SOMMAIRE
PRÉSIDENCE M. PAUL GIROD
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Election d'un sénateur
(p.
1
).
3.
Transmission d'un projet de loi et renvoi à une commission spéciale
(p.
2
).
4.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
3
).
5.
Candidature à un organisme extraparlementaire
(p.
4
).
6.
Adoption.
- Discussion d'une proposition de loi en deuxième lecture (p.
5
).
Discussion générale : MM. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la
sécurité sociale ; Luc Dejoie, rapporteur de la commission des lois ; Lucien
Neuwirth, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Franck
Sérusclat, Mmes Monique ben Guiga, Nicole Borvo, Joëlle Dusseau, M. Jean-Pierre
Fourcade.
M. le secrétaire d'Etat.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
Clôture de la discussion générale.
MM. le rapporteur, le président.
7.
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
(p.
6
).
Suspension et reprise de la séance (p. 7 )
8.
Adoption.
- Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi en deuxième
lecture (p.
8
).
M. le président.
Article 3 (p. 9 )
Amendements identiques n°s 1 de la commission et 29 de M. Sérusclat. - MM. Luc Dejoie, rapporteur de la commission des lois ; Franck Sérusclat, Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. - Retrait de l'amendement n° 29 ; adoption de l'amendement n° 1 supprimant l'article.
Article additionnel avant l'article 4 (p. 10 )
Amendement n° 30 de M. Sérusclat. - Mme ben Guiga, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 4 (p. 11 )
Amendements n°s 2 de la commission et 31 de M. Sérusclat. - M. le rapporteur, Mme ben Guiga, M. le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 31 ; adoption de l'amendement n° 2 supprimant l'article.
Article 5 (p. 12 )
Amendements n°s 3 de la commission et 32 de M. Sérusclat. - M. le rapporteur,
Mme ben Guiga, M. le sécrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement n° 3,
l'amendement n° 32 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 6
bis (supprimé)
(p.
13
)
Article 7 (p.
14
)
Amendements identiques n°s 4 de la commission, 33 de M. Sérusclat et 49 de Mme Dusseau. - MM. le rapporteur, Sérusclat, Mme Dusseau, M. le secrétaire d'Etat, Mme ben Guiga. - Retrait des amendements n°s 33 et 49 ; adoption de l'amendement n° 4 supprimant l'article.
Article 10 (p. 15 )
Amendement n° 48 de M. Chérioux. - MM. Neuwirth, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 11 (p. 16 )
Amendements identiques n°s 5 de la commission, 34 de M. Sérusclat et 50 de Mme Dusseau. - Adoption des amendements supprimant l'article.
Article 13. - Adoption (p.
17
)
Article 14 (p.
18
)
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 14 (p. 19 )
Amendement n° 54 de Mme Borvo. - Mme Borvo, MM. le rapporteur, le secrétaire
d'Etat, Mme ben Guiga, M. Neuwirth. - Rejet.
Amendements n°s 35 et 36 de M. Sérusclat. - MM. Sérusclat, le rapporteur, le
secrétaire d'Etat. - Rejet des deux amendements.
Article 15 (p. 20 )
Amendements identiques n°s 7 de la commission et 37 de M. Sérusclat. - M. le rapporteur, Mme ben Guiga, M. le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 37 ; adoption de l'amendement n° 7 supprimant l'article.
Intitulé du chapitre II (p. 21 )
Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Article 16 A (p. 22 )
Amendement n° 57 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 16 (p. 23 )
Amendement n° 9 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Intitulé de la section 2 (p. 24 )
Amendement n° 10 de la commission. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Article 17 (p. 25 )
Amendement n° 11 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 17 (p. 26 )
Amendement n° 38 de M. Sérusclat. - Mme ben Guiga, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article additionnel après l'article 20 (p. 27 )
Amendement n° 39 de M. Sérusclat. - MM. Sérusclat, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article additionnel avant l'article 27 ter AA (p. 28 )
Amendement n° 40 de M. Sérusclat. - MM. Sérusclat, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article 27 ter AA (p. 29 )
Amendement n° 56 rectifié du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le
rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 27 ter AA (p. 30 )
Amendement n° 51 de Mme Dusseau. - Mme Dusseau, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Articles 27
ter
A et 27
ter
B
(supprimés)
(p.
31
)
Article 27
quater.
- Adoption (p.
32
)
Article additionnel avant l'article 28 A (p.
33
)
Amendement n° 52 de Mme Dusseau. - Mme Dusseau, MM. le rapporteur pour avis, le secrétaire d'Etat, Mmes ben Guiga, Borvo. - Rejet.
Article 28 A (p. 34 )
Amendement n° 41 de M. Sérusclat. - MM. Sérusclat, le rapporteur pour avis, le
secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 28 (p. 35 )
Amendement n° 14 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour
avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Sérusclat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 29 (p. 36 )
Amendement n° 53 de Mme Dusseau ; amendements identiques n°s 15 de M. Neuwirth,
rapporteur pour avis, et 42 de M. Sérusclat ; amendement n° 43 de M. Sérusclat.
- Mme Dusseau, MM. le rapporteur pour avis, Sérusclat, Mme ben Guiga, M. le
secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements n°s 53 et 42 ; adoption de
l'amendement n° 15 ; rejet de l'amendement n° 43.
Adoption de l'article modifié.
Article 30 (p. 37 )
Amendement n° 44 de M. Sérusclat. - Devenu sans objet.
Amendements n°s 16 rectifié de M. Neuwirth, rapporteur pour avis, et 12 de la
commission. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat,
Sérusclat, Mmes ben Guiga, Dusseau. - Retrait de l'amendement n° 12 ; adoption
de l'amendement n° 16 rectifié.
Amendements n°s 45 de M. Sérusclat et 17 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis.
- Adoption de l'amendement n° 17, l'amendement n° 45 étant devenu sans
objet.
Adoption de l'article modifié.
Articles 30
bis
et 30
ter (supprimés)
(p.
38
)
Article 31 (p.
39
)
Amendements n°s 46 de M. Sérusclat, 18 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis, et 13 de la commission. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement n° 18 rédigeant l'article, les amendements n°s 46 et 13 étant devenus sans objet.
Article 32 (p. 40 )
Amendement n° 19 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur pour
avis. - Retrait.
Amendement n° 47 de M. Sérusclat. - Devenu sans objet.
Adoption de l'article.
Article 33 (p. 41 )
Amendements n°s 21 rectifié, 22 et 23 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. -
MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption
des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 34 (p. 42 )
Amendement n° 24 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour
avis, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 35 (p. 43 )
Amendement n° 25 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le secrétaire d'Etat, Mmes ben Guiga, Dusseau. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Articles 35
bis,
37, 38 et 40. - Adoption (p.
44
)
Article 42 (p.
45
)
Amendement n° 26 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour
avis, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 43 A. - Adoption (p.
46
)
Article 44 (p.
47
)
Amendement n° 55 de Mme Borvo. - Mme Borvo, MM. le rapporteur pour avis, le
secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 47 (p. 48 )
Amendement n° 58 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur, Mme ben Guiga. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 47 bis (p. 49 )
Amendement n° 27 rectifié de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 53 (p. 50 )
Amendement n° 28 de M. Neuwirth, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour
avis, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Vote sur l'ensemble (p. 51 )
MM. Emmanuel Hamel, Franck Sérusclat, Mmes Nicole Borvo, Monique ben Guiga,
Joëlle Dusseau, MM. Victor Reux, le rapporteur pour avis.
Adoption de la proposition de loi.
9.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
52
).
10.
Transmission d'un projet de loi
(p.
53
).
11.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
54
).
12.
Ordre du jour
(p.
55
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à seize heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
ÉLECTION D'UN SÉNATEUR
M. le président. En application des articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le président a reçu de M. le ministre de l'intérieur une communication de laquelle il résulte qu'à la suite des opérations électorales du 23 juin 1996 M. Claude Haut a été proclamé élu sénateur du département de Vaucluse.
3
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
ET RENVOI À UNE COMMISSION SPÉCIALE
M. le président.
M. le président a reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la mise
en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 461 et distribué.
En application de l'article 17, alinéa 1, du règlement, la conférence des
présidents propose de renvoyer ce projet de loi à une commission spéciale.
Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Il sera procédé le mercredi 26 juin à la nomination des membres de cette
commission spéciale dans les conditions fixées par l'article 10 du règlement.
4
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« Monsieur le président,
« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de
vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission
mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion du projet de loi relatif à l'encouragement fiscal en faveur de la
souscription de parts de copropriété de navires de commerce.
« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter le Sénat à
désigner ses représentants au sein de cette commission.
« J'adresse ce jour à M. le président de l'Assemblée nationale une demande
tendant aux mêmes fins.
« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération.
Signé : alain juppé »
Je rappelle au Sénat que la liste des candidats établie par la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation a été
affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Christian Poncelet, Jacques Oudin, Denis Badré, Guy Cabanel,
Roland du Luart, René Régnault et Mme Marie-Claude Beaudeau.
Suppléants : Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Henri Collard, Emmanuel Hamel,
Jean-Philippe Lachenaud, Philippe Marini, Michel Mercier et Michel Moreigne.
5
CANDIDATURES
À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation de son représentant au sein du comité des
prix de revient des fabrications d'armement.
En application de l'article 9, la commission des finances a présenté la
candidature de M. François Trucy.
Cette candidature a été affichée.
Elle sera ratifiée s'il n'y a pas opposition dans le délai d'une heure.
6
ADOPTION
Discussion d'une proposition de loi en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de
loi (n° 396, 1995-1996), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale
en deuxième lecture, relative à l'adoption. [Rapport n° 423 (1995-1996) et avis
n° 429 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
Monsieur le
président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, alors
que nous abordons la seconde lecture de cette proposition de loi, je tiens tout
d'abord à souligner l'importance du travail accompli sur ce sujet si délicat
que constitue l'adoption.
Je voudrais rendre hommage à la commission des lois et à la commission des
affaires sociales du Sénat, et tout particulièrement à leurs rapporteurs, MM.
Luc Dejoie et Lucien Neuwirth, qui ont pris une part décisive dans les
améliorations apportées à ce texte. Je tiens à les en remercier très
sincèrement au nom du Gouvernement.
Au-delà des discussions très riches qui ont nourri jusqu'à présent les débats
au cours de la navette, une volonté commune s'est affirmée de donner à cette
loi relative à l'adoption les moyens de répondre mieux encore à cette exigence
fondamentale que constitue le droit pour l'enfant d'avoir une famille.
Les objectifs qui sous-tendent la proposition de loi - des procédures
d'adoption plus simples, plus sûres et plus justes - sont d'ores et déjà
atteints.
Au-delà des nuances qui ont pu être apportées au texte par chacune des
assemblées, l'essence même de celui-ci et l'équilibre entre les volets civil et
social sont restés intacts.
Quelques points seulement appellent encore une discussion, sur lesquels je
voudrais faire de brèves observations.
Je commencerai par le volet juridique du texte.
S'agissant, en premier lieu, de l'assouplissement des conditions requises pour
prononcer une adoption, votre commission des lois ne souhaite pas que soit
exigé un écart d'âge maximum entre adoptants et adoptés.
Des hésitations sont en effet permises dans la mesure où une telle règle peut
apparaître trop rigide, mais il est vrai que l'intérêt de l'enfant est de ne
pas avoir de parents trop âgés. La question reste donc ouverte.
En revanche, je suis sensible, malgré la difficulté qu'il y a à fixer la durée
du délai de rétractation du consentement à l'adoption, aux arguments militant
en faveur de son abaissement à deux mois.
Je crois que cette démarche procède de la recherche d'un équilibre entre des
intérêts divergents. J'aurai l'occasion de m'en expliquer à nouveau au cours
des débats.
S'agissant en second lieu des dispositions tendant à revaloriser l'adoption
simple, j'approuve pleinement le choix de votre commission des lois de
maintenir tel quel l'âge limite de l'adoption plénière, tant il est vrai que la
période postérieure à l'adolescence est le champ d'application privilégié de
l'adoption simple.
Reste la question de la terminologie en vigueur pour ce type d'adoption. Votre
commission des lois ne souhaite pas la modifier. Sur ce point également le
Gouvernement reste très ouvert.
En ce qui concerne la question du secret de l'identité, j'observe avec
satisfaction que votre commission des lois a estimé devoir expliciter le
contenu et les conséquences à l'égard de l'enfant du principe, posé à l'article
30 de la présente proposition de loi, de lever le secret initialement
demandé.
Je m'interroge en revanche sur le seuil de l'âge de treize ans qui a été
introduit dans le même article.
Je crois en effet que le critère de l'âge doit être réservé aux seuls cas où
le mineur doit consentir à un acte modifiant son statut juridique. Il semble
donc que la communication des renseignements le concernant pourrait être plus
logiquement subordonnée au critère de l'aptitude au discernement, tel que
retenu par la convention internationale des droits de l'enfant.
Reste enfin un dernier point auquel, vous le savez, le Gouvernement attache
une importance particulière : je veux parler de l'introduction d'une norme de
conflit de lois relative à l'adoption d'enfants étrangers.
Je partage pleinement le point de vue adopté par votre commission des lois à
cet égard.
En effet, au-delà de tous les arguments d'ordre juridique, l'affirmation pure
et simple de la suprématie de la loi française sur la loi du pays d'origine de
l'enfant, lorque celle-ci prohibe l'adoption, pourrait conduire à donner aux
mineurs concernés un statut différent en France et dans son pays d'origine, et
ouvrir ainsi la voie à des trafics illicites.
La loi pourrait alors être détournée de sa finalité, ce que, à l'évidence
personne ne souhaite. Le Gouvernement soutiendra, par conséquent, l'amendement
de suppression de l'article 15 déposé par votre commission des lois.
Concernant, à présent, le volet familial de la proposition de loi, je
souhaiterais revenir un instant sur les avancées du texte que nous examinons
aujourd'hui.
Je voudrais, tout d'abord, rendre hommage aux travaux de la Haute Assemblée.
Vos réflexions ont été guidées, mesdames, messieurs les sénateurs, par le souci
de favoriser l'adoption de tous les enfants, mêmes grands ou supposés
difficilement adoptables en raison de leur état de santé, de leur handicap ou
de leur origine ethnique.
S'agissant de la simplification et de l'assouplissement des procédures pour
les candidats à l'adoption, un accord s'est déjà dégagé sur l'abaissement de
l'âge minimum et, en cas d'adoption conjointe, sur la durée du mariage requise
pour adopter, ainsi que sur la reconnaissance de la validité nationale de
l'agrément.
Je souhaite néanmoins m'arrêter un instant sur la procédure de délivrance de
l'agrément, et notamment sur le point de savoir s'il est préférable qu'il soit
exprès ou tacite.
Le Gouvernement partage à l'évidence avec votre assemblée le souci de réduire
les délais dans ce domaine, car ceux-ci constituent une épreuve pour les
adoptants, et il faut faire en sorte que les échéances fixées soient
respectées. Il ne faudrait pas, en revanche, qu'elles se transforment en
couperet, et que les agréments délivrés dans ces conditions, sans que les
enquêtes sociales et médicales aient été réalisées, entraînent un refus des
orphelinats étrangers de confier des enfants, dans la mesure où certains pays
attachent plus de prix aux enquêtes qu'à l'agrément lui-même.
Il ne me semble pas, du reste, qu'il y ait en matière de délais des
difficultés qui appelleraient une modification de la procédure. Je ne suis
qu'exceptionnellement saisi sur ce point particulier, et pour des cas ponctuels
demandant une instruction plus longue compte tenu de leur complexité.
Le Gouvernement considère que l'agrément tacite n'est sans doute pas l'élément
de procédure le mieux adapté aux circonstances de l'adoption.
Je m'engage, cependant, à tenir le plus grand compte de votre préoccupation de
clairement définir les étapes de la procédure.
Je voudrais, enfin, revenir un instant sur le principe de la parité des droits
sociaux en matière de prestations aux adoptants.
Je tiens à saluer tout particulièrement le travail de la commission des
affaires sociales et de son rapporteur sur ce sujet. Vous avez, monsieur le
rapporteur, très précisément traduit les conséquences juridiques et
administratives de ce souci de parité et je voudrais vous en remercier.
Vous contribuez également, aujourd'hui, à faire avancer de manière décisive la
parité des droits sociaux entre mères adoptantes non salariées et mères
adoptantes salariées. Il est vrai qu'aujourd'hui les premières sont moins
indemnisées que les secondes.
MM. Claude Huriet, Jean-Louis Lorrain et Jacques Machet avaient attiré
l'attention du Gouvernement sur ce sujet complexe à l'occasion de la première
lecture. Nous avons depuis lors travaillé en étroite collaboration avec votre
commission des affaires sociales pour parvenir à une solution satisfaisante.
C'est, je crois, chose faite aujourd'hui avec l'amendement que vous soumettra
votre rapporteur pour avis, M. Neuwirth.
Cette nouvelle disposition, si elle est adoptée, comme je le souhaite, portera
donc à un même niveau les indemnisations versées à l'occasion d'une adoption
dans les deux régimes, salariés et non salariés.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Très bien !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'engagera, par ailleurs, à allonger
par voie réglementaire la durée de versement des indemnités forfaitaires
journalières des mères adoptantes non salariées de trente jours en cas
d'adoptions multiples, comme cela existe déjà en cas de naissances multiples
pour les mères biologiques non salariées.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques précisions que je
voulais d'ores et déjà porter à votre connaissance avant que s'engage le débat
en deuxième lecture, devant la Haute Assemblée, de cette proposition de loi.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au cours de la
deuxième lecture de cette proposition de loi relative à l'adoption, je
reprendrai les propos que j'ai tenus lors de la première lecture : ce texte a
pour objet de rendre les conditions et les procédures d'adoption plus simples,
plus sûres et plus justes, sans remettre en cause, bien évidement, les
principes fondamentaux qui la régissent.
Je l'ai dit à plusieurs reprises, il s'agit avant tout un texte d'adaptation,
même si une ou deux avancées significatives ont été proposées entre-temps par
l'Assemblée nationale. Elles ont d'ailleurs été soulignées à l'instant par M.
le secrétaire d'Etat.
D'autres points, même s'ils ne figurent pas explicitement dans le texte, ont
été l'objet de la réflextion de notre Haute Assemblée en première lecture.
De manière générale, ce qui importe avant tout, c'est l'enfant, et lui seul.
D'autres considérations sont dignes d'attention, mais elles passent bien après
l'intérêt de l'enfant, nous devons le rappeler. A cet effet, il importe de
faire en sorte que toute la procédure d'adoption soit plus simple et plus
compréhensible, comme nous devons faire en sorte aussi que l'enfant adopté soit
le plus possible assimilé aux autres enfants.
Ces principes ont été présents à l'esprit non seulement de nos commissions,
mais aussi du Sénat tout entier.
Comme lors de la première lecture, la commission des lois s'intéressera au
titre premier, qui modifie le code civil, tandis que le reste du texte sera
traité par la commission des affaires sociales et par son rapporteur, M. Lucien
Neuwirth. Mais le rapporteur au fond que je suis vous demandera, bien
évidemment, d'adopter les amendements qui seront présentés par M. le rapporteur
pour avis.
A l'issue des lectures qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat,
dix-sept articles demeurent en discussion sur le titre premier. Ce chiffre peut
paraître important, mais il recouvre un certain nombre de modifications
formelles qui ne devraient pas susciter de difficultés majeures.
Certaines dispositions nouvelles ont été introduites par l'Assemblée
nationale. Elles sont, au yeux de la commission des lois, tout à fait
judicieuses. Je pense par exemple à la sanction possible du parent naturel qui
n'informe pas l'autre parent de son changement d'adresse. S'agissant de
l'exercice de droit de visite, cela peut évidemment poser des problèmes ! Je
pense également à l'information du parent qui a reconnu l'enfant le premier en
cas de reconnaissance par le second parent. Le simple bon sens nous fait
approuver une telle disposition.
L'Assemblée nationale a par ailleurs supprimé trois dispositions introduites
par le Sénat qui avaient pour objet d'inscrire dans le code civil la faculté de
recueillir des renseignements non identifiants - j'utilise cette expression
parce qu'il faut bien l'employer, affreuse soit-elle, je le répète pour la
énième fois - auprès des parents qui remettent leur enfant aux fins d'adoption,
en demandant le secret de leur identité. Cette possibilité de recueillir et
consigner des éléments dits non identifiants constitue, à mon sens, une avancée
essentielle. Elle existait peut-être dans la pratique, mais elle n'avait pas de
base légale.
La Haute Assemblée avait voulu solenniser cette possibilité - sinon
révolutionnaire, du moins très nouvelle - en l'inscrivant dans le code civil.
L'Assemblée nationale s'y est cependant refusée, au nom d'une logique qui
m'échappe. Quoi qu'il en soit, nous ne nous battrons pas sur ce thème.
L'absence de mention dans le code civil se traduira par une moindre solennité,
mais cela n'a guère d'importance.
Je vous proposerai, en revanche, de reprendre certaines des positions que nous
avions prises en première lecture, notamment en supprimant l'introduction d'une
différence d'âge maximale entre l'adoptant et l'adopté, qui est inutile et ne
peut présenter que des inconvénients. En première lecture, l'Assemblée
nationale proposait de fixer cette différence d'âge à quarante-cinq ans ;
aujourd'hui, elle nous propose de la porter à cinquante ans. Cela nous paraît
inutile, nous vous proposerons donc de revenir au texte actuel, qui ne prévoit
aucun écart d'âge maximal, et donc de supprimer l'article 3.
Se pose aussi la question de la réduction du délai de rétractation du
consentement à l'adoption, que l'Assemblée nationale avait fixé initialement à
six semaines. Nous avions expliqué que c'était trop court, parce que, pendant
ce bref délai, la mère pouvait être malade ou se trouver dans des conditions
physiques ou morales telles qu'elle pouvait ne pas avoir le temps suffisant
pour prendre sa décision en pleine connaissance de cause.
J'avais proposé, au nom de la commission des lois, de porter ce délai à deux
mois. Le Sénat m'avait largement démenti et avait choisi d'en rester au délai
actuel de trois mois. L'Assemblée nationale a repris les deux mois initialement
proposés par la commission des lois. Je n'aurai pas l'outrecuidance de chercher
à violer la Haute Assemblée, en quelque sorte, et je m'en tiendrai aux trois
mois qu'elle a retenus en première lecture. Nous verrons bien comment les
choses se passeront ultérieurement en commission mixte paritaire ! Au
demeurant, j'indique dès à présent que j'espère que nous aboutirons alors à un
heureux résultat.
Par ailleurs, sur un sujet que M. le secrétaire d'Etat a évoqué, la question
de l'adoption internationale, le texte adopté par l'Assemblée nationale conduit
non seulement à donner une sorte d'encouragement aux trafics d'enfants, mais
encore à nier les principes du droit international privé. Comment imaginer
pouvoir, dans un Etat de droit comme le nôtre, dans un pays qui respecte le
droit international, affirmer purement et simplement dans notre législation
que, si un autre pays ne reconnaît pas l'adoption, voire la prohibe, le juge
français passera outre ? Il est difficile de l'accepter pour un juriste, ne
serait-ce qu'au nom du simple bon sens, d'autant plus, comme cela a déjà été
rappelé en première lecture, qu'une jurisprudence récente de la Cour de
cassation règle pour l'instant au cas par cas la quasi-totalité des
difficultés.
Le droit est évolutif, les lois sont évolutives ; nous verrons bien, dans
quelques années, s'il n'est pas possible de faire mieux. Aujourd'hui, nous
disposons d'un moyen pragmatique pour nous en sortir - je vous prie de me
pardonner cette expression triviale - et je considère qu'il vaut mieux s'en
tenir à ce moyen.
La question de l'agrément administratif avait entraîné quelques difficultés.
Celles-ci sont levées et nous proposerons une rectification purement formelle,
qui ne devrait pas poser de problème.
De fait, il reste peu de points importants parmi les divergences qui
subsistent entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
Un accord est en effet intervenu pour le recueil facultatif des éléments dits
non identifiants ainsi que pour l'accès de l'enfant à ces informations dès sa
minorité, avec l'accord de son représentant légal, ce qui est tout à fait
légitime. Il en va de même, en cas de remise de l'enfant aux fins d'adoption,
de la limitation à un an de la possibilité pour les parents biologiques de
demander l'anonymat. C'est également une question de bon sens. On ne peut pas
demander l'anonymat alors que l'enfant a quatre ou cinq ans, car il a non
seulement constitué des souvenirs mais aussi établi des relations avec ses
parents adoptifs. Pendant les douze premiers mois de sa vie, l'anonymat peut
sans doute être respecté ; nous l'avions proposé, cela a été accepté en
première lecture par le Sénat.
Il n'y a donc plus de difficultés en la matière, sous réserve de préciser,
comme le Sénat l'avait souhaité en première lecture, que l'accès aux éléments
non identifiants ne sont ouvert qu'au mineur de treize ans.
L'Assemblée nationale a introduit en deuxième lecture une disposition qui nous
semble devoir être retenue : le parent qui demande le secret de son identité
doit être informé qu'il lui est possible de renoncer ultérieurement à ce
secret. L'enfant devenu majeur pourra alors, s'il le demande, connaître
l'identité de ses parents biologiques.
Cette disposition n'était pas juridiquement nécessaire puisque, en vertu des
principes généraux du droit, une personne est toujours en droit de renoncer à
une protection juridique dont elle a demandé à bénéficier. Celui qui avait
demandé le secret a donc toujours la possiblité de renoncer à ce secret ! Cela
étant, si chacun est supposé connaître la loi, ce n'est pas forcément évident
pour tout le monde et, en l'inscrivant dans la loi, ce sera peut-être plus
clair. Cela permettra également de préciser dans quelle mesure l'enfant peut,
s'il le souhaite, accéder à l'identité de ses parents lorsque ceux-ci ont levé
le secret.
La commission des lois souhaite cependant compléter ce dispositif. Supposons
qu'un enfant abandonné, dont les origines sont inconnues, ait fait l'objet
d'une adoption. Si ses parents biologiques, par la suite, renoncent au secret
de leur identité, cela nous paraît tout de même la moindre des choses que les
parents adoptifs, qui élèvent et voient grandir l'enfant, en soient informés,
ne serait-ce que pour préparer l'enfant à recevoir ou à demander - puisqu'il
doit la demander - cette information.
En conclusion, sous réserve des quelques modifications que nous vous proposons
et des quelques réserves que je viens d'exprimer, la commission des lois vous
demande d'adopter la présente proposition de loi.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.
Monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'issue de la première lecture du
présent texte, qui a eu lieu les 23 et 24 avril 1996, ici même en séance
plénière, il restait trente-quatre articles en discussion concernant les quatre
titres pour lesquels votre commission des affaires sociales était saisie pour
avis, soit, respectivement, le titre II modifiant le code de la famille et de
l'aide sociale, le titre III relatif à la sécurité, sociale, le titre IV
concernant le code du travail et le titre V portant sur les autres
dispositions. Sur ces trente-quatre articles encore en navette, la moitié
concernait le seul titre II.
Compte tenu des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, le 30 mai 1996, ne restent plus soumises à l'examen de la Haute
Assemblée que vingt dispositions, dont un article additionnel, pour quinze
articles conformes. Ces quinze articles se trouvent essentiellement dans les
parties relatives au code de la sécurité sociale, au code du travail - ce titre
ayant été adopté totalement conforme - et aux autres dispositions où ne
subsiste plus qu'un seul article en discussion.
Voyons quelles sont les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture.
Elles ont trait essentiellement au titre II relatif au code de la famille et
de l'aide sociale. Certes, l'Assemblée nationale a entériné un certain nombre
des apports de votre commission des affaires sociales, mais en y apportant des
précisions ou des modifications rédactionnelles.
On relève également des divergences d'appréciation entre l'Assemblée nationale
et la Haute Assemblée, à propos notamment de l'agrément tacite, que l'Assemblée
nationale a supprimé. De même, celle-ci a rétabli la notion de mineur capable
de discernement, ainsi que la mise à la charge des conseils généraux du
remboursement des salaires des représentants des associations non membres de
l'UNAF, l'Union nationale des associations familiales, au sein des commissions
d'agrément et la création d'une prestation destinée à aider les assistantes
maternelles qui adoptent.
Parallèlement, en cohérence avec les dispositions qu'elle a adopté au titre
Ier relatif au code civil, l'Assemblée nationale n'a pas rétabli le délai de
rétractation qu'elle avait fixé initialement à six semaines. Comme l'a indiqué
notre collègue Luc Dejoie, elle a opté pour un délai de deux mois.
Toutefois, une seule disposition véritablement nouvelle a été introduite en
deuxième lecture par l'Assemblée nationale. Cette disposition mentionne,
explicitement, que, lors de l'établissement du procès-verbal, la personne qui
demande le secret de son identité lorsqu'elle remet un enfant au service d'aide
sociale à l'enfance doit être informée de la possibilité de faire connaître
ultérieurement celle-ci. Cette identité ne pourra alors être communiquée qu'à
l'enfant majeur et sur demande expresse de ce dernier. Cette précision semble
utile à votre commission des affaires sociales, qui estime, toutefois, que le
texte initial ne l'excluait pas. Mais si cela va sans dire, cela va peut-être
mieux en le disant !
S'agissant des dispositions relatives au code de la sécurité sociale, nous
constatons avec satisfaction que l'Assemblée nationale a repris, à une
différence minime près, la rédaction de l'article posant le principe de la
parité d'accès aux droits sociaux entre naissance et adoption qu'avait
initialement proposée la commission des affaires sociales. Elle a enfin
réintroduit le principe de prêts par les régimes de prestations familiales pour
faciliter l'adoption d'enfants à l'étranger.
Quelles sont les propositions de la commission des affaires sociales ?
S'agissant précisément de ces prêts, la commission des affaires sociales n'a
pas suggéré elle-même leur suppression. Cependant, elle ne trouve pas opportun
de créer, comme M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale l'a
fort justement dit, le 30 mai 1996, à l'Assemblée nationale, une prestation
familliale qui viendra s'ajouter aux vingt-sept déjà existantes. Elles ne
souhaite toutefois pas que cette suppression que propose aujourd'hui le
Gouvernement soit mal comprise et mal interprétée, comme cela avait pu être le
cas en première lecture alors qu'un triple souci la motivait : celui de ne pas
privilégier l'adoption d'enfants à l'étranger par rapport à celle des pupilles
de l'Etat dont une majorité n'est pas adoptée ; celui de ne pas rendre encore
plus complexe le régime des prestations familiales ; celui, enfin, de ne pas
contrevenir au principe d'égalité des droits sociaux entre naissance et
adoption qu'elle venait d'établir.
A ce point du débat, je veux indiquer que deux approches différentes se
dégagent entre le rapporteur de la commision spéciale de l'Assemblée nationale
et nous-mêmes.
Nous pensons que la priorité essentielle est de donner une famille à un
enfant, d'où notre choix de tout faire pour raccourcir les délais de trop
longues procédures qu'il convient de simplifier, afin que, d'atermoiements en
lenteurs excessives, on ne retarde plus abusivement l'âge auquel un enfant est
enfin déclaré adoptable.
Nous devons tout faire également pour éviter que certains établissements
d'accueil ne deviennent, de fait, des parkings payants - et bien payés - pour
enfants abandonnés et pour que soient rigoureusement contrôlées les raisons
avancées pour les déclarer inadoptables.
De telles attitudes et des délais d'adoption qui durent parfois cinq ans
conduisent tout droit à l'adoption d'enfants étrangers trop souvent à travers
des opérations mercantiles.
A cet égard, je conteste les déclarations du rapporteur à l'Assemblée
nationale et publiées au
Journal officiel,
à la page 3670 : « Nous
abordons là l'un des points de désaccord avec nos collègues sénateurs. Ceux-ci
ont en effet supprimé la possibilité d'accorder à des couples qui souhaitent
adopter un enfant à l'étranger des prêts destinés à faciliter cette adoption,
au motif qu'il est souhaitable de favoriser l'adoption d'enfants français
puisque, de ce fait, deux tiers des enfants adoptables ne sont pas adoptés.
»
Nous sommes encore moins d'accord avec lui quand il dit : « Un tel
raisonnement est tout à fait recevable, sauf qu'il faut prendre en compte que,
parmi ces enfants adoptables mais non adoptés, il y a une très grande
proportion d'enfants handicapés. Si l'on avait poussé la logique jusqu'à terme,
il aurait donc fallu faire en sorte que l'aide sociale facilite l'adoption
d'enfants handicapés. »
« Par conséquent - conclut le rapporteur à l'Assemblée nationale je ne crois
pas que l'on puisse aujourd'hui refuser un prêt à des couples souhaitant
adopter des enfants à l'étranger au motif qu'il existe des enfants adoptables
en France, mais des enfants dits "à particularités". »
Je conteste avec la dernière énergie de tels propos. En effet, je ne connais
pas de statistiques qui donnent des indications aussi alarmistes concernant les
enfants pupilles de l'Etat en France, Mais peut-être M. le secrétaire d'Etat
possède-t-il des informations plus précises à ce sujet. Quoi qu'il en soit, il
me semble faux de prétendre que, parmi les deux tiers des enfants qui ne sont
pas adoptés, une grande partie sont des handicapés.
Compte tenu des conditions d'adoption actuelles, et s'il s'agit simplement,
pour un couple, de trouver un enfant, il est bien plus aisé de le chercher à
l'étranger, sur un autre continent, plutôt que d'attendre, peut-être en vain,
cinq ans pour être autorisé à adopter en France.
Le challenge, c'est de savoir si nous aurons la capacité, le courage de
bousculer des situations établies, pour ne pas dire sclérosées, si nous serons
capables d'avoir le sursaut salvateur qui poussera nos administrations
préfectorales, sociales, ministérielles à faire passer le souffle qui balaiera
les conformismes paralysants pour qu'enfin on ne se contente plus de « déplorer
» que les deux tiers des enfants abandonnés ne sont pas adoptés parce qu'ils ne
sont pas administrativement déclarés adoptables.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Très bien !
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
En revanche, toujours sur le titre III, la
commission souhaite reprendre à son compte un amendement que M. Claude Huriet
avait déposé en première lecture et portant sur l'accroissement de la durée de
cessation d'activité indemnisée pour les femmes adoptantes exerçant une
profession libérale. Elle estime parachever ainsi la réforme de la couverture
maternité des femmes exerçant une profession libérale qu'elle avait initiée,
par voie d'amendement, lors de la loi relative à la famille du 25 juillet
1994.
Elle considère, d'ailleurs, que c'est également la volonté du Gouvernement,
qui vient de confirmer, si j'ai bien compris, son intention d'améliorer les
dispositions actuelles.
L'essentiel des propositions de la commission des affaires sociales concerne
le titre II.
Tout d'abord, en cohérence avec la commission des lois saisie au fond, la
commission des affaires sociales propose, pour le temps de rétractation, de
revenir au délai actuel, qui avait été adopté par la Haute Assemblée en
première lecture, à savoir trois mois, et de réintroduire la notion de mineur
âgé de plus de treize ans.
S'agissant du principal apport de l'Assemblée nationale en deuxième lecture, à
savoir la possibilité pour la personne qui a demandé le secret de son identité
de lever celui-ci, la commission, si elle est bien entendu d'accord sur le
principe, a souhaité lui apporter quelques compléments.
Tout d'abord, il lui a semblé de bon sens que les parents adoptifs, sans que
leur soit révélée l'identité de la personne qui lève le secret, sachent si
ledit secret a été levé.
Ensuite, il convient de se demander s'il faut limiter au seul enfant la
connaissance de cette identité, dans la mesure où la commission d'accès aux
documents administratifs, la CADA, s'est prononcée récemment en faveur de la
communication du dossier d'un pupille de l'Etat décédé à ses ayants droit
majeurs. Elle vous propose donc de suivre cette jurisprudence récente.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale n'ayant pas précisé les modalités de
conservation de l'identité ainsi révélée - alors qu'il s'agit d'un
renseignement essentiel - la commission vous propose de faire comme pour les
autres renseignements, les conserver sous la responsabilité du président du
conseil général.
La commission des affaires sociales a également souhaité rétablir la formule
de l'agrément tacite dans la mesure où elle estime que cette disposition
pourrait être une sauvegarde des droits des futurs adoptants et qu'il convient
de contraindre l'administration à faire diligence.
A ce sujet, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai pris acte de votre désir de
raccourcir ces procédures. C'est, en fin de compte, ce qui avait motivé le
choix de la majorité de la commission d'aller dans le sens de l'agrément
tacite.
Enfin, la commission des affaires sociales, fidèle à son attitude en première
lecture, a voulu ne pas infliger de charges supplémentaires aux conseils
généraux, qu'il s'agisse de la rémunération de certains membres des commissions
d'agrément ou de la création d'une nouvelle prestation pour les assistantes
maternelles qui adoptent.
La commission des affaires sociales vous demande donc, mes chers collègues,
d'adopter la partie de ce texte pour lequel elle était saisie pour avis, sous
réserve de ses observations et des amendements qu'elle a déposés.
(Très bien
! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
j'affirme que je suis en plein accord avec mon collègue M. Dejoie sur un point.
Mais cet accord implique un désaccord tout aussi déterminé sur les conséquences
qui en découlent.
Je suis en accord complet sur ce qui est important, l'enfant, et donc en
désaccord complet sur le fait qu'il ne puisse pas connaître son identité
d'origine. Le texte nous revient, en effet, presque comme si l'on n'en avait
pas débattu dans cette enceinte.
Sur les points importants, l'Assemblée nationale semble avoir retenu ses
positions sans tenir compte de nos propositions. Qu'elle n'ait pas tenu compte
de celles des socialistes, on peut l'admettre à la rigueur, ; mais qu'elle
n'ait pas tenu compte de celles qui émanaient d'autres groupes, c'est bien plus
contestable.
Je m'associerai bien entendu aux discussions sur ces points-là. Mais vous
comprendrez bien que, pour nous, la défense de l'intérêt des enfants est
primordiale.
Depuis le 24 mai, date de la discussion en première lecture par le Sénat, les
enfants adoptés nous ont d'ailleurs inlassablement fait part de leurs
souffrances et de la nécessité, pour eux, de connaître leur identité pour
pouvoir construire leur personnalité. Ils n'ont pas pour autant mis en cause
leur insertion dans la famille qui les avait adoptés.
Je crois que là, nous nous heurtons vraisemblablement à une vision un peu trop
« adultocentriste ». Tous les parents adoptants ne partagent pas ce point de
vue, mais certains souhaitent effectivement qu'il n'y ait pas de risque, comme
ils disent.
Curieusement, ces adoptants-là sont souvent ceux qui souhaitent adopter un
enfant très jeune comme si c'était pour eux un moyen de masquer leur stérilité.
Leur vécu s'accommode donc très bien de l'expression « né de », qui est un
non-sens, une faute légale, que l'Assemblée nationale a pourtant maintenue.
Il est inadmissible de considérer qu'un enfant est « né de » parents adoptifs.
L'expression « fils de » aurait été beaucoup plus satisfaisante. C'est là un
point fort, et il est tout à fait dommage de ne pas avoir eu l'audace de
déverrouiller le secret, d'autant qu'il le sera forcément par l'application et
le respect de conventions internationales, en particulier celles qui donnent le
droit à l'enfant d'avoir connaissance de ses origines.
De plus, la pratique de plus en plus répandue d'enfants non français crée
immédiatement une différence. Il est évident que certains enfants n'ont pas
besoin de longs discours pour comprendre que leurs parents sont des parents
adoptifs. On va donc se trouver dans cette situation insupportable avec, d'un
côté, des enfants privés du droit de connaître leur identité d'origine et, de
l'autre, des enfants qui les connaîtront et que des parents adoptifs emmèneront
même dans leur pays d'origine pour la découvrir. J'ai récemment connu le cas de
parents qui, ayant adopté deux petites Indiennes, ont trouvé tout à fait normal
de les conduire en Inde.
Je vous remercie en tout cas, monsieur le rapporteur de la commission des
lois, d'avoir insisté sur ce trompe-l'oeil, sur cette redondance, qui consiste
à introduire dans une loi une autorisation qui existe déjà. Cela traduit un
comportement que je ne qualifierai pas de malhonnête, le mot serait trop fort,
mais qui n'est ni strict ni régulier. En effet, cela revient à faire croire
qu'on donne une possibilité nouvelle alors qu'on sait bien qu'elle est du seul
ressort de l'intéressé, s'il a laissé des éléments secrets permettant de
connaître son identité. Or il ne reviendra sûrement pas, même s'il le peut, car
le désir de l'oubli est fort aussi. Alors que nos collègues croient avoir
ouvert une porte, il s'agit en définitive d'un faux-semblant, et je vous
remercie de l'avoir indiqué.
Mon point de désaccord le plus fort porte sur les notions non identifiantes.
En effet, il est bien évident qu'on ne peut pas identifier par des indications
non identifiantes. Par conséquent, monsieur le rapporteur, il ne faut pas
espérer qu'il s'agit là d'une ouverture utile : c'est aussi une fausse
ouverture.
Je ne m'étendrai pas sur l'article 15. Je laisse à Mme Monique ben Guiga, qui
est plus au fait de ces problèmes internationaux, le soin de développer cet
article, qui serait la consécration dans la loi de la jurisprudence de la Cour
de cassation. Mais nous savons combien la jurisprudence est aléatoire et
combien elle peut varier. Sur ce point encore, il nous faudra bien de toute
façon honorer nos signatures en toute clarté.
La disposition relative à la réduction des délais de rétractation du
consentement à l'adoption serait presque amusante si toutefois ce domaine-là
prêtait à sourire. Ramené de trois mois à deux mois par l'Assemblée nationale,
au lieu de six semaines en première lecture, nous souhaitons lui conserver sa
durée actuelle de trois mois.
En langage vulgaire, on appelle cela des discussions de marchands de tapis !
Ce n'est pas sérieux pour des législateurs tels que nous sommes. Je crois que
trois mois sont effectivement nécessaires pour éviter, comme vous l'évoquiez
tout à l'heure, que des incidents n'interviennent. Il faut surtout du temps
pour l'accompagnement psychologique, pour que s'estompe ce moment tragique et
que la relation maternelle puisse à nouveau jouer. Ce délai permet, en un mot,
une relative tranquillité.
Au fond, ce texte donne l'impression qu'on veut aller plus vite mais, pour
moi, cela n'est peut-être pas le plus important. Dans des circonstances que je
me permettrai d'évoquer rapidement, les décisions prises ou non à l'occasion de
ce texte créent surtout, chez moi, un sentiment d'incertitude et d'inquiétude.
Au risque peut-être de froisser certains de mes collègues, d'en irriter
d'autres, peut-être même de me tromper, je crains effectivement que deux
d'entre elles surtout ne soient portées par un souci de moraliser la
société.
Pourquoi avoir exclu les concubins ? L'union spontanée d'un couple serait-elle
a priori
chargée de difficultés ? N'aurait-elle pas des chances de
pérennité, de fidélité ? Actuellement, un enfant sur trois naît chez un couple
de concubins. La légitimité du mariage n'est-elle pas surtout un moyen
d'organiser les incidents, notamment le divorce, puisqu'il est plus facile de
respecter ou de protéger l'enfant dans ce cas-là ? Pourquoi une telle exclusion
alors que l'on a accepté le recours à la procréation médicalement assistée pour
les concubins ? Il est vrai que l'intervention de Mme Missoffe avait été
particulièrement émouvante à cette occasion et peut-être a-t-elle été
déterminante ?
L'exclusion de droit à laquelle on parvient pour l'adoption amorce peut-être
une réflexion et une tentative de moralisation. Ne faut-il pas, d'une façon ou
d'une autre, punir celui qui a fauté, lui ou ses descendants ?
Et si, aujourd'hui, rien d'autre ne laissait percer une telle tentation, un
tel désir de moralisation ? Dans certains domaines, peut-être notre société
est-elle aujourd'hui quelque peu débridée ? Mais elle a des lois ; il faut
qu'elle sache les appliquer.
Je ne vais pas revenir sur le choix entre zygote et embryon. Selon M. Mattei
lui-même, on ne sait pas quand le zygote devient embryon, ni quand l'embryon
devient foetus. En revanche, on sait fort bien - et je n'ai jamais discuté
cette interprétation - que la vie commence quand le spermatozoïde entre dans
l'ovocyte ; mais il n'y a pas de personne encore. Ce sont ces éléments-là qui
s'ajoutent à cette première inquiétude.
J'en viens à la seconde. Tout récemment, un préfet, parce qu'il était
chrétien, a interdit une activité musicale. Pouvait-il exciper de cette qualité
? C'est déjà une interprétation de son rôle dans le contexte que j'évoquais.
Monseigneur Lustiger a également fait part, dans une publication, de son
inquiétude face à ce qu'il considère comme une situation grave : le fait que la
loi civile prime sur la loi morale.
Existent aussi aujourd'hui des tentations, peut-être nécessaires, de
réglementer Internet, notamment en matière de pédophilie. Mais nous savons fort
bien que le code pénal permet d'ores et déjà d'intervenir effectivement.
Veut-on trouver tout à coup dans Internet des choses choquantes, comme
aujourd'hui on trouve des photos choquantes ? Qui détermine qu'elles sont
choquantes ?
Nous entrons dans une démarche qui pourrait être interprétée, je reste très
prudent, comme le souhait non seulement de moraliser mais également de faire en
sorte que la France soit effectivement la fille aînée de l'Eglise.
M. Emmanuel Hamel.
Elle l'est !
M. Franck Sérusclat.
Aujourd'hui, nous avons une inquiétude dernière à cause du débat qui vient
d'être engagé en Espagne. En effet, le Premier ministre, qui a rencontré le
responsable diocésain de l'éducation, envisage de réintroduire l'enseignement
religieux obligatoire à l'école.
Ce ne sont peut-être là que billevesées d'une personne qui s'inquiète à tort,
mais je le dis d'autant plus facilement que si nous sommes dans un espace
confidentiel, nos débats auront quand même des répercussions nationales, ne
serait-ce que par le
Journal officiel
!
Telles sont les remarques que je voulais présenter. Si aucun des amendements
qui ont été déposés par le groupe socialiste n'est adopté, nous ne voterons pas
ce texte, malgré l'intérêt qu'il présente, en raison des lacunes qu'il contient
et des inquiétudes qu'il suscite.
M. Emmanuel Hamel.
Nous le regretterons !
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
cette proposition de loi, telle qu'elle nous revient de l'Assemblée nationale,
est décevante, à deux titres au moins.
Elle reste trop centrée sur les adultes, sur la volonté de répondre
prioritairement au désir d'enfant de couples malheureusement frappés par la
stérilité. La rupture, voulue trop précoce, des liens avec les parents
biologiques et la négation de la réalité du lien avec les grands-parents dans
le cas de l'adoption par un conjoint témoignent de cette orientation.
Elle n'atteint pas non plus son objectif proclamé qui est d'adapter notre
législation interne au fait que les enfants adoptés en France sont
majoritairement étrangers et qu'ils le seront de plus en plus.
Certes, faciliter la démarche des candidats à l'adoption est un objectif
louable, à condition qu'il s'agisse de lever des obstacles administratifs
inacceptables. Mais encore faut-il veiller, à ce que, sous couvert de
simplification administrative, on n'en vienne pas à dévaloriser l'agrément,
démarche sociale et psychologique indispensable aux candidats à l'adoption pour
vérifier leur propre capacité affective et matérielle à accueillir et à
accompagner jusqu'à l'âge adulte un enfant fragilisé. Au motif que l'agrément
n'est pas délivré dans des conditions satisfaisantes dans tel ou tel
département, on en vient à autoriser le magistrat à prononcer une adoption
malgré un refus d'agrément. J'espère que notre assemblée ne réintroduira pas
non plus sa délivrance tacite.
De mon point de vue, ce ne serait pas responsable à l'égard de l'enfant. C'est
grâce aux entretiens avec des assistants sociaux spécialisés, avec de bons
psychiatres et avec des groupes de parents adoptifs que les candidats à
l'adoption prennent conscience de la profondeur de leur désir, de leur capacité
à sacrifier des objectifs professionnels et des habitudes de loisirs et de vie
sociale aux soins à prodiguer à l'enfant qu'ils adoptent. Il y a une ascèse
préparatoire à l'adoption, qui renforce la générosité de la démarche et qui
garantit aux enfants les meilleures conditions d'accueil. Il ne faudrait pas
que les dispositions du texte qui nous revient de l'Assemblée nationale
allègent à l'excès des contraintes qui sont nécessaires.
Je regrette donc d'avoir à dire que le texte, en son état actuel, vise à
favoriser l'appropriation d'enfants par des couples plutôt que l'accueil des
enfants abandonnés au sein d'une famille.
Ainsi, la dévalorisation de l'agrément et l'absence d'incitation forte à
l'accompagnement psycho-pédagogique des familles relèvent de la même erreur
d'appréciation qui consiste à assimiler l'adoption à une naissance biologique.
C'est sur la même fiction qu'est fondé le refus de l'accès aux origines, en
dépit de la demande pressante des adoptés, que le Parlement a commencé enfin à
entendre. Je crois que, en l'occurrence, nos efforts n'auront pas été tout à
fait vains.
En ce qui concerne l'adoption internationale, la réintroduction de l'article
15 me paraît vraiment témoigner d'une méconnaissance des réalités des relations
diplomatiques et juridiques internationales. Nous prétendons, par ce texte,
adapter notre législation interne à l'adoption internationale telle que la
convention de la Haye signée par la France le 5 avril 1995 l'organise et nous
introduisons simultanément dans cette législation interne une norme qui entre
en contradiction avec cette convention. Ce n'est pas conséquent ! Une
convention internationale n'est ni un contrat, ni une convention bilatérale,
lesquels n'engagent que les deux parties signataires : elle définit des normes
de droit international qui engagent les signataires bien au-delà de la
réciprocité d'une convention bilatérale.
Enfin, quel est l'intérêt d'introduire une disposition en réalité inapplicable
? Or l'article 15, tel qu'il est rédigé, est inapplicable. Les pays visés
n'ignorent pas l'adoption, il faut le répéter. Ils la prohibent. Il n'y a pas «
d'absence de législation, dans le pays d'origine, sur l'adoption » comme le
précise l'article 15 ; il y a interdiction.
L'article 15 ne pourra donc pas être appliqué pour des enfants adoptés, en
dépit de la législation locale au Maroc et en Algérie, grâce à des magistrats
ou à des notaires peu scrupuleux, ce qui est d'ailleurs source d'erreurs pour
les parents de bonne foi.
En adoptant l'article 15, nous nous placerions en contradiction avec nos
engagements internationaux sans pour autant résoudre le cas des enfants adoptés
illégalement au Maroc ou en Algérie.
Le problème posé par ces enfants est réel, mais la solution proposée, bien
qu'inspirée par un sincère souci de leur venir en aide, n'est réellement pas
pratiquable.
L'intérêt des enfants, dans ce domaine comme dans tous les autres, doit être
notre guide, comme le respect bien entendu des législations étrangères. Le
blocage vient, à mon avis, du fait que nous avons une connaissance lacunaire
des législations musulmanes.
Je me suis fait confirmer, lors d'un récent déplacement à Alger, par une des
juristes qui font autorité en matière de droit de la famille au Maghreb, que
l'adoption simple peut être conciliable avec le droit musulman parce qu'elle ne
substitue pas une filiation juridique à la filiation biologique.
Notre erreur sur le droit musulman est de dire qu'il interdit l'adoption. Ce
qu'il interdit, c'est la substitution d'une filiation juridique à la filiation
biologique. Or, l'adoption simple ne produit pas cette substitution.
Cette voie mériterait d'être sérieusement explorée ; elle ajouterait une
solution à celle qui est déjà offerte par l'arrêt de la Cour de cassation du 10
mai 1995.
Il convient de trouver une solution pour la vingtaine d'enfants actuellement
concernés par cette difficulté liée au fait qu'ils ont été adoptés
illégalement, souvent à l'insu des parents, dans un pays du Maghreb.
Pour autant, il ne faut pas placer la France dans une situation intenable au
regard du droit international en inscrivant dans notre législation une
disposition en réalité inapplicable.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
texte qui nous revient en deuxième lecture n'est pas, en l'état, pleinement
satisfaisant.
Comme je l'ai dit en première lecture, tout ce qui ira dans le sens d'une
amélioration de la législation existante sur l'adoption aura notre soutien,
particulièrement pour mieux garantir ce qui nous tient le plus à coeur : les
droits de l'enfant.
Comprenons-nous bien : il s'agit non pas, au nom des droits de l'enfant, de
prétendre juger avec des
a priori
des situations individuelles et
souvent désespérées, ou d'arbitrer en faveur de la famille adoptive contre les
liens biologiques, mais de reconnaître que l'adoption n'est pas seulement
l'affaire des parents adoptants ou des parents d'origine, mais d'abord celle de
l'enfant adopté.
Un enfant est une personne humaine à part entière, et c'est seulement lorsque
son intérêt l'exige qu'il peut être adopté.
N'oublions pas que l'adoption est réciproque : l'enfant, lui aussi, doit
adopter ses parents, avec son identité et son histoire personnelle. Il doit
tout à la fois assumer la construction d'une famille avec ses parents adoptifs
et la souffrance indélébile de l'abandon et de la quête de ses origines, quels
qu'en soient les éléments connus. La loi ne peut privilégier l'un de ces
aspects par rapport à l'autre.
De même, l'amélioration des dispositions législatives sur l'adoption ne peut
pas gommer les inégalités sociales et la crise qui touche tant de monde
aujourd'hui, tout particulièrement les enfants.
Comme l'a dit très justement mon amie Muguette Jacquaint lors de son
intervention à l'Assemblée nationale, n'y a-t-il pas contradiction à vouloir
améliorer la loi sur l'adoption et, dans le même temps, à pérenniser les
saisies et les expulsions, dont la brutalité est particulièrement traumatisante
pour les enfants ?
Sans céder à l'illusion qu'il serait possible, par la loi écrite, de remédier
aux inégalités économiques qui se creusent dans notre pays, il est de notre
devoir de soutenir tout ce qui ira dans le sens d'une amélioration des services
sociaux.
Si nous reconnaissons que la loi écrite ne peut résoudre tous les problèmes
sociaux, elle se doit, en revanche, de ne pas être à la traîne des évolutions
de la société.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous pourrez de plus en plus difficilement
faire la sourde oreille en ce qui concerne les transformations des notions de
couple et de famille.
Le mariage n'est plus, depuis un certain nombre d'années, la seule manière de
vivre en couple.
Chez les jeunes, le mariage est même devenu minoritaire.
Nous réitérons notre regret que le législateur n'ait pas profité de ce texte
pour donner aux concubins les mêmes droits qu'aux personnes mariées.
La garantie du « projet parental » peut exister dans les deux cas, et c'est la
justice qui doit en apprécier la réalité.
Nous proposions également que l'âge requis pour adopter soit abaissé à
vingt-cinq ans, dans un souci d'harmonisation européenne. Toutefois,
l'abaissement de l'âge des deux époux de trente ans à vingt-huit ans aux termes
de la proposition de loi va dans le bon sens.
S'agissant de l'écart d'âge maximum entre les adoptants et les adoptés, qui a
été porté en deuxième lecture à cinquante ans par l'Assemblée nationale, nous
soutiendrons la proposition de la commission des lois du Sénat, qui tend à la
supprimer.
Il serait, en effet, injuste que l'institution de cet écart d'âge maximal
empêche l'adoption par des couples plus âgés ayant déjà eu des enfants ou par
des grands-parents tout à fait en mesure de constituer une famille pour des
enfants.
Pour ce qui est de l'accouchement anonyme et du secret des origines, il s'agit
de bien distinguer les deux et d'éviter une confusion qui ne pourrait que
remettre en cause la possibilité pour les femmes en grande détresse de pouvoir
donner la vie dans des conditions sanitaires satisfaisantes.
Ne pas respecter ce choix douloureux, ce serait pousser des femmes ou des
familles à se mettre dans des situations qu'elles estiment ne pas pouvoir
assumer.
Il n'est pas souhaitable de déstabiliser par la levée de l'anonymat les femmes
qui seront tentées - et qui pourra les en empêcher dans ce cas ? - dans le
meilleur des cas, de faire de fausses déclarations d'identité et, dans le pire
des cas, d'accoucher dans des conditions d'hygiène précaires pour préserver
l'anonymat, mettant ainsi en danger l'enfant qui aurait pu être mis au monde
dans une structure hospitalière.
Nous ne pourrons donc accepter la création d'un organisme central de recueil
des renseignements, qui serait une atteinte à l'anonymat.
En revanche, nous approuvons la possibilité pour la mère de donner des
renseignements ne permettant pas son identification.
Cette possibilité donnée à l'enfant d'avoir accès, y compris dans le cadre de
l'accouchement anonyme, à des renseignements non identifiants sur ses parents
va dans le bon sens, mais seulement si ces renseignements recueillis ne
permettent pas de porter de jugement de valeur sur la mère, le père ou la
personne qui remet l'enfant aux services de l'aide sociale à l'enfance.
Le fait de donner aux femmes la possibilité de bénéficier d'un accompagnement
psychologique et social, mesure proposée par la commission des lois, est
également une bonne chose.
Nous nous opposons, en revanche, aux pratiques de certaines administrations
qui refusent de lever le secret concernant les origines des enfants élevés par
l'aide sociale ou adoptés par des familles.
Il est nécessaire, selon nous, que, si l'administration dispose de ces
renseignements, les parents adoptifs, le jeune adulte ou l'enfant avec l'accord
de ses parents puissent les consulter librement. Nous soutiendrons toute
amélioration allant en ce sens.
Venons-en maintenant à un autre aspect de l'adoption qui a pris une importance
croissante : je veux parler, bien sûr, de l'adoption internationale.
La France est le deuxième pays d'accueil au monde, le premier en Europe. La
croissance du nombre d'enfants adoptés est le fait de l'adoption à l'étranger,
nous le savons. L'importance de ce phénomène nous oblige à trouver des
solutions satisfaisantes pour les enfants ainsi adoptés.
Je suis obligée de constater que, en l'état actuel des débats, nous n'avons
pas vraiment progressé sur ce sujet.
Notre préoccupation concernant l'adoption est d'assurer en premier lieu le
bonheur de l'enfant et non pas de satisfaire exclusivement l'envie d'enfant
ressentie par les parents.
Nous approuvons toutes les mesures proposées pour moraliser les procédures
d'adoption d'un enfant étranger.
Tous ceux qui en font une filière « commerciale » doivent être poursuivis, et
je ne peux que partager l'indignation de M. le secrétaire d'Etat au sujet des «
catalogues d'enfants » diffusés sur Internet.
Par ailleurs, les deux tiers des adoptions internationales sont réalisés par
les futurs parents adoptifs eux-mêmes, sans qu'ils passent par les cinquante
oeuvres d'adoption d'enfants en France, ce qui n'est pas sans poser
problème.
Cette situation favorise sans doute l'existence de certaines filières, en
particulier dans les pays où l'adoption est prohibée ou n'est pas
réglementée.
La résolution de ce problème n'est pas évidente. Il aurait été préférable,
comme j'ai eu l'occasion de le dire en première lecture, que la France se donne
les moyens nécessaires pour améliorer les relations bilatérales avec les Etats
concernés et agisse en faveur d'une amélioration grâce aux conventions
internationales, qui restent insuffisantes quant aux procédures d'adoption,
plutôt que d'engager, avec l'article 15, un conflit de lois qui risque d'être
considéré par les gouvernements de certains pays comme une déclaration de «
guerre juridique ». En effet, cela peut avoir pour conséquence d'inciter les
gouvernements à faire pression sur leurs juges pour qu'ils ne rendent plus de
jugements favorables à la sortie d'enfants du territoire en vue d'une adoption
en France.
Toutefois, il est vrai, comme l'a relevé M. Mattei, qu'en 1994 près de trois
quarts des 2 414 enfants entrés en France pour être adoptés venaient de pays
non signataires de la convention de La Haye et dont la loi nationale ignorait
ou prohibait l'adoption.
Aujourd'hui, au regard de la loi française, ces enfants sont donc dans une
situation précaire, puisque ceux qui ne pourront bénéficier d'une adoption
plénière n'auront pas la qualité de Français alors qu'ils auront été élevés sur
le territoire national.
Nous nous inquiétons du sort de ces enfants qui, à l'âge de dix-huit ans,
subiront alors le sort réservé aux étrangers par les lois Pasqua.
Nous voyons encore une fois l'effet néfaste de ces lois dont nous demandons,
par ailleurs, l'abrogation.
A l'heure actuelle, l'avenir de ces enfants est dans les mains de la
jurisprudence de la Cour de cassation, qui leur reconnaît la possibilité de
bénéficier de l'adoption plénière, et donc de la nationalité française.
Nous proposions en première lecture de consolider ce fragile édifice et
d'accorder la nationalité française à l'ensemble des pupilles qui ne la
possèdent pas.
Nous déposerons de nouveau cet amendement, qui permettra, s'il est adopté, de
lever les angoisses des parents adoptifs d'enfants adoptés à l'étranger dont le
statut juridique n'aura pas pu être entièrement défini.
J'en reviens à l'article 15 : si nous sommes contre l'introduction d'un
conflit de lois qui nous semble dommageable, nous comprenons également la
crainte éprouvée par les familles adoptantes que le refus de transcrire la
jurisprudence de la Cour de cassation ne soit perçu par les juges français
comme un signal de ne plus accorder d'adoptions plénières et donc de détruire
le fragile édifice de la naturalisation.
Nous ne pouvons qu'espérer que, quoi qu'il arrive, la jurisprudence poursuive
dans la voie actuelle et que les juges ne se laissent pas perturber par les
incohérences et les maladresses de certains qui, en posant le problème de cette
façon, créent autant de difficultés qu'ils en résolvent. Pour notre part, nous
ne pouvons pas suivre l'Assemblée nationale en la matière.
En revanche, nous nous félicitons que la commission des affaires sociales ait
retenu finalement le prêt sans intérêt pour couvrir les dépenses importantes
rendues nécessaires par une adoption d'un enfant étranger.
Cela m'amène à parler du volet social de cette proposition de loi.
Si nous nous réjouissons, comme je viens de le dire, du crédit sans intérêt
attribué aux parents adoptant un enfant à l'étranger, nous regrettons que le
texte que l'on nous propose soit passé par les fourches caudines de
l'ordonnance du 24 janvier 1996, qui octroie les prestations familiales sous
conditions de ressources. Il en va, évidemment, de l'égalité des enfants, mais,
en l'occurrence, c'est une égalité par le bas.
S'agissant de l'âge maximal pour la perception des différentes prestations,
qui serait l'âge de la fin de l'obligation scolaire, permettez-moi de dire
qu'il n'est pas sérieux de faire des économies de bouts de chandelles !
Nous nous réjouissons, en revanche, de l'allocation de remplacement pour les
femmes exerçant une profession libérale qui adoptent un enfant. Il s'agit d'une
nouveauté introduite par la commission des affaires sociales du Sénat,
nouveauté qui a été l'objet d'un de nos amendements en première lecture.
En l'état actuel des choses, cette proposition de loi constitue indéniablement
un progrès. Nous souhaitons donc la voter, et nous espérons qu'elle sera
utilement améliorée par nos débats.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le président, je termine ce festival de dames, je parle, bien sûr,
des trois dernières intervantes. Tout à l'heure, M. Neuwirth, regardant
l'hémicycle, a dit que nous étions presque à parité. C'est effectivement
presque vrai, mon cher collègue !
Quoi qu'il en soit, je souhaiterais vivement que le Sénat, dans sa grande
sagesse, tienne compte, dans ses votes à venir, de ces voix de femmes qui
viennent de s'élever, comme de celle des hommes, bien sûr.
A l'occasion de cette deuxième lecture de la proposition de loi relative à
l'adoption, je voudrais dire, à la fois, ma satisfaction pour les quelques
avancées qui me semblent avoir eu lieu, aussi bien en première lecture au Sénat
qu'en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, et mon inquiétude devant
certains aspects du texte.
S'agissant du délai de rétractation de la mère qui décide d'abandonner son
enfant, que le texte qui nous était soumis, en première lecture, portait à six
semaines, nous avions été plusieurs, dans cette enceinte, à le juger trop bref
et à souligner la grande détresse de ces femmes, qui sont très souvent en
rupture avec leur milieu familial se trouvent donc confrontés à une extrême
solitude, à des problèmes de logement, etc.
Après un débat long et passionné, nous avions décidé de maintenir le délai
actuellement en vigueur : trois mois. Cela me semblait extrêmement sage.
Malheureusement, l'Assemblée nationale est revenue sur ce délai, coupant en
quelque sorte la poire en deux, pour le porter à deux mois.
La commission des lois propose au Sénat de revenir à trois mois. Nous sommes
nombreux à approuver cette position. Je souhaite que ceux d'entre nous qui nous
représenteront en commission mixte paritaire ne considèrent pas ce délai comme
un point de négociation possible et qu'ils soient déterminés à ne pas céder.
S'agissant de l'adoption par des concubins, le Sénat et l'Assemblée nationale
ont malheureusement voté dans le même sens. Je regrette vivement, avec
d'autres, que le Parlement ait ainsi fermé une porte, ne laissant ouvertes que
deux possibilités : l'adoption soit par un couple marié, soit par une personne
seule.
Il y a là, je le répète, une aberration. Ou alors, il fallait aller au bout de
cette logique et prévoir que seuls les gens mariés peuvent adopter. Au lieu de
quoi, on a préféré une solution bancale.
En première lecture, M. Dejoie nous avait expliqué que, certes, les concubins
en tant que tels n'auraient pas le droit d'adopter mais que l'un des membres du
couple le pourrait. Ainsi, c'est le père adoptif ou, plus souvent sans doute,
la mère adoptive qui sera le seul représentant légal.
Dans quelle situation mettons-nous les parents futurs et l'enfant lui-même ?
Quelle situation familiale créons-nous avec une telle disposition ? Imaginez
que l'enfant dise à celui qui n'est ni réellement ni légalement son père ou sa
mère : « C'est l'autre qui m'a adopté et donc tu ne peux pas me faire cette
remarque ! »
Il y a là quelque chose d'humainement invivable. Je ne comprends pas ! Ni
l'intervention de M. Huriet, qui pensait comme nous, ni nos propres arguments
n'ont, hélas ! convaincu le Sénat.
Comme l'a dit M. Sérusclat, nous revenons ainsi sur des avancées que nous
avions réalisées ici même. En effet, au cours des très riches débats sur la
bioéthique, nous avions décidé qu'un couple non marié pouvait avoir recours à
l'assistance médicale à la procréation. Or voilà que nous refusons à ce même
couple, si la fécondation
in vitro
, par exemple, échoue, la possibilité
d'adopter un enfant ! Au nom de quoi ? Je ne vois qu'une explication : c'est un
repli frileux sur des valeurs morales étroites.
On a parlé de texte d'adaptation. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'en
adoptant cette disposition le Sénat et l'Assemblée nationale ne paraissent pas
animés d'un souci d'adaptation de notre législation à l'évolution de la
société. On a tout à l'heure rappelé qu'un tiers des naissances étaient le fait
de couples non mariés. Selon les chiffres de l'INED, tous âges confondus, près
de 20 p. 100 des couples vivent hors mariage. Il y a donc bien discordance avec
l'évolution actuelle de la société.
J'en viens, enfin, à l'importante question de l'accouchement anonyme ou de
l'accouchement secret. Manifestement, la confusion sémantique entre les deux
termes est totale : « anonyme » égale « secret ». Eh bien, non ! La loi prévoit
l'accouchement secret, mais l'accouchement secret n'est pas nécessairement
anonyme. Du fait de cette confusion, nous rencontrerons un jour des difficultés
à la fois d'interprétation et de concordance avec les textes européens.
J'avais déposé un amendement visant à supprimer l'accouchement sous X. C'était
peut-être un peu excessif, et je n'ai pas déposé à nouveau un tel amendement.
Je veux bien croire que, dans certains cas, les femmes veuillent absolument
préserver leur anonymat. Il reste que, malgré cette disposition permettant aux
femmes d'accoucher anonymement, on a trouvé encore récemment deux bébés dans
des poubelles. Cela prouve bien que cette disposition n'empêche malheureusement
pas que se produisent des faits aussi affligeants lorsque les femmes sont
vraiment en situation de détresse.
En tout cas, je ne vois pas au nom de quoi on interdirait aux femmes qui
veulent accoucher dans le secret de laisser des renseignements identifiants qui
resteront secrets jusqu'au moment où interviendra, éventuellement, une levée du
secret, ce qui permettra à l'enfant devenu adulte d'accéder à ces
renseignements.
Tout le monde le sait, un secret, c'est quelque chose qui est connu de
quelques rares personnes, mais ce n'est pas quelque chose d'inconnu.
L'Assemblée nationale a fait une petite avancée en prévoyant que,
ultérieurement, la mère pourrait revenir sur sa décision. Ce n'est pas
suffisant : allons jusqu'au bout, mes chers collègues, prévoyons que non
seulement elle pourra ultérieurement lever l'anonymat mais qu'elle peut aussi
décider d'accoucher secrètement, c'est-à-dire en laissant des renseignements
identifiants, qui seront conservés par telle ou telle instance, à définir, de
telle manière que, avec son accord, le secret puisse être éventuellement levé,
lorsque l'enfant est devenu adulte.
Tels sont, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les différents
éléments que je souhaitais soumettre à votre réflexion.
(Mme ben Guiga applaudit.)
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au
moment où s'achève cette discussion générale, je voudrais présenter quelques
observations.
Je rappellerai d'abord, pour éviter que l'on ne se perde dans les détails, que
l'amélioration et la simplification de notre régime de l'adoption sont l'un des
trois volets de la politique familiale que nous cherchons à mettre en place
depuis un certain nombre d'années.
De même que, à l'époque de la discussion du texte sur l'interruption
volontaire de grossesse, le Gouvernement avait pris l'engagement de tout mettre
en oeuvre pour lutter contre la stérilité des couples - et nous avons obtenu
des résultats à cet égard, les lois relatives à la bioéthique en témoignent -
il est clair qu'une politique familiale bien comprise suppose une
simplification des procédures d'adoption.
Dans une telle optique, ce qui prime, c'est l'épanouissement de le cellule
familiale et des enfants, non la joie égoïste du couple. Quand on raconte tant
de choses sur l'évolution de la société, il n'est pas inutile de fixer
clairement ce préalable.
Reconnaissons que, grâce à notre collègue député M. Mattéi - malgré, monsieur
Neuwirth, ce qu'il a pu dire en première lecture ! - la proposition de loi dont
nous débattons aujourd'hui comporte quelques éléments importants : la
généralisation de l'agrément, certaines améliorations concernant les délais et
les conditions de l'adoption, ainsi que l'avancée qui a été obtenue - même si
Mme Dusseau la trouve insuffisante, elle est réelle - s'agissant de la levée du
secret des origines, qui peut permettre de répondre à un certain nombre de
préoccupations et qui, dans l'état actuel de notre droit, représente un
progrès.
Je souhaite donc que, grâce aux efforts des deux commissions, en accord avec
l'Assemblée nationale, nous puissions trouver des solutions satisfaisantes sur
les points qui restent litigieux.
A mes yeux, monsieur le secrétaire d'Etat, deux véritables difficultés
subsistent.
Tout d'abord, la notion d'enfant adoptable n'a pas été suffisamment
précisée.
M. Neuwirth a eu tout à fait raison de dire qu'il fallait favoriser au maximum
l'adoption d'enfants français. A cet égard, je salue, bien sûr, le dévouement
de tous les services, composés d'hommes et de femmes admirables, dans tous les
départements, qui s'occupent de l'aide à l'enfance. Mais ils doivent comprendre
que leur objectif essentiel dans une société comme la nôtre n'est pas de «
conserver » les enfants dans des structures collectives : il est de faciliter
l'adoption des enfants adoptables.
Je souhaite donc que l'on étende le plus possible la notion d'enfant
adoptable, même si certains mettent en avant des handicaps rédhibitoires, même
si certains estiment que, passé tel âge, les enfants ne peuvent plus guère
s'adapter à une famille.
Par conséquent, nous avons intérêt, tant sur le plan législatif que sur celui
du fonctionnement des conseils généraux, à réduire les délais de manière que
les enfants restent effectivement adoptables. Cela ne joue, certes, que sur
quelques centaines de cas par an, mais, sur plusieurs années, cela finit par
faire quelques milliers de cas.
La seconde difficulté, qui est bien plus délicate à traiter, est celle que
soulève l'adoption internationale.
C'est manifestement parce que nombre de blocages administratifs ont freiné
l'adoption interne que certaines familles ont été poussées vers l'adoption
internationale. Or, qui dit adoption internationale dit règles difficilement
codifiables et pratiques plus ou moins commerciales.
Si l'adoption internationale doit continuer d'être encouragée, le Gouvernement
français doit faire en sorte de l'encadrer et de la moraliser en passant des
accords bilatéraux avec les gouvernements des pays principalement concernés.
Selon le texte de la proposition de loi et compte tenu des propositions des
deux rapporteurs, l'adoption internationale va se trouver de plus en plus
assimilée à l'adoption interne. On unifie ainsi les mécanismes de prises en
charge sociale. Tout cela va dans le bon sens.
Il reste que, en raison d'un taux de natalité en régression, quoi qu'on en
dise, le nombre d'enfants adoptables en France est relativement faible, ce qui
incite des familles à l'adoption internationale. Il faut les sécuriser et leur
donner les possibilités d'adoption les plus normales et les plus régulières
possibles.
J'ai peur que ce texte ne permette pas de régler totalement ces deux problèmes
sur lesquels je souhaitais insister. J'espère néanmoins que des progrès
pourront être enregistrés sur ces deux points et je me félicite des avancées
qu'il permet d'ores et déjà de réaliser au regard de notre politique
familiale.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, nous aurons bien sûr l'occasion, à la faveur de l'examen des
articles, de revenir sur un certain nombre de questions qui ont été soulevées
au cours de cette discussion générale. Pour ma part, je me ferai l'écho de ce
que M. le garde des sceaux, retenu par une autre obligation, ne peut vous dire
lui-même aujourd'hui sur les sujets qui relèvent de son autorité.
Je voudrais tout d'abord remercier l'ensemble des intervenants et, madame
Dusseau, des intervenantes, de la qualité, de la hauteur de vue et de la
chaleur de leurs réflexions. Chacun a bien conscience que, sur un texte de
cette nature, ce ne sont pas uniquement la raison et le droit qui comptent : il
y a également place pour la conviction, la passion et l'écoute de l'autre.
Vous avez, les unes et les autres, bien illustré non seulement la difficulté
de légiférer sur un tel sujet, mais aussi la nécessité de remettre
périodiquement l'ouvrage sur le métier. En effet, la société évolue, les
problèmes changent, et le rôle du législateur est de prendre en compte ces
modifications. M. le rapporteur a bien résumé les lignes de force de cette
proposition de loi. Nous travaillons pour les enfants ; c'est pourquoi il faut
avoir des procédures et des textes plus simples, plus compréhensibles et, dans
toute la mesure possible, assimiler l'enfant adopté à l'enfant biologique. Je
crois que nous sommes tous animés par cette idée parce qu'elle relève tout
simplement du bon sens.
M. le rapporteur pour avis a, lui aussi, évoqué la nécessité de simplifier et
d'accélérer les procédures.
Il m'a interrogé sur les chiffres relatifs aux causes de non-adoption mais
nous ne pouvons, de par leur nature, les connaître vraiment. Certes, des
chiffres circulent, comme celui que vous avez cité. Mais, à partir du moment où
les dossiers n'ont pas été soumis aux commissions d'éducation spéciales, il est
extrêmement difficile d'avoir des chiffres très fiables. Toutefois, ne
l'oublions pas, un enfant est un enfant et il ne faut pas vouloir le classer
dans une catégorie plutôt qu'une autre.
Je suis également convaincu que nous devons alléger les procédures, car leur
complexité peut conduire à prendre des décisions qui ne sont pas très
satisfaisantes.
M. Sérusclat a évoqué de très nombreux sujets sur lesquels nous reviendrons
plus en détail lors de l'examen des articles. Il a parlé de moralisation et a
notamment soulevé le problème d'Internet. Les débats qui ont eu lieu à ce sujet
devant l'Assemblée nationale ont résulté, comme l'a expliqué M. Jean-François
Mattei, le rapporteur de l'Assemblée nationale, de l'adoption sur catalogue. En
effet, après avoir pianoté sur Internet, il a reçu, quelques semaines plus
tard, un catalogue en couleur comprenant des photographies d'enfants. Il était
même possible de choisir la couleur des yeux et celle de la peau et un prix en
dollars était mentionné.
Il est vrai que ce procédé est intolérable mais il ne faut pas se cacher la
difficulté de légiférer en ce domaine. M. Sérusclat a d'ailleurs, à juste
titre, souligné que les outils existent déjà dans notre code pénal.
Le Gouvernement, par la voix du garde des sceaux, a confié à Mme
Falque-Pierrotin, qui est maître des requêtes au Conseil d'Etat, le soin
d'examiner les moyens d'éviter de telles dérives en ce domaine car elles
remettent en cause le fondement même de notre société et le respect de
l'autre.
Mme ben Guiga a particulièrement insisté sur la question que soulève notamment
l'article 15, qui, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, a suscité de longs
débats. Nous aurons l'occasion d'y revenir longuement mais je voudrais, d'ores
et déjà, lui dire, même si le Gouvernement ne partage pas son opinion, à quel
point j'ai été sensible à la qualité de sa réflexion et à sa connaissance
approfondie des différentes législations étrangères, notamment du droit
musulman qui est parfois difficile à appréhender et surtout à comparer à notre
droit civil, compte tenu de la structure différente de nos sociétés.
Mme Borvo a également évoqué, au début de son propos, la nécessité de
respecter avant tout le droit de l'enfant. Tel est bien l'objet de ce débat.
Nous devons faire prévaloir dans toute la mesure possible l'intérêt de l'enfant
dans l'ensemble des dispositions de cette proposition de loi.
Il est vrai que des questions difficiles se posent. Mme Borvo a notamment
évoqué les problèmes posés à la fois par l'accouchement sous X et par la notion
de secret des origines. Il n'est pas aisé de trancher de telles questions. Nous
avons tous bien conscience que la vérité n'est pas détenue entièrement par l'un
ou par l'autre. Elle résulte toujours d'un compromis entre des conceptions
contradictoires. Voilà d'ailleurs l'intérêt et la difficulté d'un tel débat.
Je tiens à remercier Mme Dusseau pour l'approche qui a été la sienne,
notamment sur ce sujet. Nous avons bien conscience qu'il s'agit là d'un domaine
dans lequel, pour citer Montesquieu, « il faut parfois légiférer en tremblant
». C'est bien la haute conscience du législateur à l'égard d'un tel texte qui
permet d'apporter autant de précisions, de précautions et d'attention envers
l'autre.
M. Fourcade, enfin, a rappelé les grands objectifs et les apports essentiels
de cette proposition de loi, et je l'en remercie. Si, en seconde lecture, le
législateur se concentre sur les problèmes qui restent encore en discussion, il
peut parfois, à la veille d'une commission mixte paritaire, perdre de vue
l'essentiel.
M. Fourcade a également évoqué deux difficultés.
S'agissant du concept d'enfant adoptable, je partage entièrement ses
réflexions. En effet, en tant qu'élu local, responsable de la commission des
affaires sociales de mon département, je perçois quotidiennement sur le terrain
ce à quoi il fait allusion. Je ne puis donc qu'être très favorable à ce que
l'association des présidents de conseils généraux et le Gouvernement
travaillent ensemble en ce domaine.
Je crois, comme vous l'avez dit, qu'il suffit de peu de chose pour que la
situation s'améliore. En tout cas, pour ma part, je retiens votre suggestion.
M. Jacques Barrot et moi-même nous prendrons dans les prochains jours les
initiatives qui s'imposent.
S'agissant de l'adoption internationale, qui est en quelque sorte une «
réflexion-miroir » par rapport à votre première observation, chacun est bien
conscient de la nécessité d'encadrer et de moraliser les procédures. Le nombre
d'adoption d'enfants étrangers diminuera si nous parvenons à mieux définir le
concept d'enfant adoptable. Voilà qui démontre bien que ce texte est peut-être
plus un point de départ qu'un aboutissement.
Je tiens à me rallier à l'hommage que M. Fourcade a rendu aux personnels qui,
dans les départements et les administrations de l'Etat, travaillent en ce
domaine car leur tâche n'est pas facile et elle doit encore s'accroître.
Telles sont, monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames,
messieurs les sénateurs, les quelques réflexions que je voulais vous livrer
avant que nous abordions l'examen des articles.
(M. Jean Delaneau remplace M. Paul Girod au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? ...
La discussion générale est close.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance
d'une vingtaine de minutes pour permettre à la commission d'examiner les
amendements.
M. le président.
Le Sénat va, bien entendu, accéder à votre demande.
7
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que la commission des finances a présenté une candidature à un
organisme extraparlementaire.
Cette candidature n'a fait l'objet d'aucune opposition dans le délai d'une
heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. François
Trucy membre titulaire du comité des prix de revient des fabrications
d'armement.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-huit
heures dix.)
M. le président. La séance est reprise.
8
ADOPTION
Suite de la discussion et adoption
d'une proposition de loi en deuxième lecture
M. le président.
Nous reprenons la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi (n°
396, 1995-1996), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, relative à l'adoption.
J'informe le Sénat que la commission des lois m'a fait connaître qu'elle a
d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le
Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de
proposer un texte sur la proposition de loi actuellement en discussion.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai
réglementaire.
La nomination des représentants du Sénat à la commission mixte paritaire
pourrait ainsi avoir lieu aussitôt après le vote sur l'ensemble de la
proposition de loi, si le Gouvernement formulait effectivement sa demande.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des propositions de loi, la discussion des
articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont
pas encore adopté un texte identique.
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - I. - Après le premier alinéa de l'article 344 du code civil, il
est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La différence d'âge entre les adoptants et les enfants ne doit pas dépasser
cinquante ans. En cas d'adoption par des époux, cette condition ne s'applique
qu'au conjoint le plus jeune. »
« II. - Dans le second alinéa du même article, après le mot :
"inférieure", sont insérés les mots : "ou supérieure" et
les mots : "prévoit l'alinéa précédent" sont remplacés par les mots :
"prévoient les alinéas précédents". »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1 est déposé par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 29 est proposé par M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben
Guiga, MM. Dreyfus-Schmidt et Mazars, les membres du groupe socialiste.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
M. Luc Dejoie,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Il s'agit
de l'article introduisant une différence d'âge maximale entre l'adoptant et
l'adopté. Nous avons exprimé notre point de vue en première lecture. Notre
position n'a pas changé.
Par ailleurs, je ne puis que donner d'avance un avis favorable à l'amendement
n° 29, qui est identique au nôtre.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat, pour défendre l'amendement n° 29.
M. Franck Sérusclat.
Cet amendement a, en effet, le même objet que celui de la commission. Il
s'agit de permettre l'adoption dans des situations limites telles que celles
des handicapés, qui sont adoptés en général tard par des couples, ou celles des
enfants qui se trouvent tout d'un coup orphelins et qui sont adoptés par leurs
grands-parents.
A ce stade du débat, je ne sais si la commission doit retirer son amendement
au profit du mien ou l'inverse.
M. le président.
Ils sont identiques et seront mis aux voix ensemble, de sorte que chacun sera
satisfait !
(Sourires.)
M. Franck Sérusclat.
Je préfère en ce cas retirer mon amendement au profit de celui de la
commission des lois.
M. le président.
L'amendement n° 29 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
Sur cet
amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat. Cela étant, il
lui semble un peu arbitraire d'établir un critère d'âge. L'appréciation au cas
par cas, notamment par le juge, serait plus justifiée.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 3 est supprimé.
Article additionnel avant l'article 4
M. le président.
Par amendement n° 30, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt, Mazars et les membres du groupe socialiste proposent
d'insérer, avant l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au début de l'article 345 du code civil, il est ajouté un alinéa ainsi
rédigé :
« L'adoption plénière n'est permise que lorsque l'enfant n'a aucune filiation
légalement établie nonobstant l'application des dispositions de l'article
345-1. »
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Cet amendement nous est inspiré par la convention internationale sur les
droits de l'enfant, qui stipule, en son article 7, que l'enfant « est
enregistré aussitôt sa naissance et a, dès celle-ci, le droit à un nom, le
droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de
connaître ses parents et d'être élevé par eux. »
Dans la mesure où un enfant a une filiation légalement établie, nous
continuons de penser qu'une adoption simple est préférable à une adoption
plénière parce qu'elle permet de garder la filiation d'origine de l'enfant. Ce
dernier pourra toujours demander, par la suite, à bénéficier du patronyme
d'usage de sa famille adoptive.
Il s'agit toujours, dans notre esprit, d'éviter de confondre la filiation
biologique et la filiation adoptive.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement, pour un
certain nombre de raisons que je résume très brièvement.
Tout d'abord, inscrire cette disposition à l'article 345 du code civil n'est
pas idéal. En effet, c'est l'article 347 du même code qui fixe la liste des
enfants susceptibles d'être adoptés.
Par ailleurs, et l'argument est assez important, le dispositif proposé, s'il
était adopté, pourrait aboutir à réduire encore le nombre d'enfants adoptables.
Je ne pense pas que ce soit l'objectif des auteurs de l'amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 345 du code civil, les
mots : "adoption simple" sont remplacés par les mots : "adoption
complétive".
« II. - Après les mots : "sont remplies,", la fin du même alinéa est
ainsi rédigée : "pendant la minorité de l'enfant et dans les deux ans
suivant sa majorité". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 2, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 31, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, les membres du groupe socialiste proposent, dans le
II de l'article 4, après les mots : « pendant la minorité de l'enfant » de
supprimer les mots : « et dans les deux ans suivant sa majorité ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Par le paragraphe I de l'article 4, l'Assemblée nationale a
souhaité remplacer la terminologie actuelle d'« adoption simple » par celle d'«
adoption complétive ». Nous avions fait tous les commentaires utiles lors de la
première lecture, je n'y reviens donc pas. Nous souhaitons maintenir la
dénomination : « adoption simple », et proposons donc de supprimer de nouveau
l'article 4.
Par ailleurs, le paragraphe II de ce même article tend à prolonger la
possibilité d'adoption plénière de l'enfant jusqu'au vingtième anniversaire de
celui-ci, alors que, aujourd'hui, cette possibilité n'est ouverte que pendant
sa minorité. Dans le même temps où on affirme souhaiter promouvoir l'adoption
simple, il est bien évident que cette disposition est mal venue, d'autant que
l'adoption simple est clairement la bonne solution pour les jeunes majeurs.
La suppression de l'ensemble de l'article lève toute difficulté.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga, pour présenter l'amendement n° 31.
Mme Monique ben Guiga.
Nous partageons le point de vue de M. le rapporteur, et nous retirons donc
notre amendement au profit de celui qui a été présenté par la commission.
M. le président.
L'amendement n° 31 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 2 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4 est supprimé.
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - L'article 345-1 du code civil est ainsi rédigé :
«
Art. 345-1.
- L'adoption plénière de l'enfant du conjoint est permise
:
« 1° Lorsque l'enfant n'a de filiation légalement établie qu'à l'égard de ce
conjoint ;
« 2° Lorsque l'autre parent que le conjoint s'est vu retirer totalement
l'autorité parentale ;
« 3° Lorsque l'autre parent que le conjoint est prédécédé et n'a pas laissé
d'ascendants au premier degré ou lorsque ceux-ci se sont manifestement
désintéressés de l'enfant. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune. Par amendement n° 3, M. Dejoie, au nom de la commission des lois,
propose de rédiger comme suit le dernier alinéa du texte présenté par cet
article pour l'article 345-1 du code civil :
« 3° Lorsque l'autre parent que le conjoint est décédé et n'a pas laissé
d'ascendants. »
Par amendement n° 32, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, et les membres du groupe socialiste proposent, dans
le dernier alinéa (3°) du texte présenté par l'article 5 pour l'article 345-1
du code civil, de remplacer les mots : « au premier degré ou lorsque ceux-ci »
par les mots : « jusqu'au deuxième degré ni de colatéraux, ou lorsque ceux-ci
».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit de revenir à la position adoptée par le Sénat lors
de la première lecture en ce qui concerne l'adoption plénière des enfants du
conjoint.
La commission souhaite que l'article 345-1 du code civil la permette lorsque
le parent conjoint décédé n'a pas laissé d'ascendant, sans préciser leur nombre
ni leur degré. En effet, s'il y a encore un ascendant, il n'est pas souhaitable
de couper les liens de l'enfant avec la famille de son parent décédé, qu'il
s'agisse d'un grand-parent ou même d'un arrière-grand-parent, ce qui est très
possible aujourd'hui.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga, pour défendre l'amendement n° 32.
Mme Monique ben Guiga.
Nous pensons qu'il faut tenir compte de la présence d'ascendants jusqu'au
deuxième degré et de colatéraux. Il est bon de ne pas prononcer une adoption
plénière par un conjoint si l'enfant a encore une famille du côté du parent
décédé.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 32 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. En
effet, tenir compte de la présence de colatéraux, c'est, selon nous, aller
beaucoup trop loin, d'autant que rien n'empêche le juge de tenir compte de
l'existence de colatéraux qui se manifesteraient, ce qu'ils ont toujours le
droit de faire, et d'apprécier s'il est ou non dans l'intérêt de l'enfant
d'être adopté plénièrement par le conjoint de son parent survivant.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 3 et 32 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
S'agissant de l'amendement n° 3, comme je l'ai indiqué
en première lecture, il nous semble opportun d'assouplir les dispositions en
vigueur prohibant l'adoption plénière de l'enfant du conjoint et de permettre
celle-ci non seulement dans le cas où le premier conjoint du parent qui se
remarie est décédé sans ascendant, mais également lorsque le mineur n'a plus
aucun lien affectif ni de relation avec la proche famille du prédécédé,
c'est-à-dire avec ses grands-parents.
La rédaction proposée par l'Assemblée nationale répond de manière
satisfaisante à ces hypothèses et correspond à l'intérêt de l'enfant. En effet,
la notion de désintérêt manifeste est déjà connue de notre droit et ne saurait
prêter à discussion.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne peut être favorable à l'amendement
n° 3.
En ce qui concerne l'amendement n° 32, sans méconnaître bien évidemment les
préoccupations de ses auteurs, le texte proposé par l'Assemblée nationale me
paraissait constituer un équilibre satisfaisant en ce qu'il visait la proche
famille, parents et grands-parents.
Je pense que les arguments qui militent en faveur de l'assouplissement des
dispositions en vigueur prohibant l'adoption plénière doivent primer sur des
situations très rares en pratique. Il ne me semble donc pas utile d'aller
au-delà du texte voté, alors qu'il appartiendra au juge d'apprécier en fonction
de l'intérêt de l'enfant, dans chaque situation qui lui est soumise,
l'opportunité de prononcer une adoption simple ou une adoption plénière.
En tout état de cause, les éventuels grands-parents, oncle ou tante de
l'enfant pourraient le cas échéant se voir accorder, sur le fondement de
l'article 371-4 du code civil, un droit de visite à l'égard de l'enfant adopté
plénièrement. Cette discussion reste bien évidemment ouverte et, sur cet
amendement-là, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Le désintérêt manifeste des parents, c'est une chose connue
du code civil, mais cette notion ne peut pas s'appliquer de la même manière aux
grands-parents, surtout dans le cas particulier du décès d'un parent qui,
jusque-là, s'occupait normalement de l'enfant. Je ne crois donc pas que l'on
puisse faire un amalgame. C'est pourquoi je maintiens cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
Mme Monique ben Guiga.
Le groupe socialiste s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 32 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
bis
M. le président.
L'article 6
bis
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - Dans la première phrase des deuxième et troisième alinéas de
l'article 348-3 du code civil, les mots "trois mois" sont remplacés
par les mots "deux mois". »
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 33 est proposé par M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben
Guiga, MM. Dreyfus-Schmidt et Mazars, et les membres du groupe socialiste.
L'amendement n° 49 est déposé par Mme Dusseau.
Tous trois tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit du délai de rétractation pour le consentement à
l'adoption donné par la mère.
L'Assemblée nationale avait fixé ce délai à six semaines. J'avais proposé en
première lecture deux mois et le Sénat avait retenu trois mois. En deuxième
lecture, l'Assemblée nationale a retenu un délai de deux mois.
Je ne tiens pas à me faire désavouer une seconde fois par le Sénat. Aussi, je
propose, au nom de la commission, le maintien du délai actuel de trois mois.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat, pour défendre l'amendement n° 33.
M. Franck Sérusclat.
Nous retirons notre amendement au profit de celui de la commission.
M. le président.
L'amendement n° 33 est retiré.
La parole est à Mme Dusseau, pour défendre l'amendement n° 49.
Mme Joëlle Dusseau.
Je retire, moi aussi, mon amendement au profit de celui de la commission.
Je suis satisfaite que la commission des lois ait décidé, malgré sa position
initiale, de reprendre le délai qui avait été adopté par le Sénat en première
lecture. La commission des lois et la commission des affaires sociales ont été
sensibles aux arguments qui ont été avancés, à tout ce qui a été dit sur cette
période si difficile pendant laquelle la mère abandonne son enfant. Il me
paraît sage de revenir au délai de trois mois.
Je reprends ce que j'ai dit tout à l'heure dans la discussion générale. Il
serait extrêmement important que les membres de la commission mixte paritaire
ne disent pas à leurs collègues députés que ce délai de trois mois a été
proposé et adopté parce que le rapporteur ne voulait pas se faire désavouer par
le Sénat, ainsi que vous l'avez dit un peu sous forme de boutade, voilà
quelques instants, monsieur le rapporteur.
En effet, ce délai correspond à une demande forte, non seulement de la
majorité du Sénat il y a quelques semaines, de la commission des lois
aujourd'hui, mais également des auteurs de deux autres amendements de
suppression, les membres du groupe socialiste et moi-même. Je crois qu'il faut
défendre fortement cette position, pour qu'un délai raisonnable soit laissé à
la mère qui accouche dans des conditions aussi difficiles.
M. le président.
L'amendement n° 49 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 4 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Cette question a été largement évoquée lors de la
première lecture. On a le choix entre le
statu quo
et une position
beaucoup plus radicale visant à raccourcir de manière excessive le délai de
rétractation. Depuis le début de la discussion de cette proposition de loi, le
Gouvernement est favorable à un délai de deux mois, ce qui explique qu'il soit
défavorable à l'amendement n° 4.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
Mme Monique ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
En l'occurrence, on néglige trop les difficultés d'une mère qui vient
d'accoucher et qui a besoin de temps pour prendre sa décision. Ce sont des
femmes trop isolées, qui ont besoin d'un accompagnement, d'une aide. Il faut
leur laisser le temps d'y voir clair, sinon elles en concevraient ensuite un
grand remords. Il est vraiment trop dur de leur laisser si peu de temps.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7 est supprimé.
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - L'article 350 du code civil est ainsi modifié :
« 1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : "une oeuvre
privée" sont remplacés par les mots : "un établissement" ;
« 2° Dans la deuxième phrase du même alinéa, les mots : "l'oeuvre
privée" sont remplacés par les mots : "l'établissement". »
Par amendement n° 48, MM. Chérioux et Neuwirth proposent de rédiger comme suit
cet article :
« Le premier alinéa de l'article 350 du code civil est ainsi rédigé :
« L'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de
l'aide sociale à l'enfance, dont les parents se sont manifestement
désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en
déclaration d'abandon est déclaré abandonné par le tribunal de grande instance
sauf le cas de grande détresse des parents et sans préjudice des dispositions
du quatrième alinéa. La demande en déclaration d'abandon est obligatoirement
transmise par le particulier, l'établissement ou le service de l'aide sociale à
l'enfance qui a recueilli l'enfant à l'expiration du délai d'un an dès lors que
les parents se sont manifestement désintéressés de l'enfant. »
La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Cet amendement, que mon collègue M. Chérioux et moi-même avons déposé et qui a
déjà été adopté en première lecture par notre assemblée, va dans le sens de
l'intérêt de l'enfant.
En effet, il ne vise en aucun cas à faciliter l'abandon des enfants par leurs
parents puisqu'il ne rend pas automatique la déclaration d'abandon. Ainsi, le
juge garde sa capacité, son pouvoir d'appréciation dans la mesure où certains
parents peuvent se trouver dans une situation de grande détresse.
En revanche, notre amendement a pour objet de permettre que les enfants dont
les parents sont manifestement désintéressés, sans motiver leur attitude par
une grande détresse, et dont aucun membre de la famille n'a demandé à assumer
la charge puissent être adoptables et adoptés plus aisément.
Cet amendement est cohérent avec ce que nous souhaitons, c'est-à-dire
accélérer le plus possible les procédures en faveur de l'adoption des
enfants.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a déjà eu l'occasion, en première
lecture, de préciser que cet amendement introduirait une rigidité peu
satisfaisante dans l'appréciation des situations et des critères conduisant à
la situation judiciaire d'abandon. Il importe en effet que le juge garde tout
son pouvoir d'appréciation en fonction des circonstances d'espèce pour
apprécier le désintérêt manifeste. Par ailleurs, la notion de grande détresse
semble difficile à cerner. Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement
émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 48.
M. Lucien Neuwirth.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Je voudrais simplement rappeler que l'expression « grande détresse » a été
retenue pour l'interruption volontaire de grossesse.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
Mme Nicole Borvo.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
Mme Monique ben Guiga.
Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé.
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - Dans le deuxième alinéa de l'article 351 du code civil, les mots
: "trois mois" sont remplacés par les mots : "deux mois".
»
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 34 est déposé par M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga,
MM. Dreyfus-Schmidt et Mazars, et les membres du groupe socialiste.
L'amendement n° 50 est proposé par Mme Dusseau.
Tous trois tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec le maintien du
délai actuel de rétractation du consentement à l'adoption.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat, pour défendre l'amendement n° 34.
M. Franck Sérusclat.
Il s'agit effectivement d'un amendement de coordination.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau, pour défendre l'amendement n° 50.
Mme Joëlle Dusseau.
Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 5, 34 et 50
?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les trois
amendements identiques, et ce pour les mêmes raisons que celles qu'il a
invoquées pour l'amendement n° 4.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?..
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 5, 34 et 50, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11 est supprimé.
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - Avant le dernier alinéa de l'article 353 du code civil, il est
inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Si l'enfant décède après avoir été régulièrement recueilli en vue de son
adoption, la requête peut toutefois être présentée. Le jugement produit effet
le jour précédant le décès et emporte uniquement modification de l'état civil
de l'enfant. » -
(Adopté.)
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - I. - Après l'article 353 du code civil, il est inséré un article
353-1 ainsi rédigé :
«
Art. 353-1.
- Dans le cas d'adoption d'un pupille de l'Etat ou d'un
enfant étranger qui n'est pas l'enfant du conjoint de l'adoptant, le tribunal
vérifie avant de prononcer l'adoption que le ou les requérants entrent dans
l'une des catégories définies par le premier alinéa de l'article 63 du code de
la famille et de l'aide sociale ou ont obtenu l'agrément prévu par l'article
100-3 du même code.
« Si l'agrément a été refusé ou s'il n'a pas été délivré dans le délai prévu à
l'article 63 du code précité, le tribunal peut prononcer l'adoption s'il estime
que les requérants sont aptes à accueillir l'enfant et que celle-ci est
conforme à son intérêt. »
« II. -
Non modifié.
»
Par amendement n° 6, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose :
I. - De rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte présenté par cet
article pour l'article 353-1 du code civil : « ... le ou les requérants ont
obtenu l'agrément pour adopter ou en étaient dispensés. »
II. - Dans le second alinéa du même texte, de remplacer les mots : « délai
prévu à l'article 63 du code précité » par les mots : « délai légal ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement, purement rédactionnel, vise à éviter qu'il ne
soit fait référence, dans le code civil, à des articles d'un autre code.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis favorable. Voilà un
amendement qui aurait ravi Stendhal !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, ainsi modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14
M. le président.
Par amendement n° 54, Mme Borvo, M. Pagès et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 14, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Après le paragraphe 4 de la section première du chapitre III du titre Ier
bis
du livre Ier du code civil, il est inséré un paragraphe nouveau
ainsi rédigé :
« ... - Acquisition de la nationalité française pour l'enfant étranger
pupille de l'Etat.
«
Art...
- L'enfant étranger admis en qualité de pupille de l'Etat
acquiert la nationalité française le jour où l'admission devient définitive.
« Toutefois il sera réputé n'avoir jamais été français, si au cours de sa
minorité intervient la restitution prévue à l'article 62 du CFAS et s'il a,
conformément à la loi nationale de son auteur, la nationalité de celui-ci, les
dispositions de l'article 21-8 ne s'appliquent pas. »
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Cet amendement vise à compléter le code civil en accordant la nationalité
française à l'ensemble des pupilles qui ne la possèdent pas.
En première lecture, le groupe communiste républicain et citoyen avait déposé
un amendement visant le même objectif et tendant à compléter l'article 61 du
code de la famille.
En effet, comme l'avait dit alors Michelle Demessine, il nous semble que
l'Etat, qui prend ces enfants intégralement en charge et assure tous les droits
et obligations des parents, doit les reconnaître comme des nationaux.
Si le problème ne se pose pas pour les enfants adoptés, puisque la loi leur
accorde la qualité de Français, notre proposition profitera néanmoins à ceux
qui ne bénéficient pas d'un projet d'adoption.
Je crois, en outre, que cette proposition peut permettre de contribuer à la
résolution partielle des problèmes posés par l'article 15. Elle évitera
notamment que les enfants adoptés à l'étranger et dont le statut juridique
n'aura pu être entièrement défini ne restent, jusqu'à dix-huit ans, dans une
situation incertaine quant à leur avenir en France.
Nous pensons que nous ne pouvons laisser ces enfants, qui sont issus la
plupart du temps de pays du Maghreb, à la merci de lois si promptes à en faire
des clandestins.
En première lecture, M. le rapporteur avait jugé « souhaitable que les
modalités d'acquisition de la nationalité française figurent ailleurs que dans
le code civil ». C'est pour cette « raison importante », selon lui, qu'il
s'était notamment opposé à l'amendement que nous avions déposé sur l'article 61
du code de la famille.
Aussi, nous avons réécrit notre amendement afin de l'insérer dans le passage
du code civil concernant la nationalité.
On ne pourra donc plus s'abriter derrière des considérations formelles pour
refuser cet amendement, que je vous propose d'adopter, mes chers collègues.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. En
effet, si les enfants concernés sont adoptés par un Français, ils deviennent
français ; mais, dans le cas contraire, c'est le droit commun qui s'applique :
il leur suffira le moment venu de déclarer qu'ils demandent la nationalité
française. Cette solution est conforme à l'esprit de notre droit de la
nationalité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 54.
Mme Monique ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Quand on connaît comme moi le cas de jeunes gens, pupilles de la nation,
élevés en France, qui ont fréquenté l'école française, n'ont vécu que dans
notre pays, ne parlent aucune autre langue que le français et ont été expulsés
une fois leur majorité advenue parce que la direction départementale des
affaires sanitaires et sociales, la DDASS, ne s'était pas occupée de leur faire
obtenir la nationalité française à laquelle ils avaient droit, on est prêt à
voter cet article. En effet, c'est absolument abominable ! On trouve
actuellement partout dans le Maghreb des cas de ce type.
La disposition proposée par le groupe communiste républicain et citoyen me
paraît donc bonne, car elle permettrait d'éviter que, suite à des négligences
administratives et à un manque de conseils donnés à ces jeunes au moment de
leur majorité, ces derniers, qui sont Français par l'éducation - nous sommes en
effet Français non parce que nous avons demandé la nationalité française, mais
parce que nous avons été éduqués en France, à l'école de la République - ne
puissent obtenir la nationalité française.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je souhaite revenir un instant sur l'argumentation présentée.
La loi n'est pas faite pour réparer ce que l'on peut appeler des carences
administratives ! Si des problèmes de ce type existent au sein des services
départementaux de l'action sanitaire et sociale, il suffit de demander à ces
derniers de faire leur travail convenablement et d'informer les jeunes en temps
utile. En effet, il n'est pas difficile pour le jeune de déclarer qu'il demande
la nationalité française. Et je suis bien certain qu'il doit arriver peu
fréquemment que l'on n'informe pas les intéressés de la possibilité qu'ils ont
de faire cette déclaration.
Mme Monique ben Guiga.
Cela arrive !
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
S'il y des cas de ce type, le problème doit être réglé non
par la loi, mais par l'exécutif, qu'il soit départemental ou national ; c'est à
ce dernier qu'il revient de donner les instructions, car l'administration doit
fonctionner convenablement et assumer toutes ses responsabilités.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.
Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Cette question me paraît relever tout à fait du
domaine réglementaire.
Il paraît difficile d'expulser ces jeunes, qui ont été élevés selon la loi et
les moeurs françaises, dans des pays où ils ne souhaitent quelquefois pas du
tout vivre, et ce à cause d'un oubli administratif.
Monsieur le secrétaire d'Etat, une circulaire ne pourrait-elle prévoir que les
directions départementales des affaires sanitaires et sociales doivent, à un
moment à déterminer, indiquer à ces jeunes qu'ils ont à demander la nationalité
française ou leur envoyer des imprimés à cet effet ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le système actuel, tel qu'il résulte de la loi du 22
juillet 1993, est un système déclaratif de volonté. L'article 21-12 est ainsi
rédigé : « Peut réclamer la nationalité française le mineur jusqu'à sa
majorité, recueilli en France et élevé par une personne de nationalité
française ou confié aux services de l'aide sociale à l'enfance. »
Notre dispositif légal, de ce point de vue-là, est correct et, d'ailleurs,
l'application et le bilan qui sont faits de cette loi de juillet 1993 ne
souffrent aucune discussion. Il faut donc, à mon avis, dédramatiser cette
question et ne pas parler d'expulsion. Nous n'avons pas d'exemples d'expulsions
de jeunes.
Mme Monique ben Guiga.
Je peux vous citer des cas, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Il ne s'agit pas de mineurs, madame ben Guiga !
Mme Monique ben Guiga.
Ce sont des jeunes majeurs !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Oui, mais nous parlons de la situation des mineurs
juste au moment où ils vont accéder à la nationalité française. Telle est bien
l'économie de la loi de juillet 1993 qui a été votée par les deux
assemblées.
Je retiens en tout cas la proposition de M. Neuwirth tendant à donner des
instructions aux services d'aide sociale à l'enfance et à procéder à une
information peut-être plus complète qu'elle ne l'est aujourd'hui afin que la
procédure de déclaration soit faite à l'âge prévu.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 54, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements, présentés par M. Sérusclat, Mmes
Dieulangard, ben Guiga, MM. Dreyfus-Schmidt, Mazars et les membres du groupe
socialiste.
L'amendement n° 35 tend à insérer, après l'article 14, un article additionnel
ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article 356 du code civil, il est inséré un
nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Sur la demande de l'adopté devenu majeur, le tribunal peut lui conférer le
droit de porter le nom de ses mère ou père d'origine si ceux-ci sont connus.
»
L'amendement n° 36 vise à insérer, après l'article 14, un article additionnel
ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article 356 du code civil, il est inséré un
nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Sur la demande du ou des adoptants, et après avoir entendu le mineur capable
de discernement, le tribunal peut conférer à l'enfant le droit de porter le nom
de ses mère ou père d'origine si ceux-ci sont connus. »
La parole est à M. Sérusclat, pour défendre ces deux amendements.
M. Franck Sérusclat.
L'amendement n° 35 vise à permettre à l'enfant adopté, devenu majeur, de
porter le nom de ses père ou mère d'origine si le tribunal lui a permis de les
connaître. Cette possibilité ne modifie en rien la filiation, mais permet à
l'enfant de faire connaître son origine biologique.
L'amendement n° 36 tend à affirmer le droit des parents adoptants de demander
que l'enfant mineur porte le nom de ses parents d'origine si celui-ci est
connu.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 35 et 36 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur ces deux
amendements.
En effet, l'un des effets essentiels de l'adoption plénière est de conférer à
l'enfant le nom patronymique de la famille adoptante et de couper les liens
avec la famille d'origine. Si, pour une raison quelconque, on décidait de
revenir sur ce point, ce serait en contradiction avec le principe même de
l'adoption plénière. Par conséquent, l'avis défavorable de la commission est
plus que justifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 35 et 36 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable aux deux
amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 15
M. le président.
« Art. 15. - Après l'article 359 du code civil, il est inséré un article 359-1
ainsi rédigé :
«
Art. 359-1
. - L'adoption régulièrement prononcée dans le pays
d'origine de l'adopté produit les effets prévus par la loi française lorsque
l'adoptant est de nationalité française ou réside habituellement en France.
« Ses effets peuvent être ceux de l'adoption plénière si le consentement à une
adoption a été recueilli en pleine connaissance de cause.
« En l'absence, dans le pays d'origine, de législation sur l'adoption, la loi
française s'applique aux conditions et aux effets de l'adoption. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 37 est déposé par M. Sérusclat, Mmes Dieulangard, ben Guiga,
MM. Dreyfus-Schmidt, Mazars et les membres du groupe socialiste.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Mon explication ne sera pas très longue, puisqu'un grand
nombre d'orateurs se sont exprimés sur ce sujet lors de la discussion
générale.
Il s'agit ici de l'adoption internationale. Le fait d'inscrire dans la loi des
dispositions contraires au droit international privé et même public me paraît
inacceptable venant du Parlement français, d'autant plus que la jurisprudence
de la Cour de cassation permet aujourd'hui de régler la quasi-totalité des
problèmes.
Il apparaît donc souhaitable de supprimer l'article 15.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga, pour présenter l'amendement n° 37.
Mme Monique ben Guiga.
Nous retirons l'amendement n° 37, qui est identique à l'amendement n° 7. En
effet, notre position a été suffisamment expliquée pour que nous ne nous
étendions pas plus sur ce sujet.
M. le président.
L'amendement n° 37 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 7 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
Mme Nicole Borvo.
Le groupe communiste vote pour.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 15 est supprimé.
CHAPITRE II
Adoption complétive
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit l'intitulé de cette division : « Adoption simple ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit de maintenir la dénomination de l'adoption simple
au lieu et place de l'adoption complétive. C'est la même position que celle que
nous avions adoptée lors de la première lecture.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé de cette division est ainsi rédigé.
Article 16 A
M. le président.
« Art. 16 A. - Après le premier alinéa de l'article 360 du code civil, il est
inséré un alinéa ainsi rédigé :
« S'il est justifié de motifs graves, l'adoption complétive d'un enfant ayant
fait l'objet d'une adoption plénière est permise. »
Par amendement n° 57, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le second alinéa de cet article, de remplacer le mot : « complétive » par
le mot : « simple ».
Il s'agit d'un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 57.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16 A, ainsi modifié.
(L'article 16 A est adopté.)
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - I. - L'intitulé du chapitre II du titre VIII du livre premier du
code civil est ainsi rédigé : "De l'adoption complétive".
« II. - Au début du premier alinéa de l'article 360 et dans l'article 362 du
code civil, le mot : "simple" est remplacé par le mot :
"complétive".
« III. - Après la référence : "343 à", la fin de l'article 361 du
code civil est ainsi rédigée : "344, premier et troisième alinéas, 346 à
350, 353 à 353-2, 355, 357, dernier alinéa, et 359-1 sont applicables à
l'adoption complétive". »
Par amendement np 9, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
supprimer cet article.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 16 est supprimé.
Section 2
Effets de l'adoption complétive
M. le président.
Par amendement n° 10, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans l'intitulé de cette division, de remplacer le mot : « complétive » par le
mot : « simple ».
Il s'agit d'un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé de cette division est ainsi rédigé.
Article 17
M. le président.
« Art. 17. - I. - Dans l'intitulé de la section 2 du chapitre II du titre VIII
du livre Ier du code civil, le mot : "simple" est remplacé par le mot
: "complétive".
« II. - Au début du premier alinéa de l'article 363 du code civil, le mot :
"simple" est remplacé par le mot : "complétive". »
Par amendement n° 11, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
supprimer cet article.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 17 est supprimé.
Article additionnel après l'article 17
M. le président.
Par amendement n° 38, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, les membres du groupe socialiste proposent
d'insérer, après l'article 17, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 362 du code civil, il est inséré un article additionnel
ainsi rédigé :
«
Art...
- Le juge peut prononcer l'adoption simple de l'enfant
étranger confié hors de France depuis au moins deux ans à un ressortissant de
nationalité française ou à des époux dont l'un au moins a cette qualité, dès
lors que les autorités nationales de l'enfant leur ont confié la garde ou la
tutelle de celui-ci et que son représentant légal ou l'enfant devenu majeur y a
consenti, en pleine connaissance de ses effets. »
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Nous avons souhaité réintroduire ces dispositions, car il nous paraît
indispensable que le ministère de la justice explore cette voie de l'adoption
simple, qui peut être considérée - elle l'est d'ailleurs par de bons juristes
spécialisés en droit musulman - comme une transposition du droit de garde
accordé dans le cadre de la législation musulmane.
Même si cette mesure n'est pas adoptée aujourd'hui, nous souhaitons qu'une
recherche soit effectuée en ce domaine. En effet, nous avons trop de relations
avec des pays musulmans pour ne pas aboutir à une amélioration des conditions
d'adoption des enfants confiées par
kefala
à des familles françaises. Il
faudrait qu'ils puissent bénéficier en France d'une adoption simple par
transposition.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées en
première lecture, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est également défavorable à cet
amendement. Toutefois, il prend acte de la proposition de Mme ben Guiga d'aller
plus avant dans l'étude de ce problème particulier de la
kefala.
En accord avec M. le garde des sceaux, cette voie sera explorée, de manière
que nous puissions progresser sur ce sujet important.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 38.
Mme Monique ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Compte tenu de l'assurance que vient de me donner M. le sécrétaire d'Etat, je
retire cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 38 est retiré.
Article additionnel après l'article 20
M. le président.
Par amendement n° 39, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars et les membres du groupe socialiste proposent
d'insérer, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le titre VIII du livre premier du code civil, il est créé un
titre nouveau intitulé : "De la recherche des origines en matière
familiale".
« II. - Dans le code civil, il est inséré, après l'article 370-2, trois
articles ainsi rédigés :
«
Art...
- Il est instauré un conseil pour la recherche des origines en
matière familiale.
« Le conseil mentionné au premier alinéa est une autorité administrative
indépendante. Il est composé de onze membres répartis comme suit :
« - un député et un sénateur désignés respectivement par l'Assemblée nationale
et le Sénat ;
« - un représentant de la fédération nationale des pupilles et anciens
pupilles de l'Etat ;
« - un représentant des familles adoptives ;
« - un membre ou ancien membre du Conseil d'Etat élu par l'assemblée générale
du Conseil d'Etat ;
« - un membre ou ancien membre de la Cour de cassation élu par l'assemblée
générale de la Cour de cassation ;
« - un membre ou ancien membre de la commission d'accès aux documents
administratifs ;
« - deux psychologues ou psychiatres nommés par le ministre chargé de la
famille ;
« - deux assistants sociaux.
« Leur mandat est de cinq ans renouvelable une fois.
« Les dispositions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal sont
applicables aux membres du conseil pour la recherche des origines en matière
familiale et aux personnes employées par ce conseil.
« Le conseil élit en son sein le président.
« Les conditions de désignation des membres du conseil et ses modalités de
fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
«
Art...
- La demande de secret de l'identité du ou des parents au
moment de la remise de l'enfant à l'aide sociale ou au moment de l'accouchement
en application de l'article L. 341-1 du présent code doit être formulée
expressément, signée du ou des demandeurs et mentionnée sur le procès-verbal de
remise de l'enfant au service de l'aide sociale à l'enfance ou à l'un des
organismes autorisés pour l'adoption ou le placement en vue de l'adoption.
« La ou les personnes qui remettent l'enfant sont invitées, dans des
conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, après avis de la Commission
nationale de l'informatique et des libertés, à donner tous renseignements
relatifs à l'enfant et à ses origines.
« Les renseignements identifiants resteront secrets et ne pourront être
transmis à l'enfant qu'en application de la procédure de recherche des origines
prévue à l'article 370-5.
« Le procès-verbal de remise de l'enfant, la demande de secret de l'identité
de la ou des personnes qui ont procédé à cette remise et tous les
renseignements y afférent sont transmis au conseil pour la recherche des
origines en matière familiale.
«
Art...
- Le conseil mentionné au présent titre conserve tout
renseignement ou document relatif au secret de l'identité de la ou des
personnes qui en ont fait la demande en remettant un enfant au service de
l'aide sociale à l'enfance dans les conditions définies par le présent code.
« Il peut être saisi par l'enfant majeur concerné ou, à condition que l'enfant
soit majeur, par le ou les parents qui ont demandé le secret.
« Le conseil apprécie la recevabilité de la demande au regard de la situation
de la personne qui a introduit celle-ci.
« Les conditions de recevabilité de cette demande sont définies par décret en
Conseil d'Etat.
« La décision du conseil est motivée.
« La demande peut porter sur la communication de renseignements remettant en
cause le secret et sur la recherche de l'enfant ou du ou des parents
concernés.
« Si la demande porte uniquement sur la communication des renseignements
remettant en cause le secret, le conseil s'assure du consentement des personnes
concernées. Il informe le demandeur du résultat de ses démarches.
« Si la demande porte sur la recherche de l'enfant ou du ou des parents
concernés et qu'elle a été déclarée recevable, le conseil procède à toutes
investigations nécessaires.
« Si aucune demande n'a été faite concernant un dossier dans un délai de
soixante ans à compter de la transmission au conseil pour la recherche des
origines en matière familiale, ledit dossier est transmis dans des conditions
fixées par décret aux archives nationales.
« Si la ou les personnes faisant l'objet d'une recherche ont pu être
retrouvées, le conseil pour la recherche des origines en matière familiale
exerce un rôle de médiateur entre les deux parties concernées. Il respecte leur
volonté et apprécie l'opportunité de leur transmettre leurs décisions
respectives. Il s'assure de la possibilité de les faire bénéficier d'un
accompagnement psychologique, si elles le souhaitent, et apporte son concours à
leur rapprochement, s'il le juge opportun et selon des modalités laissées à sa
libre appréciation. »
« III. - Les dépenses résultant de l'application des paragraphes I et II sont
compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux
droits de consommation sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code
général des impôts. »
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Cet amendement est, pour nous, essentiel. En définitive, le vote du groupe
socialiste sur ce texte dépendra du sort qui lui sera réservé.
Il s'agit d'insérer un article additionnel tendant à créer un conseil
supérieur pour la recherche des origines en matière familiale. Ce conseil
constituerait un élément intermédiaire entre l'enfant qui voudrait connaître
ses origines et le ou les parents qui accepteraient de les faire connaître. Il
jouerait le rôle de médiateur entre les deux parties concernées.
Je ne reviendrai pas sur le détail de ces dispositions ; elles ont fait
l'objet d'un débat en première lecture, qui figure au
Journal
officiel
.
Il s'agit, je le répète, d'un élément déterminant pour notre vote final.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Ces dispositions avaient déjà été repoussées en première
lecture, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, ce pour plusieurs
raisons.
Tout d'abord, il n'apparaissait pas opportun de créer un conseil
supplémentaire, avec tout ce que cela peut induire de lourdeurs de
fonctionnement.
Ensuite, la notion de secret existe ; nous en avons déjà parlé à plusieurs
reprises. Dès lors, pour quelle raison demanderait-on à un médiateur
d'intervenir en la matière ? Si le secret a été demandé, il doit être préservé
tant que celui qui l'a demandé n'a pas souhaité le lever.
L'amendement constitue un retour en arrière par rapport aux positions que le
Parlement a adoptées dans ce domaine lors de la première lecture.
Par conséquent, comme en première lecture, la commission émet un avis
défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 39.
M. Franck Sérusclat.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Je souhaiterais revenir sur la première réflexion de M. le rapporteur. Comme
ce n'est pas vraiment un argument, on pourrait penser que, en définitive, la
commission est favorable à ces mesures.
(M. le rapporteur fait un signe de dénégation.)
En effet, il s'agit
simplement de la difficulté de réunir le conseil.
Nous allons créer un conseil pour l'informatique dans peu de temps. Nous en
avons créé un pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA. Nous passons
notre temps à en créer ! Le danger existe, effectivement, en particulier pour
le législateur, de voir ces nombreux conseils prendre le pas, dans une certaine
mesure, sur la réflexion des parlementaires. Mais tel n'est pas le cas !
Par conséquent, je souhaiterais que M. le rapporteur retire cet argument, qui
n'est qu'un simple prétexte.
S'agissant du secret, nous sommes tout à fait favorables à la disposition qui
permet, comme on dit, d'accoucher « sous X ». Toutefois, pour en rester au
niveau du débat sur la sémantique engagé par notre collègue Mme Dusseau, le
secret est fait pour être gardé ou pour être révélé un jour.
Par conséquent, si le médiateur est saisi par l'enfant, il peut très bien
demander à la mère de se faire connaître et établir cette réciprocité.
Je regrette que ces deux prétextes empêchent la commission des lois d'émettre
un avis favorable sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 27
ter
AA
M. le président.
Par amendement n° 40, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt, Mazars et les membres du groupe socialiste proposent
d'insérer, avant l'article 27
ter
AA, un article additionnel ainsi
rédigé :
« La première phrase du premier alinéa de l'article 57 du code civil est ainsi
rédigée :
« L'acte de naissance énoncera le jour, l'heure et le lieu de la naissance, le
sexe de l'enfant, les prénoms qui lui seront donnés, et, sous la mention
"fils de" ou "fille de" les prénoms, noms, âges,
professions et domiciles des père et mère et, s'il y a lieu, ceux du déclarant.
»
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Je devrais, là aussi, pouvoir bénéficier de la réflexion attentive de M. le
rapporteur, qui souhaite que l'on soit toujours aussi près que possible de la
vérité, surtout quand des parlementaires légifèrent.
Abandonner l'expression « né de », quand on sait très bien que les parents
adoptants n'ont pas été biologiquement en situation de provoquer une naissance,
pour y substituer la formule « fils de » ou « fille de » serait simplement, me
semble-t-il, faire preuve d'exigence en mettant en conformité la réalité d'une
situation et le registre d'état civil.
C'est la raison pour laquelle j'espère que cet amendement recueillera l'avis
favorable de la commission des lois.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je suis navré de décevoir notre collègue, mais il ne m'est
pas possible de donner un avis favorable sur cet amendement n° 40.
En effet, nul texte de loi ne prévoit l'obligation d'inscrire « né de ». Cette
mention figure dans l'instruction générale sur l'état civil où elle pourrait
être remplacée par l'expression « fils de », ainsi que vous le proposez.
Sur le principe, je ne suis pas défavorable à cette modification, mais elle ne
relève pas du domaine législatif. Il appartient au Gouvernement de modifier, le
cas échéant, l'instruction générale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement comprend les préoccupations des
auteurs de l'amendement, mais, comme vient de le dire M. le rapporteur, cette
modification ne relève pas du domaine législatif.
A l'évidence, il faut refondre l'instruction générale relative à l'état civil.
Ce travail est en cours à la Chancellerie et il devrait être mené à bien avant
la fin de l'année. Des modèles pourront être établis en tenant compte des
observations des auteurs de l'amendement.
Par conséquent, je leur propose de retirer cet amendement en échange de
l'engagement du Gouvernement de refondre l'instruction générale relative à
l'état civil.
M. le président.
Monsieur Sérusclat, l'amendement n° 40 est-il maintenu ?
M. Franck Sérusclat.
Devant l'engagement que vient de prendre le Gouvernement et compte tenu de
l'explication qu'a donnée M. le rapporteur, je retire bien volontiers cet
amendement. J'ai, en effet, la certitude que, d'ici à un an au plus tard, sera
utilisée l'expression « fils de » ou « fille de ». Je remercie la commission et
le Gouvernement.
M. le président.
L'amendement n° 40 est retiré.
Article 27
ter
AA
M. le président.
« Art. 27
ter
AA. - I. - Après l'article 57 du code civil, il est
inséré un article 57-1 ainsi rédigé :
« Art. 57-1.
- Lorsque l'officier de l'état civil du lieu de naissance
d'un enfant naturel porte mention de la reconnaissance dudit enfant en marge de
l'acte de naissance de celui-ci, il en avise l'autre parent par lettre
recommandée avec demande d'avis de réception.
« Si ce parent ne peut être avisé, l'officier de l'état civil en informe le
procureur de la République qui fait procéder aux diligences utiles. »
« II. - L'article 335 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« Il comporte également la mention que l'auteur de la reconnaissance a été
informé du caractère divisible du lien de filiation naturelle. »
Par amendement n° 56, le Gouvernement propose de compléter le premier alinéa
du texte présenté par cet article pour l'article 57-1 du code civil par les
mots suivants : « si la filiation de l'enfant est établie à l'égard de ce
dernier depuis plus de six mois. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le mécanisme créé par cet article tend à instaurer, à
l'intention du parent qui a reconnu le premier son enfant, une information sur
la reconnaissance effectuée ultérieurement par l'autre parent.
Néanmoins, par souci de réalisme, il convient de s'attacher spécifiquement aux
reconnaissances tardives qui sont les seules à poser problème.
Or, dans les faits, les reconnaissances des pères et mères interviennent
séparément. Le décalage varie entre quelques jours et quelques semaines, voire
quelques mois quand un parent est indisponible, par exemple pour cause de
mission à l'étranger ou de maladie.
Le décalage dans le temps entre les deux reconnaissances ne signifie pas
nécessairement que l'auteur de la seconde reconnaissance a délibérément voulu
établir le lien de filiation à l'insu du parent ayant reconnu l'enfant le
premier.
Pris au pied de la lettre, l'article voté signifierait que , lorsque le père
reconnaît l'enfant le lendemain de la reconnaissance par la mère, celle-ci
devrait en être avertie par lettre recommandée avec accusé de réception de
l'officier de l'état civil.
Selon le point de vue où l'on se place, une telle démarche deviendrait soit
cocasse, soit désagréable aux yeux des intéressés.
Nous proposons donc d'introduire un délai de six mois, afin d'éviter qu'une
information ne soit mise en oeuvre dans des cas où elle ne s'impose pas à
l'évidence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission des lois est tout à fait favorable à l'esprit
de l'article 57-1 inséré dans le code civil par l'Assemblée nationale et à sa
modification demandée par le Gouvernement.
Je suggère simplement que le délai de six mois, pendant lequel il n'est pas
nécessaire d'informer le premier parent de la reconnaissance par le second
parent, puisse être ramené à trois mois. En effet, ce délai de trois mois
permet de couvrir tous les cas où la reconnaissance est quasi certaine. Au-delà
de trois mois, il s'agit manifestement de quelqu'un qui a hésité à reconnaître
son enfant. Il est donc nécessaire que l'autre parent soit informé de cette
reconnaissance.
Si le Gouvernement acceptait de ramener le délai de six à trois mois, je
pourrais donner un avis tout à fait favorable à cet amendement.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, acceptez-vous de rectifier votre amendement en
ce sens ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 56 rectifié, déposé par le Gouvernement,
et tendant à compléter le premier alinéa du texte proposé par l'article 27
ter
AA pour l'article 57-1 du code civil par les mots suivants : « si la
filiation de l'enfant est établie à l'égard de ce dernier depuis plus de trois
mois ».
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 56 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 27
ter
AA, ainsi modifié.
(L'article 27
ter
AA est adopté.)
Article additionnel après l'article 27
ter
AA
M. le président.
Par amendement n° 51, Mme Dusseau propose d'insérer, après l'article 27
ter
AA, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 341-1 du code civil, un article additionnel
rédigé comme suit :
«
Art...
Lorsqu'une femme a accouché en demandant que le secret de son
admission et de son identité soit préservé, elle a toutefois la faculté de
donner des informations, y compris identifiantes, relatives à l'enfant et à
elle-même, avec la garantie qu'elles soient gardées secrètes.
« L'enfant devenu adulte a la possibilité, avec l'accord de la mère et par
l'intermédiaire d'un médiateur, d'avoir accès à ces informations. »
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Il s'agit du problème du secret au moment de l'accouchement. Je ne reviendrai
pas sur le débat que nous avons eu à cet égard. Je rappellerai simplement
qu'actuellement la mère peut demander la préservation du secret de son
admission et de son accouchement. Mais il ne doit pas y avoir confusion entre
anonymat et secret. Il s'agit non pas de remettre en cause le droit pour la
mère d'accoucher sous le secret de son identité, mais de lui accorder la
possibilité de donner des renseignements - y compris identifiants - relatifs à
elle et à son enfant. Le secret de ces renseignements est préservé, mais, à la
demande de l'enfant majeur et avec l'accord de la mère, ce secret peut être
levé.
L'Assemblée nationale a fait une avancée non négligeable en permettant que cet
accouchement anonyme puisse être remis en cause « ultérieurement » - le terme
est relativement vague, vous en conviendrez ! - la mère revenant sur l'anonymat
et donnant son identité.
Par cohérence, je propose que la mère ait la possibilité d'accoucher de façon
secrète, mais en laissant des renseignements identifiants qui puissent être
communiqués plus tard à l'enfant devenu adulte.
J'en profite pour dire que, lors de la première lecture, j'ai posé le principe
du médiateur, que l'on retrouve dans l'amendement déposé par M. Sérusclat, qui
n'a pas été adopté mais que j'ai voté.
A cette occasion, je voudrais dire à M. Dejoie, qui ne voit pas l'utilité d'un
médiateur, que les adultes qui ont été adoptés alors qu'ils étaient enfants et
qui recherchent désespérément l'identité de leur famille, de leur mère
biologique, vivent des situations très pénibles sur le plan humain.
L'intervention d'un médiateur, au moment où l'enfant adopté devenu adulte veut
rencontrer, vingt, vingt-cinq ou trente ans après, sa mère biologique qui l'a
abandonné est, selon moi, tout à fait fondamentale. Ce n'est pas un
épiphénomène !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement pour des
raisons de forme et de fond.
S'agissant de la forme, l'Assemblée nationale s'est refusée à inclure de
telles dispositions dans le code civil. Elle les a supprimées et nous nous
sommes rangés à son avis. Cet amendement prévoit à nouveau d'insérer une
disposition dans le code civil. Nous y sommes donc défavorables.
S'agissant du fond, je vous rappelle que nous nous sommes prononcés contre
l'instauration d'un médiateur. A mon avis, elle ne se justifie pas.
En effet, quand une femme accouche anonymement, secrètement, sous X - je ne
veux pas me prononcer sur la bonne terminologie - le secret existe. Si cette
personne décide de lever ce secret,...
Mme Joëlle Dusseau.
Pas le secret, l'anonymat !
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
... l'anonymat, l'enfant devenu majeur peut déjà obtenir
communication de l'identité de sa mère.
Que veut-on de plus ?
La disposition qui est proposée me semble donc totalement inutile.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
L'avis du Gouvernement est défavorable, pour les mêmes
raisons que celles qu'a invoquées la commission.
M. le président.
Madame Dusseau, votre amendement est-il maintenu ?
Mme Joëlle Dusseau.
S'agissant de la forme, je conviens qu'il est mal placé. C'est pourquoi,
d'ailleurs, je proposerai dans quelques instants, par un autre amendement,
d'insérer cette disposition dans le code de la famille.
En conséquence, pour des raisons de forme, et de forme seulement, je retire
mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 51 est retiré.
Articles 27
ter
A et 27
ter
B
M. le président.
Les articles 27
ter
A et 27
ter
B ont été supprimés par
l'Assemblée nationale.
Article 27
quater
M. le président.
« Art. 27
quater. -
A l'article 227-6 du code pénal, les mots :
"après un divorce, une séparation de corps ou une annulation du
mariage" sont supprimés. » -
(Adopté.)
Article additionnel avant l'article 28 A
M. le président.
Par amendement n° 52, Mme Dusseau propose d'insérer, avant l'article 28 A, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Après le deuxième alinéa de l'article 47 du code de la famille et de l'aide
sociale, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, les femmes mentionnées au premier alinéa ont la faculté de donner
des informations, y compris identifiantes, relatives à l'enfant et à elle-même,
avec la garantie qu'elles soient gardées secrètes.
« L'enfant devenu adulte a la possibilité, avec l'accord de la mère et par
l'intermédiaire d'un médiateur, d'avoir accès à ces informations. »
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Cette fois, on ne peut pas m'opposer un argument de forme, puisque je propose
d'insérer cette disposition dans le code de la famille et de l'aide sociale.
Certains ne comprennent pas la différence qu'il y a entre anonymat et secret.
Pourtant, ces deux termes recouvrent des notions tout à fait différentes :
accoucher anonymement, c'est ne donner aucun renseignement ; accoucher dans le
secret, c'est éventuellement laisser des renseignements identifiants qui
pourront un jour être consultés.
Au nom de quoi voulez-vous interdire à des femmes d'accoucher dans le secret,
en laissant des renseignements identifiants ? Si elles ne veulent rien laisser,
elles ne laissent rien. Dans le cas contraire, pourquoi le leur interdire ?
Il est parfaitement illogique et incohérent d'interdire à la femme qui
accouche dans le secret de laisser des renseignements identifiants, et de dire
ensuite qu'« ultérieurement » - c'est le terme adopté par l'Assemblée nationale
et accepté par la commission - elle pourra lever ce secret. Mais les femmes
sont sans doute plus logiques que les hommes.
Je vous demande donc d'être cohérents et de prévoir dans le code de la famille
qu'une femme a le droit, si elle le désire, d'accoucher dans le secret, mais de
façon non anonyme, en laissant des renseignements identifiants qui pourront
être consultés, un jour, par l'enfant devenu adulte.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission des affaires sociales ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Errare humanum est, perseverare diabolicum.
Vous persévérez, madame, et c'est moi qui récupère le bébé, si j'ose
m'exprimer ainsi.
(Sourires.)
M. Emmanuel Hamel.
Peut-on parler latin dans l'hémicycle ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Ce n'est pas interdit par la loi !
Mme Joëlle Dusseau.
M. Toubon ne serait pas d'accord. C'est une langue étrangère !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Et l'ordonnance de Villers-Cotterêts ?
M. le président.
Revenons-en à l'amendement, s'il vous plaît !
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Vous ne serez pas étonnée que la commission des
affaires sociales soit défavorable à votre proposition, madame Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Je suis plus qu'étonnée, surtout vous connaissant !
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
La femme a le droit de lever le secret quand elle
le veut. Il en a été décidé ainsi.
Mme Joëlle Dusseau.
Mais elle n'a pas le droit de donner des renseignements identifiants dès la
naissance de l'enfant.
M. le président.
M. le rapporteur pour avis a seul la parole.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Elle a le droit de le faire par la suite.
Vous nous remettez le couvert, si j'ose m'exprimer ainsi, en proposant
d'instaurer une instance de médiation pour l'accès aux informations. Or ce
n'est pas possible.
Aussi l'avis de la commission des affaires sociales est-il deux fois
défavorable. Je n'entrerai pas dans une casuistique en ce qui concerne
l'anonymat et le secret, car cela retiendrait trop longtemps l'attention de nos
collègues.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 52.
Mme Monique ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
la parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Nous sommes évidemment tout à fait favorables à l'amendement de Mme Dusseau,
car on peut se demander qui l'on protège véritablement par ce texte : les
intérêts d'enfants adoptés qui veulent essentiellement savoir un jour pourquoi
ils ont été abandonnés, car tel est leur traumatisme fondamental, ou l'homme
qui, lui aussi, a abandonné l'enfant ?
Je me demande si ce n'est pas celui-ci que l'on protège fondamentalement en
imposant cet anonymat, plus que la mère.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Je vais m'abstenir car je crois qu'il y a une contradiction entre le fait de
dire que l'on peut demander le secret et laisser des renseignements
identifiants, étant entendu que les renseignements identifiants ne peuvent être
communiqués que si on a levé le secret. Dans la mesure où la mère a la
possibilité de lever ce secret, en même temps elle donne des renseignements
identifiants.
En outre, je ne suis pas favorable à l'intervention d'un médiateur ; les
services des DDASS sont tout a fait capables de conserver les renseignements
laissés par la mère.
Certes, les enfants doivent pouvoir consulter les renseignements qui existent,
mais il ne faut pas jouer avec les mots ; il y a vraiment contradiction entre
le secret et les renseignements laissés car si la mère ne lève pas le secret,
tout cela ne sert à rien.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 28 A
M. le président.
« Art. 28 A. - Après le deuxième alinéa de l'article 47 du code de la famille
et de l'aide sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sur leur demande ou avec leur accord, les femmes mentionnées au premier
alinéa bénéficient d'un accompagnement psychologique et social de la part du
service de l'aide sociale à l'enfance. »
Par amendement n° 41, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, les membres du groupe socialiste proposent de
rédiger comme suit cet article :
« L'article 47 du code de la famille et de l'aide sociale est ainsi rédigé
:
« Toute femme admise dans un établissement de santé public ou privé en vue
d'un accouchement peut demander que le secret de son identité soit préservé.
« Les services de l'aide sociale sont immédiatement informés de cette
admission. Une personne qualifiée de ce service informe la mère ou la future
mère des règles relatives à la préservation de son identité et aux possibilités
de transmission de celle-ci dans les conditions définies dans le chapitre III
(nouveau) du livre VIII du code civil.
« Elle recueille également tous les éléments identifiants ou non qu'elle
désire transmettre à l'enfant. Elle informe la mère de la possibilité de
bénéficier d'un accompagnement psychologique dispensé par un psychologue ou
psychiatre agréé dans des conditions définies par décret.
« Les frais d'hébergement et d'accouchement des femmes visées au premier
alinéa de cet article sont pris en charge par le service d'aide sociale à
l'enfance.
« Lorsque le nom du père ou de la mère de l'enfant figure dans l'acte de
naissance établi dans le délai prévu par les articles 55 et suivants du code
civil, la prise en charge des frais d'hébergement et d'accouchement par le
service n'est pas de droit. »
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
On va certainement nous opposer les mêmes arguments pour refuser cet
amendement.
Pourtant, la préoccupation qu'il exprime semble partagée. M. le rapporteur
pour avis de la commission des lois dit que ce qui est vraiment important c'est
l'enfant, et M. le rapporteur de la commission des affaires sociales souhaite
que l'enfant soit dans une situation aussi claire que possible. Mais personne
ensuite ne veut que le fameux secret ou l'anonymat puisse être levé et que
l'accès aux renseignements identifiants ne soit possible.
Cet amendement vise donc, à sa façon, à faire en sorte, en cohérence avec
l'amendement portant création du conseil pour la recherche des origines
familiales, que l'on ait des arguments pour pouvoir saisir ce conseil.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission des affaires sociales ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
La commission des affaires sociales est défavorable
à cet amendement. En effet, il est fait référence à des conditions définies
dans le chapitre III du livre VIII du code civil. Or ce chapitre consacre la
création d'un conseil pour la recherche des origines en matière familiale, que
la Haute Assemblée n'a pas acceptée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour
les mêmes raisons que celles qu'a évoquées M. le rapporteur pour avis.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 41.
M. Franck Sérusclat.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
L'explication que vient de donner M. le rapporteur pour avis confirme cette
position particulièrement ambiguë qui consiste à vouloir et à ne pas vouloir.
Il faut pourtant bien trouver une solution.
Notre collègue Mme Borvo pense que les services sociaux peuvent assurer cette
responsabilité ; nous croyons, nous, qu'il faut confier cette mission à un
médiateur car les services sociaux, de par leurs habitudes et leurs pratiques,
ne peuvent pas, comme cela, se transformer en instances de médiation.
M. Neuwirth vient de nous dire que le médiateur n'avait pas été retenu au
cours des débats. Pourtant, il en faudra un.
La situation est donc toujours aussi ambiguë et je ne vois pas quelle est la
solution que vous voulez retenir si ce n'est tout laisser en l'état. Comme l'a
dit Mme ben Guiga, on ne sait pas très bien qui vous voulez protéger : sûrement
pas l'enfant.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 28 A.
(L'article 28 A est adopté.)
Article 28
M. le président.
« Art. 28. - I. - L'article 60 du code de la famille et de l'aide sociale est
ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : " ; le mineur capable
de discernement est, en outre, entendu par le tuteur, ou son représentant, et
par le conseil de famille ou l'un de ses membres désigné par lui à cet
effet" ;
« 1°
bis
Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé
:
« Lorsque le mineur se trouve dans une situation de danger manifeste, le
tuteur, ou son représentant, prend toutes les mesures d'urgence que l'intérêt
de celui-ci exige. » ;
« 2° Le huitième alinéa est ainsi rédigé :
« Le conseil de famille est renouvelé par moitié. Le mandat de ses membres est
de six ans. Il est renouvelable une fois. Ses membres assurant la
représentation d'associations peuvent se faire remplacer par leur suppléant.
»
« II. - A titre transitoire, le mandat des membres du conseil de famille
mentionné au 2° du I, nommés en totalité pour la première fois après la date
d'entrée en vigueur de la présente loi, est pour la moitié de ceux-ci de trois
ans, et pour l'autre moitié de six ans. Les conditions d'application de cette
disposition sont fixées par le décret en Conseil d'Etat mentionné au dernier
alinéa du même article. »
Par amendement n° 14, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le deuxième alinéa (1°) du paragraphe I de cet article,
de remplacer les mots : « le mineur capable de discernement », par les mots : «
le mineur âgé de plus de treize ans ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Il s'agit de déterminer un âge objectif.
Il a paru cohérent à la commission des affaires sociales de fixer cet âge par
analogie à celui qu'a déjà retenu le Sénat s'agissant du consentement à
l'adoption, conformément à l'article 360 du code civil.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est favorable à l'amendement.
J'en profite pour dire, monsieur le président, que tous les amendements de la
commission des affaires sociales ont fait l'objet d'un avis favorable de la
commission des lois.
M. Pierre Fauchon.
Après un examen très attentif !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Ainsi que je l'ai dit, le Gouvernement préférerait le
critère de l'aptitude au discernement. Cela étant, il s'en remet à la sagesse
du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Franck Sérusclat.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
A quel âge un enfant atteint-il sa capacité d'appréciation ?
On ne le sait pas. Sept ans, disait-on, est l'âge de raison. Aujourd'hui,
certains enfants ont une capacité d'éveil plus précoce, beaucoup plus tôt
souvent même que les adultes, notamment si l'on retient comme critère du
discernement la faculté à maîtriser les nouvelles techniques d'information et
de communication, l'ordinateur, etc.
Nos collègues de l'Assemblée nationale ont certainement tenu compte de cette
donnée. Fixer le discernement à un âge bien précis aujourd'hui comporte
vraisemblablement un risque d'erreur ; on ne peut pas le fixer de façon aussi
nette à sept ans, à treize ans ou à dix-huit ans.
Nous sommes donc défavorables à cet amendement, considérant qu'il est
préférable de s'en tenir à la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 28, ainsi modifié.
(L'article 28 est adopté.)
Article 29
M. le président.
« Art. 29. - L'article 61 du code de la famille et de l'aide sociale est ainsi
modifié :
« 1° Aux 1°, 2° et 4°, les mots : "trois mois" sont remplacés par
les mots : "deux mois" ;
« 2° Au 3°, les mots : "d'un an" sont remplacés par les mots :
"de six mois" ;
« 3° Au 5°, les mots : "ont été déclarés déchus de l'autorité
parentale" sont remplacés par les mots : "ont fait l'objet d'un
retrait total de l'autorité parentale" ;
« 4° Au huitième alinéa, les mots : "une déchéance d'autorité
parentale" sont remplacés par les mots : "un retrait total de
l'autorité parentale" ;
« 5° Aux 4°, 5° et 6°, les mots : "confiés au" sont remplacés par
les mots : "recueillis par le". »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 53, Mme Dusseau propose de supprimer cet article.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 15 est présenté par M. Neuwirth, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 42 est déposé par M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga,
MM. Dreyfus-Schmidt, Mazars et les membres du groupe socialiste.
Tous deux tendent à supprimer le deuxième alinéa (1°) de l'article 29.
Par amendement n° 43, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt, Mazars et les membres du groupe socialiste proposent de
supprimer le troisième alinéa (2°) de l'article 29.
La parole est à Mme Dusseau, pour défendre l'amendement n° 53.
Mme Joëlle Dusseau.
Mon amendement étant mal rédigé - je souhaitais non pas supprimer l'article
29, mais le deuxième alinéa (1°) de cet article, par coordination avec le délai
de rétractation de trois mois - je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 53 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n°
15.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Dans la mesure où la commission des lois a choisi
de maintenir le délai de rétractation adopté par le Sénat en première lecture,
à savoir trois mois, pour la personne qui remet l'enfant aux services de l'aide
sociale à l'enfance, nous proposons, par coordination, de maintenir ce
délai.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat, pour défendre l'amendement n° 42.
M. Franck Sérusclat.
Compte tenu des informations apportées par M. le rapporteur pour avis, je
retire cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 42 est retiré.
La parole est à Mme ben Guiga, pour présenter l'amendement n° 43.
Mme Monique ben Guiga.
Le délai pour retrouver l'autre parent avait été fixé à un an, ce qui est bien
puisqu'il faut un délai suffisant pour entreprendre cette démarche. Le délai de
six mois, adopté par le Sénat en première lecture, nous paraît donc trop
bref.
Les services sociaux sont tellement surchargés de travail que, s'ils ne
disposent pas d'un temps suffisant, ils n'auront pas la possibilité de
retrouver l'autre parent.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission des affaires sociales sur l'amendement n° 43
?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 15 et 43 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 15
pour les motifs déjà évoqués tout à l'heure à propos de l'article 4, puisque
nous voudrions ramener le délai de rétractation à deux mois.
S'agissant de l'amendement n° 43, le délai de six mois nous semble suffisant
pour effectuer les recherches nécessaires. Le Gouvernement est donc défavorable
à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 43, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 30
M. le président.
« Art. 30. - L'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale est ainsi
modifié :
« 1° Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Lorsqu'un enfant est recueilli par le service de l'aide sociale à l'enfance
dans les cas mentionnés aux 1°, 2°, 3° et 4° de l'article 61, un procès-verbal
est établi.
« Il doit être mentionné au procès-verbal que les père ou mère ou la personne
qui a remis l'enfant ont été informés : » ;
« 2° Dans le 2°, les mots : ", et notamment des dispositions de l'article
63 ci-après relatives à leur adoption" sont supprimés ;
« 3° Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Sauf dans le cas mentionné au 4° de l'article 61, de la possibilité,
lorsque l'enfant est âgé de moins d'un an, de demander le secret de leur
identité ainsi que de donner des renseignements ne portant pas atteinte à ce
secret. Ces renseignements sont recueillis dans des conditions précisées par
décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de
l'informatique et des libertés. » ;
« 4° Après le sixième alinéa (4°), il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il y a demande de secret conformément au 4° ci-dessus, celle-ci doit
être formulée expressément et mentionnée au procès-verbal. Le procès-verbal
doit également mentionner que le demandeur a été informé de la possibilité de
faire connaître ultérieurement son identité, qui ne pourra être communiquée
qu'à l'enfant majeur et sur demande expresse de ce dernier. » ;
« 5° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "trois mois" sont
remplacés par les mots : "deux mois" et les mots : "un an"
sont remplacés par les mots : "six mois". »
Par amendement n° 44, MM. Mazars et Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga,
M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste proposent :
I. - Dans le texte présenté par le 3° de l'article 30 pour le 4° de l'article
62 du code de la famille et de l'aide sociale, de remplacer les mots : « des
renseignements ne portant pas atteinte à ce secret » par les mots : « tous
renseignements ou documents complémentaires ».
II. - Dans le texte présenté par le 4° de cet article, pour insérer un alinéa
après le sixième alinéa (4°) de l'article 62 du code de la famille et de l'aide
sociale, après les mots : « ultérieurement son identité », d'insérer les mots :
« ou de lever le secret sur celle-ci ».
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Cet amendement visait à compléter des dispositions qui n'ont pas été retenues,
il n'a donc plus d'objet.
Il tendait essentiellement à ne pas limiter les renseignements fournis par les
parents aux seuls renseignements non identifiants et à les étendre
éventuellement à l'histoire et aux raisons de cette situation.
Il visait également à lever le malentendu entre le secret et l'anonymat.
M. le président.
L'amendement n° 44 n'a plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
L'amendement n° 16, présenté par M. Neuwirth, au nom de la commission des
affaires sociales, tend à rédiger comme suit la seconde phrase du texte
présenté par le 4° de l'article 30 pour être inséré après le sixième alinéa
(4°) de l'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale : « Le
procès-verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé qu'il
pourra faire connaître ultérieurement son identité et que le représentant légal
de l'enfant sera informé de la levée du secret de cette identité qui ne sera
communiqué sur demande expresse qu'à l'enfant majeur, ou à ses ayants droit
majeurs s'il est décédé. »
L'amendement n° 12, déposé par M. Dejoie au nom de la commission des lois,
vise à rédiger comme suit la seconde phrase du neuvième alinéa de l'article 30
: « Le procès verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé
qu'il pourrait faire connaître ultérieurement son identité et que le
représentant légal de l'enfant sera informé de la levée du secret de cette
identité qui ne sera communiquée qu'à l'enfant majeur et sur demande expresse
de ce dernier. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n°
16.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Cet amendement vise à permettre aux ayants droit du
pupille de l'Etat, si celui-ci est décédé, d'avoir connaissance de l'identité
de la ou des personnes qui l'ont remis au service d'aide sociale, si toutefois
ils en font la demande expresse.
Cette disposition sera conforme à une jurisprudence de la commission d'accès
aux documents administratifs en date du 4 janvier 1996. La CADA a estimé que
les enfants majeurs de pupilles de l'Etat décédés, ainsi que leurs descendants
en ligne directe pouvaient également avoir communication de documents à
caractère nominatif.
Vous savez qu'il est actuellement procédé à de nombreuses recherches
généalogiques. En outre, il peut être important d'avoir accès à certains
renseignements médicaux sur ses ascendants.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur
l'amendement n° 16 et défendre l'amendement n° 12.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est favorable à l'amendement n° 16. Par voie de
conséquence, je retire l'amendement n° 12.
M. le président.
L'amendement n° 12 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 16 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à informer le représentant légal
de l'enfant que ses parents biologiques ou l'un des deux ont levé le secret de
leur identité.
Une telle disposition peut en effet paraître utile afin que les parents
adoptifs en soient prévenus pour se préparer psychologiquement et, surtout,
pour préparer psychologiquement l'enfant à cet élément très important de son
histoire personnelle.
Elle peut cependant présenter un risque de perturbation de la vie familiale en
rendant les parents adoptants détenteurs d'une information essentielle que
certains d'entre eux n'auraient peut-être pas souhaité connaître et qu'ils
devront gérer jusqu'à la majorité de l'enfant.
En effet, deux situations sont alors possibles.
Des parents peuvent considérer que l'enfant est en état de recevoir cette
information, et ils la lui communiquent. Tous les enfants ne sont sans doute
pas dans un état psychologique tel qu'ils puissent attendre d'être majeurs pour
accéder à leur dossier. Une telle information peut donc être la cause d'une
grave déstabilisation psychologique.
A l'inverse, si les parents considèrent que l'enfant n'est pas en état
d'intégrer cette information et ne la portent pas à sa connaissance, les
risques de blessure psychologique de l'enfant seront grands lorsqu'il
découvrira que ses parents adoptants en avaient été informés.
Il n'est pas certain, au surplus, que les parents adoptants soient désireux
d'avoir connaissance de la levée du secret.
Or, en pareille matière, il faut peut-être prendre également en compte ceux
qui trouveraient qu'il s'agit de quelque chose de trop lourd à porter.
Mais il est vrai, monsieur le rapporteur, que, sur ce sujet, comme je l'ai dit
à l'issue de la discussion générale, la vérité est complexe et plurielle.
Sur ce point précis, le Gouvernement s'en remettra donc à la sagesse de la
Haute Assemblée.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
M. Franck Sérusclat.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Cet amendement nous paraît aller dans le bon sens. Cependant je m'interroge
sur l'expression : « sur demande expresse ». Qui peut formuler cette demande
?
Une fois le secret levé, le représentant légal de l'enfant en sera informé, et
cette identité sera communiquée « sur demande expresse ». Cette demande
expresse émanerat-elle de l'enfant majeur ou de la personne qui a levé le
secret ?
Par ailleurs, je regrette que l'on n'ouvre cette possibilité pour l'enfant
qu'à sa majorité.
M. le secrétaire d'Etat a fait état d'une situation effectivement difficile :
les parents adoptants peuvent être dans le secret de l'origine et ne pas
pouvoir en parler à l'enfant qui le leur demande. Or, ce n'est pas forcément à
la majorité que l'enfant cherche à connaître son origine. C'est plutôt vers
l'âge de dix, douze ans, quand il est capable de faire preuve de discernement,
c'est-à-dire de s'apercevoir qu'il n'a pas une famille biologique en raison de
ses caractéristiques physiques, par exemple.
Je partage donc le souci du Gouvernement quant à cette connaissance par les
parents adoptants, mais pour des raisons diamétralement opposées.
M. le secrétaire d'Etat craint une gêne pour la famille adoptante. Certes, la
famille adoptante peut éprouver une gêne. Mais, pour moi, l'enfant qu'elle a
adopté a, lui aussi, son identité.
Nous sommes en contradiction, comme en témoignent nos propos. Nous voulons
tous que l'enfant soit heureux, se développe bien, mais, pour certains, si la
famille adoptante était ennuyée, ce serait gênant.
Malgré ces réserves, nous voterons l'amendement n° 16.
M. le président.
Monsieur le rapporteur pour avis, ne vaudrait-il pas mieux préciser : sur «
leur » demande expresse.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je pense, monsieur le président, que votre
proposition est bonne. Cela dit, je suis réticent sur l'expression : « sur
demande expresse de l'enfant majeur », car la loi prévoit que l'enfant majeur
peut avoir connaissance de cette information.
Mme Monique ben Guiga.
Pourquoi ne pas dire : sur « sa » demande expresse.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, il me semble que l'expression « sur leur demande
expresse » exclut toute ambiguïté, même si elle est redondante.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Monsieur le président, je n'y comprends plus rien !
L'identité ne sera communiquée sur demande expresse qu'à l'enfant majeur,
c'est-à-dire à sa demande.
M. le président.
Laissons à la commission mixte paritaire le soin de régler ce problème.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Je vais voter cet amendement bien que sa rédaction ne me paraisse pas d'une
clarté extrême.
Je me dois d'ajouter que « le demandeur », en fait, c'est la mère !... La mère
a été informée qu'elle pourra faire connaître ultérieurement son identité !
Je pose à nouveau ma question en toute innocence : au nom de quoi dites-vous
que la mère qui vient d'accoucher - c'est-à-dire « le demandeur » selon vos
propres termes - pourra plus tard faire connaître son identité, qui ne sera
communiquée à son enfant que lorsqu'il sera majeur ?
M. Pierre Fauchon.
Il manque trois virgules !
Mme Joëlle Dusseau.
Attention aux virgules ! Vous savez qu'elles ont été apportées par l'Assemblée
nationale dans un drôle de sens. Ce n'est donc peut-être pas un mot à employer
ici, monsieur Fauchon !
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Monsieur le président, je vous propose une
rédaction qui me paraît plus simple, à savoir : « la levée du secret de cette
identité, qui ne sera communiquée qu'à l'enfant majeur, ou à ses ayants droit
majeurs s'il est décédé, sur leur demande expresse ».
Mme Joëlle Dusseau.
Le demandeur, c'est la mère, nous sommes bien d'accord ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Oui.
Mme Joëlle Dusseau.
Pauvre mère !
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Neuwirth,
au nom de la commission des affaires sociales, et tendant à rédiger comme suit
la seconde phrase du texte proposé par le 4° de cet article pour être inséré
après le sixième alinéa (4°) de l'article 62 du code de la famille et de l'aide
sociale :
« Le procès-verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé
qu'il pourra faire connaître ultérieurement son identité et que le représentant
légal de l'enfant sera informé de la levée du secret de cette identité qui ne
sera communiquée qu'à l'enfant majeur, ou à ses ayants droit majeurs s'il est
décédé, sur leur demande expresse. »
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié, accepté par la commission et
pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 45, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, et les membres du groupe socialiste proposent de
supprimer le dernier alinéa (5°) de cet article.
Par amendement n° 17, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa (5°) de ce même
article :
« 5° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "un an" sont remplacés
par les mots : "six mois". »
Monsieur Sérusclat, cet amendement n'a plus d'objet.
M. Franck Sérusclat.
En effet.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n°
17.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 30, modifié.
(L'article 30 est adopté.)
Articles 30
bis
et 30
ter
M. le président.
Les articles 30
bis
et 30
ter
ont été supprimés par l'Assemblée
nationale.
Article 31
M. le président.
« Art. 31. - Il est inséré, après l'article 62 du code de la famille et de
l'aide sociale, un article 62-1 ainsi rédigé :
«
Art. 62-1
. - Les renseignements mentionnés au 4° de l'article 62 sont
conservés sous la responsabilité du président du conseil général qui les tient
à la disposition de l'enfant ou, s'il est mineur, de son représentant légal.
« Toutefois, pendant sa minorité, l'enfant peut, après accord de son
représentant légal, en obtenir communication avec l'assistance d'une personne
habilitée à cet effet par le président du conseil général.
« Les renseignements à caractère médical ne peuvent être communiqués à
l'enfant ou, s'il est mineur, à son représentant légal, que par l'intermédiaire
d'un médecin désigné par l'intéressé à cet effet. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 46, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, les membres du groupe socialiste proposent de
supprimer cet article.
Par amendement n° 18, M. Neuwirth au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit l'article 31 :
« Il est inséré, après l'article 62 du code de la famille et de l'aide
sociale, un article 62-1 ainsi rédigé :
«
Art. 62-1. -
Les renseignements mentionnés au 4° de l'article 62 sont
conservés sous la responsabilité du président du conseil général qui les tient
à la disposition de l'enfant majeur, de son représentant légal, s'il est mineur
ou de ses ayants droit, s'il est décédé.
« Toutefois, le mineur âgé de plus de treize ans peut, après accord de son
représentant légal, en obtenir communication avec l'assistance d'une personne
habilitée à cet effet par le président du conseil général.
« Les renseignements à caractère médical ne peuvent être communiqués à
l'enfant majeur, à son représentant légal, s'il est mineur ou à ses ayants
droit majeurs, s'il est décédé, que par l'intermédiaire d'un médecin désigné
par l'intéressé à cet effet.
« Si la ou les personnes qui ont demandé le secret de leur identité lèvent
celui-ci, ladite identité est conservée sous la responsabilité du président du
Conseil général ».
Par amendement n° 13, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit le début du deuxième alinéa du texte présenté par l'article
31 pour l'article 62-1 du code de la famille et de l'aide sociale :
« Toutefois, le mineur âgé de plus de treize ans peut,... ».
Monsieur Sérusclat, l'amendement n° 46 n'a plus d'objet.
M. Franck Sérusclat.
C'est exact.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n°
18.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Cet amendement a pour objet de rétablir, en partie,
la rédaction qui a été adoptée par le Sénat en première lecture, la commission
des affaires sociales estimant que la précision concernant l'enfant majeur
n'était pas inutile. Elle rend en effet la rédaction plus claire.
Il est ensuite apparu plus logique de ne permettre au mineur, même muni de
l'autorisation de son représentant légal, d'avoir accès aux renseignements
mentionnés à l'article précédent que lorsqu'il est âgé de plus de treize
ans.
De plus, cet amendement apporte une innovation par rapport à la première
lecture dans la mesure où il tient compte de la jurisprudence récente de la
commission d'accès aux documents administratifs.
Cet amendement a également pour objet de prendre en compte l'apport de
l'Assemblée nationale, à savoir la possibilité pour les personnes ayant demandé
le secret de leur identité de lever ultérieurement celui-ci.
Il faut donc prévoir les conditions de conservation de l'identité qui sera
éventuellement dévoilée plus tard. C'est ainsi que l'amendement précise que
ladite identité est conservée sous la responsabilité du président du conseil
général, eu égard à l'importance de ce renseignement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 13 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 18.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Etant satisfait par l'amendement n° 18, l'amendement n° 13
n'a plus d'objet et j'émets un avis favorable sur l'amendement n° 18.
M. le président.
L'amendement n° 13 n'a plus d'objet.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 18 ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 31 est ainsi rédigé.
Article 32
M. le président.
« Art. 32. - L'article 63 du code de la famille et de l'aide sociale est ainsi
rédigé :
«
Art. 63
. - Les pupilles de l'Etat peuvent être adoptés soit par les
personnes à qui le service de l'aide sociale à l'enfance les a confiés pour en
assurer la garde lorsque les liens affectifs qui se sont établis entre eux
justifient cette mesure, soit par des personnes agréées à cet effet, soit, si
tel est l'intérêt desdits pupilles, par des personnes dont l'aptitude à les
accueillir a été régulièrement constatée dans un Etat autre que la France, en
cas d'accord international engageant à cette fin celle-ci et ledit Etat.
« L'agrément est accordé, pour cinq ans, dans un délai de neuf mois à compter
du jour de la demande par le président du conseil général, après avis d'une
commission. Celle-ci comprend, notamment, deux membres d'un conseil de famille
des pupilles de l'Etat du département, l'un assurant la représentation de
l'union départementale des associations familiales et l'autre, celle de
l'association départementale d'entraide entre les pupilles et anciens pupilles
de l'Etat. Les membres de cette commission assurant la représentation desdites
associations peuvent se faire remplacer par leur suppléant.
« Les personnes qui demandent l'agrément bénéficient des dispositions de
l'article 55-1.
« Elles peuvent demander que tout ou partie des investigations effectuées pour
l'instruction du dossier soient accomplies une seconde fois et par d'autres
personnes que celles auxquelles elles avaient été confiées initialement. Elles
sont informées du déroulement de ladite instruction et peuvent prendre
connaissance de tout document figurant dans leur dossier dans les conditions
fixées aux articles 3, 4 et 6
bis
de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978
portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et
le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal.
« Tout refus ou retrait d'agrément doit être motivé.
« Après un refus ou un retrait d'agrément, le délai à partir duquel une
nouvelle demande peut être déposée est de trente mois.
« Lorsque les personnes agréées changent de département, leur agrément demeure
valable sous réserve d'une déclaration préalable adressée au président du
conseil général de leur nouveau département de résidence. Lorsque des personnes
à qui un refus ou un retrait d'agrément a été notifié changent de département
de résidence, ce refus ou retrait leur demeure opposable.
« Les décisions relatives à l'agrément mentionné au deuxième alinéa sont
transmises sans délai par le président du conseil général au ministre chargé de
la famille.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en
Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 19, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après le deuxième alinéa du texte présenté par cet
article pour l'article 63 du code de la famille et de l'aide sociale, un alinéa
ainsi rédigé :
« A défaut d'une notification de décision dans le délai mentionné au deuxième
alinéa, l'agrément est réputé acquis. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
J'avais dit tout à l'heure à Mme Dusseau :
perseverare diabolicum.
Je ne persévérerai pas. Compte tenu des
engagements pris par M. le secrétaire d'Etat et de l'argument relatif aux
conventions internationales, je retire cet amendement.
Il est vrai, en effet, que des pays étrangers pourraient s'inquiéter
d'apprendre qu'un agrément est réputé acquis sans peut-être qu'il ait donné
lieu aux enquêtes sociale, médicale et autres qui sont menées lors de la
procédure en vue de l'obtention d'un agrément.
M. le président.
L'amendement n° 19 est retiré.
Par amendement n° 47, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM.
Dreyfus-Schmidt et Mazars, et les membres du groupe socialiste proposent, après
le sixième alinéa du texte présenté par l'article 32 pour l'article 63 du code
de la famille et de l'aide sociale, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les décisions d'agrément sont transmises au conseil pour la recherche des
origines familiales. »
Monsieur Sérusclat, cet amendement n'a plus d'objet.
M. Franck Sérusclat.
En effet.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 32.
(L'article 32 est adopté.)
Article 33
M. le président.
« Art. 33. - Après l'article 63 du code de la famille et de l'aide sociale, il
est inséré un article 63-1 ainsi rédigé :
«
Art. 63-1.
Les enfants admis en qualité de pupilles de l'Etat en
application de l'article 61 doivent faire l'objet d'un projet d'adoption dans
les meilleurs délais. Lorsque le tuteur considère que l'adoption n'est pas
adaptée à la situation de l'enfant, il doit indiquer ses motifs au conseil de
famille. La validité de ces motifs doit être confirmée à l'occasion de l'examen
annuel de la situation de l'enfant.
« La définition du projet d'adoption, simple ou plénière suivant les
circonstances particulières à la situation de l'enfant, ainsi que le choix des
adoptants éventuels sont assurés par le tuteur, avec l'accord du conseil de
famille ; le mineur capable de discernement est préalablement entendu par le
tuteur ou son représentant et par le conseil de famille ou l'un de ses membres
désigné par lui à cet effet.
« Les dossiers des enfants pour lesquels aucun projet d'adoption n'est formé
plus de six mois après leur admission en qualité de pupilles de l'Etat sont,
sous forme non nominative, communiqués au ministre chargé de la famille par le
tuteur qui indique les raisons de cette situation. »
Je suis saisi de trois amendements présentés par M. Neuwirth, au nom de la
commission des affaires sociales.
L'amendement n° 21 rectifié tend à rédiger comme suit la dernière phrase du
premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 63-1 à insérer
dans le code de la famille et de l'aide sociale :
« Le conseil de famille, sur le rapport du service de l'aide sociale à
l'enfance, s'assure de la validité de ces motifs qui doit être confirmée à
l'occasion de l'examen annuel de la situation de l'enfant. »
L'amendement n° 22 vise, dans le deuxième alinéa du texte présenté par
l'article 33 pour l'article 63-1 à insérer dans le code de la famille et de
l'aide sociale, à remplacer les mots : « le mineur capable de discernement »
par les mots : « le mineur âgé de plus de treize ans ».
L'amendement n° 23 a pour objet, dans le dernier aliéna du texte proposé par
l'article 33 pour l'article 63-1 à insérer dans le code de la famille et de
l'aide sociale, après le mot : « communiqués », d'insérer le mot : «
obligatoirement ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre ces trois
amendements.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
L'amendement n° 21 rectifié a pour objet de
permettre au conseil de famille de contrôler réellement, grâce à un rapport du
service de l'aide sociale à l'enfance, les raisons invoquées par
l'établissement d'accueil pour déclarer l'enfant inadoptable.
C'est la suite logique de l'exposé général que j'ai fait tout à l'heure : on
ne peut pas accepter que deux tiers des enfants ne soient pas adoptés dans des
établissements qui sont, disons-le, honnêtement rétribués - chacun d'entre vous
connaît les prix de journée. Lorsque l'enfant est déclaré inadoptable, il faut
donc qu'il y ait un contrôle réel du conseil de famille grâce à un rapport du
service de l'aide sociale à l'enfance pour que les raisons invoquées par les
établissements d'accueil soient tout de même contrôlées.
L'amendement n° 22 est un amendement de coordination relatif aux mineurs âgés
de plus de treize ans.
L'amendement n° 23 est un amendement important, auquel personnellement je
tiens : il a pour objet d'insérer le mot « obligatoirement » et donc d'insister
sur le caractère obligatoire de la communication des dossiers des pupilles de
l'Etat pour lesquels aucun projet d'adoption n'a été formé plus de six mois
après leur admission.
Cette disposition est, là encore, dans la logique de ce que j'ai indiqué tout
à l'heure à la tribune.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est favorable aux amendements n°s 21
rectifié et 23, et s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 22.
M. le président.
Avant de mettre aux voix ces amendements, permettez-moi de faire une
observation : peut-il y avoir, dans la loi, des dispositions qui ne soient pas
obligatoires ?
(Sourires.)
M. Emmanuel Hamel.
Pourquoi pas ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
C'est une bonne observation, monsieur le président.
Il est vrai que cela va sans dire, mais que cela va encore mieux en le disant
!
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié, accepté par la commission et par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 33, modifié.
(L'article 33 est adopté.)
Article 34
M. le président.
« Art. 34. - Après l'article 63-1 du code de la famille et de l'aide sociale,
il est inséré un article 63-2 ainsi rédigé :
«
Art. 63-2. -
Toute personne membre de la commission mentionnée au
deuxième alinéa de l'article 63 a droit à des autorisations d'absence de la
part de son employeur pour participer aux réunions de cette instance.
« Si la personne mentionnée au premier alinéa est fonctionnaire ou assimilée,
ce droit s'exerce conformément aux dispositions prévues à l'article 52
bis
de la loi n° du relative à l'adoption. Toutefois, s'agissant de la
fonction publique de l'Etat, les modalités d'exercice de ce droit sont
déterminées par voie réglementaire.
« Si la personne mentionnée au premier alinéa est salariée, ces autorisations
ne peuvent être refusées que dans les conditions prévues aux deuxième et
troisième alinéas de l'article 16. En outre, si elle assure la présentation
d'une association affiliée à l'une des unions mentionnées à l'article 3, son
employeur bénéficie des dispositions prévues au dernier alinéa de l'article 16.
Si elle représente l'association mentionnée au premier alinéa de l'article 65,
le conseil général rembourse à l'employeur le maintien de son salaire. »
Par amendement n° 24, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans la dernière phrase du dernier alinéa du texte présenté
par cet article pour l'article 63-2 à insérer dans le code de la famille et de
l'aide sociale, de remplacer les mots : « le conseil général » par les mots : «
cette dernière ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Cet amendement de principe avait déjà été adopté en
première lecture. Il s'agit de ne pas charger indûment les conseils généraux
sans que leurs représentants aient été consultés.
Selon la commission des affaires sociales, le conseil général n'a pas à
financer le remboursement du salaire des personnes membres de commissions
d'agrément au titre des associations non membres de l'UNAF, dans la mesure où
ces associations bénéficient déjà de subventions de l'Etat, des départements et
des communes.
De plus, ces associations sont d'autant plus à même d'en supporter la charge
qu'elles n'ont qu'un seul représentant au sein d'une commission d'agrément et
qu'elles sont subventionnées par ailleurs.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Sagesse.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 34, ainsi modifié.
(L'article 34 est adopté.)
Article 35
M. le président.
« Art. 35. - Après l'article 63-2 du code de la famille et de l'aide sociale,
il est inséré un article 63-3 ainsi rédigé :
«
Art. 63-3. -
Le département accorde une aide financière sous
condition de ressources aux personnes adoptant un enfant dont le service de
l'aide sociale à l'enfance leur avait confié la garde. »
Par amendement n° 25, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Votre commission des affaires sociales remarque que
ces cas d'adoption sont peu nombreux et que, souvent, le président du conseil
général accorde une aide transitoire. Cela m'est arrivé, et d'autres présidents
de conseil général ont dû le faire également.
Il paraît donc inopportun à la commission des affaires sociales d'en passer
par la loi et, surtout, de faire de cette aide une prestation générale sans
limitation de durée et selon un critère aussi peu précis que celui de «
ressources suffisantes ».
Par ailleurs, les départements n'ont pas été consultés sur cette création et
leur situation financière est déjà suffisamment difficile pour ne pas leur
infliger de nouvelles charges qui sont totalement incontrôlées compte tenu du
manque de précision tant en matière de durée de versement de cette prestation
générale que du critère retenu, tel que celui de « ressources suffisantes ».
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25.
Mme Monique ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Nous ne voterons pas cet amendement et nous regrettons la suppression d'une
disposition qui ouvrait la possibilité d'adopter à des familles à revenus
modestes.
Finalement, quand on examine l'ensemble de ce texte, on s'aperçoit que faculté
est donnée aux personnes qui ont des moyens, qui appartiennent à des classes
sociales aisées, de pays riches, d'adopter des enfants défavorisés, souvent de
pays pauvres.
Cette disposition permettait au moins de rendre l'adoption possible à des
familles modestes qui accueillent des enfants dans le cadre de l'aide sociale à
l'enfance, qui s'attachent à eux, qui seraient prêtes à les adopter, mais qui
n'ont pas de gros moyens.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Une bonne lecture de cet amendement vous montrerait
qu'il s'agit des assistantes maternelles. Les cas sont donc peu nombreux et, en
général, il y a, là aussi, des aides des conseils généraux.
On ne peut pas s'engager dans une voie qui nous paraît absolument incontrôlée.
Je vous rappelle que vous avez déjà adopté, comme nous, la parité des
prestations sociales en faveur de l'adoption dans les mêmes conditions que pour
les naissances biologiques. On ne peut pas vouloir tout à la fois !
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Je voterai l'amendement de M. Neuwirth car j'avais été assez choquée par cette
disposition accordant une somme spécifique aux assistantes maternelles. Je
trouvais même en effet déplaisant ce qui, pour moi, ressemble à une sorte de
marchandage.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 35 est supprimé.
Articles 35
bis
, 37, 38 et 40
M. le président.
« Art. 35
bis
. - I. - L'article 81 du code de la famille et de l'aide
sociale est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, les mots : "ou de légitimation
adoptive" sont supprimés ;
« 2° Dans le deuxième alinéa, les mots : "directeur départemental de la
population et de l'action sociale et visé par le préfet" sont remplacés
par les mots : "préfet ou son représentant" ;
« 3° Le troisième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, le lieu où est tenu l'état civil d'un pupille de l'Etat, ou d'un
ancien pupille, s'il est né avant la date prévue en vigueur de la loi n° ... du
... relative à l'adoption, est communiqué aux magistrats de l'ordre judiciaire
qui en font la demande à l'occasion d'une procédure pénale. De même, à compter
de la date d'entrée en vigueur de la loi n° ... du ... précitée, le lieu où est
tenue l'identité du ou des parents ou de la personne qui a remis le pupille ou
l'ancien pupille est communiqué aux magistrats de l'ordre judiciaire qui en
font la demande à l'occasion d'une procédure pénale.
« Ces renseignements, quelle que soit la date de naissance du pupille ou de
l'ancien pupille, ne peuvent être révélés au cours de cette procédure ou
mentionnés dans la décision à intervenir ; toutes mesures sont, en outre,
prises pour qu'ils ne puissent être portés, directement ou indirectement, à la
connaissance de l'intéressé ou de toute autre personne non liée, de par ses
fonctions, par le secret professionnel visé aux articles 226-13 et 226-14 du
code pénal. »
« II. - L'article 82 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 82. -
Le contrôle du service de l'aide sociale à l'enfance est
assuré par l'inspection générale des affaires sociales. » -
(Adopté.)
« Art. 37. - L'intitulé de la section 2 du chapitre IV du titre II du code de
la famille et de l'aide sociale est ainsi rédigé : "Organismes autorisés
et habilités pour l'adoption". » -
(Adopté.)
« Art. 38. - L'article 100-1 du code de la famille et de l'aide sociale est
ainsi modifié :
« 1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, l'organisme autorisé dans un département au minimum peut servir
d'intermédiaire pour l'adoption ou le placement en vue d'adoption de mineurs de
quinze ans dans d'autres départements, sous réserve d'adresser préalablement
une déclaration de fonctionnement au président de chaque conseil général
concerné. Le président du conseil général peut à tout moment interdire dans son
département l'activité de l'organisme si celui-ci ne présente pas de garanties
suffisantes pour assurer la protection des enfants, de leurs parents ou des
futurs adoptants. » ;
« 2° et 3° Non modifiés. » -
(Adopté.)
« Art. 40. - Après l'article 100-2 du code de la famille et de l'aide sociale,
il est inséré un article 100-2-1 ainsi rédigé :
«
Art. 100-2-1.
- L'Etat aide à la mise en place d'un réseau structuré
d'organismes autorisés conformément à l'article 100-1.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de cet
article. » -
(Adopté.)
Article 42
M. le président.
Après l'article 100-3 du code de la famille et de l'aide sociale, il est
inséré un article 100-4 ainsi rédigé :
«
Art. 100-4
. - A la demande ou avec l'accord de l'adoptant, le mineur
adopté ou placé en vue d'adoption bénéficie d'un accompagnement par le service
de l'aide sociale à l'enfance ou par l'organisme mentionné à l'article 100-1
pendant une durée de six mois minimum à compter de son arrivée au foyer et dans
tous les cas jusqu'au prononcé de l'adoption plénière en France ou jusqu'à la
transcription du jugement étranger. Cet accompagnement pourra être prolongé à
la demande ou avec l'accord de l'adoptant ou du futur adoptant. »
Par amendement n° 26, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit la dernière phrase du texte présenté
par cet article pour l'article 100-4 à insérer dans le code de la famille et de
l'aide sociale :
« Cet accompagnement peut être prolongé à la demande ou avec l'accord de
l'adoptant. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 42, ainsi modifié.
(L'article 42 est adopté.)
Article 43 A
M. le président.
« Art. 43 A. - La présente loi garantit la parité des droits sociaux attachés
à la naissance et à l'adoption. Elle adapte les conditions d'âge posées pour
l'ouverture des droits à prestations aux circonstances particulières de
l'adoption. » -
(Adopté.)
Article 44
M. le président.
« Art. 44. - I. - Le premier alinéa de l'article L. 532-1 du code de la
sécurité sociale est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, lorsque l'enfant ouvrant droit à ladite allocation est adopté ou
confié en vue d'adoption dans les conditions prévues à l'article L. 535-1,
celle-ci est versée pendant une durée minimale à compter de son arrivée au
foyer, lorsqu'il a un âge supérieur à un âge limite mais inférieur à celui de
la fin de l'obligation scolaire. Cette allocation n'est pas cumulable avec le
complément familial. »
« II. -
Non modifié. »
Par amendement n° 55, Mme Borvo et M. Pagès, les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du texte présenté par
le I de cet article pour compléter l'article L. 532-1 du code de la sécurité
sociale, après les mots : « âge limite », de supprimer les mots : « mais
inférieur à celui de la fin de l'obligation scolaire ».
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Notre assemblée, en première lecture, a fixé comme âge limite pour le
versement de l'allocation parentale d'éducation l'âge de l'obligation scolaire.
Il me paraît un peu mesquin de supprimer ainsi, pour certains parents, la
possibilité de bénéficier de cette allocation, d'autant que cela ne permet que
de réaliser des économies assez dérisoires. Pourquoi priver les rares parents
qui adoptent des enfants de plus de seize ans d'une allocation ?
L'Assemblée nationale n'étant pas revenue sur cette restriction introduite par
le Sénat, nous proposons de la supprimer.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission des affaires sociales ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je comprends bien les motivations générales de Mme
Borvo, mais sa proposition est en contradiction avec la position qui a été
adoptée par le Sénat en première lecture et confirmée par l'Assemblée nationale
en deuxième lecture.
Supprimer la limite d'âge pour le versement de l'allocation parentale
d'éducation, comme le suggère Mme Borvo, reviendrait à faire bénéficier l'un
des parents adoptifs de cette allocation jusqu'à ce que l'enfant adopté
atteigne l'âge de vingt ans. Il ne paraît pas raisonnable qu'un adulte puisse
bénéficier de l'allocation parentale d'éducation pour lui-même. La fin de
l'obligation scolaire nous paraît constituer une limite tout à fait sage.
La commission des affaires sociales est donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 44.
(L'article 44 est adopté.)
Article 47
M. le président.
« Art. 47. - Le titre III du livre V du code de la sécurité sociale est
complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« Chapitre VI
« Prêts aux familles adoptantes
«
Art. L. 536.
- Les régimes de prestations familiales peuvent accorder
aux personnes titulaires de l'agrément mentionné à l'article 100-3 du code de
la famille et de l'aide sociale des prêts destinés à faciliter l'adoption
d'enfants à l'étranger dans des conditions et limites fixées par décret. »
Par amendement n° 58, le Gouvernement propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Cet article tend à permettre au régime de prestations
familiales d'accorder aux candidats à l'adoption des prêts destinés à faciliter
l'adoption d'enfants à l'étranger.
Le Gouvernement a eu l'occasion, tout au long de la discussion, et tout
récemment encore à l'Assemblée nationale, de faire savoir qu'il n'était pas
hostile au principe de tels prêts.
Néanmoins, la rédaction de cet article pourrait donner à penser qu'il s'agit
d'une prestation légale semblable aux prêts en matière de logement, dont le
caractère facultatif renvoie à une notion de condition de ressources, et qui
viendrait s'ajouter aux vingt-sept prestations déjà existantes. Or chacun
convient de la complexité de notre système de prestations familiales, dont la
simplification s'impose. Créer cette prestation au profit d'un petit nombre de
bénéficiaires potentiels ne pourrait qu'ajouter à la complexité.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'attribution de tels prêts sur
les fonds de l'action sanitaire et sociale des caisses d'allocations familiales
; pourrait être modifié en ce sens l'arrêté-programme qui définit les axes
d'intervention possible ; par ma voix, le Gouvernement s'y engage.
J'ajoute que, dans le cadre des conventions d'objectifs qui, à la suite de la
réforme de la protection sociale, vont être passées entre l'Etat et les
différentes caisses de protection sociale, nous pourrons prévoir cette
disposition.
Voilà pourquoi le Gouvernement propose de supprimer l'article 47.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission des affaires sociales ?
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
L'argumentation de M. le secrétaire d'Etat reprend
ce que nous avions exposé en première lecture. Nous sommes donc favorables à
l'amendement n° 58.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 58.
Mme Monique ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Nous estimons que les engagements pris par M. le secrétaire d'Etat sont
satisfaisants, parce qu'il est important que toutes les familles puissent
accéder également à l'adoption.
Me trouvant récemment au Brésil pour y rencontrer la communauté française,
j'ai découvert que, pour adopter un enfant, il fallait séjourner plusieurs mois
dans le pays. Cela représente évidemment une dépense très lourde et une absence
prolongée de son travail. Il faut que toutes les familles puissent accomplir
cette démarche de la même façon, sans que des raisons financières viennent les
dissuader ou les plonger dans de graves difficultés.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 47 est supprimé.
Article additionnel après l'article 47
bis
M. le président.
Par amendement n° 27 rectifié, M. Neuwirth, au nom de la commission des
affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 47
bis,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« Dans le cinquième alinéa (2°) des articles L. 615-19 et L. 722-8 du code de
la sécurité sociale, les mots : "à la moitié de" sont remplacés par
les mots : "aux trois quarts de". »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
La commission des affaires sociales reprend, en
l'occurrence, une idée de notre collègue M. Huriet. Actuellement, les femmes
exerçant une profession indépendante et qui désirent adopter ne bénéficient que
de la moitié de l'indemnité journalière forfaitaire de cessation d'activité,
qui est de soixante jours pour la naissance d'un enfant et de quatre-vingt-dix
jours pour la naissance de plusieurs enfants.
Le présent amendement a donc pour objet d'allonger la durée de versement des
indemnités journalières des mères adoptantes non salariées non agricoles aux
trois quarts de la durée des versements des indemnités journalières
forfaitaires des mères biologiques. Cet allongement porte l'indemnisation
totale des mères adoptantes non salariées à 62,5 p. 100 de celle que reçoivent
les mères biologiques non salariées. Ce rapport consacre l'exacte parité de
traitement entre mères salariées et mères non salariées.
Cependant, le présent amendement concerne l'adoption d'un seul enfant.
S'agissant des adoptions multiples, la mesure est d'ordre réglementaire. C'est
pourquoi il serait éminemment souhaitable que le Gouvernement s'engage à faire
en sorte que les femmes exerçant une profession indépendante qui adoptent
plusieurs enfants puissent également bénéficier de dispositions plus
favorables.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
J'ai déjà eu l'occasion de rendre hommage au souci de la Haute Assemblée
d'assurer la parité en matière de prestations liées aux circonstances
particulières de l'adoption, notamment la parité entre les professions
salariées et les professions non salariées.
Cet amendement tend à allonger la durée de versement des indemnités
journalières des mères adoptantes non salariées aux trois quarts de la durée
des versements des indemnités journalières forfaitaires des mères biologiques.
Cet allongement porte l'indemnisation totale des mères adoptantes non salariées
à 62,5 p. 100 de celle des mères biologiques non salariées et assure donc
exactement la parité entre salariées et non-salariées, que chacun souhaite en
la matière.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, je m'engage, au nom du
Gouvernement, à allonger, par voie réglementaire, la durée de versement des
indemnités forfaitaires journalières des mères adoptantes non salariées de
trente jours pour les adoptions multiples, comme cela existe déjà en cas de
naissances multiples pour les mères biologiques non salariées.
Je précise que, en raison du faible nombre de mères adoptantes concernées, une
augmentation des cotisations ou le recours à un autre financement de ces
mesures ne paraît pas nécessaire.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
L'engagement que vient de prendre M. le secrétaire
d'Etat correspond tout à fait au souhait de la commission.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié, accepté par la commission et par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 47
bis.
Article 53
M. le président.
« Art. 53. - Le Gouvernement présente tous les trois ans au Parlement un
rapport relatif à l'adoption indiquant notamment, par année et par département,
le nombre d'agréments demandés, accordés, refusés ou retirés, le nombre de
pupilles de l'Etat et le nombre d'adoptions et de placements en vue d'adoption
les concernant. »
Par amendement n° 28, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans cet article, de remplacer le mot : « trois » par le mot
: « deux ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Une fois qu'une loi est votée par le Parlement, il
importe que celui-ci puisse en suivre l'application et en apprécier les effets.
On peut regretter que l'abondance de matière législative ne permette pas
toujours d'assurer ce suivi.
C'est la raison pour laquelle, en première lecture, nous avions fait voter par
le Sénat un amendement prévoyant que le Gouvernement soumettrait chaque année
au Parlement un rapport sur les évolutions constatées, notamment en matière
d'adoption des pupilles de l'Etat.
L'Assemblée nationale a porté à trois ans la périodicité de ce rapport, ce qui
nous paraît trop long.
Dans un but de conciliation, nous proposons que ce document soit biennal. Je
crois d'ailleurs que la biennalité va s'imposer de plus en plus, y compris pour
certains budgets, tant il est vrai que l'annualité est très contraignante.
Aussi bien l'élaboration du rapport annuel que nous avions initialement prévu
risquait-elle de poser à vos services, monsieur le secrétaire d'Etat, de
délicats problèmes, notamment en raison d'une insuffisance de personnel.
Un rapport établi tous les deux ans assurera tout de même un suivi suffisant
de cette loi, qui n'est pas peut-être la meilleure du monde... Mais toute
oeuvre humaine est perfectible ! C'est pourquoi on voit parfois fleurir, dans
les textes portant diverses dispositions d'ordre social, certains amendements
qui permettent de modifier d'une façon intelligente des textes déjà votés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Parlant sous le contrôle de mes services, je m'en
remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 53, ainsi modifié.
(L'article 53 est adopté.)
M. le président.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la
deuxième lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Hamel, pour explication de vote.
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce
texte tend à répondre à des situations souvent dramatiques en améliorant les
conditions dans lesquelles l'adoption s'accomplit.
Les explications de nos rapporteurs ont été parfaitement éclairantes et m'ont
convaicu que, avec tous mes collègues du groupe du RPR, je devais voter sans
hésiter cette proposition de loi.
Nous le ferons d'autant plus volontiers que, tout au long de la discussion, M.
le secrétaire d'Etat a souvent répondu de manière très positive aux
propositions de nos rapporteurs.
Ce texte représente un progrès que nous souhaitons tous.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Nous ne voterons pas cette proposition de loi, et cela pour trois raisons
majeures.
La première tient au hiatus que nous constatons entre les propos et le texte.
D'un côté, on affirme le souci de l'intérêt de l'enfant, la volonté de faire en
sorte qu'il se développe aussi harmonieusement que possible et, d'un autre
côté, le texte protège les parents adoptants de tout risque qui pourrait naître
de la satisfaction donnée à l'enfant désirant connaître ses origines.
La deuxième raison, c'est l'absurdité - je ne crains pas d'employer ce mot -
qu'il y a selon moi à refuser à des concubins la possibilité d'adopter un
enfant, quand une personne seule peut le faire.
Une personne vivant en concubinage mais se déclarant comme vivant seule ne
pourra pas adopter, car une enquête sera menée avant que ne soit accordé
l'agrément.
En revanche, une personne vivant seule pourra adopter un enfant et se mettre
en concubinage ultérieurement.
Non seulement cette disposition est absurde, mais elle est au rebours de
l'évolution de notre société, où la vie d'un couple de concubins ne se
distingue guère de celle d'un couple dit « légitime ». Veut-on faire en sorte
que chacun, désormais, suive la voie qui a été tracée lorsque la société était
toute différente ? Veut-on revenir à un état figé de la société ?
Enfin, l'essentiel, pour nous, était tout de même de créer les conditions
permettant à un enfant ayant atteint l'âge de discernement, au moment où il
ressent fortement le besoin de lever quelques ambiguïtés dans sa situation
familiale, de connaître ses origines sans avoir le moins du monde, car les
entretiens que nous avons eus avec des enfants adoptés le montrent à
l'évidence, le désir de rompre avec la famille au sein de laquelle il a trouvé
effectivement un accueil toujours chaleureux et familial.
Ces enfants ressentent un trouble ; ils ont le désir et ils exigent même
parfois de connaître leurs origines, surtout lorsque des caractères physiques
mettent en évidence des différences.
Ces trois arguments sont suffisamment forts pour que, tout en reconnaissant
que des tentatives ont été faites, au moins dans les discours et parfois dans
la proposition de loi elle-même, le groupe socialiste vote contre cette
dernière.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Comme en première lecture, le groupe communiste républicain et citoyen votera
cette proposition de loi, même si elle ne permet pas, selon nous, de résoudre
tous les problèmes liés à l'adoption, mais, il faut avoir l'humilité de le
reconnaître, certains d'entre eux sont délicats.
Tout le monde s'accorde ici à reconnaître que l'adoption est avant tout
l'affaire de l'enfant et qu'elle doit respecter ses droits et sa personnalité.
Je voudrais, pour ma part, répéter que, pour l'enfant, si l'adoption permet de
construire une famille autour de ses parents adoptifs, il n'en reste pas moins
qu'elle n'occulte pas la souffrance indélébile de l'abandon et de la quête de
son identité, et ce quels que soient les éléments connus ou non. La loi ne peut
privilégier l'un de ces aspects par rapport à l'autre.
Par ailleurs, je regrette aussi que la loi ne permette pas aux couples non
mariés d'adopter un enfant. Il s'agit là d'un manque de logique par rapport à
l'évolution de la loi elle-même dans d'autres domaines et à la réalité des
couples d'aujourd'hui.
Néanmoins, nous ne pouvons nous dérober à nos responsabilités et je crois
pouvoir dire sincèrement, au terme de notre débat, que le Sénat aura su
préserver les intérêts de l'enfant.
Nous voulons répondre à l'attente des familles désirant mettre en oeuvre un
projet d'adoption ou ayant déjà adopté un enfant en votant cette proposition de
loi. Nous n'en souhaitons pas moins que d'autres textes permettent d'améliorer
encore les conditions d'adoption en tenant compte, notamment, des évolutions de
la société.
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Nous allons, avec regret, voter contre ce texte parce qu'il est réellement
très en retrait par rapport aux objectifs qu'il affiche.
Ce blocage résulte essentiellement, selon moi, de la conception
traditionnaliste de la famille qui affleure à chaque instant et qui amène à
refuser aux couples de concubins le droit d'adopter un enfant, alors qu'ils ont
parfaitement le droit de donner la vie. Aujourd'hui, en effet, un tiers des
enfants naissent dans un foyer de concubins.
Ce blocage tient également au refus de revaloriser l'adoption simple, ce qui
est lié à l'idée selon laquelle l'enfant est tout de même un peu la propriété
de ses parents. Or, avec l'adoption simple, il ne l'est pas. Comme je l'avais
souligné lors de mon intervention liminaire, l'adoption internationale, dans
ces conditions, est plus difficile à mettre en oeuvre.
Je crois que ce texte, contrairement aux intentions affichées, n'a pas modifié
substantiellement les conditions requises pour l'adoption. Il n'a pas mieux
affirmé les droits de l'enfant, en tout cas pas son droit à connaître son
histoire au moment où il sera apte à l'entendre et où il le souhaitera.
Je ne vois pas non plus en quoi ce texte, contrairement à ce qui avait été
annoncé, permettra de mieux lutter contre les échecs en matière d'adoption.
Aucune disposition ne permet en effet d'atteindre cet objectif. Nous regrettons
donc de devoir voter contre cette proposition de loi, mais elle n'améliore pas
suffisamment notre législation en la matière.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
La majorité du groupe du RDSE, comme à son habitude, votera le texte qui lui
est présenté, mais la minorité que je représente ici et qui regroupe les
sénateurs membres de Radical s'abstiendra en deuxième lecture comme elle
l'avait fait en première lecture.
Je ne reviens pas sur les points de désaccord que j'ai développés en première
lecture et que j'ai repris aujourd'hui, à savoir le problème des concubins, le
droit d'avoir accès à ses origines et celui, pour la mère, de donner sous le
sceau du secret des renseignements identifiants. Ces éléments, qui sont, pour
moi, essentiels, justifieraient que je ne vote pas ce texte.
Toutefois, nous avons enregistré quelques avancées par rapport à la première
lecture. Je suis satisfaite, pour ma part, que la commission ait repris à son
compte le délai de rétractation de trois mois, et je compte qu'elle fasse
preuve de fermeté à ce sujet.
Par ailleurs, bien qu'il comporte des ambiguïtés, l'amendement tendant à
permettre à la mère de revenir sur sa décision de garder l'anonymat constitue
un premier progrès.
J'espère, comme Mme Borvo, que nous pourrons à l'avenir améliorer encore ce
texte sur certains points. En conclusion, je m'abstiendrai sur cette
proposition de loi.
M. le président.
La parole est à M. Reux.
M. Victor Reux.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au
terme de cette deuxième lecture, permettez-moi de rappeler que cette
proposition de loi reprend les principales orientations définies par le rapport
remis au Premier ministre par notre collègue député, M. Jean-François
Mattei.
Sans bouleverser les règles de fond relatives à la filiation adoptive, il tend
à faciliter l'adoption en modifiant certaines de ses conditions légales.
Il vise également à modifier les codes sociaux afin d'améliorer la situation
des adoptants, des enfants pupilles de l'Etat et des adoptés.
Notre collègue M. Luc Dejoie, rapporteur de la commission des lois, avait
souligné, lors de la première lecture, que trois grands principes avaient guidé
sa réflexion, à savoir l'intérêt supérieur de l'enfant, l'humilité et, enfin,
l'idée qu'il fallait non pas changer pour changer mais tendre à la meilleure
efficacité possible.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis de la commission des affaires
sociales, avait, quant à lui, souligné les grandes lignes qui avaient guidé ses
travaux. Il s'agissait de simplifier les procédures et de réduire les délais,
de garantir l'équité et le droit de chacun, et, enfin, d'allier prudence et
humanité.
Nos deux rapporteurs, par ces propos, ont parfaitement résumé la philosophie
des travaux de la Haute Assemblée.
Pour toutes ces raisons, le groupe du Rassemblement pour la République votera
ce texte.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
Je tiens à répondre plus particulièrement à nos
collègues Mme Borvo et M. Sérusclat.
J'ai, comme M. Sérusclat, et peut-être un peu plus que lui, un long parcours
législatif. Or, je n'ai pas d'exemple d'une loi de société qui n'ait été
améliorée au fil des mois, voire des années - il en va ainsi de ce type de loi
- même si c'est à l'occasion de ce que l'on appelle des cavaliers budgétaires
ou de lois portant diverses dispositions d'ordre social.
Nous devons nous demander si ce texte représente une avancée. Oui, c'en est
une et je suis convaincu que le premier rapport qui nous sera présenté par le
ministère nous permettra d'avoir une photographie fidèle de l'évolution de la
situation. Nous nous sommes tous amplement et très ouvertement exprimés à ce
sujet.
Je suis donc convaincu que ce texte constitue une avancée mais l'ouverture
qu'il permet, et c'est là l'essentiel, entraînera d'autres avancées. J'y crois
profondément et c'est la raison pour laquelle nous nous sommes tellement
investis pour tenter de franchir un certain nombre d'obstacles qui empêchaient
les deux tiers des enfants pupilles de l'Etat d'être adoptés.
M. Emmanuel Hamel.
Nous partageons vos convictions et vos espoirs !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
Mme Joëlle Dusseau.
Le groupe du Rassemblement démocratique et social européen s'abstient.
(La proposition de loi est adoptée.)
9
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
Le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de
constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons
d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et
de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des lois constitutionnelles,
de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration
générale a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jacques Larché, Luc Dejoie, Lucien Neuwirth, Pierre Fauchon,
François Giacobbi, Michel Dreyfus-Schmidt et Mme Nicole Borvo.
Suppléants : MM. Guy Allouche, Robert Badinter, Philippe de Bourgoing, Patrice
Gélard, Jean-Jacques Hyest, Lucien Lanier et Michel Rufin.
10
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'encouragement
fiscal en faveur de la souscription de parts de copropriété de navires de
commerce.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 462, distribué et renvoyé à la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation.
11
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de Mmes Hélène Luc, Marie-Claude Beaudeau, MM. Paul Loridant,
Jean-Luc Bécart, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. Claude Billard, Mmes Nicole
Borvo, Michelle Demessine, M. Guy Fischer, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM.
Félix Leyzour, Louis Minetti, Robert Pagès, Jack Ralite, Ivan Renar une
proposition de loi relative aux finances locales.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 463, distribuée et renvoyée
à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques
de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission
spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
12
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mardi 25 juin 1996 :
A neuf heures trente :
1. Questions orales sans débat suivantes :
I. - Rappelant que le département de la Lozère accueille un institut
universitaire professionnalisé IUP, dispensant un enseignement supérieur en «
ingénierie du transport, de l'hôtellerie et du tourisme », Mme Janine Bardou
souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'attribution des bourses aux
étudiants de première année d'IUP.
En effet, un étudiant titulaire d'un brevet de technicien supérieur qui
s'inscrit en première année d'IUP ne peut bénéficier des bourses d'études
accordées par le centre régional des oeuvres universitaires et scolaires CROUS,
car il est considéré comme redoublant et non comme changeant d'orientation. Or,
il s'agit bien, pour lui, d'une réorientation, puisqu'il passe d'une formation
de technicien à une formation de cadre.
Il va sans dire que le refus du bénéfice des bourses écarte, ce qui est très
regrettable, certains étudiants, et bien évidemment ceux qui sont issus de
familles les plus modestes, de la possibilité d'accéder à une formation
universitaire.
Elle souhaiterait donc qu'il puisse lui indiquer quelle est l'interprétation
du ministère à ce sujet (n° 408).
II. - M. Alain Richard attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la réduction des
moyens accordés par l'Etat aux associations complémentaires de l'école,
notamment aux Francs et Franches Camarades - « Francas ».
Inspirée par le programme du Conseil national de la Résistance, reconnue
d'utilité publique, la fédération des « Francas » a été créée pour assurer à
tous les enfants, quelle que soit leur condition sociale, l'égalité des chances
à laquelle ils ont droit. Elle regroupe aujourd'hui quelque cinq mille centres
d'accueil sur l'ensemble du territoire français dans lesquels sont accueillis
plus d'un million d'enfants chaque année.
De l'aide aux devoirs à l'organisation de classes de découverte, les « Francas
» ont développé au cours des années un savoir-faire de première importance, en
servant des objectifs prioritaires de l'éducation nationale : l'aide à la
scolarisation des enfants en difficulté, en particulier dans les banlieues, la
formation des citoyens, l'ouverture des jeunes à leur environnement,
l'intégration des handicapés.
Malgré ces efforts, le Gouvernement semble vouloir se désengager de cette
action éducative. Au mois de février dernier, le ministère de l'éducation
nationale se proposait de réduire de plus de 20 p. 100 pour les années
1996-1997 les moyens affectés aux « Francas ». Devant le tollé soulevé par
cette initiative, de nouvelles propositions gouvernementales moins radicales
ont été avancées : elles consistent tout de même à diminuer de 1,3 million de
francs la subvention pour 1996 et à supprimer 2,5 postes de mise à disposition.
Cette amputation de leurs moyens aux « Francas » n'est pas anecdotique,
notamment parce que les mises à disposition sont fondamentales dans une
organisation qui repose largement pour le reste sur le bénévolat.
En conséquence, il lui demande, d'une part, quelles sont les mesures qu'il
compte prendre pour garantir aux « Francas » leur avenir, et d'autre part les
raisons qui justifient un tel désengagement de la part de l'Etat (n° 384).
III. - M. René Rouquet attire l'attention de M. le Premier ministre sur la
situation hautement préoccupante du groupe scolaire Marie-Curie de
Nogent-sur-Marne, construit sur le site contaminé d'une ancienne usine de
radium et dont l'existence d'un taux anormalement élevé de radioactivité dans
le sol, supérieur aux recommandations europénnes, pose un grave problème de
santé publique pour de nombreux riverains et écoliers.
Il lui demande, en conséquence, quelle mesure il compte prendre pour que toute
la lumière soit faite sur cette question et qu'une solution véritablement
satisfaisante puisse enfin répondre aux légitimes inquiétudes de nombreux
concitoyens (n° 405).
IV. - M. René-Pierre Signé indique à M. le ministre de l'éducation nationale,
de l'enseignement supérieur et de la recherche que le désir d'adapter notre
système éducatif à la crise économique pose le problème de l'apprentissage et
de la formation ; on a retrouvé, par le biais des centres de formation
d'apprentis, CFA, la vieille notion d'école du patronat et mis, qu'on le
veuille ou non, dans les régions à faible démographie scolaire, en concurrence
CFA et lycées professionnels.
Les CFA sont des établissements privés qui reçoivent des fonds publics, y
compris des taxes d'apprentissage importantes de services de l'Etat, ce qui
soulève tout de même une interrogation et entraîne une concurrence malsaine. Le
secteur public est ainsi menacé par la priorité que l'on donne à
l'apprentissage et à l'alternance.
On peut s'inquiéter, dans une société où l'emploi précaire est de règle, où
seuls des emplois éphémères sont créés, de cette formation étroite et
spécifique pour un métier bien déterminé, que dispensent les CFA. On peut
s'interroger sur cet enseignement très orienté, assez éloigné du socle
technique et polyvalent, nécessaire pour demain quand l'apprenti devenu ouvrier
sera peut-être confronté à une nouvelle formation pour exercer un autre
métier.
Outre la concurrence exercée, il y a aussi une formation tronquée qui risque
de freiner les chances de reconversion. Le lycée offre d'autres
possibilités.
Il lui demande quelles sont les perspectives de son action dans ce domaine (n°
423).
V. - M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre délégué à la
ville et à l'intégration concernant un projet d'aide au retour et à
l'installation de jeunes étrangers dans leur pays d'origine. En effet, de
nombreux jeunes étrangers ou Français d'origine étrangère sans emploi ou
n'ayant que de petits boulots rencontrent des difficultés dans nos banlieues et
ont souvent le mal du pays. Certains ont un projet défini pour retourner dans
leur patrie, s'y installer et développer une activité économique. Il ne leur
manque souvent qu'un appoint financier ou une aide logistique pour y parvenir,
ce qui serait possible en leur maintenant, par exemple, le RMI, s'ils le
touchent, et en débloquant une aide financière dont le montant serait à définir
suivant les dossiers.
Il lui demande s'il serait possible de monter une opération pilote sur
quelques cas précis de jeunes de Seine-Saint-Denis dont les projets sont bien
avancés, avec un financement du ministère (n° 409).
VI. - M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre de la défense
sur le projet « Fort 2000 », qui visait à regrouper l'ensemble des services
centraux de la direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE, en
particulier ceux du boulevard Mortier, en un seul site : le fort de Noisy,
complexe militaire situé sur les communes de Noisy-le-Sec et de Romainville.
Ce projet remonte à 1992 et avait été confirmé par les gouvernements
successifs depuis cette date. Il avait fait l'objet d'études approfondies par
les services techniques des armées, de réunions de concertation avec les
différents services de l'Etat concernés et avec les collectivités
territoriales, conseil régional, conseil général, communes.
Un permis de construire avait été élaboré. Stoppé en février-mars 1996 pour
des raisons budgétaires, alors qu'il avait été programmé sur cinq ans -
1996-2001 - et que les premiers crédits étaient prévus dans la loi de finances
pour 1996 ainsi que dans la loi de programmation militaire adoptée en 1994, ce
projet prévoyait notamment la construction de bureaux modernes pour la DGSE à
la place des casernes existantes, la préservation d'un site actuellement classé
par arrêté de Biotope et la réalisation d'une promenade de 3,5 hectares appelée
coulée verte, aménagée en parcours pédestres.
Les élus de l'opposition municipale de Noisy-le-Sec et l'association « Noisy
pour tous » souhaiteraient par conséquent savoir si l'arrêt de ce projet
préfigure son annulation définitive ou son report et surtout si les engagements
du ministère de la défense figurant sur les comptes rendus officiels des
réunions multipartites réalisées par la préfecture et qui conditionnent
l'ouverture de la coulée verte au printemps 1997 sont maintenus. Il s'agit en
effet du financement d'une double rangée de clôtures séparant cette coulée
verte de la zone protégée et des environs du fort et des travaux de
confortement du terrain. Les habitants de Noisy-le-Sec et de Romainville sont
en effet sensibles à l'aménagement de cet espace de détente, qui contrasterait
avec la forte urbanisation de la Seine-Saint-Denis (n° 407).
VII. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre délégué à
la jeunesse et aux sports sur l'insécurité croissante à l'occasion des
compétitions du samedi et du dimanche dans les stades de l'Ile-de-France, plus
particulièrement de l'Essonne.
Cette insécurité se caractérise au niveau des compétitions amateurs et des
réunions de fin de saison, puisque, dans ces championnats et coupes des
classements inférieurs, il n'y a pas souvent d'arbitre officiel.
Il lui demande quelles mesures immédiates il entend prendre pour faire cesser
cette situation dangereuse et nuisible au plaisir de jouer pour ces jeunes
sportifs (n° 420).
VIII. - M. Jean-Marc Pastor attire l'attention de M. le ministre de
l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation sur les conséquences
désastreuses qu'entraînerait, comme il en est question, la prorogation d'un an
des règlements actuels (arrivant normalement à échéance le 31 août 1996 en
matière d'arrachage, dans l'attente d'une réforme globale de l'OCM
vitivinicole.
Il lui rappelle que ces règlements relatifs à l'arrachage avec abandon
définitif des droits de plantation et l'interdiction de plantations nouvelles
avaient à l'origine vocation à résoudre des problèmes d'ordre structurel. En
effet, il s'agissait de résorber une production de vin excédentaire dans
l'Union européenne. Or, aujourd'hui, cette vocation première semble être
détournée de sa mission ; le système d'arrachage primé avec abandon définitif
des droits tend à s'apparenter à une mesure sociale, la prime devenant un
complément de revenus pour les personnes cessant leur activité. Mais ce qui
paraît plus problématique est que le système ayant parfaitement rempli sa
mission de résorption des excédents, le prolonger représenterait une
catastrophe économique dans la mesure où la production de vin en France
deviendrait déficitaire ; sur le territoire communautaire, quelque 200 000
hectares seraient voués à disparaître.
Il souhaite que, à l'occasion de la réforme de l'OCM et avec l'arrivée à
échéance des règlements précités, de nouvelles mesures en matière de politique
sociostructurelle soient débattues et que soient prises en compte les
propositions d'organismes professionnels, par exemple, l'instauration d'une
prime à la « transmission d'activité ».
En conséquence, il lui demande quelle position le Gouvernement entend adopter
concernant la prorogation des règlements, quelles mesures il compte proposer
dans le cadre de la réforme de l'OCM vitivinicole.
Il lui demande de bien vouloir lui donner une réponse (n° 411).
IX. - M. André Vezinhet attire l'attention de M. le ministre de
l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation sur le grave dysfonctionnement
des procédures d'aides de l'Etat et du FEOGA et les conséquences pour les
investissements matériels des caves coopératives viticoles et de leurs
unions.
Il lui rappelle un problème bien connu de ses services, mais qui devient de
plus en plus insupportable aux coopérateurs vignerons. En effet, depuis deux
ans, le « plan sectoriel » n'est toujours pas approuvé par l'Union européenne
et continue de faire l'objet de discussions parce qu'il contient des critères
d'éligibilité excessivement difficiles à satisfaire, notamment présenter pour
une coopérative plus de 70 p. 100 de vins à appellations d'origine contrôlée et
vins de pays pour pouvoir accéder aux aides du FEOGA Cette situation entraîne
des répercussions à un double niveau : premier niveau, le blocage des dossiers
FEOGA 1994 et 1995, qui, bien qu'approuvés au niveau régional, n'ont pu, faute
du plan sectoriel, être transmis à la Communauté européenne.
Ainsi, pour le département de l'Hérault, le bilan est le suivant : état des
projets 1994 et 1995 bloqués au ministère, en attente du plan sectoriel : neuf
coopératives concernées, montant hors taxes du concours sollicité : 3 994 490
francs ; état des demandes de paiement FEOGA non traitées par le ministère de
l'agriculture : quatorze coopératives concernées, montant total de l'aide : 4
024 825 francs.
Deuxième niveau de blocage : pas de programmation régionale des crédits en
1996. La commission de programmation des crédits POA, qui devait se réunir en
1996, n'a pas eu lieu, faute de critères d'éligibilité. Plusieurs dizaines de
coopératives sont ainsi privées des aides de l'Etat et du FEOGA : état des
projets Hérault 1996 non examinés, en attente du plan sectoriel : vingt-quatre
coopératives ou unions concernées pour un montant de travaux de 64,9 millions
de francs. En conséquence, il lui demande comment il compte régler rapidement
ce problème qui se pose, avec en corollaire une autre inquiétude, celle que les
dossiers FEOGA stockés au ministère depuis 1994 ne soient finalement examinés à
travers les nouveaux critères, avec le risque de ne pas satisfaire à ces
derniers. Cela aurait pour conséquence que des entreprises qui s'étaient vu
annoncer une aide de l'Etat et du FEOGA pourraient se voir finalement, après
deux années d'attente, annoncer une suppression de leurs crédits.
Enfin et pour conclure, il lui fait part d'une préoccupation croissante des
professionnels de la viticulture liée au retard de liquidation des paiements
pouvant aller jusqu'à deux ans à partir du dépôt de dossier complet au
ministère de l'agriculture.
Ce ne sont pas les mesures de réduction drastique du nombre des fonctionnaires
annoncées par le Premier ministre, là où il faudrait au contraire une
augmentation des moyens en personnel, qui sont de nature à apaiser le
mécontentement des viticulteurs héraultais (n° 414).
X. - M. Philippe Richert attire l'attention de Mme le ministre de
l'environnement sur la polémique soulevée par le récent rapport de l'INESTENE
(Institut d'évaluation des stratégies sur l'énergie et l'environnement en
Europe), quant aux exportations françaises d'électricité. Ce rapport émet un
doute sérieux sur l'intérêt financier que pourrait avoir l'Etat à ces
exportations. Or la création de nouveaux sites de production et de nouvelles
infrastructures de transport d'énergie électrique, décidée le plus souvent sans
réelle concertation des parties intéressées, engendre des conséquences sur
notre patrimoine paysager que nous ne pouvons ignorer.
Par conséquent, il souhaiterait savoir si elle envisage d'instituer, par un
texte de loi, l'obligation d'une concertation large et d'études contradictoires
d'opportunité pour la mise en place de telles infrastructures (n° 426).
XI. - M. Alain Dufaut attire l'attention de M. le ministre de la défense sur
l'avenir de la région du plateau de Sault et de la ville d'Apt en Vaucluse, à
la suite de l'annonce officielle du démantèlement des missiles sol-sol du
premier groupement de missiles stratégiques (GMS) installés sur la base
aérienne d'Albion.
La fermeture de ce site de défense nucléaire, qui s'inscrit dans le cadre plus
général de la réforme de notre défense nationale, vaste chantier que le
Président de la République a eu le courage de mettre en oeuvre, pose néanmoins
le problème de sa reconversion.
Les études entreprises depuis plusieurs mois, notamment celle qui est
commanditée par le comité de liaison des élus d'Albion, mettent en évidence
l'impact économique et social considérable d'une telle décision.
C'est ainsi que 1 200 emplois directs, environ 3 300 personnes, une
quarantaine de classes et près de 170 entreprises seront touchés. Les
incidences en termes de démographie et de maintien des services publics sont
également très importantes.
L'ampleur des conséquences ainsi cernées permet de confirmer la nécessité de
mettre en oeuvre un projet de développement de longue durée particulièrement
complet, tenant compte des propositions formulées par les acteurs locaux.
Le rapport annexe de présentation du projet de loi relatif à la programmation
militaire pour les années 1997 à 2002, projet dont la discussion aura lieu dans
les jours prochains au sein de la Haute Assemblée, précise justement que «
l'importance des mesures de restructuration militaire et industrielle et la
durée de la phase de transition d'un modèle d'armée à l'autre nécessitent un
effort d'accompagnement économique et social exceptionnel ».
A cet égard, il sollicite de M. le ministre de la défense une audience des
parlementaires vauclusiens et des élus directement concernés par la fermeture
du site d'Albion, afin de définir une procédure de travail devant déboucher sur
la mise en oeuvre de mesures de reconversion adaptées.
La récente nomination d'un délégué interministériel aux restructurations de
défense, qui s'est engagé à organiser très rapidement une première réunion dans
le Vaucluse, permet d'envisager une réelle concertation sur le terrain, en
liaison avec les autorités administratives concernées et les représentants de
la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Il n'en demeure pas moins vrai que l'efficacité de cette phase dépend en
grande partie des propositions de l'Etat, lesquelles devront absolument
s'appuyer et répondre aux engagements du Président de la République ; visant à
ce que la « reconversion du site et l'implantation de nouvelles activités
militaires ou civiles soient étudiées, en concertation avec les parlementaires
et élus locaux, avec le souci prioritaire du maintien du niveau d'emploi et des
activités économiques de la région ».
Il lui demande par conséquent de bien vouloir lui préciser ses intentions à ce
sujet (n° 417).
XII. - M. Jean-Pierre Vial attire l'attention de M. le garde des sceaux,
ministre de la justice, sur le manque de disponibilité des magistrats de
l'ordre judiciaire en raison des trop nombreuses tâches non juridictionnelles
qui leur incombent.
Il s'interroge notamment sur la nécessité de faire participer des juges de
l'ordre judiciaire à de multiples commissions administratives purement
consultatives, ou même sur la présidence de certaines d'entre elles dans des
matières, certes importantes et intéressantes, mais qui relèveront ensuite du
contentieux du juge administratif. C'est le cas notamment de la commission
donnant un avis sur le séjour ou l'expulsion des étrangers, de celle statuant
sur les appels d'aide sociale ou encore des commissions de discipline des
fonctionnaires territoriaux.
A cet égard, il est significatif de noter que la loi n° 94-1134 du 27 décembre
1994 modifiant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 a transféré au juge
administratif la charge de la présidence de ces commissions de discipline, mais
que, faute de publication d'un décret en Conseil d'Etat en fixant les
modalités, c'est toujours un juge de l'ordre judiciaire qui assure cette
fonction.
Il lui demande de préciser les mesures que son ministère compte prendre pour
décharger les magistrats de l'ordre judiciaire de matières relevant du juge
administratif ou de tâches non juridictionnelles (n° 412).
XIII. - M. Jean-Pierre Vial attire l'attention de M. le ministre de
l'équipement, du logement, des transports et du tourisme sur le problème de la
RN 504, plus particulièrement sur la croissance très rapide du trafic poids
lourds qui emprunte le tunnel routier de Fréjus et qui, pour sa très grande
majorité, utilise la RN 504 qui est totalement inadaptée. En dix ans, ce type
de trafic a augmenté de plus de 50 p. 100 sur cet itinéraire, entraînant
l'insécurité et l'exaspération des populations riveraines, outre le danger
particulier que représente la traversée de certaines communes et la sortie du
tunnel du Chat.
Par ailleurs, le risque d'une pollution accidentelle du lac du Bourget, dans
la mesure où cette route nationale surplombe sur plusieurs kilomètres le
premier lac naturel de France, est très inquiétant. Une solution à ces
problèmes peut être le barreau autoroutier Ambérieu-Grenoble, à la condition
que le choix de son tracé prenne en compte le délestage de cet itinéraire.
Un tel projet pourrait également chercher à mieux drainer le trafic qui,
venant d'Allemagne et de Suisse, traverse nos départements alpins pour se
rendre dans le sud de la France. Cette question devient d'autant plus
préoccupante que le futur tronçon autoroutier, entre Saint-Julien-en-Genevois
et Cruseilles, devrait favoriser cet axe.
C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui apporter des informations et
des précisions sur l'avancement de ce dossier qui intéresse non seulement les
Savoyards et les départements voisins mais également la région Rhône-Alpes (n°
415).
XIV. - M. Yann Gaillard attire l'attention de M. le ministre de l'équipement,
du logement, des transports et du tourisme sur la situation très difficile dans
laquelle se trouvent les entreprises du BTP à ce jour, tout particulièrement
celles du second oeuvre du bâtiment. Les difficultés de ces dernières se
trouvent amplifiées par les pratiques effectives de passation des marchés de
travaux.
En effet, que le marché soit passé par adjudication ou par appel d'offres, le
recours excessif au marché à entreprise générale fait de la plupart des
entreprises du second oeuvre des sous-traitants à des niveaux de prix et à des
conditions de paiement incompatibles avec leur pérennisation.
Ne serait-il pas souhaitable que soient rappelées aux acheteurs publics les
règles applicables aux choix des candidats, notamment la règle selon laquelle
les entreprises admises à présenter une offre doivent posséder par elles-mêmes,
et non à travers des sous-traitants éventuels, les garanties professionnelles
et financières demandées par le maître d'ouvrage.
En conséquence, l'acheteur public ne devrait pas recourir au marché unique,
dit en entreprise générale, s'il existe, compte tenu des caractéristiques de
l'ouvrage, un nombre important d'entreprises possédant la capacité technique et
les moyens de réaliser par elles-mêmes l'ensemble de l'ouvrage ; dans tous les
autres cas, ils devraient, s'ils souhaitent avoir un seul interlocuteur pour la
réalisation de l'ouvrage, choisir de recourir à la formule du groupement
conjoint ou en marchés séparés (n° 413).
XV. - M. Charles Metzinger signale à Mme le secrétaire d'Etat aux transports
que le tracé du TGV-Est, tel qu'il est envisagé actuellement, ne manquera pas
d'avoir des conséquences économiques et environnementales préjudiciables pour
la commune mosellane de Danne-et-Quatre-Vents, limitrophe du Bas-Rhin, en
particulier pour son annexe, Bonne Fontaine, enclavée dans le parc naturel des
Vosges du nord. Celle-ci bénéficie d'un environnement paysager et d'un
patrimoine culturel qui en font un ensemble remarquable composé d'un couvent,
d'un établissement hôtelier et d'une maison forestière.
La combinaison nature-culture-tourisme draine quelque 30 000 visiteurs par an,
ce qui constitue, pour une petite commune de 517 habitants, un intérêt
économique indéniable.
Dans la procédure administrative, la commission d'enquête a émis un avis
favorable à la déclaration d'utilité publique pour la construction d'une ligne
ferroviaire nouvelle sur l'ensemble du tracé. L'aménagement définitif n'est
cependant pas encore arrêté. Les élus de la commune n'ont pas ménagé leurs
efforts pour faire valoir leurs arguments et demander une traversée couverte du
site de Bonne Fontaine.
N'est-il pas envisageable de consentir un effort particulier pour la
préservation de ce site ? Par ailleurs, on entend dire que l'utilisation de
l'ancienne ligne pourrait être envisagée sur quelques dizaines de kilomètres à
proximité de Danne-et-Quatre-Vents. Est-ce vrai, et peut-elle en dire plus sur
cet aspect de la question ? (n° 416)
XVI. - M. Léon Fatous attire l'attention de M. le ministre délégué au logement
sur la politique du logement dans le département du Pas-de-Calais, en
particulier dans le district urbain d'Arras. Il lui demande de lui préciser le
montant des crédits PLA, prêt locatif aidé, et PALULOS, prime à l'amélioration
des logements à usage locatif et d'occupation sociale (n° 422).
XVII. - M. René Marquès attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur
sur les conséquences des modalités d'application de la dotation générale de
décentralisation.
Il lui rappelle que les départements pour lesquels le calcul de cette dotation
laisse apparaître un solde négatif sont soumis à un prélèvement de la somme
correspondante sur le produit de leur taxe différentielle sur les véhicules à
moteur.
Il lui indique, en effet, que le principe de ce prélèvement présente, outre
son esprit contraire aux règles de la comptabilité publique qui interdit toute
contraction entre dépenses et recettes, de nombreux inconvénients : il
complique l'élaboration des prévisions budgétaires en faisant peser une
incertitude sur le montant des recettes attendues et il introduit une opacité
dans la lecture des comptes ainsi que des distorsions dans les ratios de
gestion des collectivités concernées, faussant en conséquence les comparaisons
interdépartementales.
Il lui demande, en conséquence, s'il ne serait pas possible de revoir les
modalités d'application de la DGD en cas de solde négatif, en particulier par
l'inscription d'une ligne budgétaire spécifique (n° 427).
XVIII. - M. Philippe Madrelle appelle l'attention de M. le ministre de
l'intérieur sur les conditions d'obtention des cartes nationales d'identité.
Dans le département de la Gironde, depuis novembre 1995, avec la nouvelle
gestion des cartes nationales d'identité sécurisées, les délais d'obtention ne
cessent de s'accroître. Ces délais atteignent sept semaines et, à la veille des
examens et des départs en vacances, on parle dans les services préfectoraux de
dix semaines. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser les
mesures qu'il compte prendre afin de remédier à cet état de fait (n° 410).
XIX. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de
l'économie et des finances sur la situation des personnels hospitaliers en
fonction à l'hôpital Georges-Clemenceau de Champcueil dans son département.
Des inégalités de traitement relatives notamment aux indemnités de résidence
dues à une réglementation archaïque conduisent à des situations difficilement
supportables.
C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir supprimer ces zones anciennement
appelées zones territoriales d'abattement de salaires pour une plus juste
équité entre les personnels de l'Assistance publique (n° 419).
XX. - M. Jacques Machet appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la
santé et à la sécurité sociale sur les conditions d'attribution et le niveau de
l'allocation de veuvage.
Les fonds collectés au titre de l'assurance veuvage sont excédentaires, chaque
année, de plus d'un milliard de francs depuis dix ans. Or, le nombre total de
bénéficiaires de cette allocation oscille, sur la même période, autour de 15
000 personnes par an seulement, sur environ 350 000 veuves de moins de
cinquante-cinq ans.
Cela paraît d'autant plus choquant que la précarité des personnes touchées par
le veuvage et leurs difficultés pour retrouver un emploi se sont accrues en
proportion de la montée du chômage, depuis la création de l'assurance veuvage,
en 1979.
Il juge donc souhaitable que le plafond de ressources limitant l'octroi de
l'allocation de veuvage soit relevé, et le montant de cette allocation
substantiellement augmenté, afin que les fonds de l'assurance veuvage soient
utilisés en faveur des personnes pour lesquelles une cotisation spécifique est
prélevée sur les salaires.
Il lui demande donc quelles sont les perspectives d'amélioration de cette
situation (n° 418).
XXI. - M. Nicolas About rappelle à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la
sécurité sociale que lors, de la séance des questions orales du Sénat, le 5
mars dernier, il avait porté à sa connaissance des faits particulièrement
graves, survenus à l'intérieur d'un centre médico-psychologique de Versailles,
dont s'étaient rendus coupables un médecin psychiatre et sa collègue
psychologue. Accusés à tort d'avoir subtilisé 400 francs dans un portefeuille,
trois salariés de ce centre s'étaient vus contraints, sous la menace et la
pression psychologique, de se dévêtir devant ces deux supérieurs hiérarchiques,
afin de prouver qu'ils ne détenaient pas la somme volée.
En réponse à sa question, Mme le ministre délégué pour l'emploi chargée de le
représenter, avait vivement invité les personnes concernées, victimes
d'agissements aussi intolérables, à porter plainte devant la justice et à
saisir le Conseil de l'ordre des médecins, ce qui a été fait. S'agissant des
sanctions administratives, elle l'avait assuré que l'administration centrale
agirait en conséquence, apportant au personnel toutes les garanties
nécessaires.
Il tient néanmoins à l'informer des faits que se sont produits depuis lors
dans ce centre et qui indiquent que, loin d'avoir été sanctionnés, les auteurs
de cette faute professionnelle aggravée ont continué d'exercer, en toute
impunité, une pression psychologique telle que les personnes qui avaient porté
plainte ont dû quitter leur poste.
En effet, l'une d'entre elles, convoquée à plusieurs reprises devant ses
supérieurs dont elle a eu à subir les pressions et les menaces à peine voilées,
victime d'agressions journalières, d'invectives, de bousculades et de vexations
professionnelles en tout genre, s'est vu retirer un à un tous ses patients.
Pour échapper à des pressions devenues insupportables, elle a fini par demander
une mutation dans un autre hôpital, ainsi que deux de ses collègues.
Devant des faits aussi accablants, peut-il lui dire quelles mesures urgentes
il compte prendre pour soustraire de cette terrible pression psychologique le
personnel de ce centre qui continue à en être la victime et qui n'ose pas, on
le comprend, porter plainte devant la justice ? Il s'agit non pas d'éloigner
les victimes de leur service, ce qui serait trop facile, mais bien de
sanctionner les auteurs de ces méfaits et de réintégrer à leur poste ceux qui
n'auraient jamais dû en être écartés (n° 425).
XXII. - M. Philippe Richert constate que l'Alsace, tout comme l'ensemble des
régions transfrontalières, se distingue par les importants flux de personnes
résidant dans un pays et venant travailler de l'autre côté du Rhin. Cette
situation, qui favorise les échanges, se justifie généralement par des raisons
d'ordre économique. Toutefois, certains problèmes subsistent dans la vie
quotidienne de ces ressortissants qui restent confrontés à bon nombre de
difficultés.
C'est notamment le cas dans le domaine social, qu'il s'agisse, par exemple,
des problèmes liés à l'attribution des allocations familiales ou aux questions
d'invalidité. En effet, il arrive bien souvent que la législation des deux pays
concernés ne soient pas en totale juxtaposition, ce qui peut créer certaines
interférences et avoir des conséquences particulièrement fâcheuses pour les
transfrontaliers.
Ne serait-il pas, dans ces conditions, souhaitable d'envisager la création
d'une commission « sociale », qui statuerait sur tous les problèmes liés à ces
personnes ? Il pourrait en l'occurrence s'agir d'une commission paritaire
franco-allemande, qui aurait un pouvoir décisionnel et qui serait ainsi à même
de régler la plupart des litiges résultant des situations évoquées
précédemment. Cette proposition avait d'ailleurs déjà été évoquée dès 1993 par
l'actuel Président de la République et elle mériterait d'être examinée avec
attention.
Il souhaiterait, en conséquence, connaître la position de M. le ministre du
travail et des affaires sociales sur la question et les suites qu'il entend y
réserver (n° 424).
XXIII. - M. Jean-Marc Pastor attire l'attention de M. le ministre du travail
et des affaires sociales sur la situation pour le moins paradoxale et
problématique dans laquelle se trouvent les infirmiers du secteur psychiatrique
et, en particulier, sur les difficultés rencontrées quant à la régularisation
et l'obtention, pour certains d'entre eux, de leur diplôme d'Etat
d'infirmier.
Il lui rappelle qu'en 1994 le ministre des affaires sociales et de la santé de
l'époque avait jugé que la délivrance de droit de diplômes d'Etat aux
infirmiers du secteur psychiatrique était tout à fait justifiée et avait donc
pris un arrêté dans ce sens le 26 octobre 1994.
Or, le 20 novembre 1995, la direction générale de la santé a informé le
Conseil supérieur des professions médicales de la décision de suspendre la
délivrance des diplômes d'Etat d'infirmiers, sur consigne de la Commission
européenne. De ce fait, on peut aisément comprendre la situation à la fois
délicate et injuste dans laquelle se trouve la profession concernée, certains
infirmiers ayant pu valider leur diplôme d'infirmier psychiatrique et d'autres
pas, mais situation aussi scandaleuse car ce sont leurs compétences
professionnelles et médicales qui sont purement et simplement remises en
cause.
Il souhaite que soit mis un terme à cette situation ambiguë engendrée par une
mesure discriminatoire et injuste. Il lui demande de bien vouloir lui donner
une réponse (n° 421).
A seize heures :
2. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la SNCF.
Aucune inscription de parole dans ce débat n'est plus recevable.
3. Discussion du projet de loi relatif à l'encouragement fiscal en faveur de
la souscription de parts de copropriété de navires de commerce.
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture.)
Délai limite général
pour le dépôt des amendements
Le délai limite pour le dépôt des amendements à tous les projets de loi et
propositions de loi ou de résolution prévus jusqu'à la fin de la session
ordinaire, à l'exception des textes de commissions mixtes paritaires et de ceux
pour lesquels est déterminé un délai limite spécifique, est fixé, dans chaque
cas, à dix-sept heures, la veille du jour où commence la discussion.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures dix.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ÉLECTION D'UN SÉNATEUR
le président du Sénat a reçu de M. le ministre de l'intérieur une communication de laquelle il résulte que, à la suite des opérations électorales du 23 juin 1996, M. Claude Haut a été proclamé élu sénateur du département de Vaucluse.
MODIFICATION AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE SOCIALISTE
(72 membres au lieu de 71)
Claude Haut.
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
François Trucy pour siéger au sein du comité des prix de revient des
fabrications d'armement, en remplacement de M. Maurice Blin, démissionnaire.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Commémoration du baptême de Clovis
et visite du pape en France
430. - 24 juin 1996. - En septembre prochain, le pape Jean-Paul II effectuera une visite dans notre pays. Ce n'est pas la première du genre, et il n'y aurait là rien à redire si elle ne s'inscrivait dans un contexte particulier, à savoir la célébration du 1 500e anniversaire du baptême de Clovis, et ne faisait suite au voyage du Président de la République, le 20 janvier dernier, au Vatican. Les acquis de la révolution de 1789 que sont les droits de l'homme, la liberté, la fraternité sont le socle de la nation française, tout comme la séparation de l'Eglise et de l'Etat est un des éléments essentiels de la sauvegarde des libertés fondamentales y compris la liberté religieuse. C'est pour cela qu'un Etat démocratique ne saurait être que laïque. L'Etat laïque ne saurait tolérer que s'exercent sur lui des pressions, nombreuses ces derniers mois, tendant toutes à restaurer un certain ordre moral incompatible avec la conception républicaine. La récupération qui est faite, çà et là, de la célébration du 1 500e anniversaire du baptême de Clovis tout comme la tentative, voilà quelques mois, de remettre en cause le droit à l'interruption volontaire de grossesse participent d'un même état d'esprit. Dans ce contexte, la visite papale dans les lieux aussi chargés d'histoire que sont la ville de Reims ou le département de la Vendée revêt un caractère particulier et sort largement du cadre pastoral dans lequel elle aurait dû se confiner. Aussi, M. Gérard Roujas demande à M. le ministre de l'intérieur de préciser à la représentation nationale l'implication de l'Etat dans ce déplacement et notamment le coût financier qu'il engendre pour le contribuable. Enfin, il souhaite qu'il réaffirme son attachement et celui de l'ensemble des membres du Gouvernement à l'Etat laïque et républicain.