M. le président. « Art. 1er. - Sont insérés dans le code général des impôts trois articles ainsi rédigés :
« Art. 238 bis HN . - Sont admises en déduction du revenu ou du bénéfice mentionnés respectivement au 2 de l'article 13 et au premier alinéa du I de l'article 209, selon les modalités définies aux articles 163 unvicies ou 217 nonies , les sommes versées au titre de la souscription de parts de copropriété de navires civils de charge, lorsque les conditions ci-après définies sont remplies :
« a) La souscription est effectuée avant le 31 décembre 2000 ;
« b) Le navire est livré au plus tard trente mois après la souscription et sa durée d'utilisation, attestée par une société de classification agréée, est d'au moins huit ans ;
« c) Les parts de copropriété sont conservées par le souscripteur, qui prend un engagement en ce sens, jusqu'au 31 décembre de la quatrième année suivant celle de la livraison du navire à la copropriété ;
« d) Le navire est, dès sa livraison et pendant la durée fixée au c, exploité ou frété par la copropriété dans les conditions prévues au titre premier de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966 ;
« e) L'entreprise qui, pendant la période prévue au c, gère la copropriété, en cas d'utilisation directe du navire, ou, à défaut, l'affrète directement, est une société passible de l'impôt sur les sociétés dans les conditions du droit commun et son activité principale est l'utilisation ou l'affrètement direct de navires civils de charge ;
« f) L'entreprise visée au e détient pendant la période fixée au c , un cinquième au moins des parts de la copropriété ;
« g) L'acquisition n'est pas réalisée auprès d'un organisme ou d'une entreprise lié directement ou indirectement, au sens des dispositions du 1 bis de l'article 39 terdecies, à l'entreprise mentionnée au e.
« En outre, le projet de copropriété quirataire doit avoir fait, préalablement à sa réalisation, l'objet d'un agrément délivré par le ministre chargé du budget après avis du ministre chargé de la marine marchande. Cet agrément est accordé lorsque l'investissement, effectué à un coût financier normal, permet de renforcer effectivement la flotte de l'entreprise mentionnée au e et présente, au regard notamment des besoins du secteur concerné de la flotte de commerce, un intérêt économique justifiant l'avantage fiscal demandé.
« Dans le cas où l'une des conditions fixées aux a et b d à g ci-dessus n'est pas remplie ou cesse de l'être, le montant des sommes qui avaient été déduites est ajouté, selon le cas, au revenu net global de l'année ou au bénéfice de l'exercice au cours duquel le manquement est intervenu. Lorsque le souscripteur ne respecte pas l'engagement prévu au c, ce montant est ajouté, selon le cas, au revenu net global de l'année ou au bénéfice de l'exercice au cours duquel les versements ont été opérés. »
« Art. 163 unvicies. - Le montant maximal des sommes déductibles annuellement en application des dispositions de l'article 238 bis HN, est de 500 000 F pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcées et de 1 000 000 F pour les contribuables mariés soumis à imposition commune. Le déduction, pour un investissement déterminé, est opérée au titre de l'année du versement.
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables en cas de souscription des parts de copropriété par l'intermédiaire de sociétés à responsabilité limitée mentionnées à l'article 239 bis AA et de sociétés à responsabilité limitée à associé unique qui n'ont pas opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés.
« La déduction prévue au présent article est exclusive de celle résultant, pour le même projet, des articles 238 bis HA et 163 vicies. »
« Art. 217 nonies. - Les sommes versées pour la souscription des parts de copropriété de navires civils de charge dans les conditions définies à l'article 238 bis HN viennent en déduction du bénéfice imposable au titre, selon le cas, de l'exercice ou des exercices de versement.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables :
« 1° Aux entreprises ayant pour activité d'armer, exploiter ou affréter des navires ;
« 2° Aux sociétés appartenant à un groupe, au sens de l'article 223 A, dont l'un des membres a pour activité principale celle mentionnée au 1°.
« La déduction prévue au présent article est exclusive de celle résultant, pour le même projet, de l'article 238 bis HA. »
Par amendement n° 41, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je conçois aisément que le débat que nous allons maintenant ouvrir risque fort de détonner quelque peu dans le concert ambiant.
Nous proposons en effet, avec cet amendement n° 41, de supprimer l'article 1er du projet de loi, ce qui revient, dans les faits, à ôter quasiment tout sens à ce projet de loi.
M. Jacques Habert. Charmant !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Pourquoi avons-nous une telle attitude ? Ne peut-on pas concevoir qu'un effort puisse être accompli pour que la filière maritime française bénéficie de mesures susceptibles de lui permettre de se relancer et de partir sur de nouvelles bases ?
La situation est connue, il est néanmoins utile de la rappeler.
Notre flotte marchande est à la fois en phase de régression et de vieillissement.
Il importe de souligner que ce vieillissement est différent selon les types de bateaux. Il est notamment plus prononcé pour les bateaux porte-conteneurs et les grands vraquiers.
On constate d'ailleurs que les objectifs initiaux du projet de loi sont précisément de développer les investissements sur ce segment de notre flotte, les paquebots et autres navires transbordeurs de passagers étant plus récents, de deux ans en moyenne, que les navires civils de charge.
Cette réalité tient à une situation relativement simple. Elle tient, d'une part, au maintien de la commande publique dans ce secteur et, d'autre part, au fait que nos chantiers navals sont spécialisés dans la construction de tels navires.
Tel est d'ailleurs le premier écueil de ce projet de loi : sans politique convergente de relance de la construction navale, notamment en matière de navires de transport de marchandises, le dispositif que ce projet de loi tend à mettre en place aura, selon nous, de réels effets pervers, en particulier ceux que l'on a constatés avec le système des quirats allemands, au premier rang desquels figure la délocalisation des investissements par la construction de navires en dehors des chantiers navals allemands.
Je ne reprendrai pas ce que j'ai dit lors de la discussion générale. Je relève cependant que, au moment même où nous débattons de ce texte aux attendus pour le moins incertains, notre pays s'apprête à signer un accord avec les autres pays de l'OCDE consacrant la fin du dispositif d'aide budgétaire à la construction navale, sous la chaude recommandation des Etats-Unis et du Japon.
C'est là, je crois, un point crucial du débat.
Si un tel accord était adopté, nous limiterions strictement la portée du projet de loi à ce qu'il est en réalité : une superbe niche fiscale pour les revenus les plus élevés et les entreprises, qui leur permettrait de se dégager de leurs obligations au regard de la collectivité en faisant supporter une part du risque industriel à l'Etat !
Voilà ce qu'il fallait dire pour clarifier les termes du débat.
Je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Oudin, rapporteur. Cet amendement conteste le principe même de la mesure d'incitation fiscale proposée. Vous comprendrez dans ces conditions, mes chers collègues, que la commission y soit défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Le Gouvernement ne sait pas si ce texte porte la marque d'une certaine perversité ; en revanche, il perçoit une certaine incohérence dans l'attitude de Mme Beaudeau - je le lui dit tout à fait respectueusement - parce que son amendement n° 41 vise à supprimer l'article 1er alors que, par ailleurs, l'amendement n° 42 tend à en étendre l'application.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous avez été parlementaire, monsieur le ministre : c'est un amendement de repli !
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Ou bien on supprime le texte, ou bien on l'étend, mais il faut rester cohérent !
En tout cas, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 41.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Lorsque M. Pons a présenté la loi de défiscalisation dans les départements d'outre-mer, nous avons entendu le même tollé. Force est cependant de constater que cette loi a été porteuse de développement pour l'outre-mer. (Mme Marie-Claude Beaudeau s'exclame.) Je sais ce dont je parle !
Or, la France, puissance maritime, permet à l'Europe, grâce à l'outre-mer, d'être aussi une puissance maritime.
Elue de l'outre-mer, j'ai beaucoup de peine de voir des navires battant pavillon étranger venir dans les ports français de la Caraïbe. Ce texte permettra à la France de se repositionner grâce à des encouragements fiscaux.
C'est la raison pour laquelle j'estime que cet amendement, qui est en totale contradiction avec la volonté du Gouvernement, doit être repoussé.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
ARTICLE 238 BIS HN DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS