M. le président. Par amendement n° I-97, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le paragraphe II de l'article 194 du code général des impôts, les mots : "en vertu d'une décision de justice" sont supprimés. »
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. Il n'est pas normal d'avoir introduit une distorsion de traitement fiscal pour l'octroi de la demi-part supplémentaire de quotient familial selon que les personnes concernées perçoivent une pension alimentaire en vertu d'une décision de justice ou par accord amiable.
Tout parent élevant seul son enfant doit bénéficier du même traitement fiscal quel que soit son statut familial et la manière dont la pension alimentaire est versée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, s'agissant de la remise en cause d'une disposition qui a été adoptée l'année dernière, la commission des finances souhaite recueillir l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
Je rappelle que, par exception au principe général, les personnes qui vivent seules et qui supportent effectivement la charge de leurs enfants bénéficient d'une part entière de quotient familial au lieu d'une demi-part pour le premier d'entre eux.
Le fait qu'elles perçoivent une pension alimentaire fixée judiciairement pour l'entretien de leurs enfants ne fait pas obstacle à l'attribution de cet avantage de quotient familial. En effet, le législateur a estimé qu'il n'était pas possible de revenir sur les droits reconnus à ces personnes, qui sont souvent matériellement démunies et qui ont dû recourir à l'autorité judiciaire pour contraindre leur ancien conjoint au respect de l'obligation alimentaire qui lui incombe envers ses enfants.
Ces mêmes motifs ne s'appliquent pas au cas des contribuables qui perçoivent spontanément des subsides présumés correspondre à l'entretien des enfants dont ils assument la garde. Dès lors, il ne peut être envisagé d'accorder à ces contribuables le bénéfice de cette demi-part de quotien familial, sauf à dénaturer le dispositif institué l'an dernier.
J'ajoute que, en dehors du contrôle de l'autorité judiciare, certains contribuables pourraient être tentés d'effectuer des versements d'un montant très supérieur aux besoins de l'enfant afin de récupérer, sous forme de déduction de la pension alimentaire, le supplément d'impôt résultant de la perte de la demi-part supplémentaire.
Bien entendu, ce type de montage profiterait particulièrement aux contribuables les plus aisés, ce qui, j'en suis convaincu, n'est pas dans les intentions des auteurs de cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-97, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-123, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 3 de la loi de finances pour 1996 (loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995) est abrogé.
« II. - Le sixième alinéa de l'article 92 B du code général des impôts est ainsi rédigé :
« La limite mentionnée au premier alinéa est fixée à 50 000 francs au 1er janvier 1997. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement a pour objet de revenir sur une disposition défavorable aux couples non mariés en l'absence d'une révision globale de leur situation fiscale.
La discussion des deux dernières lois de finances a permis de constater une évolution surprenante de la position même de notre Haute Assemblée sur la question du quotient familial.
Nous avons tous souvenir que, lors de la discussion de la loi de finances pour 1995, par scrutin public, qui avait recueilli l'unanimité des membres de notre assemblée, nous avions rejeté sans hésitation un amendement de notre excellent collègue député M. Gantier, modifiant la règle de calcul du quotient familial pour un certain nombre de foyers fiscaux composés d'un adulte et d'au moins un enfant.
Cette disposition a pourtant été introduite dans le cadre de la loi de finances pour 1996. Elle est devenue l'article 3 du texte adopté et elle a conduit, de fait, à accroître sensiblement la pression fiscale pesant sur les ménages vivant en concubinage ou les foyers monoparentaux.
L'article 3 de la loi de finances pour 1996 est en quelque sorte une prime au mariage, mais aussi la reconnaissance d'un certain « ordre moral », justifié par un principe d'équité fiscale pour le moins discutable.
En effet, comment peut-on dire aujourd'hui que l'impôt sur le revenu était insuffisant pour les contribuables visés, alors que chacun sait que ces foyers fiscaux disposent le plus souvent de revenus modestes et que le poids relatif des charges fixes dans leur budget est plus important, toutes proportions gardées, que dans les foyers où il y a deux personnes adultes en âge de travailler ?
Qui était directement visé dans la procédure mise en place par l'article 3 de la loi de finances de 1996 ?
L'examen attentif des éléments statistiques fournis par la direction générale des impôts parle de lui-même. Notre pays comptait, en 1993, un peu plus de 1,7 million de foyers fiscaux comptant deux parts et constitués par un adulte célibataire ou divorcé et un enfant à charge. Un examen plus attentif de la situation souligne par ailleurs qu'un tiers de ces foyers sont aujourd'hui en situation de payer l'impôt sur le revenu.
Il est vrai que ces foyers fiscaux sont, pour l'essentiel, concentrés dans les tranches de revenu les plus modestes, puisque le nombre des foyers où le revenu par part était inférieur, en 1993, à 60 000 francs était très légèrement inférieur à 1 million, soit plus de 57 % des foyers concernés.
Le quotient familial est, nous le reconnaissons, la disposition fiscale conduisant à la plus importante dépense fiscale mais, à l'examen des faits, il n'est pas le seul motif de différence de traitement entre les ménages mariés et les ménages de célibataires ou de divorcés.
Notons, en effet, que l'article 3 de la loi de finances de 1996 a eu comme conséquence indirecte de modifier la participation de l'Etat au financement des exonérations d'impôt locaux, la variation du montant d'imposition des foyers fiscaux concernés au titre de l'impôt sur le revenu servant à moduler les sommes dues, en particulier au titre de la taxe d'habitation.
Nous ne disposons pas encore d'éléments d'appréciation de cette situation, et il faudra attendre la publication des éléments relatifs à l'imposition des revenus de 1995 pour y voir plus clair.
Tout au plus pouvons-nous constater que, si notre pays comptait, en 1993, un peu plus de 29,5 millions de contribuables potentiels à l'impôt sur le revenu, dont 14,9 millions étaient effectivement imposés, en 1995, les services du Trésor ont émis 16,2 millions d'articles d'imposition et que ce nombre ne cesse de progresser année après année.
Toujours est-il qu'en dernière instance rien ne justifie, ni sur le plan de l'équité fiscale ni sur le plan de la simple appréciation des revenus des contribuables, qu'au nom de ce que j'appelle un certain « ordre moral » quelque peu déplacé...
M. Emmanuel Hamel. Pourquoi « déplacé » ?
M. Paul Loridant. ... on établisse une fausse égalité entre les contribuables.
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous demande, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, de bien vouloir adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. M. Paul Loridant refait, s'il me permet l'expression, son « numéro » de l'année dernière. Utilisant une figure de dialectique bien connue, il tente de faire accroire que nous essayons de lui imposer un ordre moral. Mais, en réalité, c'est lui qui essaie de nous imposer son ordre moral puisque les solutions que nous préconisons sont des solutions de neutralité fiscale, pure et simple.
C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Même avis que la commission pour les mêmes raisons.
J'ajoute que, la disposition sur laquelle M. Loridant propose de revenir ayant été votée il y a à peine un an, il faut à tout le moins se donner un temps minimal pour juger ses effets.
Le Gouvernement est donc hostile à l'amendement n° I-123.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-123, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-126, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1 de l'article 6 du code général des impôts est complété par l'alinéa suivant :
« Les contribuables bénéficiant d'un certificat de concubinage, de vie maritale ou de vie en communauté sont soumis, à leur demande, à une déclaration et une imposition communes des revenus perçus par chacun d'entre eux. »
« II. - Le 3 de l'article 158 du même code est abrogé. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'adoption, lors de la discussion de la loi de finances de 1996, de l'article remettant en cause le principe d'application du quotient familial pour les couples non mariés ou pour les contribuables célibataires vivant avec un enfant à charge a rouvert le débat sur l'équilibre général de notre fiscalité en matière de traitement de la spécificité des situations familiales.
Aujourd'hui, plus du tiers des naissances enregistrées dans notre pays concerne des enfants naturels ou nés hors mariage. Il y a donc là une tendance que l'on peut qualifier de « lourde » de la démographie, qui correspond à une évolution sociologique plus profonde.
Or, dans l'état actuel des choses, cette situation n'est pas toujours prise en compte dans notre législation fiscale.
On observe, en revanche, qu'il n'en est pas de même pour bien d'autres domaines.
Ainsi, les organismes d'HLM attribuent des logements à des couples non mariés, sous la signature des deux personnes concernées.
De même l'administration de la sécurité sociale reconnaît-elle cette réalité, puisque les allocations de logement sont attribuées sur la présentation des ressources des deux adultes concernés, et la couverture maladie peut, dans certains cas, faire de l'un l'ayant droit de l'autre.
Il n'y a donc que notre administration fiscale qui ne reconnaisse pas encore ce fait. Ou plutôt elle le reconnaît trop bien puisqu'en matière de droits de succession, les couples non mariés sont soumis, en cas de décès de l'un, à un taux d'imposition autrement plus important que celui qui est appliqué aux couples mariés : on considère les personnes vivant en concubinage comme étant des étrangers l'un pour l'autre. La même inégalité existe d'ailleurs pour les pensions de réversion.
Il est donc largement temps de mettre un terme à cette exception en adoptant l'amendement n° I-123 que nous vous présentons et qui tend, en effet, à assimiler les formes nouvelles de vie commune que notre pays connaît de plus en plus à celle des couples mariés.
Il s'agit notamment de simplifier par là même le traitement d'un certain nombre de déclarations de revenus, le fait de déposer une déclaration commune limitant le nombre total des déclarations déposées.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission connaît bien le sujet qui vient d'être exposé par Mme Beaudeau.
Il nous semble qu'adopter un régime fiscal avant qu'un régime civil ne soit fixé serait tout à fait imprudent. En effet, le fiscal ne peut pas précéder le civil sur cette question, madame Beaudeau.
Je crois, mes chers collègues, qu'il faut avoir une réflexion responsable dans ce domaine. Selon les propos de Mme Beaudeau, les personnes qui vivent en concubinage forment souvent des familles ; le mot n'est pas souvent prononcé, et je le regrette. Il est donc important de savoir, pour ces familles, quels sont les droits et les devoirs que celles-ci veulent bien se fixer.
Par exemple, au sein de ces familles, le devoir de secours est-il souscrit par chacune des parties ? Le devoir d'assistance est-il souscrit ? Le devoir de fidélité l'est-il également ? La durée du couple a-t-elle été également fixée ?
Imaginez que nous prévoyions un régime fiscal alors que toutes ces modalités n'auraient pas été fixées préalablement par la loi. Il faut tout de même, sans parler d'ordre moral,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je n'ai pas parlé d'ordre moral !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... mais plus précisément dans un souci civil, madame Beaudeau, fixer préalablement toutes ces règles, faute de quoi il y aurait des optimisations fiscales par l'utilisation de la famille.
Cela me paraît totalement inimaginable. La commission des finances a souhaité entendre le Gouvernement pour le cas où il aurait un autre avis sur le sujet, mais, s'il repoussait cet amendement, j'ai mandat d'indiquer, au nom de la commission, que celle-ci y serait également défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Le Gouvernement partage tout à fait, comme la majorité de l'Assemblée nationale qui a refusé des amendements comparables, la position exprimée par M. le rapporteur général. En cette matière, en effet, le civil tient le fiscal en l'état. Or, selon notre droit civil, il ne paraît pas possible d'envisager un avantage pour les concubins par rapport aux contribuables mariés.
M. Emmanuel Hamel. Ce serait trop !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce n'est pas un avantage !
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Ce serait un avantage parce que les concubins auraient la possibilité d'opter pour un régime commun ou pour un traitement fiscal séparé, alors que cette possibilité d'option n'est pas ouverte à l'heure actuelle aux contribuables mariés.
Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-126, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-29, MM. Cabanel et Laffitte proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 156 du code général des impôts est complété par le paragraphe suivant :
« III. - A compter du 1er octobre 1997, de la contribution sociale généralisée à laquelle sont assujetties les personnes physiques visées à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-94, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les paragraphes 3°, 3° ter, 5°, 5° bis, 5° ter, 7° ter, 7° quater, 8° ter, 9° bis, 9° ter, 9° quater, 9° quinquies, 16°, 16° bis, 17°, 21°, 22° de l'article 157 du code général des impôts ainsi que les articles 163 bis AA, 163 bis B, 163 bis D, 163 quinquies B du même code sont supprimés.
« Pour l'imposition du total des produits visés au paragraphe précédent, il est appliqué un abattement à la base sur ces produits, annuel, de 10 000 francs pour une personne seule, de 20 000 francs pour un couple. »
Par amendement n° I-96, M. Masseret, Mme Berge-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 163 bis B du code général des impôts est abrogé. »
La parole est à M. Masseret, pour défendre ces deux amendements.
M. Jean-Pierre Masseret. L'amendement n° I-94 tend à introduire dans le champ du revenu imposable les revenus de l'épargne, à l'exception des intérêts du livret A.
Pourquoi une telle exception ? Parce que, traditionnellement, dans notre pays, nous considérons que le livret A est proposé à l'épargne modeste, celle des retraités, des plus faibles revenus. Par ailleurs, il sert au financement du logement social.
Je devine ce que M. Lambert va me répondre, lui qui a réfléchi tout le week-end à l'efficacité de la dépense fiscale, en faisant la liaison entre fiscalité et emploi : « Encore une imposition supplémentaire sur le capital, alors qu'on sait que depuis dix ans » - je dis bien depuis dix ans, ce qui met en cause des gouvernements que j'ai soutenus dans le passé - « l'imposition du travail s'est aggravée au bénéfice » - si j'ose dire - « de celle du capital ! » Il est peut-être temps de revenir à de plus justes proportions. C'est ce à quoi tend cet amendement.
Si l'on compare, monsieur Lambert, l'imposition du patrimoine dans notre pays à ce qu'elle est dans d'autres pays, notamment au Canada, aux Etats-Unis, au Japon, voire au Luxembourg, on s'aperçoit que la fiscalité française sur le patrimoine n'est pas particulièrement lourde. C'est donc un amendement de justice fiscale que j'ai défendu, monsieur le président.
Quant à l'amendement n° I-96, il tend à revenir sur les stock options, dont notre ancien collègue M. Arthuis s'était préoccupé quand il était au Sénat.
Ce dispositif est très avantageux pour ceux qui en bénéficient, puisqu'il leur permet de s'attribuer des compléments de ressources qui échappent à toute imposition fiscale et sociale.
S'il est vrai que toute peine mérite rémunération et que tout salaire peut être justifié par une activité, il y a quand même des bornes à ne pas franchir. Le système des stock options est un système dérogatoire du droit commun. Il serait donc juste d'y mettre un terme et de considérer que les rémunérations retirées d'un tel système sont assimilées, fiscalement et socialement, à un revenu ayant le caractère de salaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je remercie tout d'abord M. Masseret de vouloir faire gagner du temps au Sénat en proposant des réponses avant que je n'aie le temps de les prononcer ! (Sourires.)
Monsieur Masseret, le soupçon que vous portez sur moi, s'agissant de l'impôt sur le capital, est infondé, car je fais une différence entre un élément du capital qui n'a pas d'utilité sociale immédiate et un élément du capital qui peut en avoir une.
Je ne suis pas spécialiste du sujet, mais, dès lors que le capital est constitué, par exemple, d'actionnariat de proximité pour des petites et moyennes entreprises industrielles locales, j'ai tendance à penser qu'il est d'une utilité sociale évidente et qu'il doit être protégé.
En revanche, dès lors qu'il s'agit de l'épargne financière anonyme ou désincarnée, je suis, à titre personnel, beaucoup plus ouvert, tout en mesurant bien que l'Etat en a grand besoin lui-même pour financer son déficit.
Je qualifierai votre amendement d'intéressant, puisque vous allez dans le sens de la réduction, voulue par le Gouvernement, des niches fiscales. En théorie, son adoption contribuerait donc à un rééquilibrage, également voulu par le Gouvernement, de la taxation de l'épargne par rapport à celle du travail.
Néanmoins, croyez-vous que les gouvernements que vous avez soutenus et qui ont très régulièrement baissé la fiscalité sur l'épargne l'ont fait au nom des préoccupations d'équité fiscale que vous nous rappelez abondamment aujourd'hui ? Ces gouvernements l'ont fait parce qu'ils ne pouvaient pas faire autrement ! Dès lors qu'a été autorisée la libre circulation des capitaux, il a bien fallu prendre en compte une certaine harmonisation de la fiscalité de l'épargne, faute de quoi nous n'aurions pu ni financer nos déficits ni maintenir l'épargne dans notre pays.
Je veux donc bien accepter toutes les leçons de morale en matière d'équité fiscale, mais je me permets de rappeler à cette occasion que la baisse régulière de la fiscalité de l'épargne a été effectuée non pas en fonction de préoccupations d'équité, mais tout simplement parce que nous y étions condamnés !
Monsieur Masseret, si votre proposition était retenue par le Parlement, je crains qu'il ne s'ensuive éventuellement quelques problèmes pour maintenir notre niveau d'épargne nécessaire.
Par ailleurs, il ne serait pas inintéressant de savoir s'il s'agit d'un nouveau programme politique que vous proposez aux Français. Ces derniers seraient, à mon avis, fort intéressés par une telle nouvelle !
En tout état de cause, en l'état actuel des choses et avant de plus amples informations, la commission des finances est défavorable à cet amendement n° I-94.
S'agissant de l'amendement n° I-96 relatif aux stock options, la commission des finances du Sénat connaît bien le sujet. Son groupe de travail a même mis en lumière en 1995 les excès engendrés par ce dispositif, qui a été nettement corrigé.
En revanche, il est tout à fait inexact d'indiquer que ces revenus échappent à toute imposition fiscale et sociale.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. L'amendement n° I-94 de M. Masseret est un amendement intéressant, courageux, et qui vaudrait au Gouvernement, si c'était lui qui l'avait proposé, des critiques très dures sur son insensibilité envers les formes de l'épargne populaire autres que le livret A.
Je partage tout à fait les propos de M. le rapporteur général. Je rappelle que l'actuel Gouvernement a entrepris un certain rééquilibrage de l'imposition des revenus de l'épargne par rapport aux autres revenus. En particulier, à l'exception des livrets A et assimilés, tous les autres placements financiers sont désormais soumis à la cotisation pour le remboursement de la dette sociale depuis le 1er février de cette année et seront soumis à la CSG à compter du 1er janvier de l'année prochaine.
Par ailleurs, d'autres mesures ont été prises au cours des derniers mois, comme la suppression de l'abattement sur les revenus d'obligations, l'abaissement du seuil général de cession des valeurs mobilières à 200 000 francs en 1996 et à 100 000 francs en 1997, ou encore l'imposition au premier franc des gains de cession de parts ou d'actions d'OPCVM monétaires de capitalisation depuis le 1er janvier 1996.
Dans ces conditions, il ne me paraît pas opportun de réduire encore les avantages fiscaux qui sont accordés aux placements, effectués essentiellement par des personnes à revenus modestes, sur les livrets d'épargne populaire, les livrets jeune, les CODEVI, ou les plans d'épargne logement.
En ce qui concerne l'amendement n° I-96, le Gouvernement partage également l'avis de M. le rapporteur général.
Cet amendement vise à supprimer le système des options de souscriptions d'actions. En fait, ce système donnait lieu à un certain nombre d'abus.
La loi de finances de 1996 a aménagé ce régime de manière à supprimer ces abus. En outre, dans le cadre du vote de la loi de financement de la sécurité sociale, le Parlement vient d'adopter une nouvelle disposition relative au stock options qui permet d'assujettir à l'ensemble des cotisations sociales la totalité de l'avantage réalisé lors de la cession des titres, lorsque la cession intervient avant la fin de la durée d'indisponibilité de cinq ans.
Nous sommes donc parvenus, nous semble-t-il, à un certain équilibre en ce qui concerne le régime fiscal de ces options et il vaut mieux ne pas y toucher.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-94, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-96, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-98, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au premier alinéa du 2° de l'article 83 du code général des impôts, après les mots : "à titre obligatoire", il est inséré un membre de phrase ainsi rédigé : ", les cotisations de retraite versées à partir du 1er janvier 1997, qu'elles soient, ou non, à compter de cette date, immédiatement constitutives d'un droit certain au profit des intéressés". »
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. Il est proposé d'imposer à l'impôt sur le revenu, sous couvert des limites de déductibilité existantes, les cotisations de régimes de retraite dits « à prestations définies », qui profitent aux salariés titulaires des revenus les plus élevés.
Les cotisations servant à financer des couvertures sociales complémentaires sont déductibles de l'assiette de l'impôt sur le revenu dans des limites élevées. Ces cotisations ne sont considérées comme des compléments du salaire, et donc réintégrées dans l'assiette de l'impôt sur le revenu, que pour les titulaires de revenus substantiels, correspondant à un salaire mensuel d'environ 70 000 francs.
Afin d'échapper à toute réintégration d'assiette, un certain nombre de régimes de retraite « à prestations définies » ont été mis en place aux conditions suivantes : le salarié doit être présent dans l'entreprise lors de son départ à la retraite ; le droit à prestation est subordonné à une présence dans l'entreprise qui est généralement de dix à vingt ans.
Le service de la législation fiscale a admis, depuis 1977, que, dès lors que ces conditions étaient remplies, c'est-à-dire que le droit effectif à retraite n'était définitivement constitué qu'au moment de la liquidation de la prestation, la cotisation de l'employeur ne constituait pas un complément du salaire et échappait totalement à l'impôt sur le revenu.
Ce régime est tout à fait exorbitant du droit commun. Il conviendrait donc d'y mettre un terme et de se rapprocher de certaines décisions de jurisprudence, notamment des arrêts rendus - l'un en 1994, deux autres en 1995 - par la chambre sociale de la Cour de cassation.
Par ailleurs, je rappelle que cet amendement a déjà été présenté l'an dernier. Alors, monsieur le ministre, vous nous aviez indiqué qu'il était préférable d'en repousser l'examen à la discussion de la réforme de l'impôt sur le revenu. Or nous voici justement arrivés à la discussion de cette réforme, qui constitue le fer de lance du projet de loi de finances pour l'année 1997. Mon amendement aura-t-il donc cette année un meilleur sort et trouvera-t-il sa juste place dans la réforme engagée ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La discrimination qu'a évoquée M. Masseret résulte, selon la commission des finances, d'une interprétation de l'administration fiscale dont les bases juridiques semblent fragiles.
Toutefois, la commission des finances s'est demandé s'il ne serait pas plus judicieux de trancher cette question délicate à l'occasion de l'examen de la proposition de loi sur l'épargne-retraite. Ce texte est actuellement en discussion à l'Assemblée nationale et il viendra prochainement devant nous. Ne devrions-nous pas profiter de cette occasion pour reconsidérer l'ensemble du régime fiscal des retraites supplémentaires ? C'est la question que nous posons au Gouvernement.
Compte tenu des réponses que M. le ministre sera amené à donner, M. Masseret pourra peut-être retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. M. le rapporteur général parle d'or. Effectivement, monsieur Masseret, si cette question, qui est plus technique que politique, doit être examinée maintenant, c'est non pas aujourd'hui dans la discussion du projet de loi de finances pour 1997, mais dans quelques jours, dans le cadre de l'examen de la proposition de loi sur l'épargne-retraite.
Il est vrai que la Cour de cassation, dans sa jurisprudence, a introduit une novation en indiquant que les versements des régimes dits « à prestations définies » devaient bien être pris en compte pour l'appréciation du plafond de déduction des cotisations de retraite complémentaire et supplémentaire.
Nous pouvons donc être amenés à examiner l'opportunité de transposer, sur le plan fiscal, cette règle qui, pour l'instant, n'est appliquée que sur le plan social.
Mais la proposition concrète que vous faites actuellement, monsieur Masseret, trouverait davantage sa place dans le cadre du débat qui doit intervenir ici, dans quelques jours.
Sous le bénéfice de ces informations, peut-être pourriez-vous, monsieur le sénateur, retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Masseret, entendez-vous l'appel du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Masseret. Mon intention initiale n'était pas d'entendre l'appel du Gouvernement puisque, de fil en aiguille, l'examen de cet amendement est repoussé sans cesse. J'ai néanmoins pris acte des propos de M. le ministre et j'accède à son voeu sachant que ce débat interviendra avant le 31 décembre de cette année. Je pourrai donc de nouveau soumettre au Sénat cet amendement, en souhaitant alors être sérieusement écouté par le Gouvernement.
M. Emmanuel Hamel. Vous êtes toujours écouté !
M. Jean-Pierre Masseret. J'aimerais être entendu !
M. le président. L'amendement n° I-98 est retiré.
Par amendement n° I-124, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I - Dans la première phrase du 3° de l'article 83 du code général des impôts, les mots : "10 % du montant de ce revenu" sont remplacés par les mots : "15 % du montant du revenu par personne".
« II - Les dispositions des articles 158 bis , 158 ter , et 209 bis du code général des impôts sont abrogées. »
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Le barème de l'impôt sur le revenu a, entre autres caractéristiques, celle d'être quelque peu corrigé par un certain nombre de dispositions qui ont tendance soit à modifier ses effets - nous l'avons vu avec la décote - soit à modifier son assiette.
Quant à la déduction de 10 % sur les frais professionnels des salariés, il s'agit d'une disposition inscrite de longue date dans notre législation fiscale, depuis aussi longtemps qu'existe l'impôt sur le revenu, ou, à tout le moins, l'impôt cédulaire sur les salaires.
Cette disposition spécifique de notre législation a donc une large application : plus de 19 millions de salariés et plus de 10,4 millions de retraités bénéficient d'un traitement analogue. Elle est, par ailleurs, d'un coût relativement modeste : il s'élève, selon les données en notre possession, à un peu moins de 14 milliards de francs pour les pensions et retraites, soit une baisse de l'impôt sur le revenu à peine supérieure à 1 000 francs par contribuable concerné.
Compte tenu de la structure de l'impôt sur le revenu, on peut estimer que les 10 % appliqués aux salaires et traitements réduisent d'un peu plus de 330 milliards de francs l'assiette de l'impôt sur le revenu et qu'il convient donc ensuite d'appliquer à cette réduction d'assiette le taux moyen de prélèvement pour obtenir la moins-value fiscale constatée.
Pour autant, cette situation propre au traitement fiscal des revenus du travail appelle plusieurs observations.
En effet, le produit de l'impôt sur le revenu est aujourd'hui assez fortement affecté par le recours croissant au système des frais réels, qui peut être choisi sur option en lieu et place des 10 %.
Plusieurs facteurs favorisent une telle évolution.
Les temps ont en effet bien changé en matière sociale et économique et l'accomplissement d'un travail salarié revêt désormais des formes nouvelles qui justifient d'indispensables évolutions en matière fiscale.
Il y a en effet belle lurette que le lieu de travail s'est éloigné du lieu de résidence et que la réalité des zones urbaines et rurales s'est profondément transformée.
En outre, la pression du marché immobilier éloigne de plus en plus les couches modestes, voire les couches moyennes, dans un certain nombre de villes, notamment à Paris et dans les plus grandes métropoles de province, de leur lieu d'activité et engendre de nouveaux frais pour les salariés et leurs familles.
Le recours à l'automobile, même si nous pouvons le déplorer, est de plus en plus fréquent, comme en atteste la croissance régulière du trafic sur le périphérique parisien ou la réalisation de nouvelles liaisons routières payantes en province.
De nombreux salariés sont, par ailleurs, soumis à des charges supplémentaires de repas en raison de l'absence de restauration collective dans un certain nombre d'entreprises, en particulier dans les petites entreprises, malgré les efforts qui ont pu être accomplis dans l'aménagement de certaines zones d'activité, mais aussi parce que des repas sont pris « sur la route ».
Cette situation concerne donc une part importante des salariés de notre pays - environ 18 millions sur 19 millions - et doit être prise en compte.
Nous devons donc y réfléchir de nouveau tout en ne perdant pas de vue que l'adoption d'une telle disposition consiste, dans les faits, à réduire d'environ 165 milliards de francs l'assiette de l'impôt au titre des salaires.
Elle a cependant des objectifs tout à fait honorables, notamment celui de rendre un peu de pouvoir d'achat aux salariés, ce qui ne serait pas inutile.
Dans les faits, on peut, en effet, estimer que le produit de cette déduction complémentaire dégagera environ 15 milliards de francs de ressources nouvelles pour les salariés.
Cette disposition est pour partie gagée par la réduction prévisible des déclarations sollicitant l'application du régime des frais réels, mais également par la réduction du volume d'assiette soustrait par l'application de l'abattement de 20 %.
En effet, sur une base de 3 300 milliards de francs environ de revenus salariaux, appliquer une déduction de 15 % comme nous le proposons aboutit à une correction de 495 milliards de francs environ.
Dès lors, la suppression des 20 %, au lieu de représenter une réduction d'assiette de près de 600 milliards de francs, n'en représente plus qu'une de 560 milliards de francs.
En termes de salaire net imposable, on obtient finalement un pourcentage de 68 % au lieu de 72 % actuellement, pour le cas général.
S'agissant du gage de la mesure, nous entendons affirmer la priorité affichée par la loi de finances et la réforme de l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire le souci de rééquilibrer taxation du capital et taxation du travail, en supprimant les dispositions relatives à l'avoir fiscal, qui, je le rappelle une fois de plus, n'existent pas dans certains pays industrialisés à économie libérale.
Pour toutes ces raisons, je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, et ce pour deux raisons.
La première est une raison que je qualifierai de principe : à l'heure actuelle, tous les salariés ont la possibilité d'opter pour le régime de la déduction des frais réels. Or on constate depuis quelques années que l'utilisation de cette option se développe de façon considérable. Elle permet à certains salariés de bénéficier d'une réduction de leurs revenus imposables supérieure à 10 %, voire à 15 %.
Deuxième raison : cette mesure coûterait 15 milliards de francs environ et aurait pour conséquence l'apparition de 428 000 non-imposables supplémentaires.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-124, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-239, MM. Laffitte et Cabanel proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'exonération de l'impôt sur le revenu des personnes physiques est sans conséquence sur l'assujettissement à la redevance audiovisuelle définie par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986. Un décret pris en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application de cet article. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° I-93, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le taux du prélèvement sur les produits de placements à revenu fixe prévu à l'article 125 A du code général des impôts est porté à 18 % pour les produits des titres de créances négociables et de titres participatifs, des titres de créances négociables sur un marché réglementé, des bons du Trésor et assimilés émis dépuis le 1er janvier 1995, des parts émises par les fonds communs de créances. »
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. Il s'agit tout simplement, par cet amendement, de taxer plus lourdement les revenus du capital en faisant passer de 15 % à 18 % le taux de prélèvement libératoire applicable aux placements financiers.
Dans la mesure où ce sont des titulaires de hauts revenus qui bénéficient de ce dispositif, cet amendement vise, en fait, à réduire les inégalités de richesse dans ce pays.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je voudrais faire remarquer très cordialement à M. Masseret que, lorsqu'il parle d'imposition sur le capital, c'est aussi une imposition sur l'épargne qu'il désigne. Or, au cours des années antérieures, en particulier quand il soutenait les gouvernements socialistes, il a très régulièrement procédé à la diminution de l'imposition sur l'épargne. C'est un retournement total de stratégie, dont je prends acte.
En tout état de cause, mes chers collègues, faut-il aujourd'hui imposer davantage l'épargne en France ? C'est ce que suggère M. Masseret, mais la commission des finances ne le pense pas et elle a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Même avis, pour les mêmes motifs, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-93, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-95, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le taux prévu à l'article 200 A du code général des impôts est porté à 20 %. »
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. Dans le même esprit que précédemment, cet amendement tend à faire passer de 16 % à 20 % le taux forfaitaire fiscal applicable aux gains nets en capital réalisés à l'occasion de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières et droits sociaux.
On sait qu'à compter du 1er janvier 1997 le taux forfaitaire applicable aux plus-values sera majoré de un point pour passer ainsi au total, en prenant en compte les contributions sociales additionnelles, de 19,9 % à 20,9 %.
Il s'agit, par cet amendement, de réduire de façon progressive la portée du régime dérogatoire en matière de plus-values et de rapprocher ce système du barème de l'impôt progressif, dans un souci évident de justice fiscale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-95, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-99, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa (2) du paragraphe II de l'article 163 quinquies D du code général des impôts est complété in fine par la phrase suivante : "Les dividendes dont le versement ouvre droit aux dispositions de l'article 158 bis ne peuvent également figurer dans ce plan". »
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. Je me demande si j'ai bien fait de venir ce matin, monsieur le président, car les amendements que je défends n'ont pas beaucoup de succès ! (Sourires.)
M. le président. Ne vous découragez pas, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Pierre Masseret. Croyez-bien, monsieur le président, que je ne vous décevrai pas à cet égard ! (Nouveaux sourires.)
L'amendement n° I-99 se situe toujours dans la même logique puisqu'il tend à supprimer un double avantage.
En effet, actuellement, lorsque des dividendes sont perçus par un titulaire de valeurs mobilières, ce dernier bénéficie de l'avoir fiscal ; c'est un premier avantage. Mais il peut, en outre, placer ses dividendes dans un PEA, un plan d'épargne en actions, ce qui lui permettra de bénéficier une deuxième fois de l'avoir fiscal.
Nous proposons donc de mettre fin à ce double avantage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a souhaité recueillir l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, car celui-ci viderait en fait de tout intérêt le plan d'épargne en actions, qui nous apparaît comme un dispositif très utile pour développer l'acquisition d'actions, notamment par l'épargne populaire.
En revanche, le Gouvernement est tout à fait sensible au fait que le PEA a donné lieu à certains abus, consistant à acquérir ou à souscrire des titres non cotés à leur valeur nominale ou à une valeur de convenance très inférieure à leur valeur économique, de sorte que les dividendes versés sont disproportionnés par rapport au capital investi dans le PEA.
Mais c'est d'un autre sujet que traite l'amendement n° I-99. Le Gouvernement y est défavorable dans la mesure où il conduirait à la disparition des PEA. En revanche, il présentera, après l'article 9 bis, un amendement de moralisation des PEA. (Ah ! sur les travées socialistes.)
M. Emmanuel Hamel. Nous sommes pour la morale !
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-99, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-125, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans l'article 150 J du code général des impôts, les mots : "deux ans" sont remplacés par les mots : "cinq ans".
« II. - Dans l'article 150 M du code général des impôts, les mots : "deux ans" sont remplacés par les mots : "cinq ans". »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement vise à revenir, en partie, sur la taxation des plus-values immobilières.
Une véritable réforme de nos prélèvements obligatoires doit passer par une analyse aussi fine que possible de la situation de chaque catégorie de revenu au regard de notre principal impôt progressif, l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
L'assiette de cet impôt est très largement composée aujourd'hui par des revenus du travail ou des revenus de transfert qui sont, pour l'essentiel, des revenus salariaux différés. Pour le reste, il s'agit de revenus d'activité - bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux - qui ne sont représentatifs que d'un solde économique propre à chaque exploitant individuel, tandis que les revenus du capital et de la propriété sont, la plupart du temps, imposés uniquement sur option au barème progressif.
L'option du prélèvement libératoire est évidemment exercée lorsque le taux de celui-ci est inférieur au taux marginal d'effort fiscal résultant de l'application du barème de l'impôt sur le revenu.
Le taux d'imposition supporté par les plus-values de long terme est largement inférieur, même en y incluant les prélèvements sociaux, au taux maximal de prélèvement constaté au barème progressif. Il est en effet, aujourd'hui, de 19,9 %, soit près de la moitié du taux maximal de prélèvement constaté.
Le régime d'imposition spécifique des plus-values est donc largement favorable aux détenteurs de biens susceptibles d'en bénéficier. Il est spectaculairement favorable pour les plus-values financières, mais ce n'est pas ici le sujet. Il est également, dans le contexte actuel, particulièrement favorable aux détenteurs de biens immobiliers.
Rappelons que la raison d'être du régime d'imposition des plus-values est, dans l'esprit de la loi de 1976, de neutraliser les effets de l'inflation ; à l'époque, celle-ci était particulièrement forte.
Le taux de correction de la plus-value, établi par l'article 150 M du code général des impôts, est aujourd'hui de 5 % et vient s'ajouter, dans notre arsenal fiscal, aux dispositifs d'amortissement des investissements immobiliers institués par M. Périssol, ministre délégué au logement.
Or, depuis plusieurs années, le taux d'inflation se situe autour de 2 %, tandis que l'indice du coût de la construction, qui pourrait être objectivement retenu dans le calcul des plus-values immobilières, ne connaît qu'une progression erratique, du fait de la crise du secteur immobilier. Ainsi, le dernier indice connu, celui du deuxième trimestre de 1995, est de 1 023, alors qu'il était de 1 022 au premier trimestre de 1993.
Rien, dans les faits, ne justifie donc le maintien de dispositions particulièrement favorables aux détenteurs d'un patrimoine immobilier. C'est pourquoi nous proposons d'accroître le rendement de l'impôt sur le revenu en allongeant, compte tenu de la situation objective que je viens d'évoquer, la durée normale de détention des biens immobiliers susceptibles de permettre l'application du régime spécifique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La proposition de M. Loridant n'est pas une bonne idée dans la mesure où nous tentons, y compris par des incitations fiscales qui peuvent coûter relativement cher, d'inciter les Français à réinvestir dans le logement, car ils sont insuffisamment nombreux à le faire. Or la proposition de M. Loridant aurait pour effet de pénaliser ceux qui veulent, en France, investir dans le logement.
C'est la raison pour laquelle l'avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-125, repoussé par la commission et le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2 bis