M. le président. « Art. 21. - L'article L. 321-1 du code de l'urbanisme est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'ils procèdent à des opérations de restructuration urbaine, ces établissements publics sont compétents pour réaliser ou faire réaliser, après avis des communes ou groupements de communes concernés, toutes opérations ou actions ou tous aménagements ou équipements de nature à favoriser une politique de développement social urbain telle que définie à l'article premier de la loi n° du relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, pouvant inclure des actions d'insertion professionnelle et sociale en faveur des habitants des grands ensembles ou quartiers d'habitat dégradé mentionnés au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire inclus dans leurs zones d'activité territoriale.
« Les établissements publics d'aménagement qui mènent des opérations de restructuration urbaine dans les conditions prévues à l'alinéa précédent peuvent, par délégation de l'établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux, assurer la maîtrise d'ouvrage des opérations définies à l'article L. 325-1 et accomplir les actes de dispositions et d'administration définis à l'article L. 325-2. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 107, M. Fischer, Mme Fraysse-Cazalis et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi cet article :
« L'article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un syndicat mixte peut être constitué par accord entre l'Etat et une ou plusieurs des personnes publiques ci-dessus mentionnées, en vue de réaliser ou de faire réaliser toutes opérations ou actions relatives à la restructuration urbaine des grands ensembles et quartiers d'habitat dégradé. La création du syndicat mixte de restructuration urbaine est autorisée par décret en Conseil d'Etat, qui en approuve les modalités de fonctionnement, au vu des délibérations concordantes des futurs membres. »
Par amendement n° 108, M. Fischer, Mme Fraysse-Cazalis et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi l'article 21 :
« Il est créé au titre II du livre III du code de l'urbanisme un chapitre V intitulé « Etablissements publics de restructuration urbaine ». Ce chapitre comprend les articles suivants :
« Art. L... - Les établissements publics de restructuration urbaine créés en application du présent chapitre sont des établissements publics locaux associant des collectivités territoriales à l'Etat et, le cas échéant, à d'autres personnes publiques.
« Ils ont pour objet d'étudier et de définir le programme des opérations et actions de restructuration urbaine des grands ensembles et quartiers d'habitat dégradé, de rassembler et coordonner les financements nécessaires, de coordonner et de contrôler les réalisations conduites par ses membres ou par les organismes d'exécution avec lesquels ils passent les contrats nécessaires dans les conditions prévues à l'article L. 300-4.
« Ils peuvent également réaliser toutes acquisitions foncières et immobilières dans les conditions prévues à l'article L. 324-1 pour les établissements publics fonciers.
« Art. L... - Ces établissements sont créés par décret en Conseil d'Etat après délibérations concordantes des communes et groupements de communes sur le territoire duquel ils sont appelés à intervenir et des autres personnes publiques qui souhaitent y participer, et après avis du ou des conseils généraux, s'ils ne souhaitent pas y participer.
« Art. L... - Le décret qui crée l'établissement détermine sa zone d'activité territoriale et, éventuellement, sa durée. Il fixe son statut, notamment en ce qui concerne la composition du conseil d'administration, la désignation du président, les pouvoirs du conseil d'administration et du président.
« Art. L... - Le conseil d'administration doit être composé, à concurrence des trois-quarts au moins des sièges, de membres représentants les collectivités territoriales et groupements des collectivités territoriales intéressés et l'Etat ; les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements d'une part, et de l'Etat d'autre part, doivent être en nombre égal.
« Art. L... - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent chapitre. »
Par amendement n° 88, M. Franchis propose, au premier alinéa du texte présenté par l'article 21 pour l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme, après le mot : « avis », d'insérer le mot : « conforme ».
La parole est à M. Fischer, pour défendre les amendements n°s 107 et 108.
M. Guy Fischer. Comme je le rappelais en défendant l'amendement n° 106, les établissements publics d'aménagement ne répondent que très partiellement aux besoins de concertation, d'élaboration commune, de travail et de réflexion nécessaires aux actions de restructuration urbaine des grands ensembles et des quartiers dégradés.
Plutôt que de rechercher de nouveaux outils opérationnels, qui existent et impliquent de multiples intervenants - organismes d'HLM, SEM - il convient peut-être de se doter de structures propres à fixer des objectifs de restructuration urbaine.
Ces structures appellent - c'est ce qui nuance la demande de suppression de l'article 20 - une coopération à parité entre l'Etat et les communes, sans que celles-ci soient dessaisies de leurs prérogatives et compétences.
A cette fin, nous proposons deux amendements dont l'objet est identique mais la formulation différente.
L'amendement n° 107 tend à la création d'une nouvelle structure décisionnelle, et non plus simplement opérationnelle, sous forme de syndicat mixte, en vue de réaliser ou de faire réaliser toutes opérations ou actions relatives à la restructuration urbaine des grands ensembles et quartiers d'habitat dégradé.
L'amendement n° 108, amendement de repli, vise à la création spécifique d'établissements publics locaux de restructuration urbaine associant des collectivités territoriales à l'Etat.
A la différence des établissements publics d'aménagement prévus à l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme, ces derniers seraient créés par accord entre l'Etat et les collectivités et auraient vocation à piloter des opérations de restructuration urbaine et non à les réaliser eux-mêmes.
M. le président. La parole est à M. Franclin, pour défendre l'amendement n° 88.
M. Serge Franchis. La maîtrise des opérations d'aménagement appartient naturellement au maire et à son conseil municipal ou à l'assemblée délibérante de la communauté, du district ou du syndicat de communes s'il y a regroupement de communes.
Cet amendement est donc un amendement de cohérence avec les dispositions de l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme, qui requiert l'accord des collectivités locales pour les opérations conduites par les établissements publics d'aménagement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 107, 108 et 88 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Les amendements n°s 107 et 108 posent des problèmes analogues.
L'amendement n° 107 tend à substituer aux établissements publics d'aménagement compétents en matière de restructuration urbaine des syndicats mixtes composés de collectivités locales et de l'Etat. Il repose sur une autre philosophie que le texte.
J'observe que les communes donnent un avis avant la création des établissements publics d'aménagement - c'est l'article L. 321-3 du code de l'urbanisme - et qu'elles sont représentées au conseil d'administration desdits établissements. Elles sont donc associées aux travaux des établissements publics d'aménagement.
Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable sur les amendements n°s 107 et 108.
Sur l'amendement n° 88, la commission aimerait entendre l'avis du Gouvernement, car, s'il comporte des dispositions qui nous inciteraient à émettre un avis favorable, il soulève aussi un certain nombre d'interrogations.
L'amendement répond au souci de donner à la commune la possibilité d'émettre un avis conforme avant qu'un établissement public d'aménagement ne procède à une opération de restructuration urbaine. Il y aurait donc primauté du maire et du conseil municipal.
A l'article 27, que nous examinerons ultérieurement, l'Assemblée nationale a introduit un dispositif analogue pour l'établissement public d'aménagement et de restructuration commerciale. Elle a en effet prévu que l'accord des communes serait le préalable à son intervention.
Il y aurait donc homothétie entre le régime applicable aux établissements publics d'aménagement et celui qui prévaut pour l'établissement public d'aménagement et de restructuration commerciale.
J'en viens aux interrogations. L'amendement comporte un risque non négligeable de blocage, car nombre d'opérations auront un caractère intercommunal. Devant la commission spéciale j'ai évoqué l'exemple du district urbain de Mantes-la-Jolie, où une toute petite commune pourrait, si elle le voulait, bloquer une restructuration importante dans le mesure où elle est appelée à donner un avis avant la création de l'établissement public.
C'est pourquoi nous souhaitons entendre l'avis du Gouvernement sur ce sujet, d'autant que nous savons que M. le ministre de l'aménagement du territoire souhaite que le couple décentralisation-déconcentration fonctionne bien et qu'à ses yeux le pouvoir des collectivités locales est un élément important.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 107, 108 et 88 ?
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s 107 et 108, déposés par M. Fischer.
En effet, monsieur le sénateur, l'article 21 du projet de loi, tel qu'il est proposé par le Gouvernement, répond de manière plus satisfaisante à une participation équilibrée de l'Etat et des collectivités locales aux opérations de restructuration urbaine. Il n'y a pas lieu de créer une nouvelle catégorie d'établissement public local qui, tel qu'il est défini, n'aurait pas plus de compétences qu'un groupement d'intérêt public déjà institué par la loi.
Pour ce qui est de l'amendement n° 88, présenté par M. Franchis, je rappelle que les établissements publics de restructuration urbaine sont en général créés à la demande des communes pour faire face, avec l'appui de l'Etat, à des opérations lourdes dans les quartiers en grande difficulté. La commune exprime à ce moment-là son engagement sur des objectifs clairs de restructuration urbaine.
Pour la mise en oeuvre des opérations, l'avis simple de la commune est de bonne administration, car il est suffisant pour s'assurer que le conseil municipal exerce un suivi régulier des actions entreprises. Aller plus loin alourdirait les procédures, sans doute même au détriment de l'efficacité.
Le Gouvernement demande donc à M. Franchis de bien vouloir retirer son amendement. Il considère en effet que ces explications doivent le satisfaire.
M. le président. Monsieur Franchis, maintenez-vous l'amendement n° 88 ?
M. Serge Franchis. J'ai bien noté les observations qui ont été faites aussi bien par M. le rapporteur que par M. le ministre.
Selon moi, il peut y avoir une situation de blocage lorsque aucune structure intercommunale n'est constituée. Sinon, les dispositions de l'article L 321-1 du code de l'urbanisme et celles de mon amendement sont cohérentes.
Toutefois, pour les raisons qui viennent d'être indiquées, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 88 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 107, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 108, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 21.
M. Alain Richard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Richard.
M. Alain Richard. Notre collègue M. Franchis a été très conciliant en retirant son amendement. En effet, le dispositif qui résulte de l'article 21 permet de réaliser une opération d'urbanisme importante sur le territoire d'une commune contre le sentiment de son équipe municipale.
Par un simple avis, la commune ne pourra pas s'opposer à une opération et, à ce moment-là, les arguments de notre collègue M. Fischer, qui ne me convainquent pas entièrement sur d'autres plans, deviennent très forts : un organisme d'Etat dans lequel les administrateurs d'Etat sont majoritaires pourra prendre, en dépit de l'avis du conseil municipal, des décisions de transformation du territoire de cette commune sans que celle-ci puisse s'y opposer.
Par conséquent, ou bien on va très loin - étant l'élu depuis vingt ans d'un secteur d'agglomération nouvelle, je comprends cette problématique - on classe les opérations de restructuration urbaine en opérations d'intérêt national suivant un statut déterminé, avec une programmation et, malgré tout, d'un débat public.
Si ce n'est pas le cas, il y a, me semble-t-il, un déficit de légitimité démocratique. On laisse en effet un établissement public technicien transformer le cadre de vie d'une commune, même avec les meilleures intentions du monde, en désaccord avec l'équipe municipale représentative de cette commune.
La formule de l'avis conforme était une façon de répondre aux préoccupations de M. Fischer, influencé, me semble-t-il, par un précédent dans la région parisienne, qui est en fait un cas très particulier. En effet, je peux personnellement attester que l'on peut avoir un dialogue équilibré avec un établissement public d'aménagement.
Mais là, en ne suivant pas la proposition de Serge Franchis, en donnant, sans base démocratique, le dernier mot à l'établissement public, vous condamnez une commune.
S'il peut arriver qu'elle ait tort épisodiquement sur le fond, il n'en reste pas moins que la démocratie veut qu'il revienne aux élus de la population de trancher. Ne leur appartient-il pas en effet par la suite de gérer le territoire tel qu'il a été transformé par une telle opération ?
Du fait de l'absence d'avis conforme du conseil municipal, je ne peux pas donner mon accord sur cet article 21, qui est vraiment contraire au principe de décentralisation de l'urbanisme.
M. Guy Fischer. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Toujours préoccupés par le concret, nous voulons montrer que l'expérience justifie nos craintes telles que vient de les exprimer M. Richard.
Prenons le cas d'un établissement public de coopération intercommunale comme la communauté urbaine de Lyon. A l'occasion de l'élaboration du schéma directeur d'aménagement d'urbanisme et des POS, nous pouvons citer deux exemples très précis, à Vénissieux, de plusieurs dizaines d'hectares classés en sites stratégiques qui ont été bloqués par un zonage imposé par l'établissement public en total désaccord avec la collectivité territoriale.
C'est sur cette expérience que je me fondais pour vous proposer d'aller dans le sens de la réflexion menée tant par M. Franchis, que par M. Richard. Selon moi, le problème est bien réel.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21.
(L'article 21 est adopté.)
Articles 22 à 25