M. le président. « Art. 62. - I. - L'article 199 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les dispositions actuelles constituent le I ;
« 2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux intérêts afférents aux prêts contractés pour la construction ou l'acquisition de logements neufs à compter du 1er janvier 1997 et aux dépenses de ravalement payées à compter de la même date. Pour les autres logements, ces dispositions ne s'appliquent pas aux intérêts afférents aux prêts contractés à compter du 1er janvier 1998. »
« II. - Au quatrième alinéa de l'article 150 H du code général des impôts, après les mots : "Des intérêts des emprunts contractés", sont insérés les mots : "avant le 1er janvier 1997".
« III. - Le quatrième alinéa de l'article 199 quater C, la dernière phrase du premier alinéa de l'article 199 quater D et le sixième alinéa de l'article 199 quater E du code général des impôts sont ainsi rédigés :
« Les dispositions du 5 du I de l'article 197 sont applicables. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-162, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés, proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° II-214, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi le II de l'article 62 :
« II. - Le onzième alinéa de l'article 150 H du code général des impôts est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les limites prévues au a du 1° du I de l'article 199 sexies , des intérêts des emprunts contractés dans les conditions prévues au II du même article pour l'acquisition d'une résidence secondaire ; ».
Par amendement n° II-196 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de compléter l'article 62 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Avant le 31 décembre 1997, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le financement aidé de l'accession à la propriété. Ce rapport s'attachera à mettre en évidence la pertinence économique des différents dispositifs existants, notamment au regard des niveaux de ressources des ménages accédant à la propriété. Il comparera l'efficacité de l'avance sans intérêt prévue par l'article R. 317-1 du code de la construction et de l'habitation avec celle de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 sexies du code général des impôts. »
La parole est à M. Régnault, pour défendre l'amendement n° II-162.
M. René Régnault. Il convient de revenir sur la mesure de suppression de la réduction d'impôt pour intérêts d'emprunt.
En effet, cet avantage, dont profitent près de 3 millions de nos concitoyens - ce qui n'est pas rien - constitue pour les contribuables disposant de revenus moyens - 78 % des acquéreurs ont un revenu mensuel inférieur à 15 000 francs - un facteur décisif dans leur décision d'acquérir un logement principal. Or nous avons vu, avant la suspension de la séance, que le Sénat se préoccupait de ceux dont le revenu est effectivement inférieur à ces 15 000 francs de revenu mensuel.
Il est par ailleurs inacceptable que le Gouvernement cherche à réaliser des économies sur ses dépenses fiscales en supprimant cette réduction, alors qu'il a renforcé lui-même les avantages fiscaux dont profitent les investisseurs immobiliers. C'était il y a quelques mois seulement !
Il convient donc de revenir sur cette mesure, même si sa portée a d'ores et déjà été considérablement réduite depuis l'examen du présent projet de loi de finances par l'Assemblée nationale.
Il va sans dire qu'au moment où l'on constate l'intérêt porté par nos concitoyens à leur logement, notamment à leur logement principal, et alors que les entreprises du secteur sont particulièrement aux abois, la mesure qui vous est proposée doit recueillir l'assentiment de la Haute Assemblée, car elle est de nature à relancer un secteur de l'économie, et donc à créer des emplois.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre les amendements n°s II-214 et II-196 rectifié et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° II-162.
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'amendement n° II-214, tout d'abord, est un amendement de coordination, qui permet de maintenir le droit existant et qui tire les conséquences de la mesure adoptée par l'Assemblée nationale qui a pour effet de différer d'un an la suppression de la réduction d'impôt au titre des intérêts d'emprunt.
Quant à l'amendement n° II-196 rectifié, il a une tout autre dimension, et je souhaite retenir un instant l'attention du Gouvernement.
J'aurais souhaité, monsieur le ministre, si j'en avais eu le pouvoir, proposer que le prêt à taux zéro soit reconduit dans les conditions actuelles pour une année supplémentaire, car c'est la bonne réponse aux besoins existants du logement.
Nous avons cet après-midi insisté sur la nécessité de ne pas considérer que le seul logement ancien. La chaîne du logement est un tout et les dispositifs puissants qui ont été mis au service du logement neuf créent une discrimination très défavorable au logement ancien et risquent de briser cette chaîne dont la cohésion est indispensable.
Je propose donc, par cet amendement, au Gouvernement de nous remettre un rapport qui mette en évidence la pertinence des différents dispositifs existants au regard des niveaux de ressources des ménages accédant à la propriété.
Il faut dire que nous sommes dans une situation un peu paradoxale. Actuellement, nous encourageons à acquérir un logement neuf des ménages dont les conditions de ressources justifieraient plutôt qu'ils achètent un logement ancien et, inversement, nous encourageons à acquérir un logement ancien des ménages qui auraient les moyens d'acheter du neuf.
Bref ! la situation n'est pas satisfaisante. Elle induit un parcours résidentiel inversé et elle créée des comportements contraires à l'intérêt général, et à l'intérêt du logement en particulier. En effet, on incite à la construction de logements neufs bon marché, qui sont, hélas ! appelés à se décoter et non à se valoriser, de sorte que, une fois qu'ils seront anciens, ils ne seront plus recherchés par les ménages plus aisés.
La solution serait de maintenir au moins pour une année supplémentaire le dispositif qui avait été accepté par le Premier ministre en janvier dernier et qui visait à accorder le prêt à taux zéro sous quotité de travaux-planchers de 20 %.
Monsieur le ministre, je souhaite vraiment que cette proposition retienne votre attention.
Vous m'objecterez sans doute l'obstacle du coût budgétaire d'une telle mesure, qui, en effet, ne doit pas être négligé. Cet obstacle pourrait, à nos yeux, être franchi moyennant un raccourcissement, modéré certes, des délais de remboursement, qui sont actuellement très longs pour les ménages, ainsi que par une plus grande souplesse dans les durées d'emprunt pour tenir compte des souhaits desdits ménages.
Si le coût budgétaire ne doit donc pas être exagéré il faut également tenir compte du transfert de certaines opérations du neuf vers l'ancien et d'un coût moyen des opérations probablement inférieur.
Sincèrement, monsieur le ministre, je ne voudrais pas avoir l'impression de « radoter » sur la question du logement ancien mais si, véritablement, le Gouvernement tardait à nous entendre, il le regretterait lui-même, car il serait conduit dans les mois à venir, à l'occasion d'un autre texte, un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, par exemple, à venir lui-même nous proposer un soutien au logement ancien. Ce serait la pire des erreurs, car nous savons tous le temps qu'il faut pour réamorcer un marché.
Monsieur le ministre, le marché du logement ancien court un réel danger, qui est lié tout à la fois au traitement de faveur dont jouit le logement neuf et à l'expiration au 31 décembre prochain de toutes les mesures qui le soutiennent. Je crois vraiment qu'il y a ici pour le Gouvernement une opportunité de proroger le dispositif du prêt à taux zéro pour une année supplémentaire.
En ce qui concerne l'amendement n° II-162, j'ai suffisamment dit tout à l'heure à quel point le prêt à taux zéro était à nos yeux un outil pertinent d'accession sociale à la propriété pour que chacun ait compris que l'avis de la commission était défavorable.
M. René Régnault. Il ne faut pas opposer le neuf et l'ancien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-162, II-214 et II-196 rectifié ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° II-162, qui tend à supprimer l'article 62.
Le Gouvernement a souhaité, en effet, proposer au Parlement de mettre fin à la réduction d'impôt pour intérêts d'emprunt souscrit pour l'acquisition ou les grosses réparations de l'habitation principale à compter du 1er janvier 1997. Nous avons en effet constaté que la réussite du prêt à taux zéro était éclatante puisque, en un an, nous avons « placé », si je puis dire, près de 130 000 prêts à taux zéro, alors que, je vous le rappelle, l'objectif était de 10 000 prêts par mois. Compte tenu de ce succès et de la baisse des taux d'intérêt afférents aux prêts immobiliers de plus d'un point en moyenne depuis septembre 1995, soit une diminution de plus de 5 % du coût d'un emprunt immobilier sur quinze ans - l'effet incitatif qu'avait la réduction d'impôt pour intérêts d'emprunt est fortement amoindri. Le Gouvernement propose donc de la supprimer. En revanche, il propose, sur une suggestion de l'Assemblée nationale, de la maintenir pour un an au titre de l'acquisition des seuls logements anciens.
Nous avons le sentiment qu'avec la baisse des taux d'intérêt, avec le prêt à taux zéro, avec la disposition qui permet de déduire 20 % du montant des travaux de grosses réparations, dans la limite de 40 000 francs, nous avons désormais un dispositif mieux adapté à la situation actuelle du marché du logement.
Pour le reste, je suis bien entendu favorable à l'amendement de coordination n° II-214 ainsi qu'à l'amendement n° II-196 rectifié. A cet égard, je voudrais dire à M. le rapporteur général que, au-delà de cet amendement, je comprends le message qu'il martèle, et qu'il a raison de marteler.
Il a en effet raison de nous rappeler que, pour une famille ou un particulier qui veut se loger, le marché du logement est un, et qu'à trop concentrer les mécanismes d'aide sur la construction neuve, en oubliant le logement ancien, on fausse les mécanismes du marché et on peut arriver, à la limite, à des contradictions du type de celles qu'il évoquait : des ménages qui seraient prêts à se loger dans l'ancien seraient incités à acheter dans le neuf, et réciproquement.
C'est d'ailleurs pourquoi le Gouvernement a accepté un amendement déposé à l'Assemblée nationale. Et tout à l'heure, le Sénat, dans sa sagesse, et contre l'avis du Gouvernement, a adopté un amendement sur l'imposition des revenus fonciers qui va dans le sens souhaité par M. le rapporteur général.
Je suis tout à fait d'accord pour retenir l'amendement n° II-196 rectifié et, au-delà de son libellé, pour réfléchir dès maintenant à la situation globale du marché du logement ; il nous faut effectivement agir à temps, afin de ne pas laisser des phénomènes anti-économiques, et donc, s'agissant du logement, antisociaux, se produire sur ce marché.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-162, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-214.
M. René Régnault. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Régnault.
M. René Régnault. Cet amendement ne manque pas d'intérêt, pourtant il m'intrigue.
Tout d'abord, monsieur le rapporteur général, je me sens un peu mal à l'aise car vous semblez opposer avec une réelle insistance les projets de constructions neuves aux autres. (M. le rapporteur général fait des signes de dénégation.) Votre propos insistant le laisse entendre.
Or, pour ma part, je constate que les personnes se dirigent vers le logement ancien pour le réhabiliter et que d'autres personnes, en fonction de leurs revenus et de leur situation, y compris par rapport à l'emplois, par conséquent moins favorisées et moins sécurisées - choisissent plutôt le neuf, ce fameux neuf que vous évoquez et dont vous craigniez la qualité médiocre.
Monsieur le ministre, on aurait donc distribué 130 000 prêts à taux zéro. Dès lors, j'aimerais savoir, dans le cadre de l'étude que vous avez accepté de nous fournir, comment se répartissent ces prêts entre le neuf et l'ancien. C'est là une vraie question.
Par ailleurs, je crains que l'optimisme que vous mettez à nous dire combien de prêts ont ainsi été distribués, ne dure pas, car, pour ma part, j'observe sur le terrain qu'après avoir suscité un certain intérêt, le prêt à taux zéro connaît maintenant un ralentissement, voire un arrêt.
Telles sont les quelques observations complémentaires que je voulais vous livrer. Peut-être pourrez-vous me répondre ce soir, monsieur le ministre, faute de quoi j'attendrai, pour obtenir des éclaircissements, le rapport que vous vous êtes engagé à remettre au Parlement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-214, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-196 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 62, modifié.
(L'article 62 est adopté.)
Article 63