M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et concerne le statut des intermittents du spectacle.
Permettez-moi de saluer d'abord la mémoire d'un intermittent célèbre : Marcello Mastroianni, qui vient, hélas ! de disparaître.
Une fois de plus, les intermittents manifestent aujourd'hui, après plusieurs semaines d'une action menée dans un esprit de dignité, de fermeté et d'invention.
Ils s'émeuvent légitimement de la remise en cause de leur statut et, notamment, des modalités d'indemnisation du chômage dont ils bénéficient telles qu'elles résultent des annexes 8 et 10 de l'UNEDIC.
En effet, sur l'initiative du CNPF, l'ouverture des droits aux ASSEDIC ne deviendrait effective que dès lors que seraient accomplies 676 heures au lieu des 507 qui sont nécessaires aujourd'hui. Un tel dispositif reviendrait à exclure de l'assurance chômage, bien qu'ils aient cotisé, 75 % à 80 % des intermittents, soit 64 000 personnes.
Mais, au-delà, c'est la clé de voûte de tout un système régissant l'emploi salarié dans la culture qui se trouvait ébranlée. Car, contrairement à ce qu'affirme le président du CNPF, l'indemnisation par l'UNEDIC des intermittents n'est pas incongrue ; elle correspond à la spécificité même des emplois culturels, qui ne sont pas des emplois permanents.
Comme le dit fort à propos Jean-Pierre Vincent, le directeur du théâtre des Amandiers, « la production artistique ne se limite pas aux périodes liées à un travail rémunéré : sans couverture ASSEDIC adaptée, la création elle-même est rendue impossible ».
Nécessaire pour les artistes, les techniciens et les machinistes, la couverture spécifique des intermittents l'est aussi pour les structures culturelles qui ne peuvent embaucher du personnel permanent en trop grand nombre, ou qui n'en ont tout simplement pas besoin. La réalité de la vie culturelle est surtout caractérisée par l'emploi occasionnel, selon les programmations, les spectacles. Le système actuel, c'est la garantie d'une vie culturelle diversifiée, voire d'une vie culturelle tout court.
A côté des structures institutionnalisées, tout un tissu de création vivant s'est développé. Le mode de couverture sociale des intermittents permet ainsi aux petites structures - compagnies de danse, de théâtre, orchestres, jeunes équipes cinématographiques - de vivre, voire de survivre dans un contexte difficile. C'est également le garant d'un développement culturel, grâce aux interventions artistiques dans les établissements scolaires, dans les zones urbaines, dans les zones rurales.
Tout cet ensemble contribue au dynamisme et à la force culturels de notre pays.
M. le président. Posez votre question, monsieur Renar.
M. Ivan Renar. J'y arrive, monsieur le président.
Décidément non, le cliché de l'artiste ou des techniciens du spectacle travaillant peu et vivant aux crochets de l'assurance chômage ne tient pas !
Un moratoire de quatre mois a été obtenu. C'est un répit. Mais cela reste insuffisant.
M. le président. Votre question, s'il vous plaît !
M. Ivan Renar. Allez-vous, monsieur le ministre, laisser faire M. Gandois et un patronat de plus en plus réactionnaire ? Je vous demande donc quelles mesures vous comptez prendre pour garantir le régime spécifique des intermittents et le maintien de la vie et de la création culturelles, qui sont parties prenantes de l'exception culturelle française. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture. Permettez-moi à mon tour, monsieur le sénateur, de rendre hommage à un géant, peut-être le plus grand, du cinéma européen, Marcello Mastroianni. Avec lui vont s'éteindre un certain nombre de génériques qui sont présents dans nos mémoires. Il va rejoindre un autre monstre sacré qui nous a quittés voilà quelques années, Federico Fellini, réalisateur de La Dolce Vita et de Otto e Mezzo.
Monsieur le sénateur, vous avez posé une question importante sur les intermittents du spectacle. Nous sommes tous très attachés à la spécificité des professions du spectacle, qu'il s'agisse des artistes ou des techniciens.
Pourquoi parler de spécificité ? Premièrement, il s'agit de professions qui alternent des périodes de travail et de chômage. L'activité en continu n'existe pas pour elles.
Deuxièmement, les périodes de travail sont courtes puisqu'elles vont d'un jour à quelques mois au maximum. D'ailleurs, le code du travail lui-même reconnaît que le contrat à durée déterminée est d'usage.
Enfin, j'ajoute que la moitié des professionnels du spectacle n'arrive pas à accomplir les 507 heures réglementaires et ne parvient donc pas à toucher les indemnités de chômage.
C'est la raison pour laquelle M. Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, et moi-même avons demandé aux partenaires sociaux de proroger de quatre mois les annexes 8 et 10 relatives aux intermittents. Cette proposition sera présentée dans la soirée.
Nous voudrions que cette période de quatre mois soit mise à profit pour engager le plus rapidement possible des négociations spécifiques. Les pouvoirs publics sont décidés à faciliter le déroulement de ces négociations en oeuvrant activement pour que leur cadre, leurs modalités et leur calendrier soient arrêtés dans les prochains jours.
M. Jacques Barrot et moi-même nommerons prochainement une personnalité qui prendra immédiatement tous les contacts nécessaires et proposera un calendrier de discussion au sein du groupe de travail qu'elle constituera avec les parties intéressées. Ses travaux devront commencer au début du mois de janvier afin d'aboutir à une conclusion positive avant la fin du mois d'avril. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)

NÉCESSITÉ D'UNE RESTRUCTURATION
DE L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE EUROPÉENNE