M. le président. Par amendement n° 90, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, après le mot : « sauvegarde », d'insérer les mots : « de l'intérêt national, ».
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. L'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications tend à instaurer une autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications pour l'exploitation de réseaux ouverts au public.
L'amendement n° 90 tend à préciser et à étendre les motifs pour lesquels une telle autorisation peut être refusée.
En effet, les motifs invoqués sont si minimes que l'on peut légitimement dire que le ministre ne pourra jamais refuser l'agrément. Or, comme nous l'avons démontré depuis le début de la discussion de ce texte, les télécommunications ne sont pas une marchandise comme une autre. Les enjeux de leur accès et de leur diffusion dans la population sont tels qu'il s'agit, pour nous, d'une question d'intérêt national.
Certes, dans les propos de campagne ou dans ceux de M. le Premier ministre, lors du mouvement qui a éclaté au cours des mois de novembre et de décembre derniers, il a souvent été question de cet intérêt national que l'on défendait à Bruxelles.
Je me permets de rappeler que M. Juppé déclarait avec solennité : « Nous défendrons le service public français auprès de Bruxelles. J'ai dit avec humilité aux Français que je suis prêt à le faire inscrire dans la Constitution. »
Aujourd'hui, ces promesses sont quelque peu oubliées. L'heure est à la déréglementation, à la casse du service public français et à la remise en cause de l'intérêt national.
Pour notre part, nous sommes persuadés que les télécommunications seront le système nerveux du développement économique. La maîtrise de ces flux doit donc rester entre les mains des représentants de la nation. C'est essentiel pour assurer un développement économique et social cohérent et pour maintenir le pacte républicain.
C'est pourquoi, mes chers collègues, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, je vous propose d'ajouter les mots : « de l'intérêt national » après le mot : « sauvegarde ».
M. Félix Leyzour. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission se prononce contre...
M. Paul Loridant. L'intérêt général ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Non ! La commission est contre cet amendement car la notion de l'intérêt national mérite de retenir toute notre attention.
Je tiens à rappeler que le texte comporte des précisions très claires en matière de sauvegarde.
La sauvegarde de l'ordre public, des besoins en matière de défense ou de sécurité publique relèvent bien, que je sache, de l'intérêt national. Mais, dans ce cas d'espèce, une notion doit être juridiquement solide pour pouvoir être introduite dans le texte parce qu'elle pourra faire l'objet de recours. Il ne nous semble donc pas que l'introduction de cette notion d'intérêt national, qui reste assez vague sur le plan juridique, soit de nature à renforcer le texte, bien au contraire. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Si nous pouvions nous mettre d'accord sur cette notion d'intérêt national, je serais prêt à accepter cet amendement. Mais, pour moi, l'intérêt national dans le domaine des télécommunications, c'est apporter à nos concitoyens plus de services ou au moins autant que dans les pays libéralisés, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, à des tarifs plus bas que ceux que nous pratiquons aujourd'hui et à permettre à France Télécom de partir à la conquête des marchés européens, américains et asiatiques parce que le quatrième opérateur mondial a vocation à être présent sur les trois continents.
Pour vous, l'intérêt national, c'est la défense d'un monopole qui maintient nos concitoyens dans une situation dans laquelle les services sont moins nombreux et plus chers. Je crois que nous ne pouvons donc pas nous mettre d'accord sur cette notion.
Mme Danielle Bidard-Reydet. La caricature vous sied mal, monsieur le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. C'est la vérité !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 90, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 146, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « ou lorsque le demandeur », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications : « n'a pas la capacité technique et financière de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice de son activité ou n'a pas satisfait aux prescriptions régissant la mission ou la délégation de service public qui lui a été confiée dans un autre secteur d'activité, ou encore a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4. »
Par amendement n° 196, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de supprimer la référence : « , L. 39-3 ».
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 146.
M. Gérard Delfau. Cet amendement a pour objet d'élargir les motifs de refus de délivrance d'une autorisation d'établissement et d'exploitation de réseaux ouverts au public. En effet, il n'échappe pas au Sénat qu'un certain nombre de groupes privés bénéficiaires d'une concession de services, ont connu ces dernières années des démêlés judiciaires. Certains de ces groupes ont même fait l'objet d'une sanction.
Il nous semble opportun de préciser qu'une autorisation d'utilisation de réseaux ne pourra pas être accordée à un groupe ayant fait l'objet d'une condamnation dans le cadre d'une concession de services, par exemple, dans le cadre du service des eaux.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 146 et pour présenter l'amendement n° 196.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Dans sa présentation, M. Delfau a précisé quelles étaient les sociétés visées. J'ai en effet connu un moment d'angoisse en commission. En effet, nous étions restés dans le vague, et j'ai pensé qu'il pouvait y avoir des doutes sur la SNCF, qui envisage de s'engager dans le domaine des télécommunications... Me voilà mieux informé !
Mais s'agissant des entreprises visées, notamment les grands distributeurs d'eau, il ne faut pas être atteint d'un syndrome d'une ville que je ne citerai pas car le dossier n'est pas encore clos. Il faut, en la matière, rester serein.
Que prévoit le texte ? Lorsque les opérateurs « disposent dans un secteur d'activité autre que les télécommunications d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après avis du conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement... », ce qui est le cas - j'ai tout à l'heure appelé de mes voeux une autorité de régulation dans le domaine de l'eau, mais restons dans celui des télécommunications - « ils sont tenus, dans l'intérêt d'un bon exercice de la concurrence, d'individualiser cette activité sur le plan juridique. » La réponse est là. Il ne s'agit pas de nier les problèmes qui se posent mais il faut éviter cette espèce de sentiment sulfureux que l'on voudrait faire planer au-dessus de l'ensemble de ces secteurs qui, rappelons-le, sont porteurs pour notre économie.
Arrêtons de nous suicider collectivement quand nous avons des entreprises qui fonctionnent, notamment Alcatel, qui est la première entreprise dans le domaine des télécommunications. Cessons de jeter ces entreprises en pâture, car elles sont une chance pour la France ! (MM. Bernard Seillier, Michel Pelchat et Gérard Braun applaudissent.)
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 146.
J'en viens à l'amendement n° 196. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 44 visant à supprimer le texte proposé par l'article 7 pour l'article L. 39-3 du code des postes et télécommunications, et qui concerne la possibilité de déclarer pénalement responsable une personne morale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 146 et 196 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 146 et il approuve les propos que vient de tenir M. le rapporteur. Je m'étonne d'ailleurs que les socialistes, qui ont été au pouvoir pendant près de douze ans, n'aient pas modifié la législation concernant ces sociétés qui leur semblent désormais représenter le diable.
S'agissant de l'amendement n° 196, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 146.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. A la suite des explications de M. le rapporteur, j'aurais envie de lui dire, mais ce serait facile, que chacun a ses champions !
M. Gérard Braun. Alors, ne le dites pas !
M. Gérard Delfau. Je souhaiterais élever le débat. Je voudrais lui faire observer que j'ai employé les mots « à titre d'exemple » et « notamment ». S'il est vrai qu'il y a une actualité regrettable et condamnable, il y a aussi tout simplement nécessité, pour le législateur, de prendre un certain nombre de garanties en ce qui concerne l'ensemble des filières et des opérateurs concernés, ni plus ni moins.
Par ailleurs, je voudrais tout de même suggérer à M. le rapporteur ainsi qu'à M. le ministre de bien écouter ce que dit la population.
M. Emmanuel Hamel. Mais nous sommes la population !
M. Gérard Delfau. Il vaudrait mieux que, de ce point de vue, nous soyons à la limite un peu trop rigoureux, plutôt que de passer pour un peu trop laxistes !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 146, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 196.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. S'agissant de l'entreprise Alcatel, qui a été évoquée par M. le rapporteur, je voudrais simplement faire remarquer qu'à un moment s'est posé un problème de surfacturation à France Télécom, lequel a porté sur près de deux milliards de francs. Certes, c'était une bonne entreprise, mais encore faut-il veiller à ce que la vérité se fasse véritablement.
M. Gérard Larcher, rapporteur. C'était le fait du monopole !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 196, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 91, MM. Loridant, Ralite, Billard et Leyzour, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le deuxième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit d'infrastructures nouvelles, l'autorisation du ministre chargé des télécommunications ne peut être délivrée qu'après consultation et avis des collectivités territoriales concernées. »
Par amendement n° 147, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le deuxième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« L'autorisation d'établissement d'un nouveau réseau ne peut être délivrée qu'après consultation et avis des collectivités locales et territoriales concernées. »
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Paul Loridant. Cet amendement a pour objet de tenir compte de l'avis des collectivités locales lorsqu'il s'agit d'implanter de nouveaux réseaux.
A n'en pas douter, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur des télécommunications connaît d'intenses évolutions et le projet de loi réglementant ce secteur nous a fait accomplir un grand bond, mais c'est, nous semble-t-il, un fantastique bond en arrière !
Je ne reviendrai pas sur les conséquences sociales et économiques qu'ont développées les précédents orateurs, ni sur les conséquences en termes d'aménagement du territoire à travers la fin de la péréquation pour les services obligatoires. Je partage ces analyses.
Je voudrais attirer plus modestement l'attention de la Haute Assemblée sur un point particulier de ce projet de loi, et lui soumettre un amendement qui devrait recueillir un très large consensus.
Mes chers collègues, nous devons veiller particulièrement au rôle des collectivités territoriales. Nous savons tous quel rôle incontournable elles jouent pour fédérer des acteurs locaux, pour faire naître de nouveaux services.
De très grandes villes européennes, comme Anvers, ont décidé de se doter d'infrastructures de télécommunications. Plusieurs centaines de villes françaises de toute importance et des départements entiers déploient sur leurs territoires des réseaux câblés, sur lesquels fonctionnent déjà des services de télécommunications, et vont en expérimenter d'autres dans le cadre des futures autoroutes de l'information. Des régions - je pense, en particulier, à l'Aquitaine - réfléchissent à des schémas directeurs en matière de télécommunications et investissent dans des équipements structurants, en partenariat avec France Télécom.
Les villes sont consultées, pour l'implantation de pylônes de télécommunications, pour des travaux de voirie permettant le passage de câble. Au sein de l'association des villes câblées, de nombreux maires nous ont fait part des sollicitations dont ils font déjà l'objet, de la part des hôpitaux, des centres de recherche et des universités, pour créer des réseaux locaux. Nous avons aussi nos propres besoins, pour relier les équipements administratifs, les écoles, les médiathèques et tout autre équipement.
Les villes sont aussi des aménageurs, elles sont à l'écoute des entreprises pour leurs besoins d'infrastructures de toutes sortes, et je peux vous dire, en tant que maire d'une ville où sont installées de nombreuses entreprises dans des secteurs de pointe, qu'elles nous interpellent aussi sur les télécommunications.
Ces projets, ces réalisations, vous en connaissez peut-être une partie, c'est « Visio université Ile-de-France », c'est l'anneau culturel de Valenciennes, pour le câble c'est « Metz interactive », c'est Futuroscope TV, c'est Cristal en Alsace. Du Vercors au Limousin, de l'Hérault à Lille, ces initiatives se chiffrent par plusieurs dizaines, et ce n'est qu'un début. Vous avez noté qu'il y a des départements ou des équipements qui sont chers au coeur du Sénat, je pense au Futuroscope.
Face à ce rôle de véritable pivot que jouent les collectivités territoriales entre les institutions, les entreprises et, bien sûr, les habitants, que prévoit ce projet de loi ? Rien. Les communes, les départements, les régions sont ignorés. Le ministre seul autoriserait la création d'infrastructures nouvelles sans même recueillir le simple avis des collectivités concernées.
Il s'agit bien d'un fantastique bond en arrière par rapport aux principes de la décentralisation.
Une infrastructure de télécommunications ne se décide pas à la sauvette. Elle s'étudie avec soin. Les investissements considérables, tant en matériel qu'en génie civil, doivent s'amortir sur un grand nombres d'années. Pour quels besoins, pour quels services ?
Alors, pourquoi ne pas recueillir l'avis des collectivités ? Ces infrastructures n'auraient-elles aucune incidence sur la vie locale ? N'y a-t-il aucune cohérence à rechercher ? N'y a-t-il pas le risque de voir certaines zones sous-équipées et d'autres suréquipées, sans rentabilité dans les deux cas, par un simple manque d'information et de concertation ? La concurrence est une chose, la gabegie en est une autre.
On nous objecte qu'il ne saurait y avoir 36 000 réseaux de télécommunications, comme il y a 36 000 communes. Mes chers collègues, nous sommes la Haute Assemblée. C'est un faux procès.
Il ne s'agit pas de cela. Depuis la décentralisation, que je sache, on construit toujours des routes, des autoroutes ou des voies ferrées. L'avis des communes et de leurs groupements est toujours recueilli. Les procédures sont rodées. Loin de bloquer les projets, cette procédure permet de leur assurer une meilleure insertion. Elle permet aussi aux collectivités d'anticiper sur l'arrivée de ces équipements, de les accompagner. Sur les autoroutes de l'information, n'y aura-t-il pas besoin de bretelles pour rejoindre la circulation locale ?
Les collectivités locales ne sont pas des freins à la croissance, au développement ; elles en sont un des moteurs, vous le savez bien. Je vous propose donc, mes chers collègues, que la consultation et l'avis des collectivités concernées soient introduits dans le projet de loi pour l'autorisation du ministre concernant les infrastructures nouvelles.
En adoptant cet amendement, vous voterez à la fois pour la défense des principes de la décentralisation et pour une meilleure efficacité économique. Je ne doute pas un seul instant que la Haute Assemblée sera sensible à cet amendement.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 147.
M. Gérard Delfau. Cet amendement, comme le précédent, tend à faire droit aux prérogatives des collectivités locales pour l'établissement d'infrastructures de télécommunications.
Comme les usagers, les collectivités locales sont les parents pauvres de ce projet de loi. Nous proposons donc, tout au long du débat, plusieurs amendements visant à faire droit à leurs prérogatives.
En l'occurrence, il s'agit d'autoriser l'établissement d'un nouveau réseau seulement après consultation et avis des collectivités concernées. Cet amendement est modeste. Il ne vise pas à conditionner l'établissement des réseaux à l'autorisation des communes. Il ne s'agit pas de donner aux communes un pouvoir de régulation, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, à M. Guyard qui défendait, à l'Assemblée nationale, un amendement similaire.
Les collectivités territoriales, le Sénat le sait tout particulièrement, sont adultes. La décentralisation n'était plus, dans cette enceinte, ces dernières années, objet de contestation. Encore que, avec la loi Pasqua, on se demandait parfois s'il n'y avait pas quelque impatience de l'Etat pour revenir sur quelques transferts de compétences - mais c'est là une remarque au passage.
Pour revenir à notre texte, monsieur le ministre, il nous paraît impossible, comme à vous tous, mes chers collègues, que nous n'acceptions pas de donner à nos communes, à nos départements, à nos régions, à nos syndicats intercommunaux, communautés de communes ou districts au moins le droit à une consultation et la possibilité élémentaire de donner un avis.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 91 et 147 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. S'agissant de ces deux amendements, nous devons dire les choses telles qu'elles sont.
Je rappellerai, tout d'abord, que nous avons souligné que les infrastructures de télécommunications seraient, dans les années à venir, encore plus importantes que les infrastructures de communications ou de transport bâties au siècle dernier ou dans les soixante-dix premières années du xxe siècle, et qu'elles seraient déterminantes en matière d'aménagement et de dynamique du territoire.
Je dirai également que le Sénat est naturellement attaché à la liberté des collectivités locales et territoriales.
Je voudrais néanmoins rappeler l'enjeu. L'amendement n° 91 ne vise pas une permission de voirie. Cette dernière figure d'ailleurs dans le texte proposé pour l'article L. 47 du code des postes et télécommunications, en ce qui concerne notamment le domaine routier, avec une consultation et une permission telles que le code de la voirie routière les prévoit. L'amendement présenté par M. Loridant tend, en fait, à consulter et à demander l'avis des collectivités territoriales concernées pour que le ministre puisse délivrer une autorisation d'infrastructures nouvelles.
Je prendrai l'exemple d'une infrastructure nouvelle le long de l'autoroute de l'Est assurant la jonction Paris-Strasbourg.
M. Félix Leyzour. Vous nous avez déjà donné cet exemple !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Oui, j'ai déjà pris cet exemple en commission, monsieur Leyzour, mais permettez-moi d'en faire profiter l'ensemble de la Haute Assemblée !
M. Michel Pelchat. C'est un bon exemple !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cette autoroute traverse plus de 620 communes, huit départements, quatre régions, ce qui signifierait autant de délibérations. Allons-nous être atteints du syndrome « TGV belge », qui, à la suite de la fédéralisation de la Belgique, bloque depuis cinq ans cette infrastructure essentielle pour nos voisins et pour nous-mêmes ? Je crois qu'en cette matière nous sommes trop attachés à la fois à l'intérêt national...
M. Emmanuel Hamel. On n'est jamais trop attaché à l'intérêt national !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... et à l'aménagement du territoire pour nous complaire dans ce type de méandres.
A l'époque des grandes décisions conduites par les gouvernements du général de Gaulle, l'intérêt national était l'une des priorités qui ont permis à notre territoire d'être dans l'état dans lequel il se trouve aujourd'hui.
C'est pourquoi l'amendement n° 91 qu'il ne faut pas confondre avec un amendement concernant la permission de voirie, me paraît particulièrement dangereux.
Les élus locaux que nous sommes aiment être consultés et donner leur avis, ce qui est naturel. Mais il y a aussi l'intérêt national. La commission des affaires économiques émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 91, et ce pour des raisons de fond qui sont d'ailleurs liées aux nécessités de l'aménagement et de l'équipement du territoire.
S'agissant de l'amendement n° 147, je formulerai les mêmes observations : l'aménagement du territoire et la décentralisation, c'est non pas une addition de grands et de petits duchés qui se mettraient successivement d'accord, mais un territoire qui reste, à mes yeux, un et indivisible et dont il revient à certains moments à l'exécutif de décider de l'intérêt supérieur.
La commission émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 91 et 147 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ferai trois réflexions.
Tout d'abord, monsieur Delfau, si vous êtes si soucieux de l'avis des collectivités locales sur l'établissement de ces réseaux, vous me permettrez de m'interroger sur les raisons qui ont conduit depuis tant d'années le groupe socialiste, en particulier, à ne pas réclamer ce droit qui n'existait ni dans la loi de 1990 ni auparavant.
M. Gérard Delfau. On l'a fait !
M. François Fillon, ministre délégué. Par ailleurs, je voudrais vous faire remarquer que ce texte prévoit pour la première fois le versement d'une indemnité aux collectivités locales.
Mais il s'agit d'établir des réseaux nationaux, des réseaux européens. Comment accepter que, pour établir un réseau national, il faille obtenir l'accord de l'ensemble des collectivités locales traversées ?
En réalité, on voit bien ce qui se cache derrière l'amendement n° 91 : si ce texte était adopté, il y aurait les communes favorables au réseau de l'opérateur public, et les communes favorables au réseau des opérateurs privés.
M. Michel Pelchat. Voilà !
M. François Fillon, ministre délégué. C'est vers ce type de combat département par département que nous nous orienterions au moment où il s'agirait d'établir des grands réseaux « sans couture », au moins sur le territoire national, sinon sur le territoire européen.
Par conséquent, je vous en prie ! Vous avez à plusieurs reprises évoqué l'intérêt national. Certaines responsabilités incombent aux collectivités locales ; nous devons les assumer et les renforcer. D'autres responsabilités appartiennent à l'Etat, dans l'intérêt national. S'agissant de l'établissement de réseaux qui sont des réseaux nationaux, il n'y a pas de doute : ils doivent être établis sans procédure de consultation des collectivités locales même si, ensuite, pour le droit de passage sur le domaine des collectivités locales, la consultation intervient forcément.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 91.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le minisre, je crains que nous ne soyons au coeur d'une contradiction forte et que les collectivités territoriales - mais vous aussi, monsieur le ministre, et vos services encore plus - ne soient confrontés, à l'avenir, à de très sérieuses difficultés si vous n'écoutez pas les raisons et le bon sens de notre proposition. Si une contradiction institutionnelle existe bien sûr et si l'intérêt de l'Etat se justifie, l'intérêt des communes, des départements et des régions doit néanmoins être également pris en compte.
Nos amendements - je l'ai dit - ne cherchent pas à méconnaître le rôle qui peut être celui de l'Etat ou de grandes entreprises publiques comme France Télécom. Cependant, nous sommes bien obligés de constater que le texte, tel qu'il nous est soumis, ne tient pas compte d'un certain nombre de réalités déjà établies sur le terrain, singulièrement en matière de télévisions locales de câble.
C'est si vrai que, dans ce projet de loi, « l'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public sont autorisés par le ministre chargé des télécommunications » sans plus de consultation des acteurs locaux.
Or, depuis la loi du 30 septembre 1986 et son article 34, les communes établissent ou autorisent l'établissement des réseaux câblés sur le territoire ; l'exploitation des services est autorisée par le CSA pour les services audiovisuels et par le ministre chargé des télécommunications pour les services de télécommunication, sur proposition des communes dans les deux cas.
Or, les réseaux câblés sont des réseaux de télécommunications ouverts au public, comme ceux qui sont visés par l'article L. 33-1 auquel nous nous référons. Il apparaît donc clairement que le texte dont nous débattons aujourd'hui revient en partie sur des dispositions adoptées voilà presque dix ans, et ce sans que vous l'ayez dit publiquement et sans que vous en ayez informé la Haute Assemblée.
Je sens donc pointer le risque de conflits d'interprétation juridique puisque nous savons que, à terme, tous les réseaux offriront l'ensemble des services, à savoir la voix, les données, les images.
C'est ainsi que l'instauration d'un double régime pour des réseaux et services de même nature empêcherait l'accomplissement des prérogatives des collectivités territoriales, qui sont aussi chargées de veiller à la cohérence des infrastructures et qui sont garantes de l'intérêt général.
Si nous pouvons comprendre que les rédacteurs du projet de loi ont souhaité ne pas donner le sentiment de morceler la politique nationale des télécommunications entre les 36 000 communes, nous constatons cependant qu'ils ont poussé très loin leur zèle jacobin au point de méconnaître les lois antérieurement votées et la réalité du terrain. Les élus locaux seront donc exclus de tout processus décisionnel ou de concertation, alors que leur avis n'en est pas moins précieux.
D'ailleurs, le directeur des relations extérieures de France Télécom ne disait pas autre chose lorsqu'il s'est exprimé récemment dans la revue de l'association des villes câblées : « Il ne serait pas normal que les élus se sentent de purs spectateurs d'une bataille entre opérateurs, alors qu'il s'agit en partie du développement de leur ville. Il y a donc lieu, poursuivait-il, de rechercher une forme d'intervention qui, sans être une course d'obstacles pour des opérateurs contribuant au développement local, permette quand même d'imprimer la marque d'une municipalité sur ce qui est autre chose qu'un simple problème de voirie ».
Tel est l'enjeu, mes chers collègues. Si le Sénat rejette notre amendement, soyez certains que vous reviendrez alors sur certaines dispositions de la loi de 1986, que vous mettrez en difficulté des communes qui sont déjà reliées à un réseau câblé et que vous ne permettrez pas à d'autres de « prendre le train en marche » lorsque des réseaux de télécommunications seront en mesure de les desservir et que, pour une raison ou pour une autre, le ministre, dans le secret de son bureau, ignorera les réalités locales.
Mes chers collègues, nous formons le Grand conseil des communes de France ; je vous invite donc à bien réfléchir avant de repousser notre amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Delfau applaudit également.)
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. J'avoue que ce débat, que je suis avec une très grande attention, comme chacun d'entre nous j'imagine, me laisse franchement interloqué !
De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'un conflit de compétences qui, comme vient de l'indiquer mon collègue Paul Loridant, a été tranché, s'agissant du plan câble, par la loi de 1986, ou qui a été surmonté par un certain nombre de pratiques d'opérateurs nationaux, tels que Gaz de France, qui n'hésite pas, du moins maintenant, avant de procéder à des travaux, à consulter les communes, ce qui est bien la moindre des choses.
Nous discutons ce soir d'un projet de loi qui tend à modifier complètement l'implantation des réseaux de télécommunications.
Comment comprendre que le Sénat, dans cette affaire, accepte que les collectivités locales ne puissent pas dire leur mot ? C'est leur prérogative, et cela n'est pas discutable, monsieur le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Si, c'est discutable !
M. Gérard Delfau. Si nous étions d'accord sur le principe, je vous suivrais plus avant pour considérer qu'il faut éviter les blocages et que l'on ne peut donc pas tout morceler ; j'admettrais avec vous, par exemple, que, s'agissant d'un réseau de télécommunications, l'avis doit être demandé à la collectivité locale directement concernée : ce serait le district urbain, si ce réseau touche le district urbain, la région, si l'ensemble de la région est concerné, ou le département, si le réseau de télécommunications touche seulement un département.
Mais comment expliquer que le ministre puisse prendre des mesures aussi décisives pour la vie quotidienne des habitants sans qu'à un moment donné, dans une France qui a voté les lois de décentralisation, un représentant des collectivités locales puisse donner un avis ?
Vous refusez ! Pour moi, c'est incompréhensible. Vous essayez de caricaturer notre position : nous disons « avis » ; vous feignez d'entendre « accord » ou « refus motivé ». Ce n'est pas ce que nous demandons !
Par conséquent, nous maintenons fermement notre position. Le groupe socialiste votera l'amendement présenté par M. Loridant. S'il n'est pas adopté, je ne donne pas plus de deux ans pour que le Sénat revienne sur cette question...
M. Paul Loridant. C'est sûr !
M. Gérard Delfau. ... car, devant les dégâts et la révolte des élus locaux, monsieur le ministre, vous, ou votre successeur, serez bien obligé de revoir votre position.
M. François Fillon, ministre délégué. C'est ainsi depuis 1990 et il n'y pas eu de révolte des élus locaux !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 91, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 95:

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 94
Contre 221

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 147, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose de compléter in fine le sixième alinéa c du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications par les mots suivants : « et des informations liées aux communications ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement tend à accroître la confidentialité et la neutralité imposées aux opérateurs par le cahier des charges, en ce qui concerne non seulement le contenu des messages, mais également leur provenance, leur destination et l'heure à laquelle les appels ont eu lieu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend à préciser le texte ; il répond à un souci qui est aussi celui du Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le quatorzième alinéa k du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « de l'annuaire universel prévu » par les mots : « et à la tenue de la liste prévue ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification. En effet, la rédaction que nous vous proposons dissipe toute équivoque d'interprétation qui pourrait laisser supposer que l'organisme - nous y reviendrons au cours du débat - chargé de collecter les informations nécessaires à l'édition de l'annuaire éditerait lui-même l'annuaire.
Il convient de distinguer nettement l'édition de l'annuaire de la collecte des informations et de la gestion de la liste par l'organisme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 60 rectifié quater, MM. Cabanel, Laffitte, Rausch, Joly, Baudot et Bernadaux proposent de rétablir le vingt et unième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications dans la rédaction suivante :
« r) Les obligations sociales ou culturelles, sous la forme d'engagements pris par le futur opérateur en matière de raccordement d'institutions d'intérêt général tels que les établissements d'enseignement, de soins médicaux, les musées ou les fondations reconnues d'utilité publique. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 92, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le second alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après avis du conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement » par les mots : « d'une présence ».
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Cet amendement tend à supprimer une disposition défavorable à l'opérateur historique sur le plan de la concurrence.
Cette disposition permettrait aux sociétés qui exercent des activités dans d'autres secteurs que celui des télécommunications d'individualiser juridiquement leur nouvelle activité dans le secteur des télécommunications.
La mesure prévue par le paragraphe II du texte proposé pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications se situe pleinement dans la stricte application des directives de Bruxelles en matière de télécommunications.
M. Gérard Larcher l'explique clairement dans son rapport en indiquant que « le II de l'article L. 33-1 transpose une règle européenne de séparation comptable figurant dans la directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 ».
Sans vouloir paraphraser M. Pierre Mazeaud, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, je dirai que le rôle du Parlement se trouve, de fait, confiné à celui d'une chambre d'enregistrement, puisque la norme européenne s'impose à la norme nationale, selon la jurisprudence de la Cour de justice européenne, mais aussi du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation.
M. Emmanuel Hamel. Hélas ! Trois fois hélas !
M. Félix Leyzour. Hélas ! en effet, monsieur Hamel !
Nous pouvons donc nous interroger sur la portée de votre pouvoir d'appréciation sur la disposition que nous examinons présentement.
Cette mesure, qui régit l'individualisation des situations comptables, impose à l'opérateur historique, en l'occurrence France Télécom, des dispositions de libre concurrence qui avantageront, de manière incontestable, ces grandes multinationales, prêtes à se jeter sur toutes les activités potentiellement génératrices de profit.
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d'adopter notre amendement n° 92, afin d'éviter une dérive anarchique issue d'un libéralisme effréné, dérive dont les usagers et les salariés ne manqueraient pas de faire les frais.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement n° 92. En effet, la disposition retenue favorise les petites et moyennes entreprises par rapport aux grosses entreprises.
Je tiens à rappeler que l'obligation de filialisation que nous proposons concerne les opérateurs qui disposent d'un monopole ou d'une position dominante. Nous n'avons pas les mêmes exigences pour ceux qui émergent dans le marché, c'est-à-dire les petites et moyennes entreprises.
Vous êtes hostile à l'émergence de la concurrence, monsieur Leyzour, vous l'avez rappelé. Je n'oserai pas rapprocher ce fait de la défense du monopole de ATT avant 1984. La disposition que nous prévoyons tend à éviter que seules quelques grosses entreprises ne dominent le marché et à faire émerger réellement la concurrence au travers des petites et moyennes entreprises.
M. Gérard Delfau. Vous aurez les mêmes résultats !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. L'amendement n° 92 revient à imposer une obligation de filialisation à tout intervenant dans le secteur des télécommunications, dès lors qu'il exerce une activité dans un autre secteur, même s'il ne dispose d'aucune position dominante.
Cet amendement vide de son sens la disposition prévue dans le projet de loi. Par ailleurs, la mesure proposée me paraît impossible à mettre en oeuvre dans le cas où les infrastructures ne peuvent être séparées.
J'ajoute que, contrairement à ce qu'a indiquéM. Leyzour, nous n'appliquons pas strictement la réglementation européenne. Nous allons plutôt plus loin pour respecter la jurisprudence du conseil de la concurrence, telle qu'elle s'est appliquée à plusieurs reprises dans notre pays.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 92.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 92, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa du IV du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « des articles L. 33-1 et L. 34-1 » par les mots : « du présent article et de l'article L. 34-1 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 148, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés, proposent de compléter ainsi le premier alinéa du V du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications : « ou s'il est établi que ce nombre risque de porter atteinte au service public des télécommunications. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement a pour objet d'élargir les cas où le nombre de licences peut être limité, notamment lorsque ce nombre risque de porter atteinte au service public des télécommunications.
En effet, la directive 96/19/CE de la Commission a retenu, contre l'avis du Parlement européen, le principe de non-limitation des licences. Il convient, au contraire, d'encadrer ce droit à partir de l'intérêt du service.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 148. En effet, pour quelle raison l'importance du nombre de concurrents porterait-elle atteinte au service universel, dès lors que celui-ci est strictement défini et financé par les concurrents eux-mêmes ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui viennent d'être exposées par M. le rapporteur.
J'ajoute - M. Delfau l'a dit lui-même - que l'amendement n° 148 est contraire à l'engagement européen qui a été pris par tous les Etats membres, y compris la France, de ne limiter le nombre de licences que dans les situations de pénurie de fréquences. Les dispositions proposées seraient donc inapplicables en cas de contentieux.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 148.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je souhaite simplement faire observer que la pénurie de licences peut concerner très directement le service public.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 148, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Gérard Delfau. Le groupe socialiste également.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 33-2 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS