référence : « 7° ».
L'amendement n° 83 vise :
A. - A supprimer les sixième, septième et huitième alinéas du paragraphe I de
l'article 1er.
B. - En conséquence, dans le premier alinéa du paragraphe I de cet article, à
supprimer la référence : « 9° ».
Enfin, par amendement n° 58 rectifié
quater,
MM. Cabanel, Laffitte,
Rausch, Joly, Baudot et Bernadaux proposent de compléter le septième alinéa du
paragraphe I de l'article 1er par une phrase ainsi rédigée : « A compter du 1er
janvier 1988, l'interconnexion inclut l'itinérance entre les réseaux des
opérateurs de radiocommunications mobiles, soumis par leur cahier des charges à
des obligations de couverture à l'échelle nationale. »
La parole est à M. Pagès, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Robert Pagès.
Cet amendement tend à la suppression de l'article 1er.
L'ouverture du réseau au secteur privé est, bien entendu, le principal grief
que nous ferons à cet article.
L'expérience prouve que la déréglementation des télécommunications est
catastrophique pour les salariés comme pour les usagers.
En effet, sous la pression des grands groupes de la communication, la plupart
des pays capitalistes se sont lancés dans une course effrénée à la
déréglementation.
Le mouvement est parti, dès 1984, des Etats-Unis, qui ont démantelé le géant
American Telegraph and Telephon, ATT, pour créer plusieurs sociétés, capables
de partir à la conquête de marchés extérieurs, notamment de marchés
européens.
Le résultat pour les consommateurs américains ne s'est pas fait attendre. En
effet, les factures des ménages ont augmenté de quelque 60 p. 100. En revanche,
les grandes entreprises ont bénéficié de baisses tarifaires.
L'autre conséquence concerne bien entendu l'emploi. Le secteur des
télécommunications américaines a aussi connu une véritable saignée, d'abord
chez ATT avec des suppressions d'emplois depuis 1984, puis chez les nouveaux
opérateurs.
La Grande-Bretagne, puis le Japon ont emboîté le pas aux Américains dès la fin
de l'année 1984, ces deux pays ayant inauguré la privatisation de leurs
télécommunications. Cela a, bien entendu, été une affaire des plus juteuses
pour les places financières de Londres et de Tokyo, qui ont mis sur le marché
les plus grosses capitalisations boursières de l'histoire.
Comme aux Etats-Unis, les effets pour les personnels et les usagers ont été
destructeurs. Des suppressions d'emplois ont été décidées chez BT et Nikon
Telegraph and Telephon.
Les ménages ont, bien évidemment, dû subir une forte hausse des tarifs,
notamment en Grande-Bretagne. Voilà qui démontre bien que la bourse est
l'ennemie de l'emploi stable, et j'insiste sur cet adjectif.
Les conséquences de la privatisation et de la déréglementation de ce secteur
sont toujours les mêmes. Je ne citerai que les deux principales.
La première est la suppression massive d'emplois stables dans les services,
mais aussi dans l'industrie des télécommunications. Il faut savoir qu'en
Grande-Bretagne cette industrie n'existe pratiquement plus.
La seconde conséquence est la mise des télécommunications entre les mains des
multinationales - elles ne sont pas des philantropes - qui en deviennent
actionnaires et maîtrisent ainsi directement les réseaux de communication,
systèmes nerveux des sociétés contemporaines.
Pour toutes ces raisons, nous demandons à la Haute Assemblée d'adopter, par
scrutin public, cet amendement de suppression.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 80.
M. Guy Fischer.
Par cet amendement de suppression du paragraphe I de l'article 1er, qui
introduit dans le code des postes et télécommunications les nouvelles notions
de réseaux ouverts au public, de service téléphonique au public et
d'interconnexion, nous voulons exprimer notre totale opposition au texte du
Gouvernement.
Ces trois notions sont en effet la clé de voûte du système concurrentiel que
les partisans de la privatisation veulent mettre en place.
La notion de réseau ouvert au public ouvre en effet les vannes de la
déréglementation et de la pénétration des opérateurs privés sur les créneaux
d'activité jusqu'à présent réservés à France Télécom qui devait les occuper en
appliquant tout ce que le service public peut apporter à tous les usagers.
L'article 5 du projet de loi prévoit certes que cette faculté d'ouvrir un
réseau au public sera soumise à une autorisation ministérielle préalable, mais,
dans le cadre de cette ouverture à la concurrence, il faut bien constater que
les critères de cette autorisation favoriseront l'arrivée des poids lourds des
privés du secteur.
France Télécom sera alors tenu de laisser ses concurrents utiliser à moindre
frais le réseau construit à partir de l'argent des contribuables et des usagers
de ses services, ce qui est, pour nous, totalement inacceptable.
La deuxième notion définie par le paragraphe I de l'article 1er qui est celle
de service téléphonique au public ne signifie aucunement service public du
téléphone.
C'est même tout le contraire, puisqu'elle permettrait de libéraliser l'accès
des grands groupes nationaux et multinationaux aux services téléphoniques les
plus immédiatement rentables dans notre pays, dans les gares et les aéroports
notamment.
Au lieu de garantir les droits des usagers à un service téléphonique de
qualité, cette notion ferait de l'usager un client dont la seule véritable
information serait d'ordre publicitaire.
Il ne fait alors aucun doute que les nouveaux opérateurs privés qui
investiraient ce nouveau marché ne le feraient que pour les lignes les plus
rentables sans se soucier de l'aménagement du territoire ni de l'égalité
d'accès au téléphone.
La troisième notion qui est celle d'interconnexion est tout aussi dangereuse
puisqu'elle donne une définition technique aux dispositifs d'accès aux
réseaux.
Attachés au service public des télécommunications que seule France Télécom
peut assurer dans de bonnes conditions tarifaires pour tous, nous ne pouvons
donc accepter aucune des trois définitions déclinées au paragraphe I de
l'article 1er. Nous ne pouvons donc, par cet amendement n° 80, qu'en demander
la suppression.
Mme Hélène Luc et M. Robert Pagès.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet, pour défendre l'amendement n° 81.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
L'article 1er du projet de loi de réglementation des télécommunications est au
coeur du dispositif de déréglementation de notre service public des
télécommunications.
Au moment de l'arrivée massive de nouveaux outils de communication, au moment
de l'explosion de nouveaux médias mêlant simultanément l'image et le son, en
faisant appel aux technologies de la téléphonie, l'abandon du monopole de
France Télécom est lourd de conséquences.
Une nouvelle fois, nous constatons que nous nous éloignons, chaque jour
davantage, des promesses du candidat à la présidence de la République, Jacques
Chirac, qui, durant la campagne électorale, soulignait l'importance de la
spécificité du service public à la française.
Aujourd'hui, cette spécificité disparaît au bénéfice d'un service « public
universel » d'inspiration libérale dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il ne
s'agit, au fond, que d'une importante modification du service public à la
française.
Le secteur des télécommunications est un secteur clé de notre économie. Cette
position, appelée à se renforcer et à se développer dans les années à venir,
explique d'ailleurs que le président des Etats-Unis, Bill Clinton, fait
figurer, dans sa campagne électorale, les autoroutes de l'information parmi les
enjeux majeurs du développement économique des Etats-Unis.
La croissance du marché des télécommunications de 5 p. 100 à 7 p. 100 par an,
selon les diverses estimations, devrait représenter 8 p. 100 du produit
intérieur brut mondial, soit bien plus que l'industrie automobile.
Certains estiment que l'arrivée de ces nouvelles technologies et les
contraintes techniques qu'elles engendrent justifient des modifications du
service public français.
Il s'agit là, pour nous, de prétextes qui n'ont d'autre objet que de vouloir
concéder à des intérêts privés le formidable enjeu économique de la révolution
informationnelle qui est en cours.
Quant à la baisse des tarifs liée à l'ouverture de la concurrence, si l'on
observe les différentes modifications de tarifs intervenues depuis la réforme
de 1994, il apparaît que les baisses ne profitent pas de la même manière aux
différentes catégories d'usagers. Les « clients affaires » sortent gagnants
d'une diminution opérée à leur seul profit.
L'exemple de la Grande-Bretagne face à la concurrence et à la prétendue baisse
des prix de son marché national de l'électricité est particulièrement
inquiétant car il en résulte un affaiblissement du service rendu à la
population.
En fait, l'ouverture à la concurrence n'a pour objectif que de soumettre le
marché de l'information et de la communication en pleine expansion aux intérêts
privés. Ce sont les capacités du service public à oeuvrer au développement de
ces nouvelles technologies dans notre pays qui seront compromises. Pour y
remédier, je vous propose, mes chers collègues, d'adopter l'amendement n°
81.
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme Luc, pour défendre l'amendement n° 82.
Mme Hélène Luc.
Dans le droit-fil des propos que nous avons tenus en défendant l'amendement n°
80, nous proposons, par l'amendement n° 82, de supprimer les quatrième et
cinquième alinéas du paragraphe I de l'article 1er.
Ces deux alinéas suggèrent une définition du service téléphonique au public
qui n'a que peu de rapport avec l'actuel service public.
D'un point de vue technique, l'introduction dans le code des postes et
télécommunications de cette nouvelle notion signifie la fin du monopole de
France Télécom sur le téléphone filaire et aligne celui-ci sur ce qui existe
dans le domaine des radiocommunications mobiles.
Ce régime laxiste n'a pourtant pas permis aux services de radiocommunications
mobiles de se développer d'une manière aussi efficace et aussi peu onéreuse
qu'il eût été souhaitable et surtout possible, si ce secteur d'activité avait
été réservé à France Télécom.
Je rappelle que, si la France est à la traîne en matière de téléphonie sans
fil, la déréglementation qui a permis la multiplicité des opérateurs que nous
connaissons aujourd'hui n'y est pas pour rien.
La téléphonie sans fil française est l'une des plus chères parmi les pays
développés comparables. Nous avons donc ici la preuve de l'inefficacité du
système de liberté de la concurrence sur un créneau d'activité. Pourquoi
faudrait-il alors le généraliser à la quasi-totalité des activités
téléphoniques ?
Dans ces conditions, il nous a paru souhaitable de demander la suppression des
dispositions qui organisent l'ouverture des services téléphoniques à la
concurrence.
Tel est l'objet de l'amendement n° 82, que je vous demande, mes chers
collègues, d'adopter.
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Leyzour, pour défendre l'amendement n° 83.
M. Félix Leyzour.
Par cet amendement, nous demandons de ne pas retenir la notion et la
définition de l'interconnexion qui est proposée car elle implique l'utilisation
à des fins lucratives par des entreprises privées des réseaux qui ont été
imaginés et construits à partir des investissements et de la contribution des
usagers du service public des télécommunications.
M. le président.
L'amendement n° 58 rectifié
quater
est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 79, 80, 81, 82 et 83
?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
L'article 1er définit les principaux concepts juridiques
institués ou modifiés par le projet de loi. La suppression de cet article
viderait le projet de loi de sa substance. Nous sommes donc défavorables à ces
amendements car ils sont contraires à la position adoptée par la commission en
ce domaine.
Je ne relèverai pas les propos qui ont été tenus concernant les raisons du
faible développement du téléphone mobile en France. Après l'analogique, il y a
eu le numérique et l'on pourrait presque parler maintenant, à vous entendre,
madame Luc, de « syllogique », terme un peu spécieux qui ferait croire que
l'ouverture à une certaine concurrence aurait entraîné un retard dans le
développement de la téléphonie mobile en France.
En revanche, je reviendrai sur les tarifs car beaucoup a été dit depuis le
début de l'après-midi à ce sujet. Je prendrai pour exemples trois pays, et,
pour commencer, les Etats-Unis. J'ai pu constater que le groupe communiste
républicain et citoyen défendait avec beaucoup de conviction...
M. Félix Leyzour.
De constance !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
... le monopole privé américain antérieur à 1984,
c'est-à-dire ATT.
(Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
J'ai compris que c'était la loi de 1984 qui avait détruit ce monopole
privé...
M. Robert Pagès.
Ce n'est pas très sérieux !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
... en introduisant la concurrence sur de longues distances
et une organisation régionale.
M. Guy Fischer.
C'est de la provocation !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
J'ai donc cru comprendre que le premier détonateur avait été
la loi de 1984.
M. Félix Leyzour.
Vous me decevez, monsieur le rapporteur !
Mme Hélène Luc.
M. Larcher ne pense pas ce qu'il dit !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Prenons maintenant le montant de l'abonnement dans trois
pays. Il s'élève à environ 52 francs pour France Télécom, à 63 francs pour BT
et à 55 francs pour Nynex.
Les services proposés par l'abonnement sont identiques pour les trois
opérateurs, mais s'y ajoute la facturation détaillée, gratuite pour BT et
Nynex, et qui s'élève à 8 francs pour la France.
Maintenant, parlons du prix des communications. Pour trois minutes, le prix
d'un appel urbain est de 0,613 franc en France, de 0,668 franc en
Grande-Bretagne et de 0,326 franc aux Etats-Unis. Le coût d'un appel
téléphonique interurbain pour trois minutes s'élève, en moyenne, à 5,10 francs
en France, à 2,84 francs aux Etats-Unis et à 1,44 franc en Grande-Bretagne. Il
s'agit de tarifs pour les particuliers : abonnements, appels urbain et
interurbain.
J'en viens au coût des appels internationaux. Naturellement, ceux-ci profitent
plus aux entreprises. Cependant, ne sommes-nous pas là pour les aider à être
présentes et compétitives sur le marché international ? Pour une entreprise, le
prix d'un appel international est de 13,06 francs en France, de 8,96 francs aux
Etats-Unis et de 6,30 francs en Grande-Bretagne. Et on nous répète depuis des
heures qu'un danger majeur pèse sur les tarifs, qui s'envoleraient,...
M. Gérard Delfau.
Mais oui !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
... et que les petits seraient spoliés. Voilà la réponse
tarifaire à ces arguments et le panier moyen.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 79, 80, 81, 82 et 83
?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'a rien à ajouter à une démonstration
aussi brillante, qui vient appuyer les thèses qu'il s'efforce de démontrer au
Sénat depuis près de deux jours. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable
sur l'ensemble de ces amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 79, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
92:
Nombre de votants | 307 |
Nombre de suffrages exprimés | 307 |
Majorité absolue des suffrages | 154 |
Pour l'adoption | 93 |
Contre | 214 |
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 82, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
M. Robert Pagès. Le groupe communiste républicain et citoyen votre contre.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - L'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 32-1
. - I. - Dans les conditions prévues par les dispositions
du présent code :
« 1° Les activités de télécommunications s'exercent librement, dans le respect
des autorisations et déclarations prévues au chapitre II, qui sont délivrées ou
vérifiées dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires
et proportionnées aux objectifs pousuivis ;
« 2° Le maintien et le développement du service public des télécommunications
défini au chapitre III, qui comprend notamment le droit de chacun au bénéfice
du service universel des télécommunications, sont garantis ;
« 3° La fonction de régulation du secteur des télécommunications est
indépendante de l'exploitation des réseaux et de la fourniture des services de
télécommunications. Elle est exercée au nom de l'Etat dans les conditions
prévues au chapitre IV par le ministre chargé des télécommunications et par
l'Autorité de régulation des télécommunications.
« II. - Le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation
des télécommunications veillent, dans le cadre de leurs attributions
respectives :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du
service public des télécommunications ;
« 2° A l'exercice, entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de
services de télécommunications, d'une concurrence effective, loyale et
bénéfique aux utilisateurs ;
« 3° Au développement de l'emploi, de l'innovation et de la compétitivité dans
le secteur des télécommunications ;
« 4° A la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et
d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les
utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la
concurrence ;
« 5° Au respect par les opérateurs de télécommunications du secret des
correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages
transmis ;
« 6° Au respect, par les exploitants de réseaux et les fournisseurs de
services de télécommunications, des obligations de défense et de sécurité
publique. »
Sur cet article, la parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après
l'article 1er qui tendait à modifier certaines définitions sur lesquelles
s'appuie la réglementation, nous entrons, avec l'article 2, au coeur du
dispositif de déréglementation que nous propose le Gouvernement.
En effet, l'article 2 tend à fixer le cadre général en modifiant de fond en
comble l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications.
Alors que dans son texte actuel l'article L. 32-1 affirme d'entrée l'autorité
de l'Etat sur le secteur des télécommunications, ce qui signifie donc que c'est
de l'autorité de l'Etat que procède l'ensemble de l'organisation du secteur, la
nouvelle rédaction de l'article L. 32-1 opère un renversement total de cette
logique, le principe premier étant désormais que « les activités de
télécommunications s'exercent librement » même si c'est « dans le respect des
autorisations et déclarations prévues au chapitre II ».
Certes, l'objectif de maintien et de développement du service public est
ensuite affirmé dans le 2° de l'article L. 32-1, mais il est subordonné à la
libéralisation des marchés ; on est ramené au « droit de chacun au service
universel », c'est-à-dire à un service minimum pour tous, avec une domination
de la logique privée sur les grands services modernes. En bonne logique
libérale, l'intervention de l'autorité publique est réduite au rôle de simple
régulateur du marché.
C'est la définition de cette régulation qui est prévue par le 3° du nouvel
article L. 32-1 ; il prévoit que cette activité de régulation soit confiée non
seulement au ministre chargé des télécommunications, mais, aussi, et c'est la
nouveauté, à une « autorité de régulation des télécommunications », l'ART.
Cette autorité qui, malgré ce qui a été affirmé, ne sera ni indépendante ni
transparente, ne défendra ni l'intérêt national, ni celui des consommateurs,
mais celui des opérateurs, en particulier privé.
Composé de trois personnes nommées de manière irrévocable par le Gouvernement,
cette autorité, entièrement indépendante de la puissance publique, risque, dans
un contexte de déréglementation généralisée, de pousser toujours plus loin le
feu de la privatisation, de l'ouverture internationale et de la guerre
économique.
S'agissant des télécommunications, on passe d'une maîtrise nationale du
secteur, - en l'occurrence ce rôle est exercé par l'Etat - à une maîtrise par
le marché.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen propose de
supprimer l'article 2.
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi bouleverse un équilibre datant des années soixante et consistant à
pratiquer pour les abonnements et les communications locales un tarif minoré
par rapport aux prix des communications interurbaines et internationales.
Cette péréquation sociale a permis à notre pays de rendre le téléphone
réellement accessible à tous en un laps de temps très court, de rattraper le
retard pris et de réaliser l'un des réseaux les plus modernes du monde.
La péréquation géographique, quant à elle, recoupe un tarif identique de
l'abonnement quel que soit le lieu dans lequel il est souscrit et une même taxe
de base quelle que soit la zone. Mais c'est surtout le même tarif pour une
distance équivalente. Cette égalité de traitement des usagers constitue
indéniablement un élément essentiel d'une politique d'aménagement du territoire
permettant une véritable cohésion nationale.
Les chiffres sont là pour le prouver : l'abonnement et les communications
locales représentent près de 90 p. 100 de la facture moyenne d'un abonné
résidentiel ; le pourcentage des lignes numérisées est de 86 p. 100 en France,
contre 75 p. 100 en Grande-Bretagne et 66 p. 100 aux Etats-Unis.
La privatisation envisagée et la libéralisation du secteur des
télécommunications accéléreront la politique tarifaire commencée en 1994 et se
traduiront incontestablement par une hausse de la dépense de téléphone pour les
revenus modestes. Au-delà, l'accès aux nouvelles technologies de
télécommunications sera réglé par des critères financiers, alors que l'on
devrait, au contraire, essayer d'enrichir la péréquation sociale.
Votre projet de loi, en effet, en acceptant l'idée d'un service public découpé
en trois niveaux, tourne le dos à cet objectif, qui tend à faire partager dans
les meilleures conditions possibles, sans discrimination liée au revenu, les
nouveaux moyens de communication, à offrir la possibilité au plus grand nombre
d'accéder et de maîtriser les nouvelles technologies qui feront la
communication de demain.
Il entérine la logique maastrichtienne qui privilégie le droit de la
concurrence et néglige presque complètement la notion de service public.
De fait, le secteur des télécommunications, comme celui des services postaux
ou celui des réseaux ferroviaires, est un exemple édifiant de la conception
ultralibérale qui prévaut en matière de construction communautaire.
Alors que le traité de Rome excluait le secteur des télécommunications des
compétences de la Communauté économique européenne, la Communauté s'est
progressivement intéressée à ce domaine en se référant à l'objectif défini par
l'Acte unique et visant à construire un grand marché intérieur.
Poursuivant ce processus, le traité signé à Maastricht le 7 février 1992 a
donné compétence à la Communauté pour établir et développer les réseaux
transeuropéens dans le secteur des télécommunications.
Dans le même temps, la Commission européenne s'est saisie du dossier de
manière contestable et contestée. L'article 90-3 du même traité lui permet, en
effet, d'adresser aux Etats membres des directives ou décisions afin de faire
appliquer les règles communautaires en matière de concurrence.
C'est sur le fondement de cette prérogative législative qu'ont été prises les
principales directives du secteur des télécommunications. C'est également
l'article 90-3 que la Commission européenne envisage, à intervalles réguliers,
d'appliquer afin de faire adopter les directives sur le marché intérieur de
l'électricité et du gaz.
C'est pourquoi nous demandons au Gouvernement d'intervenir pour la suppression
de cet article à l'occasion de la conférence intergouvernementale qui se
déroule en ce moment. M. Borotra était d'ailleurs favorable à cette abrogation.
Qu'en est-il aujourd'hui ?
Dans ce cadre européen, comment la péréquation géographique, comme la
péréquation sociale, sera-t-elle assurée alors que le texte que vous nous
proposez stipule, en termes très vagues, qu'il faudrait « éviter une
discrimination fondée sur la localisation géographique » et n'évoque que de
façon très générale la nécessité et l'urgence de « l'accès de tous » en le
fondant sur l'impératif vague de pratiquer un « prix abordable » permettant de
résorber « les déséquilibres tarifaires au regard du fonctionnement réel du
marché » ?
Cela signifiera concrètement - à plus ou moins long terme, monsieur le
ministre, lorsque seront passés les effets de conquête du public - une
augmentation des tarifs à la charge des ménages et des petits
professionnels.
C'est cela que nous contestons, cette logique destructrice, porteuse
d'inégalités et d'exclusion.
M. le président.
Sur l'article 2, je suis saisi d'un certain nombre d'amendements qui peuvent
faire l'objet d'une discussion commune ; mais, pour la clarté du débat, je les
appellerai les uns après les autres.
Par amendement n° 84, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet
amendement vise à la suppression d'un des principaux articles de ce texte qui
prévoit et organise la déréglementation du secteur des télécommunications et
met gravement en cause l'exercice des missions de services publics.
L'opérateur historique France Télécom serait ainsi privé de l'essentiel de ses
capacités de développement et devrait non seulement permettre, mais également
organiser l'utilisation de ses réseaux, qui, je le rappelle, ont été financés
par les usagers et par les contribuables.
Contrairement aux affirmations du Gouvernement et de sa majorité, nous sommes
bien confrontés à une entreprise de démembrement du service public à la
française et de déstabilisation de l'entreprise publique qui devra, sous
l'effet des dispositions, se replier sur les activités les moins rentables
financièrement et renoncer, par conséquent, à toute politique audacieuse de
développement.
Nous ne pouvons donc en aucune manière accepter le dispositif de cet article
2, qui sera préjudiciable tant à l'emploi qu'aux consommateurs de
communications locales.
Rares sont en effet ceux de nos concitoyens qui ont à téléphoner pour leurs
besoins personnels à New York, à Los Angeles, à Tokyo, ou, plus près de nous, à
Londres, à Berlin ou à Stockholm.
Or ce sont précisément ces communications longues distances que l'on prétend
vouloir favoriser le plus par ce texte, et ce au détriment des communications
de proximité que nos compatriotes sont amenés à utiliser fréquemment pour
téléphoner pour des raisons personnelles ou professionnelles.
Nous refusons une telle orientation.
C'est donc pour l'ensemble de ces raisons que nous demandons la suppression de
l'article 2.
(Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Par amendement n° 85, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le deuxième
alinéa (1°) du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.
32-1 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet
amendement tend à supprimer le deuxième alinéa du paragraphe I du texte proposé
pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications.
En effet, ce paragraphe introduit pour la première fois dans le texte du
projet de loi le principe de déréglementation du secteur des
télécommunications. Permettez-moi de citer l'alinéa dont nous proposons la
suppression :
« Les activités de télécommunications s'exercent librement, dans le respect
des autorisations et déclarations prévues au chapitre II, qui sont délivrées ou
vérifiées dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires
et proportionnées aux objectifs poursuivis. »
Cet alinéa pose donc le principe du libre exercice des activités de
télécommunications. Il rappelle les principes imposés par les directives
européennes.
Vous comprendrez, mes chers collègues, que le groupe communiste républicain et
citoyen s'oppose à un tel texte qui pose juridiquement le principe du libre
exercice des activités de télécommunications pour les entreprises privées et
entérine en fait la suppression du monopole de service public détenu par France
Télécom.
Une telle disposition serait à terme lourde de conséquences pour les usagers,
pour l'emploi et pour le développement des télécommunications dans notre
pays.
Ce jugement se fonde notamment sur les conséquences de la privatisation des
télécommunications dans d'autres pays.
Prenons, par exemple, le bilan de cette privatisation au Royaume-Uni : BT est
aujourd'hui la plus grande société privée en Grande-Bretagne ; les énormes
bénéfices réalisés le sont au profit beaucoup plus des directeurs et des
actionnaires que des petits consommateurs.
Pendant que sir Jan Vallance, le président de la société, s'octroie, en 1995,
un salaire astronomique de plusieurs millions de francs,...
M. Gérard Delfau.
Eh oui !
M. Guy Fischer.
... BT a supprimé des dizaines de milliers d'emplois.
M. Gérard Delfau.
Eh oui !
M. Guy Fischer.
Dans son rapport sur les services publics, l'ancien député Franck Borotra
chiffrait d'ailleurs à 150 000 la perte d'emplois.
Mme Hélène Luc.
Absolument !
M. Guy Fischer.
De 230 000 personnes employées en 1990, BT prévoit de n'en garder bientôt que
100 000 !
Des rapports internes de plusieurs années ont révélé une baisse du moral des
salariés de l'entreprise.
Enfin, parmi les clients, ce sont essentiellement les grandes entreprises qui
sont favorisées par le tarif.
La politique suivie par BT est en effet de faire payer davantage les sept
millions d'abonnés qui ont le téléphone chez eux et d'accorder des rabais aux
grands usagers.
Notons au passage que l'expérience de la concurrence est largement
artificielle. Après plus de dix ans, BT possède environ 90 p. 100 de parts du
marché. Voilà la vérité !
Mais, en fait, l'objectif prioritaire semble moins l'instauration d'une
concurrence interne que l'internationalisation des opérateurs nationaux sur le
modèle d'ATT démembré aux Etats-Unis, dont l'objectif est d'atteindre 50 p. 100
de son chiffre d'affaires à l'extérieur des Etats-Unis, ou de BT, qui vise 10
p. 100 du marché européen.
Il n'y a rien d'étonnant à constater que la Grande-Bretagne, une fois de plus,
a servi de « cheval de Troie » à une politique dérégulatrice.
On a privatisé BT en même temps qu'ATT, mais c'est le Sud - l'Italie et
l'Espagne - qui a accueilli ATT.
L'Europe va-t-elle devenir un champ de bataille entre opérateurs nationaux de
télécommunications au bénéfice de pays comme les Etats-Unis ou le Japon qui ont
dérégulé en fermant leurs marchés à la pénétration européenne ? Poser la
question, c'est évidemment y répondre !
L'expérience britannique prouve, s'il en était besoin, combien est néfaste une
ouverture à la concurrence d'un secteur qui exige au contraire une maîtrise
publique, afin de répondre aux besoins de tous les citoyens.
C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d'approuver cet
amendement.
(Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Par amendement n° 140, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier,
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le deuxième
alinéa (1°) du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.
32-1 du code des postes et télécommunications, après le mot : « respect »,
d'insérer les mots : « des principes du service public et ».
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Cet amendement vise à rappeler que le principe du service public est de même
valeur que celui de la libre concurrence.
Vous prétendez, monsieur le ministre, avoir voulu préserver le service public
par ce projet de loi. Vous vous prévalez, si je vous ai bien entendu, du fait
de l'avoir pour la première fois inscrit et défini dans un projet de loi. Le
Gouvernement auquel vous appartenez entendait même, en décembre dernier,
inscrire ce principe dans la Constitution, ainsi que dans le texte du traité
sur l'Union européenne. L'amendement n° 140 devrait donc être adopté à
l'unanimité par le Sénat !
(Sourires.)
M. le président.
Par amendement n° 86, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le troisième alinéa
(2°) du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1
du code des postes et télécommunications, de supprimer les mots : « défini au
chapitre III, qui comprend notamment le droit de chacun au bénéfice du service
universel des télécommunications, ».
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
L'article 2 du projet de loi vise à modifier le texte proposé pour l'article
L. 32-1 du code des postes et télécommunications, qui définit le cadre général
de la législation sur les télécommunications et les principes qui la
sous-tendent.
Le texte tend ainsi à introduire une notion nouvelle dans le droit français,
celle de « service universel ».
Permettez-moi, à propos du principe d'universalité, de faire la citation
suivante, monsieur le ministre, mes chers collègues : « Il ne sert à rien de
garantir une desserte universelle s'il y a éviction des usagers par les prix.
Or, la commission entend manifestement remettre rapidement et totalement en
cause la péréquation implicite entre les tarifs locaux et les tarifs longue
distance.
« La commission souhaite notamment une augmentation très rapide et forte du
coût des communications locales, afin d'accroître la concurrence, au détriment
naturellement des consommateurs de base, qui ne passent pas majoritairement des
appels internationaux. Les réactions hostiles à la dernière opération de
"rééquilibrage" lancée par France Télécom en témoignent, si besoin
était. La totale égalité entre la tarification et les coûts serait socialement
encore plus douloureuse, puisque environ 60 p. 100 des ménages font perdre de
l'argent à France Télécom ! »
Ce texte est extrait d'un paragraphe relatif au service public dans les
télécommunications, dont le titre était pour le moins édifiant : en faisant
référence aux propositions de directive de la Commission européenne, il parlait
en effet de « l'accès de tous au téléphone menacé ».
Le paragraphe que j'ai lu est extrait d'un rapport d'information, éminemment
intéressant, enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 6 octobre
1995. Déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union
européenne, son auteur n'était autre que l'actuel ministre de l'industrie, de
La Poste et des télécommunications, M. Borotra, alors député.
Pouvez-vous m'expliquer, monsieur le ministre, en quoi le projet de loi que
vous nous soumettez aujourd'hui a levé les craintes et permettra d'éviter les
graves dangers que vous évoquiez il y a moins d'un an ?
Je ferai une autre citation : « Si des adaptations sont impératives pour
lutter contre l'exclusion sociale et territoriale, la société doit plus que
jamais pouvoir s'appuyer sur des services publics qui répondent aux attentes
des citoyens. Le service public, que certains estiment dépassé, est donc plus
que jamais d'actualité. »
Partageant cette réflexion de M. Philippe Séguin, qui figure dans
l'introduction du rapport précité,...
M. Gérard Braun.
Très bonnes références !
M. Robert Pagès.
... nous proposons au Sénat de supprimer la référence à la notion britannique
de « service universel ».
Cette notion, éminemment réductrice par rapport à la notion de service public,
ne permettrait pas, si elle devait se substituer à la conception du service
public « à la française », de garantir l'égalité de traitement des citoyens et
la solidarité entre les différentes catégories d'usagers. Mais nous aurons
l'occasion, au cours de l'examen de l'article 5 du projet de loi, de revenir
sur ces questions essentielles.
Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, nous vous
demandons d'adopter l'amendement n° 86, dont je ne doute pas qu'il aurait été
voté, entre autres, par M. Borotra, à l'Assemblée nationale, et par la majorité
des parlementaires membres de la délégation pour l'Union européenne en octobre
dernier.
M. Gérard Braun.
Nous sommes au Sénat, non à l'Assemblée nationale !
M. le président.
Les deux amendements suivants sont présentés par Mme Pourtaud, MM. Charzat,
Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 142 tend, dans l'avant-dernier alinéa (2°) du paragraphe I du
texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et
télécommunications, à supprimer les mots : « , qui comprend notamment le droit
de chacun au bénéfice du service universel des télécommunications, ».
L'amendement n° 141 vise à insérer, après le troisième alinéa (2°) du
paragraphe I du texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code
des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Les droits des usagers sont garantis par l'accès à un abonnement de prix
abordable, soumis à une péréquation en fonction de la situation sociale des
usagers et dont l'augmentation suit l'évolution du pouvoir d'achat des ménages,
la fourniture à un prix abordable de factures détaillées et l'obligation pour
l'opérateur, en cas de non-paiement des factures de téléphone, de proposer
avant toute interruption de fourniture une réduction des services offerts. »
La parole est à Mme Pourtaud, pour défendre ces deux amendements.
Mme Danièle Pourtaud.
L'amendement n° 142 a pour objet d'affirmer que la notion de service public se
suffit à elle-même et ne nécessite nulle référence à un autre concept emprunté
au droit européen, c'est-à-dire le service universel.
Quant à l'amendement n° 141, il donne sa juste place aux droits de l'usager.
En effet, dans les termes où elle est proposée, la réforme de la réglementation
des télécommunications ne fait aucune place à l'usager, alors que c'est en
dernier ressort pour le bénéfice de ce dernier qu'elle doit être conçue.
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 87, est présenté par MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite,
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Le second, n° 143, est déposé par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et
Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, dans la seconde phrase du dernier alinéa (3°) du paragraphe
I du texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et
télécommunications, à supprimer les mots : « et par l'Autorité de régulation
des télécommunications ».
La parole est à Mme Luc, pour défendre l'amendement n° 87.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte
proposé pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications nous
permet d'appréhender l'existence d'une nouvelle instance de régulation,
dénommée « autorité de régulation des télécommunications ».
A l'instar du Conseil supérieur de l'audiovisuel pour les services de
communication audiovisuelle, cette autorité serait donc en charge de faire
respecter, pour le compte de l'Etat, les règles déontologiques en vigueur de
par la loi et le code pour ce qui concerne les prestations de services de
télécommunications.
Il arrive très souvent, s'agissant notamment des projets de loi les plus
sensibles, que le Gouvernement estime nécessaire la création d'une instance de
régulation afin de faire respecter des règles qui, dans les faits, sont amenées
à être profondément modifiées au regard des dispositions existantes.
Pour autant, cette abondance croissante d'autorités de régulation pose un
certain nombre de questions de fond.
La première, et non la moindre, est celle qui est posée par le principe même
de l'existence d'une telle autorité, conseil supérieur ou je ne sais quel
comité ou haut comité.
A chaque fois, l'Etat se dessaisit sur un organisme non élu, dont les membres
sont non pas investis par le suffrage universel mais seulement désignés par les
représentants de la nation, d'une part de ses responsablités.
En fait, ce processus ces réduit le pouvoir même des élus de la nation, étant
entendu, par exemple, que les assemblées parlementaires n'ont pas d'autres
droits, en matière d'instance de régulation, que de voir leurs présidents
respectifs désigner une partie des membres de telle ou telle institution
nouvelle.
En réalité, l'indépendance de cet organisme n'est qu'apparente.
La deuxième question posée par la création d'une telle autorité est celle de
la régulation.
A la limite, on peut se demander pourquoi on a pu vivre, dans notre pays,
depuis tant d'années, avec une administration des postes et télécommunications
placée, d'abord, sous tutelle directe du Gouvernement, puis, depuis 1990, mise
en situation d'exploitant public, sans que cela ne légitime la mise en place de
la moindre autorité de régulation.
Et si cette situation provenait tout simplement du fait que France Télécom n'a
rien fait d'autre, dans le passé, que de répondre aux exigences de la politique
nationale de développement des infrastructures de communication ! Elle l'a
d'ailleurs accompli dans un contexte financier particulier, à savoir le
versement quasi intégral, dans un premier temps, des résultats d'exploitation
au budget général de l'Etat, puis, depuis 1994, au travers d'une contribution à
l'équilibre de ce budget particulièrement significative au titre de l'impôt sur
les sociétés, de la taxe sur la valeur ajoutée ou de la taxe
professionnelle.
L'instance de régulation avait-elle une raison d'être lorsque, l'espace de
deux secondes, un beau jour d'octobre 1986, France Télécom fut capable de
procéder, de par son avance technologique, à la renumérotation de l'ensemble
des lignes existantes par modification des zones de tarification ?
M. Gérard Delfau.
Très bien !
Mme Hélène Luc.
Les citoyens sont-ils si peu satisfaits de la mission de service public
accomplie par France Télécom qu'il y aurait matière à leur proposer la mise en
place d'une autorité de contrôle susceptible de recevoir leurs doléances ? Cela
n'est pas du tout notre avis, monsieur le ministre, et c'est pourquoi nous
sommes contre.
La vraie question, c'est que le fait d'édicter de nouvelles règles en matière
de télécommunications aura comme conséquence principale de les voir
régulièrement transgressées par ceux qui guettent depuis de longues années le
juteux et prometteur marché des télécommunications.
Il y a, en ce domaine, de l'argent à faire prospérer, et même beaucoup
d'argent, ce qui implique que l'on décide, en fait, de procéder d'une façon
relativement simple.
Dans un premier temps, l'Etat définit des règles, aussi générales
qu'apparemment précises.
Dans un deuxième temps, il confie à une autorité non élue le soin de les faire
respecter et la responsabilité, par ailleurs, de choisir les acteurs du nouveau
marché ouvert.
Dans un troisième temps, la guerre commerciale fait rage, à grands coups
d'investissements publicitaires coûteux, de basses manoeuvres diverses et
variées, qui n'éveillent en général que des remontrances bien senties de
l'autorité de régulation, sans autre conséquence sur la poursuite de la
compétition ouverte.
En général, le perdant, dans ces cas-là - on peut dire dans tous les cas -
c'est le service rendu à la population, l'usager ou le citoyen ne devenant
qu'un client ou un segment de la part de marché qu'il faut conquérir.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, sous le bénéfice de ces
observations, il ne nous semble pas nécessaire de confier le devenir de notre
secteur des télécommunications à une autorité non élue, confisquant le droit de
décider en la matière aux représentants légitimes de notre peuple. C'est
pourquoi nous vous demandons d'adopter notre amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Pourtaud, pour présenter l'amendement n° 143.
Mme Danièle Pourtaud.
Le motif de cet amendement, qui a pour objet de manifester une préférence pour
la notion de régulation d'Etat sur celle d'autorité de régulation indépendante
dans les télécommunications, a été exprimé avec justesse comme l'a indiqué un
de mes collègues, sous la plume de M. Franck Borotra, député, dans le rapport
qu'il avait remis dans le cadre de la délégation à l'Union européenne de
l'Assemblée nationale le 6 octobre 1995.
Le titre de ce rapport, à l'époque provocateur, aujourd'hui, hélas !
prophétique était : « Faut-il défendre le service public ? » M. Borotra y
écrivait : « Le système des régulateurs est un concept anglo-saxon étranger à
notre culture. » On ne saurait mieux dire !
Mais, plus précisément, l'article L. 32-1 dont nous traitons pose le principe
de l'indépendance de la régulation du secteur des télécommunications.
Or, bien qu'il pose ce principe, le projet de loi ne permet pas de le faire
respecter : la création de l'Autorité de régulation des télécommunications en
fournit la preuve.
En effet, assurer l'indépendance, c'est satisfaire aux principes de
neutralité, de transparence et d'égalité. Or ces trois principes ne sont pas
respectés. Il s'agit d'une fausse neutralité, puisque les membres de l'autorité
sont nommés par le Gouvernement et puisque ce ne seront pas des fonctionnaires
qui, par définition, sont tenus au respect de ce principe, qui en seront
membres.
On constate également une absence de transparence, car les avis de l'Autorité
de régulation des télécommunications sont rarement rendus publics.
Enfin, le principe d'égalité n'est pas observé, puisque l'objet de ce projet
de loi est non pas de garantir un service public des télécommunications
performant pour tous, mais de faire entrer sur ce marché de nouveaux
opérateurs.
Neutralité, transparence, égalité, autant de principes dont la défense relève
par essence, à nos yeux, des missions de l'Etat, mais que malheureusement il
n'assurera plus.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Par amendement n° 88, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le
premier alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 2 pour
l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications :
« II. - Le ministre chargé des télécommunications veille : ».
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Cet amendement tend à réserver au ministre chargé des télécommunications un
certain nombre de fonctions qu'il ne doit pas partager avec une quelconque
autre autorité.
L'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications dipose, dans la
rédaction actuelle de son paragraphe II : « Le ministre chargé des
télécommunications et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent,
dans le cadre de leurs attributions respectives :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du
service public des télécommunications ;
« 2° A l'exercice, entre les exploitants du réseau et les fournisseurs de
services de télécommunications, d'une concurrence effective, loyale, et
bénéfique aux utilisateurs ;
« 3° Au développement de l'emploi, de l'innovation et de la compétitivité dans
le secteur des télécommunications ;
« 4° A la définition des conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et
d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les
utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la
concurrence ;
« 5° Au respect par les opérateurs de télécommunications du secret des
correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages
transmis ;
« 6° Au respect, par les exploitants de réseaux et les fournisseurs de
services de télécommunications, des obligations de défense et de sécurité
publique. »
A y regarder de plus près, on en vient, en fait, à se poser une question de
fond.
L'ensemble des missions et des principes définis par cet article a, en effet,
de longue date et de manière permanente, été inscrit dans ce que l'on peut
appeler le cahier des charges.
La démarche nationale de planification a, dans les faits, pleinement intégré,
pour l'administration des postes et télécommunications, puis pour France
Télécom, à compter de la réforme de 1990, les principes que prétend exposer
l'article L. 32-1.
Le moins que l'on puisse dire est que l'objectif a été largement atteint,
l'indice d'équipement des ménages étant désormais particulièrement élevé,
tandis que l'on ne peut reprocher aux salariés de France Télécom de ne pas
mettre en oeuvre l'ensemble de leurs compétences pour répondre, dans les délais
les meilleurs, aux dysfonctionnements éventuels du réseau.
La meilleure preuve de ce processus ne nous est-elle pas fournie par la
perspective très proche d'une nouvelle modification de la numérotation des
abonnés, qui interviendra en fin d'année, et qui témoigne de la haute maîtrise
technologique de l'exploitant public ?
A moins que l'un des objectifs de cette nouvelle numérotation ne soit d'offrir
des lignes disponibles aux opérateurs du secteur privé habilités demain, par la
loi, à intervenir sur les réseaux...
Tirons le fil jusqu'au bout et interrogeons-nous sur le fait que cette
nouvelle numérotation ne soit qu'une « composante du service public de
télécommunications » ou encore une condition de « l'exercice d'une concurrence
effective, loyale et bénéfique aux utilisateurs » consistant à faire supporter
au seul exploitant public la charge des investissements nécessaires à la mise
en place de cette technologie nouvelle.
Nous ne le répéterons jamais assez : l'existence du monopole de France Télécom
n'a jamais constitué un obstacle à l'innovation technologique et au
développement de l'emploi.
La meilleure preuve en est fournie par le simple fait que France Télécom et,
avant elle, l'administration des postes et télécommunications disposaient des
moyens d'expérimentation des nouvelles technologies de par leur fonction
sociale et économique même.
Sur les principes mêmes qui guident la rédaction de l'article L. 32-1, force
est de constater que le projet de loi fait le choix du doublon.
Au pouvoir du ministre, ce qui est tout à fait concevable dans notre tradition
nationale, s'ajoute celui de la nouvelle autorité prétendument indépendante qui
va se nommer « autorité de régulation des télécommunications ».
Permettez-nous de nous interroger sur une autorité indépendante qui n'aura de
compte à rendre à personne, et au premier chef aux salariés eux-mêmes du
secteur des télécommunications ; elle pourra, au gré des changements de
majorité politique, continuer de peser sur les choix nationaux susceptibles
d'être effectués en matière de développement d'infrastructures de
communication.
Depuis la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire, dont le rapporteur fut, pour une part, l'auteur, notre pays est
doté d'un schéma national des télécommunications.
Ce schéma sera-t-il demain respecté par les opérateurs et sera-t-il opposable
aux orientations fixées par tel ou tel opérateur dès lors que ses choix n'y
répondront pas ?
En particulier, quel intérêt y aura-t-il pour un opérateur en téléphonie
mobile à investir largement les zones rurales de notre pays ?
L'autorité de régulation des télécommunications ira-t-elle jusqu'à suspendre
l'activité d'un opérateur s'il manque gravement aux obligations de son cahier
de charges ?
Mais, surtout, pourquoi une autorité dite indépendante de plus ?
Et que fait-on de la simple consultation des premiers intéressés, personnels
ou usagers ?
C'est la raison pour laquelle, je vous invite, mes chers collègues, à adopter
cet amendement.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Mes chers collègues, étant encore saisis de plusieurs amendements sur
l'article 2, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à
vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures, sous la
présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt.)
PRÉSIDENCE DE
M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de réglementation des
télécommunications.
Dans la discussion des articles, le Sénat en est parvenu, au sein de l'article
2, à l'amendement n° 1.
Présenté par M. Gérard Larcher, au nom de la commission, cet amendement a pour
objet de rédiger ainsi le 2° du II du texte présenté par l'article 2 pour
l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications :
« 2° A l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et
loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de
télécommunications ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet d'inverser certains termes
contenus dans l'article 2 pour souligner que la concurrence doit s'exercer
d'abord au bénéfice des utilisateurs.
M. le président.
Par amendement n° 144, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le II du
texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et
télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« A l'équilibre des conditions de fourniture des réseaux et services de
télécommunications, en promouvant des offres de services de télécommunications
non discriminatoires et ouvertes au plus large public. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Cet amendement tend à compléter les missions confiées au ministre chargé des
télécommunications et à l'autorité de régulation. Ceux-ci devront veiller à ce
qu'émergent des offres cohérentes et non discriminatoires en matière de
télécommunications, afin d'éviter que des fournisseurs de services ou des
opérateurs se placent sur des « niches » du marché pour procéder à un «
écrémage » préjudiciable à l'équilibre de l'ensemble.
Avec cet amendement et avec un certain nombre de ceux que nous présenterons
tout au long de ce débat, nous pouvons illustrer ce que nous n'avons cessé de
dire dans la discussion générale : nous craignons, en effet, que certains
opérateurs de service ne cherchent, en fait, qu'à utiliser au mieux les zones
les plus rentables, portant ainsi préjudice à l'équilibre de l'ensemble et
compromettant ce que nous continuons à appeler le service public.
M. le président.
Par amendement n° 145 Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le II du
texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-I du code des postes et
télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« A la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs dans
l'accès aux services et aux équipements. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Cet amendement tend également à compléter les missions confiées au ministre
chargé des télécommunications et à l'autorité de régulation, en réintroduisant
les grands absents que sont les collectivités territoriales.
Les auteurs de ce texte dit de réglementation des télécommunications semblent
en effet ignorer le rôle desdites collectivités en la matière et à quel point
elles sont trop souvent victimes de procédures un peu anarchiques, qui vont
parfois à l'encontre de l'intérêt réel de leurs administrés.
Il nous semble impossible que le Sénat ne profite pas de l'occasion que nous
lui offrons pour réaffirmer que, dans le partenariat nécessaire entre les
fournisseurs de services et les utilisateurs, les collectivités locales doivent
être directement intéressées et leur avis dûment enregistré et, dans la mesure
du possible, suivi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 84, 85, 140, 86, 142,
141, 87, 143, 88, 144 et 145 ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
L'article 2 organise la liberté des activités de
télécommunication et leur contrôle.
Nous sommes défavorables à l'amendement n° 84, car il tend à supprimer cet
article 2 et il vide le texte d'une partie de son contenu.
Nous sommes aussi défavorables à l'amendement n° 85, car l'exercice des
activités de télécommunication y est visé et son adoption viderait également le
texte d'une partie de son contenu.
L'amendement n° 140 a attiré l'attention de la commission. Il aurait pour
effet, en soumettant les concurrents de l'opérateur historique aux règles
imposées à ce dernier - et tout particulièrement au principe d'égalité, -
d'ôter tout contenu à la concurrence. L'égalité n'est pas l'égalitarisme ! Cet
amendement ayant pour effet d'empêcher l'émergence de nouveaux produits, nous y
sommes défavorables.
L'amendement n° 86 vise à supprimer la référence au service universel. A
l'évidence nous ne pouvons y être favorables.
Il en va de même de l'amendement n° 142, qui tend lui aussi à la suppression
du service universel.
L'amendement n° 141 est en partie satisfait par un amendement que nous
examinerons ultérieurement sur le caractère insaisissable, dans un certain
nombre de conditions, de la ligne téléphonique, véritable « fil de vie »
destiné à recevoir des appels d'urgence et qui constitue un acquis majeur dans
le cadre du service public. Cet amendement consacrera l'insaisissabilité d'une
telle ligne en cas de difficultés financières ou sociales tout en prévoyant la
fourniture à un prix abordable de factures détaillées.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire, un certain nombre d'opérateurs, notamment
en Grande-Bretagne, fournissent gratuitement de telles factures. Prévoir un
prix, fût-il abordable, pour les factures détaillées, c'est abdiquer face à ce
qui pourrait émerger du jeu de la concurrence.
Il en est de même du principe de fourniture à un prix abordable par rapport au
pouvoir d'achat des ménages, puisque l'on nous propose une augmentation, alors
que nous faisons le pari d'une baisse des tarifs.
Nous sommes donc défavorables à cet amendement. L'amendement n° 87 vise à
supprimer l'autorité de régulation des télécommunications, l'ART. Nous y sommes
défavorables.
L'amendement n° 143 ayant également pour objet de faire passer l'ART à la
trappe, nous y sommes défavorables.
L'amendement n° 88 vise à supprimer les compétences de l'autorité de
régulation s'agissant du contrôle, notamment, des principes fondant le respect
des droits de la concurrence. Nous y sommes défavorables.
L'amendement n° 144, présenté à l'instant par M. Delfau, vise à interdire ce
que l'on appelle « l'écrémage » auquel se livrent un certain nombre
d'opérateurs. En réalité, compte tenu de la manière dont il est rédigé, cette
interdiction est édictée dans de telles conditions qu'elle entrave toute
concurrence et abolit la diversité.
Dès le départ, nous avons souligné la nécessité d'un texte équilibré entre
l'opérateur historique et la concurrence. Nous sommes donc défavorables à cet
amendement.
L'amendement n° 145, enfin, précise utilement la portée du texte, notamment
les exigences essentielles qu'impose la prise en compte des contraintes
d'urbanismes et d'aménagement du territoire. Nous retrouverons d'ailleurs les
mêmes principes à l'article 6.
Nous sommes favorables à cet amendement, parce que l'aménagement du territoire
est l'une des préoccupations majeures de la commission et que cette
préoccupation, je le sais, est largement partagée par le Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 84, 85, 140, 86, 142,
141, 87, 143, 88, 1, 144 et 145 ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Les amendements n°s 84 et 85 visent à empêcher
l'ouverture à la concurrence, qui est l'objet même du texte qui vous est
soumis.
Nous avons déjà répondu aux arguments qui ont été avancés à plusieurs reprises
par les membres du groupe communiste républicain et citoyen. Dans les pays déjà
libéralisés, la concurrence a été source de création d'emplois, de baisse des
tarifs et d'augmentation du nombre de services.
La description qui nous a été faite de la Grande-Bretagne, où le téléphone
serait rare et cher, où les gens les plus modestes ne pourraient pas accéder
aux services, est tellement caricaturale que je ne peux pas croire qu'elle
corresponde réellement à l'opinion de ceux qui l'ont émise.
M. Guy Fischer.
Et qu'en pense M. Borotra ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Vous avez des références intéressantes ! Moi, j'en ai
d'autres, mais nous allons y venir.
L'amendement n° 140 vise lui aussi à soumettre aux obligations de service
public l'ensemble des opérateurs, alors que nous avons fait clairement le choix
- et je crois que c'est un choix qui va dans le sens de la garantie du service
public - de confier ledit service public à France Télécom, et seulement à
France Télécom.
Les amendements n°s 86 et 142 visent à supprimer la référence au service
universel. Votre référence constante est le rapport de M. Borotra - que vous
n'avez d'ailleurs pas tout à fait lu jusqu'au bout, mais j'aurai l'occassion
d'y revenir - alors que j'ai, pour ma part, une autre référence, qui est
l'introduction pour la première fois par M. Quilès, dans une résolution sur la
poste qu'il a fait adopter sous présidence française par le Conseil des
ministres européen d'Antibes, en septembre 1989, de la notion de service
universel.
Le Gouvernement n'a pas voulu réduire le service public au service universel,
puisque le service public, pour lui, c'est le service universel, plus le
service obligatoire, plus les missions d'intérêt général.
J'ajoute que nous avons fait figurer la notion de service universel dans ce
projet de loi parce qu'il s'agit d'une notion utile dans la mesure où elle
constitue, dans ce secteur, un socle commun à l'Europe.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, c'est notamment grâce à l'action des
gouvernements français depuis dix ans que le contenu du service universel dans
la réglementation européenne ne diffère pas de celui du service public et
repose sur les mêmes principes. Il serait dommage de ne pas inscrire dans cette
loi ce que signifie, pour nous, le service universel. C'est pourquoi le
Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Il est également défavorable à l'amendement n° 141, qui vise à énumérer les
droits des usagers. En effet, les usagers souhaitent que leurs droits soient
garantis et non pas définis d'une manière limitative.
D'ailleurs, la tentative de définition des droits est extrêmement périlleuse,
puisque vous oubliez un certain nombre de ces droits, tels le droit de ne pas
figurer sur un annuaire, le droit d'être indemnisé en cas d'interruption de
service. Vous faites ainsi la démonstration qu'une liste des droits des usagers
est un exercice périlleux et restrictif, et qu'il vaut mieux s'en tenir à la
définition générale que nous avons introduite.
Le Gouvernement est aussi défavorable aux amendements n°s 87, 143 et 88, qui
visent à supprimer l'autorité de régulation des télécommunications. C'est le
choix du Gouvernement de rester l'actionnaire majoritaire de France Télécom, ce
choix conduit à proposer la création d'une autorité de régulation des
télécommunications,
Le groupe communiste a souligné que cette autorité de régulation n'avait pas
été nécessaire dans le passé. Et pour cause, nous étions en situation de
monopole ! La régulation du marché n'a de sens, dans mon esprit, que lorsqu'il
y a concurrence.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 1, présenté par
M. Larcher, au nom de la commission des affaires économiques. La rédaction
proposée fait mieux ressortir que celle du Gouvernement que la concurrence doit
bénéficier aux utilisateurs.
Enfin, le Gouvernement est également favorable à l'amendement n° 145 du groupe
socialiste, qui reprend très exactement les termes de l'amendement n° 73 de Mme
Bardou.
Je note simplement, monsieur Delfau, que les collectivités locales, loin
d'avoir été oubliées dans le projet de loi, vont faire, pour la première fois,
l'objet du versement d'une redevance d'utilisation du service public par les
opérateurs, ce qui ne figurait ni dans la loi de 1990, ni dans les textes
précédents.
Mais il est une limite que nous ne devrions pas franchir. S'agissant de la
prise en compte de l'avis des collectivités locales sur la mise en place des
réseaux, il ne faudrait pas donner à celles-ci un pouvoir de régulation qui ne
permettrait pas l'établissement de réseaux nationaux, auxquels nous sommes
attachés. Mais je ne pense pas que ce soit votre intention.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 144.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 140, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 86, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 142, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 141.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Je voudrais revenir un instant sur cet amendement qui concerne les droits des
usagers.
Monsieur le ministre, vous nous dites que toute liste est périlleuse, et je
vous l'accorde bien volontiers. Mais l'absence des termes « droits des usagers
», l'absence de préoccupation à l'égard des usagers me paraît non seulement
périlleuse mais condamnable.
En fait, ce texte axé sur la concurrence - vous ne vous en cachez pas, c'est
votre litanie - concerne uniquement l'arrivée ou le développement d'opérateurs
privés dans le secteur des télécommunications.
Nous réaffirmons avec force que, pour être équilibré, dans la mesure où nous
ne sommes plus en présence d'un opérateur public disposant d'un quasi-monopole,
ce texte aurait dû définir un droit des usagers.
Je ferai d'ailleurs observer, et ce sera ma dernière remarque, que je parle
d'« usagers », conformément à une tradition républicaine s'agissant du service
public, et que vous parlez d'« utilisateurs », ce que je comprends d'ailleurs,
puisque vous vous placez dans l'optique de la stricte loi du marché. Mais la
nuance est d'importance.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je préciserai simplement, à l'adresse de M. Delfau, que
le terme d'« utilisateurs » est le terme consacré par la loi de 1990, à
laquelle je suis fidèle le plus souvent possible.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Ce n'est peut-être pas un terme républicain, mais enfin
!...
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 141, repoussé par la commission et le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 87 et 143, repoussés par la
commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
93:
Nombre de votants | 314 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 89 |
Contre | 225 |
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 88, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Félix Leyzour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Le grand mérite de cet amendement de la commission des affaires économiques et du Plan est, pour le moins, d'être clair.
Par son contenu et du fait que son auteur est M. le rapporteur, cet amendement revêt une grande importance et appelle une explication de vote.
En effet, après la discussion de l'article 1er, M. le rapporteur estime qu'il est indispensable de procéder à une réécriture du paragraphe II, 2°, de l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications qui ne constitue pas qu'un simple apport de portée rédactionnelle au projet de loi.
Or, l'amendement de M. le rapporteur - personne ne s'y sera trompé - est significatif de l'idéologie qui sous-tend une bonne partie de l'opération de déstabilisation du service public des télécommunications.
Il est vrai que le rapporteur du présent projet de loi est également l'auteur du rapport d'information qui a, pour une part essentielle, présidé à la conception du projet de statut de France Télécom.
Les organisations syndicales de France Télécom ne s'y sont d'ailleurs pas trompées en liant, dans le cadre de leur action revendicative, les deux textes précités, dont les objectifs ne sont, dans les faits, guère avouables.
Sous la plume d'un syndicaliste, on trouve d'ailleurs dans le journal d'information du syndidat Sud-PTT - je le signale parce qu'il a été indiqué qu'aucune organisation syndicale ne s'était élevée contre ce projet - un article intitulé : « Les contrevérités du sénateur Larcher » qui fait le florilège des arguments spécifiquement idéologiques accompagnant l'orientation imprimée par les deux projets de loi.
Ces arguments sont classiques : modification des technologies, possibilités nouvelles offertes pour la communication à l'échelle internationale par les nouveaux réseaux à haut débit, nécessité d'alliances stratégiques nécessitant souplesse des structures et abandon de garanties statuaires pour pouvoir se positionner sur les crénaux ouverts.
M. Larcher est devenu, dans cette assemblée, le porte-parole de la majorité de droite en matière de télécommunications. Il a déclaré être opposé aux amendements que mon groupe a déposés. Nous sommes, nous, opposés à l'amendement n° 1 qu'il vient de présenter et c'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen votera contre.
M. Paul Loridant. C'est un scoop ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur Leyzour, vous avez suivi avec beaucoup d'attention et d'intérêt l'ensemble des travaux que nous conduisons depuis le mois de novembre. Vous avez fait part de vos réflexions et apporté votre contribution au rapport.
M. Félix Leyzour. Tout à fait !
Mme Hélène Luc. M. Leyzour est toujours très assidu !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il est vrai que nous ne sommes pas parvenus sur le sujet aux mêmes conclusions même si, à certains moments, nos préoccupations étaient communes en matière de recherche et de développement d'un opérateur public fort.
En effet, nous, nous croyons que pour arriver à un opérateur public fort devenant l'opérateur historique, il ne faut pas procéder à un repli frileux sur soi-même. Il faut d'autant moins agir ainsi que, du fait des évolutions techniques, les frontières vont disparaître, que nous le souhaitions ou non. Il convient donc de s'adapter à ce monde nouveau et de se mettre en position de conquête.
Je vous remercie de l'hommage indirect que vous avez rendu à l'ensemble de la commission, à sa cohésion derrière son rapporteur. Il est normal, dans un secteur où nous travaillons en réseau, d'être le porte-parole du réseau de la majorité du Sénat, mais c'est pour moi un honneur dont je ne sais pas si je suis encore digne !
Plusieurs sénateurs du RPR. Mais si, mais si ! (Sourires.)
M. Gérard Delfau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, vous avez affirmé voilà un instant dans cet hémicycle que vous aviez repris le terme « utilisateurs » figurant dans la loi de 1990, que vous nous citez abondamment. Sans doute l'avez-vous fait à la suite d'une lecture un peu hâtive.
Or, dans le comparatif, je lis à l'alinéa 3 de l'article 2 de la loi de 1990 : « A ce que soit respecté, par l'exploitant public et les fournisseurs de services de télécommunications, le principe d'égalité de traitement des usagers, quel que soit le contenu du message transmis. » Dont acte, monsieur le ministre, il faudra compléter votre information !
Mais ce qui m'importe - j'en profite pour le dire, parce qu'après tout la plume peut hésiter - c'est qu'un alinéa complet précise : « Afin que soit respecté par l'exploitant public le principe d'égalité de traitement des usagers. » Autrement dit, la préoccupation des consommateurs, que l'on appelle ici, selon la tradition républicaine, des « usagers » puisqu'il s'agit d'un service public quasiment en fonction de monopole, est bien au centre ; en tout cas, elle est fort présente.
Vous et vos conseillers pouvez hâtivement compulser le texte que vous nous présentez, les usagers, consommateurs, utilisateurs sont les grands absents.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mais non !
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je ne consulte pas plus hâtivement que vous, monsieur Delfau, les pages de la loi du 29 décembre 1990, que je tiens à votre disposition et qui, dans son article L. 34-6, par exemple - mais j'ai trouvé quatre références -, prévoit que « les représentants des fournisseurs des services, des utilisateurs des services, ainsi que des personnalités qualifiées nommées par le ministre chargé des télécommunications font partie de la commission,... ».
Cela veut dire que le mot d'utilisateur est cité à plusieurs reprises dans la loi de 1990. S'il est chargé de tout le sens que vous lui donniez tout à l'heure, alors pourquoi se retrouve-t-il dans cette loi de 1990 ?
Mais je conviens que cette querelle est quelque peu dérisoire...
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. Gérard Delfau. Le vocabulaire a du sens !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
M. Gérard Delfau. Le groupe socialiste vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 144, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 145, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'ensemble de l'article 2.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. L'article 2, nous l'avons dit, est un article clef de ce texte de déréglementation.
M. le ministre et M. le rapporteur de la commission des affaires économiques ont insisté, au cours de la discussion générale et lors de la présentation des deux premiers articles, sur la nécessité de supprimer le monopole public de France Télécom en raison de la concurrence. Ils ont avancé l'argument selon lequel ce texte s'inscrivait dans une logique visant à promouvoir le service public.
Cette assertion nous paraît tout à fait contraire à la réalité, et les salariés des principaux services publics, qu'ils soient de France Télécom, d'EDF-GDF ou de la SNCF, soutenus par la très grande majorité des Français, ne s'y sont pas trompés.
Je voudrais revenir sur la question des tarifs, argument fort avancé de manière solennelle par M. le ministre et par notre rapporteur.
De ce point de vue, à cette heure un peu avancée de la nuit, je vous invite à consulter un hebdomadaire satyrique célèbre paraissant le mercredi.
M. Jean Delaneau. Francophile ?
Mme Danielle Bidard-Reydet. Il est écrit dans cet hebdomadaire, sous le titre « La fin du monopole de France Télécom va coûter de 8 à 12 milliards aux usagers » : « Pour préparer dignement la libéralisation du téléphone, prévue au 1er janvier 1998, les usagers risquent de devoir débourser de 8 à 12 milliards à petites doses. »
M. Gérard Braun. Ce n'est pas une certitude, c'est un risque !
M. Gérard Larcher, rapporteur. C'est de l'homéopathie !
Mme Danielle Bidard-Reydet. « Sans attendre, France Télécom vient déjà d'augmenter de 15 p. 100 le prix de ses abonnements, uniquement pour les particuliers, celui des entreprises restant inchangé. Certes, la loi prévoit que France Télécom et ses futurs concurrents devront, comme aujourd'hui, proposer des tarifs sociaux pour les plus démunis, un effort estimé entre 500 millions et 1 milliard de francs, mais qui reste une aumône en comparaison des 8 à 12 milliards de recettes supplémentaires prévus sur les abonnements et les communications locales. »
Cet hebdomadaire étant connu pour le sérieux de ses informations (Exclamations sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants), je vous renvoie à ses rédacteurs !
Mes chers collègues, ces quelques lignes qui ne proviennent pas de nos travées, vous en conviendrez,...
M. Jean-Patrick Courtois. Vous n'êtes pas assez bons !
Mme Danielle Bidard-Reydet. ... viennent à l'appui des longues démonstrations que nous avons faites au cours du débat et vous comprendrez que, ces éléments confortant notre position, nous voterons résolument contre cet article 2 sur lequel nous demandons un scrutin public. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Gérard Braun. Scrutin public demandé par le Canard enchaîné. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 2, modifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 94:
Nombre de votants | 316 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 223 |
Contre | 93 |
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - L'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications est
ainsi modifié :
« I. - Le premier alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Elle veille également au respect des principes du service public et
notamment du service universel dans le secteur des télécommunications. Outre
les avis, recommandations et suggestions qu'elle adresse au ministère dans les
domaines de sa compétence, elle peut être consultée par l'Autorité de
régulation des télécommunications et par les commissions permanentes de
l'Assemblée nationale et du Sénat sur les questions relevant de leurs
compétences spécifiques en matière de télécommunications. Elle peut saisir
l'Autorité de régulation des télécommunications sur des questions concernant la
compétence de cette autorité en matière de contrôle et de sanction du respect,
par les opérateurs, des obligations de service public et service universel
résultant des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont
applicables en vertu du présent code et des autorisations dont ils bénéficient.
»
« II. - Au deuxième alinéa, les mots : "aux articles L. 33-1, L. 33-2, L.
34-2, L. 34-3, L. 34-4 et L. 34-5 du présent code" sont remplacés par les
mots : "aux articles L. 33-1, L. 33-2, L. 34-1, L. 34-2, L. 34-3 et L.
34-4". »
« III. - Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Elle établit un rapport annuel qui est remis au Parlement et au Premier
ministre. Ce rapport comprendra obligatoirement un bilan de l'exercice du
service public des télécommunications comportant donc un chapitre concernant
particulièrement le service universel des télécommunications. Il est établi
après que la Commission supérieure du service public des postes et
télécommunications a pris connaissance du rapport annuel de l'Autorité de
régulation des télécommunications. »
Par amendement n° 2, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans
la deuxième phrase du deuxième alinéa du III de cet article, après les mots : «
du service public des télécommunications comportant », de supprimer le mot : «
donc ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 134, MM. Bourges et Courtois proposent de compléter
in
fine
la deuxième phrase du texte présenté par le III de l'article 3 pour
compléter l'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications par les
mots : « ainsi qu'un chapitre sur la mise en oeuvre des missions d'intérêt
général de service public définies au troisième alinéa de l'article L. 35-6.
»
La parole est à M. Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois.
Les missions de service public sont essentielles à la préservation et au
maintien d'opérations relevant de l'intérêt général du pays. Il est donc
nécessaire que les autorités publiques chargées de la gestion et du contrôle
des réseaux de télécommunications soient régulièrement informées des conditions
dans lesquelles ces missions de service public ont été assurées au cours de
l'année et il est nécessaire que cette obligation soit fixée par la loi.
Tel est le sens de cet amendement que je demande au Sénat de bien vouloir
adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La commission des affaires économiques et du Plan a estimé
pouvoir être favorable à cet amendement sous réserve d'une rectification. Elle
souhaiterait en effet que les mots « de service public » soient supprimés non
pas pour porter atteinte au service public, qui, je le rappelle, repose sur
trois piliers, le service universel, les services obligatoires et les missions
d'intérêt général, mais parce que la rédaction qui nous est proposée pourrait
laisser croire qu'il n'y a qu'un pilier ou qu'il y a un quatrième pilier de
service public.
M. le président.
Monsieur Courtois, acceptez-vous de rectifier ainsi votre amendement ?
M. Jean-Patrick Courtois.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 134 rectifié, présenté par MM. Bourges
et Courtois, et tendant à compléter
in fine
la deuxième phrase du texte
proposé par le paragraphe III de l'article 3 pour compléter l'article L. 32-2
du code des postes et télécommunications par les mots : « ainsi qu'un chapitre
sur la mise en oeuvre des missions d'intérêt général définies au troisième
alinéa de l'article L. 35-6. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 134 rectifié.
M. Félix Leyzour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Je n'ai pas très bien compris les explications de M. le rapporteur. Depuis le
début de ce débat, j'entend parler de l'intérêt qui est porté au service
public. Or, maintenant, M. le rapporteur demande une rectification consistant à
supprimer la référence au service public. Je ne perçois pas très bien la portée
de cette rectification, mais, en tout état de cause, nous voterons contre cet
amendement.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je rappellerai simplement à notre collègue, M. Félix Leyzour,
qu'à l'article 6 du projet de loi il est clairement précisé que « le service
public des télécommunications comprend le service universel des
télécommunications, les services obligatoires et les missions d'intérêt général
».
Vous voyez donc, mes chers collègues, que la rectification ne met nullement en
cause la définition du principe de service public.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
L'explication fournie par notre rapporteur ne peut être reçue.
La présentation, dont nous contestons le principe, qui vise à décomposer en
trois strates le service public fait que chacune de celles-ci est un élément du
service public.
Je ne comprends donc pas plus que mon collègue Félix Leyzour que, tout à coup,
il faille supprimer ce qui n'est qu'une reprise de la définition contenue dans
l'article 6 du projet de loi. Serait-ce une phobie qui se manifesterait ainsi ?
Mais je sais bien que ce n'est pas le cas.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 134 rectifié, accepté par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'article 3.
M. Félix Leyzour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
L'article 3 vise à adapter les missions de la commission supérieure du service
public des postes et télécommunications à la réforme. On nous a dit qu'il
complétait ces missions, mais vous comprendrez, mes chers collègues, que nous
n'avons pas la même lecture de ce texte que M. le ministre et M. le
rapporteur.
En effet, cette commission aura pour objet, désormais, de veiller au respect
des principes du service public et notamment du service universel dans le
secteur des télécommunications.
Avec la mention du service universel, nous avons plutôt l'impression que cette
commission aura en charge de veiller à l'application du service minimum.
Certes, par l'obligation qui est faite à la commission de remettre un rapport
au Parlement, on tente d'habiller ce choix du service minimum des atours de la
concertation. Il n'en reste pas moins que toutes les instances existantes et
celles que vous mettez en place sont conçues pour organiser l'ouverture des
réseaux et l'amoindrissement des services publics.
C'est la raison pour laquelle notre groupe votera contre l'article 3.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président.
Par amendement n° 206, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose
d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les troisième et quatrième alinéas de l'article 35 de la loi n° 90-568 du 2
juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des
télécommunications sont ainsi rédigés :
« - sept députés,
« - sept sénateurs, désignés par leurs assemblées respectives, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La loi de 1990 n'avait pas institué de parité dans la
représentation, au sein de la commission supérieure du service public de la
poste et des télécommunications, des deux chambres du Parlement. Nous
souhaitons aujourd'hui établir cette parité et qu'à cette commission siègent
sept députés et sept sénateurs. Cette disposition a également pour objet
d'élargir la représentation, donc la représentativité, des différentes
sensibilités qui existent au sein du Parlement.
Pour avoir participé aux travaux de cette commission, je puis dire qu'elle
fait depuis longtemps un bon travail en faveur du service public.
Ce fut une innovation utile de la loi de 1990.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Aujourd'hui, elle mérite d'être renforcée. C'est l'occasion
de réaffirmer le rôle de consultation, d'avis, d'information, de transparence
que cette commission a déjà joué et jouera demain pour la préservation et le
renforcement du service public.
Notre collègue M. Hérisson, qui siège au sein de cette commission, avait
préparé ce texte. En cet instant du débat, je tenais à lui rendre hommage pour
sa participation à l'ensemble de la réflexion que nous avons conduite depuis le
mois de novembre sur ce sujet.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage l'avis qui vient d'être formulé
par M. le rapporteur.
En effet, la commission supérieure du service public des postes et des
télécommunications joue un rôle tout à fait positif. Je note d'ailleurs qu'à ma
connaissance elle a donné un avis favorable, à l'unanimité de ses membres, sur
le projet de loi de réglementation des télécommunications. Mais mes
informations ne sont peut-être pas complètes sur ce sujet.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement a tenu le plus grand compte des
observations de cette commission dans la phase de préparation de ce texte.
Nous n'avions pas osé modifier la loi de 1990 quant à la composition de la
commission. Bien entendu, le Gouvernement ne voit que des avantages à ce que
l'Assemblée nationale et le Sénat soient représentés à parité.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 206.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Je souscris tout à fait à l'hommage qui a été rendu par M. le rapporteur à
cette commission mise en place par la loi de 1990 et qui joue effectivement un
rôle utile.
Monsieur le ministre, vous vous souvenez sans doute de mon mutisme lors de la
présentation du texte dont nous débattons, mutisme qui ne laissait pas, je
pense, augurer de grandes louanges. Vous m'aviez fait observer que je me
réservais pour l'hémicycle ; c'était le cas.
Pour revenir à l'essentiel, je dirai qu'il est nécessaire que les deux
assemblées du Parlement soient représentées à égalité. Je regrette évidemment
que le rôle de la commission sorte amoindri du projet de loi qui nous est
proposé, si du moins il est voté en l'état. En tout état de cause, il est
nécessaire qu'elle joue son rôle, et il est normal que le Sénat y soit
normalement représenté.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 206, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 3.
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - L'article L. 32-4 du code des postes et télécommunications est
ainsi modifié :
« I. - Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Pour l'accomplissement de leurs missions, le ministre chargé des
télécommunications et le président de l'Autorité de régulation des
télécommunications peuvent : ».
« II. - Au premier alinéa du 2°, les mots : "il désigne" sont
remplacés par les mots : "ils désignent".
« III. - Le début du deuxième alinéa du 2° est ainsi rédigé :
« Le ministre chargé des postes et télécommunications et le président de
l'Autorité de régulation des télécommunications veillent...
(Le reste sans
changement.) »
-
(Adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - Le chapitre II du titre Ier du livre II du code des postes et
télécommunications est ainsi rédigé :
« Chapitre II
« Régime juridique
« Section 1
« Réseaux
«
Art. L. 33.
- Les réseaux de télécommunications sont établis dans les
conditions déterminées par la présente section.
« Ne sont pas concernées par la présente section :
« 1° Les installations de l'Etat établies pour les besoins de la défense
nationale ou de la sécurité publique ou utilisant des bandes de fréquences ou
des fréquences attribuées par le Premier ministre à une administration pour les
besoins propres de celle-ci, en application de l'article 21 de la loi n°
86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;
« 2° Les installations mentionnées aux articles 10 et 34 de la même loi.
Celles de ces installations qui sont utilisées pour offrir au public des
services de télécommunications sont soumises aux dispositions du présent code
applicables à l'exploitation des réseaux ouverts au public, dans la seule
mesure nécessaire à leur offre de services de télécommunications.
«
Art. L. 33-1.
- I. - L'établissement et l'exploitation des réseaux
ouverts au public sont autorisés par le ministre chargé des
télécommunications.
« Cette autorisation ne peut être refusée que dans la mesure requise par la
sauvegarde de l'ordre public ou des besoins de la défense ou de la sécurité
publique, par les contraintes techniques inhérentes à la disponibilité des
fréquences, ou lorsque le demandeur n'a pas la capacité technique ou financière
de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice
de son activité, ou a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles
L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4.
« L'autorisation est soumise à l'application des règles contenues dans un
cahier des charges et portant sur :
«
a)
La nature, les caractéristiques, la zone de couverture et le
calendrier de déploiement du réseau ;
«
b)
Les conditions de permanence, de qualité et de disponibilité du
réseau ainsi que les modes d'accès, notamment au moyen de cabines établies sur
la voie publique ;
«
c)
Les conditions de confidentialité et de neutralité au regard des
messages transmis ;
«
d)
Les normes et spécifications du réseau et des services, notamment
européennes s'il y a lieu ;
«
e)
Les prescriptions exigées par la protection de l'environnement et
par les objectifs d'aménagement du territoire et d'urbanisme, comportant, le
cas échéant, les conditions d'occupation du domaine public et les modalités de
partage des infrastructures ;
«
f)
Les prescriptions exigées par la défense et la sécurité publique
;
«
g)
La contribution de l'exploitant à la recherche et à la formation
en matière de télécommunications ;
«
h)
L'utilisation des fréquences allouées et les redevances dues à ce
titre ainsi que pour les frais de leur gestion et de leur contrôle ;
«
i)
L'allocation de numéros et de blocs de numéros, les redevances
dues pour les frais de la gestion du plan de numérotation et de son contrôle,
dans les conditions de l'article L. 34-10 ;
«
j)
Les obligations du titulaire au titre du service universel dans
les conditions prévues aux articles L. 35-2 et L. 35-3 et au titre des services
obligatoires définis à l'article L. 35-5 ;
«
k)
La fourniture des informations nécessaires à la constitution de
l'annuaire universel prévu à l'article L. 35-4 ;
«
l)
Les droits et obligations de l'exploitant en matière
d'interconnexion ;
«
m)
Les conditions nécessaires pour assurer une concurrence loyale
;
«
n)
Les conditions nécessaires pour assurer l'équivalence de
traitement des opérateurs internationaux conformément aux dispositions des III
et IV ci-après ;
«
o)
Les conditions nécessaires pour assurer l'interopérabilité des
services ;
«
p)
Les obligations qui s'imposent à l'exploitant pour permettre le
contrôle du cahier des charges par l'Autorité de régulation des
télécommunications ;
«
q)
Les taxes dues pour la délivrance, la gestion et le contrôle de
l'autorisation, dans les conditions prévues par les lois de finances ;
«
r) Supprimé ;
«
s)
L'égalité de traitement et l'information des utilisateurs,
notamment sur les conditions contractuelles de fourniture du service,
comportant en particulier les compensations prévues pour le consommateur en cas
de manquement aux exigences de qualité précisées en
b.
« L'autorisation est délivrée pour une durée de quinze ans. Deux ans au moins
avant la date de son expiration, le ministre notifie au titulaire les
conditions de renouvellement de l'autorisation et les motifs d'un refus de
renouvellement. Dans les cas d'établissement ou d'exploitation de réseaux
expérimentaux, de modification ou d'adaptation de l'autorisation ou lorsque le
demandeur le propose, l'autorisation peut être délivrée pour une durée
inférieure à quinze ans ; le cahier des charges précise alors le délai minimal
dans lequel sont notifiés au titulaire les conditions de renouvellement de
l'autorisation et les motifs d'un refus de renouvellement.
« Un décret, pris après avis de la Commission supérieure du service public des
postes et télécommunications, précise celles des clauses énumérées plus haut
qui doivent être conformes à des clauses types dont il détermine le contenu.
Les dispositions du projet de décret relatives à la clause mentionnée au
m
sont soumises pour avis au Conseil de la concurrence.
« II. - Les opérateurs réalisant un chiffre d'affaires annuel sur le marché
des télécommunications supérieur à un seuil fixé par arrêté des ministres
chargés des télécommunications et de l'économie sont tenus d'individualiser sur
le plan comptable l'activité autorisée.
« En outre, lorsqu'ils disposent dans un secteur d'activité autre que les
télécommunications d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après
avis du Conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent
être séparées physiquement, ils sont tenus, dans l'intérêt d'un bon exercice de
la concurrence, d'individualiser cette activité sur le plan juridique.
« III. - Sous réserve des engagements internationaux souscrits par la France
comportant une clause de réciprocité applicable au secteur des
télécommunications, l'autorisation mentionnée au présent article, lorsqu'elle
concerne un réseau utilisant des fréquences radio-électriques, ne peut-être
accordée à une société dans laquelle plus de 20 p. 100 du capital social ou des
droits de vote sont détenus, directement ou indirectement, par des personnes de
nationalité étrangère.
« De même, aucune personne de nationalité étrangère ne peut procéder à une
acquisition ayant pour effet de porter, directement ou indirectement, la part
détenue par des personnes de nationalité étrangère à plus de 20 p. 100 du
capital social ou des droits de vote dans les assemblées générales d'une
société titulaire d'une telle autorisation.
« Est considérée comme personne de nationalité étrangère, pour l'application
du présent article, toute personne physique de nationalité étrangère, toute
société dont la majorité du capital n'est pas détenue, directement ou
indirectement, par des personnes physiques ou morales de nationalité
française.
« Les dispositions du présent III ne sont pas applicables aux personnes
physiques ou morales ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne
ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
« IV. - Sous réserve des engagements internationaux souscrits par la France,
le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation des
télécommunications veillent à ce que soit assurée l'égalité de traitement des
opérateurs autorisés à acheminer du trafic international au départ ou à
destination de réseaux ouverts au public français, notamment dans les
conditions d'interconnexion aux réseaux français et étrangers auxquels ils
demandent accès.
« Sous la même réserve, ils veillent également à ce que les opérateurs des
pays tiers à la Communauté européenne assurent aux opérateurs autorisés en
application des articles L. 33-1 et L. 34-1 des droits comparables, notamment
en matière d'interconnexion, à ceux dont ils bénéficient sur le territoire
national, en application du présent code.
« V. - Le nombre des autorisations peut être limité en raison des contraintes
techniques inhérentes à la disponibilité des fréquences.
« Dans ce cas, le ministre chargé des télécommunications publie, sur
proposition de l'Autorité de régulation des télécommunications, les modalités
et les conditions d'attribution des autorisations.
« L'allocation des fréquences doit dans tous les cas permettre d'assurer des
conditions de concurrence effective.
«
Art. L. 33-2.
- L'établissement des réseaux indépendants, autres que
ceux mentionnés à l'articleL. 33-3, est autorisé par l'Autorité de régulation
des télécommunications.
« Un décret, pris après avis de la Commission supérieure du service public des
postes et télécommunications, détermine les conditions générales
d'établissement et d'exploitation de ces réseaux en ce qui concerne les
exigences essentielles, les prescriptions relatives à la sécurité publique et à
la défense et les modalités d'implantation du réseau que doivent respecter les
exploitants. Il précise les conditions dans lesquelles ceux-ci, ainsi que ceux
mentionnés à l'article L. 33-3, peuvent, sans permettre l'échange de
communications entre des personnes autres que celles auxquelles l'usage du
réseau est réservé, être connectés à un réseau ouvert au public.
« L'autorisation ne peut être refusée qu'en cas de non-conformité à l'une des
conditions générales d'établissement définies dans le décret mentionné au
précédent alinéa ou à l'une des conditions d'établissement fixées par
l'Autorité de régulation des télécommunications conformément aux dispositions
de l'article L.36-6. A défaut de décision expresse dans les deux mois suivant
la demande, et sauf dans le cas mentionné à l'alinéa suivant, elle est réputée
acquise.
« Lorsqu'elle concerne un réseau qui utilise des fréquences assignées à son
exploitant, l'autorisation doit être expresse. Elle est assortie d'un cahier
des charges qui porte sur les prescriptions mentionnées au
h
du I de
l'article L. 33-1 et qui précise les obligations pesant sur le titulaire en
application du décret prévu au deuxième alinéa du présent article.
« Un exploitant de réseau indépendant ne peut conférer à son réseau le
caractère de réseau ouvert au public sans autorisation préalable délivrée dans
les conditions prévues à l'article L. 33-1. A défaut, l'exploitant peut être
sanctionné dans les conditions prévues aux articles L. 36-11, L. 39 et L.
39-3.
«
Art. L. 33-3.
- Sous réserve de leur conformité aux dispositions du
présent code, sont établis librement :
« 1° Les réseaux internes ;
« 2° Les cabines téléphoniques en dehors de la voie publique ;
« 3° Les réseaux indépendants de proximité, autres que radio-électriques,
d'une longueur inférieure à un seuil fixé par le ministre chargé des
télécommunications ;
« 4° Les installations radioélectriques de faible puissance et de faible
portée dont les catégories sont déterminées conjointement par les ministres
chargés des télécommunications, de la défense et de l'intérieur ;
« 5° Les installations radioélectriques n'utilisant pas des fréquences
spécifiquement assignées à leur utilisateur.
« Les conditions d'utilisation des installations radioélectriques mentionnées
ci-dessus sont déterminées dans les conditions prévues à l'article L. 36-6.
«
Art. L. 33-4.
- La publication des listes d'abonnés ou d'utilisateurs
des réseaux ou services de télécommunications est libre, sous réserve de la
protection des droits des personnes concernées.
« Section 2
« Services
«
Art. L. 34.
- La présente section s'applique aux services de
télécommunications fournis au public.
«
Art. L. 34-1.
- La fourniture du service téléphonique au public est
autorisée par le ministre chargé des télécommunications.
« Cette autorisation ne peut être refusée que dans la mesure requise par la
sauvegarde de l'ordre public ou les besoins de la défense ou de la sécurité
publique, ou lorsque le demandeur n'a pas la capacité technique ou financière
de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice
de son activité, ou a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles
L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4.
« L'autorisation est soumise à l'application des règles contenues dans un
cahier des charges et portant sur les points mentionnés au I de l'article L.
33-1, à l'exception des
e
et
h
.
« Lorsque la fourniture du service suppose l'établissement d'un réseau ouvert
au public, l'autorisation délivrée en application de l'article L. 33-1 autorise
la fourniture du service.
«
Art. L. 34-2.
- La fourniture au public des services de
télécommunications autres que le service téléphonique est libre sous réserve du
respect des exigences essentielles et des prescriptions relatives à la défense
et la sécurité publique.
« Toutefois, ces services sont soumis à autorisation dans les cas prévus à
l'article L. 34-3 et à déclaration dans le cas prévu au premier alinéa de
l'article L. 34-4.
« Un décret en Conseil d'Etat précise le contenu de la déclaration et de la
demande d'autorisation et les conditions dans lesquelles sont fixées les
prescriptions techniques nécessaires au respect des exigences essentielles.
«
Art. L. 34-3.
- La fourniture au public des services de
télécommunications utilisant des fréquences hertziennes est soumise à
autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications dans les
conditions suivantes :
« 1° Lorsqu'elle suppose l'établissement d'un nouveau réseau ou la
modification d'un réseau déjà autorisé, les dispositions de l'article L. 33-1
sont applicables ;
« 2° Lorsqu'elle est assurée grâce à un réseau utilisant des fréquences
assignées par une autre autorité que celle compétente en matière de
télécommunications, la délivrance de l'autorisation est subordonnée au respect
des dispositions mentionnées au I de l'article L. 33-1. Cette autorisation est
délivrée après que l'autorité assignant les fréquences a donné son accord sur
l'usage de celles-ci.
«
Art. L. 34-4.
- La fourniture au public des services de
télécommunications autres que le service téléphonique sur les réseaux établis
ou exploités en application de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la
communication audiovisuelle et de l'article 34 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986 précitée est soumise, après information de la commune ou du
groupement de communes ayant établi les réseaux ou autorisé leur établissement,
à déclaration préalable auprès de l'Autorité de régulation des
télécommunications.
« Cette déclaration a pour seul objet de permettre à l'Autorité de régulation
des télécommunications de vérifier la nature du service fourni et des
installations utilisées.
« Lorsque le service proposé est le service téléphonique au public, sa
fourniture est soumise aux dispositions de l'article L. 34-1.
« En ce cas, l'autorisation est délivrée après consultation de la commune ou
du groupement de communes ayant établi le réseau ou autorisé son
établissement.
« Lorsque l'objet du service proposé est directement associé à la fourniture
des services de radiodiffusion sonore et de télévision distribués sur le
réseau, les dispositions du premier alinéa de l'article L. 34-2 de la loi n°
86-1067 du 30 septembre 1986 précitée reçoivent application.
« Les conventions en vigueur qui contiennent des clauses excluant la
fourniture de services de télécommunications sur les réseaux mentionnés au
premier alinéa ci-dessus ou lui apportant des restrictions de nature juridique
ou technique devront être mises en conformité, avant le 1er janvier 1998, avec
les dispositions du présent article. Ces mêmes conventions garantissent une
juste rémunération du propriétaire de ces réseaux assurant la couverture, par
le fournisseur de services, du coût des prestations fournies et des
investissements réalisés. Elles précisent les modalités de mise à disposition
des capacités supplémentaires nécessaires ainsi que les conditions techniques
d'utilisation de ces réseaux. En cas de litige, l'Autorité de régulation des
télécommunications peut être saisie, dans les conditions prévues à l'article L.
36-8.
« Section 3
« Dispositions communes
« Art. L. 34-5. -
Sont placées auprès du ministre chargé des
télécommunications et de l'Autorité de régulation des télécommunications deux
commissions consultatives spécialisées, d'une part dans le domaine des réseaux
et des services radioélectriques, d'autre part dans celui des services
mentionnés aux articles L. 34-1, L. 34-2 et L. 34-4. Elles comprennent, en
nombre égal, des représentants des fournisseurs de services, des représentants
des utilisateurs de services et des personnalités qualifiées nommés par le
ministre chargé des télécommunications.
« La commission consultative compétente est consultée par le ministre chargé
des télécommunications ou par l'Autorité de régulation des télécommunications
sur tout projet de mesure visant à définir les procédures d'autorisation, à
fixer ou à modifier les conditions techniques et d'exploitation, les
spécifications et les prescriptions techniques des services relevant de son
domaine de compétence. Ses conclusions sont transmises à la commission
supérieure du service public des postes et télécommunications.
« Un décret détermine la composition, les attributions et les conditions de
fonctionnement de chacune de ces deux commissions consultatives.
« Art. L. 34-6. -
Les autorisations délivrées en application des
dispositions des sections 1 et 2 du présent chapitre sont liées à la personne
de leur titulaire. Elles ne peuvent être cédées à un tiers.
« Les autorisations délivrées en application des articles L. 33-1, L. 34-1 et
L. 34-3, ainsi que, le cas échéant, les cahiers des charges qui leur sont
annexés, sont publiées au
Journal officiel.
« Les refus d'autorisation sont motivés et notifiés aux intéressés.
« La suspension, la réduction de durée et le retrait total ou partiel des
autorisations sont prononcés par l'Autorité de régulation des
télécommunications, dans les conditions prévues à l'article L. 36-11.
« Art. L. 34-7. -
Les infrastructures de télécommunications établies
sur le domaine public ou pour les besoins de missions de service public peuvent
être utilisées pour l'aménagement et l'exploitation de réseaux ouverts au
public et la fourniture au public de tous services de télécommunications, dans
le respect des dispositions du présent code.
« Section 4
« Interconnexion et accès au réseau
« Art. L. 34-8. -
I. - Les exploitants de réseaux ouverts au public
font droit, dans des conditions objectives, transparentes et non
discriminatoires, aux demandes d'interconnexion des titulaires d'une
autorisation délivrée en application des articles L. 33-1 et L. 34-1.
« La demande d'interconnexion ne peut être refusée si la demande est
raisonnable au regard, d'une part des besoins du demandeur, d'autre part des
capacités de l'exploitant à la satisfaire. Le refus d'interconnexion est
motivé.
« L'interconnexion fait l'objet d'une convention de droit privé entre les deux
parties concernées. Cette convention détermine, dans le respect des
dispositions du présent code et des décisions prises pour son application, les
conditions techniques et financières de l'interconnexion. Ces conditions
doivent être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments
propres à répondre aux demandes spécifiques. La convention susmentionnée est
communiquée à l'Autorité de régulation des télécommunications.
« Lorsque cela est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de
concurrence ou l'interopérabilité des services, l'Autorité de régulation des
télécommunications peut, après avis du Conseil de la concurrence, demander la
modification des conventions déjà conclues.
« Un décret détermine les conditions générales, notamment celles liées aux
exigences essentielles, et les principes de tarification auxquels les accords
d'interconnexion doivent satisfaire.
« II. - Les exploitants de réseaux ouverts au public figurant sur la liste
établie en application du 7° de l'article L. 36-7 sont tenus de publier, dans
les conditions déterminées par leur cahier des charges, une offre technique et
tarifaire d'interconnexion approuvée préalablement par l'Autorité de régulation
des télécommunications. Les tarifs d'interconnexion rémunèrent l'usage effectif
du réseau de transport et de desserte, et reflètent les coûts
correspondants.
« L'offre mentionnée à l'alinéa précédent contient des conditions différentes
pour répondre, d'une part aux besoins d'interconnexion des exploitants de
réseaux ouverts au public et, d'autre part, aux besoins d'accès au réseau des
fournisseurs de service téléphonique au public, compte tenu des droits et
obligations propres à chacune de ces catégories d'opérateurs.
« Les mêmes exploitants doivent, dans des conditions objectives, transparentes
et non discriminatoires, assurer un accès à leur réseau aux utilisateurs et
fournisseurs de services de télécommunications autres que le service
téléphonique au public, ainsi qu'aux services de communication audiovisuelle
déclarés en application de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre
1986 précitée. Ils doivent également répondre aux demandes justifiées d'accès
spécial correspondant à des conditions techniques ou tarifaires non publiées,
émanant de ces fournisseurs de services ou des utilisateurs.
« III. - Les litiges relatifs aux refus d'interconnexion, aux conventions
d'interconnexion et aux conditions d'accès peuvent être soumis à l'Autorité de
régulation des télécommunications conformément à l'article L. 36-8.
« Section 5
« Equipements terminaux
«
Art. L. 34-9.
- Les équipements terminaux sont fournis librement.
« Les équipements destinés à être connectés à un réseau ouvert au public,
ainsi que les installations radioélectriques, doivent faire l'objet d'une
évaluation de leur conformité aux exigences essentielles. Les organismes
intervenant dans la procédure d'évaluation de conformité sont désignés de façon
à offrir aux industriels concernés un choix préservant leur indépendance par
rapport à des entreprises offrant des biens ou services dans le domaine des
télécommunications.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine :
« 1° Les conditions dans lesquelles l'Autorité de régulation des
télécommunications peut désigner les organismes chargés de délivrer
l'attestation de conformité ;
« 2° Les conditions dans lesquelles sont élaborées et publiées les
spécifications techniques des équipements soumis à l'évaluation de conformité
et les conditions de leur raccordement aux réseaux ouverts au public ;
« 3° Les cas dans lesquels une qualification technique est requise pour
procéder au raccordement et à la mise en service de ces équipements ou
installations et les conditions permettant de la garantir ;
« 4° La procédure d'évaluation de conformité et de délivrance des attestations
correspondantes, les cas où celles-ci, en raison des caractéristiques
techniques des équipements, sont acquises tacitement, ainsi que les conditions
particulières dans lesquelles l'attestation est délivrée pour les installations
destinées à être connectées aux réseaux mentionnés au 1° de l'article L. 33.
« Les équipements ou installations soumis à l'évaluation de conformité ne
peuvent être fabriqués pour l'Espace économique européen, importés, en vue de
leur mise à la consommation de pays n'appartenant pas à celui-ci, détenus en
vue de la vente, mis en vente, distribués à titre gratuit ou onéreux, connectés
à un réseau ouvert au public ou faire l'objet de publicité que s'ils ont fait
l'objet d'une attestation de conformité et sont à tout moment conformes à
celle-ci.
« Section 6
« Numérotation
«
Art. L. 34-10.
- Un plan national de numérotation est établi par
l'Autorité de régulation des télécommunications et est géré sous son contrôle.
Il garantit l'égal accès, par les utilisateurs, aux différents réseaux et
services de télécommunications et l'équivalence des formats de numérotation.
« L'Autorité de régulation des télécommunications attribue aux opérateurs des
préfixes et des numéros ou blocs de numéros, dans des conditions objectives,
transparentes et non discriminatoires, moyennant une redevance, fixée par
décret en Conseil d'Etat, destinée à couvrir les coûts de gestion du plan de
numérotation et le contrôle de son utilisation.
« Les conditions d'utilisation de ces préfixes, numéros ou blocs de numéros
sont précisées selon le cas par le cahier des charges de l'opérateur ou par la
décision d'attribution qui lui est notifiée.
« L'Autorité de régulation des télécommunications veille à la bonne
utilisation des numéros attribués. Les préfixes, numéros ou blocs de numéros ne
peuvent pas être protégés par un droit de propriété industrielle ou
intellectuelle. Il sont incessibles et ne peuvent faire l'objet d'un transfert
qu'après accord de l'Autorité de régulation des télécommunications.
« A compter du 1er janvier 1998, tout abonné qui ne change pas d'implantation
géographique peut conserver son numéro en cas de changement d'opérateur dans la
limite des technologies mises en oeuvre et des capacités qu'elles permettent.
Jusqu'au 31 décembre 2000, les coûts induits par le transfert des appels par
l'opérateur initial sont supportés par le nouvel opérateur qui, seul, peut les
refacturer à l'abonné. Les opérateurs sont tenus de prévoir les dispositions
nécessaires dans les accords d'interconnexion conclus entre eux. Les
dispositions du présent alinéa ne s'appliquent pas aux numéros alloués aux
réseaux radioélectriques lorsqu'ils sont utilisés pour fournir des services
mobiles.
« A compter du 1er janvier 2001, tout utilisateur peut, à sa demande :
« - conserver son numéro s'il change d'opérateur sans changer d'implantation
géographique ;
« - obtenir de l'opérateur auprès duquel il est abonné, un numéro lui
permettant de changer d'implantation géographique ou d'opérateur en gardant ce
numéro.
« A compter de la même date, les opérateurs sont tenus de prévoir les
dispositions nécessaires dans les accords d'interconnexion et de proposer aux
utilisateurs les offres correspondantes, dont les conditions sont approuvées
préalablement par l'Autorité de régulation des télécommunications. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Cet article 5, qui modifie à lui seul 16 articles du code des
télécommunications, est l'un des plus dangereux de ce projet de loi puisqu'il
organise le régime juridique des télécommunications ouvertes à la
concurrence.
A première vue pourtant, cet article paraît prévoir des garde-fous aux
turpitudes bien prévisibles des opérateurs privés.
Il convient cependant de le resituer dans son contexte réel et de le lire en
comparant point par point les dispositions qu'il modifie dans l'actuel article
du code des télécommunications.
On s'aperçoit alors qu'il opère un véritable bouleversement dans le paysage
des télécommunications de notre pays et qu'un certain nombre des garanties
qu'il semble offrir se révèlent être des coups contre le service public des
télécommunications.
Avec cet article 5, les pouvoirs publics n'auront que très peu de motifs
légaux pour refuser l'intrusion en France d'opérateurs étrangers menaçant les
intérêts nationaux.
Il s'agit donc là d'une affaire très grave et qui pourrait coûter très cher à
notre pays.
Je rappelle, à cet égard, que la France peut faire obstacle à toute décision
qui léserait ses intérêts nationaux les plus fondamentaux devant les
institutions communautaires.
Il paraît donc très surprenant que notre pays ne puisse opposer la sauvegarde
de ses intérêts nationaux devant un opérateur qui les mettrait en cause.
L'article 5 va également à l'encontre des intérêts des collectivités locales
en leur déniant toute réelle participation au processus de décision de
construction d'infrastructures de télécommunications, ce qui nous semble faire
bien peu de cas des droits des collectivités locales.
Le régime de l'interconnexion très laxiste qu'il prévoit pour les opérateurs
privés obligerait l'opérateur historique France Télécom à favoriser
l'introduction de ses propres concurrents sur le marché et lui ferait supporter
des charges disproportionnées.
Les compagnies téléphoniques privées pourraient ainsi se connecter au réseau
de l'opérateur, pour l'instant public, pour un prix dérisoire, qui ne tiendrait
compte ni de l'entretien du réseau qu'elles utiliseraient ni du coût de son
amortissement.
Ce réseau, il faut le rappeler une nouvelle fois, a été payé par les
contribuables et par les usagers de France Télécom et il est par conséquent
tout à fait inconcevable que ceux qui l'utiliseraient n'acquittent pas un prix
correspondant réellement au coût total de son utilisation.
Enfin, l'article 5 crée un régime juridique dérogatoire qui consisterait à
soumettre à une autorité de réglementation des télécommunications particulière
les litiges relatifs aux problèmes d'interconnexion entre France Télécom et ses
concurrents privés.
Quand on sait que l'objectif de cette nouvelle institution est avant tout de
faciliter l'exercice de la concurrence, il y a fort à parier que ses décisions
seront principalement prises à l'encontre de l'opérateur France Télécom.
Par conséquent, et pour toutes ces raisons, je tenais, au nom du groupe
communiste républicain et citoyen, à alerter le Sénat sur le contenu réel des
dispositions de l'article 5, qui est l'un des éléments clés du dispositif de
privatisation de la plupart des activités que France Télécom exerce aujourd'hui
avec l'efficacité que l'on sait et au service du public et non d'intérêts
financiers privés.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Très bien !
M. le président.
Par amendement n° 89, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer l'article 5.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Nous proposons, par cet amendement, de supprimer l'article 5, qui, nous venons
de l'expliquer, est sous des apparences anodines l'un des éléments principaux
de l'équilibre de ce texte.
Avec ces dispositions, des sociétés spécialisées dans la pose d'autres tuyaux
que ceux de l'information vont pouvoir s'attaquer en grand au marché que
représentent les télécommunications.
Nous souhaitons, pour notre part, que ces entreprises se concentrent sur leur
activité principale, plutôt que de chercher à s'accaparer des marchés dans des
domaines dans lesquels elles ne paraissent pas à première vue particulièrement
qualifiées.
Nous pourrions, pendant des heures, comparer l'efficacité des compagnies
fermières chargées de la gestion et de la distribution de l'eau et des
entreprises publiques, telles que France Télécom, EDF-GDF ou la SNCF.
Il en ressortirait sans aucun doute que les entreprises publiques gèrent mieux
le service public et ont le souci permanent de l'innovation, du progrès
technologique et de la création d'emplois.
Nous souhaitons, pour notre part, que les compagnies des eaux se consacrent
pleinement à la gestion et à la distribution de l'eau et qu'elles y consacrent
l'ensemble de leurs investissements.
Il est en effet très étonnant que ces sociétés réclament en permanence de
l'argent public et augmentent inconsidérément leurs tarifs pour construire les
installations nécessaires à la dénitrification de l'eau et à leur mise aux
normes européennes, pendant qu'elles investissent leurs énormes profits
ailleurs.
Nous estimons que les modifications de l'article L. 33-1 du code des postes et
télécommunications contenues dans l'article 5 font la part trop belle aux
compagnies téléphoniques privées par rapport à France Télécom.
Il n'est, en effet, pas normal de prévoir dans cet article de les exonérer de
l'individualisation juridique de leurs activités futures dans le secteur des
télécommunications, ce qui leur permettrait de maintenir une certaine opacité
de leurs activités et de leurs comptes.
C'est la porte ouverte à de nombreuses futures affaires qui pourraient
défrayer la chronique au cours des prochaines années.
Pour toutes ces raisons, l'article 5 est donc parfaitement inacceptable. C'est
pourquoi nous demandons au Sénat de voter sa suppression.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Il n'y aurait plus de loi si cet amendement était adopté car,
comme l'a souligné M. Leyzour, la suppression de l'article 5 reviendrait à
tourner la page et à renvoyer ce texte aux calendes grecques. La commission est
donc naturellement défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le Gouvernement est également défavorable à cet
amendement, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 89, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Toujours sur l'article 5, je suis maintenant saisi d'un certain nombre
d'amendements.
ARTICLE L. 33 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Sur le texte proposé pour l'article L. 33 du code des postes et
télécommunications, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 33 du code des postes et
télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 33-1 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Par amendement n° 90, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le deuxième alinéa du
paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code
des postes et télécommunications, après le mot : « sauvegarde », d'insérer les
mots : « de l'intérêt national, ».
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
L'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications tend à instaurer
une autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications pour
l'exploitation de réseaux ouverts au public.
L'amendement n° 90 tend à préciser et à étendre les motifs pour lesquels une
telle autorisation peut être refusée.
En effet, les motifs invoqués sont si minimes que l'on peut légitimement dire
que le ministre ne pourra jamais refuser l'agrément. Or, comme nous l'avons
démontré depuis le début de la discussion de ce texte, les télécommunications
ne sont pas une marchandise comme une autre. Les enjeux de leur accès et de
leur diffusion dans la population sont tels qu'il s'agit, pour nous, d'une
question d'intérêt national.
Certes, dans les propos de campagne ou dans ceux de M. le Premier ministre,
lors du mouvement qui a éclaté au cours des mois de novembre et de décembre
derniers, il a souvent été question de cet intérêt national que l'on défendait
à Bruxelles.
Je me permets de rappeler que M. Juppé déclarait avec solennité : « Nous
défendrons le service public français auprès de Bruxelles. J'ai dit avec
humilité aux Français que je suis prêt à le faire inscrire dans la
Constitution. »
Aujourd'hui, ces promesses sont quelque peu oubliées. L'heure est à la
déréglementation, à la casse du service public français et à la remise en cause
de l'intérêt national.
Pour notre part, nous sommes persuadés que les télécommunications seront le
système nerveux du développement économique. La maîtrise de ces flux doit donc
rester entre les mains des représentants de la nation. C'est essentiel pour
assurer un développement économique et social cohérent et pour maintenir le
pacte républicain.
C'est pourquoi, mes chers collègues, au nom des sénateurs du groupe communiste
républicain et citoyen, je vous propose d'ajouter les mots : « de l'intérêt
national » après le mot : « sauvegarde ».
M. Félix Leyzour.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La commission se prononce contre...
M. Paul Loridant.
L'intérêt général ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Non ! La commission est contre cet amendement car la notion
de l'intérêt national mérite de retenir toute notre attention.
Je tiens à rappeler que le texte comporte des précisions très claires en
matière de sauvegarde.
La sauvegarde de l'ordre public, des besoins en matière de défense ou de
sécurité publique relèvent bien, que je sache, de l'intérêt national. Mais,
dans ce cas d'espèce, une notion doit être juridiquement solide pour pouvoir
être introduite dans le texte parce qu'elle pourra faire l'objet de recours. Il
ne nous semble donc pas que l'introduction de cette notion d'intérêt national,
qui reste assez vague sur le plan juridique, soit de nature à renforcer le
texte, bien au contraire. La commission est donc défavorable à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Si nous pouvions nous mettre d'accord sur cette notion
d'intérêt national, je serais prêt à accepter cet amendement. Mais, pour moi,
l'intérêt national dans le domaine des télécommunications, c'est apporter à nos
concitoyens plus de services ou au moins autant que dans les pays libéralisés,
ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, à des tarifs plus bas que ceux que nous
pratiquons aujourd'hui et à permettre à France Télécom de partir à la conquête
des marchés européens, américains et asiatiques parce que le quatrième
opérateur mondial a vocation à être présent sur les trois continents.
Pour vous, l'intérêt national, c'est la défense d'un monopole qui maintient
nos concitoyens dans une situation dans laquelle les services sont moins
nombreux et plus chers. Je crois que nous ne pouvons donc pas nous mettre
d'accord sur cette notion.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
La caricature vous sied mal, monsieur le ministre.
M. François Fillon,
ministre délégué.
C'est la vérité !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 90, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 146, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier,
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « ou
lorsque le demandeur », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa du
paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code
des postes et télécommunications : « n'a pas la capacité technique et
financière de faire face durablement aux obligations résultant des conditions
d'exercice de son activité ou n'a pas satisfait aux prescriptions régissant la
mission ou la délégation de service public qui lui a été confiée dans un autre
secteur d'activité, ou encore a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées
aux articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4. »
Par amendement n° 196, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose,
dans le deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour
l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de supprimer la
référence : « , L. 39-3 ».
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 146.
M. Gérard Delfau.
Cet amendement a pour objet d'élargir les motifs de refus de délivrance d'une
autorisation d'établissement et d'exploitation de réseaux ouverts au public. En
effet, il n'échappe pas au Sénat qu'un certain nombre de groupes privés
bénéficiaires d'une concession de services, ont connu ces dernières années des
démêlés judiciaires. Certains de ces groupes ont même fait l'objet d'une
sanction.
Il nous semble opportun de préciser qu'une autorisation d'utilisation de
réseaux ne pourra pas être accordée à un groupe ayant fait l'objet d'une
condamnation dans le cadre d'une concession de services, par exemple, dans le
cadre du service des eaux.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur
l'amendement n° 146 et pour présenter l'amendement n° 196.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Dans sa présentation, M. Delfau a précisé quelles étaient les
sociétés visées. J'ai en effet connu un moment d'angoisse en commission. En
effet, nous étions restés dans le vague, et j'ai pensé qu'il pouvait y avoir
des doutes sur la SNCF, qui envisage de s'engager dans le domaine des
télécommunications... Me voilà mieux informé !
Mais s'agissant des entreprises visées, notamment les grands distributeurs
d'eau, il ne faut pas être atteint d'un syndrome d'une ville que je ne citerai
pas car le dossier n'est pas encore clos. Il faut, en la matière, rester
serein.
Que prévoit le texte ? Lorsque les opérateurs « disposent dans un secteur
d'activité autre que les télécommunications d'un monopole ou d'une position
dominante appréciée après avis du conseil de la concurrence, et que les
infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement... », ce qui est
le cas - j'ai tout à l'heure appelé de mes voeux une autorité de régulation
dans le domaine de l'eau, mais restons dans celui des télécommunications - «
ils sont tenus, dans l'intérêt d'un bon exercice de la concurrence,
d'individualiser cette activité sur le plan juridique. » La réponse est là. Il
ne s'agit pas de nier les problèmes qui se posent mais il faut éviter cette
espèce de sentiment sulfureux que l'on voudrait faire planer au-dessus de
l'ensemble de ces secteurs qui, rappelons-le, sont porteurs pour notre
économie.
Arrêtons de nous suicider collectivement quand nous avons des entreprises qui
fonctionnent, notamment Alcatel, qui est la première entreprise dans le domaine
des télécommunications. Cessons de jeter ces entreprises en pâture, car elles
sont une chance pour la France !
(MM. Bernard Seillier, Michel Pelchat et
Gérard Braun applaudissent.)
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 146.
J'en viens à l'amendement n° 196. Il s'agit d'un amendement de coordination
avec l'amendement n° 44 visant à supprimer le texte proposé par l'article 7
pour l'article L. 39-3 du code des postes et télécommunications, et qui
concerne la possibilité de déclarer pénalement responsable une personne
morale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 146 et 196 ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 146
et il approuve les propos que vient de tenir M. le rapporteur. Je m'étonne
d'ailleurs que les socialistes, qui ont été au pouvoir pendant près de douze
ans, n'aient pas modifié la législation concernant ces sociétés qui leur
semblent désormais représenter le diable.
S'agissant de l'amendement n° 196, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du
Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 146.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
A la suite des explications de M. le rapporteur, j'aurais envie de lui dire,
mais ce serait facile, que chacun a ses champions !
M. Gérard Braun.
Alors, ne le dites pas !
M. Gérard Delfau.
Je souhaiterais élever le débat. Je voudrais lui faire observer que j'ai
employé les mots « à titre d'exemple » et « notamment ». S'il est vrai qu'il y
a une actualité regrettable et condamnable, il y a aussi tout simplement
nécessité, pour le législateur, de prendre un certain nombre de garanties en ce
qui concerne l'ensemble des filières et des opérateurs concernés, ni plus ni
moins.
Par ailleurs, je voudrais tout de même suggérer à M. le rapporteur ainsi qu'à
M. le ministre de bien écouter ce que dit la population.
M. Emmanuel Hamel.
Mais nous sommes la population !
M. Gérard Delfau.
Il vaudrait mieux que, de ce point de vue, nous soyons à la limite un peu trop
rigoureux, plutôt que de passer pour un peu trop laxistes !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 146, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 196.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
S'agissant de l'entreprise Alcatel, qui a été évoquée par M. le rapporteur, je
voudrais simplement faire remarquer qu'à un moment s'est posé un problème de
surfacturation à France Télécom, lequel a porté sur près de deux milliards de
francs. Certes, c'était une bonne entreprise, mais encore faut-il veiller à ce
que la vérité se fasse véritablement.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
C'était le fait du monopole !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 196, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 91, MM. Loridant, Ralite, Billard et Leyzour, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le deuxième
alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code
des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit d'infrastructures nouvelles, l'autorisation du ministre
chargé des télécommunications ne peut être délivrée qu'après consultation et
avis des collectivités territoriales concernées. »
Par amendement n° 147, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier,
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le
deuxième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1
du code des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« L'autorisation d'établissement d'un nouveau réseau ne peut être délivrée
qu'après consultation et avis des collectivités locales et territoriales
concernées. »
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Paul Loridant.
Cet amendement a pour objet de tenir compte de l'avis des collectivités
locales lorsqu'il s'agit d'implanter de nouveaux réseaux.
A n'en pas douter, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur des
télécommunications connaît d'intenses évolutions et le projet de loi
réglementant ce secteur nous a fait accomplir un grand bond, mais c'est, nous
semble-t-il, un fantastique bond en arrière !
Je ne reviendrai pas sur les conséquences sociales et économiques qu'ont
développées les précédents orateurs, ni sur les conséquences en termes
d'aménagement du territoire à travers la fin de la péréquation pour les
services obligatoires. Je partage ces analyses.
Je voudrais attirer plus modestement l'attention de la Haute Assemblée sur un
point particulier de ce projet de loi, et lui soumettre un amendement qui
devrait recueillir un très large consensus.
Mes chers collègues, nous devons veiller particulièrement au rôle des
collectivités territoriales. Nous savons tous quel rôle incontournable elles
jouent pour fédérer des acteurs locaux, pour faire naître de nouveaux
services.
De très grandes villes européennes, comme Anvers, ont décidé de se doter
d'infrastructures de télécommunications. Plusieurs centaines de villes
françaises de toute importance et des départements entiers déploient sur leurs
territoires des réseaux câblés, sur lesquels fonctionnent déjà des services de
télécommunications, et vont en expérimenter d'autres dans le cadre des futures
autoroutes de l'information. Des régions - je pense, en particulier, à
l'Aquitaine - réfléchissent à des schémas directeurs en matière de
télécommunications et investissent dans des équipements structurants, en
partenariat avec France Télécom.
Les villes sont consultées, pour l'implantation de pylônes de
télécommunications, pour des travaux de voirie permettant le passage de câble.
Au sein de l'association des villes câblées, de nombreux maires nous ont fait
part des sollicitations dont ils font déjà l'objet, de la part des hôpitaux,
des centres de recherche et des universités, pour créer des réseaux locaux.
Nous avons aussi nos propres besoins, pour relier les équipements
administratifs, les écoles, les médiathèques et tout autre équipement.
Les villes sont aussi des aménageurs, elles sont à l'écoute des entreprises
pour leurs besoins d'infrastructures de toutes sortes, et je peux vous dire, en
tant que maire d'une ville où sont installées de nombreuses entreprises dans
des secteurs de pointe, qu'elles nous interpellent aussi sur les
télécommunications.
Ces projets, ces réalisations, vous en connaissez peut-être une partie, c'est
« Visio université Ile-de-France », c'est l'anneau culturel de Valenciennes,
pour le câble c'est « Metz interactive », c'est Futuroscope TV, c'est Cristal
en Alsace. Du Vercors au Limousin, de l'Hérault à Lille, ces initiatives se
chiffrent par plusieurs dizaines, et ce n'est qu'un début. Vous avez noté qu'il
y a des départements ou des équipements qui sont chers au coeur du Sénat, je
pense au Futuroscope.
Face à ce rôle de véritable pivot que jouent les collectivités territoriales
entre les institutions, les entreprises et, bien sûr, les habitants, que
prévoit ce projet de loi ? Rien. Les communes, les départements, les régions
sont ignorés. Le ministre seul autoriserait la création d'infrastructures
nouvelles sans même recueillir le simple avis des collectivités concernées.
Il s'agit bien d'un fantastique bond en arrière par rapport aux principes de
la décentralisation.
Une infrastructure de télécommunications ne se décide pas à la sauvette. Elle
s'étudie avec soin. Les investissements considérables, tant en matériel qu'en
génie civil, doivent s'amortir sur un grand nombres d'années. Pour quels
besoins, pour quels services ?
Alors, pourquoi ne pas recueillir l'avis des collectivités ? Ces
infrastructures n'auraient-elles aucune incidence sur la vie locale ? N'y
a-t-il aucune cohérence à rechercher ? N'y a-t-il pas le risque de voir
certaines zones sous-équipées et d'autres suréquipées, sans rentabilité dans
les deux cas, par un simple manque d'information et de concertation ? La
concurrence est une chose, la gabegie en est une autre.
On nous objecte qu'il ne saurait y avoir 36 000 réseaux de télécommunications,
comme il y a 36 000 communes. Mes chers collègues, nous sommes la Haute
Assemblée. C'est un faux procès.
Il ne s'agit pas de cela. Depuis la décentralisation, que je sache, on
construit toujours des routes, des autoroutes ou des voies ferrées. L'avis des
communes et de leurs groupements est toujours recueilli. Les procédures sont
rodées. Loin de bloquer les projets, cette procédure permet de leur assurer une
meilleure insertion. Elle permet aussi aux collectivités d'anticiper sur
l'arrivée de ces équipements, de les accompagner. Sur les autoroutes de
l'information, n'y aura-t-il pas besoin de bretelles pour rejoindre la
circulation locale ?
Les collectivités locales ne sont pas des freins à la croissance, au
développement ; elles en sont un des moteurs, vous le savez bien. Je vous
propose donc, mes chers collègues, que la consultation et l'avis des
collectivités concernées soient introduits dans le projet de loi pour
l'autorisation du ministre concernant les infrastructures nouvelles.
En adoptant cet amendement, vous voterez à la fois pour la défense des
principes de la décentralisation et pour une meilleure efficacité économique.
Je ne doute pas un seul instant que la Haute Assemblée sera sensible à cet
amendement.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 147.
M. Gérard Delfau.
Cet amendement, comme le précédent, tend à faire droit aux prérogatives des
collectivités locales pour l'établissement d'infrastructures de
télécommunications.
Comme les usagers, les collectivités locales sont les parents pauvres de ce
projet de loi. Nous proposons donc, tout au long du débat, plusieurs
amendements visant à faire droit à leurs prérogatives.
En l'occurrence, il s'agit d'autoriser l'établissement d'un nouveau réseau
seulement après consultation et avis des collectivités concernées. Cet
amendement est modeste. Il ne vise pas à conditionner l'établissement des
réseaux à l'autorisation des communes. Il ne s'agit pas de donner aux communes
un pouvoir de régulation, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, à M.
Guyard qui défendait, à l'Assemblée nationale, un amendement similaire.
Les collectivités territoriales, le Sénat le sait tout particulièrement, sont
adultes. La décentralisation n'était plus, dans cette enceinte, ces dernières
années, objet de contestation. Encore que, avec la loi Pasqua, on se demandait
parfois s'il n'y avait pas quelque impatience de l'Etat pour revenir sur
quelques transferts de compétences - mais c'est là une remarque au passage.
Pour revenir à notre texte, monsieur le ministre, il nous paraît impossible,
comme à vous tous, mes chers collègues, que nous n'acceptions pas de donner à
nos communes, à nos départements, à nos régions, à nos syndicats
intercommunaux, communautés de communes ou districts au moins le droit à une
consultation et la possibilité élémentaire de donner un avis.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 91 et 147 ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
S'agissant de ces deux amendements, nous devons dire les
choses telles qu'elles sont.
Je rappellerai, tout d'abord, que nous avons souligné que les infrastructures
de télécommunications seraient, dans les années à venir, encore plus
importantes que les infrastructures de communications ou de transport bâties au
siècle dernier ou dans les soixante-dix premières années du xxe siècle, et
qu'elles seraient déterminantes en matière d'aménagement et de dynamique du
territoire.
Je dirai également que le Sénat est naturellement attaché à la liberté des
collectivités locales et territoriales.
Je voudrais néanmoins rappeler l'enjeu. L'amendement n° 91 ne vise pas une
permission de voirie. Cette dernière figure d'ailleurs dans le texte proposé
pour l'article L. 47 du code des postes et télécommunications, en ce qui
concerne notamment le domaine routier, avec une consultation et une permission
telles que le code de la voirie routière les prévoit. L'amendement présenté par
M. Loridant tend, en fait, à consulter et à demander l'avis des collectivités
territoriales concernées pour que le ministre puisse délivrer une autorisation
d'infrastructures nouvelles.
Je prendrai l'exemple d'une infrastructure nouvelle le long de l'autoroute de
l'Est assurant la jonction Paris-Strasbourg.
M. Félix Leyzour.
Vous nous avez déjà donné cet exemple !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Oui, j'ai déjà pris cet exemple en commission, monsieur
Leyzour, mais permettez-moi d'en faire profiter l'ensemble de la Haute
Assemblée !
M. Michel Pelchat.
C'est un bon exemple !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cette autoroute traverse plus de 620 communes, huit
départements, quatre régions, ce qui signifierait autant de délibérations.
Allons-nous être atteints du syndrome « TGV belge », qui, à la suite de la
fédéralisation de la Belgique, bloque depuis cinq ans cette infrastructure
essentielle pour nos voisins et pour nous-mêmes ? Je crois qu'en cette matière
nous sommes trop attachés à la fois à l'intérêt national...
M. Emmanuel Hamel.
On n'est jamais trop attaché à l'intérêt national !
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
... et à l'aménagement du territoire pour nous complaire dans
ce type de méandres.
A l'époque des grandes décisions conduites par les gouvernements du général de
Gaulle, l'intérêt national était l'une des priorités qui ont permis à notre
territoire d'être dans l'état dans lequel il se trouve aujourd'hui.
C'est pourquoi l'amendement n° 91 qu'il ne faut pas confondre avec un
amendement concernant la permission de voirie, me paraît particulièrement
dangereux.
Les élus locaux que nous sommes aiment être consultés et donner leur avis, ce
qui est naturel. Mais il y a aussi l'intérêt national. La commission des
affaires économiques émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 91, et
ce pour des raisons de fond qui sont d'ailleurs liées aux nécessités de
l'aménagement et de l'équipement du territoire.
S'agissant de l'amendement n° 147, je formulerai les mêmes observations :
l'aménagement du territoire et la décentralisation, c'est non pas une addition
de grands et de petits duchés qui se mettraient successivement d'accord, mais
un territoire qui reste, à mes yeux, un et indivisible et dont il revient à
certains moments à l'exécutif de décider de l'intérêt supérieur.
La commission émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 91 et 147 ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je ferai trois réflexions.
Tout d'abord, monsieur Delfau, si vous êtes si soucieux de l'avis des
collectivités locales sur l'établissement de ces réseaux, vous me permettrez de
m'interroger sur les raisons qui ont conduit depuis tant d'années le groupe
socialiste, en particulier, à ne pas réclamer ce droit qui n'existait ni dans
la loi de 1990 ni auparavant.
M. Gérard Delfau.
On l'a fait !
M. François Fillon,
ministre délégué.
Par ailleurs, je voudrais vous faire remarquer que ce
texte prévoit pour la première fois le versement d'une indemnité aux
collectivités locales.
Mais il s'agit d'établir des réseaux nationaux, des réseaux européens. Comment
accepter que, pour établir un réseau national, il faille obtenir l'accord de
l'ensemble des collectivités locales traversées ?
En réalité, on voit bien ce qui se cache derrière l'amendement n° 91 : si ce
texte était adopté, il y aurait les communes favorables au réseau de
l'opérateur public, et les communes favorables au réseau des opérateurs
privés.
M. Michel Pelchat.
Voilà !
M. François Fillon,
ministre délégué.
C'est vers ce type de combat département par
département que nous nous orienterions au moment où il s'agirait d'établir des
grands réseaux « sans couture », au moins sur le territoire national, sinon sur
le territoire européen.
Par conséquent, je vous en prie ! Vous avez à plusieurs reprises évoqué
l'intérêt national. Certaines responsabilités incombent aux collectivités
locales ; nous devons les assumer et les renforcer. D'autres responsabilités
appartiennent à l'Etat, dans l'intérêt national. S'agissant de l'établissement
de réseaux qui sont des réseaux nationaux, il n'y a pas de doute : ils doivent
être établis sans procédure de consultation des collectivités locales même si,
ensuite, pour le droit de passage sur le domaine des collectivités locales, la
consultation intervient forcément.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 91.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Monsieur le minisre, je crains que nous ne soyons au coeur d'une contradiction
forte et que les collectivités territoriales - mais vous aussi, monsieur le
ministre, et vos services encore plus - ne soient confrontés, à l'avenir, à de
très sérieuses difficultés si vous n'écoutez pas les raisons et le bon sens de
notre proposition. Si une contradiction institutionnelle existe bien sûr et si
l'intérêt de l'Etat se justifie, l'intérêt des communes, des départements et
des régions doit néanmoins être également pris en compte.
Nos amendements - je l'ai dit - ne cherchent pas à méconnaître le rôle qui
peut être celui de l'Etat ou de grandes entreprises publiques comme France
Télécom. Cependant, nous sommes bien obligés de constater que le texte, tel
qu'il nous est soumis, ne tient pas compte d'un certain nombre de réalités déjà
établies sur le terrain, singulièrement en matière de télévisions locales de
câble.
C'est si vrai que, dans ce projet de loi, « l'établissement et l'exploitation
des réseaux ouverts au public sont autorisés par le ministre chargé des
télécommunications » sans plus de consultation des acteurs locaux.
Or, depuis la loi du 30 septembre 1986 et son article 34, les communes
établissent ou autorisent l'établissement des réseaux câblés sur le territoire
; l'exploitation des services est autorisée par le CSA pour les services
audiovisuels et par le ministre chargé des télécommunications pour les services
de télécommunication, sur proposition des communes dans les deux cas.
Or, les réseaux câblés sont des réseaux de télécommunications ouverts au
public, comme ceux qui sont visés par l'article L. 33-1 auquel nous nous
référons. Il apparaît donc clairement que le texte dont nous débattons
aujourd'hui revient en partie sur des dispositions adoptées voilà presque dix
ans, et ce sans que vous l'ayez dit publiquement et sans que vous en ayez
informé la Haute Assemblée.
Je sens donc pointer le risque de conflits d'interprétation juridique puisque
nous savons que, à terme, tous les réseaux offriront l'ensemble des services, à
savoir la voix, les données, les images.
C'est ainsi que l'instauration d'un double régime pour des réseaux et services
de même nature empêcherait l'accomplissement des prérogatives des collectivités
territoriales, qui sont aussi chargées de veiller à la cohérence des
infrastructures et qui sont garantes de l'intérêt général.
Si nous pouvons comprendre que les rédacteurs du projet de loi ont souhaité ne
pas donner le sentiment de morceler la politique nationale des
télécommunications entre les 36 000 communes, nous constatons cependant qu'ils
ont poussé très loin leur zèle jacobin au point de méconnaître les lois
antérieurement votées et la réalité du terrain. Les élus locaux seront donc
exclus de tout processus décisionnel ou de concertation, alors que leur avis
n'en est pas moins précieux.
D'ailleurs, le directeur des relations extérieures de France Télécom ne disait
pas autre chose lorsqu'il s'est exprimé récemment dans la revue de
l'association des villes câblées : « Il ne serait pas normal que les élus se
sentent de purs spectateurs d'une bataille entre opérateurs, alors qu'il s'agit
en partie du développement de leur ville. Il y a donc lieu, poursuivait-il, de
rechercher une forme d'intervention qui, sans être une course d'obstacles pour
des opérateurs contribuant au développement local, permette quand même
d'imprimer la marque d'une municipalité sur ce qui est autre chose qu'un simple
problème de voirie ».
Tel est l'enjeu, mes chers collègues. Si le Sénat rejette notre amendement,
soyez certains que vous reviendrez alors sur certaines dispositions de la loi
de 1986, que vous mettrez en difficulté des communes qui sont déjà reliées à un
réseau câblé et que vous ne permettrez pas à d'autres de « prendre le train en
marche » lorsque des réseaux de télécommunications seront en mesure de les
desservir et que, pour une raison ou pour une autre, le ministre, dans le
secret de son bureau, ignorera les réalités locales.
Mes chers collègues, nous formons le Grand conseil des communes de France ; je
vous invite donc à bien réfléchir avant de repousser notre amendement.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen. - M. Delfau applaudit également.)
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
J'avoue que ce débat, que je suis avec une très grande attention, comme chacun
d'entre nous j'imagine, me laisse franchement interloqué !
De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'un conflit de compétences qui, comme vient de
l'indiquer mon collègue Paul Loridant, a été tranché, s'agissant du plan câble,
par la loi de 1986, ou qui a été surmonté par un certain nombre de pratiques
d'opérateurs nationaux, tels que Gaz de France, qui n'hésite pas, du moins
maintenant, avant de procéder à des travaux, à consulter les communes, ce qui
est bien la moindre des choses.
Nous discutons ce soir d'un projet de loi qui tend à modifier complètement
l'implantation des réseaux de télécommunications.
Comment comprendre que le Sénat, dans cette affaire, accepte que les
collectivités locales ne puissent pas dire leur mot ? C'est leur prérogative,
et cela n'est pas discutable, monsieur le ministre.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Si, c'est discutable !
M. Gérard Delfau.
Si nous étions d'accord sur le principe, je vous suivrais plus avant pour
considérer qu'il faut éviter les blocages et que l'on ne peut donc pas tout
morceler ; j'admettrais avec vous, par exemple, que, s'agissant d'un réseau de
télécommunications, l'avis doit être demandé à la collectivité locale
directement concernée : ce serait le district urbain, si ce réseau touche le
district urbain, la région, si l'ensemble de la région est concerné, ou le
département, si le réseau de télécommunications touche seulement un
département.
Mais comment expliquer que le ministre puisse prendre des mesures aussi
décisives pour la vie quotidienne des habitants sans qu'à un moment donné, dans
une France qui a voté les lois de décentralisation, un représentant des
collectivités locales puisse donner un avis ?
Vous refusez ! Pour moi, c'est incompréhensible. Vous essayez de caricaturer
notre position : nous disons « avis » ; vous feignez d'entendre « accord » ou «
refus motivé ». Ce n'est pas ce que nous demandons !
Par conséquent, nous maintenons fermement notre position. Le groupe socialiste
votera l'amendement présenté par M. Loridant. S'il n'est pas adopté, je ne
donne pas plus de deux ans pour que le Sénat revienne sur cette question...
M. Paul Loridant.
C'est sûr !
M. Gérard Delfau.
... car, devant les dégâts et la révolte des élus locaux, monsieur le
ministre, vous, ou votre successeur, serez bien obligé de revoir votre
position.
M. François Fillon,
ministre délégué.
C'est ainsi depuis 1990 et il n'y pas eu de révolte des
élus locaux !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 91, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
95:
Nombre de votants | 315 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 94 |
Contre | 221 |
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 147, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose de compléter in fine le sixième alinéa c du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications par les mots suivants : « et des informations liées aux communications ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement tend à accroître la confidentialité et la neutralité imposées aux opérateurs par le cahier des charges, en ce qui concerne non seulement le contenu des messages, mais également leur provenance, leur destination et l'heure à laquelle les appels ont eu lieu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend à préciser le texte ; il répond à un souci qui est aussi celui du Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le quatorzième alinéa k du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « de l'annuaire universel prévu » par les mots : « et à la tenue de la liste prévue ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification. En effet, la rédaction que nous vous proposons dissipe toute équivoque d'interprétation qui pourrait laisser supposer que l'organisme - nous y reviendrons au cours du débat - chargé de collecter les informations nécessaires à l'édition de l'annuaire éditerait lui-même l'annuaire.
Il convient de distinguer nettement l'édition de l'annuaire de la collecte des informations et de la gestion de la liste par l'organisme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 60 rectifié quater, MM. Cabanel, Laffitte, Rausch, Joly, Baudot et Bernadaux proposent de rétablir le vingt et unième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications dans la rédaction suivante :
« r) Les obligations sociales ou culturelles, sous la forme d'engagements pris par le futur opérateur en matière de raccordement d'institutions d'intérêt général tels que les établissements d'enseignement, de soins médicaux, les musées ou les fondations reconnues d'utilité publique. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 92, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le second alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après avis du conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement » par les mots : « d'une présence ».
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Cet amendement tend à supprimer une disposition défavorable à l'opérateur historique sur le plan de la concurrence.
Cette disposition permettrait aux sociétés qui exercent des activités dans d'autres secteurs que celui des télécommunications d'individualiser juridiquement leur nouvelle activité dans le secteur des télécommunications.
La mesure prévue par le paragraphe II du texte proposé pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications se situe pleinement dans la stricte application des directives de Bruxelles en matière de télécommunications.
M. Gérard Larcher l'explique clairement dans son rapport en indiquant que « le II de l'article L. 33-1 transpose une règle européenne de séparation comptable figurant dans la directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 ».
Sans vouloir paraphraser M. Pierre Mazeaud, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, je dirai que le rôle du Parlement se trouve, de fait, confiné à celui d'une chambre d'enregistrement, puisque la norme européenne s'impose à la norme nationale, selon la jurisprudence de la Cour de justice européenne, mais aussi du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation.
M. Emmanuel Hamel. Hélas ! Trois fois hélas !
M. Félix Leyzour. Hélas ! en effet, monsieur Hamel !
Nous pouvons donc nous interroger sur la portée de votre pouvoir d'appréciation sur la disposition que nous examinons présentement.
Cette mesure, qui régit l'individualisation des situations comptables, impose à l'opérateur historique, en l'occurrence France Télécom, des dispositions de libre concurrence qui avantageront, de manière incontestable, ces grandes multinationales, prêtes à se jeter sur toutes les activités potentiellement génératrices de profit.
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d'adopter notre amendement n° 92, afin d'éviter une dérive anarchique issue d'un libéralisme effréné, dérive dont les usagers et les salariés ne manqueraient pas de faire les frais.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement n° 92. En effet, la disposition retenue favorise les petites et moyennes entreprises par rapport aux grosses entreprises.
Je tiens à rappeler que l'obligation de filialisation que nous proposons concerne les opérateurs qui disposent d'un monopole ou d'une position dominante. Nous n'avons pas les mêmes exigences pour ceux qui émergent dans le marché, c'est-à-dire les petites et moyennes entreprises.
Vous êtes hostile à l'émergence de la concurrence, monsieur Leyzour, vous l'avez rappelé. Je n'oserai pas rapprocher ce fait de la défense du monopole de ATT avant 1984. La disposition que nous prévoyons tend à éviter que seules quelques grosses entreprises ne dominent le marché et à faire émerger réellement la concurrence au travers des petites et moyennes entreprises.
M. Gérard Delfau. Vous aurez les mêmes résultats !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. L'amendement n° 92 revient à imposer une obligation de filialisation à tout intervenant dans le secteur des télécommunications, dès lors qu'il exerce une activité dans un autre secteur, même s'il ne dispose d'aucune position dominante.
Cet amendement vide de son sens la disposition prévue dans le projet de loi. Par ailleurs, la mesure proposée me paraît impossible à mettre en oeuvre dans le cas où les infrastructures ne peuvent être séparées.
J'ajoute que, contrairement à ce qu'a indiquéM. Leyzour, nous n'appliquons pas strictement la réglementation européenne. Nous allons plutôt plus loin pour respecter la jurisprudence du conseil de la concurrence, telle qu'elle s'est appliquée à plusieurs reprises dans notre pays.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 92.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 92, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa du IV du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « des articles L. 33-1 et L. 34-1 » par les mots : « du présent article et de l'article L. 34-1 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 148, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés, proposent de compléter ainsi le premier alinéa du V du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications : « ou s'il est établi que ce nombre risque de porter atteinte au service public des télécommunications. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement a pour objet d'élargir les cas où le nombre de licences peut être limité, notamment lorsque ce nombre risque de porter atteinte au service public des télécommunications.
En effet, la directive 96/19/CE de la Commission a retenu, contre l'avis du Parlement européen, le principe de non-limitation des licences. Il convient, au contraire, d'encadrer ce droit à partir de l'intérêt du service.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 148. En effet, pour quelle raison l'importance du nombre de concurrents porterait-elle atteinte au service universel, dès lors que celui-ci est strictement défini et financé par les concurrents eux-mêmes ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui viennent d'être exposées par M. le rapporteur.
J'ajoute - M. Delfau l'a dit lui-même - que l'amendement n° 148 est contraire à l'engagement européen qui a été pris par tous les Etats membres, y compris la France, de ne limiter le nombre de licences que dans les situations de pénurie de fréquences. Les dispositions proposées seraient donc inapplicables en cas de contentieux.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 148.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je souhaite simplement faire observer que la pénurie de licences peut concerner très directement le service public.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 148, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Gérard Delfau. Le groupe socialiste également.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 33-2 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Par amendement n° 93, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer la seconde
phrase du troisième alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article L.
33-2 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Avec cet amendement, que nous soumettons à la réflexion de la Haute Assemblée,
nous proposons de ne pas retenir la possibilité d'obtenir l'autorisation
d'établir des réseaux indépendants sans décision expresse de l'autorité chargée
de l'accorder. L'écoulement d'un délai de deux mois à compter de la demande ne
doit pas valoir autorisation tacite.
Le premier alinéa de l'article L. 32-2 prévoit que ce n'est plus, comme dans
le régime actuel, le ministre chargé des télécommunications qui délivrera
l'autorisation, mais l'autorité de régulation des télécommunications.
Je ne reviendrai pas sur notre position concernant l'autorité de régulation.
Nous nous sommes, je pense, largement exprimés sur ce point. Je rappelle
toutefois que nous condamnons fermement le désengagement de l'Etat dans la
décision d'autoriser l'établissement de réseaux indépendants.
En outre, comme l'indique M. Larcher, à la page 109 de son important rapport,
« afin de renforcer la libéralisation du marché, le projet de loi prévoit,
contrairement au cas de figure habituel où le silence de l'administration vaut
décision de rejet, que le silence gardé pendant deux mois suivant une demande
vaut autorisation ».
Nous voyons bien là l'intention réelle des auteurs de ce projet de loi, qui
est de faciliter l'entrée de multiples opérateurs sur le marché des
télécommunications au détriment du maintien d'un service public de qualité.
Nous ne saurions admettre une telle entorse à ce qui prévaut habituellement en
droit administratif, d'autant moins qu'elle ne se justifie aucunement.
Le Gouvernement et la majorité tiennent absolument à donner tout pouvoir à une
autorité de régulation indépendante dont les membres seront dégagés de toute
responsabilité et de tout contrôle, mais subiront indéniablement la pression de
certains lobbies comme ceux qui agissent pour les entreprises privées agissant
dans ce secteur.
Au regard de la transparence et de la démocratie, un tel dispositif est
proprement indéfendable.
Telle est la raison pour laquelle nous sommes certains que le Sénat va émettre
un avis favorable sur l'amendement déposé par le groupe communiste républicain
et citoyen, car il permettra sans doute d'étudier dans de meilleures conditions
le cadre général de l'établissement et de l'exploitation des réseaux
indépendants.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je constate que M. Leyzour nous lit avec attention, mais je
suis obligé de lui dire que la commission est défavorable à son amendement,
parce qu'il alourdit les procédures.
La réflexion devrait sans doute être élargie s'agissant des rapports entre
l'administration, les citoyens et les entreprises, afin d'éviter le syndrome
huméro-cubital bien connu qui fait que des dossiers restent sous cette
importante articulation pendant un délai qui excède, me semble-t-il, ce que
l'on peut considérer comme un délai normal de réponse.
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Dans l'optique de la réforme de l'Etat, qui fait
l'objet d'un débat depuis quelques semaines, M. le Premier ministre a souhaité
que soient systématiquement supprimés les régimes d'autorisation, de manière à
défendre le droit des usagers...
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Très bien !
M. François Fillon,
ministre délégué.
... lorsqu'ils présentent telle ou telle demande à
l'administration. En effet, il n'y a aucune raison que ceux-ci dépendent du bon
vouloir d'un service administratif.
(M. le rapporteur opine.)
Je ne vois pas de raison, s'agissant de ce texte, d'agir différemment. Il
s'agit là, me semble-t-il, d'une évolution qui va dans le sens de la défense
des droits des citoyens : l'administration doit répondre dans les délais et,
quand elle ne le fait pas, c'est qu'elle donne son accord tacite à la demande
qui lui a été adressée.
Si nous adoptons ce principe dans tous les domaines de notre organisation
administrative, celle-ci connaîtra de véritables bouleversements.
M. Gérard Braun.
Tout à fait !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 93.
M. Michel Pelchat.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n'avais
pas déposé d'amendement sur cet article, son texte me paraissant suffisamment
clair, précis et bienvenu, comme viennent de l'indiquer M. le rapporteur et M.
le ministre.
Toutefois, l'amendement qui a été défendu à l'instant me donne l'occasion de
demander quelques précisions, et vous ne serez pas étonnés, mes chers
collègues, que je ne partage pas l'opinion de M. Leyzour. En effet, je crains
que cette demande d'autorisation auprès de l'autorité de régulation des
télécommunications ne soit trop contraignante pour ces réseaux indépendants et
je souhaiterais, monsieur le ministre, obtenir quelques précisions sur l'état
d'esprit dans lequel vous entendez traiter ce dossier.
Puisqu'il s'agit de confier à l'ART la responsabilité d'attribuer cette
autorisation, je voudrais savoir si cette procédure ressemblera à ce qui se
pratique dans des pays comparables à la France comme la Suède, le Royaume-Uni
ou les Etats-Unis, où le même système que le nôtre a été adopté depuis déjà
plusieurs années et où, pour les réseaux indépendants, l'autorisation était
quasiment un acte déclaratif. Il n'y avait pas d'instruction particulière pour
de tels dossiers.
Va-t-on, en France, dans cette direction ou, au contraire, va-t-on dans une
direction nettement plus administrative et nettement plus contraignante, même
si, effectivement, comme vous l'avez bien expliqué, l'absence de réponse au
bout de deux mois vaut avis favorable, ce qui va déjà dans le bon sens ?
Serons-nous aussi libéraux et l'autorisation de l'ART se résumera-t-elle à un
acte déclaratif pour les réseaux indépendants ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le régime d'autorisation des réseaux indépendants prévu
dans cet article est bien un régime d'autorisation générale, avec approbation
tacite. Il s'agit donc d'un système automatique dès lors que l'on remplit
certaines conditions générales définies à l'avance, sauf dans le cas
d'allocation de fréquences à l'opérateur.
M. Michel Pelchat.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 93, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 33-2 du code des postes et
télécommunications.
M. Félix Leyzour.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 33-3 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Sur le texte proposé pour l'article L. 33-3 du code des postes et
télécommunications, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 33-3 du code des postes et
télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 33-4 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Par amendement n° 94, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le texte présenté par
l'article 5 pour l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications,
après les mots : « sous réserve », d'insérer les mots : « des conditions et du
respect d'un cahier des charges fixés par le ministre chargé des
télécommunications et ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Le projet de loi achève, avec cet article L. 33-4, le processus de
libéralisation en rendant libre la publication de toute liste d'abonnés ou
d'utilisateurs de réseaux ou de services de télécommunications.
Cette liberté accrue, précise toutefois le texte, ne doit pas porter atteinte
aux droits des personnes concernées.
Nous proposons que, dans le texte présenté pour l'article L. 33-4 du code des
postes et télécommunications, soit insérée une disposition permettant au
ministre chargé des télécommunications de contrôler que la publication des
listes d'abonnés ou d'utilisateurs des réseaux ou services de
télécommunications se fasse, dans le respect des libertés individuelles, en
fonction d'un cahier des charges fixé par le même ministère.
Refuser cet amendement reviendrait à accepter que n'importe quelle imprimerie,
n'importe quelle société puisse, « sous réserve de la protection des personnes
concernées », notion bien floue pour un sujet si essentiel que le respect des
libertés individuelles, constituer un annuaire.
A l'Assemblée nationale, sur cette question primordiale, les députés,
conseillés par le Gouvernement, ont refusé l'adoption d'un amendement tendant à
préciser la nature des droits des personnes concernées.
Il semblerait que cette position ne satisfasse pas la commission des lois,
puisqu'elle propose, par voie d'amendement, de compléter l'article L. 33-4 du
code des postes et télécommunications en définissant certains des droits
garantis en ce domaine. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Cela étant, il conviendrait d'aller beaucoup plus loin.
Vous vous vantez de faire de la satisfaction des besoins du consommateur votre
priorité, mais comment pourra-t-il s'y retrouver si le texte est adopté en
l'état ?
A l'heure actuelle, les choses sont simples, claires et définies. Demain,
c'est sans doute une certaine anarchie qui prévaudra.
Est-ce cela que vous souhaitez en libéralisant complètement la publication des
annuaires ? J'ose espérer que non.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons d'adopter notre
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commision ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cet amendement déposé par le groupe communiste...
M. Paul Loridant.
... républicain et citoyen !
(Sourires.)
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
... - groupe qui est, je crois, jacobin et non pas girondin,
comme je l'ai entendu tout à l'heure - vise à revenir à un régime beaucoup plus
rigide.
Nous y sommes défavorables, mais nous sommes attentifs au respect des droits
de l'abonné. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté un amendement n°
6 rectifié, que je souhaiterais défendre dès à présent si vous m'y autorisez,
monsieur le président.
M. le président.
Je suis en effet saisi d'un amendement n° 6 rectifié, présenté par M. Gérard
Larcher, au nom de la commission, et tendant à compléter
in fine
le
texte proposé par l'article 5 pour l'article L. 33-4 du code des postes et
télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« Parmi les droits garantis figure celui pour toute personne de ne pas être
mentionnée sur les listes d'abonnés ou d'utilisateurs publiées, de s'opposer à
l'inscription de l'adresse complète de son domicile dans ces listes,
d'interdire que les informations nominatives la concernant soient utilisées
dans des opérations commerciales, ainsi que de pouvoir obtenir communication
desdites informations nominatives et exiger qu'elles soient rectifiées,
complétées, clarifiées, mises à jour ou effacées dans les conditions prévues
aux articles 35 et 36 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cet amendement n° 6 rectifié vise à garantir le droit pour
l'usager des télécommunications à figurer sur ce que l'on appelle la liste
rouge, à s'opposer à l'inscription de son adresse complète à côté de ses nom et
numéro de téléphone, à ne pas voir utiliser à des fins commerciales les
informations nominatives le concernant et, enfin, à exiger, en tant que de
besoin, la correction de ces informations.
Cette protection est au coeur de nos préoccupations.
C'est la raison pour laquelle nous proposons au Sénat d'adopter cet amendement
n° 6 rectifié et de repousser l'amendement n° 94.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° 94 et 6 rectifié ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 94,
qui vise à revenir sur une liberté acquise depuis 1990 et qui n'a pas posé de
problèmes tels qu'il faille mettre en place un régime moins libéral que celui
que nous connaissons aujourd'hui.
Si le Gouvernement a conseillé à l'Assemblée nationale de repousser
l'amendement qui lui avait été proposé sur les droits des abonnés, c'est parce
que le texte en question énonçait les droits d'une manière exhaustive, et donc
limitative - il en manquait, d'ailleurs - alors que la rédaction que propose
votre commission n'est pas limitative. Elle me semble beaucoup plus adaptée à
la défense des droits des abonnés.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 6 rectifié et défavorable
à l'amendement n° 94.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 94, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 33-4 du
code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 34 DU CODE
DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS
M. le président.
Sur le texte proposé pour l'article L. 34 du code des postes et
télécommunications, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 34 du code des postes et
télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 34-1 DU CODE
DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS
M. le président.
Par amendement n° 149, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier,
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « ou
lorsque le demandeur », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa du texte
proposé par l'article 5 pour l'article L. 34-1 du code des postes et
télécommunications : « n'a pas la capacité technique et financière de faire
face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice de son
activité ou n'a pas satisfait aux prescriptions régissant la mission ou la
délégation de service public qui lui a été confiée dans un autre secteur
d'activité, ou encore a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux
articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4 ».
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Cet amendement est l'homologue de l'amendement n° 146, la différence étant que
ce dernier avait trait aux réseaux tandis l'amendement n° 149 vise les services
de télécommunications.
Je ne reprendrai donc pas l'argumentation que j'ai développée tout à l'heure,
d'autant qu'elle a donné lieu à un échange de vues fourni qui ne nous a pas
permis de nous mettre d'accord. J'imagine d'ailleurs que je ne convaincrai pas
plus M. le rapporteur maintenant.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable. Par ailleurs,
j'éprouve les mêmes regrets que M. Delfau, puisque je n'ai pas su le
convaincre.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 149, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 34-1 du code des postes et
télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 34-2 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Par amendement n° 77, Mme Bardou, MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard
proposent d'insérer, après le premier alinéa du texte présenté par l'article 5
pour l'article L. 34-2 du code des postes et télécommunications, un alinéa
ainsi rédigé :
« Les opérateurs bénéficiaires d'une licence ou autorisation sont tenus de
fournir annuellement les informations statistiques concernant les flux, les
équipements et leur état, les conditions et zones d'accès selon des modalités
qui seront définies par décret. »
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
Il s'agit de permettre à l'autorité de régulation des télécommunications de
disposer d'un maximum d'éléments chiffrés pour assurer sa mission dans les
meilleures conditions, notamment celle qui concerne la prise en compte de
l'intérêt des territoires et des utilisateurs.
L'autorité de régulation doit pouvoir observer avec précision l'évolution de
l'offre des télécommunications dans les régions et les départements, et veiller
à ce qu'une partie de la population - même faible - ne soit pas pénalisée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Mme Bardou ainsi que MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard
sont extrêmement attentifs à tous les problèmes relatifs à l'aménagement du
territoire.
Ils ont su apporter leur contribution et la commission a repris un certain
nombre de leurs propositions, quant aux équipements des établissements
d'enseignement dans les secteurs de revitalisation, tant urbaine que rurale, et
quant à l'incitation au développement sur l'ensemble du territoire, quel que
soit son niveau de peuplement, notamment en matière de téléphonie mobile.
Leurs apports aux travaux tant de la commission que du Sénat sont extrêmement
importants.
L'amendement n° 77 vise à souligner clairement que les préoccupations
d'aménagement du territoire et les comptes rendus sur les niveaux d'équipement
doivent être annuels. Ce dispositif est assez lourd, nous n'en disconvenons
pas.
Toutefois, mon expérience récente en tant que président d'une commission
chargée de la préparation du schéma national d'aménagement du territoire me
montre que, si l'on veut traduire dans les faits la politique d'aménagement du
territoire à laquelle le Sénat a porté une attention particulière et consacré
des études approfondies, une vraie volonté est indispensable. Et les
rendez-vous fréquents ne sont pas inutiles pour rafraîchir quelques
mémoires.
Voilà pourquoi nous sommes favorables à cet amendement.
M. Gérard Delfau.
Dites-le bien au Gouvernement !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Madame Bardou, je partage complètement l'objectif que
vous cherchez à atteindre. En effet, il est très important que l'autorité de
régulation puisse observer l'évolution du secteur des télécommunications, en
particulier les offres de services.
Néanmoins, votre amendement ne permet pas de satisfaire cet objectif parce
qu'il prévoit des obligations pour des opérateurs autorisés alors que l'article
L. 34-2 traite non pas des opérateurs autorisés mais des services offerts
librement.
Il me semble d'ailleurs que vos souhaits sont satisfaits par d'autres
dispositions du projet de loi. Tout d'abord, le cahier des charges des
opérateurs autorisés prévoit des dispositions en la matière, notamment sur les
zones de couverture et le déploiement des services. Il prévoit aussi que
l'autorité de régulation pourra demander toute information permettant de
contrôler le cahier des charges.
Par ailleurs, comme nous en discuterons à l'article L. 36-14 du code des
postes et télécommunications, l'autorité de régulation des télécommunications
peut mener des études et recueillir des données sur le secteur.
Sous le bénéfice de ces explications, je souhaiterais, madame Bardou, que vous
puissiez retirer cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 77.
Mme Janine Bardou.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
Monsieur le ministre, comme M. le rapporteur, j'estime qu'il faut être
extrêmement vigilant en matière d'aménagement du territoire.
Peut-être cet amendement ne figure-t-il pas à la bonne place. Il n'en demeure
pas moins que les opérateurs bénéficiaires d'autorisations doivent fournir
certaines informations. Je ne pense pas qu'il soit excessif de le leur
demander.
Sur cette question importante, je me conformerai à la décision que le Sénat
prendra.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
C'est en tant que Languedocien que j'approuve ce texte ; mais mon propos
dépasse bien évidemment ce cadre géographique.
L'amendement de Mme Bardou pose une vraie question. En effet, la multiplicité
des opérateurs rendra plus illisible la carte de desserte du territoire en
matière de télécommunications.
Il est absolument nécessaire, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez
très précisément où, quand et comment l'autorité de régulation des
télécommunications va pouvoir suivre - si elle en a le pouvoir - l'évolution
annuelle et non pas quinquénale.
D'ailleurs, la commission supérieure du service public des postes et
télécommunications ne serait-elle pas, elle aussi, d'une certaine façon,
concernée, pour la partie service public ?
En tout cas, la question se pose et la Haute Assemblée, qui est très attentive
au déséquilibre du territoire - je parle ici devant d'éminents collègues - ne
peut pas ne pas traiter ce problème, ne pas lui apporter de solution.
M. Félix Leyzour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Avec cet amendement, c'est tout le problème de l'aménagement du territoire qui
est posé.
Je comprends l'inquiétude des auteurs de cet amendement, car le sort des
départements ruraux éloignés des grandes métropoles reste en suspens.
Selon moi, la régulation de l'offre devrait être de la responsabilité du
Gouvernement. Bien évidemment, pour les départements ruraux, la meilleure
garantie, c'est l'obligation de la péréquation sociale et géographique que nous
avons prônée en défendant le monopole du service public.
Ne soyons pas dupes, les opérateurs privés qui vont se ruer sur la téléphonie
ne se bousculeront pas pour s'implanter dans les départements les plus ruraux !
Nous restons donc persuadés que le maintien du monopole public serait le
meilleur garant d'une offre de qualité au moindre coût.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire en commission lorsque Mme Bardou a
présenté cet amendement, nous ne sommes pas des partisans du tout ou rien et
nous allons voter cet amendement.
Je note d'ailleurs que le fait que le Gouvernement refuse cet amendement est
tout à fait significatif de la réalité que recouvre ce projet de loi.
Le Gouvernement accepte certes que l'on parle d'aménagement du territoire - un
discours dans lequel on n'emploie pas cette expression n'est vraiment pas au
goût du jour ! - mais à la condition qu'on ne fixe pas clairement aux
opérateurs de télécommunications l'objectif d'aménager réellement le
territoire.
Notre groupe émettra et votera donc pour cet amendement.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Je demande à Mme Bardou de rectifier son amendement. Il nous
semble plus judicieux que cet amendement figure après le deuxième alinéa du
texte proposé pour l'article 34-2 et non après le premier.
M. le président.
Madame Bardou, acceptez-vous de rectifier votre amendement en ce sens ?
Mme Janine Bardou.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 77 rectifié, présenté par Mme Bardou,
MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard, et tendant, après le deuxième alinéa du
texte proposé par l'article 5 pour l'article L. 34-2 du code des postes et
télécommunications, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les opérateurs bénéficiaires d'une licence ou autorisation sont tenus de
fournir annuellement les informations statistiques concernant les flux, les
équipements et leur état, les conditions et zones d'accès selon des modalités
qui seront définies par décret. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement n° 77 rectifié ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Le Gouvernement est très embarrassé. Sur le fond, je
l'ai dit, je n'ai aucune objection à formuler sur l'esprit de cet amendement,
mais je persiste à dire à Mme Bardou qu'il n'aura pas de sens, et qu'il en aura
encore moins, monsieur le rapporteur, après l'alinéa qui concerne TDF.
Ce que vous voulez, c'est que les opérateurs de téléphone soient soumis à un
certain nombre d'obligations en matière d'informations concernant les flux, les
équipements et leur état, etc. Or, vous déposez un amendement sur un article
qui concerne non pas les opérateurs de téléphone, mais les transmissions de
données, les services qui sont libres.
Encore une fois, le Gouvernement n'est pas hostile à cet amendement sur le
fond ; il considère simplement qu'il n'a rien à voir avec cet article et qu'il
n'aura donc, s'il est adopté, aucun des effets que vous recherchez.
Je vous demande donc, madame Bardou, de le retirer.
M. le président.
Madame Bardou, l'amendement n° 77 rectifié est-il maintenu ?
Mme Janine Bardou.
Monsieur le ministre, si je vous comprends bien, c'est une question de forme
et non de fond qui vous amène à vous opposer à mon amendement.
J'estime donc que même s'il n'est pas déposé sur le bon article, ce que je ne
conteste pas, les informations que nous demandons pourront être obtenues par le
biais de cet amendement.
En tout état de cause, monsieur le président, il revient maintenant à chacun
de voter comme il l'entend.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre délégué.
Permettez-moi d'insister sur le fait que le
Gouvernement ne peut être favorable à un amendement qui, portant sur cet
article, sera dépouvu de sens et qui, malgré tous les regrets que j'exprime à
Mme Bardou, n'entraînera aucune obligation pour les services qu'elle vise. Je
crois que c'est dommage, mais je suis défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 77 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. Emmanuel Hamel.
Vous avez un grand succès, madame !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé par l'article L. 34-2 du
code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 34-3 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
Par amendement n° 167, M. Trégouët propose de compléter le dernier alinéa du
texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-3 du code des postes et
télécommunications par une phrase ainsi rédigé : « Elle doit notamment établir
les conditions d'une concurrence loyale entre les fournisseurs de services,
quelle que soit l'autorité assignant les fréquences. »
La parole est à M. Trégouët.
M. René Trégouët.
La mise en oeuvre de réseaux radioélectriques utilisant des fréquences
assignées par des autorités différentes pour la fourniture au public de
services de télécommunications de même nature est susceptible de générer des
conditions de concurrence inégales entre fournisseurs.
En effet, les règles appliquées pour autoriser l'établissement de réseaux
radioélectriques peuvent varier selon les autorités qui assignent les
fréquences. Ces différences peuvent notamment porter sur les conditions
techniques et financières d'utilisation des fréquences et d'installation des
réseaux. Il convient donc d'éviter que des distorsions de concurrence ne
résultent de ces différences.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cet amendement précise que les autorisations accordées
doivent permettre une concurrence loyale quelle que soit l'autorité qui
attribue ces fréquences ; ce peut-être par exemple le CSA.
Bien que la nécessité d'une concurrence loyale figure déjà à l'article L. 32-1
du code des postes et télécommunications, tout particulièrement dans sa
deuxième partie, et soit valable pour l'ensemble des dispositions du texte,
notre commission a été favorable à cet amendement, qui rappelle utilement les
conditions nécessaires à une concurrence loyale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
Favorable.
M. Emmanuel Hamel.
Parfait !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 167, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 34-3 du
code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 34-4 DU CODE
DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS
M. le président.
Sur cet article, je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° 95, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le texte
présenté par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et
télécommunications.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 96 est présenté par MM. Loridant, Ralite, Billard, Leyzour et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 150 est présenté par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau,
Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, au premier alinéa du texte proposé par cet article 5 pour
l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications, à remplacer le mot
: « information » par les mots : « avis conforme ».
Par amendement n° 151, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, dans la
seconde phrase du troisième alinéa du texte présenté par cet article 5 pour
l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications, après le mot : «
consultation » les mots : « et avis conforme ».
Par amendement n° 97, MM. Loridant, Ralite, Billard et Leyzour et les membres
du groupe communiste, républicain et citoyen proposent d'ajouter dans le
troisième alinéa du texte présenté par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du
code des postes et télécommunications, après le mot : « consultation », les
mots : « et avis ».
L'amendement n° 7, présenté par M. Gérard Larcher, au nom de la commission,
tend à rédiger comme suit la deuxième phrase du dernier alinéa du texte proposé
par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et
télécommunications :
« Ces mêmes conventions garantissent, au titre de ces services, une juste
rémunération du propriétaire de ces réseaux, assurant la couverture par le
fournisseur de services du coût des investissements utilisés à cet effet et des
prestations fournies. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 153, déposé par Mme
Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe
socialiste et apparentés et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n°
7 pour la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 34-4 du code des
postes et télécommunications, à remplacer le mot : « utilisés » par le mot : «
réalisés ».
L'amendement n° 168, présenté par M. Trégouët, est identique à l'amendement n°
7.
Par amendement n° 152, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier,
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de supprimer
l'avant-dernière phrase du dernier alinéa du texte présenté par cet article
pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Leyzour pour défendre l'amendement n° 95.
M. Félix Leyzour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre
amendement n° 95 tend à maintenir la situation juridique actuelle qui soumet la
fourniture des services de télécommunications au public à l'autorité
ministérielle chargée des télécommunications.
Le projet d'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications confie
cette compétence à la future autorité de régulation des télécommunications,
l'ART, instance dépourvue, nous l'avons déjà souligné, de toute légitimité
démocratique.
La compétence de l'ART sera décidément extrêmement vaste. Cette autorité sera
associée à l'élaboration des lois et elle veillera à leur application. Elle
sera associée au décret, et même - au nom de quelle légitimité ? -, aux
négociations internationales.
Si nous avons bien compris le texte dont nous discutons, elle prendra
l'initiative des arrêtés d'application de la présente loi à la place du
ministre, qui se contentera de les valider avant leur publication au
Journal
officiel
.
Elle instruira les autorisations délivrées par le ministre. C'est également
elle qui délivrera les certificats de conformité des équipements terminaux.
Nous le verrons plus tard dans le débat, c'est l'ART qui sera chargée de régler
un certain nombre de litiges à la place de la justice, dessaisie.
Enfin, et je ne suis pas exhaustif, l'ART contrôlera les obligations des
opérateurs résultant de la loi et des cahiers des charges. Cette dernière
compétence sera valable, y compris en matière de financement.
Trop c'est trop. Nous estimons qu'avec cette marche forcée vers une
pseudo-indépendance, vers un libéralisme qui masque mal la voie ouverte au
capitalisme le plus sauvage, c'est la démocratie même qui se trouve ainsi
bafouée. C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter notre amendement n° 95,
qui remet en cause l'une des compétences de la future autorité de régulation
des télécommunications.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour présenter l'amendement n° 96.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet
amendement vise à permettre aux collectivités territoriales d'intervenir dans
la décision d'utilisation des réseaux câblés à des fins de services de
télécommunications et de téléphonie.
En soi, mon argumentaire ne variera pas vraiment de l'amendement que j'ai
défendu précédemment puisque, là encore, il me semble que les communes
concernées doivent pouvoir faire entendre leur voix, à la différence près que,
là, on fait état de réseaux câblés qui existent déjà.
Tel qu'il est rédigé, l'article L. 34-4 laisse entendre que la fourniture au
public des services de télécommunications autres que le service téléphonique
sur les réseaux établis dans le contexte de lois précédemment votées permettra
d'outrepasser la volonté des communes.
En effet, comment interpréter autrement la rédaction de cet article, qui ne
prévoit comme mode de relations avec les collectivités locales qu'une simple
information avant autorisation d'une nouvelle source de services de
télécommunications susceptibles d'emprunter les réseaux locaux établis avec la
participation financière de celles-ci ? Je me dois de vous rappeler, mes chers
collègues, qu'un certain nombre de collectivités territoriales ont participé
financièrement à l'établissement de ces réseaux locaux câblés.
Le risque encouru à la suite de cette rédaction initiale, c'est que les
communes concernées soient le plus souvent mises devant le fait accompli sans
qu'elles n'aient en rien été associées au processus de décision.
« Après information de la commune... » est une rédaction passive qui ne permet
pas à la commune ou au groupement de communes ayant établi des réseaux ou
autorisé leur établissement de faire valoir un point de vue.
C'est pourquoi nous préférerions une autre rédaction plus active ou les mots «
avis conforme » remplaceraient le mot « information ».
Encore une fois, la représentation parlementaire ne peut pas faire comme si
rien ne s'était produit depuis les lois de décentralisation et celles qui
portent sur l'établissement des réseaux câblés sur leur territoire.
De fait, des communes et des groupements de communes ont énormément investi
dans ces réseaux câblés qui sont aujourd'hui largement déployés à travers tout
le territoire. Ils ne sont encore à ce jour ni rentables ni amortis. Ils ont
été établis avec des participations financières des villes dans le cadre du
plan câble ou sous le régime de la concession - majorité des sites « nouvelle
donne » - et appartiennent donc, de ce fait, aux communes.
Dès lors, il ne serait pas légitime que de nouvelles infrastructures puissent
être établies sur le territoire des communes sans que celles-ci soient
consultées et qu'elles aient pu émettre un avis. Cela paraît relever du simple
bon sens, au-delà de tout esprit partisan puisque les communes concernées
appartiennent à l'ensemble de l'échiquier politique.
On voudrait nous faire croire que la volonté des communes pourrait aller à
l'encontre de l'intérêt général. Voilà bien une réflexion de technocrates qui
n'ont que peu le sens des réalités locales. Sommes-nous, mes chers collègues,
vous qui souvent, comme moi, partagez des responsabilités locales, des
contrevenants à l'intérêt général lorsque nous veillons, dans nos communes, au
respect de la loi républicaine, à la cohérence des infrastructures, à
l'aménagement du territoire, au développement économique et à celui de la
démocratie ?
Pourquoi diable se méfier à ce point des décideurs locaux ?
Comprenez bien que notre amendement n'a pas pour objet de transformer les 36
000 communes de France en autant de régulateurs des télécommunications ; il
s'agit non pas de leur confier un rôle d'autorisation, mais de les consulter
pour avis avant que le ministre ne délivre les autorisations qui concernent
l'aménagement de leur territoire et déterminent leur économie.
Une telle revendication ne nous paraît pas infondée ni contraire à l'esprit du
temps et aux discours tenus par les plus hautes instances de ce pays.
N'est-ce pas se mettre en conformité tout simplement avec les souhaits
qu'exprime le Président de la République, notamment aujourd'hui, lorsqu'il se
rend dans les régions de France ?
Mes chers collègues, je m'en remets à votre sagesse et je vous demande
d'adopter cet amendement par simple bon sens.
M. le président.
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 150.
M. Gérard Delfau.
La législation actuelle dispose, s'agissant des réseaux câblés existants,
d'une part, que les communes ont compétence pour établir ou autoriser
l'établissement des réseaux câblés sur leur territoire et, d'autre part, que
c'est sur leur proposition que l'exploitation des services est autorisée par le
CSA pour les services audiovisuels et par le ministre chargé des
télécommunications pour les services de télécommunications.
Il n'apparaît donc pas légitime que les communes qui ont participé
financièrement à l'établissement des réseaux câblés et qui sont impliquées dans
l'exploitation de ces réseaux n'aient pas leur mot à dire sur la fourniture des
services, hors téléphonie vocale, sur leur réseau. L'objet de cet amendement
consiste donc à rétablir les droits et prérogatives des communes.
En effet, si la lecture à l'Assemblée nationale a permis d'améliorer ce projet
de loi, elle n'en demeure pas moins insuffisante. La procédure de l'information
ne permet pas aux communes de faire jouer pleinement leurs compétences. C'est
la raison pour laquelle nous proposons qu'elle soit utilement précisée par les
termes : « avis conforme », faute de quoi il y aurait objet de litige, et sur
l'ensemble du territoire. Le Sénat, qui se doit de veiller, comme d'ordinaire,
à l'intérêt des collectivités locales, c'est sa mission, ne peut qu'approuver
cet amendement.
Quant à l'amendement n° 151, il est analogue au précédent ; mais il s'agit
cette fois de la fourniture des réseaux téléphoniques sur le réseau câblé d'une
commune ou d'un groupement de communes.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 970.
M. Paul Loridant.
Cet amendement est de pure coordination rédactionnelle puisqu'il ne fait
qu'ajouter le mot « avis » au troisième alinéa de l'article L. 34-4.
Il tend à ce que les communes ou groupements de communes ayant établi un
réseau ou autorisé sa construction puissent non seulement être consultés, mais
également donner leur avis lorsque la fourniture d'un nouveau service proposé,
soumis aux dispositions de l'article L. 34-1 du code des postes et
télécommunications, est le service téléphonique au public.
Permettez-moi cependant d'ajouter quelques propos à ceux que j'ai déjà tenus
préalablement.
Certes, l'Assemblée nationale a formalisé une avancée par rapport au texte
initialement proposé par le Gouvernement, qui ne prévoyait en aucune manière la
consultation des communes câblées. Cependant, cette nouvelle rédaction demeure
insuffisante pour permettre aux communes de s'impliquer réellement dans le
développement des services locaux, qui constituent pourtant les motivations
initiales d'établissement de ces réseaux.
Dans un document émanant de la direction des relations extérieures de France
Télécom, j'ai pu lire le propos suivant : « France Télécom entend être un
acteur dynamique et performant du nouveau cadre. De par son histoire, sa
culture de service, de par les missions de service public que la loi lui
confiera, sa relation avec les collectivités locales ne sera pas une simple
relation client-fournisseur. France Télécom entend rester un acteur engagé du
développement local au côté des responsables locaux ».
Voilà un état d'esprit qui pourrait me convenir, mais force est de constater
que la lettre du projet de loi, tel qu'il nous est soumis après lecture à
l'Assemblée nationale, ne correspond pas tout à fait aux propos officiels tenus
par la direction de l'établissement public.
Le flou existant autour de la terminologie employée à propos des rapports
entre France Télécom et les collectivités locales, ajouté aux très nombreux
renvois à des décrets d'application, est loin de me rassurer.
Monsieur le ministre, je souhaiterais fermement que vous vous engagiez, devant
la représentation nationale, à ce que France Télécom veille systématiquement à
prendre le pouls des collectivités locales, singulièrement de celles qui sont
engagées dans le développement de réseaux locaux, dès lors que l'entreprise
publique cherchera à développer de nouveaux produits ou des services pouvant
avoir une incidence sur la gestion des réseaux câblés ou, plus généralement,
sur l'organisation de l'économie locale.
Ce n'est pas jouer les empêcheurs de tourner en rond que de revendiquer une
certaine considération des collectivités locales dans le processus décisionnel.
Il n'y a pas d'incompatibilité entre l'intérêt général, qui serait défendu par
France Télécom, dont chacun comprend bien qu'elle cherche à défendre sa place
prééminente, et l'intérêt des collectivités locales en termes de développement
économique et d'aménagement du territoire.
Ces deux intérêts ne s'opposent pas, ils se complètent.
Le projet de loi, tel qu'il se présente, laisse pourtant planer un doute sur
la confiance de France Télécom à l'égard de ses partenaires locaux.
Aussi est-ce pour lever ce doute que je vous demande, mes chers collègues, de
bien vouloir voter cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 7.
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Cet amendement tend à préciser que la rémunération prévue au
présent article pour la fourniture au public de services de télécommunications
sur le réseau câblé est bien une rémunération additionnelle spécifiquement liée
aux dits services et qu'elle portera sur les investissements réalisés,
c'est-à-dire sur les investissements utilisés à cet effet. En effet, il ne
s'agirait pas de prendre en compte l'ensemble des investissements qui ne
seraient point utilisés pour ces services particuliers du téléphone sur le
réseau câblé.
Nous aboutirions à des coûts prohibitifs et à la multiplication des
investissements, ce qui serait un gaspillage ! L'objectif ne serait pas atteint
pour l'opérateur historique qui, ayant beaucoup investi dans un réseau, en
attend un retour sur investissements et non pas un accroissement des
infrastructures.
M. le président.
La parole est à M. Trégouët, pour défendre l'amendement n° 168.
M. René Trégouët.
Mon amendement reprenant exactement les termes de l'amendement de la
commission, je le retire.
Il ne faut pas voir dans le dépôt de cet amendement un « effet de pompage »,
mais, comme on le dit sur le réseau, un « effet de miroir », et je vois que la
commission avait envoyé un bon signal !
(Sourires.)
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
Un miroir est toujours agréable quand il renvoie une bonne
image !
M. le président.
L'amendement n° 168 est retiré.
La parole est à M. Delfau, pour défendre le sous-amendement n° 153 et
l'amendement n° 152.
M. Gérard Delfau.
Avec ce sous-amendement, nous sommes au coeur d'une des questions les plus
difficiles soulevée par ce projet de loi.
Il s'agit de savoir dans quelle mesure les nouveaux opérateurs pourront
utiliser des réseaux existants et quel dédommagement il y aura dans ce cas.
Dans le texte qui nous est proposé, il est question d'une rémunération pour
les investissements utilisés. Nous souhaitons qu'il soit bien précisé - c'est
l'objet de notre sous-amendement - que l'investissement réalisé doit être
indemnisé. Nous craignons en effet qu'il n'y ait sous-estimation du coût réel,
et que la rémunération, qui doit être juste puisque la loi elle-même la
prévoit, n'aboutisse finalement qu'à sous-estimer l'engagement financier de
l'opérateur public France Télécom et, par-delà France Télécom, ce qu'ont payé
les contribuables et les usagers.
J'en viens à l'amendement n° 152.
S'agissant des réseaux câblés, l'Assemblée nationale a introduit une
disposition prévoyant que les conventions entre le propriétaire, par exemple
l'opérateur public, et l'exploitant desdits réseaux « précisent les modalités
de mise à disposition des capacités supplémentaires nécessaires pour la
fourniture de services sur ces réseaux ».
Cet ajout nous paraît source de difficultés. La notion de capacité
supplémentaire est une notion évolutive, donc difficile à définir de manière
immuable et à l'avance, du fait notamment des progrès techniques. C'est
pourquoi nous proposons de supprimer cette mention pour revenir au texte
initial.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 95, 96, 150, 151, 97,
7 et 152, ainsi que sur le sous-amendement n° 153 ?
M. Gérard Larcher,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 95, qui, en
fait, vise à revenir à la rédaction antérieure, c'est-à-dire à une autorisation
du ministre alors que le projet de loi soumet la fourniture des services à une
déclaration auprès de l'autorité de régulation. Les amendements n°s 96, 150,
151 et 97 visent, en quelque sorte, à substituer à la déclaration
l'autorisation du maire.
Mais nous ne sommes pas en présence d'une loi de municipalisation des réseaux
!
Je crois que l'information des collectivités locales est un élément suffisant.
Voilà pourquoi la commission est défavorable à l'ensemble de ces
amendements.
J'en viens au sous-amendement n° 153 et à l'amendement n° 152.
Il ne faudrait pas faire payer un certain nombre de choix qui ne se sont pas
révélés fructueux et qui correspondent à plus de 25 milliards de francs par la
concurrence ou par l'utilisateur.
Voilà pourquoi nous avons préféré mentionner les « investissements utilisés à
cet effet ». Notre position sur ce sujet est claire : elle est traduite par
l'amendement n° 7. La commission est donc défavorable au sous-amendement n°
153.
En ce qui concerne l'amendement n° 152, l'expression « capacités
supplémentaires » ne vise en aucun cas, à nos yeux, à obliger le propriétaire à
réaliser de nouveaux investissements. Je rappelle d'ailleurs que l'autorité de
régulation des télécommunications doit veiller à ce que les conventions
respectent l'équilibre des relations entre le propriétaire et l'exploitant,
afin d'écarter le risque que soulignait M. Delfau. Voilà pourquoi nous sommes
défavorables à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements, ainsi que sur
le sous-amendement n° 153 ?
M. François Fillon,
ministre délégué.
L'amendement n° 95 vise à interdire la libéralisation
de la téléphonie sur les réseaux câblés. Le Gouvernement y est donc totalement
défavorable, car l'introduction du téléphone sur le câble favorisera un
meilleur équilibre de l'exploitation des réseaux câblés et aidera à la
poursuite du câblage dans nos communes.
La téléphonie sur le câble fournira aussi l'occasion d'introduire une
concurrence innovante, source de nouveaux services pour les usagers. Les
expériences en cours dans ce domaine sont extrêmement prometteuses.
Le Gouvernement est également défavorable aux amendements n°s 96, 150, 151 et
97 pour des raisons que j'ai déjà indiquées tout à l'heure et que M. le
rapporteur vient de rappeler.
Nous souhaitons, là encore, que la concurrence s'exerce partout et que tous
les usagers puissent en bénéficier, quel que soit l'avis sur ce sujet de telle
ou telle collectivité engagée dans telle ou telle négociation avec tel ou tel
opérateur.
Là où nous introduisons un régime de simple déclaration, vouloir introduire
une autorisation de la collectivité locale - car l'avis conforme revient à une
autorisation - c'est déplacer le pouvoir en matière d'autorisation de réseaux
vers les collectivités locales, ce qui ne me semble pas aller dans le sens de
l'intérêt national.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7, qui clarifie l'intention du
Gouvernement en distinguant bien les rémunérations du propriétaire pour l'usage
lié au service des télécommunications dont il est question dans ce texte des
rémunérations pour l'usage audiovisuel.
En revanche, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 153, ainsi
qu'à l'amendement n° 152.
Il est vrai, monsieur Delfau, que la notion de capacité supplémentaire est
évolutive, donc difficile à définir de manière immuable à l'avance, comme
l'indique l'exposé des motifs de votre amendement.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi ne définit pas cette notion et
renvoie aux conventions le soin d'en traiter. J'ignore quel est votre objectif,
monsieur Delfau, mais s'il consiste à s'opposer au développement de telle
capacité supplémentaire, le Gouvernement ne peut bien évidemment pas être
favorable à l'amendement n° 152, puisqu'il souhaite l'émergence de nouveaux
services sur le câble.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 95, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 96 et 150, repoussés par la
commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 151, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 97, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 153.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Je tiens à redire que nous craignons beaucoup que ce texte ne soit
déséquilibré au détriment de France Télécom et au profit d'opérateurs
privés.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 153, repoussé par la commission et par
le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 152, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 34-4 du code des
postes et télécommunications.
M. Gérard Delfau.
Le groupe socialiste vote contre.
M. Félix Leyzour.
Le groupe communiste républicain et citoyen également.
(Ce texte est adopté.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
17
TRANSMISSION DE PROJETS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 1994.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 404, distribué et renvoyé à la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale
dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'information et à
la consultation des salariés dans les entreprises et les groupes d'entreprises
de dimension communautaire, ainsi qu'au développement de la négociation
collective.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 411, distribué et renvoyé à la
commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
18
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant
modification de l'article 12 de la directive 77/780/CEE visant à la
coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives
concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice,
des articles 2, 6, 7 et 8 et des annexes II et III de la directive 89/647/CEE
relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit, ainsi que de
l'article 2 et de l'annexe II de la directive 93/6/CEE sur l'adéquation des
fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de
crédit.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-638 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 76/207/CEE relative
à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et
femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation professionnelle et
les conditions de travail.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-639 et
distribuée.
19
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Paul Masson un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de résolution (n° 274, 1995-1996)
présentée en application de l'article 73
bis
du règlement par M. Daniel
Millaud sur la proposition de décision du Conseil portant révision à
mi-parcours de la décision 91/482/CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative
à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté européenne
(n° E-594).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 405 et distribué.
J'ai reçu de M. Gérard Larcher un rapport fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur le projet de loi relatif à l'entreprise
nationale France Télécom (urgence déclarée) (n° 391, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 406 et distribué.
J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi organique, adoptée par
l'Assemblée nationale complétant la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996
portant statut d'autonomie de la Polynésie française (n° 376, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 407 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Jacques Robert un rapport fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi, adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, sur la loyauté et
l'équilibre des relations commerciales (n° 392, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 408 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Oudin un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, portant diverses mesures en faveur des associations (n° 340,
1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 409 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Oudin un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la
proposition de loi relatif à l'encouragement fiscal en faveur de la
souscription de parts de copropriété de navires de commerce (n° 348,
1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 410 et distribué.
J'ai reçu de M. Charles de Cuttoli un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur :
- la proposition de loi organique de MM. Charles de Cuttoli, Jacques Habert,
Pierre Croze, Paul d'Ornano, Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Mme
Paulette Brisepierre, MM. Hubert Durand-Chastel et André Maman, tendant à
compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français
établis hors de France pour l'élection du Président de la République (n° 270,
1995-1996) ;
- la proposition de loi organique de MM. Charles de Cuttoli, Jacques Habert,
Pierre Croze, Paul d'Ornano, Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Mme
Paulette Brisepierre, MM. Hubert Durand-Chastel et André Maman tendant à
modifier et à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le
vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la
République (n° 271, 1995-1996) ;
- la proposition de loi organique de Mme Monique ben Guiga, MM. Guy Penne et
Pierre Biarnès tendant à modifier la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976
sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de
la République (n° 397, 1995-1996) ;
- la proposition de loi organique de Mme Monique ben Guiga, MM. Guy Penne et
Pierre Biarnès tendant à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976
sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de
la République (n° 398, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 412 et distribué.
20
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, jeudi 6 juin 1996 :
A dix heures quinze :
1. Suite de la discussion du projet de loi (n° 357, 1995-1996), adopté par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des
télécommunications.
Rapport (n° 389, 1995-1996) de M. Gérard Larcher, fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan.
A quinze heures et le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
3. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la situation en
Corse.
Aucune inscription de parole dans ce débat n'est plus recevable.
4. Suite de l'ordre du jour du matin.
Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
1° Projet de loi déclaré d'urgence relatif à l'entreprise nationale France
Télécom (n° 391, 1995-1996).
Le délai limite pour les inscription de parole dans la discussion générale est
fixé au lundi 10 juin 1996, à douze heures.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au lundi 10 juin 1996,
à douze heures.
2° Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer (n°
333, 1995-1996).
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au mercredi 12 juin
1996, à dix-sept heures.
3° Proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale, complétant
la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la
Polynésie française (n° 376, 1995-1996).
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au mercredi 12 juin
1996, à dix-sept heures.
Délai limite général pour le dépôt des amendements
Le délai limite pour le dépôt des amendements à tous les projets de loi et
propositions de loi ou de résolution prévus jusqu'à la fin de la session
ordinaire, à l'exception des textes de commissions mixtes paritaires et de ceux
pour lesquels est déterminé un délai limite spécifique, est fixé, dans chaque
cas, à dix-sept heures, la veille du jour où commence la discussion.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 6 juin 1996, à une heure cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ERRATA
Au compte rendu intégral de la séance du 23 mai 1996
AIR ET UTILISATION RATIONNELLE DE L'ÉNERGIE
Page 2852, 1re colonne, dans le texte proposé par l'amendement n° 172 pour le
second alinéa de l'article 4, dixième ligne :
Au lieu de :
« périodique, qui est confiée, pour »,
Lire :
« périodique, qui peut être confiée, pour ».
Au compte rendu intégral de la séance du 28 mai 1996
LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Page 3008, 1re colonne, dans l'intitulé du sous-amendement n° 62 rectifié,
troisième ligne :
Au lieu de :
« le dernier alinéa »,
Lire :
« l'avant-dernier alinéa ».
Délai limite pour le dépôt des amendements
à une proposition de résolution
En application de l'article 73
bis,
alinéa 7, du règlement, la
commission des lois a fixé au mardi 11 juin 1996, à dix-sept heures, le délai
limite pour le dépôt des amendements à la proposition de résolution qu'elle a
adoptée sur la proposition de décision du Conseil portant révision à
mi-parcours de la décision 91/482/CEE du Conseil du 25 juillet 1991, relative à
l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté européenne
(n° E 594).
Le rapport n° 405 (1995-1996) de M. Paul Masson sera mis en distribution
aujourd'hui, jeudi 6 juin 1996.
Les amendements devront être déposés directement au secrétariat de la
commission des lois et seront examinés par la commission lors de sa réunion du
mercredi 12 juin 1996, à neuf heures.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Statut des infirmiers du secteur psychiatrique
421.
- 5 juin 1996. -
M. Jean-Marc Pastor
attire l'attention de
M. le ministre du travail et des affaires sociales
sur la situation pour le moins paradoxale et problématique dans laquelle se
trouvent les infirmiers du secteur psychiatrique et en particulier sur les
difficultés rencontrées quant à la régularisation et l'obtention, pour certains
d'entre eux, de leur diplôme d'Etat d'infirmier. Il lui rappelle qu'en 1994 le
ministre des affaires sociales et de la santé de l'époque avait jugé que la
délivrance de droit de diplômes d'Etat aux infirmiers du secteur psychiatrique
était tout à fait justifiée et avait donc pris un arrêté dans ce sens le 26
octobre 1994. Or, le 20 novembre 1995, la direction générale de la santé a
informé le Conseil supérieur des professions médicales de la décision de
suspendre la délivrance des diplômes d'Etat d'infirmiers, sur consigne de la
Commission européenne. De ce fait, on peut aisément comprendre la situation à
la fois délicate et injuste dans laquelle se trouve la profession concernée,
certains infirmiers ayant pu valider leur diplôme d'infirmier psychiatrique et
d'autres pas, mais situation aussi scandaleuse car ce sont leurs compétences
professionnelles et médicales qui sont purement et simplement remises en cause.
Il souhaite que soit mis un terme à cette situation ambiguë engendrée par une
mesure discriminatoire et injuste. Il lui demande de bien vouloir lui donner
une réponse.
Politique du logement dans le département du Pas-de-Calais
422.
- 5 juin 1996. -
M. Léon Fatous
attire l'attention de
M. le ministre délégué au logement
sur la politique du logement dans le département du Pas-de-Calais et en
particulier dans le district urbain d'Arras. Il lui demande de lui préciser le
montant des crédits PLA (prêt locatif aidé) et Palulos (prime à l'amélioration
des logements à usage locatif et d'occupation sociale).
Apprentissage et formation
423.
- 5 juin 1996. -
M. René-Pierre Signé
indique à
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche
que le désir d'adapter notre système à la crise économique pose le problème de
l'apprentissage et de la formation ; on a retrouvé, par le biais des centres de
formation d'apprentis (CFA), la vieille notion d'école du patronat et mis,
qu'on le veuille ou non, dans les régions à faible démographie scolaire, en
concurrence CFA et lycées professionnels. Les CFA sont des établissements
privés qui reçoivent des fonds publics, y compris des taxes d'apprentissage
importantes de services de l'Etat, ce qui pose tout de même interrogation et
entraîne une concurrence malsaine. Le secteur public est ainsi menacé par la
priorité que l'on donne à l'apprentissage et l'alternance. On peut s'inquiéter,
dans une société où l'emploi précaire est de règle, ou seuls des emplois
éphémères sont créés, de cette formation étroite et spécifique pour un métier
bien déterminé, que dispense les CFA. On peut s'interroger sur cet enseignement
très orienté, assez éloigné du socle technique et polyvalent, nécessaire pour
demain quand l'apprenti devenu ouvrier sera peut-être confronté à une nouvelle
formation pour exercer un autre métier. Outre la concurrence exercée, il y a
aussi formation tronquée qui risque de freiner les chances de reconversion. Le
lycée offre d'autres possibilités. Il lui demande quelles sont les perspectives
de son action dans ce domaine.
Régime social des travailleurs transfrontaliers
N° 424.
- 5 juin 1996. -
M. Philippe Richert
constate que l'Alsace, tout comme l'ensemble des régions transfrontalières, se
distingue par les importants flux de personnes résidant dans un pays et venant
travailler de l'autre côté du Rhin. Cette situation, qui favorise les échanges,
se justifie généralement par des raisons d'ordre économique. Toutefois,
certains problèmes subsistent dans la vie quotidienne de ces ressortissants qui
restent confrontés à bon nombre de difficultés. Cela est notamment le cas dans
le domaine social, qu'il s'agisse par exemple des problèmes liés à
l'attribution des allocations familiales ou aux questions d'invalidité. En
effet, il arrive bien souvent que la législation des deux pays concernés ne
soient pas en totale juxtaposition, ce qui peut créer certaines interférences
et avoir des conséquences particulièrement fâcheuses pour les transfrontaliers.
Ne serait-il dans ces conditions pas souhaitable d'envisager la création d'une
commission « sociale », qui statuerait sur tous les problèmes liés à ces
personnes ? Il pourrait en l'occurrence s'agir d'une commission paritaire
franco-allemande, qui aurait un pouvoir décisionnel et qui serait à même de
régler la plupart des litiges résultant des situations évoquées précédemment.
Cette proposition avait d'ailleurs déjà été évoquée dès 1993 par l'actuel
Président de la République et elle mériterait d'être examinée avec attention.
Il souhaiterait en conséquence connaître la position de
M. le ministre du travail et des affaires sociales
sur la question et les suites qu'il entend y réserver.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance du mercredi 5 juin 1996
SCRUTIN (n° 88)
sur la motion n° 1, présentée par Mme Hélène Luc et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen, tendant à opposer la question préalable au
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la
Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
de la République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions
et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le
revenu (ensemble un protocole).
Nombre de votants : | 218 |
Nombre de suffrages exprimés : | 218 |
Pour : | 15 |
Contre : | 203 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
N'ont pas pris part au vote :
24.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre :
92.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Jacques Valade, qui présidait la
séance.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
N'ont pas pris part au vote :
74.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
58.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Nicole Borvo
Michelle Demessine
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Félix Leyzour
Paul Loridant
Hélène Luc
Louis Minetti
Robert Pagès
Jack Ralite
Ivan Renar
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Monique ben Guiga
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Jacques Bimbenet
Marcel Bony
André Boyer
Guy Cabanel
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Henri Collard
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Jean François-Poncet
Aubert Garcia
Gérard Gaud
François Giacobbi
Paul Girod
Roland Huguet
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Philippe Labeyrie
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
François Lesein
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Georges Mouly
Georges Othily
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Claude Pradille
Roger Quilliot
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
René Regnault
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Fernand Tardy
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jacques Valade, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification et conformes à la liste de scrutin ci-dessus.
SCRUTIN (n° 89)
sur la motion n° 138, présentée par M. Gérard Delfau et les membres du groupe
socialiste et apparentés, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité au
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de
réglementation des télécommunications.
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 94 |
Contre : | 221 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. François Giacobbi.
Contre :
18.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre :
93.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Pour :
73.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
57.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. René Monory, président du Sénat,
et Jean Faure, qui présidait la séance.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
François Giacobbi
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification et conformes à la liste de scrutin ci-dessus.
SCRUTIN (n° 90)
sur la motion n° 57, présentée par Mme Hélène Luc et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen tendant à opposer la question préalable au
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de
réglementation des télécommunications.
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 93 |
Contre : | 222 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre :
19.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre :
93.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Pour :
73.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
57.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. René Monory, président du Sénat,
et Jean Faure, qui présidait la séance.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 316 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 159 |
Pour l'adoption : | 93 |
Contre : | 223 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 91)
sur la motion n° 67, présentée par M. Paul Loridant et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen, tendant au renvoi à la Commission du projet
de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de
réglementation des télécommunications.
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 93 |
Contre : | 222 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre :
19.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre :
93.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Pour :
73.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
57.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. René Monory, président du Sénat,
et Jean Faure, qui présidait la séance.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 316 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 159 |
Pour l'adoption : | 93 |
Contre : | 223 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 92)
sur l'amendement n° 79, présenté par M. Claude Billard et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen, tendant à supprimer l'article premier du
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de
réglementation des télécommunications (mission de service public de France
Télécom).
Nombre de votants : | 306 |
Nombre de suffrages exprimés : | 306 |
Pour : | 93 |
Contre : | 213 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre :
19.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre :
93.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Pour :
73.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
57.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. René Monory, président du Sénat,
et Jean Faure, qui présidait la séance.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
N'ont pas pris part au vote :
10.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Hubert Durand-Chastel, Alfred Foy, Jean
Grandon, Jacques Habert, Jean-Pierre Lafond, André Maman, Claude Pradille, Alex
Türk et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 307 |
Nombre de suffrages exprimés : | 307 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 154 |
Pour l'adoption : | 93 |
Contre : | 214 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 93)
sur l'amendement n° 87, présenté par M. Claude Billard et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen, à l'article 2 du projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des
télécommunications (opposition à la création d'une autorité de régulation des
télécommunications).
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 88 |
Contre : | 227 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
1. _ M. François Abadie.
Contre :
23.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre :
93.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Pour :
72.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui
présidait la séance, et Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
58.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Yvon Collin
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Joëlle Dusseau
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 314 |
Nombre de suffrages exprimés : | 314 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 158 |
Pour l'adoption : | 89 |
Contre : | 225 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 94)
sur l'ensemble de l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications
(régulation des télécommunications).
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 223 |
Contre : | 92 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Contre :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
19.
Contre :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer,
Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Pour :
93.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Contre :
72.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui
présidait la séance, et Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Pour :
58.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Pour :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Pour :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Ont voté contre
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 316 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 159 |
Pour l'adoption : | 223 |
Contre : | 93 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 95)
sur l'amendement n° 91, présenté par M. Paul Loridant et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen, à l'article L. 33-1 du code des postes et
télécommunications proposé par l'article 5 du projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des
télécommunications (participation des collectivités locales au processus
décisionnel en matière d'autorisation pour la construction et l'exploitation
des infrastructures et des services des télécommunications).
Nombre de votants : | 314 |
Nombre de suffrages exprimés : | 314 |
Pour : | 93 |
Contre : | 221 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :
Pour :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre :
19.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Pour :
1. _ M. Emmanuel Hamel.
Contre :
91.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Philippe de Gaulle.
GROUPE SOCIALISTE (74) :
Pour :
72.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui
présidait la séance, et Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre :
58.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Emmanuel Hamel
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Philippe de Gaulle, Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 158 |
Pour l'adoption : | 94 |
Contre : | 221 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.