M. le président. La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse, en l'absence du ministre du travail et des affaires sociales et eu égard à l'importance du problème soulevé, à M. le Premier ministre.
Notre pays compte, monsieur le Premier ministre, 3 100 800 chômeurs selon la méthode de calcul restrictive adoptée par votre gouvernement en août 1995, 3 228 000 selon la définition du Bureau international du travail et 3 450 600 si l'on tient compte, comme on devrait le faire, des 350 700 personnes qui sont inscrites à l'Agence nationale pour l'emploi et qui ont travaillé plus de soixante-dix-huit heures dans le mois.
M. Josselin de Rohan. C'est votre héritage !
M. Henri Weber. Mais quel que soit le mode de calcul retenu, le chômage, nous le savons bien, a fortement augmenté au cours de l'année écoulée puisque son taux de progression se situe entre 5,3 et 6,8 %, selon les modes de calcul.
M. Jacques Mahéas. C'est dramatique !
M. Henri Weber. Or, ces chômeurs toujours plus nombreux sont de plus en plus mal indemnisés. Parmi les chômeurs indemnisés qui touchent en effet moins de 3 000 francs par mois et 82 %, la moitié touchent moins de 5 000 francs par mois. Enfin, 43 % des demandeurs d'emploi ne reçoivent aucune allocation et, parmi eux, 550 000 jeunes de moins de vingt-cinq ans et de nombreuses femmes.
Dans le même temps, comme l'a rappelé M. Fischer, l'UNEDIC va dégager cette année un excédent de 11 milliards de francs, du fait de l'application de l'allocation unique dégressive, qui réduit de 17 % tous les quatre mois le montant de l'indemnisation, et du durcissement des conditions d'entrée dans le système de l'assurance chômage.
Cet excédent considérable, le CNPF souhaite l'utiliser principalement pour réduire les cotisations patronales à l'UNEDIC.
M. Jacques Mahéas. Tu parles !
M. Henri Weber. Les syndicats exigent au contraire, à juste titre, qu'il serve à mieux indemniser les chômeurs et à aider la création d'emplois.
En cas d'échec de la négociation en cours, vous le savez bien, monsieur le Premier ministre, il reviendra à l'Etat de traiter ce dossier,...
M. Gérard Delfau. Bien sûr !
M. Henri Weber. ... qui le concerne au premier chef.
Que comptez-vous faire, monsieur le Premier ministre, pour réformer notre système d'assurance chômage, qui, du fait de l'essor du travail précaire, laisse de plus en plus de personnes démunies face aux licenciements et au manque d'emplois ? Que comptez-vous faire pour inciter le CNPF à tenir compte des revendications légitimes des demandeurs d'emploi et de l'intérêt de notre économie nationale ? (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
M. Jacques Mahéas. Cela n'intéresse pas le Premier ministre ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. Monsieur le sénateur, je suis un peu désolée mais c'est une femme, ministre délégué pour l'emploi, qui va répondre à votre question. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Claude Estier. Quel luxe de précaution !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Comme votre question était posée à M. Barrot, je vais vous apporter la réponse que M. Barrot aurait pu vous faire, à savoir que, quand le chômage augmente, c'est la faute du Gouvernement, et quand le chômage baisse, c'est la faute des chiffres ! (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. René Rouquet. Ne vous énervez pas !
M. Jacques Mahéas. On ne vous a pas agressée !
M. Bernard Piras. Du calme !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. La période actuelle nécessite un traitement un peu plus sérieux des problèmes !
Le Gouvernement, depuis son installation, voilà dix-huit mois, s'est donné comme priorité la lutte pour l'emploi.
M. Jacques Mahéas. C'est raté !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Aujourd'hui, des négociations se déroulent au sein de l'UNEDIC. J'ai déjà répondu à M. Fischer tout à l'heure...
Mme Hélène Luc. Non, vous n'avez pas répondu à M. Fischer !
M. René Rouquet. Vous lui avez bien mal répondu !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. ... que si l'UNEDIC, qui est entre les mains des partenaires sociaux, présente actuellement une situation excédentaire, c'est notamment parce que l'Etat, entre 1993 et 1995, a subventionné cet organisme, pour un montant total de 20 milliards de francs. En 1995, il a repris une partie de sa dette, soit 10 milliards de francs.
Il est donc tout à fait injuste de vouloir faire croire que les pouvoirs publics n'apportent pas leur concours aux chômeurs indemnisés.
S'agissant des autres chômeurs, je rappellerai que la collectivité nationale verse l'allocation spécifique de solidarité à quelque 500 000 chômeurs, pour un total de 7 milliards de francs, ainsi que le RMI, qui représente 22 milliards de francs.
Cela n'exclut pas, bien évidemment, comme je le disais tout à l'heure à M. Fischer, certaines situations préoccupantes.
En ce qui concerne les chômeurs isolés et les jeunes, notre priorité est qu'ils retrouvent un emploi nous faisons donc en sorte que tous les partenariats se mobilisent, notamment en direction des jeunes, et le Gouvernement, pour sa part, assume sa responsabilité.
L'Etat doit-il intervenir aujourd'hui dans la négociation entre les partenaires sociaux ? Non, monsieur le sénateur !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas la question !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Nous pouvons, à mon avis, faire confiance à la capacité de négociation des partenaires sociaux, qu'il s'agisse du cadre patronal ou du cadre salarié. Ils ont en effet su faire preuve de responsabilité. Je pense donc que le Gouvernement peut avoir confiance dans leur capacité à apporter des solutions, voire des ajustements par rapport aux dispositifs existants.
Par conséquent, mesdames, messieurs les sénateurs, laissons les partenaires sociaux discuter.
M. Bernard Piras. Et après ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Il sera temps pour le Gouvernement d'intervenir par la suite si cela se révélait nécessaire. Mais, je le répète, ces représentants ont été capables de prendre leurs responsabilités dans des périodes difficiles. Il faut donc leur laisser le soin de négocier. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certains bancs du RDSE.)
MM. Michel Dreyfus-Schmidt et Bernard Piras. Ce n'est pas la question !

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