SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Candidatures à un organisme extraparlementaire
(p.
1
).
3.
Plans d'épargne retraite.
- Discussion d'une proposition de loi en deuxième lecture (p.
2
).
Discussion générale : MM. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances
; Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances ; Marc Massion, Mme
Joëlle Dusseau, MM. Paul Loridant, Alain Lambert.
M. le ministre.
Clôture de la discussion générale.
Exception d'irrecevabilité (p. 3 )
Motion n° 44 de Mme Luc. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Joëlle Dusseau. - Rejet.
Article 1er (p. 4 )
Amendement n° 1 de la commission et sous-amendement n° 64 du Gouvernement. -
MM. le rapporteur, le ministre, Marc Massion, Paul Loridant, Mme Joëlle
Dusseau. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Amendement n° 66 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 5 )
Amendements n°s 15 de M. Massion et 45 de M. Loridant. - MM. Marc Massion, Paul
Loridant, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 46 de M. Loridant. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le
rapporteur, Alain Lamassoure, ministre délégué au budget ; Paul Loridant. -
Rejet.
Amendement n° 47 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Amendements n°s 16 de M. Massion et 48 de M. Loridant. - M. Marc Massion, Mme
Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Mme Joëlle
Dusseau. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 17 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 6 (p. 6 )
M. Paul Loridant.
Amendement n° 18 rectifié de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Amendements n°s 19 de M. Massion et 49 de M. Loridant. - M. Marc Massion, Mme
Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet de
l'amendement n° 19 et, par scrutin public, de l'amendement n° 49.
Amendement n° 50 de M. Paul Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° 20 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
M. le président.
4.
Rappel au règlement
(p.
7
).
Mme Danielle Bidard-Reydet, M. le président.
5.
Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire
(p.
8
).
Suspension et reprise de la séance (p. 9 )
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
6.
Rappel au règlement
(p.
10
).
Mme Marie-Claude Beaudeau, M. le président.
7.
Démission de membres de commissions et candidatures
(p.
11
).
8.
Plans d'épargne retraite.
- Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi en deuxième
lecture (p.
12
).
Article 6 (suite) (p. 13 )
Amendements n°s 51 de M. Loridant, 2 de la commission et sous-amendement n° 65
du Gouvernement. - MM. Paul Loridant, Philippe Marini, rapporteur de la
commission des finances ; Alain Lamassoure, ministre délégué au budget, Marc
Massion. - Rejet de l'amendement n° 51 ; adoption du sous-amendement n° 65 et
de l'amendement n° 2 modifié.
Amendements identiques n°s 3 de la commission et 52 de M. Loridant. - MM. le
rapporteur, Paul Loridant, le ministre délégué. - Adoption des deux
amendements.
Amendement n° 21 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Article 6 bis (p. 14 )
Amendement n° 4 de la commission et sous-amendements n°s 22 à 24, 27 rectifié
de M. Massion et 42 de M. Badré ; amendement n° 67 du Gouvernement. - MM. le
rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 4, les
sous-amendements devenant sans objet ; adoption de l'amendement n° 67.
Adoption de l'article modifié.
Article 6
ter (supprimé)
(p.
15
)
Article 8 (p.
16
)
Amendements n°s 26 de M. Massion, 5 de la commission et sous-amendement n° 25
de M. Massion ; amendement n° 53 de M. Loridant. - MM. Marc Massion, le
rapporteur, le ministre délégué, Paul Loridant. - Rejet du sous-amendement n°
25 et des amendements n°s 26 et 53 ; adoption de l'amendement n° 5.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 (p. 17 )
Amendement n° 60 de M. Badré. - MM. Denis Badré, le rapporteur, le ministre
délégué. - Retrait.
Adoption de l'article.
Article 9 bis (p. 18 )
Amendements n°s 6 de la commission et 54 de M. Loridant. - MM. le rapporteur,
Paul Loridant, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 6 ; rejet de
l'amendement n° 54.
Adoption de l'article.
Article 10 (p. 19 )
Amendement n° 28 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Amendement n° 43 de M. Badré. - MM. Denis Badré, le rapporteur. - Retrait.
Adoption de l'article.
Article 11. - Adoption (p.
20
)
Article 11
bis
(p.
21
)
Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 ter (p. 22 )
Amendements n°s 8 rectifié de la commission et 29 de M. Massion. - MM. le rapporteur, Marc Massion, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 8 rectifié rédigeant l'article, l'amendement n° 29 devenant sans objet.
Article 14 (p. 23 )
Amendements n°s 30 de M. Massion et 55 à 57 de M. Loridant. - MM. Marc Massion,
Paul Loridant, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des quatre
amendements.
Adoption de l'article.
Article 16 (p. 24 )
Amendement n° 58 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° 31 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Retrait.
Adoption de l'article.
Article 17 bis (p. 25 )
Amendement n° 33 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 17 bis (p. 26 )
Amendement n° 63 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'article insérant un article additionnel.
Article 17 quater (p. 27 )
Amendement n° 34 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 19 (p. 28 )
Amendement n° 35 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Amendement n° 36 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Amendements n°s 61 et 62 de M. Badré. - MM. Denis Badré, le rapporteur, le
ministre délégué. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° 37 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Amendement n° 38 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre
délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 19 bis (supprimé) (p. 29 )
Amendement n° 9 de la commission et sous-amendements n°s 59 de M. Loridant, 32 rectifié et 39 de M. Massion. - MM. le rapporteur, Paul Loridant, Marc Massion, le ministre délégué. - Retrait du sous-amendement n° 39 ; rejet du sous-amendement n° 59 ; adoption du sous-amendement n° 32 rectifié et de l'amendement n° 9, modifié, rétablissant l'article.
Article 23 (p. 30 )
Amendements n°s 10 et 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre
délégué - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 30 (p. 31 )
Amendement n° 40 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Intitulé du chapitre VI (p. 32 )
Amendement n° 12 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rétablissant la division et son intitulé.
Article 31 (supprimé) (p. 33 )
Amendement n° 13 de la commission. - M. le rapporteur. - Retrait.
Article 32. - Adoption (p.
34
)
Intitulé de la proposition de loi (p.
35
)
Amendement n° 14 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur, le ministre délégué, Emmanuel Hamel, Paul Loridant. - Rejet.
Vote sur l'ensemble (p. 36 )
Mme Anne Heinis, MM. Yann Gaillard, Denis Badré, Paul Loridant, Marc Massion,
le rapporteur.
Adoption de la proposition de loi.
9.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
37
).
10.
Nomination de membres de commissions
(p.
38
).
11.
Transmission de projets de loi
(p.
39
).
12.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
40
).
13.
Dépôt de propositions d'actes communautaires
(p.
41
).
14.
Dépôt de rapports
(p.
42
).
15.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
43
).
16.
Ordre du jour
(p.
44
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURES
À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation des quatre sénateurs appelés à siéger au sein
du Conseil national de la montagne.
La commission des affaires économiques et du Plan a fait connaître qu'elle
propose les candidatures de MM. Jean Faure et Bernard Hugo, la commission des
affaires sociales a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. André
Jourdain et la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale a fait connaître
qu'elle propose la candidature de M. Germain Authié, pour siéger au sein du
Conseil national de la montagne.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à
l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition, à l'expiration du délai
d'une heure.
3
PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE
Discussion d'une proposition de loi en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition
de loi (n° 179, 1996-1997), adoptée avec modifications par l'Assemblée
nationale en deuxième lecture, créant les plans d'épargne retraite. [Rapport
(n° 190, 1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, en ouvrant cette discussion, en deuxième lecture, de
la proposition loi relative à la création de fonds d'épargne retraite, je veux
d'abord adresser mes compliments et mes remerciements à la commission des
finances du Sénat et à son rapporteur, M. Philippe Marini, pour le travail
considérable qu'ils ont accompli.
Ma conviction est que les fonds d'épargne retraite constituent un élément
extrêmement positif qui contribue directement au bien de notre collectivité
nationale.
Contrairement aux craintes exprimées çà et là, les fonds d'épargne retraite ne
menacent pas nos retraites par répartition, qu'il s'agisse tant des régimes de
base que des régimes complémentaires. La répartition - cela doit être bien
clair - doit rester et restera le socle de nos retraites.
M. Paul Loridant.
Paroles !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Je me permets d'affirmer cela
avec d'autant plus de force que je suis convaincu que les fonds d'épargne
retraite vont même consolider nos régimes de base de retraite par
répartition.
En effet, en abondant les fonds propres de nos entreprises, ils favoriseront
leur développement, engendrant ainsi des emplois nouveaux qui eux-mêmes
offriront des assiettes de cotisation pour les régimes de retraite par
répartition. Autrement dit, il n'y aura que des gagnants dans cet enchaînement
dynamique ; ce point est capital.
Notre discussion va par ailleurs nous permettre de régler les dernières
questions encore en suspens sur ce projet.
Notre premier sujet de débat concerne le mode de gestion des futurs fonds. Ces
fonds seront gérés dans un cadre assurantiel, puisque leur objet est de servir
une rente aux épargnants lorsqu'ils atteindront l'âge de la retraite. Cela
implique un mode de gestion des actifs en fonction d'objectifs à long terme et
non de rentabilité immédiate.
C'est la raison pour laquelle la gestion de ces fonds est soumise aux règles
prudentielles et de contrôle du code des assurances. Si nous avons fait ce
choix, c'est aussi parce que ces règles ont déjà fait la preuve de leur
efficacité, notamment en termes de sécurité pour les épargnants.
Dans ces conditions, vous comprendrez que je ne sois pas favorable à l'idée
d'imposer aux fonds d'épargne retraite une obligation de délégation de la
gestion des actifs, comme le propose la commission.
Je partage pleinement les objectifs de sécurité et de contrôle qui fondent son
amendement, mais je considère que ces exigences seront bien prises en compte
sans qu'il soit besoin de déléguer la gestion des actifs.
Avec le dispositif que nous mettons en place, l'épargne retraite sera isolée
des autres gestions d'actifs puisque les fonds d'épargne retraite ne pourront
exercer que cette seule activité. Nous mettons ainsi en place une véritable «
muraille de Chine » qui garantira la sécurité des placements.
Que cela soit bien clair : le système que nous instaurons permet d'éviter tout
conflit d'intérêts.
J'ajoute que la délégation de la gestion des actifs présenterait d'autres
inconvénients qu'on ne saurait négliger.
Elle entraînerait, tout d'abord, une obligation de dissociation des gestions
d'actif et de passif, et donc la nécessité de recourir à des gestionnaires
d'actif rémunérés. Il en résulterait nécessairement des coûts supplémentaires
de gestion, qui
in fine
réduiraient le rendement des fonds pour les
salariés.
Elle se traduirait, ensuite, par un dédoublement du contrôle entre la
commission de contrôle des assurances et la commission des opérations de
bourse. Les risques de dysfonctionnements qui résulteraient d'une telle
situation me paraissent ne pas devoir être négligés.
Je crois donc qu'il faut laisser le soin aux futurs gestionnaires d'apprécier
l'opportunité de déléguer ou non la gestion des actifs des fonds d'épargne
retraite. Dans les cas où une telle délégation serait mise en oeuvre, la
gestion des fonds serait, bien entendu, soumise au contrôle de la commission
des opérations de bourse dans le cadre de ses compétences.
Dans le même ordre d'idées, je proposerai au Sénat de ne pas retenir l'idée
d'une filialisation obligatoire de la gestion pour compte de tiers. En effet,
vous le savez, je travaille à la préparation d'un texte de loi sur la gestion
collective, où cette question trouvera naturellement sa place. Ce sujet mérite,
en outre, un approfondissement de la concertation avec la place.
En ce qui concerne la question de la division des risques, nous devons
parvenir à concilier au mieux nos objectifs prudentiels et d'abondement des
fonds propres des entreprises. M. le rapporteur a beaucoup travaillé sur ce
sujet. Je m'en remettrai donc à la sagesse de la Haute Assemblée sur cette
question.
Le dernier point que je souhaite évoquer est celui de l'adhésion individuelle
aux futurs fonds d'épargne retraite. Nous sommes parvenus, je le crois, à un
bon compromis sur cette question avec M. le rapporteur, et cela me réjouit
pleinement.
La priorité, vous le savez, est de tout faire pour que la mise en place des
futurs fonds d'épargne retraite soit réalisée dans le cadre de la négociation
collective. Toutefois, afin que personne ne reste en attente sur le bord du
chemin, nous avons souhaité qu'une possibilité d'adhésion individuelle soit
ouverte dans les cas où cette négociation collective n'aura pu aboutir.
Je donnerai donc mon accord à l'amendement de votre commission autorisant
l'adhésion individuelle d'un salarié si, plus d'un an après la promulgation de
la loi, un plan d'épargne retraite ne lui a toujours pas été proposé.
De la même manière, un employeur pourra prendre une décision unilatérale de
même nature si, un an après son ouverture, la négociation collective n'a
toujours pas abouti.
Je pense que, avec ce dispositif, nous avons trouvé un bon équilibre entre la
nécessité de préserver la priorité de la négociation collective et celle de
permettre à tous les salariés d'avoir accès à ces produits nouveaux.
Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
principaux points que je vous propose d'examiner aujourd'hui. Le Parlement et
le Gouvernement ont, jusqu'à présent, su faire preuve d'imagination et
d'efficacité collective dans la conduite de ce projet. Nous sommes maintenant
dans la dernière ligne droite : gardons le cap que nous nous sommes fixé.
C'est l'intérêt des salariés, c'est l'intérêt des retraités de demain, c'est
l'intérêt de l'économie française. Nous allons ainsi pouvoir mieux diriger
l'épargne des Français vers l'économie productive, contribuant à la croissance
et à la création d'emplois.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, je ferai quelques brèves remarques, si vous le
permettez, au moment où nous abordons cette deuxième lecture.
Certaines des modifications que nous avons apportées en décembre ont été
validées par l'Assemblée nationale.
Je citerai, à ce titre, le principe consistant à accorder la possibilité pour
un salarié d'une entreprise qui n'aurait pas pu ou pas voulu instituer un fonds
d'épargne retraite d'adhérer à un plan d'épargne retraite existant. Certes,
l'Assemblée nationale a validé notre texte sous réserve de certains
aménagements qui en limitent la portée, mais notre apport est significatif car
il est réellement intéressant que ce nouveau système s'adresse à tous et que le
principe d'égalité soit bien respecté à cet égard.
En deuxième lieu, l'Assemblée nationale a confirmé l'amendement Cantegrit,
favorable à nos concitoyens installés hors de France.
En troisième lieu, disposition de portée plus générale, elle a reconnu la
possibilité pour un souscripteur de plan d'épargne retraite de changer de
contractant au moins une fois tous les cinq ans.
Enfin, les dispositions fiscales et les dispositions incitatives en matière de
charges sociales ont été adoptées conformes par l'Assemblée nationale, en
particulier l'amendement « Fourcade » sur lequel nous nous étions longuement
expliqués lors de la première délibération.
Au terme de cette première navette, il demeure toutefois, monsieur le
ministre, un nombre substantiel de points de désaccord.
Le premier porte sur l'interdiction que nous avons voulu poser de la formule
dite « des contrats à prestations définies ». Nous aurons l'occasion de nous
expliquer sur ce point lors de l'examen de l'article 9.
Le deuxième désaccord - vous venez d'en faire état - concerne la question de
la délégation de la gestion des actifs des fonds d'épargne retraite. Nous
souhaitions la rendre obligatoire ; l'Assemblée nationale n'évoque qu'une
simple possibilité. Là encore, nous échangerons les arguments de fond lors de
la discussion de l'article 11
bis.
Troisième désaccord : l'Assemblée nationale ne nous a pas suivis en ce qui
concerne l'obligation pour un gestionnaire de fonds d'épargne retraite
d'exercer les droits de vote attachés aux titres détenus en portefeuille, qu'il
s'agisse du gestionnaire ou du fonds lui-même. Nous nous en expliquerons lors
de l'examen de l'article 11
ter.
Surtout, en ce qui concerne les
dispositions prudentielles et de répartition des actifs, l'Assemblée nationale
a souhaité rétablir son texte de première lecture. Ainsi, les fonds d'épargne
retraite pourraient, si on la suivait, investir jusqu'à 10 % de leurs actifs
dans les titres d'une même société cotée, et ce dans la limite de 40 % de leur
portefeuille, soit quatre fois 10 %.
S'agissant des titres de sociétés non cotées, les ratios actuels ont de
nouveau été doublés, permettant ainsi aux fonds d'épargne retraite d'investir
jusqu'à 10 % de leurs actifs dans de tels titres, et ce dans la limite de 1 %
par émetteur.
Mes chers collègues, ces dispositions ne me semblent pas pouvoir être
confirmées par le Sénat, car il s'agit véritablement d'une question de principe
touchant à la confiance que les épargnants, les souscripteurs pourront avoir
dans ces nouveaux produits. C'est réellement un sujet sur lequel la commission
des finances du Sénat a exprimé, par son amendement, une conviction très forte.
Mais nous en reparlerons à l'article 23.
Enfin, l'Assemblée nationale a supprimé la possibilité pour le salarié de
transférer ses droits, indépendamment de toute rupture du contrat de travail ;
nous évoquerons cela à l'article 8.
A la vérité, et au-delà des apparences techniques, les divergences -
d'approche, mais non pas d'objectif - qui traduisent la nature de notre
bicamérisme, ont trait à quelques aspects substantiels du texte. Une question,
essentielle, à mon avis, se pose : les fonds de pension doivent-ils, comme
l'affirment nos collègues députés, avoir simultanément plusieurs objectifs, ces
objectifs étant d'assurer, de favoriser le développement des marchés d'actions
et d'inciter à la négociation collective ?
Quand je considère l'approche des députés, j'ai l'impression qu'ils mettent
sur le même plan chacun de ces trois objectifs. Encore une fois, les fonds
d'épargne retraite doivent-ils poursuivre, à la fois, plusieurs objectifs de
nature différente ou bien doivent-ils avoir un seul objectif d'un côté et en
tirer les conséquences de l'autre ? L'objectif, et le seul, comme nous l'avions
affirmé en première lecture, ici, au Sénat, c'est de payer des pensions.
M. Jean Chérioux.
Très juste !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Au-delà de cet objectif, bien sûr, par le fait même que l'on
encourage et que l'on met en place ce mécanisme, ...
M. Paul Loridant.
Prétexte !
Mme Joëlle Dusseau.
Nous ne sommes pas dupes !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
... des effets économiques sont à attendre, ...
Mme Joëlle Dusseau.
C'est sûr !
M. Jean Chérioux.
Exactement !
M. Philippe Marini,
rapporteur...
effets qu'il faudra optimiser. Mais il ne faut pas
confondre les effets et la cause, les conséquences et l'objectif.
C'est sur ce thème, mes chers collègues, que nous demanderons, au nom de la
commission des finances, au Sénat de se prononcer.
Je voudrais également insister sur le fait que sur un certain nombre de
points, sans amour propre d'auteur - la commission n'en a aucun en la matière -
nous vous demanderons de confirmer vos votes de première lecture.
Tout en indiquant que dans le courant du débat nous trouverons sans doute les
formules adéquates, dans la tradition de notre maison, je profite de cette
intervention pour évoquer un point qui, outre de nombreuses interrogations dans
les milieux professionnels, a soulevé quelques inquiétudes. Ce point qui, à mon
avis, n'est pas traité dans le texte, mérite sans doute d'être relevé, au moins
dans les limites d'un échange de propos avec le Gouvernement.
Il est entendu que, selon le texte actuel, les fonds d'épargne retraite,
personnes morales, ne pourront pas obtenir le remboursement de l'avoir fiscal.
Cette situation risque, me semble-t-il, d'être, à terme, défavorable aux
investissements en actions françaises.
Ce point mérite l'attention et une réponse de la part du Gouvernement. A vrai
dire, dès lors que les fonds d'épargne retraite seront dotés de la personnalité
juridique, dès lors qu'ils auront nécessairement à se mettre en place et qu'ils
dégageront sans doute des résultats comptables négatifs les premières années,
les avoirs fiscaux liés à la détention d'actions de sociétés françaises ne
pourront pas, par définition, être apportés en compensation d'une dette d'impôt
sur les sociétés.
Je suppose donc - c'est ce que de nombreux professionnels m'ont dit - que,
pendant la période de « montée en puissance », marquée par des investissements
commerciaux et, vraisemblablement, des résultats comptables négatifs, on
relèvera sans doute, pour cette seule raison mécanique, peu d'investissements
en actions françaises et plus d'investissements en actions étrangères cotées
sur d'autres marchés que la place de Paris. Telle est, du moins, l'inquiétude
qui a été manifestée par certains professionnels. A cet égard, je souhaiterais
connaître l'opinion du ministre.
Le second point de nature fiscale qui me semble aussi nécessiter un échange
entre nous concerne l'interprétation de la disposition qui, elle, figure, bien
sûr dans le texte, disposition relative à la déductibilité par le salarié des
versements effectués sur un plan épargne retraite de son revenu imposable.
En effet, certaines organisations, notamment représentatives de salariés, se
sont émues de l'interprétation qu'il convient de faire de l'article 25, article
adopté conforme.
Cet article dispose que les versements des salariés et les contributions
complémentaires de l'employeur sont déductibles du revenu imposable du salarié
à l'impôt sur le revenu dans une certaine limite fixée par le texte.
Doit-on, monsieur le ministre, faire masse des deux versements et les
soustraire du revenu imposable, ou considérer - ce qui a toujours été
l'interprétation de la commission des finances du Sénat - que seules les
cotisations de salariés sont déductibles, les versements effectués par
l'employeur n'étant pas ajoutés au salaire ? Prenons l'exemple d'un salarié
dont le revenu brut s'éleverait à 200 000 francs et qui effectuerait un
versement de 2 000 francs sur un plan d'épargne retraite sur lequel l'employeur
déposerait également 8 000 francs. Son revenu imposable serait-il de 198 000
francs ou de 190 000 francs ?
Je suis quelques peu confus de citer, au cours de la discussion générale, un
exemple chiffré mais, monsieur le ministre, il me semble important que vous
puissiez nous préciser, lors de ce débat, quelle interprétation est, à vos
yeux, la bonne. J'ai exposé la démarche de la commission des finances ; cette
interprétation est judicieuse mais il faudrait que vous puissiez la confirmer
si telle est votre opinion. Bien entendu, les partenaires sociaux seront
particulièrement attentifs à la réponse que vous apporterez.
Tels sont les quelques propos liminaires que je souhaitais vous livrer avant
que nous abordions l'examen des articles. Cette proposition de loi, nous
l'avons souvent indiqué, est importante. Elle a été l'objet, comme il est
normal, de quelques tiraillements, chacun souhaitant y apporter sa marque
propre mais, comme je l'ai indiqué, le Sénat n'a pas d'amour-propre d'auteur ;
il souhaite simplement rechercher les meilleures solutions de fond, avec en
particulier le souci de protéger l'épargnant et d'assurer la transparence et la
sécurité.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous
abordons en deuxième lecture l'examen d'une proposition de loi qui ne
concernera en réalité qu'une très petite partie de la population salariée. En
effet, les avantages fiscaux et sociaux attachés à cette proposition de loi
font que ce dispositif baptisé « plans d'épargne retraite » intéresserait
principalement les dirigeants de PME et les cadres supérieurs de grandes
entreprises.
Personnellement, j'attache beaucoup d'importance au vocabulaire : je suis donc
toujours étonné d'entendre M. le ministre, dans ses déclarations, ses
interviews, parler de « tous les salariés qui le veulent ». Il est vrai que la
volonté est une condition nécessaire, mais elle n'est pas une condition
suffisante. En effet, le dispositif concernera les salariés qui le veulent,
certes, mais seulement ceux qui le peuvent, et ceux-là seront peu nombreux.
A ce titre, l'exemple pris par M. le rapporteur d'un salarié percevant 200 000
francs par an est assez révélateur. Permettez-moi de vous rappeler - mais
peut-être êtes-vous complètement coupé des réalités ! - qu'un tel salaire n'est
pas fréquent.
Je souhaite revenir un instant sur les articles 25 et 26 qui, votés conformes
par l'Assemblée nationale, ne reviendront pas en discussion lors de l'examen
des articles.
L'avantage fiscal, qui a été voté sans l'ombre d'une hésitation, n'a pas été
mesuré. Nous attendons toujours que vous nous indiquiez quel sera son impact
sur le budget de l'Etat.
Je conçois qu'il soit difficile de le chiffrer, puisque personne ne peut
savoir avec précision combien de personnes souscriront à ces plans d'épargne
retraite. Mais vous auriez pu faire une estimation et indiquer au Parlement
s'il fallait compter en centaines de millions ou en milliards de francs.
Vous prétendez être des apôtres de la rigueur budgétaire la plus absolue.
Force est de constater que, lorsqu'il s'agit de favoriser les catégories les
plus aisées de la population, curieusement, votre rigueur devient plus
accommodante.
L'avantage social conçu est encore plus injustifié. Voilà quelques semaines,
dans cette enceinte, s'est tenu un débat que je considère comme totalement
surréaliste. Vous vous êtes demandé en effet s'il fallait ou non accorder un
avantage social aux salariés qui gagnent plus d'un million de francs par an,
débat à la fois consternant et révoltant, particulièrement dans le contexte
actuel !
Si j'ai bien suivi vos échanges, vous avez finalement estimé qu'il ne fallait
pas aller trop loin. Permettez-moi de vous rappeler, car vous semblez
l'ignorer, que la rémunération moyenne des salariés, dans ce pays, est de six à
sept fois inférieure au seuil auquel vous vous êtes arrêtés. Il serait temps
que vous retrouviez le sens des réalités !
Le sens des réalités, monsieur le ministre, mes chers collègues, si vous me
permettez de faire état de mon expérience de sénateur de province, je le trouve
lors des permanences au cours desquelles je reçois régulièrement nos
concitoyens.
A ces occasions, je constate, que, de plus en plus souvent, nous recevons des
travailleurs qui éprouvent des difficultés toujours plus grandes à assumer les
charges de la vie quotidienne.
J'ai ainsi en mémoire une récente visite d'un couple. Le mari, ouvrier chez
Renault, m'a montré sa fiche de paie et ses charges, et il m'a dit : il va
falloir que nous retirions notre fils de l'université.
Si j'avais proposé à ce monsieur votre produit d'épargne retraite, ou bien il
aurait rigolé, s'il était de bonne humeur, ou bien il m'aurait massacré !
Qu'en est-il, dans votre dispositif, des salariés qui passent les dernières
années de leur vie professionnelle dans la précarité, des travailleurs qui, de
quarante-cinq ans jusqu'à soixante ans, travaillent par intérim ? Je vous ai
posé cette question voilà quelques semaines, et vous ne m'avez pas répondu.
En matière sociale donc, tout a été décidé sans le moindre chiffrage, aussi
bien pour la sécurité sociale que pour les régimes complémentaires de l'ARRCO
et de l'AGIRC. Des estimations ont circulé, vous n'avez cependant pas jugé
utile de donner vos propres prévisions.
Vous avez fait adopter la loi de financement de la sécurité sociale. Si vous
adoptez demain la proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui, vous
aurez transformé la première loi de financement de la sécurité sociale en une
loi de déséquilibre de la sécurité sociale.
Quelles que soient les prévisions du Premier ministre - il annonçait, au mois
de novembre 1995, un excédent des comptes de la sécurité sociale de 17
milliards de francs, et, quelques semaines plus tard, il envisageait un déficit
de 30 milliards de francs toujours pour 1997 - le fond du discours reste le
même : il faut maîtriser les dépenses et augmenter les recettes.
Pourtant, quelques mois plus tard, vous nous présentez un texte dont les
conséquences seront d'amputer les recettes de la sécurité sociale ! Bel
exemple, parmi d'autres, de l'incohérence de la politique gouvernementale.
Pour en revenir à des remarques plus générales sur ce texte, je poursuivrai
mon exposé en reconnaissant que M. le ministre et les deux promoteurs de la
proposition de loi, MM. Thomas et Marini - à dire vrai, le premier plus que le
second ! - s'emploient à nous expliquer que cette proposition de loi intéresse
de vastes catégories de la population, qu'elle ouvre, pour les partenaires
sociaux, un nouveau champ à la négociation collective d'entreprise et qu'elle
ne menace en aucune manière la sécurité sociale et les grands régimes de
retraite complémentaire des salariés. Ce n'est pas vrai, et je vais m'attacher
à le démontrer.
Pour demander au Parlement de légiférer, il faut une bonne raison.
Existe-t-elle dans le cas particulier ? Je ne le crois pas !
Les entreprises ont aujourd'hui la possibilité de mettre en place, au profit
de leurs salariés, des systèmes de retraite susceptibles de compléter les
prestations servies par la sécurité sociale et les régimes complémentaires.
Le statut fiscal et social des cotisations servant à financer ces régimes à
caractère supplémentaire n'est, en outre, nullement désavantageux pour les
salariés concernés, les risques de réintégration d'assiette n'apparaissant que
pour des salaires se situant entre 800 000 francs et un million de francs.
Lorsque l'entreprise décide de mettre en place un tel système, c'est après
discussion ou négociation avec ses salariés ou leurs représentants, dans un
cadre obligatoire.
C'est ce dispositif que vous avez décidé de mettre à mal en invoquant des
arguments fallacieux.
Les assureurs vous ont fait savoir qu'ils avaient du mal à vendre des contrats
de retraite par capitalisation aux PDG des petites et moyennes entreprises ou
aux dirigeants des grandes entreprises. Soucieux des intérêts des uns et des
autres, vous vous empressez de leur donner satisfaction.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Image d'Epinal !
M. Jean Chérioux.
C'est véritablement regarder par le petit bout de la lorgnette !
M. Marc Massion.
Le dispositif antérieur, dont ils profitent largement, est maintenu, et un
nouveau mécanisme vient s'y ajouter. Pour un salaire de million de francs par
an, ce sont 50 000 francs de cotisations à un plan d'épargne retraite qui vont
s'ajouter aux 250 000 francs qui étaient déjà déductibles, soit 20 % de mieux.
Ce n'est pas mal !
Vous avez essayé de faire la même chose en matière de cotisations de sécurité
sociale, mais M. Fourcade vous en a empêché. Je ne m'en plaindrai pas, même si,
par ailleurs, comme nous l'avons montré en première lecture, l'avantage ainsi
accordé coûtera cher aux régimes de protection sociale.
Le caractère obligatoire des régimes de retraite supplémentaire vous gênait.
Il est contraire à l'idéologie libérale que vous professez au nom de la
mondialisation de l'économie. Vous avez donc opté pour des systèmes facultatifs
ou, plus exactement, facultatifs et individuels, même lorsqu'ils sont mis en
place dans le cadre de l'entreprise.
Le salarié doit être libre ou, plutôt, il doit avoir l'illusion de l'être ! Le
problème, c'est que, pour se constituer un complément de retraite correct, il
faut cotiser pendant des durées très longues : vingt, trente, quarante ans !
Or, personne ne le fait volontairement. Les incitations sociales et fiscales ne
suffiront pas non plus. Restent donc les entreprises ! Financeront-elles très
largement - c'est-à-dire au maximum que vous avez prévu, 80 % de la cotisation
- et en tout cas longuement vos plans d'épargne retraite ? Rien n'est moins
sûr.
Que ce soit en France, pour les non-salariés ou les fonctionnaires, ou à
l'étranger, l'expérience montre que les systèmes facultatifs ne touchent qu'une
faible partie de la population potentielle : sans doute 10 % au maximum.
Le cadre que vous avez choisi est celui de l'assurance. M. le ministre nous a
répété à chaque article combien il est satisfaisant. Je n'en suis pas aussi
convaincu que lui. Gérer des engagements de très longue durée suppose la
constitution de réserves très importantes. Exception faite des régimes gérés
comme celui de la PREFON, le code des assurances ne prévoit nullement la
constitution de ces réserves qui doivent permettre de faire face aux évolutions
de la démographie du groupe assuré, à l'accroissement constant de l'espérance
de vie et aux fluctuations des marchés financiers.
Etes-vous si certains que les taux d'intérêt réels seront encore positifs dans
trente ou quarante ans ? Lorsque l'on sait que vous avez prévu ou déjà inscrit
dans la loi de déroger à certaines des règles prudentielles de l'assurance,
dans un sens évidemment laxiste, il est permis de douter de la solidité du
dispositif technique que vous proposez.
Restent les salariés et leurs représentants, c'est-à-dire les partenaires
sociaux. Craignant sans doute leur réaction, qui est forte et unanime, vous
vous êtes efforcés de leur faire une place dans votre proposition de loi. Mais
cette place, très modeste, se réduit à chaque lecture. L'individuel apparaît
désormais très clairement comme étant l'une des modalités importantes de
souscription d'un plan d'épargne retraite.
Bien sûr, vous discutez encore du délai de grâce que vous allez accorder aux
partenaires sociaux. M. Thomas leur laissait deux ans pour signer un accord
national interprofessionnel. M. Marini nous proposera, dans un instant, de
réduire ce délai à un an dans le cadre de l'entreprise. Si, dans ce délai,
l'employeur et les organisations syndicales ne se sont pas mis d'accord,
l'employeur pourra agir seul et les salariés pourront adhérer individuellement
au plan de leur choix.
Restent les assurés. Vous avez prévu qu'ils soient représentés au travers de
conseils de surveillance dont ils éliront les représentants. Comme vous ne
voulez pas des partenaires sociaux, vous vous êtes dit que ce serait un bon
moyen de les contourner. Mais vous en êtes restés au stade des intentions, car
vos conseils de surveillance n'auront ni moyens ni pouvoirs.
Le seul véritable pouvoir que vous leur reconnaissez, c'est, en cas de carence
du fonds, celui de saisir un juge ! De qui se moque-t-on ? Permettez-moi de
vous faire remarquer que vous êtes, en ce domaine, très loin des dispositifs
prévus en matière d'intéressement des salariés ou de plans d'épargne
d'entreprise. Mais, là encore, il ne fallait pas trop contraindre les assureurs
qui sont les véritables instigateurs du texte et qui souhaitent en être les
bénéficiaires réels...
Réservé aux catégories très aisées de la population salariale, coûteux pour
les finances publiques et la sécurité sociale, dirigé contre les régimes
collectifs d'entreprise gérés par les partenaires sociaux, techniquement
imprudent, renforçant les prérogatives des assureurs face aux assurés, votre
texte est un très mauvais texte auquel je souhaite courte vie. Tel sera en tout
cas son devenir si le sort des urnes nous est favorable dans un peu plus d'un
an.
M. Denis Badré.
On peut toujours rêver !
M. Marc Massion.
Sur le fond, ce texte est le pur produit d'une idéologie qui sacrifie la
solidarité du plus gand nombre aux privilèges de quelques-uns.
Sans trop le dire, vous êtes en train de changer profondément notre système de
protection sociale. Vous voulez remplacer Bismarck par Beveridge, autrement dit
privilégier la minorité, ceux qui ont les moyens, au détriment de l'immense
majorité, ceux qui ont des besoins.
Les régimes obligatoires, qui sont les seuls, soit dans un cadre national,
soit dans le cadre de l'entreprise, à exprimer la solidarité d'un groupe, vous
souhaitez, sinon les faire disparaître, du moins en réduire fortement la
place.
Face aux régimes obligatoires, dont le rendement baisse, dont le niveau de
couverture se réduit progressivement, vous proposez aux salariés de se
débrouiller par eux-mêmes. Il s'agit d'une gigantesque tromperie, car vous
savez bien que l'on ne cotise pas volontairement pendant longtemps et qu'au
titre de leurs efforts individuels les salariés ne se constitueront pas des
droits importants. J'excepte, bien sûr, le cas des dirigeants d'entreprise qui,
en général, ne sont pas trop dépourvus pour faire valoir leurs droits.
Dans quinze ou vingt ans, lorsque la baisse de rendement des régimes
obligatoires se fera très sérieusement sentir, vos plans d'épargne retraite
risquent fort, pour la majorité de nos compatriotes, de ne représenter qu'un
complément nul ou insignifiant.
Il faut donc cesser de proclamer votre attachement à la répartition et aux
grands régimes obligatoires, alors qu'en fait vous confirmez leur déclin sans
proposer de véritable solution alternative aux entreprises et à de très larges
catégories de salariés.
Comme nous l'avons fait en première lecture, nous allons, au cours de cette
deuxième lecture, affirmer notre opposition déterminée à cette proposition de
loi.
Ce texte étant, à nos yeux, à la fois inégalitaire pour les citoyens et
dangereux pour l'avenir de la sécurité sociale, nous saisirons le Conseil
constitutionnel.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole et à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que
nous abordons la deuxième lecture de la proposition de loi sur les plans
d'épargne retraite, trois questions fondamentales me paraissent toujours en
suspens.
Beaucoup de bruit a été fait autour du manque à gagner des caisses du régime
général et des régimes complémentaires, beaucoup de chiffres contradictoires
ont été avancés. Les confédérations syndicales ont évalué ce manque à 18
milliards de francs par an pour le régime général et on a parlé de 7 milliards
à 8 milliards de francs pour les régimes complémentaires.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Et pourquoi pas 50 milliards de francs ?
Mme Joëlle Dusseau.
M. Jean-Pierre Thomas, se référant à une étude qu'il qualifie de sérieuse,
évoque une perte supérieure à 2 milliards de francs.
Dès la première lecture, notre collègue Alain Vasselle, qui n'est pas suspect
d'être de gauche
(Sourires.)...
M. Philippe Marini,
rapporteur.
C'est un excellent sénateur !
Mme Joëlle Dusseau.
... avant l'amendement Fourcade, avait évoqué un chiffre de 8 milliards à 13
milliards de francs pour les pertes de recettes,...
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Vous sortez ses propos de leur contexte !
Mme Joëlle Dusseau.
Non, pas du tout !
... en prenant en compte les seules cotisations déplafonnées du régime
général, et à 3,5 milliards de francs les pertes de l'AGIRC.
Le vote de l'amendement Fourcade, qualifié de « cautère sur une jambe de bois
» par le président de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, n'aurait
réduit que modérément le « manque à gagner » potentiel pour la retraite de base
de la sécurité sociale, toujours chiffré à 6 milliards de francs.
Au-delà des chiffres que l'on pourra toujours opposer les uns aux autres,
cette proposition de loi illustre une philosophie qui est préjudiciable à
l'esprit même de la répartition, c'est-à-dire de la solidarité, principe établi
à la Libération et qui fonde notre cohésion sociale.
Depuis quelques années se sont multipliées, avec la bénédiction des pouvoirs
publics, des rémunérations ou des sources de revenus pour des salariés
échappant aux cotisations sociales, que ce soit l'intéressement, la
participation ou les plans d'épargne entreprise. Certains estiment que, par ce
biais, 33 milliards de francs échappent aux cotisations sociales.
Je vous pose donc une première question, monsieur le ministre, monsieur le
rapporteur. Au moment où le nombre de cotisants s'amenuise par rapport au
nombre de retraités, ...
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Hélas !
Mme Joëlle Dusseau.
... au moment où le chômage dévore par les deux bouts l'existence du salarié
qui commence à travailler plus tard, qui est jeté comme inutile ou non
performant plus tôt, est-il bien opportun de développer et de continuer à
développer une série de dispositifs, immédiats ou différés, qui sont exonérés
des charges sociales ? Est-ce bien ainsi que vous espérez réduire la fracture
sociale ?
Vous affirmez que vous ne voulez pas remettre en cause les retraites par
répartition. Admettez qu'une telle conclusion, au vu de vos propositions, est
pourtant bien tentante.
Ma deuxième préoccupation concerne les salariés. Après tout, permettre à un
certain nombre de personnes qui en ont la capacité financière de se constituer
des fonds de retraite facilitant leurs vieux jours n'est pas
a priori
scandaleux, mais, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, qu'en
est-il des autres ?
Qu'en est-il des petits salaires, de ceux qui ne pourront pas épargner et qui
tirent le diable par la queue, si je puis dire, pour arriver à la fin du mois
?
Qu'en est-il des femmes, qui sont, à qualification égale, payées un tiers de
moins que les hommes, qui sont pour l'essentiel les « bénéficiaires » du temps
partiel et donc des salaires partiels ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Après deux septennats socialistes, madame !
Mme Joëlle Dusseau.
Chacun aura compris le sens de ces guillemets.
Qu'en est-il des chômeurs ? Il y aurait donc deux catégories : ceux qui
peuvent payer, qui profiteraient des dégrèvements d'impôts et bénéficieraient
des apports des entreprises - avec « prime » aux plus favorisés - et les autres
!
Et vous continuez à dire que vous ne voulez pas mettre en place une retraite à
deux vitesses ! Si l'on a des doutes, il suffit de lire les propos de
Jean-Pierre Thomas - encore lui ! - qui est tout de même au fait de ces
propositions ; quand il évoque les catégories concernées, il parle
exclusivement des cadres ! Monsieur le ministre, le salariat français n'est-il
composé que de cadres ?
Parlons-en donc, de ces heureux, de ces priviligiés de la retraite, pour qui,
paraît-il, cette proposition de loi serait une solution. A bien y regarder,
leur situation ne serait pourtant pas si idéale.
En effet, il sera tentant, pour le patron, de limiter les augmentations de
salaires sur lesquelles il paierait des charges, en échange d'un fonds
d'épargne, sans cotisation sociale. Et, au cas où il n'aurait pas bien compris,
on le lui dit.
Je cite encore Jean-Pierre Thomas, s'exprimant ainsi à l'Assemblée nationale :
« si 10 % des augmentations des salaires des cadres allaient à l'épargne
retraite ». La phrase se passe de commentaires ! On passe d'une augmentation
immédiate avec charges sociales à une augmentation différée sans charges
sociales et moyennant des avantages pour les entreprises.
Mais, surtout, quelle somme faudrait-il que le salarié investisse ? Pour
combien de temps ? Avec quels résultats ? Avec quelles garanties ? Pour des
fonds d'épargne retraite, ce sont bien là des questions essentielles. Avouez
que ce ne sont pourtant pas les questions esentielles qui ont été l'objet des
débats auxquels nous avons assisté !
Certains organismes ont fait des estimations : pour avoir 1 % supplémentaire
de retraite, il faudrait consacrer 1 % de ses revenus salariaux à des fonds de
retraite à partir de quarante-deux ans.
Si l'on commençait à vingt ans et que l'on versait sans discontinuer, on
atteindrait un taux de 2,54 % au moment de la retraite. Si l'on commençait à
cinquante-cinq ans, on atteindrait seulement 0,2 %. Ce dispositif ne serait
réellement intéressant que pour des gens âgés de vingt à quarante ans et
cotisant sur une longue période. Mais à vingt ans, vingt-cinq ans, vingt-huit
ans, monsieur le ministre, même quand on est qualifié, même quand on est futur
cadre, on enchaîne les petits boulots et les stages bidons, et on vit avec
l'aide de ses parents. On n'a pas vraiment les moyens de se payer un plan
d'épargne retraite ! Dans ces conditions, pour qui cette disposition est-elle
prise ? On le voit bien, la peau de chagrin continue à se rétrécir.
Quelle garantie aura le salarié, le cadre, dans vingt ans, dans trente ans, au
moment de sa retraite ? Qui, sur les bancs des assemblées, peut s'engager,
affirmer avec certitude que les salariés retrouveront bien l'argent qu'ils ont
investi ? On connaît tous les scandales des fonds de pension dans d'autres
pays, aux Etats-Unis, au Japon - avec des pertes de 940 milliards de francs des
fonds de pension - en Grande-Bretagne avec l'affaire Maxwell, en Allemagne avec
l'affaire AEG.
A ces risques s'ajoute le débat sur le type des contrats liant assureur et
assuré, contrats en francs ou en unités de compte. Le Sénat a nettement opté
pour le contrat en unités de compte, celui auquel préfèrent recourir les
assureurs. C'est en fait ce type de contrat qui, en cas de crise économique ou
d'erreur de gestion, fait supporter les pertes au souscripteur, alors que les
contrats en francs garantissent à la personne, à l'issue du contrat, la
restitution des fonds, éventuellement augmentés des intérêts dont le taux
minimum est garanti. En faisant le choix des contrats en unités de compte, on
fait prendre le risque au salarié.
Cependant, je vous parle, monsieur le ministre, de garanties de revenus pour
des salariés ou d'inégalité devant la retraite, de précarisation de la
solidarité. C'est vous dire mon incroyable naïveté, car ce n'est pas de cela
qu'il s'agit ici !
D'ailleurs, si la question de fond avait été celle des retraités, on aurait
laissé cela à la commission des affaires sociales. Mais on parle ici d'une
chose beaucoup plus importante : on parle d'argent, et c'est la commission des
finances qui rapporte.
Son rapporteur écrivait en décembre : « le maintien de la capacité compétitive
de la place de Paris en Europe dépend largement du succès de cette réforme
»...
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Parce que vous souhaitez que la place de Paris ne soit pas
compétitive ?
Mme Joëlle Dusseau.
Est-ce la question quand on parle d'une chose aussi importante que les
retraites ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
C'est la question ! La place de Paris fait travailler des
milliers de salariés !
M. le président.
Monsieur le rapporteur !
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le rapporteur, je prends acte ici que, pour vous, l'objet de cette
proposition de loi...
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Ne travestissez par les choses ! J'ai parlé de son objet tout
à l'heure à la tribune !
M. le président.
Monsieur le rapporteur, vous avez toujours la parole, mais pas pour
interrompre en permanence un orateur !
Mme Joëlle Dusseau.
Votre argument, monsieur le rapporteur, illustre tout à fait l'état d'esprit
dans lequel vous vous trouvez et dans lequel, malheureusement, se trouve aussi
le Gouvernement !
Vous répétez, dans le second rapport que vous venez de nous présenter, que «
Les fonds de pension ont pour objet de verser des pensions. » C'est bien le
moins ! « Leur existence a pour effet de renforcer le marché des actions et
donc le financement en fonds propres de nos entreprises. »
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Parce qu'il ne faut pas renforcer le financement en fonds
propres des entreprises ?
Mme Joëlle Dusseau.
Même réponse, monsieur le rapporteur !
M. le président.
Je ne voudrais pas que la discussion s'engage de cette façon à l'occasion de
l'intervention de Mme Dusseau !
Monsieur le rapporteur, vous avez la possibilité d'intervenir à tout moment :
après la réponse de M. le ministre, je vous donnerai la parole pour répondre,
si vous le souhaitez, mais je vous demande, pour l'heure, de laisser Mme
Dusseau terminer son intervention.
Mme Joëlle Dusseau.
Je vous remercie, monsieur le président.
Les interruptions assez peu courtoises de M. le rapporteur illustrent
parfaitement son état d'esprit à l'égard de cette proposition de loi.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très bien !
Mme Joëlle Dusseau.
D'un bout à l'autre du texte, comme d'ailleurs d'un bout à l'autre de la
discussion - nous venons d'en avoir encore un exemple très concret - nous
voyons bien que le débat tourne autour des problèmes des assurances, des fonds
propres des entreprises et de la compétitivité de la place de Paris.
Je ne discute pas de l'importance de ces questions ! Je dis simplement, mais
fortement, que développer tout un débat, important, sur le thème des
difficultés pour la société de payer les retraites dans les décennies à venir,
laisser de côté l'ensemble des personnes trop démunies pour payer des fonds de
pension, inciter les autres à s'engager dans cette opération, dont nul ne sait
vraiment, ici ou ailleurs, ce qu'elle donnera effectivement dans vingt ou
trente ans, tout cela, pour en réalité redonner des fonds propres aux
entreprises, relève de l'escroquerie morale !
M. Jean Chérioux.
Si c'était vrai, oui ! Mais ce n'est pas vrai !
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur Chérioux, il faudrait vous mettre d'accord avec M. le rapporteur !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Nous sommes parfaitement d'accord !
Mme Joëlle Dusseau.
Il y a là une discussion interne à la majorité que je trancherai pas !
M. Jean Chérioux.
Votre interprétation est inexacte ; elle est fallacieuse !
M. le président.
Ne vous laissez pas interrompre, madame Dusseau ! Poursuivez.
Mme Joëlle Dusseau.
J'en ai terminé, monsieur le président.
Les sénateurs radicaux-socialistes du groupe du Rassemblement démocratique et
social européen voteront contre cette proposition de loi.
Je tiens d'ores et déjà à préciser que M. Vigouroux m'a fait savoir que,
contrairement à ce qu'il avait fait en première lecture, il souhaitait
s'abstenir sur ce texte.
(Applaudissements sur certaines travées socialistes
et du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'examen
de cette proposition de loi portant sur la mise en place de fonds d'épargne
retraite, je dois avouer bien humblement ma peine à discerner dans ce texte le
véritable ordre de priorité.
M. Alain Lambert.
Ah !
M. Paul Loridant.
La priorité affichée est-elle la retraite ? N'est-ce pas plutôt la
consolidation des marchés financiers ?
M. Jean Chérioux.
Non !
Mme Joëlle Dusseau.
Si !
M. Paul Loridant.
Rappelons-nous, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, monsieur le
ministre, que, lors de la première lecture, le président Fourcade, au nom de la
commission des affaires sociales, avait balayé l'argument que nous avancions
quant à la nécessité, eu égard à la situation de la sécurité sociale, de
saisir, au moins pour avis, la commission des affaires sociales, qu'il préside,
en indiquant que le texte présent ne concernait que « des problèmes financiers
relevant des questions de l'assurance ».
Quel ne fut pas notre étonnement de constater ensuite que le ministre des
finances parlait, lui, d'un texte répondant à un problème majeur pour les
Français, leur retraite, propos que M. le ministre vient de réitérer à
l'instant.
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Eh oui !
M. Paul Loridant.
Ainsi donc, avec un président de la commission des affaires sociales parlant
de finances, et un ministre des finances parlant d'affaires sociales, nous nous
trouvions devant un abîme de perplexité,...
M. Alain Lambert.
Mais c'est la France qui compte !
M. Paul Loridant.
... dont deux lectures à l'Assemblée nationale et ici même nous ont,
toutefois, tirés grâce au rôle joué par notre rapporteur.
Oui, décidément, cette proposition de loi sur l'épargne retraite est conçue,
dans son essence, comme un texte clairement financier.
M. Jean Chérioux.
Non !
M. Paul Loridant.
Elle vise à draîner vers les marchés boursiers une part croissante de la
richesse des salariés en favorisant le marché des actions. Telle est la vérité
!
Si ce texte a effectivement des implications sociales, c'est, d'abord, parce
qu'il soumet à la loi d'airain de l'argent-roi une partie des relations de
solidarité entre les générations, des relations sociales dans l'entreprise et
vise à vassaliser encore un peu plus la création d'emplois et le travail à la
courbe d'évolution des indices boursiers.
M. Jean Chérioux.
Ce sont des mots tout cela. Ça n'a pas de sens !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Supprimez la Bourse !
M. Paul Loridant.
Ce texte est un texte financier...
M. Jean Chérioux.
Faites-moi de bonnes finances, je vous ferai de bonnes retraites !
M. le président.
Veuillez laisser s'exprimer l'orateur.
M. Paul Loridant.
Ce texte est un texte financier, dévolu aux acteurs des marchés, un outil
destiné à leur offrir une nouvelle marge de manoeuvre ou la source de nouvelles
recettes.
Un certain nombre des caractères fondamentaux du texte illustrent cet aspect
de la question.
Il consacre d'abord le rôle déterminant des compagnies d'assurance, acteurs
fondamentaux des marchés obligataires et qui ont besoin de nouvelles facilités
pour intervenir sur les marchés d'actions. Il n'y a pas de honte à l'avouer.
Les compagnies d'assurance le disent elles-mêmes.
Cela correspond à un débat qui agite depuis quelque temps la majorité
parlementaire actuelle, les différents instituts économiques, le CNPF et ses
fédérations professionnelles.
Ce débat, c'est celui de la priorité à accorder en matière de fiscalité de
l'épargne, en vue d'orienter cette épargne vers des placements en actions.
Toute mesure en ce sens n'est conçue qu'assortie de dispositions fiscales ou
sociales avantageuses qui servent de « produits d'appel ».
Nous en avons une remarquable illustration avec les articles 25 et 26 que,
suprême subtilité, nos collègues députés de la majorité ont adoptés conforme,
ce qui fait qu'on ne peut plus discuter ces très importants articles, qui
créent un véritable abcès de fixation sur les comptes des régimes
complémentaires appelés à grossir, tandis que la défiscalisation au titre de
l'impôt sur le revenu s'apparente, au moins pour les plus hauts revenus, à une
resucée du régime des
stock options,
qui avait lui-même été réglementé
et moralisé.
Dans notre histoire fiscale, il en a toujours été ainsi. De la rente Pinay à
l'emprunt Balladur en passant par l'emprunt Giscard indexé sur l'or, on a
toujours fait assaut d'imagination pour optimiser, fiscalement parlant,
certains placements des particuliers.
Le débat sur le choix entre actions et obligations rebondit d'ailleurs sur la
qualité des engagements que pourront souscrire les fonds de pension tels que
définis à l'article 23.
Il reste en effet un débat sur le niveau d'engagement des fonds en termes de
souscription d'actions de sociétés non cotées, de parts de fonds communs de
placements innovation ou encore de parts de capital détenues dans une même
société ou dans un même groupe.
Cela signifie-t-il que les fonds deviendront, avec le temps, des actionnaires
de référence exigeant une rémunération conséquente de leurs engagements,
rémunération qui, finalement pèsera sur l'emploi et les salaires ? L'expérience
des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne dans ce domaine est édifiante et,
monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, elle est inquiétante.
Car là est le noeud du problème : socialement parlant, les fonds de pension se
positionnent clairement à l'encontre de la tradition sociale de notre pays, et
cela dès l'origine.
Il demeure encore possible aujourd'hui, aux termes de la loi, de battre en
brèche la négociation collective et de mettre l'employeur en situation
d'imposer à ses salariés l'adhésion à un fonds de pension.
Que soient éventuellement posés des délais à la mise en oeuvre de cette
procédure dite « démocratique », mais unilatérale, ne nous permet pas d'oublier
l'essentiel.
Dans certaines entreprises françaises, il y a carence des institutions
représentatives du personnel ou, lorsque celles-ci existent, il est parfois
extrêmement difficile d'engager la négociation sur les vraies questions :
salaire, emploi, production, stratégie d'entreprise.
Cette volonté d'aboutir coûte que coûte à faire participer des salariés au
financement des fonds de pension est, en fait, à l'instar de celle qui a
présidé à l'élaboration d'autres textes que nous avons examinés, conçue comme
une nouvelle remise en cause des droits et garanties collectifs que les
salariés de notre pays ont obtenus au cours d'années de luttes syndicales.
Autre aspect fondamental : la souscription à un fonds de pension est
clairement posée comme un choix individuel, volontaire, du salarié ; autrement
dit, pour reprendre la terminologie de M. Thomas, il s'agirait d'une option
libérale.
Notons que, parmi les aiguillons utilisés pour favoriser cette adhésion,
figure la possibilité pour les employeurs d'abonder les versements des salariés
jusqu'à quatre fois leur montant, celui-ci étant plafonné, il est vrai.
Notons aussi que les administrateurs salariés des caisses d'assurance maladie
ou des régimes complémentaires obligatoires ne seraient probablement pas en
désaccord avec ce principe du rapport 20 %-80 % entre cotisations des salariés
et cotisations des employeurs.
Sur le fond, comme le plafond est situé très haut, cette invitation à la
souscription aux fonds de pension - le fameux troisième pilier - risque à terme
de peser sur les deux autres piliers, contrairement aux affirmations répétées
de vous-même, monsieur le ministre, et de MM. Thomas et Marini. La difficulté
n'est pas pour aujourd'hui, mais vous verrez dans dix ans !
Il y a peu de doute à avoir sur l'arbitrage qui résultera de telles
dispositions.
Les employeurs ont souvent tendance à procéder à un partage de la valeur
ajoutée entre emploi et salaire, une fois déduite évidemment la rémunération du
capital.
Demain, on ajoutera les fonds de pension à cet arbitrage, fonds qui pèseront
donc sur l'emploi et les salaires, c'est-à-dire sur ce qui sert d'assiette aux
ressources des régimes obligatoires de base ou complémentaires, mais aussi de
fondement au développement de la consommation des ménages, donc de la
croissance.
Je suis désolé de dire cela, mais c'est aussi en termes de récession
économique, parce que l'on va mobiliser sur les fonds des ressources qui
n'auront plus d'utilisation immédiate en faveur de l'emploi et des salaires,
que nous nous devons d'analyser les effets de l'application des dispositions
prévues par cette proposition de loi.
On nous demande, en effet, de substituer une épargne bloquée - jusqu'à l'âge
de soixante ans, au moins - à la croissance de la masse salariale et aux
ressources de la protection sociale, dont la liquidité est tout de même plus
clairement établie.
Le fonds de pension est en effet une épargne bloquée, aucune possibilité de
déblocage anticipé n'étant offerte aux adhérents avant l'âge légal de départ à
la retraite. Que ne le dites-vous plus fort, monsieur le ministre, monsieur le
rapporteur !
Sur cette question de l'âge et de la durée de cotisation qui en découle, nous
nous devons de relever certaines données.
Les analyses en matière de fonds de pension sont claires : compte tenu de
l'inflation, il faudrait aujourd'hui cotiser dix-huit ans à un fonds de pension
pour obtenir une rente stabilisée en francs courants et vingt-cinq ans pour
neutraliser les effets de l'inflation sur la valeur des prestations servies.
Faites le compte : tout salarié âgé de plus de quarante-deux ans aujourd'hui
perdra de l'argent dans cette affaire, sauf à travailler jusqu'à soixante-sept
ans. Il faut le dire aux futurs cotisants !
Quant aux salariés âgés d'au moins trente-cinq ans, comme le disait ma
collègue Mme Dusseau, ils semblent avoir intérêt à cotiser dès maintenant. Mais
le peuvent-ils ? Est-ce à cet âge, lorsqu'on est soit à la recherche d'un
emploi, soit chargé de famille avec des enfants en bas âge, que l'on peut
vraiment cotiser à une caisse d'épargne retraite ?
Le fait de reverser en rente ou en capital le produit des placements ne change
pas grand-chose à l'affaire : les fonds de pension, en quelque sorte, sont
l'instrument de détérioration des liens de solidarité entre générations qui
fondent aujourd'hui nos régimes de protection sociale.
Il s'agit d'un choix de société, choix qui procède sans doute de la logique
que nous connaissons depuis longtemps, qui vise à alléger la fiscalité du
capital et à privatiser les entreprises publiques, à chasser la dépense
publique, à favoriser l'initiative privée ou encore à mettre un terme à
l'économie mixte pour que le marché, dans sa grande bonté, daigne résoudre la
fracture sociale résultant du désordre naturel qui règne dans notre pays. Il en
est des fonds de pension comme de bien d'autres domaines.
Ce qui met aujourd'hui la retraite des salariés sous la coupe des marchés
financiers relève de la logique qui tend à faire éclater la SNCF, à ouvrir à la
concurrence les services publics ou à banaliser le financement du logement.
Et tant pis si cette financiarisation de la protection sociale, déjà bien
entamée avec la CADES, qui va servir en treize ans près de 200 milliards de
francs d'intérêt aux marchés financiers, casse les solidarités et mine,
progressivement, les régimes obligatoires de base et les régimes
complémentaires !
M. Alain Lambert.
Vous voulez transférer cette dette aux générations futures, peut-être !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Ce serait un emprunt gratuit !
M. Paul Loridant.
L'essentiel, c'est bien connu, c'est que les marchés financiers se portent
bien et que, tout à fait accessoirement, certaines PME disposent de nouveaux
moyens de financement.
A ce propos, force est de constater que le problème de la répartition des
risques conduira probablement les gestionnaires des fonds à souscrire des parts
de sociétés cotées, c'est-à-dire, le plus souvent, de celles qui ont moins
besoin de fonds que les PME mais qui ont plutôt besoin de trésors de guerre
utilisables pour quelques OPA ou opération de prise de contrôle, toujours
coûteuse en emplois, finalement.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Supprimez les marchés !
M. Paul Loridant.
Le choix qui nous est offet est clair : ou l'on développe les solidarités
entre générations et l'on répond aux besoins sociaux, ou l'on crée des fonds
d'épargne retraite qui répondent peut-être aux préoccupations des salariés les
mieux lotis et des cadres dirigeants, mais sûrement aux besoins en fonds
propres des entreprises faisant appel au marché financier.
Nous disons non à cette proposition de loi faussement présentée comme un texte
à caractère social, mais qui, finalement, vise à consolider le marché des
actions et fera des fonds d'épargne retraite des actionnaires de référence
jouissant d'un poids déterminant dans les conseils d'administration des
entreprises.
J'imagine volontiers la situation d'un employeur disant à ses salariés : « Je
ne peux augmenter les salaires car je dois servir de solides dividendes aux
actionnaires de référence, donc aux fonds de pension ». Ce serait le stade
suprême du dialogue social que de procéder de la sorte ! C'est ce qui se passe
aux Etats-Unis, c'est ce qui se passe en Grande-Bretagne, et, monsieur le
minsitre, monsieur le rapporteur, nous n'en voulons pas pour la France.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyens, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui est parvenue au stade de la
dernière lecture avant que la commission mixte paritaire n'en soit saisie. Je
souhaiterais, à cette occasion, très simplement et très brièvement, présenter
quelques observations d'ordre général, afin de bien marquer les convictions de
la commission des finances, merveilleusement exprimées par M. Philippe Marini,
son rapporteur.
Quelles que soient les embûches de la démarche entreprise - et elles ne
manquent pas - nous ne devons pas donner l'impression de consentir du bout des
lèvres à un texte dont la portée est à terme très importante. Bien au
contraire, nous devons unir nos forces pour l'introduire dans notre
législation, imprégné de la sagesse sénatoriale, et lui donner ainsi toutes les
chances d'une réussite éclatante.
La France ne saurait, à l'évidence, rester à l'écart de mécanismes d'épargne
retraite qui ont fait leurs preuves dans les autres pays, pays qui sont aussi,
ne l'oublions pas, nos concurrents économiques. Nos entreprises, grandes et
moyennes, si nous n'y prenions garde, se verraient, demain, imposer des
décisions dangereuses pour notre économie, pour nos emplois, si ne demeuraient
présents sur le marché que les énormes fonds de pension anglo-saxons. Quelques
exemples récents illustrent parfaitement que mon propos ne relève nullement
d'une quelconque fiction.
La nécessité de nous fixer des objectifs ambitieux en la matière ne doit pas
nous conduire pour autant à manquer de vigilance.
Dans un pays comme la France, par tradition peu familier de ces mécanismes
financiers, le moindre échec - voire le moindre incident - rencontré par un
fonds, fût-il de taille modeste, pourrait ruiner la confiance nécessaire à
l'existence de ces fonds. Nous devons donc mes chers collègues, en les
instituant, nous assigner la plus haute exigence pour leur sécurité. Les
propositions de M. Philippe Marini, au nom de la commission des finances, en
matière de ratios prudentiels me paraissent participer de cette volonté de
sécurité financière. Bien sûr, il est toujours possible d'argumenter pour
quelques dixièmes de point en plus ou en moins. Là n'est pas le débat.
En réalité, la vraie mesure de l'enjeu nous impose de satisfaire, dès
l'origine, à des exigences prudentielles élevées.
On pourra toujours, dans l'avenir, fort de l'expérience acquise, assouplir le
dispositif si c'est nécessaire. A l'inverse, chacun le sait, il est
pratiquement toujours impossible, ou au moins extrêmement délicat, de revenir
en arrière.
Cette première constatation de bon sens me semble en entraîner une autre. Les
fonds de pension, quelle que soit la dénomination retenue, ont un objectif et
un seul : garantir les intérêts des assurés et des épargnants en contribuant,
pour partie, à la recherche d'une solution au problème démographique gravissime
de la pyramide des âges, problème dont nos compatriotes et, parfois, la
représentation nationale ne semblent pas mesurer toute l'ampleur. Il m'arrive
de frémir à l'idée du jugement que l'histoire portera sur l'imprévoyance de
notre génération à l'endroit de celles qui suivront, au regard tant de notre
endettement que des retraites. Toute notre réflexion doit donc être commandée
par cet impératif, qui appelle des meures d'application dénuées de toute
faiblesse, de tout souci de concilier des objectifs contradictoires.
Ces mesures d'application sont diverses, et je ne reviendrai pas sur le détail
des propositions faites par notre commission des finances, qui ont été très
clairement exposées par notre rapporteur. Je me limiterai donc à des
considérations de simple bon sens.
Ce bon sens suggère que la Commission des opérations de bourse puisse exercer
la plénitude de ses compétences, que les gérants des fonds d'épargne retraite
ne s'assignent qu'un seul objectif, celui de la défense des intérêts des
épargnants, et que la transparence soit recherchée à tous le niveaux des
structures de gestion.
J'ai le sentiment que, en permettant l'information détaillée du public, en
motivant les gestionnaires des fonds et en recherchant la transparence la plus
absolue, nous aurons choisi la voie de la sagesse et élaboré la meilleure
législation possible.
Si, comme j'en ai la conviction, cette proposition de loi participe de
surcroît à la dynamisation du tissu économique par le renforcement des fonds
propres de nos entreprises, alors, nous pourrons être légitimement fiers du
succès de cette initiative parlementaire, succès auquel, monsieur le ministre,
le Sénat n'aura pas été étranger.
A ce propos, je tiens à rendre à notre collègue Philippe Marini l'hommage
qu'il mérite. Depuis plusieurs années maintenant, il travaille à ce dispositif
des fonds de retraite avec autant de compétence que de détermination.
Pour conclure, j'insisterai sur l'exigence qui doit être la nôtre de réunir
soigneusement, dès l'origine, les conditions du succès des plans d'épargne
retraite. Elle correspond à l'idée que je me fais de l'intérêt supérieur de
notre pays : garantir la solidartité du pacte social par la réussite de notre
économie, qui passe par celle de nos entreprises et par la création
d'emplois.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.).
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
J'ai, bien entendu, été attentif
aux observations qui ont été exprimées à cette tribune par les différents
intervenants.
M. le rapporteur m'a d'abord interrogé sur le remboursement des avoirs
fiscaux. Il convient de noter que les compagnies d'assurance n'ont pas la
capacité d'obtenir ce remboursement.
En tout état de cause, nous savons bien que le niveau des dividendes versés
par les sociétés n'est pas considérable par rapport à la valeur des actions.
Dès lors, l'attention des investisseurs se porte probablement plus sur
l'appréciation du titre liée à la mise en réserve des bénéfices desdites
sociétés. Il y a là, aussi, une façon de participer au financement du
développement de ces sociétés.
Je vous promets néanmoins de mener à son terme la réflexion sur ce sujet. Il
nous faut procéder à des évaluations. Ces entités seront soumises à l'impôt sur
les sociétés. Nous verrons dans quelle mesure elles peuvent, dans ces
conditions, opérer l'imputation de l'avoir fiscal.
Je ne suis pas sûr qu'il y ait là un problème, mais je m'engage à ce que soit
menée une étude, dont je vous rendrai naturellement compte.
J'ajoute que, aujourd'hui, un certain nombre d'investisseurs étrangers sont
présents sur le marché français sans que, pour autant, ils aient la faculté de
récupérer l'avoir fiscal. C'est aussi un élément au regard duquel nous devons,
sur le plan technique, aller jusqu'au bout de nos investigations.
S'il apparaît que, en cette matière, nous sommes confrontés à des difficultés,
à un frein, je vous ferai une proposition. Nous pourrons faire le point à
l'occasion de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier, qui viendra en discussion au Sénat dans quelques
semaines.
Vous m'avez interrogé ensuite, monsieur Marini, sur la déduction par le
salarié de sa contribution à l'épargne retraite. Sur le plan fiscal, il n'est
pas douteux que le versement qui est fait par le salarié vient en déduction de
son revenu imposable dans la mesure où, avec l'abondement de l'entreprise, il
n'excède pas la limite de 5 %.
Sur le plan social, dans la mesure où l'article 26 rappelle un principe
d'exonération, les sommes qui seront versées au titre de l'abondement, dans la
limite de 85 % du plafond de la sécurité sociale n'entreront pas dans
l'assiette des cotisations.
C'est seulement dans l'hypothèse où l'employeur verserait un abondement
au-delà de 85 % que ce versement prendrait la forme d'un supplément de
rémunération, avec toutes les conséquences qui s'y attachent. Le salarié, dans
ces conditions, ne pourrait pas déduire l'intégralité.
Autrement dit, dans la limite fixée par les dispositions de l'article 26, qui
s'appuient sur la règle des 85 % du plafond de la sécurité sociale, il n'y a
pas de problème. Si l'abondement va au-delà de ce que prévoient ces
dispositions, il y a supplément de rémunération.
M. Massion s'est livré à une démonstration qu'il a voulue convaincante. C'est
le choc de deux conceptions !
Cependant, puis-je vous rappeler, monsieur le sénateur, que ne participeront
que les salariés qui le souhaitent ?
M. Marc Massion.
Qui le peuvent !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Ce n'est pas plus une obligation,
que dans le cas de la PRÉFON ou du FONPEL, le fonds de pension des élus locaux
!
M. Emmanuel Hamel.
La PRÉFON existe et vous n'êtes pas contre, monsieur Massion !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Je n'ai pas connaissance que tous
les fonctionnaires participent à la PRÉFON. Vous ne vous êtes pas élevés contre
la PRÉFON et le FONPEL, mais dois-je comprendre que vous entendez mettre un
terme à ces dispositifs ?
M. Marc Massion.
La PRÉFON concerne 2 % des fonctionnaires !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Peut-être constaterez-vous demain
que les plans d'épargne retraite ne concernent qu'une partie des salariés,
puisque c'est une faculté.
Dès lors, il est très difficile de procéder à une évaluation précise de ce
qu'il en coûtera au budget de l'Etat. En tout état de cause, il en coûtera peu
sur le budget de 1997, le dispositif devant se mettre en place progressivement
en 1997 ; il n'aura donc pas d'impact budgétaire immédiat.
Permettez-moi de vous inviter à une démarche prospective. Si nous suscitons
les plans d'épargne retraite, c'est pour mobiliser une épargne et l'orienter
vers d'autres objets que le financement des déficits publics. J'ai en effet bon
espoir qu'au fil des années ceux-ci disparaîtront. Dans ces conditions, les
épargnants devront chercher d'autres affectations pour leur épargne.
C'est tout de même, convenons-en, une étrange situation que la nôtre, qui voit
l'épargnant consacrer ses fonds disponibles au financement des déficits publics
!
Les contrats d'assurance vie comprennent sans doute une masse considérable de
bons du Trésor et d'OAT. Ainsi, on hypothèque l'avenir en finançant les
déficits présents de la collectivité. Une telle situation pourrait vous
inquiéter, monsieur Massion...
Il est, en vérité, urgent de faire disparaître les déficits publics et de
mobiliser une plus grande part de l'épargne en faveur de l'économie
productive.
Qu'est-ce qui permettra, demain, d'assurer la perpétuation du système de
retraite par répartition, sinon les salaires qui seront alors versés ? Or la
masse des salaires dépendra du nombre des entreprises. Si nous ne sommes pas
capables aujourd'hui de mieux mobiliser nos ressources pour régénérer le tissu
productif, dites-moi, monsieur Massion, où nous trouverons les salaires et donc
les cotisations qui permettront de financer les retraites par répartition.
Je vous l'ai dit, nous sommes, comme vous, attachés à ce socle de solidarité,
mais, selon nous, il ne faut pas empêcher ceux qui le souhaitent de se
constituer un supplément de retraite.
Evitons aussi d'opposer, comme vous le faites, ceux qui entreprennent, qui
bénéficieraient de tous les avantages, et ceux qui, malheureusement,
n'entreprennent pas.
M. Alain Lambert.
Notre pays manque d'entrepreneurs !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Notre société doit retrouver une
culture d'entreprise. Existerait-il une richesse providentielle dont nous
pourrions disposer sans que certains de nos concitoyens aient pris des risques
à un moment donné ?
Etes-vous conscients que nous ne réussirons que si nous retrouvons un sens du
risque ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Les trois millions de chômeurs, ils en prennent des risques !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Oui, madame, mais permettez-moi
de vous dire que le modèle que vous nous proposez est une machine à fabriquer
des chômeurs, la démonstration, je pense, en a été suffisamment faite !
Retrouvons donc le sens de l'entreprise, le sens de l'initiative, de la
responsabilité et de l'investissement ! Il ne sert à rien de demander à l'Etat
de tout payer. On l'a vu, cela ne sert qu'à multiplier les déficits publics.
Est-ce là votre ambition ? Est-ce cela qui redonnera de l'espérance à nos
compatriotes ? Je ne le crois pas.
Enfin, je comprends mal, monsieur Massion, le procès que vous faites aux
dispositions que nous avons retenues puisqu'elles sont parfaitement conformes
aux souhaits exprimés, le 10 décembre, dans une lettre adressée à M. le Premier
ministre par les responsables de la CGT, de Force ouvrière, de la CGC et de la
CFTC.
En adoptant l'amendement de M. Fourcade, le Sénat n'a fait que transcrire
cette préoccupation.
Et voilà qu'aujourd'hui les positions ont changé : vous exprimez une violente
opposition à cette proposition de loi.
Je voudrais vous convaincre, monsieur le sénateur, que ces craintes ne sont
pas fondées et qu'elles sont marquées par quelque dogmatisme, un dogmatisme que
semble d'ailleurs partager Mme Joëlle Dusseau dans l'expression de son
opposition à ce texte.
Je crois, madame, que tous les excès sont insignifiants.
Vous vous demandez si c'est bien le moment de développer l'épargne retraite.
Oui, assurément, si l'on veut construire l'avenir. La politique n'a pas
seulement pour fonction d'apporter des réponses pour l'immédiat. Nous avons
trop souffert, précisément, de ne pas suffisamment anticiper, de ne pas assez
inscrire dans la durée nos initiatives et nos propositions.
S'agissant de la politique salariale, je ne crois vraiment pas que la mise en
place de plans d'épargne retraite soit de nature à la perturber. Il s'agit de
conventions passées à l'échelon d'une entreprise, d'un groupe d'entreprises ou
d'une branche professionnelle. Il s'agit d'enrichir le dialogue et d'affecter
une partie de la valeur ajoutée à la constitution d'une épargne qui va vivifier
l'économie française.
Permettez-moi, madame Dusseau, de vous dire que votre vision de l'entrée dans
la vie active est un peu « tristounette ». Vous affirmez que les jeunes sont
condamnés à des « petits boulots ».
Mme Joëlle Dusseau.
Ce n'est pas ma vision, c'est la réalité !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Ce n'est quand même pas une
fatalité ! Nous héritons d'une situation ; nous y mettons bon ordre. Nous
retrouvons une dynamique et nous ne voulons pas nous abandonner à cette
fatalité.
Mme Joëlle Dusseau.
Bien sûr que ce n'est pas une fatalité ! Mais c'est la manière dont les gens
vivent, les chiffres en témoignent !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
C'est la réalité !
M. le président.
Je vous prie de ne pas interrompre M. le ministre !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
C'est le constat que nous faisons
aujourd'hui. Peut-être est-ce la conséquence d'une gestion publique qui a
prévalu hier et avant-hier.
MM. Jean Chérioux et Pierre Fauchon.
Hélas !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Il faut maintenant en sortir,
aller de l'avant. Il faut considérer que la vie n'est pas une fatalité. Nous
avons autre chose à offrir à nos enfants, madame le sénateur, que la
perspective de petits boulots pour entrer dans la vie active et d'avoir, dans
le futur, à payer une masse de dettes publiques que leurs aînés n'auraient pas
su assumer parce que, à un moment donné, ils auraient voulu perpétuer une
solidarité sans en répartir le coût et en faisant systématiquement appel à
l'émission d'emprunts, parce qu'ils auraient laissé aux générations à venir,
pourtant moins nombreuses, le soin de prendre en charge leurs propres
carences.
Enfin, madame Dusseau - et je m'adresse également à M. Loridant - il est temps
de renoncer à cette vision manichéenne qui oppose la finance et le social.
Le Gouvernement n'a-t-il pas quotidiennement le souci de mettre l'économie et
les finances au service de l'homme et de la solidarité ?
Mme Joëlle Dusseau.
Non !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
A quoi sert-il, madame Dusseau,
de vouloir séparer ainsi le social et l'économique ?
La société est faite de cohérence, et vous n'aurez pas de bonne politique
sociale sans prospérité économique. De même, la réussite suppose la
confiance.
Or certains parmi vous contestent les marchés. Qu'ils nous disent alors
jusqu'où ils comptent aller ! Souhaitent-ils les supprimer ? Expliquez cela,
monsieur Loridant, aux salariés des banques, y compris à ceux de la Banque de
France !
(Sourires.)
Je voudrais que vous alliez jusqu'au bout de votre
démonstration. Avez-vous si peu d'égards pour les salariés des places
financières ?
M. Paul Loridant.
Je n'ai jamais dit cela !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Non, mais vous dites que les
marchés sont dévastateurs.
Ce qu'il faut faire prévaloir, c'est sans doute une autre vision, une
meilleure articulation entre l'exigence sociale et l'exigence des marchés, pour
ne plus constater l'appréciation subite d'un titre le jour où l'on décide
d'engager un plan de restructuration.
M. Alain Lambert.
Eh oui !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Une telle coïncidence est assez
difficilement compréhensible, mais elle est due au fait que, pendant trop
longtemps, l'entreprise concernée n'a pas su mettre en oeuvre les réformes
nécessaires, et que, à un moment donné, il faut bien restructurer pour assurer
l'avenir.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Avec l'argent public !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Pour cela, des fonds sont
nécessaires, qui sont apportés par les épargnants.
Envisagez-vous d'interdire l'épargne ? Pour ma part, j'estime que son
existence est bénéfique et qu'elle doit pouvoir être mise à la disposition de
ceux qui veulent investir. Le marché y contribue, et l'on n'a pas trouvé de
meilleure formule, dès lors que l'on a défini des principes de transparence et
des règles prudentielles. C'est ainsi que nous maintiendrons la solidarité, et
je m'étonne donc de ce procès.
Par ailleurs, l'épargne peut faire l'objet de mises à disposition anticipées,
monsieur Loridant, et ce dans des conditions bien précises : l'article 2 l'a
prévu.
Vous vous êtes élevé contre la CADES.
M. Paul Loridant.
C'était un exemple !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Puis-je vous faire remarquer,
monsieur Loridant, que s'il a fallu assurer le financement de cet organisme,
c'est parce que les gouvernements que vous avez soutenus n'ont pas pris les
décisions opportunes pour mettre bon ordre dans les finances sociales ?
Il était donc indispensable de mettre fin au financement un peu hypocrite
qu'assurait la Caisse des dépôts et consignations jusqu'au 31 décembre, date à
laquelle, au terme d'une opération magique, la dette disparaissait pour
renaître dès le 2 janvier ! Est-ce là la transparence que vous prônez ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Vous faites la même chose, monsieur le ministre !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Est-ce là une politique de vérité
et de sincérité ? Je ne le crois pas. Cette attitude ne correspond certainement
pas à vos convictions, monsieur Loridant. Je vous connais suffisamment pour ne
pas vous faire ce procès.
(M. Lambert sourit.)
En matière de retraite, ce qui compte, c'est la démographie. Or un Livre
blanc - les gouvernements socialistes n'étaient pas avares de littérature -
faisait apparaître que l'on compterait, pour un retraité, trois cotisants en
1981, 2,7 cotisants en 1995 et deux en 2015. C'est cela qui devrait vous
inquiéter, car comment assurera-t-on le financement des retraites ?
Mme Joëlle Dusseau.
C'est votre réponse, monsieur le ministre ?
M. Emmanuel Hamel.
C'est la question à laquelle il fallait répondre !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances
Mais oui, madame Dusseau, car si
nous régénérons le tissu économique, nous serons en mesure de créer des
emplois. Or, qui dit emplois dit salaires, donc élargissement de l'assiette des
cotisations et capacité de faire face à l'obligation de solidarité.
Par conséquent, je vous invite à ne pas vous enfermer dans une vision statique
de la société et dans une sorte de résignation, en matière de retraites, qui
évoque celle des naufragés du
Radeau de la Méduse.
Voilà ce que je
voulais affirmer.
Je remercie enfin M. Lambert, qui a bien défini le champ de nos travaux et de
nos réflexions. Je pense qu'il a eu raison d'insister sur la nécessité de
déterminer des ratios prudentiels pertinents. Si l'Assemblée nationale a cru
pouvoir déplacer légèrement le curseur, c'est parce qu'elle souhaitait mettre
l'accent sur l'impératif d'affecter une fraction du produit de l'épargne
retraite aux petites et moyennes entreprises. Je sais que ce n'est pas facile
sur le plan technique, mais nous devons avoir, les uns et les autres, le souci
permanent de veiller à ce qu'une part de cette épargne puisse favoriser la
création d'entreprises qui, dans vingt ans, emploieront sans doute des
personnels nombreux, ce qui permettra d'assurer la pérennité de la retraite par
répartition.
M. Lambert a également posé, dans toute sa dimension, la problématique de la
retraite, et je tiens à souligner que le Gouvernement souscrit totalement à son
analyse.
Telles sont les réponses que je souhaitais faire aux différentes observations
qui ont été formulées au cours de cette discussion générale. Je ne doute pas
que le Sénat contribuera lui aussi à enrichir ce texte, et je n'oublie pas que
M. Marini était lui-même l'auteur d'une proposition de loi similaire qui avait
été conçue au sein de la commission des affaires sociales, avant d'être reprise
par la commission des finances. Par conséquent, je crois que c'est le Sénat
tout entier qui doit s'approprier ce texte.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et Républicains
et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Exception d'irrecevabilité
M. le président.
Je suis saisi d'une motion n° 44, présentée par Mme Luc, M. Loridant, Mme
Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et tendant
à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare
irrecevable la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée
nationale en deuxième lecture, créant les plans d'épargne retraite (n° 179,
1996-1997). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative
ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour
quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie
au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée
n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Beaudeau, auteur de la motion.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre
assemblée est chargée d'examiner pour la deuxième fois le texte instituant la
création de fonds de pension.
Nous avions déjà déposé, en première lecture, une motion tendant à opposer
l'exception d'irrecevabilité. Aucune réponse n'avait été apportée, ni par le
rapporteur, ni par le Gouvernement, à nos critiques les plus fondées.
Le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale étant, somme toute, peu
différent de celui que nous avons déjà examiné en première lecture, il ne nous
paraît pas davantage acceptable.
Son irrecevabilité tient, en premier lieu, au fait qu'il déroge au principe
d'égalité énoncé par notre Constitution.
Le texte prévoit certes que tous les salariés pourront, s'ils le désirent,
adhérer à un plan d'épargne retraite, souscrit par leur employeur, et se
constituer ainsi un complément de retraite qui s'ajoutera aux pensions versées
par les régimes généraux et complémentaires.
L'aspect alléchant du dispositif tient aux avantages fiscaux proposés :
déductibilité à hauteur de 5 % du salaire brut du montant des versements, avec
possibilité d'atteindre 20 % du plafond de la sécurité sociale, ce qui signifie
qu'environ 30 000 francs pourront être déduits du revenu imposable.
L'immense majorité des salariés n'a donc que peu de chose à attendre de cette
réforme, qui ne concernera que ceux qui paient des impôts, soit 50 % des foyers
fiscaux, et ne s'adressera en fait qu'aux détenteurs de revenus élevés,
lesquels sont déjà les principaux bénéficiaires de la prétendue réforme fiscale
dont on nous rebat les oreilles en ce moment.
En effet, des foyers aisés, pourront avantageusement placer une grande partie
des économies réalisées grâce à la baisse de l'impôt sur le revenu sur un plan
d'épargne retraite, ce qui entraînera une nouvelle baisse de leur revenu
imposable, et donc du montant de leurs impôts.
En revanche, l'économie d'impôt réalisée par les foyers aux revenus moyens ne
suffira pas à faire face aux prélèvements supplémentaires que constituent
l'augmentation du prix des carburants et l'accroissement du taux de la CSG et
du RDS prélevés sur les plans d'épargne logement ou d'épargne retraite.
La proposition de loi créant l'épargne retraite établit donc l'inégalité
devant l'impôt, sur le plan des principes et sur celui des faits, et le
dispositif prévu ne se révèle finalement intéressant que pour les bénéficiaires
de revenus mensuels compris entre 70 000 et 80 000 francs. Bref, cela ne va pas
précisément, monsieur le ministre, dans le sens d'une réduction de la fracture
sociale !
En effet, alors que la majorité des salariés voient leur pouvoir d'achat
laminé, que la moitié des chômeurs indemnisés perçoivent moins de 4 000 francs
par mois, que de nombreuses familles se privent sur l'essentiel, qu'un grand
nombre d'entre elles ne peuvent même plus faire face aux dépenses de restaurant
scolaire pour leurs enfants fréquentant collèges et lycées, que de nombreux
salariés n'adhèrent plus, faute de ressources suffisantes, à un régime de
mutuelle complémentaire pour couvrir leurs frais de maladie, comment
pourrait-on leur proposer d'adhérer à un plan d'épargne retraite ?
Par ailleurs, cette situation ne peut que s'aggraver avec le développement du
travail à temps partiel que le Gouvernement appelle de ses voeux ou
l'instauration du « CIP
bis
», rebaptisé « stage diplômant », qui permet
d'embaucher au rabais de jeunes diplômés. L'inégalité de principe et de fait
s'amplifiera donc.
Plus largement, c'est la base même du dispositif proposé, le système de
retraite par capitalisation, qui contrevient au principe fondamental de
l'égalité entre citoyens.
Ce système aggrave, à l'âge de la retraite, les inégalités de la vie active,
puisque la différence se creuse en fonction de la part du revenu pouvant être
épargnée : sur ce point, l'écart est encore plus grand que celui qui est
observé en matière de salaires. Cette proposition de loi favorise donc
l'inégalité des retraites, elle est en cela contraire à la Constitution.
Irrecevable, ce texte l'est sous un autre angle, puisqu'en s'attaquant au
régime de retraite par répartition il contredit le préambule de la Constitution
de 1946, qui stipule que la nation doit garantir « à tous, notamment à
l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la
sécurité matérielle ». En effet, le dispositif proposé est, comme je l'ai
montré, inégalitaire, mais surtout il sape les bases du système de retraite mis
en place après la guerre.
Bien sûr, l'auteur de cette proposition de loi tente souvent d'en cacher
l'objectif véritable et M. Thomas peut ainsi déclarer qu'« il faut pérenniser
ce système de répartition auquel nous sommes très attachés. L'épargne retraite
est un supplément qui vient consolider ce système ».
Dans ce cas, pourquoi la quasi-totalité des grandes organisations syndicales,
que ce soit la CGT, la CFTC, la CGC ou Force ouvrière, se sont-elles opposées,
et pour la première fois de manière unitaire, à l'institution des fonds de
pension ?
Elles savent que ce nouvel étage ajouté à l'architecture du système de
retraite risque de mettre en difficulté les deux autres, à savoir le régime
général et, surtout, le régime complémentaire.
En effet, en dépit des propos rassurants des promoteurs des fonds de pension,
les systèmes de retraite par répartition et par capitalisation entreront en
concurrence : l'employeur n'aura-t-il pas intérêt à souscrire au plan d'épargne
retraite - il sera alors dispensé de verser des cotisations sociales - plutôt
qu'à accorder une augmentation de salaire ? En outre, qui dans ces conditions
acceptera de voir ses cotisations augmenter ? La proposition de loi remet donc
en question, en plus des deux principes d'égalité évoqués, l'égalité des
retraites.
Dans les circonstances actuelles, la mise en oeuvre du texte entraînera une
perte de 6 milliards de francs de cotisations par an pour les trois branches de
la sécurité sociale et de 3 milliards de francs pour les régimes de retraite
complémentaire. Le déficit de la branche vieillesse ne peut que se creuser - et
vous le savez, monsieur le ministre - à cause des exonérations de charges
prévues par la proposition de loi.
Pour échapper à cette perspective, le Sénat, suivi d'ailleurs par l'Assemblée
nationale, a voté en première lecture un amendement présenté par le président
de la commission des affaires sociales, M. Jean-Pierre Fourcade, et tendant à
contenir le montant de l'abondement de l'employeur sous la limite d'exonération
de 85 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 139 944 francs.
Cela ne réduira cependant que de 100 millions de francs la perte, estimée à 6
milliards de francs, que subira le régime obligatoire.
Comme le faisait remarquer mon ami Alain Bocquet, président du groupe
communiste à l'Assemblée nationale, rien n'empêchera, après avoir approuvé,
dans un premier temps, le principe général de la création des fonds de pension,
d'augmenter discrètement, dans les années à venir, le taux d'exonération dont
bénéficieront les souscripteurs ! En l'occurrence, la bombe visant le système
de retraite par répartition sera à retardement, monsieur le ministre.
Contrairement à ce que proclament la majorité et le Gouvernement, la création
des fonds de pension tendra non pas à assurer des vieux jours paisibles aux
retraités, mais avant tout à drainer une partie des sommes destinées à financer
les dépenses socialement utiles vers les marchés financiers, la spéculation, la
guerre économique et monétaire.
Il suffit de lire - et d'autres que moi l'ont cité - le rapport de M. Marini
pour s'en convaincre : n'est-il pas indiqué très clairement que « le maintien
de la compétitivité de la place de Paris en Europe dépend largement du succès
de cette réforme » ?
L'argument évoqué est l'investissement pour l'emploi. Mais quelles garanties
avons-nous que ces fonds serviront effectivement à cette fin ? Depuis quand
l'emploi est-il une préoccupation des marchés financiers ?
Il semble plutôt que les indices boursiers - on vient de le voir aux
Etats-Unis - baissent quand le nombre de créations d'emplois augmente trop vite
!
Licencier, supprimer des emplois, baisser les salaires, diminuer le pouvoir
d'achat des prestations sociales, tel est le prix de la course au profit
maximal et de la réduction des déficits par réduction des dépenses publiques ou
des dépenses sociales.
Et il faut dire que le marché est porteur ! Voilà quelques semaines, à propos
de la présente proposition de loi, le journal
Les Echos
ne titrait-il
pas : « Un marché estimé de 30 à 50 milliards : une opportunité pour la bourse
! » ?
Avec cette proposition de loi, c'est bien un pas de plus vers la privatisation
de la sécurité sociale qui est fait.
Quant au sort des retraités, ce qui est arrivé aux salariés du groupe Maxwell
doit nous faire réfléchir lorsque nous prenons des exemples à l'étranger.
Cette proposition de loi est donc contraire à la Constitution parce qu'elle
s'oppose à l'un de ses principes de base, celui de l'égalité des citoyens.
Mais il est plus curieux de voir la majorité passer outre à une disposition
qu'elle a récemment votée lors d'une révision constitutionnelle.
En effet, comme l'avait remarqué mon ami Jean-Luc Bécart, le 12 décembre
dernier, l'article 34 de la Constitution a été complété le 27 février 1996 par
la disposition suivante : « Les lois de financement de la sécurité sociale
déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu
de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses... »
L'article 1er de la loi organique du 22 juillet 1996 précise que seules les
lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu de ce
principe.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'était prononcé contre
l'inscription dans la Constitution de ces lois de financement et contre la loi
organique correspondante.
Nous avions d'ailleurs voté contre la première loi de financement, qui
imposait une logique de restriction des soins à la sécurité sociale.
Dans ce contexte, il est pour le moins curieux que, par le biais du texte
instaurant les plans d'épargne retraite, la majorité passe outre au nouvel
article 34 de la Constitution.
Lors de la première lecture, nous avions souhaité, pour le moins, un débat sur
cet argument qui nous paraît irréfutable.
Qu'avons-nous eu pour toute réponse ? Les sarcasmes de M. Marini parlant d'«
analyse essentiellement idéologique » et une réponse pour le moins laconique de
M. Lamassoure, ce simple mot : « défavorable ».
Pourtant, en toute logique - nous nous étions d'ailleurs opposés à cette
extension de l'irrecevabilité financière prévue par la loi organique - les
dispositions d'exonérations fiscales auraient dû être présentées lors de la loi
de financement.
Mes chers collègues, pouvez-vous contester que l'instauration de fonds de
pension ne pourrait qu'aggraver le déséquilibre de la sécurité sociale ?
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Oui, on le conteste !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Comme nous le disions en première lecture, « si certains ici contestent cette
perte de ressources, le débat doit s'engager ».
Comme trop souvent, ce débat, vous l'avez refusé. Et l'on parle de revaloriser
le rôle du Parlement !
Dès lors, nous ne pouvons que vous proposer, chers collègues, de voter notre
motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité à la proposition de loi
créant les plans d'épargne retraite.
(M. Loridant applaudit.)
M. le président.
Y a-t-il un orateur contre la motion ?...
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, je crains de décevoir Mme Beaudeau car mon intervention sera
brève.
Nous avons véritablement de la peine à communiquer. En effet, au sein de la
commission comme de la majorité sénatoriale, nous estimons avoir développé, de
la façon la plus claire et la plus pédagogique possible, les considérations qui
nous semblent devoir conduire à l'adoption de ce texte. Nous croyons avoir
expliqué clairement que notre pays doit sortir d'une atmosphère totalement
dépendante des prélèvements obligatoires et d'un comportement vertical
consistant à toujours imposer les mêmes prestations, les mêmes cotisations, les
mêmes voies, les mêmes solutions à tous, quelle que soit la situation concrète
de chacun.
Mme Joëlle Dusseau.
C'est cela, le principe de la solidarité nationale, monsieur le rapporteur
!
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Nous avons cru avoir montré que ce texte ouvre un espace de
liberté et prépare l'avenir, ce que vous ne pouvez nier...
Mme Joëlle Dusseau.
Vous vous enfoncez par rapport au discours officiel.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Madame Dusseau, tout à l'heure, vous m'avez fait grief de
vous interrompre.
Mme Joëlle Dusseau.
A juste titre !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
J'ai l'impression que la réciproque est vraie à présent !
(Sourires.)
Mme Joëlle Dusseau.
C'est exact, monsieur le rapporteur !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Vous avez constaté que la démonstration arithmétique, en ce
qui concerne les cotisants, d'une part, et les ayants droit, d'autre part, nous
oblige à faire évoluer les systèmes de protection contre le risque vieillesse.
Est-ce vrai ou est-ce faux ? Peut-on imaginer d'accroître sans cesse les
prélèvements obligatoires et les cotisations sociales ? Peut-on imaginer de
réduire sans cesse la durée de la vie de travail et d'anticiper sans cesse
l'âge du départ à la retraite ? Comment peut-on dire qu'on traite nos
concitoyens en personnes majeures si on continue à les bercer d'illusions ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
C'est vous qui les bercez d'illusions !
M. le président.
Mme Beaudeau, nous sommes dans le cadre d'une motion, vous ne pouvez pas
intervenir.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Ce matin, je n'ai entendu, sur les travées de la gauche,
excusez-moi de le dire, que des interprétations erronées, auxquelles M. le
ministre a répondu fort opportunément et très clairement. Alors, de grâce !
mettons en place ces dispositions...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
En creusant le trou de la sécurité sociale !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
...qui sont empiriques, qui ont une portée qu'il ne faut pas
exagérer...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Enfin !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
... et nous verrons bien qui elles intéresseront.
Concerneront-elles 2 % de nos concitoyens comme dans le cas de la PRÉFON qui
est réservée aux fonctionnaires ? Ce taux sera-t-il plus élevé ? Personne ne
peut le dire.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Si, vous le savez !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Nous n'en savons rien ! Il n'existe aucune simulation digne
de foi en ce domaine.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Si, vous le savez !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Ouvrons un espace de liberté. Madame Beaudeau, vous avez cité
certains chiffres alléguant des pertes d'assiette et de cotisations sociales.
Cette démarche n'est pas rationnelle ; ces chiffres sont susceptibles d'être
démentis parce qu'ils prennent comme hypothèse de travail, tout à fait
gratuite, l'effet de substitution qui se produirait entre une augmentation de
salaire immédiate et un abondement permettant de faire apparaître, dans un
avenir lointain, un supplément de retraite.
Mes chers collègues, c'est vraiment faire peu de cas de la conscience sociale
des travailleurs au sein des entreprises. Peut-on imaginer que leurs
représentants vont accepter de substituer un franc immédiatement et un franc
dans quinze ans, trente ans ou quarante ans ? Soyons sérieux, ne créons pas de
mythe, n'entretenons pas des illusions, ne disons pas à nos concitoyens que
nous pouvons avoir raison tout seuls dans notre petit canton de l'univers !
Il faut un minimum de réalisme, et celui-ci vous commande, mes chers
collègues, de rejeter cette motion tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Il n'est pas simple de débattre
des chemins à emprunter pour construire un avenir meilleur qui contribue à la
cohésion sociale.
On oppose prospérité économique et dimension sociale. Mais tous ceux qui
croient en l'entreprise - et la plupart des responsables d'entreprise sont dans
ce cas - partagent ces convictions. Ils ne peuvent imaginer la prospérité
boursière, la santé des marchés dans un champ de ruines social. Nous avons
collectivement le devoir de sortir d'une vision aussi manichéenne. Ce qui se
met en place a pour finalité l'emploi et la cohésion sociale.
Madame Beaudeau, vous souhaitez le débat. Existe-t-il un lieu plus privilégié
que le Parlement pour débattre ? C'est ici que la représentation nationale
s'exprime. Or, sur un thème aussi essentiel, votre seule préoccupation, c'est
de déclarer que la proposition de loi est irrecevable. Il s'agit là d'une
contradiction.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Une chose est évidente : nous ne sommes pas pour la discussion de cette
proposition de loi !
M. Emmanuel Hamel.
Il faut discuter pour progresser !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Madame Beaudeau, vous dites qu'il
faut débattre et vous invitez le Sénat à ne pas se prononcer sur cette
proposition de loi, au motif qu'elle serait irrecevable. Je vous laisse à vos
contradictions, madame le sénateur.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Vous savez bien qu'il n'y en a pas ; vous avez été vous même parlementaire,
monsieur le ministre !
M. le président.
Madame Beaudeau, je vous ai déjà demandé de ne pas interrompre l'orateur car
nous sommes dans le cadre d'une motion !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Le Gouvernement souhaite que le
Sénat veuille bien entrer dans la discussion pour parfaire ce texte, afin qu'il
réponde à l'attente et aux espérances de nos compatriotes.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Et le trou de la sécurité sociale ?
M. le président.
Madame Beaudeau, vous n'avez pas la parole !
Je vais mettre aux voix la motion n° 44.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le rapporteur, j'ai été choquée par vos propos. Nos concitoyens
doivent cesser de se bercer d'illusions par rapport à l'âge de la retraite,
dites-vous,...
M. Philippe Marini,
rapporteur.
C'est vous qui les bercez d'illusions !
Mme Joëlle Dusseau.
... et vous évoquez le débat sur la retraite à cinquante-cinq ans.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Absolument !
Mme Joëlle Dusseau.
Mais qui, actuellement, met à la rue les salariés à cinquante ans ? Qui les
déclare, à cinquante-deux ou à cinquante-trois ans, inaptes à travailler ? Moi
? Non, bien entendu, ce sont les entreprises.
M. Jean Chérioux.
Ce ne sont pas les entreprises, c'est la situation économique !
Mme Joëlle Dusseau.
Non, ce n'est pas la situation économique, ce sont les entreprises !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Eh bien, tuez les entreprises, la solution sera là !
M. le président.
Mes chers collègues, je vous demande de ne pas interrompre les orateurs, car
nous sommes dans le cadre d'une motion.
Mme Joëlle Dusseau.
Je ne veux pas tuer les entreprises !
Je ne puis accepter que l'on dise que l'on berce d'illusions les salariés à
propos de la retraite à cinquante-cinq ans alors que, dans le même temps, on
les met massivement au chômage. Ainsi, quand ils sont âgés de cinquante-quatre
ou de cinquante-cinq ans et qu'ils recherchent un emploi, on leur dit : de
toute façon, vous n'avez aucune chance d'en trouver. Lorsqu'ils sont
bénéficiaires du RMI et qu'ils sont âgés de cinquante-cinq ou cinquante-six ans
- et combien nous en avons recensé ! - on leur dit : ce n'est pas la peine de
chercher un travail, restez au RMI jusqu'à la retraite.
C'est cela la réalité, monsieur Marini ! Vous parlez de réalisme. Eh bien,
moi, je vous renvoie à la réalité de la société à l'heure actuelle !
Il faut, dites-vous, sortir d'un système dans lequel les mêmes prestations
sont versées aux différentes personnes. Mais c'est cela le principe de la
solidarité ; c'est cela le principe de la sécurité sociale ; c'est cela le
principe de l'égalité.
Vous confirmez que vous voulez sortir de ce système.
M. Jean Chérioux.
On le supprime !
Mme Joëlle Dusseau.
Vous souhaitez donc vous orienter vers un système qui apportera toujours plus
d'argent aux privilégiés.
Lorsque vous dites que l'on ne pourra pas continuer à payer les retraites et
qu'il faut trouver une solution, qui figure dans la présente proposition de
loi, laquelle ne concerne - et vous l'avez vous-même reconnu - que des cadres
aisés, vous illustrez parfaitement votre propos.
Pour cet ensemble de raisons, je voterai contre cette proposition de loi.
Aussi, je voterai la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 44, repoussée par la commission et par le
Gouvernement.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet de la
proposition de loi.
(La motion n'est pas adoptée.)
M. le président.
Nous passons donc à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ Tout salarié lié par un contrat de travail de droit privé et
relevant du régime d'assurance vieillesse de base mentionné au titre V du livre
III du code de la sécurité sociale ou à l'article 1024 du code rural ainsi que
des régimes de retraite complémentaire mentionnés au titre II du livre IX du
code de la sécurité sociale peut adhérer à un plan d'épargne retraite répondant
aux conditions fixées par la présente loi. »
Par amendement n° 1, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter
cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les salariés employés par une entreprise dans laquelle ne sont pas proposés
de plans d'épargne retraite, dans le délai d'un an à compter de la promulgation
de la présente loi, peuvent demander leur adhésion à un plan d'épargne retraite
existant. Si, postérieurement à cette adhésion, un plan d'épargne retraite est
proposé dans leur entreprise, ils peuvent demander que les droits qu'ils ont
acquis soient transférés intégralement et sans pénalité sur ce plan. Un décret
fixe les conditions d'application du présent alinéa. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 64, présenté par le
Gouvernement, et tendant à rédiger comme suit le début du texte proposé par
l'amendement n° 1 :
« A défaut d'intervention d'un accord interprofessionnel national ou d'une
décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés défini dans le champ de
l'épargne retraite défini à l'alinéa précédent, les salariés... »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
L'amendement n° 1 vise en quelque sorte à prévoir un filet
de sécurité. La disposition présentée concerne en effet l'adhésion des salariés
employés par une entreprise qui ne proposerait pas de plan d'épargne
retraite.
La commission estime que, si une telle situation persiste plus d'un an à
compter de la promulgation de la présente loi, ces salariés doivent être en
mesure de demander leur adhésion à un plan d'épargne existant.
Le Sénat avait déjà adopté en première lecture une disposition d'objet
analogue, que l'Assemblée nationale a ensuite subordonnée à une double
condition : l'échec préalable d'une négociation collective sur le plan national
et un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi.
L'amendement n° 1 tend à maintenir la seconde condition posée par l'Assemblée
nationale, mais à ramener le délai à un an. En effet, un tel délai est
vraisemblablement suffisant pour s'organiser et pour mettre en place, le cas
échéant, les dispositions conventionnelles qui seraient susceptibles de donner
naissance à un fonds d'épargne retraite.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 64 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1.
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
La commission a adopté
l'amendement n° 1, dont le premier objet est de réintégrer à l'article 1er la
possibilité, ouverte à l'article 6 dans le texte adopté en deuxième lecture par
l'Assemblée nationale, pour un salarié qui ne bénéficie pas d'un plan dans son
entreprise, d'adhérer à un plan déjà existant. La commission a en effet estimé
que, s'agissant d'un problème d'adhésion et non pas de souscription, cette
disposition avait plus sa place à l'article 1er qu'à l'article 6.
Je ne m'opposerai pas à ce transfert, tout en faisant remarquer que la
position de l'Assemblée nationale n'était pas non plus sans fondement, puisque
l'article 6 traite non seulement des questions de souscription mais également
des conditions dans lesquelles l'adhésion est proposée aux salariés.
Le second objet de l'amendement n° 1 est d'élargir les possibilités d'adhésion
individuelle à un plan déjà existant en cas d'absence de proposition de plan
dans l'entreprise. Le délai d'attente avant l'intervention de cette possibilité
serait réduit de deux ans à un an après la promulgation de la loi. De plus,
cette possibilité ne serait plus conditionnée par l'absence d'accord
interprofessionnel ou de décision unilatérale à portée nationale.
La question de l'adhésion individuelle à l'extérieur de l'entreprise est
particulièrement délicate. Il faut en effet mettre en place un dispositif qui
ne laisse personne sur le bord du chemin.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Mais il faut également laisser la
plus grande place à la négociation collective. L'Assemblée nationale a voulu
donner une prééminence nette à la négociation collective, et ce n'est qu'en cas
d'échec de celle-ci à tous les niveaux - entreprise, branche ou échelon
national interprofessionnel - que l'adhésion individuelle devenait possible.
La commission des finances souhaite donner une place un peu plus importante à
l'adhésion individuelle en réduisant le délai d'attente de deux ans à un an.
Elle ne souhaite pas, par ailleurs, subordonner cette faculté a l'absence de
dispositif national mis en place par accord interprofessionnel ou, à défaut,
par décision unilatérale d'un groupement d'employeurs.
Je comprends la préoccupation de la commission des finances. Cependant, le
Gouvernement est très attaché à ce que la négociation collective soit
privilégiée. Un temps suffisant, s'agissant d'une matière délicate, doit lui
être laissé à tous les niveaux pour mettre en place le dispositif. Le
Gouvernement souhaite donc que la faculté d'adhésion individuelle à un plan
déjà existant à l'extérieur de l'entreprise ne soit ouverte qu'en dernier
ressort, et que si les mécanismes collectifs font réellement défaut.
En outre, il sera plus aisé pour un salarié de se rattacher à un fonds
d'épargne retraite mis en place à l'échelon national, plutôt que de chercher un
plan d'entreprise déjà existant qui lui convienne et qui voudra bien
l'accepter.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 1, sous réserve de
l'adoption du sous-amendement n° 64.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 64 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Monsieur le président, la commission n'a pas été en mesure
d'examiner ce sous-amendement ; mais, à titre personnel, je formule un avis
favorable sur ce texte. Ce dernier, en effet, se situe bien dans la logique du
dispositif qu'il convient de mettre en place : nous devons nous assurer que
personne ne reste au bord du chemin et que le maximum a été fait pendant un
délai raisonnable pour l'obtention d'un accord entre partenaires sociaux, au
niveau approprié.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 64.
M. Marc Massion.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Monsieur le président, cette explication de vote portera à la fois sur le
sous-amendement n° 64 et sur l'amendement n° 1.
Le groupe socialiste ne votera par ces deux textes, et ce pour plusieurs
raisons.
Tout d'abord, ils ne règlent en rien les distorsions d'égalité qui sont
contenues dans cet article et que nous avons déjà relevées en première
lecture.
Par ailleurs, l'amendement n° 1 vise à prévoir un délai d'un an pour
l'adhésion individuelle. Cela signifie que, si les négociations syndicales en
vue de l'élaboration d'un plan dépassent ce délai, le recours à des adhésions
individuelles sera alors possible, ce qui me paraît fâcheux. Au lieu de prévoir
dans ce cas la possibilité d'un transfert possible, mieux aurait valu ne pas
limiter dans le temps les négociations salariales et laisser ainsi les salariés
librement discuter.
En outre, permettre, dans le cas où l'entreprise n'aurait pas de plan, que le
salarié puisse adhérer à un plan d'une autre entreprise me paraît bien
irréaliste.
Enfin, ne vaudrait-il pas mieux parler de transfert des actifs représentatifs
des droits plutôt que de transfert des droits ?
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Si le dispositif proposé prévoit certes des négociations, il encadre néanmoins
ces dernières dans le temps, de sorte que, le délai étant passé, la décision
peut être prise unilatéralement par le chef d'entreprise.
Nous attirons l'attention de la Haute Assemblée sur le fait que cette
disposition, si elle était adoptée, constituerait un précédent, et que certains
chefs d'entreprise auraient alors objectivement intérêt à faire traîner les
négociations : l'accord n'intervenant pas dans les temps, ils pourraient alors
retrouver toute liberté dans la fixation des modalités d'adhésion à ce plan
d'épargne retraite.
Des régimes différents pourraient ainsi coexister au sein de l'entreprise,
privilégiant certaines catégories de salariés et entraînant un accroissement
des disparités entre ces derniers. En effet, le schéma qui prévalait pour les
stock-options peut tout à fait être reproduit.
Dans ces conditions, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre
le sous-amendement n° 64 et l'amendement n° 1.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Je considère moi aussi tout à fait dommageable de ramener le délai des
négociations à un an. Chacun sait, en effet, que ces dernières prennent du
temps, et que le dispositif à mettre en place est compliqué et lourd de
conséquences pour les salariés.
En outre, comme M. Loridant, je pense que certains chefs d'entreprise auront
intérêt à faire traîner ces négociations et donc à dépasser le délai d'un an
pour éviter un accord.
Je voterai donc contre le sous-amendement n° 64 et l'amendement n° 1.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 64, accepté par la commission.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 1, accepté par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 66, le Gouvernement propose de compléter
in fine
l'article 1er par une phrase ainsi rédigée :
« Les avocats salariés relevant de la caisse nationale des barreaux français
mentionnée à l'article L. 723-1 du code de la sécurité sociale peuvent
également adhérer à un plan d'épargne retraite. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
La loi du 31 décembre 1990
relative à la profession d'avocat a unifié un certain nombre de professions
qui, jusque-là, s'exerçaient séparément ; c'est ainsi que des avocats peuvent
être salariés de cabinets.
Certains avocats salariés, notamment les anciens conseils juridiques, relèvent
du régime des retraites par répartition, y compris pour les retraites
complémentaires, et peuvent donc bénéficier de l'accès aux plans d'épargne
retraite.
D'autres avocats salariés ne sont pas soumis à ces régimes de retraite
complémentaire, et, compte tenu de la rédaction actuelle de la proposition de
loi, ne pourraient pas accéder à cette possibilité d'épargne retraite.
A l'Assemblée nationale, M. Jean-Pierre Philibert avait posé la question sous
forme d'amendement ; faute d'expertise, je l'avais invité à retirer ce dernier,
prenant l'engagement de proposer un texte au Sénat si la nécessité était
confirmée.
Le résultat des derniers contacts pris justifie que cette faculté soit ouverte
aux avocats qui exercent sous statut salarié et qui, du fait de la rédaction du
texte, n'auraient pas accès à l'épargne retraite.
Tel est l'objet de l'amendement n° 66.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je me réjouis de la sollicitude exprimée pour les situations
dont il a été fait état. Bien sûr, à titre personnel - la commission n'a pu
examiner cet amendement - j'émets un avis favorable sur ce texte en rappelant
que, lors de la première lecture, nous avions exprimé un souci identique, si je
ne m'abuse, pour les agriculteurs salariés : nous avions estimé que moyennant
peut-être certains aménagements, ils étaient sans doute, eux aussi, compris
dans le champ d'application de la loi.
M. Jean Arthuis
ministre de l'économie et des finances.
Ils le sont.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Les apaisements nécessaires sont donc apportés pour les
secteurs dans lesquels la profession peut être exercée comme salarié ou comme
non-salarié, ce qui est notamment le cas de la profession d'avocat.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ Le plan d'épargne retraite ouvre droit, au profit de ses
adhérents, au paiement d'une rente viagère à compter de la date de leur
cessation définitive d'activité et, au plus tôt, à l'âge fixé en application de
l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, en contrepartie de leurs
versements ou des abondements de leur employeur.
« A cette date, les adhérents ont également la possibilité d'opter pour un
versement unique qui ne peut excéder 20 % de la provision mathématique
représentative des droits de l'adhérent, sans que le montant de ce versement
puisse excéder 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
« Par dérogation aux dispositions des alinéas précédents, la rente d'un
montant annuel inférieur à une valeur fixée par arrêté du ministre de
l'économie est liquidée en totalité sous la forme d'un versement unique.
« L'adhérent à un plan d'épargne retraite peut également demander que tout ou
partie de la rente servie au titre de ce plan soit versée, après son décès, à
ses enfants mineurs, incapables ou invalides ou à son conjoint survivant. »
Je suis tout d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 15, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer au premier alinéa de cet article,
après les mots : « rente viagère », les mots : « régulièrement revalorisée
».
Par amendement n° 45, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, dans le premier alinéa
de l'article 2, après les mots : « rente viagère », les mots : « indexée au
moins sur l'évolution prévisionnelle de l'indice des prix ».
La parole est à M. Massion, pour défendre l'amendement n° 15.
M. Marc Massion.
Le principe d'une revalorisation régulière des rentes servies doit être
affirmé dans la loi, chaque plan pouvant ensuite définir librement les
modalités de cette revalorisation.
Faute d'une telle précision, non seulement l'assuré supportera les risques du
placement, mais encore les rentes servies pourront ne pas être revalorisées.
Vos fonds de pension, monsieur le ministre, n'ont pas, semble-t-il, beaucoup
d'attrait ! Et je pense que vous allez bientôt nous expliquer qu'une fois la
rente liquidée son montant initial ne sera même pas garanti. Tout cela ne fait
pas très sérieux !
Nous proposons donc que chaque fonds, pour chaque plan, prévoie une
revalorisation régulière des rentes servies ; à lui de déterminer librement les
modalités de cette revalorisation, et donc de ne pas prévoir un mécanisme trop
avantageux qu'il ne pourrait pas tenir par la suite. Cela s'appelle, en langage
clair, exercer son métier d'assureur.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 45.
M. Paul Loridant.
Il est, dans ce débat sur le développement de l'épargne retraite, un point
particulièrement important, qui résulte de la réalité des prestations
aujourd'hui servies par les régimes de retraite obligatoires : toutes
comportent des clauses de revalorisation, mais nous voudrions que l'épargne
retraite donne des assurances à cet égard.
Il serait, dans ce cadre, plus juste de dire que tout a été fait, et
singulièrement par le gouvernement de M. Balladur, pour que la progression du
niveau des retraites et pensions soit le plus possible déconnectée du mouvement
réel de la création de richesses dans les entreprises.
C'est ainsi que la loi de juillet 1993 sur les retraites a indexé les pensions
sur le seul indice des prix tandis que les modalités de calcul du niveau des
retraites servies étaient modifiées, afin d'en réduire la quotité.
Mais, dans le cas qui nous préoccupe, avec les fonds de pension, nous sommes
dans une situation originale qui fait qu'il n'y a pas, dans le texte, à notre
connaissance, de clause de revalorisation expressément inscrite, ce qui est
particulièrement inquiétant, comme vient d'ailleurs de le souligner notre
collègue M. Marc Massion.
En clair, le salarié qui aura cotisé pendant vingt-cinq ans touchera une rente
dont le pouvoir d'achat ne pourra que s'étioler année après année, ce qui pour
le moins pose problème, même si l'on ne devait, sur la longue durée,
n'enregistrer de taux d'inflation que de un à deux points. Prendre le pari
d'une telle évolution sur trente ans est difficile.
Avec une inflation moyenne de 1,5 % cela signifie une perte de pouvoir d'achat
de 37,5 % en vingt-cinq ans de versement de rente !
Une telle perspective, si elle était maintenue, risquerait d'ailleurs de ne
pas favoriser, c'est le moins que l'on puisse dire, l'adhésion volontaire aux
plans d'épargne retraite à moins que les gérants de ces fonds, assurances ou
autres, ne soient explicites sur cet aspect risqué de l'épargne retraite.
Je rappelle à nos collègues de la Haute Assemblée que cette situation a
d'ailleurs déjà été éprouvée dans notre pays, durant les années trente, et
chacun sait que c'est le régime général par répartition qui a résolu cette
difficulté majeure à laquelle se sont alors retrouvés confrontés les
épargnants.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous invitons le Sénat à adopter cet
amendement, qui garantit un minimum de revalorisation des rentes lorsque
celles-ci seront servies.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 15 et 45 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Les mécanismes de revalorisation existent déjà dans le code
des assurances, dans le code de la mutualité et dans le code de la sécurité
sociale. La commission a considéré que l'amendement n° 15 n'apportait rien de
plus, et a donc émis un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 45, il est véritablement contre nature - si je puis
ainsi m'exprimer - et il ne peut donc que susciter de notre part un avis
nettement défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Arthuis,
ministre de l'économie et des finances.
Le Gouvernement partage
totalement l'avis que vient d'exprimer M. le rapporteur et demande le rejet de
ces deux amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 45, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 46, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa de
l'article 2, de remplacer les mots : « et, au plus tôt » par le mot : « ou
».
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement porte sur l'une des questions fondamentales posées par la
proposition de loi.
Dans sa rédaction actuelle, le texte offre en effet deux possibilités de
dénouement du contrat d'assurance individuelle en vue de la retraite que
représente l'adhésion à un fonds de pension.
Il s'agit de permettre au souscripteur de bénéficier du versement d'un capital
ou d'une rente lors de la cessation définitive de son activité professionnelle
ou bien, au plus tôt, nous est-il précisé, à l'âge légal de liquidation des
droits à la retraite des régimes de base ou complémentaires obligatoires.
Cela signifie, en l'état actuel de la législation, que l'épargne accumulée ne
peut être liquidée avant que le souscripteur ait atteint l'âge de soixante
ans.
Cette disposition tend donc à créer une épargne d'autant plus captive que le
souscripteur aura commencé à verser tôt au fonds de pension de son
entreprise.
Dans les faits, cette situation est toutefois relativement contradictoire avec
une analyse objective de la réalité.
En effet, l'ensemble des études portant sur la question du taux d'activité des
plus de cinquante ans illustrent aujourd'hui un phénomène grandissant, celui de
la cessation définitive d'activité professionnelle d'un nombre important de
salariés âgés d'au moins cinquante ans, notamment dans la tranche comprise
entre cinquante-six et soixante ans.
Le nombre des plus de cinquante-six ans conservant une activité
professionnelle est, du fait de la mise en place de plans sociaux et de
conventions FNE, aujourd'hui minoritaire, tandis que les salariés sans activité
sont même le plus souvent dispensés de pointer au chômage, ce qui permet
d'ailleurs de corriger les statistiques officielles. Le nombre d'inactifs dans
la tranche comprise entre cinquante-cinq et soixante ans aujourd'hui est ainsi
estimé à 66 %.
Il nous apparaît donc logique que, plutôt que d'encourager à la prolongation
de l'activité professionnelle, ce que pourrait induire la rédaction actuelle de
l'article 2, il pourrait être tenu compte de cette donnée pour établir une
faculté de liquidation des droits acquis au titre d'un plan épargne retraite, y
compris pour des salariés n'ayant pas encore atteint l'âge légal de la
retraite.
C'est le sens de cet amendement qui tend, dans les faits, à rendre plus
liquide une épargne dont les souscripteurs pourraient d'ailleurs avoir
objectivement besoin.
C'est la raison pour laquelle je vous invite à l'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement traite de situations dans lesquelles le
salarié est amené, éventuellement contre son gré, à cesser son activité avant
l'âge légal de la retraite.
Le problème posé est assurément réel et légitime.
A la réflexion et après un examen attentif, la commission s'est déclarée
défavorable à cet amendement au cours de la réunion qu'elle a tenue en début de
matinée.
En premier lieu, si l'on permet la sortie de ces régimes quelques années avant
l'âge de la retraite, on va techniquement pénaliser les bénéficiaires, car les
rentes servies vont être sensiblement moins importantes. Or il faut les
prémunir contre ce risque.
En deuxième lieu, ne risque-t-on pas de donner aux fonds d'épargne retraite
davantage une coloration d'instrument d'épargne que d'instrument de retraite si
l'on ouvre cette brèche ?
En troisième lieu, est-il possible de déterminer juridiquement la cessation
d'activité avant l'âge de la retraite ? Nous savons que se présenteront de plus
en plus, en fin de carrière, des situations de transition où les intéressés
n'auront plus d'occupation à plein temps mais rendront encore des services ! A
partir de quelle proportion du revenu antérieur pourra-t-on considérer qu'il y
a bien cessation d'activité ? Tout cela me semble ouvrir le champ de
contestations importantes.
Enfin, il me semble que, si l'on acceptait cet amendement, on donnerait un
signal qui, à mon avis, serait inopportun s'agissant de l'âge légal de la
retraite : je vous renvoie au débat que nous avons eu tout à l'heure sur ce
point.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué au budget, porte-parole du Gouvernement.
Le Gouvernement
partage point par point l'avis de M. le rapporteur.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 46.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
J'ai écouté très attentivement à la fois M. le rapporteur et M. le
ministre.
M. Arthuis m'a répondu tout à l'heure que l'article 2 prévoyait la sortie
anticipée du plan d'épargne retraite. Or tel n'est pas le cas ! M. le ministre
et M. le rapporteur ne viennent-ils pas de nous confirmer que, quelle que soit
la situation du souscripteur, même s'il est en cessation progressive d'activité
ou s'il est mis en retraite anticipée, il ne pourra en aucun cas bénéficier de
l'épargne retraite et de la rente avant l'âge de soixante ans ?
Ainsi donc, mes chers collègues, nous devons prendre conscience du fait qu'en
adoptant l'article 2 tel qu'il nous est soumis nous imposons aux souscripteurs
de plans d'épargne retraite d'épargner, s'ils le peuvent, jusqu'à soixante ans,
tout en sachant qu'en tout état de cause ils ne verront le produit de leur
épargne, et encore sous forme de rente, qu'à partir de soixante ans et pas
avant, quelle que soit leur situation.
Il y a là des rigidités totalement inacceptables, surtout compte tenu de la
description que vient de faire M. le rapporteur de ce que sera la fin de
carrière de nombre de nos concitoyens : en effet, entre cinquante et soixante
ans peuvent intervenir des cessations progressives d'activité, des temps
partiels, des missions d'intérim... Est-ce l'avenir que nous réservons à nos
concitoyens, en bloquant de surcroît leur épargne pour la retraite ?
Nous pensons que c'est inacceptable. C'est la raison pour laquelle nous
invitons la Haute Assemblée à adopter notre amendement qui, tout en donnant
plus de souplesse au dispositif, tend à défendre les intérêts des salariés.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 47, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 2, de supprimer les mots : « qui ne
peut excéder 20 % de la provision mathématique représentative des droits de
l'adhérent ».
II. - Après le deuxième alinéa de l'article 2, d'insérer un alinéa ainsi
rédigé :
« Le solde éventuel est versé lors d'un second versement. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Cet amendement porte sur une question essentielle aux yeux des futurs
adhérents des plans d'épargne retraite, celle de la sortie en rente ou en
capital du montant de l'épargne accumulée.
Dans son état actuel, le texte qui nous est soumis nous propose une priorité
accordée à la sortie en rente plutôt qu'en capital, avec une possibilité de
sortie partielle en capital.
Cette situation appelle évidemment de notre part plusieurs remarques, dont la
moindre n'est pas de souligner que la sortie en rente avantage l'organisme
gestionnaire du fonds de pension. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les
compagnies d'assurance - à la différence des banques - ont toutes manifesté le
vif désir que la sortie s'effectue uniquement en rente.
En effet, après que le salarié aura cotisé pendant plus ou moins longtemps et
apporté une épargne bloquée au titre du fonds de pension - jusqu'à l'âge de
soixante ans, je le répète - on pourra lui proposer, lorsque sera venu le
moment de dénouer le contrat, de continuer de supporter les coûts de portage
représentatifs des engagements du fonds.
Soyons clairs : les revenus tirés des placements en fonds de pension ont un
défaut fondamental, leur absence de liquidité, alors que cette liquidité est
assurée pour de nombreux autres placements défiscalisés : je pense notamment
aux contrats d'assurance-vie.
Afin de remédier pour partie à cette absence de liquidité, nous proposons une
plus grande souplesse avec la possibilité d'un versement en capital de
l'épargne accumulée.
L'article 2 tend en effet à tenir compte, sous certaines conditions, de la
modicité de l'abondement à un fonds de pension, modicité qui sera
éventuellement fréquente quand les gestionnaires devront servir les premières
prestations. Dans ce cas, on permet de recourir au principe du versement
unique.
On peut penser qu'un certain nombre de premiers plans seront directement
concernés par ce dispositif.
Toutefois, il nous apparaît indispensable que, dans les limites fixées en
partie par l'article 2, il soit fait droit aux adhérents des plans d'épargne
retraite de disposer d'une faculté de recourir, à hauteur de 75 % du plafond
annuel des cotisations sociales, à un tel versement pour les mêmes raisons de
liquidité qui peuvent nous animer quant au versement unique.
Cela représente aujourd'hui un premier versement d'au moins 120 000 francs,
versement qui s'avérera, bien entendu, d'un montant supérieur à celui qui est
prévu au troisième alinéa de cet article 2.
Quel est le sens de notre démarche ?
Il s'agit, pour nous, de prendre en compte le fait que la liquidité de
l'épargne accumulée doit être encouragée.
De surcroît, la mise à disposition d'un tel capital permettra à certains
retraités de disposer de moyens financiers appropriés pour faire face à
certains besoins propres à la cessation d'activité. On peut citer, à ce titre,
l'acquisition d'une nouvelle résidence principale, le versement concerné
pouvant constituer l'élément principal de l'apport personnel de l'acquéreur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement n'est pas conforme aux options que nous avons
retenues lors de la première lecture. Et comme il n'y a pas lieu d'apporter
d'innovation par rapport à la première lecture, la commission émet un avis
défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 47, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 16, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparenté proposent, au dernier alinéa de l'article 2, de
remplacer le mot : « mineurs » par les mots : « aussi longtemps que ceux-ci
sont à sa charge ».
Par amendement n° 48, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le quatrième alinéa de
l'article 2, après les mots : « ses enfants », d'inserér les mots : « à charge
».
La parole est à M. Massion, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Marc Massion.
Nous souhaitons que la faculté de versement d'une rente aux enfants de
l'adhérent décédé soit non pas limitée aux seuls enfants mineurs, mais étendue
aux enfants à charge.
Si nous présentons de nouveau cet amendement, déjà déposé en première lecture,
en pensant notamment aux enfants encore étudiants ou en apprentissage, c'est
parce que, en première lecture, il avait été écarté sans explication.
Si donc cet amendement devait subir le même sort aujourd'hui, j'aimerais ne
pas avoir à me contenter, de la part de M. le rapporteur et de M. le ministre,
d'un laconique : « Défavorable ».
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 48.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le dernier alinéa de l'article 2 offre la faculté aux adhérents d'un plan
d'épargne retraite de faire bénéficier leurs enfants d'une possibilité de
réversion de la rente viagère versée en raison de ce plan.
Il est manifeste, à la lecture de cet alinéa, que demeure une petite
imprécision sur la nature des éventuels récipiendaires de cette réversion.
Nous en sommes aujourd'hui au point où pourraient bénéficier d'une telle
disposition soit les enfants mineurs, invalides ou incapables majeurs, soit le
conjoint survivant.
En toute objectivité, si l'on tient compte de la réalité, on est rarement
parent d'un enfant mineur après l'âge de soixante ans et, fort heureusement,
pas toujours parent d'un enfant handicapé.
Il nous semble souhaitable de faire en sorte que l'ensemble des enfants de
l'adhérent bénéficient de cette possibilité de réversion, plus particulièrement
ceux qui, du fait de l'obligation alimentaire, sont pris en compte dans la
déclaration de revenus de leurs parents.
Je rappelle qu'en 1993 le gouvernement de M. Balladur a introduit la
possibilité de percevoir des allocations familiales pour les enfants à charge
de plus de dix-huit ans.
C'est donc un amendement qui apporte une précision, mais une précision
importante.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 16 et 48 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission est défavorable aux deux amendements.
L'amendement n° 16 est inapplicable. Quant à l'amendement n° 48, il
restreindrait inutilement le champ d'application des bénéficiaires de rentes de
réversion.
M. Marc Massion.
Pourquoi notre amendement est-il inapplicable ?
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement est également défavorable aux deux
amendements.
D'ores et déjà, dans le texte actuel, une rente de réversion au bénéfice des
enfants mineurs au moment du décès peut continuer d'être versée jusqu'à la
majorité de l'enfant, voire au-delà, jusqu'à un âge fixé
conventionnellement.
En outre, il est également prévu dans le texte qu'un enfant handicapé, quel
que soit son âge, peut bénéficier d'une rente de réversion.
J'ai donc le sentiment que la préoccupation qui s'exprime au travers de ces
deux amendements est, pour l'essentiel, prise en compte dans le projet.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
J'avoue ne pas très bien comprendre les explications de la commission et du
Gouvernement, notamment les raisons de l'inapplicabilité de l'amendement n° 16
et l'argumentation sur l'enfant mineur.
On vient, précisément, de voter un allongement de la durée de versement des
allocations familiales pour les jeunes mineurs à charge. On sait que rares sont
ceux qui, âgés de plus de soixante ans, ont encore des mineurs à charge.
En revanche, de plus en plus nombreuses sont les personnes vieillissantes qui
ont à leur charge des jeunes majeurs, soit que ces derniers fassent des études,
soit que, malheureusement, ils soient au chômage, soit qu'ils recherchent un
emploi, soit qu'ils enchaînent les stages.
Il y a en France une extrême fragilisation des jeunes entre seize et
vingt-huit ou vingt-neuf ans, fragilisation d'ailleurs plus importante que dans
les autres pays de la Communauté européenne.
Il est donc tout à fait anormal d'empêcher que la rente soit servie pour des
jeunes majeurs qui sont encore à la charge de leurs parents au moment du décès,
comme c'est, malheureusement, très souvent le cas.
A cet égard, aucune des explications données n'a apporté de réponse à ce
problème qui ne peut que préoccuper les personnes concernées.
M. Marc Massion.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
J'ai bien écouté les explications de M. le ministre. Je ne vois pas quel
inconvénient il y aurait à prévoir dans la loi que le versement de la rente se
poursuit après la majorité tant que l'enfant est à charge, plutôt que de s'en
remettre aux clauses facultatives d'un contrat. L'inscrire dans la loi
reviendrait à instituer une obligation salutaire.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
A l'appui des arguments de Mme Dusseau et de M. Massion, j'ajoute que,
contractuellement, il faudrait qu'il y ait réouverture continuelle de la
convention. En effet, qui peut savoir à quarante ans, par exemple, lorsqu'il
signe le contrat, quelle sera la situation de ses enfants à soixante ans ?
Je ne comprends pas du tout l'argument de M. Marini, selon lequel la mesure
serait inapplicable.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Madame Beaudeau, la réponse à votre question me paraît
évidente.
On souhaite pouvoir transmettre, sous forme de réversion, les rentes à des
enfants majeurs restant à la charge de l'intéressé. Or, si la personne est
décédée, comment peut-on imaginer que quelqu'un d'autre soit à sa charge ? On
ne peut pas être à la charge d'une personne décédée ! C'est pourtant ce qui
résulte de la rédaction du premier amendement.
Voilà pourquoi je dis que c'est inapplicable.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 17, MM. Massion et Autain, Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter le dernier alinéa de l'article
2 par la phase suivante : dans ce dernier cas, les dispositions de l'article L.
912-4 du code de la sécurité sociale sont applicables. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Par cet amendement, nous souhaitons faire bénéficier les ex-conjoints divorcés
de la réversion.
Le principe du partage de la pension de réversion entre le conjoint survivant
et le ou les ex-conjoints divorcés s'applique à l'ensemble des régimes de
retraite. Dans un double souci d'équité et de simplification pour les assurés,
la même règle doit s'appliquer aux plans d'épargne retraite lorsque l'adhérent
a, comme la proposition de loi le prévoit, opté pour le versement d'une pension
de réversion. Il est, pour cela, fait référence à l'article L. 912-4 du code de
la sécurité sociale, qui fixe les règles de partage pour les régimes
complémentaires de salariés.
Pour prendre un exemple concret, si le titulaire d'un plan d'épargne retraite
divorce à cinquante-huit ans, se remarie à cinquante-neuf ans et décède à
soixante et un ans, c'est la dernière épouse qui bénéficie de la totalité de la
réversion. Il nous semble qu'il vaudrait mieux proratiser la rente en fonction
du nombre d'années de mariage.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
S'agissant d'une rente que l'on se constitue facultativement,
est-il vraiment justifié d'envisager un mécanisme administratif de
fractionnement de cette rente entre les différentes épouses...
Mme Joëlle Dusseau.
Ou les différents maris !
(Sourires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur.
... que l'on peut avoir successivement au cours de sa vie
?
Cela ne paraît pas être nécessairement une très bonne idée, ni même une idée
très réaliste. C'est pour cette raison que la commission a émis un avis
défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la
commission.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - Les plans d'épargne retraite peuvent être souscrits par un ou
plusieurs employeurs, ou par un groupement d'employeurs, au profit de leurs
salariés.
« La souscription peut résulter d'un accord collectif d'entreprise ou d'un
accord de branche, professionnel ou interprofessionnel, conclu à un échelon
national, régional ou local. Ces accords sont régis par le titre III du livre
premier du code du travail, à l'exclusion de ses chapitres III et IV ; ils
peuvent déroger au second alinéa de l'article L.132-13 et au second alinéa de
l'article L.132-23 dudit code. Les plans d'épargne retraite sont proposés à
l'adhésion de tous les salariés de l'entreprise et, en cas d'accord de branche,
professionnel ou interprofessionnel, à tous les salariés compris dans son champ
d'application professionnel et territorial. Les conditions d'adhésion sont
alors définies de façon identique pour des catégories homogènes de salariés.
« En cas d'impossibilité de conclure un accord ou à défaut de conclusion d'un
accord dans un délai fixé par décret, la souscription peut également résulter
d'une décision unilatérale de l'employeur ou d'un groupement d'employeurs
constatée par un écrit remis par ceux-ci à chaque salarié. Dans ce cas, les
conditions d'adhésion des salariés d'une même entreprise sont identiques.
« A défaut d'intervention, dans un délai de deux ans à compter de la
promulgation de la présente loi, d'un accord interprofessionnel national ou
d'une décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés compris dans le
champ d'application de l'épargne retraite défini à l'article premier, les
salariés employés dans une entreprise où ne sont pas proposés de plans
d'épargne retraite pourront demander leur adhésion à un plan d'épargne retraite
existant. Si, postérieurement à cette adhésion, un plan d'épargne retraite est
proposé dans leur entreprise, ils peuvent demander que les droits qu'ils ont
acquis soient transférés intégralement et sans pénalité sur ce dernier plan. Un
décret fixe les conditions d'application du présent alinéa. »
Sur l'article, la parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mise en
place des plans d'épargne retraite va consister à tester la capacité des
partenaires sociaux à développer la négociation collective.
Tout doit être fait, à notre sens, pour valider cette négociation collective
et pour que rien ne soit, au bout du compte, imposé aux adhérents des fonds de
pension.
On ne peut, encore une fois, que souligner le problème que pose la rigidité
des versements effectués sur un plan d'épargne retraite au regard d'autres
types de produits d'épargne, qu'il s'agisse des livrets défiscalisés, des parts
de SICAV ou des contrats d'assurance-vie, dont le dénouement peut avoir lieu au
bout de huit ans dans la rédaction actuelle de l'article 125 O-A du code
général des impôts.
Or le texte de la proposition de loi portant sur l'épargne retraite, plutôt
que de valoriser la négociation collective, nous offre en fait une forme de
construction de type gigogne, à plusieurs niveaux, et surtout, comme je l'ai
déjà dit, il n'est pas possible de bénéficier du produit avant l'âge de
soixante ans. Il y a donc une faible liquidité de ce produit et une grande
rigidité dans la négociation. Je rappelle quels sont ces niveaux.
Le premier niveau est l'accord collectif de branche, professionnel ou
interprofessionnel, de portée éventuellement élargie, proche dans son esprit
des conventions collectives que nous connaissons par ailleurs.
Le deuxième niveau concerne des accords locaux ou directement liés à
l'entreprise qui pourront, soit résulter d'une transférabilité des accords de
portée générale, soit de dispositions propres à chaque entreprise.
Le troisième niveau résulte d'accords pouvant éventuellement être en
contradiction avec des dispositions légales ou conventionnelles plus
favorables.
Enfin, le quatrième niveau - et il nous inquiète - découle de la décision
unilatérale de tel ou tel employeur ou groupement d'employeurs à l'égard des
salariés de la branche ou de l'entreprise concernée.
Il s'agit aujourd'hui d'enfoncer un coin dans les principes de la négociation
collective, et de valoriser en fait les attitudes « hors normes » que certains
chefs d'entreprise peuvent avoir avec les règles du jeu posées par ces
principes.
Adopter en l'état l'article 6 reviendrait à accepter, par exemple, pour
demain, que tel ou tel chef d'entreprise se dispense, de sa propre initiative,
d'appliquer dans son entreprise les règles de fonctionnement que le cadre
conventionnel lui fait obligation de respecter.
Aujourd'hui les fonds de pension, demain les salaires, après-demain les
horaires de travail, et après après-demain, ou même avant, le respect des
normes de sécurité ?
Nous ne pouvons accepter que le principe de la négociation soit mis en cause
par cet article, qui constitue un précédent.
C'est pourquoi, sauf modifications notables de ce texte, nous serons
clairement contre son adoption dans les termes actuels et contre les
propositions de rédaction formulées par notre rapporteur.
M. le président.
Par amendement n° 18 rectifié, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres
du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter
in fine
le
premier alinéa de l'article 6 par une phrase ainsi rédigée : « Ils doivent, à
peine de nullité, s'appliquer, sans discrimination aucune, à l'ensemble des
salariés de l'entreprise ou des entreprises concernées et ne comporter aucune
discrimination entre les hommes et les femmes. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Cet amendement tend à compléter et à préciser l'article 6. M. le rapporteur me
répondra peut-être que cela va de soi, mais cela va encore mieux en
l'écrivant.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je ne me contenterai pas de dire que cela va de soi. J'ajoute
que cet amendement est superfétatoire, car la disposition qu'il tend à
introduire découle déjà de la rédaction du premier alinéa de l'article 6 tel
qu'il nous est soumis ainsi que des principes généraux du droit. Le premier
alinéa de l'article 6 évoque bien des conditions identiques. Il n'est pas
possible d'être plus clair.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission et émet
donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18 rectifié, repoussé par la commisssion et
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 19, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa
de l'article 6, de supprimer les mots : «, à l'exclusion de ses chapitres III
et IV ; ils peuvent déroger au second alinéa de l'article L. 132-13 et au
second alinéa de l'article L. 132-23 dudit code ».
Par amendement n° 49, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans la deuxième phrase du
deuxième alinéa de l'article 6, de supprimer les mots : « ils peuvent déroger
au second alinéa de l'article L. 132-13 et au second alinéa de l'article L.
132-23 dudit code ».
La parole est à M. Massion, pour défendre l'amendement n° 19.
M. Marc Massion.
Nous souhaitons modifier l'article 6 qui, si j'ai bien compris l'objectif que
vous poursuivez, permettra, par voie d'accord d'entreprise, de déroger à un
accord de branche dans un sens qui pourrait être moins favorable aux salariés
de l'entreprise.
Pour prendre un exemple simple, cela signifie que, si, dans une branche, les
partenaires sociaux fixent le montant de l'abondement applicable aux
entreprises relevant de la branche, telle ou telle entreprise relevant de cette
même branche pourra décider, par voie d'accord d'entreprise, que la part prise
en charge par l'employeur sera inférieure.
Votre texte présente une autre nouveauté. Les accords de branche ne pourront
pas être étendus ou élargis par le ministre du travail. Les entreprises qui
n'adhèreront pas à une fédération patronale signataire de l'accord ne seront
donc jamais tenues d'en appliquer les dispositions puisqu'il ne pourra y avoir
extension.
Par ces deux mesures, que vous chercherez sans doute à étendre à l'ensemble
des conditions de travail et de rémunération des salariés, vous portez une
atteinte très grave à la négociation collective en France. Les professions de
foi répétées en faveur du dialogue social et de la garantie des acquis sociaux
au plus haut niveau de l'Etat ne sont que des affirmations gratuites que vous
vous empressez de démentir dans les textes et dans les faits.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 49.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Les articles L. 132-13 et L. 132-23 du code du travail disposent expressément
: « Une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel
ne peut comporter des dispositions moins favorables aux salariés que celles qui
leur sont applicables en vertu d'une convention ou d'un accord couvrant un
champ territorial ou professionnel plus large.
« S'il vient à être conclu une convention ou un accord de niveau supérieur à
la convention ou à l'accord intervenu, les parties adaptent celles des clauses
de leur convention ou accord antérieur qui seraient moins favorables aux
salariés. »
Quant au second alinéa de l'article L. 132-23 du code du travail, il est ainsi
rédigé : « Dans le cas où des conventions de branche ou des accords
professionnels ou interprofessionnels viennent à s'appliquer dans l'entreprise
postérieurement à la conclusion de conventions ou accords négociés conformément
à la première section, les dispositions de ces conventions ou accords sont
adaptés en conséquence. »
Que nous est-il donc proposé à travers le texte actuel de la loi ? Créer les
conditions de dérogations massives aux principes du droit du travail, visant en
fait à éparpiller et essaimer la négociation collective au plus près de
l'entreprise et au plus loin des intérêts réels des salariés.
La proposition de loi tend notamment à remettre en cause, en matière de fonds
de pension, la représentativité syndicale, élément pourtant constitutif du
dialogue social aujourd'hui.
On comprendra aisément que nous souhaitions supprimer purement et simplement
ces éléments de la proposition de loi qui ont, sans doute, été conçus pour
permettre une mise en place effective des plans, mais plus vraisemblablement -
n'est-ce pas, monsieur le rapporteur ? - pour s'attaquer encore plus aux
garanties des salariés.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Ah !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le problème, monsieur Marini, c'est que les salariés sont aujourd'hui plus
nombreux que les spéculateurs.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Mais que voulez-vous dire ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose donc d'adopter cet
amendement, mes chers collègues, et compte tenu de son importance, je vous
invite à vous prononcer par scrutin public.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 19 et 49 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je ne répondrai pas aux provocations. Mme Beaudeau me
connaît, plus on essaie de me provoquer...
M. Emmaneul Hamel.
Plus je résiste !
M. Philippe Marini,
rapporteur...
plus je résiste. Et je résiste à Mme Beaudeau !
(Sourires.)
Mme Marie-Claude Beaudeau.
C'est difficile !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
C'est effectivement difficile, comme vous le dites, madame
!
Les amendements n°s 19 et 49 étant presque identiques, je ferai une réponse
commune.
Ce sont en effet des amendements de fond, qui vont à l'encontre de la
philosophie du texte car notre philosophie est décentralisatrice. Nous estimons
que l'entreprise est une réalité, une communauté et que les partenaires sociaux
dans l'entreprise sont les mieux placés dans certains cas pour faire les bons
ajustements dans l'intérêt de l'entreprise et donc de l'emploi.
Telle est la raison pour laquelle la commission est défavorable aux
amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement émet le même avis que la commission,
non pas par souci systématique de résister à Mme Beaudeau, mais parce qu'il
existe une différence fondamentale d'esprit et d'ailleurs de portée juridique
entre le code du travail, notamment au travers des les règles qui régissent,
par exemple, les conditions de travail dans l'entreprise, et la proposition de
loi relative aux plans d'épargne retraite.
En effet, l'application du code du travail est non pas facultative mais
obligatoire quand il y a un accord de branche et, lorsque cet accord est étendu
réglementairement, il s'applique obligatoirement à toutes les entreprises de la
branche.
Ici, nous souhaitons mettre en place un dispositif qui doit être non pas
obligatoire - c'est un point sur lequel chacun ici s'accorde - mais facultatif.
Dès lors que le système est facultatif, il n'y a pas lieu d'appliquer les
dispositions du code du travail qui prévoient qu'un accord de niveau inférieur
doit s'adapter automatiquement à l'accord de niveau supérieur.
Nous nous incrivons donc dans des philosophies différentes. C'est la raison
pour laquelle les amendements n°s 19 et 49 ne nous paraissent pas fondés.
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 49, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ? ...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 94 :
:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 94 |
Contre | 222 |
Par amendement n° 50, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 6, de remplacer les mots : "des catégories homogènes de" par les mots : "l'ensemble des".
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement tend à maintenir un principe fondamental : la solidarité entre catégories professionnelles. Il s'agit donc d'un amendement de principe.
Il vise, en effet, à créer une solidarité naturelle entre les adhérents d'un fonds de pension en vue d'éviter une spécification des garanties offertes aux épargnants selon leur position professionnelle au sein de l'entreprise.
Nous souhaitons éviter qu'il n'y ait une multiplication des fonds selon que l'on s'adressera aux cadres, aux ouvriers, aux agents de maîtrise ou aux employés, ce qui finira par faire de l'adhésion à tel ou tel plan un élément de la stratégie de gestion des ressources humaines dans l'entreprise, ou encore qu'il n'y ait des garanties différenciées selon que les salariés soient plus ou moins exposés aux maladies ou aux accidents professionnels, ou qu'il s'agisse de salariées hommes ou de salariés femmes.
Il convient d'éviter que soient mis en place des régimes de faveur pour les cadres dirigeants. Il faut donc prévoir une catégorie unique.
Sous le bénéfice de ces observations, j'invite la Haute Assemblée a adopter cet amendement,
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est contraire à la philosophie du texte : la majorité de la commission est tout à fait défavorable au nivellement par la base.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Le Gouvernement est hostile à cet amendement, car il ne partage pas les craintes de M. Loridant.
En réalité, dans le cas notamment où l'épargne retraite sera mise en place par un accord collectif, le fait de permettre, comme le texte actuel le prévoit, de moduler les conditions d'adhésion des salariés suivant les catégories professionnelle, ne présente pas d'inconvénient et peut même offrir des avantages, car cela permettra aux organisations syndicales d'obtenir éventuellement, par la négociation, des conditions d'abondement plus favorables pour les catégories les plus modestes, comme c'est souvent le cas déjà dans les plans d'épargne d'entreprise.
Par conséquent, la rédaction actuelle nous paraît plus favorable aux salariés les moins favorisés.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 50.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre réponse. En effet, il existe, pour les plans d'épargne d'entreprise, des abondements inversement proportionnels aux salaires. Toutefois, je souhaiterais attirer votre attention sur le fait que, dans cette proposition de loi, s'il n'y a pas accord d'entreprise, il peut y avoir décision unilatérale du chef d'entreprise pour les plans d'épargne retraite.
Or, j'ai tendance à penser que certaines entreprises - le dialogue social n'y étant pas spécialement mis en valeur refuseront la discussion avec les syndicats ou avec les représentants du personnel. Je crois par ailleurs que les accords unilatéraux comporteront des dispositions, très disparates et favorisant certaines catégories de salariés, voire des cadres dirigeants.
Monsieur le ministre, nous savons bien - je le sais d'autant mieux que j'ai fait partie, avec MM. Arthuis et Marini, d'un groupe de travail sur les stock-options qu'un certain nombre de dirigeants dans ce pays se sont constitués, grâce à ce dispositif, des fortunes personnelles dont le grand public aurait beaucoup de peine à imaginer le montant !
Par cet amendement, nous voulons poser des verrous. C'est pourquoi nous demandons à la Haute Assemblée de bien vouloir le voter.
Monsieur le ministre, si vous voulez que je sois plus explicite sur les stock-options, je peux l'être !
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je persiste à penser que nous sommes d'accord avec M. Loridant. Je voudrais donc appeler son attention sur le fait que l'alinéa qui précède celui qu'il propose d'amender dispose : « En cas d'impossibilité de conclure un accord ou à défaut de conclusion d'un accord dans un délai fixé par décret, la souscription peut également résulter d'une décision unilatérale de l'employeur... Dans ce cas, les conditions d'adhésion des salariés d'une même entreprise sont identiques. »
Dans ces conditions, la modulation par catégorie de salariés ne peut intervenir que s'il y a accord collectif.
Il me semble très sincèrement, monsieur Loridant, que nous partageons rigoureusement les mêmes préoccupations et que la rédaction actuelle de l'article répond mieux à votre souhait.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 50, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 20, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le deuxième alinéa de l'article 6, un alinéa rédigé comme suit :
« La souscription peut également résulter d'une décision du comité d'entreprise. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Par cet amendement, nous souhaiterions que la souscription d'un plan d'épargne retraite puisse également résulter d'une décision du comité d'entreprise.
Il semble, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que vous ayez décidé d'exclure les comités d'entreprise des fonds d'épargne retraite, ce qui illustre un double aveu : d'une part, vous ne voulez pas que les salariés, au travers de leurs instances représentatives, puissent contrôler ces fonds d'épargne retraite et, d'autre part, vous souhaitez que les fonds d'épargne retraite ne concernent, dans la pratique, que les seuls cadres supérieurs. Dans nombre d'entreprises, le « charme » du plan d'épargne retraite tiendra surtout à sa discrétion.
Nous pensons quant à nous que le comité d'entreprise doit pouvoir, lui aussi, mettre en place un fonds d'épargne retraite au financement duquel il pourra participer et qui, bien sûr, devra avoir le même statut fiscal et social que les plans souscrits par l'employeur et donc bénéficier de l'abondement par ce dernier. Rien ne justifie l'ostracisme dans lequel vous semblez tenir les comités d'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement pose la question des vocations, des missions, des limites de compétences des comités d'entreprise.
Avec ce texte, nous avons voulu placer les fonds d'épargne retraite sous le signe de la négociation collective. Or, si je ne m'abuse, un principe important du droit du travail vise à confier aux délégués syndicaux et aux instances représentatives de branche les responsabilités essentielles en matière de négociation collective et de souscription d'accords collectifs d'entreprise.
Si nous brouillons les idées en faisant des comités d'entreprise des éléments actifs de négociation - sans doute est-ce concevable et peut-être serait-ce une bonne mesure pour les entreprises en question - je crains que nous ne nuisions à la lisibilité des textes de droit du travail qui ont organisé une bonne spécialité des compétences de ces différentes instances.
C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. L'avis du Gouvernement est identique à celui de la commission. Il ne serait en effet pas souhaitable de déresponsabiliser le chef d'entreprise dans la mise en oeuvre du plan d'épargne retraite, tel qu'il a été conçu.
J'ajoute que si l'on veut que les salariés percevant de bas salaires profitent pleinement de ces plans d'épargne retraite, ce n'est concevable qu'avec un abondement de l'employeur. Or, le comité d'entreprise ne pourra naturellement pas décider d'un tel abondement.
Dans ces conditions, nous ne voyons pas l'intérêt de l'amendement n° 20.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 20.
M. Marc Massion. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Je n'ai pas parlé des comités d'entreprise en tant que partenaires de négociation, comme l'a dit M. le rapporteur ; j'ai présenté le comité d'entreprise comme une structure existante à l'intérieur de l'entreprise.
Lorsque M. le ministre parle de confiance des salariés ou de pouvoirs du chef d'entreprise pour les salariés ayant des salaires modestes, on peut peut-être se demander si, à la limite, ces salariés-là ne feraient pas plus confiance à leur comité d'entreprise qu'à leur chef d'entreprise.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Nous poursuivrons la discussion de cette proposition de loi cet après-midi.
J'informe le Sénat que la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur la proposition de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
4
RAPPEL AU RÈGLEMENT
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Mon intervention se fonde sur l'article 36 du règlement.
Au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, je veux
faire part de notre émotion à la suite de la multiplication des crimes en
Algérie.
Depuis le début du ramadan, la violence s'est accrue, et, mardi après-midi,
c'est le premier dirigeant de l'Union générale des travailleurs algériens qui
est tombé sous les balles des terroristes intégristes.
Par cet assassinat, c'est le symbole d'une réelle démocratie, c'est le symbole
d'un peuple algérien déterminé à défendre l'Etat républicain, c'est le symbole
du mouvement social revendicatif que les tueurs ont voulu supprimer.
Des milliers et des milliers d'Algériens ont déjà été tués par les partisans
de la terreur. Aujourd'hui, ces derniers essaient de briser l'âme de
l'Algérie.
La stratégie des terroristes est simple : elle vise à déstabiliser l'Etat pour
accéder au pouvoir, mais aussi pour imposer je ne sais quelle négociation.
Ainsi, à Paris comme dans d'autres capitales européennes, on entend les appels
à la froide raison, raison qui consisterait à donner suite aux exigences des
commanditaires des massacres.
Mais, si l'Algérie en est là, cela ne provient pas du hasard. Le chômage
galopant, la pauvreté accrue, la crise morale qui touchent ce pays ami sont
autant de ferments sur lesquels grandissent les manipulations et les tentations
intégristes.
On ne saurait faire cadeau au crime du crédit de quelque vertu. C'est donc
bien à la racine du mal qu'il faut s'attaquer. La France, de par sa situation
privilégiée, se doit d'intervenir pour aider le peuple algérien à trouver une
issue démocratique et pacifiste.
Les connivences financières, diplomatiques ou politiques dont dispose
l'état-major intégriste dans certaines capitales européennes doivent être
dénoncées.
La politique du Fonds monétaire international doit être, pour le moins,
assouplie, tant le plan d'ajustement structurel est destructeur d'emplois et de
richesses au sein de ce pays.
Enfin, l'implication plus grande de la France dans une coopération avec notre
voisin méditerranéen est indispensable. Cela passe notamment par l'annulation
de la dette et la signature de nouveaux contrats de développement.
Ce soir, place des Droits-de-l'Homme, au Trocadéro, aura lieu un rassemblement
silencieux à l'appel des organisations syndicales. C'est un moment fort auquel
nous participerons.
Par ailleurs, le vendredi 7 février, le parti communiste français, pour sa
part, invitera tous les citoyens à exprimer leur indignation face au meurtre
d'Abdelkak Benhamouda et à montrer leur solidarité avec le peuple algérien dans
sa courageuse résistance à la barbarie et dans sa recherche d'une alternative
faisant renaître l'espoir.
Monsieur le ministre, nous souhaiterions connaître les intentions du
Gouvernement français en la matière, notamment savoir s'il entend agir, dans la
limite de ses responsabilités, afin que l'Algérie sorte de cette tragédie.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
5
NOMINATION DE MEMBRES
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires économiques et du Plan, la
commission des affaires sociales et la commission des lois constitutionnelles,
de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration
générale ont proposé quatre candidatures pour le Conseil national de la
montagne.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Jean Faure,
Bernard Hugo, André Jourdain et Germain Authié membres du Conseil national de
la montagne.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures,
sous la présidence de M. Paul Girod.)
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
RAPPEL AU RÈGLEMENT
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon rappel
au règlement se fonde sur l'organisation des travaux de notre assemblée.
Nous avons en effet appris vendredi dernier par la presse qu'un accord tendant
à établir « un concept commun franco-allemand en matière de sécurité et de
défense » avait été conclu le 9 décembre dernier, à Nuremberg, entre le
Président de la République et le Chancelier d'Allemagne.
En tenant manifestement secret pendant plus d'un mois et demi cet accord, qui
porte singulièrement atteinte à la souveraineté de notre pays, le Président de
la République et son gouvernement ont délibérément bafoué le droit que
l'article 34 de la Constitution reconnaît au Parlement de déterminer « les
principes fondamentaux de l'organisation générale de la défense nationale ».
Je tiens ici à le souligner avec force : il est proprement scandaleux que ni
le peuple ni ses représentants n'aient été tenus au courant ni des tractations
en cours début décembre ni de leur aboutissement.
Faut-il que les abandons ainsi décidés en catimini aient été importants pour
que l'on ait jugé, en haut lieu, inopportun de les rendre publics !
Directement inspiré de la très ancienne Communauté européenne de défense, qui
a échoué au début des années cinquante, cet accord, d'une extrême gravité, vise
en fait à constituer une politique de défense commune placée sous tutelle
américaine.
S'inscrivant dans une perspective européenne ouvertement atlantiste et
contraire à la démarche d'indépendance nationale définie en son temps par le
général de Gaulle, démarche que nous avions soutenue, ses auteurs ont ainsi
délibérément choisi de subordonner nos armées et notre force de frappe
nucléaire à des objectifs qui n'ont rien à voir avec la défense de la
nation.
Au nom du groupe communiste républicain et citoyen, je tiens à protester
solennellement contre le fait que le Parlement et l'opinion publique de notre
pays aient été tenus à l'écart de cet accord alors que celui-ci met
fondamentalement en cause l'actuelle politique étrangère et de défense de la
France.
Le Gouvernement a été obligé d'accepter un débat à l'Assemblée nationale, et
cela dans la plus grande précipitation, ce qui témoigne de l'embarras dans
lequel il se trouve.
Nous demandons donc que notre commission des affaires étrangères, de la
défense et des forces armées soit saisie dans les plus brefs délais de cette
affaire, aujourd'hui même si possible, que le Gouvernement vienne s'expliquer
devant le Sénat et que le Parlement s'exprime par un vote sur le contenu de cet
accord.
(Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Madame, s'il ne m'appartient pas de porter un jugement sur le sujet que vous
venez d'évoquer, permettez-moi de dire, en revanche, qu'il n'a pas de rapport
avec l'organisation de nos travaux ! Il concerne plutôt l'ordre du jour, lequel
est du ressort du Gouvernement.
De plus, j'ignore quels ont été le précédents en matière de traitement de ce
genre de document devant la représentation nationale au cours des années
passées. C'est au Gouvernement qu'il revient d'apprécier.
Pour ma part, je ne peux que vous donner acte de votre rappel au règlement
qui, encore une fois, porte non pas sur l'organisation de nos travaux, mais bel
et bien sur l'ordre du jour.
Mme Hélène Luc.
De toute façon, j'ai écrit au président Monory.
7
DÉMISSION DE MEMBRES
DE COMMISSIONS ET CANDIDATURES
M. le président.
J'ai reçu avis de la démission de M. Michel Charzat comme membre de la
commission des affaires économiques et du Plan, et de la démission de M.
Bernard Piras comme membre de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration
générale.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats
proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées, et la nomination aura lieu conformément
à l'article 8 du règlement.
8
PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE
Suite de la discussion et adoption
d'une proposition de loi en deuxième lecture
M. le président.
Nous reprenons la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi
(n° 179, 1996-1997), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, créant les plans d'épargne retraite.
Dans la discussion des articles, le Sénat a commencé ce matin l'examen de
l'article 6.
J'en rappelle les termes :
Article 6
(suite)
M. le président.
« Art. 6. - Les plans d'épargne retraite peuvent être souscrits par un ou
plusieurs employeurs, ou par un groupement d'employeurs, au profit de leurs
salariés.
« La souscription peut résulter d'un accord collectif d'entreprise ou d'un
accord de branche, professionnel ou interprofessionnel, conclu à un échelon
national, régional ou local. Ces accords sont régis par le titre III du livre
premier du code du travail, à l'exclusion de ses chapitres III et IV ; ils
peuvent déroger au second alinéa de l'article L. 132-13 et au second alinéa de
l'article L. 132-23 dudit code. Les plans d'épargne retraite sont proposés à
l'adhésion de tous les salariés de l'entreprise et, en cas d'accord de branche,
professionnel ou interprofessionnel, à tous les salariés compris dans son champ
d'application professionnel et territorial. Les conditions d'adhésion sont
alors définies de façon identique pour des catégories homogènes de salariés.
« En cas d'impossibilité de conclure un accord ou à défaut de conclusion d'un
accord dans un délai fixé par décret, la souscription peut également résulter
d'une décision unilatérale de l'employeur ou d'un groupement d'employeurs
constatée par un écrit remis par ceux-ci à chaque salarié. Dans ce cas, les
conditions d'adhésion des salariés d'une même entreprise sont identiques.
« A défaut d'intervention, dans un délai de deux ans à compter de la
promulgation de la présente loi, d'un accord interprofessionnel national ou
d'une décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés compris dans le
champ d'application de l'épargne retraite défini à l'article premier, les
salariés employés dans une entreprise où ne sont pas proposés de plans
d'épargne retraite pourront demander leur adhésion à un plan d'épargne retraite
existant. Si, postérieurement à cette adhésion, un plan d'épargne retraite est
proposé dans leur entreprise, ils peuvent demander que les droits qu'ils ont
acquis soient transférés intégralement et sans pénalité sur ce dernier plan. Un
décret fixe les conditions d'application du présent alinéa. »
Le Sénat s'est déjà prononcé sur les amendements n°s 18 rectifié, 19, 49, 50
et 20.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 51, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le troisième alinéa de
cet article.
Par amendement n° 2, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger
ainsi le début du troisième alinéa de l'article 6 :
« En cas d'impossibilité de conclure un accord collectif d'entreprise ou, à
défaut de conclusion d'un tel accord dans un délai d'un an à compter du début
de la négociation, la souscription peut... ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 65, présenté par le
Gouvernement, et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 2, à
supprimer les mots : « d'entreprise ».
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 51.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, vous me permettrez tout d'abord de m'associer
pleinement au rappel au règlement que vient de faire Mme Beaudeau. En effet,
tout ce qui touche à l'indépendance nationale et à l'organisation de notre
défense est un élément essentiel. Il est par conséquent choquant que la Haute
Assemblée n'ait pas été saisie de ce dossier si important pour l'avenir de
notre République.
J'en viens à l'amendement 51, qui découle de notre position de principe quant
aux conditions de mise en place de plans d'épargne retraite.
Il vise à exclure la possibilité d'imposer aux salariés, sans consultation de
leurs organisations syndicales ou de leurs représentants du personnel, et à
défaut d'un accord collectif, l'adhésion à un plan d'épargne retraite.
Il est vrai que l'article 7 de la proposition de loi, adopté conforme par
l'Assemblée nationale, fait de l'adhésion comme des versements aux plans des
actes volontaires et facultatifs, ce qui reviendrait, dans les faits, à limiter
la portée de la décision unilatérale de l'employeur...
Que les choses soient néanmoins claires : puisque l'adhésion des salariés est
facultative, de même que leurs versements, pourquoi vouloir à toute force
imposer, coûte que coûte, l'existence d'un fonds d'épargne retraite, y compris
par la voie d'une décision unilatérale de l'employeur ?
Il convient plutôt de rechercher le versement volontaire librement consenti,
parce que librement négocié, dans les formes et les principes fondamentaux de
la négociation collective.
C'est le sens de cet amendement, qui vise à supprimer le troisième alinéa de
l'article 6.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement concerne la possibilité pour un employeur de
souscrire un fonds d'épargne retraite par voie de décision unilatérale.
Mes chers collègues, vous vous en souvenez, lors de la première lecture, nous
avions prévu que cette souscription pourrait se faire de deux façons - les deux
étant placées de manière symétrique - à savoir, d'une part, par voie d'accord
collectif, d'autre part, par décision unilatérale, sachant que l'accord
collectif pourrait se concevoir au niveau soit de l'entreprise, soit de la
branche, soit d'une profession, ou encore au niveau interprofessionnel.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a subordonné l'éventualité de la
décision unilatérale, dans un délai qui devait être fixé par décret, à l'échec
de la négociation collective, et ce sans préciser de quel niveau de négociation
collective il devait s'agir.
Le présent amendement vise à placer ce principe de subordination, que la
commission accepte par conséquent, dans le cadre suivant : nous souhaitons
d'abord préciser qu'il s'agit bien d'une négociation d'entreprise et, ensuite,
fixer le délai dans la loi, et le fixer à un an par symétrie avec la
disposition proposée par l'amendement n° 1 voté en fin de matinée.
Enfin, nous souhaitons que, dans le cas où la négociation est rendue
impossible, en particulier du fait de l'absence de représentants du personnel,
cette condition de subordination ne soit pas maintenue, car elle n'aurait pas
de raison d'être.
Tels sont, monsieur le ministre, mes chers collègues, les objectifs que la
commission poursuit avec cet amendement n° 2.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 65.
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
L'amendement n° 2 vise, comme l'a indiqué M. le
rapporteur, à fixer à un an le délai au-delà duquel, en l'absence d'accord, une
décision unilatérale de l'employeur peut intervenir pour mettre en place
l'épargne retraite.
Le troisième alinéa de l'article 6, tel qu'il a été adopté, laissait le soin à
un décret de fixer ce délai.
Le Gouvernement comprend tout à fait le souci de la commission des finances,
notamment de son rapporteur, de fixer dès à présent ce délai, qui ne doit pas
être trop long et qui paraît ici raisonnable.
Toutefois, la nouvelle rédaction du début du troisième alinéa, proposée par la
commission des finances, ne fait référence qu'aux accords d'entreprises alors
que, comme il est indiqué dans la suite de l'alinéa, les fonds d'épargne
retraite peuvent être également mis en place par une décision unilatérale d'un
groupement d'employeurs.
Par souci de cohérence, le Gouvernement a déposé ce sous-amendement n° 65, qui
tend à supprimer les mots « d'entreprises » au début du troisième alinéa.
Ainsi, le délai d'un an laissé à la négociation collective s'appliquera à tous
les niveaux de la négociation - entreprises, branches - et au niveau
interprofessionnel.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 65 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Comme vient de l'expliquer M. le ministre, ce sous-amendement
vise à rendre le texte plus cohérent. Il élargit le champ de la convention
collective. J'y suis donc favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 65, accepté par la commission.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 51 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
L'avis de la commission est défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 51 et 2 ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 51,
qui supprimerait la possibilité de mettre en place les plans d'épargne retraite
par décision unilatérale.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 2, modifié par le
sous-amendement que le Sénat, dans sa sagesse, vient d'adopter.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Marc Massion.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si mes
comptes sont justes, c'est, au moins, la quatrième fois que le Gouvernement ou
la majorité parlementaire se propose de réécrire l'article 6, dont on peut dire
que la principale caractéristique n'est pas la densité.
Cela ne nous étonne pas. Il s'agit en effet de l'article censé définir le rôle
des partenaires sociaux dans la mise en place des plans d'épargne retraite.
Cette fois, la proposition est claire : il s'agit ni plus ni moins d'évacuer
ceux-ci du dispositif. Il suffira pour ce faire d'attendre une année. Vous avez
déjà procédé à cette éviction à l'article 1er ; vous recommencez à l'article 6,
mais vous procédez, cette fois, en deux temps.
Premièrement, vous confirmez que l'accord d'entreprise peut déroger à l'accord
de branche ou à l'accord interprofessionnel dans un sens moins favorable aux
salariés. Concrètement, cela signifie que l'employeur pourra financer le plan à
un niveau inférieur à celui qui est prévu par l'accord de branche, voire ne pas
participer à ce financement.
Bref, vous voulez bien des partenaires sociaux à condition qu'ils réduisent
les droits des salariés.
Je présume que, demain, vous nous proposerez la même chose pour les régimes de
retraite complémentaire !
Le président du CNPF, M. Gandois, a récemment annoncé la couleur : « Il faut,
dit-il, revoir l'ensemble des accords de branche, parce qu'ils accordent des
avantages excessifs aux salariés. »
Dès lors, vous me permettrez de dire que je ne vois pas bien à quoi sert qu'au
plus haut niveau de l'Etat on s'affirme comme les garants de la protection
sociale.
Deuxièmement, vous décidez, et cette mesure s'inscrit dans la même logique,
qu'une fois le délai d'un an écoulé, les partenaires sociaux n'ont plus qu'à
disparaître, et que l'employeur pourra faire ce qu'il voudra, c'est-à-dire rien
!
En outre, votre texte est difficile à cerner : dans quel cas décidera-t-on que
la négociation est devenue impossible ? Lorsque le délai d'un an aura expiré,
deviendra-t-il définitivement impossible d'engager une nouvelle négociation ?
Quel sens tout cela peut-il avoir, alors qu'un an après la promulgation de la
loi tout salarié pourra adhérer au plan de son choix ?
Cet amendement, dans la logique du texte, va à l'encontre des intérêts des
assurés. Comme la plupart des modifications proposées, il ne correspond pas à
la réalité de la négociation collective dans l'entreprise.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. Marini, au nom de la commission.
L'amendement n° 52 est déposé par M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du
groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer le dernier alinéa de l'article 6.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
L'amendement n° 3 est un amendement de conséquence de
l'amendement n° 1, que le Sénat a adopté tout à l'heure.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 52.
M. Paul Loridant.
Sans revenir sur l'argumentation que nous avons déjà développée sur l'article
6, je vous invite, mes chers collègues, pour des raisons bien évidemment
différentes de celles de M. le rapporteur, à procéder à la suppression du
quatrième alinéa de cet article.
Nous souhaitons, en effet, que soit clairement marquée la préférence de la
Haute Assemblée pour la mise en place de fonds de pension dans le cadre d'une
négociation collective ambitieuse, respectueuse des volontés des parties, sans
que l'employeur ait la possibilité d'imposer aux salariés ses vues sur les
fonds d'épargne retraite.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 52 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je suis un peu embarrassé pour donner un avis parce que cet
amendement est formellement identique à celui que je viens de présenter et, de
ce point de vue, je ne peux qu'y être favorable, alors que les intentions qui
ont présidé à son dépôt sont en totale opposition avec celles de la
commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à ces amendements, mais,
bien évidemment, je rencontre le même problème que M. le rapporteur. Je dirai
donc que je suis favorable à l'amendement n° 3 malgré les arguments de M.
Loridant et favorable à l'amendement n° 52 enrichi de l'argumentation de M. le
rapporteur.
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 3 et 52, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Par amendement n° 21, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter l'article 6 par un alinéa ainsi
rédigé :
« Lorsqu'un salarié est affilié à plusieurs plans d'épargne retraite, il ne
peut bénéficer des dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 242-1 du
code de la sécurité sociale et de celles de l'article 83
ter
, 1°, du
code général des impôts qu'au titre d'un seul de ces plans. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Sur notre initiative, le Sénat avec raison avait adopté un amendement
prévoyant qu'un même salarié ne pouvait bénéficier que d'un seul plan d'épargne
retraite.
L'Assemblée nationale, à la demande des assureurs, je suppose, a supprimé
cette disposition. Elle doit être rétablie, en tout cas dans son esprit ; nous
en avons en effet modifié la forme.
Il s'agit de protéger les finances publiques et la sécurité sociale contre une
optimisation des avantages fiscaux et sociaux excessifs que vous avez prévus,
laquelle profiterait essentiellement aux détenteurs de haut revenus.
La règle que nous vous proposons de rétablir n'est en aucune manière génante
pour les adhérents aux plans puisque leur contenu peut être défini librement,
soit dans le cadre de l'entreprise, soit par chaque fonds lorsque les salariés
y adhéreront individuellement. Plusieurs plans pourront être souscrits par un
même salarié, mais celui-ci ne profitera qu'une fois des avantages fiscaux et
sociaux qui lui sont offerts.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement,
qui lui semble trop restrictif.
En ce qui concerne le dispositif incitatif en matière fiscale ou sociale, il
faut rappeler que l'ensemble des versements du salarié entrent dans une
enveloppe globale. Ce n'est donc pas parce qu'il existerait plusieurs plans
dans une même entreprise que le coût pour les régimes sociaux ou pour le budget
de l'Etat en serait plus élevé. En conséquence, il me semble que les
préoccupations exprimées par M. Massion n'ont pas lieu d'être.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Mon analyse est identique à celle de M. le rapporteur.
Retenir cet amendement n° 21 reviendrait à interdire de fait à un salarié de
participer à deux ou plusieurs plans. Or, tout le monde est d'accord, je crois,
pour considérer qu'il peut être intéressant de permettre à un salarié de
participer à plusieurs plans.
Le souci de M. Massion, si j'ai bien compris, est d'éviter un cumul
d'avantages fiscaux et sociaux.
Or, comme vient de le dire M. le rapporteur, la rédaction actuelle de la
proposition de loi garantit qu'il n'y aura pas de cumul d'avantages fiscaux :
le plafond de l'avantage fiscal prévu à l'article 25, c'est-à-dire la déduction
des versements des salariés et de leurs employeurs dans la limite de 5 % de la
rémunération brute ou de 20 % du plafond annuel de la sécurité sociale, de même
que celui de l'avantage social prévu à l'article 26, s'appliquent globalement à
l'ensemble des versements annuels effectués par un même salarié et son
employeur ou ses employeurs, et cela quel que soit le nombre de plans d'épargne
retraite dont les intéressés peuvent être titulaires en application de
l'article 6.
A partir du moment où la rédaction garantit qu'il n'y aura pas cumul
d'avantages fiscaux, il ne nous paraît pas opportun de la modifier.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 6
bis
M. le président.
« Art. 6
bis.
_ La mise en place de plans d'épargne retraite est
subordonnée à la conclusion d'un contrat entre un employeur, un groupement
d'employeurs, d'une part, et un organisme mentionné à l'article 9, d'autre
part. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 4, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter
cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le contrat instituant le plan d'épargne retraite prévoit les conditions et
la périodicité d'un réexamen. Le réexamen doit avoir lieu au moins tous les
cinq ans.
« Les engagements du plan d'épargne retraite sont soit exprimés, pour la
période qui précède la constatation des droits, en unités de compte constituées
de valeurs mobilières ou d'actifs offrant une protection suffisante de
l'épargne investie et figurant sur une liste dressée par décret, soit définis
conformément aux dispositions du chapitre premier du titre IV du livre IV du
code des assurances.
« Lorsque le souscripteur d'un plan d'épargne retraite décide de changer de
fonds d'épargne retraite, la contre-valeur des actifs représentatifs des droits
et obligations attachés à ce plan est intégralement transférée, sans pénalité,
vers le nouveau fonds d'épargne retraite dans un délai et selon des modalités
fixées par décret. »
Cet amendement est assorti de cinq sous-amendements.
Le sous-amendement n° 22, présenté par MM. Massion, Autain et Mélenchon, les
membres du groupe socialiste et apparentés, vise à la fin de la première phrase
du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4, à remplacer les mots
: « d'un réexamen. » par les mots : « du réexamen du choix du fonds d'épargne
retraite et du prestataire de services d'investissement. »
Le sous-amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. Massion, Autain et
Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés, tend à remplacer le
second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4 par trois alinéas ainsi
rédigés :
« Lorsque le souscripteur d'un plan d'épargne retraite a résilié le plan qui
le lie à un fonds d'épargne retraite, les adhérents au fonds continuent de
bénéficier des participations aux bénéfices ou aux excédents dans les
conditions prévues initialement par le plan sans que celles-ci puissent être
inférieures à la moyenne des participations dont bénéficient les adhérents de
l'ensemble des autres plans du fonds.
« Lorsqu'un nouveau plan est immédiatement souscrit en remplacement du
précédent, toutes les provisions représentatives des engagements pris au titre
du précédent plan sont transférées avec l'ensemble des droits y afférents vers
le nouveau fonds d'épargne retraite dans un délai maximum de six mois à compter
de la date de résiliation du plan précédent. Les actifs transférés sont au
moins égaux à la valeur de réalisation des placements correspondant aux
engagements. Aucune indemnité ou perte de participations aux bénéfices ou aux
excédents ne peut être mise à la charge de l'adhérent ni déduite de la valeur
actuelle des rentes acquises au moment du transfert.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du
deuxième alinéa du présent article aux plans d'épargne retraite auxquelles
adhèrent plusieurs entreprises. »
Le sous-amendement n° 23, présenté par MM. Massion, Autain et Mélenchon, les
membres du groupe socialiste et apparentés, a pour objet, dans le deuxième
alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4, de supprimer les mots : « soit
exprimés, pour la période qui précède la constatation des droits, en unités de
compte constituées de valeurs mobilières ou d'actifs offrant une protection
suffisante de l'épargne investie et figurant sur une liste dressée par décret,
soit ».
Le sous-amendement n° 42, présenté par M. Badré, vise à compléter le deuxième
alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4 pour compléter cet article par
les mots : « ou de la section 4 du chapitre II du titre III du livre IX du code
de la sécurité sociale. » Le sous-amendement n° 24, présenté par MM. Massion,
Autain et Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés, tend à
compléter le troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4 par une
phrase ainsi rédigée : « Dans tous les cas, les documents à caractère
contractuel ou publicitaire relatifs aux plans d'épargne retraite doivent
présenter de manière claire et accessible la nature de l'opération ainsi que
l'étendue des engagements que prend le fonds d'épargne retraite vis-à-vis des
adhérents. »
Par amendement n° 67, le Gouvernement propose de compléter l'article 6
bis
par un alinéa ainsi rédigé :
« Les fonds d'épargne retraite ne peuvent s'engager à servir des prestations
définies en fonction du salaire de l'adhérent. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Sur les sujets traités par cet amendement, et qui sont
substantiels, je me livrerai tout d'abord à une mise au point ou, tout au
moins, à un rappel.
Nous pouvons considérer qu'il existe actuellement, dans les pratiques
assurancielles, cinq types de garanties susceptibles d'être apportées au
souscripteur par un fonds d'épargne retraite. Si je les classe sur une échelle
risque-rentabilité, ces garanties sont les suivantes.
On trouve, en premier lieu, les contrats à prestations définies en fonction du
salaire. Ce sont les régimes dits de l'article 39 du code général des impôts,
plus connus sous le nom de « retraites chapeaux ». Ils offrent au salarié le
risque minimum. Mais, en réalité, ce risque est transféré sur l'entreprise.
En deuxième lieu, il existe les contrats en francs dans lesquels, non
seulement le nominal est garanti, mais encore l'assureur s'engage à verser un
taux minimum, dit « taux technique ». Ce dernier ne peut, selon la
réglementation en vigueur, être supérieur à 3,5 %.
En troisième lieu, nous avons les contrats en francs dans lesquels seul le
nominal est garanti et pour lesquels il n'y a aucune garantie de taux.
En quatrième lieu, il y a les contrats spécifiques dits de l'article L. 441 du
code général des impôts - ce sont les régimes PREFON pour les fonctionnaires et
FONPEL pour les élus locaux - qui, par un mécanisme complexe faisant intervenir
les notions de valeurs de services et de valeurs d'acquisition, assurent à
l'épargnant d'engranger au moins les résultats accumulés au cours d'une
année.
En cinquième lieu, il y a les contrats dits en unités de compte, qui ne sont
assortis d'aucune garantie mais qui autorisent une totale liberté de gestion -
actions ou obligations - et permettent de placer beaucoup plus largement les
actifs en titres de capital.
L'intention du Sénat en première lecture était bien d'interdire les régimes à
prestations définies ou « retraites chapeaux », qui ont donné lieu à des abus
importants ces dernières années, en particulier au profit de cadres dirigeants
en passe de partir à la retraite qui souhaitaient se constituer, par ce moyen
une retraite importante sans avoir cure du passif social qu'ils laissaient à
l'entreprise. Par ailleurs, de grandes entreprises ont pu également se laisser
piéger dans ce type de systèmes en faisant à leurs salariés des promesses très
difficiles à tenir ensuite.
Sur l'élimination par la loi de ces régimes à prestation définie, le
Gouvernement et la commission des finances sont tout à fait d'accord.
En revanche, nous avons une appréciation un peu différente quant au fait de
savoir s'il faut autoriser ou non les contrats à taux techniques garantis, ce
qui constitue une forme de prestation définie, au sens financier du terme.
Notre position en première lecture était de dire que, pour promettre un taux
technique garanti, l'assurance est quasiment contrainte de s'adosser à une
gestion majoritairement, voire, exclusivement obligataire. C'est le cas de
figure de l'assurance-vie. Or, nous avons souvent affirmé que nous ne voulions
pas que les fonds de pension soient de l'assurance-vie à trente ou quarante
ans. Nous souhaitons donc éliminer les produits impliquant de façon quasi
mécanique un placement obligataire dominant.
Il faut être bien conscient que, sur une épargne longue comme les fonds
d'épargne retraite, s'il y a garantie, le rendement sur la durée se rapprochera
de la garantie. Moins il y a de garanties explicites, plus le produit peut
bénéficier d'une gestion performante. Le constat simple, vérifié dans le passé
dans les pays qui ont beaucoup pratiqué les fonds de pension, est qu'il est
beaucoup plus dangereux, dans une optique à long terme, d'être investi sur de
l'obligataire ou du monétaire que de prendre le bon risque sur des placements
longs, exposés, mais justifiés.
Nous avons donc estimé qu'il fallait, dans l'intérêt des adhérents, éliminer
les taux techniques garantis, afin de mettre en place une épargne longue
profitable à tous, notamment aux entreprises, qui pourront ainsi renforcer
leurs fonds propres.
La position du Gouvernement, telle que je l'ai perçue au cours de nos contacts
préalables et de la discussion générale, consiste à dire que le seul fait
d'allonger ce que l'on appelle d'un terme barbare la « duration » du passif,
c'est-à-dire la durée comprise entre le moment où est conclu l'engagement et
celui où il se réalise, permettra aux gestionnaires de diversifier leurs
engagements plus qu'ils ne le font aujourd'hui.
Par ailleurs, il est vrai que, optiquement du moins, le risque est plus élevé
dans un contrat en unités de compte et qu'il est supporté par l'adhérent, non
par l'assureur. L'interdiction des placements garantis risquerait de se heurter
de plein fouet aux comportements d'épargne de nos concitoyens et à leur
aversion bien connue pour le risque économique.
Vous considérez également, monsieur le ministre, que tout dépendra du
traitement comptable. Actuellement, dans le cadre du code des assurances, ce
traitement privilégie les placements en obligations au détriment des actions et
vous vous engagez à le modifier par voie réglementaire.
C'est pourquoi, afin de clarifier le débat, la commission des finances a
présenté l'amendement n° 4, qui comporte trois alinéas. Les longues
explications que j'ai données concernent le sujet traité par le deuxième
alinéa, le premier et le troisième ne contenant que des dispositions de
conséquence par rapport à des votes qui ont déjà eu lieu.
Vos explications, monsieur le ministre, vont nous permettre de savoir quelles
doivent être les limites du champ des techniques offertes aux plans d'épargne
retraite.
Quand nous disions que les plans d'épargne retraite devaient proscrire les
prestations définies, nous voulions éviter les « retraites chapeaux » et les
taux techniques garantis. En ce qui concerne les autres formes de gestion, nous
en acceptions le principe. Au demeurant, il ne nous est jamais apparu opportun
de revenir sur le mode de gestion de régimes comme PREFON et FONPEL.
Monsieur le président, mes chers collègues, vous voudrez bien me pardonner le
caractère très technique de ces longues explications, mais il m'a paru
nécessaire de poser tous les termes du débat.
M. Emmanuel Hamel.
Dans vos propos, monsieur le rapporteur, la technique était dominée par
l'esprit !
(Sourires.)
M. le président.
Monsieur le ministre, sans doute conviendrait-il, pour simplifier la
discussion, que, dès à présent, vous donniez l'avis du Gouvernement sur
l'amendement n° 4 et que vous présentiez l'amendement n° 67.
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
En effet, monsieur le président.
L'amendement n° 4 reprend deux principes que le Gouvernement approuve tout à
fait.
Tout d'abord, les droits des salariés sont garantis au travers d'un
encadrement des conditions de transfert des plans d'un fonds d'épargne retraite
vers un autre. Cette disposition est également approuvée par l'Assemblée
nationale, qui l'a précisée dans l'article 9
bis.
La rédaction du texte de l'Assemblée nationale en deuxième lecture, reprise de
la position du Sénat en première lecture, me paraît particulièrement claire. En
outre, elle est parfaitement cohérente avec les dispositions régissant les
régimes collectifs de retraite dits « article 83 du code général des impôts »,
ce qui constitue un avantage qu'il conviendrait de préserver. Il serait donc
judicieux de conserver cette rédaction.
Dès lors, l'article 9
bis,
dans sa rédaction actuelle, me paraît
devoir être préféré aux premier et troisième alinéas du texte présenté par
l'amendement n° 4.
J'en viens maintenant au deuxième alinéa.
Le second principe sur lequel nous sommes d'accord avec M. le rapporteur a
trait à la garantie des droits des salariés et à une maximisation du rendement
des plans au travers de l'interdiction des « régimes chapeaux » et autres
systèmes de retraite à prestations définies en fonction du salaire.
Ce point, qui reçoit l'assentiment du Gouvernement, me semblait acquis au
travers de la rédaction de l'article 2 du texte. Cela étant, il peut sembler
préférable de le dire explicitement en interdisant les plans d'épargne retraite
exprimés en fonction de la variable non financière qu'est le salaire plutôt
qu'en imposant des plans d'épargne retraite en unités de compte ou sous la
forme de régimes collectifs de rente et en excluant les régimes en francs, qui
constituent une des modalités appréciées des régimes à cotisations définies.
En conséquence, tout en partageant les préoccupations de la commission, le
Gouvernement estime qu'il faudrait donner à ces préoccupations une traduction
technique légèrement différente, inspirée des articles 9 et 6
bis,
que
le Sénat avait adoptés en première lecture.
C'est pourquoi, je propose à M. le rapporteur de bien vouloir retirer
l'amendement n° 4, étant entendu que les dispositions des premiers et troisième
alinéas sont reprises, dans une rédaction qui nous paraît meilleure, à
l'article 9
bis
et que le deuxième alinéa pourrait être avantageusement
remplacé par l'amendement n° 67 du Gouvernement, qui aboutit au même résultat
mais qui nous paraît plus simple.
En effet, l'amendement n° 67 tend à prévoir que les fonds d'épargne retraite
ne peuvent s'engager à servir des prestations définies en fonction du salaire
de l'adhérent.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, maintenez vous l'amendement n° 4 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Comme je l'ai laissé entendre, nous nous sommes efforcés,
ensemble, d'examiner ce sujet très technique de la manière la plus concrète
possible.
Compte tenu de la confirmation que M. le ministre vient d'apporter, je retire
l'amendement n° 4 et j'exprime, en tant que rapporteur, un avis favorable sur
l'amendement n° 67.
M. le président.
L'amendement n° 4 est retiré.
En conséquence, les sous-amendements n°s 22, 27 rectifié, 23, 42 et 24 n'ont
plus d'objet.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 67.
M. Marc Massion.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
M. le rapporteur a parlé précédemment de deux logiques tout à fait
différentes. Eh bien, c'est effectivement au nom d'une logique tout à fait
différente de celle de M. le ministre que nous voterons contre cet
amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 67, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6
bis,
ainsi modifié.
(L'article 6
bis,
est adopté.)
Article 6
ter
M. le président.
L'article 6
ter
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. _ En cas de rupture du contrat de travail, l'adhérent à un plan
d'épargne retraite peut demander le maintien intégral des droits acquis au
titre de ce plan. Il peut également demander le transfert intégral sans
pénalité, dans des conditions fixées par décret, des droits attachés à ce plan
sur un autre plan d'épargne retraite ou contrat d'assurance de groupe en cas de
vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle.
»
Je suis saisi de trois amendement, qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 26, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres groupe
socialiste et apparentés proposent de rédiger ainsi l'article 8 :
« Lorsque l'adhérent à un plan d'épargne retraite change d'employeur, et à la
condition qu'il puisse bénéficier d'un plan d'épargne retraite en vigueur chez
son nouvel employeur, toutes les provisions correspondant aux engagements pris
au titre du précédent plan peuvent, à sa demande, être transférées au fonds
d'épargne retraite chargé de la mise en oeuvre du plan en vigueur chez son
nouvel employeur. Dans tous les cas, les actifs transférés sont, au moins,
égaux à la valeur de réalisation des placements correspondant aux
engagements.
« L'adhérent doit notifier par lettre recommandée au fonds d'épargne retraite
qu'il quitte son intention d'user de la faculté de transfert prévue au premier
alinéa du présent article dans un délai de deux mois à compter de la rupture de
son contrat de travail.
« L'adhérent qui n'use pas de la faculté de transfert prévue au premier alinéa
du présent article ou qui laisse expirer le délai prévu au deuxième alinéa
conserve le bénéfice intégral des droits constitués en son nom auprès du fonds
d'épargne retraite. Il conserve les mêmes règles de participation aux bénéfices
ou aux excédents que celles qui sont applicables aux autres adhérents du plan
qu'il a quitté.
« Les statuts du fonds d'épargne retraite fixent le délai maximum du transfert
sans que celui-ci puisse excéder quatre mois à compter de l'envoi de la lettre
recommandée mentionnée au deuxième alinéa du présent article, ainsi que les
modalités dudit transfert.
« Lors de la rupture du contrat de travail, l'employeur remet à l'adhérent une
note explicative élaborée par le fonds d'épargne retraite, qui présente de
manière claire et précise les modalités du transfert ; le défaut de remise de
cette note entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu au deuxième
alinéa du présent article jusqu'au soixantième jour suivant la date de remise
effective de cette note.
« Le salarié qui, dans un délai de deux ans au plus après avoir quitté
l'entreprise, n'a pas eu la possibilité de s'affilier à un autre plan d'épargne
retraite peut faire usage de la faculté de transfert, dans les conditions et
délais prévus aux deuxième et quatrième alinéas du présent article, vers la
Caisse des dépôts et consignations. La note mentionnée au cinquième alinéa
comporte obligatoirement une mention relative à l'exercice de cette faculté.
»
Par amendement n° 5, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter
l'article 8 par un alinéa ainsi rédigé :
« En l'absence de rupture du contrat de travail, l'adhérent peut demander,
tous les dix ans, le transfert intégral, sans pénalité, des droits acquis en
vertu de ce plan sur un autre plan d'épargne retraite. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 25, présenté par MM.
Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés,
et visant, dans le texte proposé par cet amendement, à remplacer les mots : « ,
tous les dix ans, » par les mots : « , tous les ans, ».
Par amendement n° 53, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 8 par un
alinéa ainsi rédigé :
« Il peut également demander le reversement des droits attachés à ce plan.
»
La parole est à M. Massion, pour défendre l'amendement n° 26.
M. Marc Massion.
Nous présentons de nouveau en deuxième lecture cet amendement, que nous avions
déjà défendu en première lecture.
L'article 8 tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale, et que vous vous
êtes bien gardé de modifier, est pour le moins surprenant : lorsque l'adhérent
voit son contrat de travail rompu, ses droits ne sont pas maintenus
automatiquement ; pour qu'ils le soient, il faut que l'adhérent le demande à
l'assureur. Nous avons ici une nouvelle illustration de l'improvisation dans
laquelle ce texte est élaboré.
Mais le problème majeur n'est pas là.
Vous avez résolument opté, dans cette affaire comme dans d'autres, pour le
libre jeu du marché ; adhésions facultatives ou individuelles, forte
concurrence entre les assureurs, forte concurrence aussi entre les
gestionnaires des actifs financiers, faculté de changer d'organisme. La
contrepartie de cette logique, ce doit être un texte rigoureux, fixant très
clairement les règles du jeu et assurant ainsi une protection minimale des
droits des assurés.
Dans tous les pays économiquement développés qui ont des fonds de pension, la
législation et la réglementation fixent très précisément les règles relatives à
la portabilité des droits. Pourquoi ? Parce que, lorsque l'assuré ne cotise
plus ou qu'il souhaite transférer les actifs représentatifs de ses droits, la
tentation risque d'être grande, pour l'organisme assureur, soit de lui
attribuer moins de participations aux bénéfices, soit de ne transférer qu'une
partie des actifs qui sont la contrepartie des droits qu'il a acquis.
En première lecture, le ministre a jugé notre amendement compliqué et inutile.
Il a évidemment invoqué la liberté des parties contractantes, c'est-à-dire la
seule liberté, de l'assureur. Eh bien, cette liberté je ne la reconnais pas à
l'assureur lorsqu'elle doit s'exercer systématiquement à l'encontre des
assurés.
Si le Sénat n'adopte pas l'amendement que nous proposons, cela signifiera que,
après l'Assemblée nationale, il a décidé de ne plus exercer les attributions
qui sont les siennes. Tout transfert doit être neutre pour l'assuré. Il
appartient au législateur de dire le droit en la matière et de protéger
l'assuré contre les abus que le professionnel peut être tenté de commettre à
son encontre.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
L'amendement n° 5 vise à rétablir, en la modérant, une
disposition que nous avions votée en première lecture.
Dans le souci d'assurer la concurrence et, par conséquent, de garantir au
souscripteur les meilleures conditions possibles quant au choix entre les
différents régimes d'épargne retraite, nous souhaitions que l'adhérent puisse
périodiquement, même en l'absence de rupture du contrat de travail, demander le
transfert intégral et sans pénalité de ses droits sur un autre plan d'épargne
retraite.
En première lecture, nous avions envisagé une périodicité quinquennale.
Il nous apparaît aujourd'hui que cinq années constituent, en la matière, une
période trop courte : une telle périodicité pourrait déstabiliser certaines
politiques de gestion et, finalement, aller à l'encontre de certains de nos
objectifs.
C'est pourquoi nous proposons de rétablir la possibilité pour l'adhérent de
demander le transfert de ses droits sur un autre plan, mais cela tous les dix
ans et non plus tous les cinq ans.
M. le président.
La parole est à M. Massion, pour défendre le sous-amendement n° 25.
M. Marc Massion.
Il nous semble nécessaire que les adhérents puissent facilement changer de
plan s'ils le désirent.
L'adhésion du salarié à un plan d'épargne retraite sera, nous dites-vous,
annuelle avec tacite reconduction. Dans ces conditions, ou bien le choix du
plan résulte d'une décision de l'entreprise et les salariés ne pourront alors
s'affilier qu'au plan souscrit, ou bien les salariés auront le libre choix du
plan et de l'assureur.
Vous avez assez logiquement opté, dans le premier cas, pour un réexamen de la
situation tous les cinq ans ; mais, dans le second cas, le salarié doit être
libre de demander le transfert des droits lorsqu'il le souhaite. Pourquoi, en
effet, lui imposer de ne pouvoir changer d'assureur que tous les dix ans ? Ce
délai est beaucoup trop long !
Prenons l'exemple d'un assureur qui propose des contrats en unités de compte,
c'est-à-dire sans garantie, et dont la gestion financière est très médiocre :
le salarié n'a aucun intérêt à rester lié à cet assureur, et il doit donc
pouvoir, sans délai d'aucune sorte, adhérer à un autre organisme.
Le même raisonnement s'applique
a fortiori
dans le cas d'un salarié qui
aura adhéré individuellement à un plan d'épargne retraite, hypothèse que vous
n'avez manifestement pas envisagée.
Je crois qu'il faut être prudent car, dans mon exemple, l'impossibilité dans
laquelle se trouvera l'assuré de changer en temps opportun d'assureur découlera
de cette disposition législative que vous voulez faire adopter par le Sénat.
C'est donc la responsabilité de l'Etat qui sera ainsi engagée.
Pour une fois, allez jusqu'au bout de votre démarche et soyez réellement
libéraux : lorsque l'on accorde, comme vous, une confiance aveugle au marché,
il faut être cohérent et ouvrir réellement aux assurés qui ont fait un choix
individuel le droit légitime de revenir sur celui-ci en changeant d'assureur et
en ayant la possibilité de transférer non pas les droits, comme vous l'avez
écrit, mais les actifs représentatifs de ces droits.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 25 ?
M. Paul Loridant.
Pris au piège du libéralisme !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Il s'agit là d'un débat très intéressant, parce que M.
Massion nous renvoie à la pratique américaine. Or, aux Etats-Unis, les fonds de
pension sont gérés selon deux modes : certains sont constitués en
trust
et d'autres prennent la forme de contrats d'assurance.
La législation que nous sommes en train d'élaborer ne prévoit pas la formation
de
trusts,
qui n'existent pas en droit français. Il faudra un jour voter
une loi sur la fiducie si l'on souhaite instaurer un système à peu près
équivalent, mais il sera nécessaire de réunir quelques conditions, me
semble-t-il, pour progresser dans cette voie.
Les fonds de pension ne s'assimilent pas davantage à des contrats d'assurance,
puisque nous définissons une nouvelle personne morale spécifique, qui est le
fonds d'épargne retraite.
Aux Etats-Unis, lorsque le fonds est constitué sous forme de
trust,
le
souscripteur ne peut pas librement en sortir selon une périodicité définie. En
revanche, lorsqu'il s'agit d'un contrat d'assurance, le souscripteur peut,
comme le propose M. Massion, demander le transfert de ses droits chaque
année.
Si j'essaie d'en tirer une synthèse cohérente, j'aurai donc tendance à dire
que, puisque la proposition de loi que nous examinons n'établit ni des
trusts,
ni des contrats d'assurance, mais instaure quelque chose
d'intermédiaire, il n'est pas absurde de permettre le transfert des droits, sur
l'initiative du souscripteur, non pas tous les ans, ce qui déstabiliserait la
gestion et conduirait à adopter une optique monétaire et obligataire à trop
court terme, mais après un délai raisonnable qui pourrait, d'après la
discussion que nous avons eue en première lecture, être de dix ans.
Pour toutes ces raisons, et après avoir argumenté peut-être un peu longuement,
mais je voulais montrer à M. Massion que ses amendements sont examinés comme
ils le méritent, avec tout le sérieux nécessaire - je ne puis que formuler un
avis défavorable sur le sous-amendement n° 25.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 25 ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
L'avis du Gouvernement est identique celui de M. le
rapporteur, pour les mêmes raisons.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 25.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
J'ai bien entendu les arguments de M. le ministre et de M. le rapporteur, mais
qu'ils me permettent de m'étonner.
En effet, cette proposition de loi a été élaborée sous le signe de la liberté,
et le vocabulaire employé le montre : les salariés « peuvent », « ils ne sont
pas obligés », les employeurs « peuvent » également, etc.
Certes, on a bien vu, au cours de l'examen de ce texte, que cette liberté
comportait quelques limites, puisque l'employeur aura finalement la possibilité
d'imposer de façon unilatérale la création d'un plan d'épargne retraite. Mais
surtout, si le bénéficiaire du fonds d'épargne retraite, c'est-à-dire le
salarié, s'intéresse à la gestion du fonds, s'aperçoit que celle-ci est
médiocre et souhaite changer d'organisme assureur, il ne pourra le faire - M.
le rapporteur et M. le ministre nous l'ont dit - que tous les dix ans. Si l'on
veut ramener ce délai à un an, il s'agirait alors, selon eux, d'une pratique
américaine qui n'est pas la nôtre, qui relève d'une société ultra-libérale. M.
le rapporteur et M. le ministre se veulent libéraux, mais de façon modérée !
Quoi qu'il en soit, ce libéralisme profite toujours à l'employeur. On me
permettra donc de souligner les contradictions du Gouvernement et de sa
majorité et d'annoncer que le groupe communiste républicain et citoyen votera
le sous-amendement du groupe socialiste.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 25, repoussé par la commission et par
le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 53.
M. Paul Loridant.
L'amendement n° 53 tend en fait à compléter les dispositions relatives au
problème posé par la rupture du contrat de travail dans l'optique de
l'exécution d'un plan d'épargne retraite.
En effet, il est malheureusement à prévoir que certains salariés, qui auront
souscrit un plan d'épargne retraite, perdront leur emploi et connaîtront le
chômage. Or parmi les raisons pouvant motiver un transfert des droits acquis au
titre du plan avant l'âge légal de départ à la retraite et de liquidation de
ceux-ci figurent le changement d'entreprise et la cessation temporaire
d'activité.
Il s'agit donc pour nous, là encore, de rendre un peu plus « liquide »
l'épargne accumulée, en ouvrant, au-delà des modalités éventuelles de transfert
des droits acquis, une possibilité de liquidation de ceux-ci, afin de donner au
salarié privé d'emploi - licencié, soyons clairs ! - la faculté de disposer de
son capital pour faire face à la diminution de ses ressources.
Nous considérons que les risques sont réels pour les salariés, et le texte,
tel qu'il est conçu aujourd'hui, ne leur permet pas, même s'ils sont privés
d'emploi, de mobiliser leur épargne retraite avant l'âge de soixante ans. Nous
proposons donc d'instituer une dérogation en faveur de ceux de nos concitoyens
qui se trouveraient dans cette situation.
J'ajoute, monsieur Marini, que je crois savoir qu'aux Etats-Unis cette
possibilité de sortie du dispositif en cas de privation d'emploi existe. Alors,
soyez libéral !
Tel est le sens de cet amendement, que nous proposons de transformer
éventuellement en sous-amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 26 et 53 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Sur l'amendement n° 26 de M. Massion, l'avis de la commission
est défavorable, car les dispositions proposées semblent relever, pour
l'essentiel, du domaine réglementaire ou de la liberté contractuelle.
S'agissant de l'amendement n° 53, et malgré les « appels du pied » de M.
Loridant au libéral que je suis en effet - je n'en disconviens pas, mais je
reste réaliste - il m'apparaît techniquement difficile à comprendre : soit il
tend à permettre le versement des droits acquis avant l'âge de la retraite,
notamment en cas de chômage, et alors il s'agit non plus d'un système de rente,
mais d'un instrument d'épargne ; soit il vise à permettre un reversement - ou
plutôt, en fait, une réversion - en faveur d'une tierce personne, mais on ne
comprend pas bien alors comment cette disposition pourrait s'insérer à cet
endroit du texte, étant donné les votes qui sont intervenus en fin de matinée,
lors de la discussion des premiers articles.
Le dispositif ne semble donc pas satisfaisant à la commission, ce qui l'a
conduite à émettre un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 26, 5 et 53 ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n°
26, et nous en revenons sur ce point à une discussion que nous avions déjà eue
en première lecture.
Ces dispositions techniques nous paraissent relever soit du domaine
réglementaire, dans la mesure où les principes ont été affirmés dans le texte,
soit, comme l'a dit M. le rapporteur, de la liberté contractuelle qui prévaut
entre les parties.
J'évoquerai ensuite l'amendement n° 53. Le Gouvernement y est également
opposé, parce qu'il revient sur le principe selon lequel l'épargne retraite
doit permettre de préparer la retraite, au cours des différentes phases de la
vie active et, le cas échéant, chez plusieurs employeurs, par la constitution
d'un complément de revenu versé sous la forme d'une rente. Cet amendement est
donc en contradiction avec l'objet général du texte.
Enfin, une fois n'est pas coutume, le Gouvernement est réservé sur
l'amendement n° 5 de la commission.
Il s'agit là ausssi d'un débat que nous avions eu lors de la première lecture.
En effet, sur le plan financier, je dirai, pour ne retenir qu'un argument, que
la disposition prévue par cet amendement, qui vise à assurer la possibilité
d'un transfert individuel des droits acquis tous les dix ans, indépendamment de
toute modification du contrat de travail, semble difficilement compatible avec
la gestion à long terme des engagements pris en matière de retraite à l'égard
des salariés. Une telle option aurait pour conséquence de renforcer une
concurrence axée notamment sur les performances à court terme des plans, ce qui
risquerait de pénaliser l'utilisation de ces fonds pour l'achat d'actions,
alors même que cet investissement constitue la meilleure garantie de
performances sur le long terme pour les salariés.
Par conséquent, le Gouvernement n'émet pas un avis favorable sur l'amendement
n° 5.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 53, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. _ Les fonds d'épargne retraite sont des personnes morales ayant pour
objet exclusif la couverture des engagements pris dans le cadre de plans
d'épargne retraite.
« Les fonds d'épargne retraite doivent être constitués sous la forme d'une
société anonyme d'assurance, d'une société d'assurance mutuelle, d'une
institution de prévoyance régie par le titre III du livre IX du code de la
sécurité sociale ou d'un organisme mutualiste du code de la mutualité.
« Lorsque le fonds d'épargne retraite est constitué sous forme d'une
institution de prévoyance régie par le titre III du livre IX du code de la
sécurité sociale, le chapitre II du titre III du livre IX dudit code est
applicable aux plans d'épargne retraite souscrits auprès de ce fonds.
« Lorsque le fonds d'épargne retraite est constitué sous une autre forme
juridique, les titres premier, III et IV du livre premier et le titre IV du
livre IV du code des assurances sont applicables aux plans d'épargne retraite
souscrits auprès de ce fonds. Toutefois, lorsque le fonds d'épargne retraite
est constitué sous la forme d'un organisme mutualiste régi par le code de la
mutualité, les articles L. 121-2, L. 122-2, L. 122-3 et L. 321-2 dudit code lui
demeurent applicables. »
Par amendement n° 60, M. Badré propose de compléter cet article par deux
alinéas rédigés comme suit :
« Les régimes de retraite à adhésion obligatoire servant des prestations
s'ajoutant à celles versées par la sécurité sociale et par les régimes de
retraite complémentaire relevant du titre II du livre IX du code de la sécurité
sociale peuvent opter pour le bénéfice des dispositions de la présente loi.
Dans ce cas, les dispositions de l'article 83
ter
(1°) du code général
des impôts s'appliquent aux cotisations qui assurent le financement de ces
régimes.
« Lorsque ces régimes sont mis en oeuvre par l'une des personnes morales
mentionnées à l'article 9 de la présente loi, répondant à l'ensemble des
conditions posées par les dispositions de cet article et de l'article 10 et
agréées par l'autorité administrative compétente antérieurement à la
promulgation de celle-ci, ladite personne morale demeure agréée pour poursuivre
ces opérations sous réserve d'en informer la ou les autorités administratives
compétentes dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la
présente loi. »
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
L'amendement n° 60 tend à traiter un problème qui me paraît réel et dont il
n'a pourtant curieusement presque pas été question jusqu'ici : celui des
entreprises qui se sont déjà engagées sur la voie que nous sommes en train de
baliser par le texte dont nous débattons.
L'amendement comporte deux alinéas, portant l'un sur un problème fiscal,
l'autre sur les conditions d'agrément.
Le premier alinéa concerne les entreprises qui ont déjà mis en place des
régimes de retraite supplémentaire à adhésion obligatoire. Ces entreprises
relèvent donc d'un statut fiscal antérieur, et nombre d'entre elles auront
intérêt à opter pour le nouveau dispositif fiscal. Or il n'est, à mon sens, pas
prévu qu'elles puissent le faire. Le premier alinéa a donc pour objet d'ouvrir
cette possibilité.
Le second alinéa de l'amendement revient sur les conditions d'agrément et vise
les institutions de prévoyance créées par certaines entreprises, peu nombreuses
d'ailleurs, pour mettre en place un régime de retraite supplémentaire. Il est
prévu que, si ces entreprises remplissent les conditions stipulées par la
proposition de loi, elles n'auront pas à demander un nouvel agrément.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Notre collègue Denis Badré pose un vrai problème, car il est
exact que certaines grandes entreprises ont déjà mis en place des régimes de
retraite supplémentaire qui s'inspirent de logiques assez proches de celle qui
nous guide. La question de l'articulation entre ces systèmes préexistants et
les fonds d'épargne retraite qui seront institués par la loi peut se poser.
La commission n'a pas été en mesure, compte tenu des délais et de la
technicité du sujet, de s'assurer de la faisabilité du dispositif qui est
proposé par l'amendement n° 60. Aussi, tout en partageant le souci exprimé par
M. Denis Badré, elle souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement avant de se
prononcer.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage la préoccupation de M. Badré
d'assurer les meilleures conditions de transfert possibles des droits des
régimes de retraite par capitalisation entre eux, que ceux-ci soient
facultatifs, comme l'épargne retraite, ou obligatoires. Je remercie M. Badré
d'avoir appelé notre attention sur un problème qui nous avait échappé en
première lecture.
Cela étant, les produits d'épargne retraite ne sont, je le rappelle, qu'un
complément et ne peuvent ni ne doivent se substituer aux régimes à caractère
obligatoire, y compris dans le domaine de la capitalisation. Dans ce contexte,
il ne paraît pas logique de permettre de vider les régimes collectifs à
adhésion obligatoire au bénéfice de l'épargne retraite. En outre, et d'un point
de vue juridique, certaines dispositions relatives à la retraite obligatoire,
qui s'appliquent aux régimes de retraite par capitalisation comme aux régimes
en répartition, sont incompatibles avec l'épargne retraite. Il en est ainsi,
par exemple, des modalités de la négociation collective relative à la
constitution ou à la révision de l'accord donnant naissance au régime. Il en
est de même en matière fiscale, avec les dispositions qui s'appliquent à des
régimes n'offrant qu'une sortie en rente à l'exclusion de toute sortie en
capital, qui sont donc différentes de l'épargne retraite. Dans ce contexte, le
premier alinéa de l'amendement n° 60 n'est pas juridiquement envisageable, sauf
à remettre en cause les principes de la négociation collective obligatoire en
matière de retraite qui ont été édictés par la loi du 8 août 1994 et dont je
doute que le Sénat souhaite la remise en cause.
En outre, sur le plan financier, il a été prévu que l'épargne retraite, dès sa
mise en place, serait gérée dans le cadre spécifique des structures dédiées
agréées spécialement à cette seule fin, afin de garantir les intérêts des
salariés qui adhèrent à un dispositif facultatif distinct des régimes de
retraite obligatoires ou d'assurance sur la vie.
Il me paraît donc indispensable de conserver ce principe, que nous avons
longuement évoqué et qui est un gage de transparence et de lisibilité du plan
d'épargne retraite, et d'éviter que certains puissent donner l'impression
qu'ils exercent l'activité d'épargne retraite sans agrément spécifique. Dans ce
contexte et compte tenu de ce souci de cohérence juridique et sociale mais
aussi de transparence du dispositif à l'égard des salariés, il ne me paraît pas
possible de retenir une disposition du type de celle qui figure à l'amendement
n° 60. Aussi, dans la mesure où les préoccupations que vous avez exprimées à
juste titre, monsieur Badré, sont prises en compte dans la proposition de loi,
peut-être pourriez-vous retirer votre amendement ?
M. le président.
Monsieur Badré, l'amendement n° 60 est-il maintenu ?
M. Denis Badré.
Je vous remercie, monsieur le ministre, des explications que vous venez de
nous donner. Mon propros vise non pas à remettre en cause les principes qui
fondent notre proposition de loi, mais à poser un problème qui me paraît réel.
Donc, si vous me confirmez soit que ce problème a déjà été largement résolu par
les autres dispositions du texte, soit que nous allons compléter les
dispositions qui permettraient de le traiter, je retirerai mon amendement.
M. le président.
M. le ministre acquiesce !
M. Denis Badré.
Dans ces conditions, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 60 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article 9
bis
M. le président.
« Art. 9
bis
. - Lorsque l'accord collectif ou la décision unilatérale
visés à l'article 6 désigne le fonds d'épargne retraite auprès duquel est
souscrit le plan, il comporte une clause déterminant dans quelles conditions et
selon quelle périodicité le choix de ce fonds ainsi que des intermédiaires et
délégataires des opérations relatives aux plans d'épargne retraite peut être
réexaminé. La périodicité du réexamen ne peut excéder cinq ans.
« Lorsque le souscripteur d'un plan d'épargne retraite décide de changer de
fonds d'épargne retraite, la contre-valeur des actifs représentatifs des droits
et obligations attachés à ce plan est intégralement transférée, sans pénalité,
vers le nouveau fonds d'épargne retraite dans un délai et selon des modalités
fixés par décret. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 6, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer
cet article.
Par amendement n° 54, M. Loridant, Mme Beaudeau, et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa de
l'article 9
bis
, de supprimer les mots : « ou la décision unilatérale
».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. Philippe Marini.
Je retire cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 6 est retiré.
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 54.
M. Paul Loridant.
Cet amendement procède naturellement de notre position de principe relative
aux conditions de mise en place des fonds de pension. Il me paraît inutile de
rappeler ici la priorité que nous souhaitons voir affirmée, celle du choix
librement consenti parce que librement négocié. Nous ne souhaitons pas que
l'employeur ait le dernier mot si les négociations n'aboutissent pas.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à
adopter cet amendement, qui tend à supprimer pour l'employeur la possibilité de
décider unilatéralement, à la fin de la négociation, si un accord n'est pas
conclu.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
M. Loridant est cohérent avec lui-même en présentant cet
amendement ; la commission est cohérente avec elle-même en émettant un avis
défavorable.
M. Emmanuel Hamel.
Que de cohérence !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement, cohérent avec la position qu'il a
adoptée précédemment, s'oppose à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 54, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9
bis.
(L'article 9
bis
est adopté.)
Article 10
M. le président.
« Art. 10. _ Les fonds d'épargne retraite ne peuvent commencer leurs
opérations qu'après avoir obtenu un agrément administratif délivré après avis
de la commission constituée conformément à l'article 17
bis.
« Les dispositions de l'article L. 310-27 du code des assurances s'appliquent
lorsque des opérations visées au premier alinéa de l'article 9 sont pratiquées
sans cet agrément.
« Cet agrément est délivré par arrêté du ministre chargé de l'économie lorsque
les fonds d'épargne retraite sont constitués sous la forme d'une société
anonyme d'assurance ou d'une société d'assurance mutuelle et par arrêté
conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé de la sécurité
sociale lorsqu'ils sont constitués sous la forme d'un organisme mutualiste régi
par le code de la mutualité ou sous la forme d'une institution de
prévoyance.
« La délivrance de l'agrément prend en compte :
« _ les moyens techniques et financiers dont la mise en oeuvre est proposée et
leur adéquation au programme d'activités de l'entreprise d'assurance, de
l'organisme mutualiste ou de l'institution de prévoyance ;
« _ l'honorabilité et la qualification des personnes chargées de diriger
l'entreprise d'assurance, l'organisme mutualiste ou l'institution de prévoyance
;
« _ la répartition du capital et la qualité des actionnaires de la société
anonyme d'assurance ou, pour les sociétés d'assurance mutuelles, les organismes
mutualistes et les institutions de prévoyance, les modalités de constitution du
fonds d'établissement.
« La liste des documents à produire à l'appui d'une demande d'agrément est
fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie. »
Par amendement n° 28, MM. Massion, Autain, et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans le premier alinéa de cet article,
après le mot : « avis », d'insérer le mot : « conforme ».
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Les attributions de la commission de contrôle des fonds d'épargne retraite
doivent être renforcées. L'agrément, qui constitue l'acte essentiel dans la vie
d'un fonds d'épargne retraite, doit être accordé par une autorité totalement
indépendante. En l'occurrence, la commission de contrôle des fonds d'épargne
retraite et la COB sont les seules autorités qui soient à même de remplir
effectivement cette condition d'indépendance. C'est la raison pour laquelle les
pouvoirs des ministres doivent être liés par l'avis que donnera la commission
de contrôle sur toute demande d'agrément d'un fonds d'épargne retraite.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission de contrôle des assurances est une commission
de contrôle et non une commission d'agrément. Si nous transformions ses avis
simples en avis conformes, nous modifierions la nature de cet organisme, ce qui
ne nous paraît pas souhaitable. C'est pourquoi nous émettons un avis
défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable
sur cet amendement. En effet, s'il paraît logique de prévoir un avis de la
commission de contrôle avant l'agrément des fonds, il est inopportun de prévoir
un avis conforme. Celui-ci aboutirait à créer une confusion entre le contrôle
a priori
et le contrôle
a posteriori
des fonds d'épargne
retraite, qui est calqué sur celui qui s'applique, dans de bonnes conditions
aujourd'hui, aux sociétés d'assurances, aux institutions de prévoyance et aux
mutuelles du code de la mutualité.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 43, M. Badré propose de compléter le dernier alinéa de
l'article 10 par les mots : « pour les sociétés d'assurance et les mutuelles et
par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé de
la sécurité sociale pour les institutions de prévoyance ».
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Cet amendement précise que la liste des documents à produire à l'appui d'une
demande d'agrément est fixé par arrêté conjoint du ministre chargé de
l'économie et du ministre chargé de la sécurité sociale. Il entre sans doute un
peu dans le détail, mais ce n'est pas complètement inutile.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement entre effectivement dans le détail. Je me
demande s'il ne va pas un peu au-delà du domaine législatif et s'il ne relève
pas du domaine réglementaire. En tout cas, est-il nécessaire d'aller aussi loin
dans la symétrie des formes ?
Je reconnais toutefois la cohérence du raisonnement de M. Badré. Sous le
bénéfice de ces observations, je crois devoir lui dire que cet amendement ne
paraît pas indispensable et lui rappeler que la commission a émis un avis
défavorable. Il serait sans doute préférable que cet amendement soit retiré.
M. le président.
Monsieur Badré, l'amendement n° 43 est-il maintenu ?
M. Denis Badré.
J'ai cru comprendre, en écoutant M. le rapporteur, qu'il avait l'assurance que
ma préoccupation sera prise en compte. Si le Gouvernement lui a confirmé que
tel sera le cas - et je n'ai aucune raison d'en douter - je retire
l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 43 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - I. -
Non modifié.
« II. - Lorsque le fonds est constitué sous la forme d'une institution de
prévoyance régie par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale,
les articles L. 931-9 à L. 931-33 dudit code lui demeurent applicables.
« Lorsque le fonds est constitué sous la forme d'un organisme mutualiste régi
par le code de la mutualité, les chapitres II à VIII du titre II, le titre III
et le titre IV du livre III du code des assurances, à l'exception des articles
L. 322-26-1 à L. 322-26-2-1 et L. 322-26-5, lui sont applicables en tant qu'ils
visent les sociétés d'assurance mutuelles. L'article L. 125-3 et le dernier
alinéa de l'article L. 126-5 du code de la mutualité lui demeurent
applicables.
« Lorsque le transfert de portefeuille de contrats est réalisé selon les
modalités prévues à l'article L. 324-1 du code des assurances, l'arrêté du
ministre chargé de l'économie autorisant le transfert doit être contresigné par
le ministre chargé de la sécurité sociale lorsque l'entreprise à l'origine ou
bénéficiaire du transfert est une institution de prévoyance régie par le titre
III du livre IX du code de la sécurité sociale ou un organisme mutualiste régi
par le code de la mutualité, sans préjudice pour ce dernier de l'application
des articles L. 126-2 et L. 126-3 du code de la mutualité. » -
(Adopté.)
Article 11
bis
M. le président.
« Art. 11
bis.
- La gestion des actifs des fonds d'épargne retraite
peut être déléguée à des prestataires de services d'investissement, agréés pour
fournir le service visé au
d
de l'article 4 de la loi n° 96-597 du 2
juillet 1996 de modernisation des activités financières.
« Le fonds d'épargne procède au moins tous les cinq ans au réexamen du choix
du prestataire de services d'investissement. »
Par amendement n° 7, M. Marini, au nom de la commission, propose :
I. - Dans le premier alinéa de cet article de remplacer les mots : « peut être
» par le mot : « est ».
II. - Après le premier alinéa de cet article, d'insérer un alinéa ainsi rédigé
:
« Le non-respect des dispositions de l'alinéa précédent est passible des
sanctions prévues aux articles 82 à 88 de la même loi. Sans préjudice de ces
sanctions, la commission prévue à l'article 17
bis
de la présente loi
peut retirer l'agrément délivré au fonds. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Les questions que nous traitons par cet amendement sont de
diverses natures.
D'abord, est-il normal et légitime qu'un épargnant qui confie son argent à un
gestionnaire, par exemple en investissant dans un fonds commun de placement ou
dans une SICAV, bénéficie de la protection de la Commission des opérations de
bourse alors qu'un autre épargnant, salarié d'une entreprise et qui confie son
argent à un fonds de pension, n'en bénéficie pas ? C'est la première question
que nous nous posons et que nous soumettons au Sénat.
Notre industrie financière a-t-elle intérêt à la consécration d'un monopole de
droit au profit des assureurs et des banquiers ? C'est la seconde question que
nous nous posons.
M. Emmanuel Hamel.
Elle est excellente !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Sans vouloir être trop long, je voudrais revenir sur quelques
points de principe, là encore pour éclairer le débat aussi objectivement que
possible.
En l'occurrence, nous traitons du problème de la délégation de la gestion à
des gestionnaires ou gérants de portefeuilles pour compte de tiers. Cela
répond, dans les pays où la règle de l'obligation de délégation de gestion
existe, à un double objectif.
Il s'agit d'abord d'un objectif prudentiel, avec la délimitation d'un champ de
compétences pour la Commission des opérations de bourse. A ce propos, je relève
que, tant en Grande-Bretagne qu'aux Etas-Unis, les homologues de la Commission
des opérations de bourse interviennent pour garantir la qualité et la fiabilité
de l'information donnée aux souscripteurs.
En l'état actuel du texte de la proposition de loi, le contrôle exercé au nom
de l'Etat serait assurément un contrôle de qualité, celui de la commission de
contrôle des assurances, améliorée par l'adjonction d'autres personnes
spécialistes en matière de prévoyance sociale et de mutuelle, mais ce ne serait
pas le contrôle de la Commission des opérations de bourse, au profit de
laquelle nous avons créé, par la loi du 2 juillet 1996, un bloc de compétences
sur les affaires de la gestion.
Je me permets de rappeler au Sénat que l'état dans lequel nous trouvons le
texte encore cet après-midi me gêne beaucoup. En effet, avoir revalorisé le
statut de la Commission des opérations de bourse, avoir rapproché cette
commission du Parlement en prévoyant au sein de son collège des membres
désignés par les présidents des assemblées parlementaires, avoir constitué ce
bloc de compétences sur les affaires de la gestion et considérer que cela
s'applique à tous les compartiments de l'épargne, sauf à l'épargne à long terme
et à très long terme, me paraît manquer de rationalité...
M. Emmanuel Hamel.
De logique !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
...de logique, en effet, et de cohérence.
Le second objectif, et je vais aussi m'en expliquer, c'est celui de stratégie
industrielle. Faut-il consacrer ce monopole de droit au profit des assureurs et
des banquiers ? Voyons ce qui se passe à l'extérieur, sur les marchés
d'outre-Atlantique et d'outre-Manche où existent des fonds de pension. La
plupart des professionnels de ces pays nous expliquent que la France en est
aujourd'hui à un stade d'évolution qu'ils ont connu dans leur pays voilà vingt
ou trente ans, avant des réformes structurelles significatives.
Certains d'entre vous me diront peut-être que les fonds d'épargne retraite
relèvent du domaine de l'assurance, lequel est régi par des modalités
d'organisation et des règles de gestion spécifiques. Ils auront, certes,
raison. Il ne faut en effet pas confondre l'assurance et les OPCVM, les SICAV
ou les fonds communs de placement.
En ce qui concerne les OPCVM, la société gère des capitaux qui ne lui
appartiennent pas, et les résultats dépendront uniquement de la performance de
la gestion.
En matière d'assurance, les capitaux appartiennent à l'assureur, qui les gère
en fonction de ses engagements, lesquels peuvent être très élevés. Nous en
avons discuté lors du débat sur les prestations définies, les taux garantis,
etc.
Nous avons en effet deux systèmes juridiques différents.
Mais en matière de fonds de pension - je vais encore me répéter - nous
espérons bien que nous ferons autre chose que de l'assurance vie à quarante
ans. M. Arthuis disait d'ailleurs lui-même qu'il faut parvenir à financer autre
chose que les déficits publics.
M. Jean Chérioux.
C'est évident !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Or, la forme la plus achevée des fonds de pensions est non
pas celle dans laquelle il y a globalisation de tous les versements et de tous
les engagements, mais au contraire, me semble-t-il, celle où il y a
segmentation, compartimentage des versements et des engagements en fonction de
l'arrivée probable à l'âge de la retraite des différentes classes de
salariés.
Je n'entrerai pas dans le détail technique, mais on voit bien que, si l'on
gère dans l'esprit habituel des assureurs, on conservera les mêmes proportions
de l'actif investi dans les différentes catégories des valeurs pendant toute la
durée de vie du fonds. Par conséquent, on gardera un socle important de valeurs
obligataires et de valeurs de nature monétaires.
Si l'on procède différemment, avec ce que l'on appelle l'effet de noria,
l'investissement pourra être fait majoritairement en actions pendant la
première période de vie du fonds, puis essentiellement en produits liquides en
fin de vie, lorsque les rentes devront être liquidées au bénéfice des ayants
droits.
Dès lors, il n'y a pas de raison, semble-t-il, qu'un même métier ne soit pas
exercé selon les mêmes règles et sous le contrôle de la même autorité. Il n'y a
pas de raison qu'un épargnant qui confie son argent à un gestionnaire pour
compte de tiers bénéficie du contrôle de la Commission des opérations de bourse
et que celui qui confie son argent à un fonds d'épargne retraite n'en profite
pas.
Voyons enfin ce qui se passe dans nos grands groupes d'assurance. A cet égard,
je relisais par hasard, dans une publication financière - il s'agit du journal
MTF-l'Agefi
du 4 janvier dernier - un entretien récent de l'un des
directeurs généraux d'AXA, M. Gérard de la Martinière : « Si je prends le cas
du groupe AXA, notre organisation interne sépare déjà la gestion d'actifs et la
gestion des passifs. Nous avons donc bien à la fois une offre d'accueil
bilantiel au niveau des passifs et une offre de gestion financière au niveau
des actifs, ces deux offres pouvant être combinées ou séparées. »
Ce n'est pas autre chose que ce que nous disions ici-même en décembre dernier,
lors de la première lecture de ce texte, à savoir que la technique
assurantielle, c'est la gestion des passifs et l'adossement des actifs et des
passifs, et que tout cela est contrôlé par la commission de contrôle des
assurances, améliorée, et que la gestion des actifs, qui a vocation à être
faite par des équipes distinctes, doit être contrôlée par la Commission des
opérations de bourse.
S'il n'y a pas séparation juridique de l'un et de l'autre, on ne voit pas où
faire passer la ligne de partage...
M. Michel Caldaguès.
La « muraille de Chine » !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
... entre les compétences de la commission de contrôle des
assurances et celles de la Commission des opérations de bourse.
M. Jean Chérioux.
Tout à fait !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Certes, on peut dire que tout cela peut heurter des habitudes
et que tous les segments de l'industrie financière ne sont pas forcément prêts
à accueillir ce langage.
M. Jean Chérioux.
Une fois de plus !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Mais il y a eu concertation de place. Je tiens à souligner la
conclusion de cette dernière, qui figure à la page 108 du rapport du groupe de
travail de Paris Euro-place, présidé par l'excellent Gérard de la Martinière :
« Pour les membres de la commission, l'élément majeur est que les fonds
d'épargne retraite, comme d'ailleurs l'ensemble des organismes de retraite ou
de gestion des comptes sociaux, délèguent leur gestion et ceci uniquement
auprès d'organismes soumis au "bloc de compétence" institué au profit
de la COB. Seul ce type de mesure est de nature à garantir les meilleurs
contrôles et la sécurité dans la gestion des fonds. »
Pardonnez-moi la longueur de cette explication, mais c'est, à mon avis, un
point intéressant du débat.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des finances soumet à
nouveau au Sénat cet amendement n° 7, qui ne fait que reprendre un amendement
que nous avions voté de manière identique en première lecture.
Nous savons bien que nous sommes actuellement en deuxième lecture, que
certains points de divergence peuvent légitimement exister entre nos approches
et que la commission mixte paritaire se réunira la semaine prochaine. Nous
verrons alors, à ce stade, comment nos approches s'ordonnent les unes par
rapport aux autres. Mais il serait à mon avis dommage que le Sénat, s'il
partage la vision et la conviction que je viens d'exprimer ne concrétise pas
cette position par un vote qui constituerait un élément important pour nos
discussions au sein de la commission mixte paritaire.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Nous reprenons là un débat que nous avons déjà eu en
première lecture.
Le Gouvernement émet un certain nombre de réserves sur la solution présentée
par cet amendement, qui a d'ailleurs été rejetée par l'Assemblée nationale.
Mais le débat est tout à fait légitime, et je reconnais très volontiers la
pertinence d'un grand nombre d'arguments avancés par M. le rapporteur.
Cet amendement vise à rétablir l'obligation de délégation de gestion des
actifs des fonds d'épargne retraite. Or, le Gouvernement considère que cette
obligation soulève des difficultés pour deux raisons principales.
En premier lieu, elle néglige les contraintes spécifiques d'adossement
actifs-passifs propres à des organismes d'assurance.
La cohérence de la proposition de loi réside dans le choix d'un support
technique et juridique qui est celui du code des assurances, comme M. le
rapporteur l'a reconnu. Pour nous, ce choix doit conduire en logique et pour
des raisons de sécurité à éviter de séparer systématiquement la gestion du
passif du fonds de celle de ses actifs. Ce sont les engagements pris par le
fonds - ils figurent à son passif - qui commandent les règles de gestion des
actifs, et non l'inverse.
En second lieu, cette obligation ajoute un élément de complexité et de coût au
dispositif, élément qui ne paraît pas justifié par un gain en termes de
sécurité dans la gestion des fonds d'épargne retraite.
Le contrôle des fonds d'épargne retraite doit d'abord être celui de la bonne
adéquation entre passifs et actifs du fonds, c'est-à-dire le contrôle du
respect des règles prudentielles. Or, qui mieux que les organismes spécialisés
en la matière, c'est-à-dire les commissions de contrôle des assurances et des
institutions de prévoyance ou des mutuelles, peuvent assurer efficacement ce
contrôle ?
Pour ces raisons, il nous semble préférable de substituer une faculté de
délégation à cette obligation. En fonction de leurs objectifs de gestion et de
la nature des contrats retenus, les fonds ou les souscripteurs d'épargne
retraite peuvent souhaiter déléguer tout ou partie de la gestion de leurs
actifs ou ne pas le faire.
Par conséquent, ne figeons pas aujourd'hui le mode d'organisation des fonds
d'épargne retraite. Laissons ces fonds, qui sont des investisseurs
professionnels, libres de choisir leur mode d'organisation en matière de
gestion d'actifs.
C'est pourquoi le Gouvernement reste défavorable à cette obligation.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11
bis
, ainsi modifié.
(L'article 11
bis
est adopté.)
Article 11
ter
M. le président.
« Art. 11
ter.
- Les dirigeants d'un fonds d'épargne retraite sont
tenus de faire prévaloir l'intérêt des adhérents aux plans d'épargne retraite
dont ce fonds couvre les engagements.
« Lorsque la gestion des actifs des fonds d'épargne retraite a été déléguée à
des prestataires de services d'investissement agréés pour fournir le service
visé au d de l'article 4 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 précitée, ces
prestataires exercent librement, dans le seul intérêt du fonds d'épargne
retraite, les droits de vote attachés aux titres, donnant directement ou
indirectement accès au capital de sociétés, détenus par eux pour le compte du
fonds. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 8 rectifié, M. Marini, au nom de la commission, propose de
rédiger ainsi cet article :
« I. - Les organismes visés à l'article précédent sont tenus d'exercer
effectivement, dans le seul intérêt des adhérents du fonds d'épargne retraite,
les droits de vote attachés aux titres, donnant directement ou indirectement
accès au capital de sociétés, détenus par eux pour le compte du fonds.
« Le non-respect de l'obligation posée à l'alinéa précédent est sanctionnée
par la Commission des opérations de bourse dans les conditions prévues par
l'ordonnance n° 67-833 du 28 juillet 1967 instituant une commission des
opérations de bourse et relative à l'information des porteurs de valeurs
mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse.
« Un décret fixe les conditions d'application du présent paragraphe et,
notamment, les conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux dispositions
du premier alinéa dans le cas où l'exercice effectif des droits de vote
entraînerait des coûts disproportionnés.
« II. - Les actionnaires d'un fonds d'épargne retraite doivent s'abstenir de
toute initiative qui aurait pour objet ou pour effet de privilégier leurs
intérêts propres au détriment des adhérents du fonds.
« Les dirigeants d'un fonds d'épargne retraite doivent, dans l'exercice de
leur activité, conserver leur autonomie de gestion afin de faire prévaloir,
dans tous les cas, l'intérêt des adhérents des plans d'épargne retraite dont ce
fonds couvre les engagements. »
Par amendement n° 29, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le premier alinéa de
l'article 11
ter
, un alinéa rédigé comme suit :
« Les fonds d'épargne retraite relevant de la présente loi doivent
obligatoirement appliquer à l'ensemble des plans qu'ils gèrent les principes de
prudence et d'équité entre les générations d'assurés, notamment dans
l'attribution des participations aux bénéfices ou aux excédents techniques et
financiers. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 8 rectifié.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement n° 8 rectifié est très significatif, car il
concerne les obligations déontologiques des gérants de l'épargne retraite. Il
tend à rétablir une disposition déjà adoptée par le Sénat lors de la première
lecture, obligeant en particulier les gérants des fonds d'épargne retraite à
exercer effectivement, dans le seul intérêt du fonds d'épargne retraite, les
droits de vote attachés au titre.
Concrètement, nous voulons dire que les gérants des fonds d'épargne retraite
ne doivent poursuivre qu'un seul intérêt, celui des souscripteurs, s'exprimer
en assemblée générale des sociétés cotées dont les fonds détiennent des
valeurs, expliciter les positions prises pour éviter toute espèce de
contradiction ou conflit d'intérêt entre les actionnaires des fonds d'épargne
retraite et les gérants qui agissent pour leur compte.
Ces actionnaires devant être, dans bien des cas, des compagnies d'assurances,
des groupes d'investisseurs institutionnels, il ne faudrait pas que leurs
intérêts propres viennent à prendre le pas sur les intérêts des
souscripteurs.
Compte tenu du système de gestion déléguée dans lequel nous nous situons à
nouveau, il est important que la « muraille de Chine » soit bien présente et
que l'on s'assure de la transparence la plus grande de tout le dispositif.
C'est donc bien dans cet esprit que ces dispositions sont proposées.
Nous reprenons par ailleurs, au paragraphe II, des dispositions figurant de
façon analogue dans la loi de modernisation des activités financières.
Nous prévoyons ici, en particulier, que les actionnaires du fonds d'épargne
retraite, donc, dans bien des cas, les assureurs, devront s'abstenir de toute
initiative qui aurait pour objet ou pour effet de privilégier leurs intérêts
propres au détriment de ceux des adhérents du fonds et que, à l'inverse, les
dirigeants du fonds devront veiller à bien préserver leur autonomie de gestion
pour être les garants des seuls intérêts des adhérents.
M. Michel Caldaguès.
Très bien !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Au demeurant, ces dispositions, comme celles de la loi de
modernisation des activités financières, devraient pouvoir faire l'objet
d'actions civiles au cas où elles ne seraient pas respectées, compte tenu du
fait que les contrevenants engageraient leur responsabilité, notamment
civile.
Tel est l'esprit dans lequel cet amendement n° 8 rectifié vous est proposé,
mes chers collègues.
M. le président.
La parole est à M. Massion, pour défendre l'amendement n° 29.
M. Marc Massion.
Certaines sociétés d'assurance françaises ont pris l'habitude, pour des
raisons purement commerciales, de majorer artificiellement les résultats des
contrats qu'elles commercialisent au détriment des contrats plus anciens. Afin
d'interdire de telles pratiques, s'agissant d'engagements de longue durée, il
est nécessaire de poser le double principe de prudence et d'équité entre les
générations d'assurés. Il appartiendra ensuite aux assurés de comparer les
résultats des différents plans qui seront proposés et, si nécessaire, de faire
valoir leurs droits auprès des autorités compétentes.
Ce principe d'équité entre les générations d'assurés est affirmé dans le droit
d'autres Etats de l'Union européenne, notamment pour les assureurs vie
allemands.
Cet amendement, que nous avions déjà présenté en première lecture, avait alors
suscité, me semble-t-il, quelque intérêt ; peut-être, avec le temps,
suscitera-t-il plus que de l'intérêt !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 29 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La notion d'équité actuarielle, que nous pouvons comprendre
dans son principe, n'est malheureusement pas définie en termes juridiques. Elle
est, à mon sens, trop imprécise pour être appliquée telle quelle et pour
figurer, comme le propose M. Massion, dans un texte de loi.
C'et pourquoi, tout en comprenant le souci de notre collègue, la commission ne
peut émettre qu'un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 8 rectifié et 29 ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement avait un certain nombre d'objections à
l'encontre de l'amendement n° 8 rectifié ; mais, compte tenu du vote intervenu
sur l'amendement précédent que, dans sa sagesse, le Sénat a adopté, malgré
l'avis défavorable du Gouvernement, je m'en remets finalement à la sagesse du
Sénat.
Par ailleurs, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 29,
qui ne lui semble pas nécessaire : l'épargne retraite sera gérée par des fonds
d'épargne retraite qui sont des structures dédiées. Tous les adhérents auront
un horizon d'investissement similaire, la période de la retraite, et non cinq à
huit ans pour certains et trente à quarante ans pour d'autres. Dans ces
conditions, il n'y aura pas de conflit de générations dans la gestion de
l'épargne retraite.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié, pour lequel le Gouvernement s'en
remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11
ter
est ainsi rédigé et l'amendement n° 29
n'a plus d'objet.
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - Dès la mise en place d'un plan d'épargne retraite, le
souscripteur est tenu de mettre en place un comité de surveillance.
« Ce comité est composé, au moins pour moitié, de représentants élus des
adhérents du plan. Il peut comprendre des personnalités n'adhérant pas au plan,
compétentes en matière de protection sociale ou de gestion financière et
n'ayant aucun lien de subordination ou d'intérêt avec le fonds. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 30, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de rédiger ainsi cet article :
« Les adhérents d'un plan d'épargne retraite ou leurs représentants sont
associés, dans des conditions fixées par le plan, à la gestion de celui-ci. A
cet effet, il est créé, pour chaque plan, un comité de surveillance qui, chaque
année, décide de la fixation des paramètres d'évolution du plan et de
l'affectation des excédents ou bénéfices techniques et financiers.
« Le comité émet, au moins tous les trois ans, un avis sur les modalités de
couverture des engagements du plan, la qualité de la gestion administrative du
fonds et l'exercice du droit individuel de transfert prévu à l'article 8 de la
présente loi. Il émet également un avis préalablement à toute décision de
changement de fonds exercée dans les conditions de l'article 9
bis
.
« Les décisions et avis du comité de surveillance sont, dans le délai maximum
d'un mois, adressés par le fonds à chacun des adhérents et bénéficiaires du
plan.
« La Commission des opérations de bourse est habilitée à prendre un règlement
relatif à l'information des comités de surveillance. Ce règlement est pris
conformément aux dispositions de l'article 4-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28
septembre 1967 instituant une commission des opérations de bourse. »
Par amendement n° 55, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le second alinéa de l'article
14, de remplacer les mots : « au moins pour moitié » par les mots : « à 80 %
».
Par amendement n° 56, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le second alinéa de l'article
14, de remplacer les mots : « au moins pour moitié » par les mots : « en
majorité ».
Par amendement n° 57, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 14 par un
alinéa ainsi rédigé :
« Un représentant des adhérents du plan exerce de plein droit les fonctions de
président du comité de surveillance. »
La parole est à M. Massion, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Marc Massion.
Les comités de surveillance que vous proposez sont en réalité des comités
fantômes : ils émettent de vagues avis sans même avoir la possibilité d'être
informés correctement sur la gestion technique et financière du plan ou de
s'adjoindre les services de tel ou tel expert indépendant.
Une comparaison avec les plans d'épargne d'entreprise ou les fonds communs de
placement d'entreprise le montre, vous êtes, en la matière, très en retrait
!
Nous vous proposons donc de préciser les attributions des comités de
surveillance, afin qu'ils puissent effectivement exercer leur rôle. Plutôt que
de renvoyer à un décret, dont le contenu sera soumis à des influences diverses,
nous vous proposons de confier à la Commission des opérations de bourse le soin
de préciser le contenu des informations qui devront être fournies aux comités
de surveillance.
La COB a, en la matière, fait faire des progrès très importants aux
établissements financiers. Elle constitue l'instance appropriée pour obliger
les assureurs à se mettre à niveau. Ceux-ci doivent être capables de présenter
clairement et de manière accessible leurs opérations en matière d'épargne
retraite.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour défendre les amendements n°s 55, 56 et
57.
M. Paul Loridant.
Avec l'amendement n° 55, nous proposons d'assurer une représentation des
salariés au comité de surveillance du plan d'au moins 80 %.
L'article 14 prévoit la mise en place d'un comité de surveillance pour chaque
plan d'épargne retraite. Il s'agit d'assurer le contrôle des affiliations sur
ces plans d'épargne retraite.
Nous considérons que, si un tel article est nécessaire, la proposition faite
par l'Assemblée nationale est, en revanche, très nettement insuffisante pour
assurer un contrôle réel des salariés sur la gestion des fonds de pension.
Pour cela, il faut, selon nous, que le comité de surveillance soit composé
d'une très grande majorité de salariés, à savoir 80 %. Ainsi, la présence de
personnalités extérieures compétentes en matière de gestion financière serait
possible sans que le contrôle des salariés risque d'être remis en cause.
L'amendement n° 56 est - vous l'avez compris, mes chers collègues - un
amendement de repli.
Nous proposons que la représentation des salariés au sein du comité de
surveillance du plan d'épargne retraite soit composée en majorité de
représentants élus des adhérents du plan.
En effet, dans le texte original, tel qu'il est rédigé, si le nombre des
membres du comité est pair, rien ne garantit une représentation majoritaire des
salariés. Notre amendement vise donc à résoudre ce problème et à assurer à ces
derniers, dans tous les cas, une représentation majoritaire.
J'ajoute, mes chers collègues, qu'il nous semblerait choquant que ceux à qui
ces fonds appartiennent, c'est-à-dire les salariés futurs retraités, ne soient
pas majoritaires au sein du comité de surveillance.
Adopter cet amendement ne constituerait pas, me semble-t-il, une grande
révolution pour la Haute Assemblée : cette disposition, s'inscrit dans la
démarche qui sous-tend cette proposition de loi.
Enfin, l'amendement n° 57 complète les deux amendements précédents.
Nous avons ainsi proposé que, dans tous les cas, les comités de surveillance
des plans d'épargne retraite soient composés en majorité de représentants élus
des salariés.
Dans le droit fil de cette proposition, nous souhaitons que la fonction de
président du comité de surveillance soit obligatoirement assurée par un
représentant des adhérents du plan.
Si, pour une part, il s'agit d'un amendement de cohérence avec nos autres
amendements sur l'article 14, puisqu'il permettrait de prendre acte de la
représentation majoritaire des salariés dans le comité, notre amendement peut,
par lui-même, apporter un complément utile au texte actuel.
En effet, si le comité est composé à parité de personnalités compétentes et de
représentants des adhérents du plan d'épargne retraite, réserver à l'un d'entre
eux le poste de président leur assurerait une majorité de fait au sein du
comité de surveillance, chargé de veiller à la bonne utilisation de leur fonds.
Les représentants des salariés futurs retraités auraient bien ainsi le dernier
mot en cas de partage des voix au sein du comité de surveillance.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 30, 55, 56 et 57 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
S'agissant de l'amendement n° 30, je rappelle que le comité
de surveillance a pour mission de surveiller, tout comme la commission de
contrôle a pour mission de contrôler. Surveiller n'est pas gérer, et il n'est,
à l'évidence, pas justifié d'autoriser un comité de surveillance à décider de
l'affectation d'une société ne lui appartenant pas.
La commission est donc défavorable à cet amendement n° 30.
Pour ce qui est des amendements n°s 55, 56 et 57, ma réponse sera commune : le
texte qui nous est soumis offre aux salariés la garantie qu'ils disposeront au
moins de la moitié des sièges au comité de surveillance. Mais il réserve aussi
un espace à la liberté contractuelle et il appartient aux partenaires de se
rapprocher : si, d'un commun accord, ils souhaitent que les salariés aient la
majorité des sièges au sein du comité de surveillance ou que la présidence
dudit comité soit exercée par l'un des représentants des salariés, c'est leur
affaire ! C'est donc un sujet qui doit pouvoir être traité par la négociation
et par un accord collectif aux différents niveaux que nous avons déjà
évoqués.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission est défavorable aux amendements
n°s 55, 56 et 57.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces quatre amendements ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à ces quatre
amendements.
L'amendement n° 30 est en contradiction et partiellement redondant avec
l'article 15, qui encadre déjà le fonctionnement et les attributions du comité
de surveillance et que les deux chambres du Parlement ont déjà adopté dans les
mêmes termes, dans une rédaction sur laquelle il ne nous paraît pas utile de
revenir.
S'agissant des amendements n°s 55, 56 et 57, je partage l'analyse faite par M.
le rapporteur. En réalité, dans sa rédaction actuelle, l'article 14 donne aux
salariés la garantie qu'ils seront représentés au moins pour moitié dans les
comités de surveillance, et éventuellement pour plus, et qu'ils seront le
groupe le mieux représenté puisque ces comités pourront comporter également des
personnalités qualifiées.
Il ne paraît donc pas souhaitable, sauf à déséquilibrer la composition du
comité de surveillance, de prévoir systématiquement et obligatoirement une
représentation supérieure.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 55.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Mon explication de vote sera commune aux trois amendements n°s 55, 56 et
57.
Je voudrais exprimer mon étonnement face aux observations de M. le rapporteur
et de M. le ministre. J'avoue ne pas comprendre : en dépit de notre position de
principe sur ce texte consacré aux fonds de pension, ces amendements me
paraissaient aller dans le sens que vous souhaitez, monsieur le rapporteur,
monsieur le ministre.
Les fonds d'épargne retraite visent à assurer aux futurs retraités un
troisième étage de protection et un complément de ressources. Ces fonds
appartiennent donc bien aux futurs retraités : il n'est pas exagéré, dans ces
conditions, d'inscrire dans la loi que les futurs retraités propriétaires de
ces fonds seront majoritaires et auront leur mot à dire, non pas dans la
gestion du fonds, mais au sein du comité de surveillance, comme vient de le
souligner M. le rapporteur.
Nous donnons ainsi aux salariés les moyens de se prémunir contre d'éventuelles
affaires Maxwell, que nous avons tous présentes à l'esprit lorsque nous
évoquons de tels sujets.
Ces amendements vont aussi dans le sens de la responsabilisation des salariés,
qui seraient ainsi amenés à suivre leurs fonds de pension pour se prémunir
contre les risques.
Lorsque nous vous proposons que les salariés soient majoritaires, vous nous
répondez que cela déséquilibrerait le comité de surveillance. Mais cela ne
déséquilibre rien du tout, puisque l'on n'intervient pas dans la gestion !
Votre réaction démontre bien, en tout cas, que ces fonds de pension ont pour
finalité le financement des fonds propres des entreprises, l'apport de
nouvelles ressources aux marchés financiers. Quand il s'agit de donner de
vraies garanties aux salariés, en revanche, le Gouvernement et la majorité
émettent un avis défavorable. C'est regrettable !
M. Michel Caldaguès.
Allons, allons !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 56, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 57, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - Un tiers au moins des membres du comité de surveillance peut
interroger les dirigeants du fonds d'épargne retraite sur une ou plusieurs
opérations relatives à la gestion du plan d'épargne retraite.
« A défaut de réponse sous trente jours, ou si la réponse ne satisfait pas les
membres du comité de surveillance visés au premier alinéa, ces derniers peuvent
demander en justice la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de
présenter un rapport sur la ou les opérations de gestion concernées.
« Le ministère public est habilité à agir aux mêmes fins.
« S'il est fait droit à la demande, la décision de justice détermine l'étendue
de la mission et des pouvoirs des experts. Elle peut mettre les honoraires à la
charge du fonds.
« Le rapport est adressé au comité de surveillance, au ministère public, au
commissaire aux comptes du fonds qui gère le plan d'épargne retraite, aux
organes de direction dudit fonds ainsi qu'au président de la commission
constituée conformément à l'article 17
bis.
Ce rapport doit en outre
être annexé à celui établi par le commissaire aux comptes en vue de la
prochaine assemblée générale du fonds.
« Un décret fixe les conditions d'application du présent article. »
Par amendement n° 58, M. Loridant, Mme Beaudeau, les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le début du
premier alinéa de cet article :
« Un quart au moins des membres du comité de surveillance ou son président
peuvent interroger... »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
L'amendement n° 58 tend à ce qu'un quart au moins des membres du comité de
surveillance puissent interroger directement les dirigeants du fonds d'épargne
retraite sur une ou plusieurs opérations relatives à la gestion du plan
d'épargne retraite, à instaurer un droit d'interpellation, en quelque sorte, au
profit d'une minorité au sein du comité de surveillance.
Notre amendement vise, en fait, à accorder des garanties supplémentaires aux
adhérents du plan. En effet, l'article 14 de la présente proposition de loi
prévoit que le comité de surveillance sera composé au moins pour moitié de
représentants des adhérents. Fixer à un tiers le nombre de membres nécessaires
pour interroger les dirigeants du fonds d'épargne me paraît un seuil trop
élevé. Cela signifierait, dans le cas où les représentants élus ne
représenteraient que la moitié des membres du comité, qu'il faudrait que la
demande émane des deux tiers d'entre eux.
Nous pensons que la majorité des représentants élus des salariés doivent
pouvoir, s'ils en font seuls la demande, interroger les dirigeants du plan
d'épargne sur la gestion des fonds qu'ils lui ont confiés. Or, la majorité de
la moitié, cela fait bien un quart des membres au moins.
Tel est le sens de notre amendement, que nous présentons, encore une fois,
dans le même esprit : il s'agit de donner la possibilité aux salariés
d'interpeller les dirigeants sur la bonne gestion du fonds et de justifier
leurs opérations. Je ne vois rien là qui ne soit dans l'esprit du libéralisme
le plus pur !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
En me réjouissant de voir que M. Loridant se positionne par
rapport à des idées qui ne sont pas toujours les siennes sur cet amendement n°
58, je ne crois pas qu'il soit raisonnable de l'accepter. La commission y est
donc défavorable, car elle considère que cette disposition risquerait de
conduire à une multiplication des contentieux.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la
commission.
En la matière, le libéralisme de M. Loridant m'effraie.
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 31, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparenté proposent, au premier alinéa de l'article 16, de
remplacer les mots : « sur une ou plusieurs opérations relatives à la gestion
du plan d'épargne retraite » par les mots : « sur la couverture par le fonds de
ses engagements, la politique suivie par celui-ci en ce qui concerne
l'attribution des participations aux excédents ou aux bénéfices et sur
l'adéquation de sa politique de placements aux engagements qu'il prend ».
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Par cet amendement, nous souhaitons préciser le champ des opérations qui
peuvent donner lieu à la désignation d'un expert en justice.
Dans le projet, on a souhaité ouvrir aux conseils de surveillance le droit de
demander à l'autorité judiciaire d'ordonner une expertise de minorité. On me
permettra de trouver cette proposition plutôt curieuse alors que les conseils
de surveillance ne disposent d'aucun pouvoir véritable pour participer
effectivement à la gestion des plans d'épargne retraite. Plutôt que de leur
donner le pouvoir d'agir lorsque les choses iront mal - pour beaucoup de plans,
elles iront nécessairement mal ! - il aurait été préférable de les doter de
véritables pouvoirs de gestion au quotidien.
L'article 16 semble mal rédigé, car on ne sait pas dans quels cas l'expertise
de minorité pourra s'exercer : ou bien cet article restera lettre morte parce
que son objet est trop général ; ou bien, au contraire, les conseils de
surveillance saisiront le juge du moindre problème.
C'est pourquoi nous proposons de limiter les possibilités de saisine du juge
aux trois cas suivants : l'examen de la couverture, par le fonds, de ses
engagements, c'est-à-dire de sa solvabilité ; les conditions dans lesquelles
sont attribuées les participations aux bénéfices afin que les assurés ne soient
pas lésés par rapport aux actionnaires du fonds - je ne doute pas que M. le
rapporteur, qui semble très attaché à cet équilibre des pouvoirs au travers de
l'article 11
ter
, soutienne ma proposition ; enfin, l'adéquation entre
les politiques de placements menées et la nature des engagements pris par le
fonds.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je fais miens les objectifs visés par M. Massion, dont
l'amendement est intéressant. Cela étant, je me demande si ses préoccupations
ne sont pas satisfaites par le texte tel qu'il nous vient de l'Assemblée
nationale.
Par ailleurs, ne revient-il pas au pouvoir réglementaire de préciser le
dispositif tendant à permettre de bien définir le champ des opérations qui
pourraient être examinées par un expert judiciaire ?
Au demeurant, si nous avons utilisé la procédure de l'expertise de minorité,
qui est définie par la loi sur les sociétés commerciales, alors que nous ne
sommes pas, ici, véritablement dans le droit commun des sociétés commerciales,
c'est parce qu'elle existait, qu'elle était une référence commode, qu'elle
correspondait à une jurisprudence bien précise et qu'elle offrait, semble-t-il,
de nombreuses garanties.
Sous le bénéfice de ces observations, j'aimerais connaître l'avis du
Gouvernement sur les préoccupations exprimées par M. Massion.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
L'objet de cet amendement est d'éviter la
multiplication des recours en justice, ce qui est parfaitement justifié.
Sur ce point, comme l'a laissé entendre M. le rapporteur, l'Assemblée
nationale a, en fait, amélioré la rédaction initiale du projet puisqu'elle a
ajouté, en quelque sorte, un filtre préalable à la demande en justice, en
permettant au comité de surveillance d'obtenir la désignation d'un expert
chargé de présenter un rapport sur les opérations mises en cause. C'est l'objet
du deuxième alinéa de l'article 16.
Cette disposition nous paraît suffisante pour éviter la multiplication des
actions en justice, d'autant que, comme l'a également souligné M. le
rapporteur, il est tout à fait possible de compléter et de préciser le rôle de
cette expertise dans le cadre du pouvoir réglementaire.
D'ailleurs, le dernier alinéa de l'article 16 prévoit qu'un décret fixe les
conditions d'application du présent article. Les garde-fous que M. Massion
propose de mettre en place, et auxquels nous sommes tout à fait favorables,
pourraient trouver leur place dans ce décret.
Sous le bénéfice de cette observation et de cette suggestion, peut-être M.
Massion pourrait-il retirer l'amendement.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Massion ?
M. Marc Massion.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 31 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
bis
M. le président.
« Art. 17
bis.
- Le contrôle de l'État sur les fonds d'épargne retraite
s'exerce dans l'intérêt des salariés adhérant à un plan d'épargne retraite et
de leurs ayants droit au titre de la présente loi. A cette fin, la Commission
de contrôle des assurances et la commission de contrôle mentionnée à l'article
L. 951-1 du code de la sécurité sociale se réunissent et siègent en formation
commune.
« La présidence de la réunion des deux commissions instaurée à l'alinéa
précédent est assurée alternativement et pendant deux ans et demi par le
président de la Commission de contrôle des assurances puis par le président de
la commission de contrôle visée à l'article L. 951-1 du code de la sécurité
sociale.
« La commission ainsi constituée veille au respect, par les fonds d'épargne
retraite, des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont
applicables. Elle s'assure que ces fonds tiennent les engagements qu'ils ont
contractés à l'égard des salariés, des anciens salariés, des bénéficiaires et
de leurs ayants droit au titre de la présente loi.
« Le contrôle de l'État sur les fonds d'épargne retraite s'exerce conformément
aux dispositions des articles L. 310-8, L. 310-9, L. 310-11, L. 310-12-1
(huitième, dixième et onzième alinéas) et L. 310-13 à L. 310-28 du code des
assurances. »
Par amendement n° 33, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter
in fine
le troisième
alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée : Elle s'assure également
qu'il n'est pas tenu compte des participations qu'une société, mutuelle ou
institution de prévoyance détient dans le capital social d'un fonds d'épargne
retraite dans les éléments représentatifs de la marge de solvabilité ou des
provisions techniques constituées par la société, mutuelle ou institution
actionnaire du fonds. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Les fonds d'épargne retraite vont rapidement être confrontés à de redoutables
problèmes de solvabilité. En effet, la législation française ne traite pas en
effet, aujourd'hui, du double emploi des fonds propres entre une société mère
et sa filiale. Ce problème est bien connu des filiales d'assurance des
établissements bancaires.
En l'espèce, on prévoit la création d'une nouvelle catégorie d'organismes
assureurs sans traiter de cette question fondamentale du double emploi des
fonds propres.
Une fois de plus, force est de constater que ce projet n'a pas fait l'objet
d'une réflexion véritablement sérieuse et approfondie.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Là encore, l'amendement soulève un vrai problème. Il s'agit
en effet d'éviter de comptabiliser deux fois les mêmes fonds propres.
Mais ce problème, qui est bien connu, fait actuellement l'objet d'un examen
par la Commission de l'Union européenne dans le cadre d'un projet de directive
sur les conglomérats financiers.
Notre collègue Denis Badré, spécialiste de ces sujets d'ordre communautaire,
aura certainement à émettre, un jour ou l'autre, un avis lorsque nous serons
saisis du projet de directive.
Le problème évoqué devra donc ête traité. Il en résultera des conséquences un
peu partout dans le système financier français et pas seulement dans le domaine
qui nous occupe aujourd'hui.
Dès lors, est-il opportun d'anticiper sur ces nouvelles contraintes ?
Probablement pas ! C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis
défavorable, tout en reconnaissant qu'il y a là, en effet, une contrainte qui
sera probablement rendue plus exigeante au cours des prochaines années en
fonction de l'évolution des normes que nous nous fixerons dans le cadre de
l'Union européenne.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
M. Massion a eu raison de souligner l'importance de cette question, mais il
paraît difficile de se lancer dans l'élaboration d'une législation purement
nationale à partir du moment où, dans les prochains mois, doit intervenir une
directive communautaire. Il est préférable d'attendre cette directive.
M. Michel Rufin.
Absolument !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33.
M. Marc Massion.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
J'ai un peu le sentiment que la réponse est : « Courage, fuyons ! ». On
s'accorde à dire que le probème soulevé est réel, pour ajouter aussitôt qu'il
ne faut surtout pas prendre de disposition pour essayer de trouver une solution
!
M. Denis Badré.
Pas du tout !
M. Marc Massion.
C'est un peu dommage ! S'il faut toujours attendre la bénédiction de
Bruxelles, pourquoi même se réunir pour discuter de cette proposition de loi ?
Le Parlement est majeur. Conscient que des problèmes vont se poser dans les
mois à venir, il peut d'ores et déjà prendre des dispositions. Si, par la
suite, ces dispositions se révélaient être en contradiction avec les directives
de Bruxelles, on pourrait toujours procéder à leur réexamen.
Pourquoi attendre que Bruxelles décide ? C'est une attitude que je n'arrive
pas à comprendre.
M. Emmanuel Hamel.
Il fallait voter contre Maastricht !
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17
bis
.
(L'article 17
bis
est adopté.)
Article additionnel après l'article 17
bis
M. le président.
Par amendement n° 63, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer,
après l'article 17
bis
, un article additionnel rédigé comme suit :
« La commission instituée à l'article 17
bis
établit chaque année un
rapport d'activité au Président de la République. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Toujours dans le même souci de transparence et pour répondre,
notamment, à des préoccupations exprimées par certains représentants des
partenaires sociaux, nous voudrions disposer chaque année d'une référence
neutre, objective, incontestable, dressant en quelque sorte le bilan des fonds
d'épargne retraite : combien de fonds collectés ? Quelles performances globales
? Quelle répartition par grandes masses des actifs ? Quel type de gestion ?
Sans entrer, bien entendu, dans le détail, qui n'appartient qu'aux ayants
droit de chaque fonds d'épargne retraite, il serait bon que, chaque année, la
commission de contrôle joue le rôle d'observatoire des fonds d'épargne retraite
et mette à la disposition du public, sous forme d'un « rapport d'activité au
Président de la République », tel qu'il est intitulé, les éléments
d'information que je viens de citer et tous autres qui sembleraient utiles pour
que l'on se fasse une opinion neutre et objective sur le succès plus ou moins
grand que la formule est appelée à rencontrer.
Tout à l'heure, on a évoqué le taux de succès de la PREFON chez les
fonctionnaires. Certains laissaient entendre que les fonds d'épargne retraite
allaient rencontrer une audience considérable ; d'autres étaient plus
sceptiques ; nous verrons bien quelle sera la réalité en fonction à la fois des
incitations que nous mettons en place dans ce texte et du comportement des
différents partenaires partout où ils s'exprimeront.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui
paraît très opportun.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la
proposition de loi, après l'article 17
bis
.
Article 17
quater
M. le président.
« Art. 17
quater
. - Les membres de la commission constituée
conformément à l'article 17
bis
ne peuvent, pendant la durée de leur
mandat et dans les cinq ans qui suivent l'expiration de celui-ci, recevoir,
directement ou indirectement, de rétribution d'un fonds d'épargne retraite ou
d'un prestataire de services d'investissement mentionné à l'article 11
bis
ou de toute société exerçant sur le fonds ou le prestataire un contrôle
exclusif au sens de l'article 357-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur
les sociétés commerciales. »
Par amendement n° 34, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter cet article par un alinéa ainsi
rédigé :
« Les dispositions du présent article s'appliquent également aux
fonctionnaires et agents de l'Etat qui ont contrôlé ou accordé l'agrément à un
fonds d'épargne retraite ou participé à l'instruction de la demande d'agrément
dans les cinq années qui suivent la date à laquelle ils cessent d'exercer ces
fonctions. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Il s'agit d'un amendement de moralisation, qui a toute sa place dans le
contexte actuel.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commision comprend - et partage, d'ailleurs - le souci de
déontologie exprimé par notre collègue.
Elle estime, toutefois, que le droit pénal actuel prévoit des dispositions de
portée identique. Au demeurant, nous avons pu constater récemment, dans un
dossier qui continue, hélas ! de défrayer la chronique du côté de la place
Vendôme, que ces dispositions «anti-pantouflage » étaient tout à fait
efficaces. Elles sont, semble-t-il, de portée assez générale pour s'appliquer à
tous les organismes qui se trouveraient, à un moment donné, sous le contrôle
d'un fonctionnaire d'autorité ou d'un responsable, au nom de l'Etat, de tel ou
tel secteur de l'administration.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage le sentiment de la commission.
Les dispositions du code pénal relatives aux fonctionnaires et agents publics
ayant exercé une tutelle sur des organismes privés traitent en fait de la
question qui est évoquée ici.
Le Gouvernement partage tout à fait ces préoccupations déontologiques, mais
l'insertion d'une disposition spécifique semble inutile et alourdit le texte
sans fournir de garantie supplémentaire par rapport au droit existant. Au
demeurant une jurisprudence récente du Conseil d'Etat a montré que ce droit
existant était tout à fait efficace.
M. le président.
L'amendement n° 34 est-il maintenu ?
M. Marc Massion.
Il l'est !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17
quater
.
(L'article 17
quater
est adopté.)
Article 19
M. le président.
« Art. 19. - Le souscripteur d'un plan d'épargne retraite est tenu :
« - de remettre à l'adhérent une notice établie par le fonds qui définit les
garanties et leurs modalités d'entrée en vigueur ainsi que les formalités à
accomplir lors de la liquidation de sa rente viagère ou, le cas échéant, du
versement unique ;
« - d'informer, le cas échéant, les adhérents par écrit des modifications
qu'il est prévu d'apporter à leurs droits et obligations lors d'une
modification du contenu ou des conditions de gestion du plan d'épargne
retraite. »
« La preuve de la remise de la notice à l'adhérent et de l'information
relative aux modifications contractuelles incombe au souscripteur.
« Le fonds d'épargne retraite communique chaque année, deux mois au plus après
la date de clôture de ses comptes et au plus tard le 31 août suivant la clôture
de l'exercice considéré, à chaque souscripteur d'un plan d'épargne retraite
ainsi qu'au comité de surveillance du plan un rapport sur la gestion du plan,
établi dans des conditions fixées par décret.
« En outre, le fonds doit indiquer chaque année aux adhérents des plans
d'épargne retraite, dans des conditions fixées par décret, le montant de la
provision mathématique représentative des droits qu'ils ont acquis dans le
cadre du plan par leurs versements et, le cas échéant, l'abondement de leur
employeur. »
Par amendement n° 35, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans le deuxième alinéa de cet article,
après les mots : « les garanties » d'insérer les mots : « et les modalités
selon lesquelles la rente peut être revalorisée ».
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Il s'agit d'un amendement de précision. En effet, l'adhérent doit savoir si la
rente qui lui sera servie fera ou non l'objet d'une revalorisation et, lorsque
tel sera le cas, selon quelles modalités cette revalorisation sera opérées.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cette précision ne paraît pas utile à la commission, qui a
donc donné un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission. En
effet, le texte de l'article 19 est calqué sur les dispositions existantes en
matière d'assurance de groupe contenues dans la loi du 31 décembre 1989.
En outre, les modalités de revalorisation des rentes sont traitées de manière
exhaustive par les articles L. 132-5-1 et L. 331-3 du code des assurances,
auxquels renvoient les articles 9 et 10 de la présente proposition de loi.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 36, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, après le quatrième alinéa de l'article 19,
d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le souscripteur remet la présente notice à tout salarié nouvellement
embauché qui relève du plan d'épargne retraite et, avant le 30 juin de chaque
année, à chacun des salariés relevant de celui-ci et qui n'y sont pas affiliés.
»
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Nous souhaitons que les assureurs soient capables de faire aussi bien que les
banquiers. Tel est le sens d'ailleurs des amendements que nous avons déposés
sur cet article 19.
A regarder ce qui nous est proposé jusqu'à présent, j'ai l'impression que vous
vous êtes aligné sur la législation la moins contraignante. C'est en tout cas
ce qui ressort du texte adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale,
qui a soigneusement gommé les quelques améliorations que M. le rapporteur avait
apportées en première lecture au Sénat.
Que vous proposons-nous dans cet amendement ? Rien de bien extraordinaire, à
dire vrai, ni, surtout, de révolutionnaire.
L'employeur doit être tenu d'informer tout salarié nouvellement embauché. Il
doit également rappeler périodiquement aux salariés qui n'ont pas adhéré qu'ils
peuvent le faire quand ils le veulent. Si j'ai bien compris votre dispositif,
l'abondement de l'employeur ne sera pas nécessairement identique selon les
catégories de salariés. Lorsque tel sera le cas, les adhérents au plan devront
en être informés.
Chaque adhérent doit pouvoir consulter, lorsqu'il le souhaite, les comptes et
rapports du plan et du fonds et en prendre à ses frais copie. Il s'agit d'une
exigence minimale de transparence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Tout en comprenant le souci exprimé par notre collègue M.
Marc Massion, la commission estime que ces précisions ne sont pas nécessaires.
En effet, les salariés nouvellement embauchés et relevant du plan d'épargne
retraite recevront nécessairement la notice en application des dispositions du
deuxième alinéa de l'article 19. Quant aux salariés qui ne sont pas concernés,
faut-il soumettre l'employeur à une obligation de distribution de ladite notice
? En tout état de cause, ce n'est pas certain. Ceux qui n'ont pas adhéré au
plan ont eu la possibilité de le faire lors du lancement de celui-ci. Doit-on
faire circuler l'information auprès de tous les salariés ?
A la vérité, ne s'agit-il pas en quelque sorte d'un faux problème ? En effet,
nous savons bien que les responsables et les gérants des fonds d'épargne
retraite auront intérêt à recueillir le plus grand nombre d'adhésions. A mon
sens, ils feront le maximum de publicité et les notices seront très largement
distribuées aux intéressés. Il n'est donc pas utile d'apporter ce type de
précision dans la loi.
Sous le bénéfice de ces observations, si notre collègue M. Marc Massion ne
retirait pas son amendement, je ne pourrais que réitérer l'avis défavorable de
la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Il partage l'avis de la commission.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 61, M. Badré propose, à la fin de l'avant-dernier alinéa de
l'article 19, de remplacer les mots : « un rapport sur la gestion du plan,
établi dans des conditions fixées par décret », par les mots : « un rapport sur
les comptes du plan visé par son commissaire aux comptes et un rapport sur la
couverture des engagements du plan élaboré par un actuaire indépendant : le
contenu de ces deux rapports et les conditions de nomination de l'actuaire sont
précisés par décret. »
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Il s'agit là d'un amendement de précision, dicté par notre préoccupation
constante de réunir les meilleures conditions d'information possibles. Il
prévoit que deux rapports sont adressés au comité de surveillance, l'un sur les
comptes visés par le commissaire aux comptes et l'autre élaboré par un actuaire
sur la couverture des engagements, ce dernier appréciant notamment l'évaluation
de ces engagements et les provisions constituées.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission souhaiterait connaître l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement partage la préoccupation de M. Badré,
mais estime que celle-ci relève plus du domaine réglementaire que du domaine de
la loi. Nous avons préparé un projet de décret dont je puis soumettre le texte
à votre appréciation, monsieur le sénateur, qui répond tout à fait à la
préoccupation que vous avez exprimée à travers cet amendement n° 61.
Je pense que, sous le bénéfice de cet engagement de signer très rapidement le
décret, vous pourriez peut-être retirer votre amendement n° 61.
M. le président.
Monsieur Badré, votre amendement est-il maintenu ?
M. Denis Badré.
Je m'estime satisfait ; je remercie le Gouvernement et je retire mon
amendement.
M. le président.
L'amendement n° 61 est retiré.
Par amendement n° 62, M. Badré propose, après l'avant-dernier alinéa de cet
article, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un résumé de chacun des deux rapports mentionnés au précédent alinéa du
présent article est adressé chaque année avant le 30 septembre par le fonds aux
adhérents. Ce résumé comprend obligatoirement une mention indiquant les
conditions dans lesquelles les adhérents peuvent prendre connaissance et copie
des rapports. »
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
L'amendement n° 62 relève du même esprit que le précédent. Il prévoit
simplement qu'un résumé de ces deux rapports est porté à la connaissance des
adhérents. Mais si le décret évoqué par M. le ministre prévoit effectivement
cette disposition, je suis disposé à retirer mon amendement.
(M. le ministre
acquiesce.)
Je retire donc mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 62 est retiré.
Par amendement n° 37, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter,
in fine
, le dernier
alinéa de l'article 19 par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque l'abondement de l'employeur varie selon les catégories de salariés,
un état récapitulant le montant annuel des différents abondements est annexé à
ces informations. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La disposition proposée ne paraissant pas indispensable, la
commission est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 38, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter,
in fine
, le dernier
alinéa de l'article 19 par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout adhérent à un fonds d'épargne retraite peut, à tout moment, prendre
connaissance des comptes annuels du fonds ainsi que des rapports des organes de
direction, des commissaires aux comptes et des actuaires du fonds. Il peut
également en prendre copie à ses frais suivant les modalités fixées à l'article
4 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures
d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses
dispositions d'ordre administratif, social et fiscal. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Ayant, tout à l'heure, en présentant l'amendement n° 36, également exposé
l'amendement n° 38, il est inutile que j'y revienne.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement va un peu loin. Les préoccupations de M.
Massion seront satisfaites si nous adoptons, dans quelques instants,
l'amendement n° 9 de la commission à l'article 19
bis.
En attendant, la commission est défavorable à l'amendement n° 38.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19.
(L'article 19 est adopté.)
Article 19
bis
M. le président.
L'article 19
bis
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 9, M. Marini, au nom de la commission, propose de le
rétablir dans la rédaction suivante :
« Le comité de surveillance peut demander aux commissaires aux comptes du
fonds d'épargne retraite auprès duquel le plan est souscrit tout renseignement
sur l'activité et la situation financière dudit fonds. Les commissaires aux
comptes sont alors déliés, à son égard, du secret professionnel.
« Les membres du comité de surveillance sont soumis au secret professionnel
dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226-13 et 226-14 du
code pénal. »
Cet amendement est assorti de trois sous-amendements.
Le sous-amendement n° 59 est présenté par M. Loridant et Mme Beaudeau, les
membres du groupe communiste, républicain et citoyen.
Il tend, dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 9, après
les mots : « de surveillance » à ajouter les mots : « ou son président ».
Les deux sous-amendements suivants sont présentés par MM. Massion, Autain et
Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés.
Le sous-amendement n° 32 rectifié vise à compléter le premier alinéa du texte
proposé par l'amendement n° 9 par une phrase ainsi rédigée : « Ils peuvent
également interroger aux mêmes fins le ou les actuaires du fonds. »
Le sous-amendements n° 39 a pour objet de compléter,
in fine
, le texte
présenté par l'amendement n° 9 par un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité de surveillance peut, dans les mêmes conditions, demander tout
renseignement aux actuaires du fonds. Il peut également demander toute
expertise à un actuaire indépendant du fonds. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 9.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La question me paraît importante pour l'efficacité des
travaux du comité de surveillance. En effet, pour que celui-ci soit dûment
informé, il lui faut disposer des informations que les commissaires aux comptes
du fonds d'épargne retraite seront en mesure de lui donner. Or, ces
commissaires aux comptes sont régis par un statut fort contraignant, qui
comporte comme élément essentiel le secret professionnel.
A défaut d'une disposition légale spécifique pour lever le secret
professionnel des commissaires aux comptes au bénéfice des membres des comités
de surveillance des fonds d'épargne retraite, les commissaires aux comptes vont
se trouver dans une situation fausse. Dans cette affaire, ce sont les adhérents
des fonds d'épargne retraite qui risquent d'être lésés ou en tout cas de
souffrir d'un déficit d'information.
Pour tenir compte des observations de M. le rapporteur de l'Assemblée
nationale, nous proposons d'étendre le secret professionnel aux membres du
comité de surveillance. Ils seront couverts par ce secret, mais ils lui seront
soumis. Dans la formule que nous envisageons ici, ils porteront une partie de
la responsabilité partagée de ce secret professionnel.
M. Michel Caldaguès.
Informations privilégiées !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Si l'on veut que les choses marchent bien, il faut faire
confiance aux membres de ces comités de surveillance. Une disposition de cette
nature paraît devoir faciliter les prises de conscience nécessaires ; on peut
du moins le souhaiter. Le secret est indispensable si l'on veut pouvoir se
faire une opinion sur certains sujets très techniques et très précis concernant
la gestion des activités financières. Cependant, il faut bien entendu respecter
le secret ; il convient que tous ceux qui le partagent s'astreignent à la même
déontologie.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour présenter le sous-amendement n° 59.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous allez
pouvoir constater notre grande constance !
Nous partageons le souci du rapporteur de donner au comité de surveillance du
fonds, c'est-à-dire aux adhérents du plan, donc aux salariés, le maximum de
possibilités de contrôle prudentiel de l'activité des fonds de pension.
De la même façon que nous avons souhaité donner un rôle particulier à ce
comité et à son président, il nous semble souhaitable que ce soit ce même
président du comité de surveillance qui soit habilité à mettre en oeuvre la
procédure visée à l'article 19
bis
.
Ce serait là un complément utile à la volonté de transparence qui nous anime
quant aux normes de contrôle de l'activité des gestionnaires des fonds de
pension.
Tel est l'objet de ce sous-amendement n° 59.
M. le président.
La parole est à M. Massion, pour défendre les sous-amendements n°s 32 rectifié
et 39.
M. Marc Massion.
Le sous-amendement n° 39 est retiré.
Par le sous-amendement n° 32 rectifié, nous souhaitons compléter le premier
alinéa de l'amendement n° 9.
Afin de ne pas multiplier le recours à l'expertise judiciaire, il est
nécessaire que les membres du comité de surveillance puissent obtenir auprès
des actuaires du fonds les explications nécessaires.
M. le président.
Le sous-amendement n° 39 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 59 et 32
rectifié ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Sur le sous-amendement n° 59, je rappelle que la commission,
ce matin, a émis un avis défavorable, mais elle a dû examiner de nombreux
amendements en un laps de temps réduit. A titre personnel, après avoir écouté
M. Loridant attentivement, je serais prêt à m'en remettre à la sagesse du Sénat
car, si cette précision n'est pas substantielle, néanmoins elle n'est pas
complètement inutile.
Sur le sous-amendement n° 32 rectifié, j'aurais souhaité entendre l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 9 ainsi que sur les
sous-amendements n°s 59 et 32 rectifié ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 9 de la
commission des finances.
En revanche, il n'est pas favorable au sous-amendement n° 59 parce qu'il ne
comprend pas très bien pourquoi, du moment que le comité de surveillance est
une instance collégiale, le président de ce comité pourrait bénéficier
d'informations dont ne pourraient pas bénéficier les autres membres du comité.
Cela ne semble pas logique.
C'était peut-être logique pour M. Loridant, puisqu'il avait proposé que,
statutairement, le président soit le représentant des salariés. Toutefois, le
Gouvernement n'a pas la même logique et il considère que ce sous-amendement
n'est pas justifié.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 32 rectifié, le Gouvernement n'a pas
d'objection de fond à formuler. La matière lui paraît plutôt relever du décret.
Cela étant, c'est un sujet sur lequel il est prêt à s'en remettre à la sagesse
du Sénat.
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 32
rectifié ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission partage l'avis du Gouvernement et s'en remet
donc à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 59, repoussé par le Gouvernement et
pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 32 rectifié, pour lequel la commission
et le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 9, accepté par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 19
bis
est rétabli dans cette rédaction.
Article 23
M. le président.
« Art. 23. - Les engagements réglementés des fonds d'épargne retraite peuvent
être représentés, à concurrence de 10 % et dans la limite de 1 % par émetteur,
par des actions, parts ou droits émis par une société commerciale et non admis
à la négociation sur un marché réglementé ainsi que par des parts de fonds
communs de placement à risques du chapitre IV de la loi n° 88-1201 du 23
décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs
mobilières et de fonds communs de placement dans l'innovation institués par
l'article 102 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996).
»
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Marini, au nom de la
commission.
L'amendement n° 10 tend, avant le texte de l'article 23, à insérer un alinéa
ainsi rédigé :
« Les engagements réglementés des fonds d'épargne retraite ne peuvent excéder
5 % pour l'ensemble des valeurs émises et des prêts obtenus par une même
société, ou par des sociétés contrôlées par cette société au sens de l'article
355-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.
Aucune dérogation à cette règle n'est admise. »
L'amendement n° 11 a pour objet, au début de ce même article, de remplacer les
mots : « 1 % par émetteur, » par les mots : « 0,5 % par émetteur, appréciée
dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa précédent, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Il s'agit là d'une disposition tout à fait substantielle. J'y
ai fait allusion lors de la discussion générale et, après avoir beaucoup
insisté sur cet aspect des choses au cours de la première lecture, la
commission propose au Sénat de revenir au vote qu'elle avait alors émis.
Il convient de rappeler que le code des assurances prévoit, notamment en
matière d'assurance vie, que les placements ne peuvent excéder 5 % de l'actif
pour l'ensemble des valeurs émises et des prêts obtenus par un même
organisme.
Nous comprenons les raisons pour lesquelles nos collègues de l'Assemblée
nationale ont voulu, à titre dérogatoire, permettre de porter ce quantum de 5 %
à 10 %. Au demeurant, - c'est le sujet abordé par l'amendement n° 11 - ils ont
transposé ce raisonnement au titre des sociétés non cotées en doublant, là
aussi, les plafonds de droit commun prévus aujourd'hui par le code des
assurances.
Je crois cependant devoir à nouveau brièvement attirer l'attention de nos
collègues sur l'importance tout à fait cruciale vis-à-vis de l'épargne du vote
qui va intervenir.
Nous l'avons dit à maintes reprises au cours de ce débat, l'objectif, avec les
fonds d'épargne retraite, c'est, d'abord, de servir des rentes. Cet objectif se
concilie fort bien avec des effets économiques qu'il nous importe d'optimiser
au profit des fonds propres des entreprises, notamment de celles, petites et
moyennes, qui ne sont pas encore cotées et qui ont un potentiel important de
développement.
Mais nous devons, surtout dans la phase de démarrage et d'émergence de
nouveaux systèmes, ces derniers dépendant beaucoup de la confiance, tout faire
pour apporter le maximum de garanties, de sécurité et de protection aux
souscripteurs.
Si nous allions dans le sens préconisé par nos collègues de l'Assemblée
nationale, nous conduirions les épargnants, me semble-t-il, à prendre des
risques tout à fait excessifs. Ainsi, quelle serait la viabilité d'un plan
d'épargne retraite mis en service par la société Eurotunnel - je la cite en
exemple parce qu'elle est médiatique et que l'on connaît sa situation - pour
laquelle les dirigeants auraient très légitimement imposé, lors de la
souscription du contrat, que les avoirs des adhérents soient investis à hauteur
de 10 % dans cette même société ? Après tout, si la loi avait été votée dans
les termes qui nous ont été transmis, cela aurait fort bien pu se concevoir
!
Concernant les sociétés non cotées, les règles actuelles autorisent d'avoir au
maximum dix lignes de 0,5 % dans un portefeuille. En conséquence, il faudrait
huit défaillances sur dix pour absorber la marge de solvabilité du fonds, qui
est fixée à 4 %. Dans le dispositif proposé par l'Assemblée nationale, un fonds
de pension pourrait comporter au maximum dix lignes de 1 % et, en conséquence,
il suffirait de quatre défaillances sur dix pour absorber la marge de
solvabilité.
On voit donc qu'en doublant simplement les ratios, le dispositif adopté par
l'Assemblée nationale conduit également à doubler les risques à un niveau qui
n'est acceptable ni en ce qui concerne les sociétés cotées - amendement n° 10
de la commission des finances - ni en ce qui concerne les sociétés non cotées -
amendement n° 11.
Je voudrais, sans m'étendre plus qu'il n'est besoin sur ce sujet, rappeler que
le groupe de travail Paris-Europlace, que je citais tout à l'heure à propos de
l'industrie de la gestion, avait lui-même partagé les préoccupations que
j'exprime. Ainsi, selon lui : « Les fonds d'épargne retraite doivent être gérés
en fonction de l'intérêt de leurs souscripteurs. L'adjonction d'un second
objectif parallèle visant à ce que les fonds concourent au développement du
marché des actions risque de conduire à une confusion des genres et à un risque
sérieux de voir l'intérêt de l'épargnant menacé. »
Je crois qu'il est difficile d'être plus clair que les professionnels
eux-mêmes. Dès lors, il nous appartient de trouver le juste compromis, de
trouver l'équilibre entre les vertus sociales du système et ses vertus
économiques.
En en restant aux règles de droit commun qui figurent actuellement dans le
code des assurances - 5 % d'un côté, 1 % de l'autre - nous nous situons à un
niveau raisonnable de compromis. En adoptant cette position, en votant comme en
première lecture, le Sénat serait tout à fait dans son rôle de protecteur de
l'épargne.
Sachez enfin, mes chers collègues, que, s'agissant de l'amendement n° 10 et
des valeurs cotées, le dispositif que nous proposons, et qui figure déjà dans
le code des assurances, correspond à la législation britannique laquelle, je le
rappelle, a été votée en 1992, après l'affaire dite « Maxwell ». Les épargnants
français méritent sans doute les mêmes précautions que les épargnants
britanniques !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 10 et 11 ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
C'est un débat que nous avons déjà eu longuement en
première lecture. Sur ce sujet, tout le monde partage, me semble-t-il, les
mêmes objectifs, notamment de prudence et de garantie à l'égard des adhérents
et des souscripteurs, mais il peut y avoir des divergences sur les ratios à
fixer. L'Assemblée nationale et le Sénat n'ont pas tout à fait le même point de
vue à cet égard.
Je ne veux pas répéter les arguments que nous avons développés lors de la
première lecture. Le mieux est que je m'en remette à la sagesse du Sénat. Je
pense que le bon compromis sera trouvé lors de la réunion de la commission
mixte paritaire.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 41, MM. Laffitte et Joly proposent, dans l'article 23, après
les mots : « organismes de placement collectif en valeurs mobilières », de
remplacer le mot : « et » par les mots : « pour 1997 et dans la limite de 2 %
par émetteur, par des parts ».
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23 modifié.
(L'article 23 est adopté.)
Article additionnel après l'article 30
M. le président.
Par amendement n° 40, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 30, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa du 2° de l'article 83 du code général des impôts,
après les mots : "affilié à titre obligatoire", sont insérés les mots
: "les cotisations de retraite versées à partir du 1er janvier 1998,
qu'elles soient ou non, à compter de cette date, immédiatement constitutives
d'un droit certain au profit des intéressés". »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Il est proposé ici de soumettre à l'impôt sur le revenu, sous couvert des
limites de déductibilité existantes, les cotisations de régimes de retraite
dites « à prestations définies », qui profitent aux salariés titulaires des
revenus les plus élevés.
Les cotisations servant à financer des couvertures sociales complémentaires
sont déductibles de l'assiette de l'impôt sur le revenu dans des limites
élevées. Ces cotisations ne sont pas considérées comme des compléments du
salaire et ne sont donc réintégrées dans l'assiette de l'impôt sur le revenu
que pour les titulaires de revenus substantiels, c'est-à-dire à partir d'un
salaire mensuel d'environ 70 000 francs.
Afin d'échapper à toute réintégration d'assiette, un certain nombre de régimes
de retraite, les régimes « à prestations définies », ont été mis en place aux
conditions suivantes : le salarié doit être présent dans l'entreprise lors de
son départ à la retraite ; le droit à prestation est subordonné à une présence
dans l'entreprise qui est généralement comprise entre dix ans et vingt ans.
Le service de la législation fiscale a admis, depuis 1977, que, dès lors que
ces conditions étaient remplies, c'est-à-dire que le droit effectif à retraite
n'était définitivement constitué qu'au moment de la liquidation de la
prestation, la cotisation de l'employeur ne constituait pas un complément du
salaire et échappait totalement à l'impôt sur le revenu.
Ce régime exorbitant du droit commun ne peut être maintenu, et ce pour
différentes raisons.
Tout d'abord, selon la nature des régimes de retraite, à cotisations ou à
prestations définies, le régime fiscal est différent ; il y a donc atteinte au
principe constitutionnel de l'égalité.
En outre, les salariés titulaires des revenus les plus élevés sont les
principaux bénéficiaires de ces régimes.
Enfin, la Cour de cassation vient de juger à trois reprises que les
cotisations des employeurs à ces régimes constituaient bien, pour les salariés
intéressés, un avantage servi à l'occasion du travail et, à ce titre, entraient
dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale dès lors qu'ils dépassaient
les limites d'exonération qui sont fixées à un niveau comparable aux limites
fiscales. Or, en la matière, les règles fiscales et sociales ont été conçues de
manière à être cohérentes entre elles.
Il faut également ajouter que la mise en place de tels régimes de retraite
constitue une entrave à la mobilité des salariés et qu'elle est, à ce titre,
contraire au principe constitutionnel de la libre circulation des personnes. En
outre, un certain nombre de salariés qui quittent l'entreprise sans répondre
aux conditions posées perdent définitivement tout droit à ce type de régime.
C'est pourquoi l'article 83 du code général des impôts doit, dans un double
souci de cohérence avec les règles sociales et d'équité, être modifié.
Ce régime offre par ailleurs un avantage fiscal redondant avec celui qui est
proposé à l'article 25 de la présente proposition de loi.
Nous avions présenté un amendement identique lors du débat budgétaire, mais il
avait été rejeté par le Gouvernement sans que ce dernier y oppose une
argumentation véritablement motivée, puisqu'il s'était contenté d'en renvoyer
l'examen au débat sur la proposition de loi qui nous occupe aujourd'hui. Nous
avions donc présenté cet amendement en première lecture ; il avait été « évacué
» et nous le représentons en deuxième lecture.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Sur l'amendement n° 40, je souhaiterais connaître l'avis du
Gouvernement avant d'exprimer celui de la commission.
Par ailleurs, monsieur le président, m'autorisez-vous à revenir sur un sujet
qui concerne l'article 23 que nous venons d'adopter, et, plus précisément,
l'amendement qu'avaient déposé MM. Laffitte et Joly sur cet article, amendement
qui n'a pas été soutenu ?
M. le président.
Votre demande n'est pas conforme au règlement, monsieur le rapporteur, puisque
cet amendement n'a pas été soutenu et que l'article a été adopté.
Cela dit, en explication de vote sur l'ensemble du texte, peut-être
pourrez-vous nous dire un mot sur le sujet.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je retiens bien volontiers votre suggestion, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 40 ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Monsieur le président, nous avons déjà eu l'occasion de
nous exprimer sur un amendement similaire lors de la première lecture.
La question posée, qui porte sur le régime fiscal des cotisations versées aux
régimes de retraite dits à prestations définies, relève de l'interprétation des
textes existants, et non de leur modification.
En effet, en matière sociale comme en matière fiscale, des dispositions de
portée générale existent qui permettent de déduire de l'assiette des
cotisations sociales et de celle de l'impôt sur le revenu les cotisations
versées aux régimes de retraites complémentaires et supplémentaires. Cette
déduction est plafonnée sur les plans aussi bien fiscal que social.
Ces dispositions ne posent pas de problème d'application quand il s'agit de
régimes dits à cotisations définies pour lesquels on sait exactement quel
montant de cotisation a été versé pour chaque salarié.
L'application de ces règles est plus délicate pour les régimes à prestations
définies, qui se caractérisent par un engagement de l'employeur à verser un
certain montant de retraite supplémentaire, généralement aux seuls salariés
présents dans l'entreprise à la date de leur départ à la retraite, cet
engagement étant financé par un versement global de l'employeur à une compagnie
d'assurances.
En matière sociale, la Cour de cassation a effectivement indiqué, par des
décisions récentes, que ces versements devaient être pris en compte pour
l'appréciation du plafond de déduction des cotisations de retraites
complémentaires et supplémentaires.
La matière fiscale paraît relever du niveau de l'instruction et non du niveau
de la loi. Par conséquent, le Gouvernement n'est pas favorable à cet
amendement.
Je tiens à apporter une précision, pour répondre à une question posée un peu
plus tôt dans le débat par M. le rapporteur, et apaiser les craintes qu'il a
exprimées tout à l'heure.
Supposons qu'un salarié perçoive une rémunération de 200 000 francs avant la
mise en place des plans d'épargne retraite ; qu'après la mise en place d'un
plan, son employeur lui consente un abondement de 8 000 francs, alors que ce
salarié effectuerait un versement de 2 000 francs. Dans une telle hypothèse,
l'enveloppe serait complètement utilisée, et la rémunération prise en compte
fiscalement serait alors de 198 000 francs.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je suis heureux que M. le ministre nous ait fait part de son
interprétation, dont la conformité avec ce que la commission avait elle-même
imaginé se trouve ainsi confirmée. Il est utile que les travaux préparatoires
fassent état de cette convergence d'interprétation.
Sur l'amendement n° 40, compte tenu de sa réponse, j'exprime un avis
défavorable, au nom de la commission.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Intitulé du chapitre VI
M. le président.
Cette division et son intitulé ont été supprimés par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 12, M. Marini, au nom de la commission, propose de les
rétablir, avant l'article 31, dans la rédaction suivante : « Chapitre VI. -
Dispositions diverses ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
L'Assemblée nationale a supprimé cette division et son
intitulé - c'est ce que nous avons appelé en première lecture les amendements
d'architecture - mais elle a introduit l'article 32 sur les personnels
retraités de France Télécom, qui est étranger aux dispositions du chapitre
V.
Sans vouloir remettre des chapiteaux ou des frontons là où le zèle de
l'Assemblée nationale les a fait disparaître, sans vouloir modifier à nouveau
le style du texte, la commission estime que l'intitulé « Dispositions diverses
» est indispensable pour chapeauter les derniers articles, compte tenu du
caractère quelque peu hétérogène des matières qui y sont traitées.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, cette division et son intitulé sont rétablis dans cette
rédaction.
Article 31
M. le président.
L'article 31 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 13, M. Marini, au nom de la commission, propose de le
rétablir dans la rédaction suivante :
« I. - Le troisième alinéa de l'article 11 de la loi n° 96-597 du 2 juillet
1996 précitée est ainsi rédigé :
« Lorsque est sollicitée la fourniture du service d'investissement visé au
d
de l'article 4, l'approbation du programme d'activité et l'agrément
sont délivrés par la Commission des opérations de bourse. Une entreprise
d'investissement ainsi agréée ne peut fournir les autres services
d'investissement visés à l'article 4 ni les services connexes visés aux
a,
b, d
et
e
de l'article 5. »
« II. - Les dispositions du I ci-dessus entrent en vigueur à compter du 30
juin 1999. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement est de la même veine que celui qui concerne la
délégation de la gestion, dont nous avons amplement débattu tout à l'heure. Son
champ est toutefois plus large, car il ne s'agit pas seulement de fonds
d'épargne retraite, il s'agit de l'ensemble des activités de gestion pour
compte de tiers.
Nous pouvons être d'avis que cette orientation est la bonne. Lorsque nous
l'avons adoptée en première lecture, nous voulions donner un signal aux
professionnels. Toutefois, deux situations doivent être distinguées.
Un marché nouveau s'ouvre : les fonds d'épargne retraite. Nous souhaitons que
l'articulation professionnelle soit clairement définie dès le départ, pour que
les intervenants puissent se positionner le mieux possible sur ce nouveau
marché. Toutes les professions existantes, avec lesquelles une concertation est
en cours, devront être soumises au projet de loi sur la gestion pour compte de
tiers, qui est en cours de préparation au sein du ministère de l'économie et
des finances et dont nous aurons probablement à discuter au cours de ce premier
semestre, sauf si vous infirmez cette perspective ou ce calendrier, monsieur le
ministre.
Dans un souci de bonne préparation de ce texte, pour ne pas nécessairement
préjuger tout ce qui sera dit, et sachant que les intentions du Sénat ont déjà
été clairement exprimées à plusieurs reprises, il me semble possible de retirer
l'amendement n° 13. Je souhaite cependant que les professionnels comprennent la
nécessité de la filialisation, pour toutes les raisons qui ont été évoquées
tout à l'heure, et qu'ils s'y préparent. Je m'inscris en faveur d'un projet de
loi suffisamment volontariste sur la gestion des capitaux.
M. le président.
L'amendement n° 13 est retiré.
Article 32
M. le président.
« Art. 32. - Le premier alinéa de l'article 32-1 de la loi n° 90-568 du 2
juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des
télécommunications est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces dispositions s'appliquent également aux anciens agents affectés à France
Télécom et relevant des articles 29 et 44 précités dès lors qu'ils ont cessé
leurs fonctions après le 1er janvier 1991 et qu'ils peuvent se prévaloir d'une
ancienneté supérieure à cinq années dans un emploi d'un service relevant de la
direction générale des télécommunications. » -
(Adopté.)
Intitulé de la proposition de loi
M. le président.
Par amendement n° 14, MM. Massion, Autain et Mélenchon, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit l'intitulé de la
proposition de loi : « Proposition de loi créant les plans de capitalisation
financière ».
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Cet amendement a pour objet de modifier l'intitulé de la proposition de loi
afin de le mettre en conformité avec son contenu réel.
En effet, les débats parlementaires ont fait apparaître la véritable nature de
la proposition de loi qui nous est soumise. En réalité, il s'agit d'opérations
de capitalisation financière de plus en plus individuelles, qui se traduiront
par le service d'une rente viagère et non d'une véritable pension de retraite.
Il est donc temps de mettre ce texte en conformité avec la réalité et
d'utiliser les termes qui définissent effectivement les opérations dont vous
assurez la promotion.
C'est pourquoi nous proposons, afin de lever toute ambiguïté avec les
véritables régimes de retraite, de qualifier ce texte de « proposition de loi
créant les plans de capitalisation financière ».
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Il s'agit, je crois, d'une petite facétie à laquelle se livre
notre collègue M. Massion !
L'intitulé de ce texte : « Proposition de loi créant les plans d'épargne
retraite » est factuel et correspond bien à la réalité. De toute façon, quelle
que soit l'appellation que vous utiliserez, le commun des mortels qualifiera
ces plans de « fonds de pension », expression qui a été écartée en raison de je
ne sais quelle connotation.
« Plans d'épargne retraite » est l'appellation légale. Encore une fois, elle
est factuelle et fidèle. L'appellation commune sera sans doute plutôt, je le
répète, « fonds de pension ». Permettez-moi de considérer celle de « plan de
capitalisation financière » comme une facétie de fin d'examen de ce texte, mon
cher collègue. La commission ne peut qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Vous me permettrez de faire un appel à M. le ministre.
Si chargé que soit son emploi du temps, si lourdes que soient ses
responsabilités, je lui demande de se souvenir de l'amendement n° 14 - le
dernier de cette longue discussion - que vient de défendre notre collègue.
Cet amendement est, en effet, très important, parce qu'il démontre qu'une
action va être conduite sur le plan psychologique auprès de l'opinion pour
tenter de faire croire aux salariés que notre proposition de loi est un texte
de régression sociale ! Si tel était le cas, nous ne la voterions pas !
Au contraire, ce texte est né d'une prise de conscience des problèmes que
posera, dans quelques décennies, si la démographie n'est pas inversée, le
financement des retraites.
Loin d'être, dans notre esprit, l'expression d'une volonté de satisfaire les
marchés financiers, de faire un sourire au grand capital, de mettre en cause le
système et le régime de retraite de répartition, cette proposition constitue
pour nous un réel progrès. En effet, elle offrira aux salariés - à ceux d'entre
eux qui pourront y souscrire - la possibilité de compléter plus tard leur
retraite.
Ce n'est pourtant pas ce que nos collègues de l'opposition - et ils sont dans
leur droit démocratique - veulent faire croire, en dénaturant la réalité des
choses.
Souvenez-vous de cette volonté de nos collègues du groupe socialiste,
notamment, de faire croire à l'opinion qu'il s'agit d'un texte de régression
sociale, de soumission aux exigences du grand capital, d'un sourire aux marchés
financiers, en un mot, d'un texte qui oublie l'homme pour permettre à la France
de s'insérer dans la mondialisation du capital !
Monsieur le ministre, une tâche très importante vous attend. En effet, la
cohésion sociale, que le Gouvernement a la ferme volonté de préserver, risque
d'être altérée si l'opinion ne comprend pas que ce texte, même s'il pose encore
quelques problèmes ou compte encore certaines incertitudes, est, tant dans
notre esprit que dans celui du Gouvernement, un texte de progrès social, de
défense des salariés et des futurs retraités !
(Applaudissements sur les
travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et
Indépendants.)
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Mon intervention se situera dans le droit-fil de ce que vient de dire M.
Hamel, mais avec une interprétation toutefois différente !
Je voudrais saluer la perspicacité de Marc Massion et de son groupe d'avoir
qualifié ce texte de ce qu'il est vraiment, à savoir un système de
capitalisation, système que la France avait banni depuis 1945, depuis qu'elle
avait opté pour un système de retraite par répartition, et qui avait laissé un
triste souvenir à ceux qui y avaient cotisé.
Attirer l'attention des salariés sur le caractère spécifique de ces plans
d'épargne retraite et sur la technique de capitalisation individuelle, sans
solidarité, est quelque chose de très important.
C'est donc avec une grande satisfaction que je voterai l'amendement du groupe
socialiste.
M. le président.
Mes chers collègues, avant de mettre aux voix cet amendement, je voudrais
souligner qu'il aurait pu être refusé par la présidence, car, visant des «
plans de capitalisation financière », expression qui ne figure nulle part dans
le texte, il devrait comporter une disposition introduisant une telle
appellation dans l'ensemble de la proposition de loi.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à Mme Heinis, pour explication de vote.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de
l'examen en deuxième lecture de la proposition de loi portant sur l'épargne
retraite, je dirai que nous touchons à notre but, après des discussions
importantes au sein de chaque assemblée.
Mettre en place un troisième étage au système de retraite apparaît bien,
malgré les dénégations entendues sur certaines travées de cette assemblée,
indispensable, voire inéluctable. Je rappelle que c'est grâce à la
détermination de M. Thomas, député des Vosges, que cela se fera.
Si nous laissions en l'état le dispositif des retraites tel qu'il existe
actuellement, nous exposerions les futurs retraités à des déboires certains, ce
que nous voulons éviter. Alors, le système par répartition serait réellement en
danger. Cela a été démontré avec force lors des débats.
Cependant, mes collègues et moi-même avons clairement rappelé notre
attachement au régime de répartition. Il n'y a aucune ambiguïté sur ce
point.
Ecartons bon nombre des arguments qui ont été opposés au texte et rappelons
pêle-mêle que les fonds de pension existent dans la fonction publique depuis
longtemps, que les risques de capitalisation liés au support boursier ne sont
pas ceux que l'on dit.
Malgré les krachs boursiers, les placements en actions ont été les plus
rémunérateurs depuis cent ans. L'AGIRC et l'ARRCO, pour faire fructifier leurs
réserves, les placent en bourse.
La dimension économique de la proposition de loi, élément auquel nous devons
attacher la plus grande importance, tient à l'enchaînement vertueux qu'elle
pourrait installer. Plus de fonds sur le marché financier pour les entreprises,
c'est une économie plus prospère et évidemment, ce qui est primordial, plus
d'emplois, donc plus de cotisations aux régimes de retraite par répartition. La
boucle est bouclée !
Le texte que nous allons voter a bien évolué au cours de son examen et le
Sénat a beaucoup contribué à cette construction.
Je tiens à rappeler le dispositif voté sur l'initiative de la commission des
affaires sociales et de son président, M. Fourcade, visant à limiter le montant
des abondements patronaux exonérés. Cela devrait, fort légitimement, rassurer
ceux qui craignaient pour l'avenir des régimes complémentaires. Ce sont eux
d'ailleurs, ne l'oublions pas, qui ont souhaité, en décembre 1996, voir la
disposition adoptée.
Les points de divergences restant en deuxième lecture entre les deux
assemblées et le Gouvernement ont été surmontés en partie ou le seront à
l'issue de la commission mixte paritaire.
Reconnaissons que le souci de sécurisation extrême du système recherché tout
au long des travaux, notamment par M. le rapporteur, est à saluer. Cependant,
prenons garde à ce qu'il ne freine pas le bon développement de l'épargne
retraite, qui est attendue et qui devrait être profitable à nos concitoyens et
à notre économie.
Pour toutes ces raisons, mes collègues du groupe des Républicains et
Indépendants et moi-même voterons cette proposition de loi.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'issue de
la deuxième lecture de la proposition de loi dont le Sénat vient d'achever
l'examen, nous tenons, nous aussi, à rappeler le profond attachement de notre
groupe à la mise en place des fonds d'épargne retraite en France.
Mis en oeuvre à partir d'un engagement pris par le Président de la République
devant nos compatriotes, les fonds d'épargne retraite constituent un troisième
étage pour notre système de retraite. Il ne s'agit en aucun cas de substituer
un système de retraite par capitalisation aux régimes de retraite par
répartition obligatoire, auxquels nous réaffirmons avec force et détermination
notre attachement, comme vient de le faire notre collègue M. Hamel.
Ceux qui annoncent que ce texte aurait pour conséquence de procéder à une
telle substitution en France ne disent pas la vérité.
La faculté ainsi ouverte aux Français de s'occuper activement de leur retraite
est, à coup sûr, un acte responsable. C'est aussi un acte de justice envers le
secteur privé, puisque de telles possibilités existaient déjà dans le secteur
public, ce dont nous n'avons d'ailleurs pas beaucoup parlé.
Je tiens à rendre hommage au rapporteur de notre commission des finances, M.
Philippe Marini, qui, par sa connaissance aiguë de ce dossier et la qualité de
son rapport, a contribué d'une manière décisive aux travaux du Sénat.
Gardons à l'esprit pour l'en féliciter, et sans vouloir nous engager dans une
recherche des filiations et des droits d'auteur, que c'est bien notre collègue
Philippe Marini qui, le premier, a engagé une réflexion approfondie sur les
fonds de pension. Je tenais à le rappeler en cet instant.
Cette deuxième lecture nous a permis de trouver un équilibre souhaitable sur
des points importants. Ainsi, pour les conditions d'adhésion aux plans
d'épargne retraite, le Sénat a rappelé la nécessité de privilégier la
négociation collective avant qu'un salarié ne puisse adhérer à un plan déjà
existant, lorsque sa propre entreprise ne propose pas un tel plan. Le délai
d'un an, sur lequel nous nous sommes entendus, nous semble procéder d'un bon
équilibre.
Il en va de même pour l'accord intervenu avec le Gouvernement concernant
l'interdiction faite aux fonds d'épargne retraite de servir des prestations
définies en fonction du salaire de l'adhérent.
Certains points sur lesquels un accord n'a pas pu intervenir restent néanmoins
en discussion. Nous formons le voeu que, à l'occasion de la commission mixte
paritaire qui sera réunie sur ce texte sur l'initiative du Gouvernement, il
soit possible de parvenir à un consensus avec nos collègues de l'Assemblée
nationale et que souffle, sur les travaux de cette décisive CMP, l'esprit de
sagesse qui est propre à notre Haute Assemblée ou, du moins, dont nous nous
targuons.
Certains ont, d'ores et déjà, annoncé leur intention de remettre intégralement
en cause le dispositif des fonds d'épargne retraite en cas d'alternance
politique. La discussion un peu surréaliste intervenue sur le titre de cette
proposition de loi a bien montré l'arrière-pensée qui sous-tend cette
affirmation. Outre que cette éventuelle alternance politique est bien loin
d'être d'actualité, c'est une déclaration choquante et peu réaliste. Je fais le
pari que si, par malheur, les conditions d'un tel retour en arrière étaient
réunies, il n'aurait pas lieu pour autant !
Comme le Gouvernement et la commission des finances, nous voulons que
l'épargne soit mobilisée en faveur de la création d'entreprises et de l'emploi.
Le groupe du Rassemblement pour la République votera donc ce texte, qui
représente une chance indéniable pour l'avenir de nos systèmes de retraite et
pour l'intérêt des salariés, lequel a été notre souci dominant pendant tout ce
débat.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Je ne voudrais pas prolonger ce débat qui a été d'une très grande qualité et
qui nous a permis d'aller au fond des choses sur un sujet difficile mais tout à
fait essentiel dans la perspective de la modernisation de notre économie et de
l'avenir de nos retraites.
Je rappellerai que ce texte a été bâti sur l'inspiration de M. Jean-Pierre
Thomas et de M. Philippe Marini, dont on vient de dire quelle avait été la
part, mais aussi de M. Jacques Barrot ; je pense que personne ne l'a oublié.
Tout a été dit et très bien dit par M. le rapporteur et, à l'instant, par mes
collègues Anne Heinis et Yann Gaillard.
J'ajouterai simplement, sans surprendre personne, que mes collègues du groupe
de l'Union centriste et moi-même nous voterons sans état d'âme cette
proposition de loi.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Au terme de cette deuxième lecture du texte relatif aux plans d'épargne
retraite, nous sommes contraints de poser une question légèrement différente de
l'objet initial de la proposition de loi mais bien en rapport avec le sujet :
les entreprises de notre pays ont-elles besoin de fonds propres ou de débouchés
?
Poser cette question consiste en fait à revenir aux leçons de l'histoire et à
la situation réelle actuelle des entreprises de notre pays.
Dans les années soixante et soixante-dix, le niveau de la croissance était
sensiblement plus élevé qu'aujourd'hui et le niveau de chômage sensiblement
plus faible, alors même que le niveau des fonds propres des entreprises était
particulièrement faible.
Nous sommes, depuis 1993, dans une situation assez paradoxale ; année après
année, la capacité d'autofinancement de nos entreprises s'est très sensiblement
renforcée au point qu'elles ont pu se désendetter et constituer, pour les plus
florissantes d'entre elles, de véritables trésors de guerre. Dans le même
temps, les taux d'intérêt baissent, du fait, en partie, de la moindre demande
de nouveaux crédits résultant de cet accroissement de l'autofinancement.
Pour autant, le niveau de chômage n'a jamais été aussi élevé dans notre pays
depuis de très longues années, en tout cas depuis la Libération.
Dans le même temps, nous constatons que la consommation stagne et que cette
situation pèse à la fois sur les entreprises qui instaurent des plans de
restructuration et de licenciements et sur les recettes publiques, toujours
plus étroitement dépendantes des actes de consommation.
Avec cette proposition de loi sur l'épargne retraite, va-t-on inverser la
tendance ? Telle est la question.
Nous assistons ni plus ni moins à la mise en place d'une épargne captive,
puisqu'elle sera bloquée jusqu'à l'âge de soixante ans pour chaque salarié et
qu'il n'y aura aucune possibilité de déblocage anticipé, même en cas de chômage
prolongé. Bref, on ajoute une couche supplémentaire, si je puis dire, à des
fonds qui vont alimenter les marchés financiers sans possibilité pour les
salariés, qui en auraient besoin d'anticiper sur leur retraite.
On nous propose donc, ni plus ni moins, de geler et de distraire du circuit de
la consommation, du développement et de la protection sociale - on parle ainsi
de 6 milliards de francs de pertes sèches sur les trois caisses de la sécurité
sociale - des sommes de plus en plus importantes et donc d'accroître encore les
phénomènes macroéconomiques récessifs que j'évoquais à l'instant. Ce serait une
bonne raison de rejeter cette proposition de loi.
Il en est d'autres.
Je n'insisterai pas sur la mise en place des fonds de pension au regard de la
négociation collective, le débat ayant montré que, en fin de compte, le
dirigeant d'entreprise a la possibilité d'imposer ses choix de façon
unilatérale.
Je n'insisterai pas plus sur le fait que les plans d'épargne retraite
s'adressent d'abord aux salarés en activité, ce qui revient à placer « hors jeu
» les très nombreux chômeurs qui existent dans notre pays.
Je n'insisterai pas davantage sur le fait qu'ils s'adressent à ceux des
salariés qui ont suffisamment de capacités d'épargne pour laisser sur un fonds
de pension, au moins jusqu'à l'âge de soixante ans, des sommes de plus en plus
élevées.
Je dirai simplement que cette proposition de loi porte en germe, certes non
pas pour aujourd'hui, mais à terme, l'affaiblissement de l'importance donnée à
la retraite par répartition. Elle fait moins de place à l'esprit de solidarité
et renforce dans l'idée de nos concitoyens, notamment des jeunes, le sentiment
que l'avenir est une affaire individuelle et que les retraites se constituent
individuellement.
Nous ne voterons donc pas ce texte, parce que nous le considérons comme
socialement injuste, économiquement inutile et culturellement inadapté au
comportement de nos compatriotes.
M. le président.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
En fait, notre explication de vote, nous l'avons faite depuis ce matin tout au
long du débat, mais, s'il me fallait trouver maintenant une formule plus
ramassée, je serais tenté de dire que je suis au moins d'accord avec M. le
rapporteur lorsqu'il dit que nous sommes dans deux logiques différentes qui
procèdent de deux philosophies différentes.
Pour nous, l'application de cette proposition de loi aura de nombreux effets
négatifs : une perte de recettes pour les régimes de retraite de base et
complémentaire, ce qui constituera une menace pour leur équilibre financier ;
l'institution de disparités entre salariés d'une même entreprise ou
d'entreprises différentes selon les initiatives patronales quant à l'abondement
des fonds de pension ; l'établissement d'une inégalité croissante entre assurés
sociaux et donc d'une inégalité encore plus forte au moment de la vieillesse ;
au bout du compte, l'instauration d'une retraite à plusieurs vitesses, avec un
système par répartition minimum.
Au demeurant, ce n'est pas d'un gonflement de l'épargne que notre économie a
besoin, c'est d'une relance de la consommation.
Sur le plan financier, la soumission partielle des plans d'épargne retraite et
de leur évolution aux aléas de la conjoncture fait prendre un très grand risque
aux assurés et à eux seuls.
Pour toutes ces raisons schématiquement rappelées parmi bien d'autres, le
groupe socialiste votera contre cette proposition de loi.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je voudrais réparer un oubli. Lors de l'examen de l'article
23, j'ai en effet omis de reprendre l'amendement qu'avaient déposé nos
collègues MM. Laffitte et Joly et qui était relatif aux placements en parts de
fonds communs de placement pour l'innovation, les FCPI.
Ces instruments, qui ont été d'ailleurs améliorés par la loi de finances pour
1997, permettent aux particuliers, par le biais d'incitations fiscales,
d'abonder les fonds propres des entreprises innovantes.
Nos collègues proposaient qu'une certaine fraction des actifs du fonds
d'épargne retraite puisse être constituée de parts de FCPI.
Nous nous sommes exprimés longuement sur les ratios prudentiels, et je
souhaite que soit conservée une approche cohérente de ce sujet.
Néanmoins, monsieur le ministre, je pense que cette idée, même si la rédaction
proposée n'était pas tout à fait satisfaisante, est très intéressante et
qu'elle mérite d'être étudiée. Peut-être conviendrait-il que, dans un futur
texte portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, par
exemple, la question ayant été examinée de manière plus approndie, soient
prévues des dispositions allant dans le sens qui était souhaité par MM.
Laffitte et Joly.
Je veux maintenant remercier tous ceux de nos collègues qui ont participé à ce
débat.
J'estime que la commission des finances, dans le court laps de temps qui lui a
été donné, a bien travaillé. Mais elle a été bien appuyée par tous les groupes
du Sénat, quelles que soient leur position sur le fond, car nos discussions ont
permis de traiter les différents aspects du sujet, de sorte que les
spécialistes de ces questions et les praticiens pourront disposer, le moment
venu, d'éléments précis quant à la volonté du législateur.
Je tiens également, monsieur le ministre, à vous exprimer ma gratitude pour le
sens du dialogue dont vous avez su faire montre, ainsi que M. Jean Arthuis.
Nous sommes parvenus, sur certains points, à dégager des solutions qui tenaient
compte de nos approches respectives.
Je n'ai aucun doute quant à la poursuite de ce processus au sein de la
commission mixte paritaire, puis lors de l'examen des conclusions de celle-ci
dans les deux assemblées.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
9
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de
constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons
d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et
de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des finances, du contrôle
budgétaire et des comptes économiques de la nation a été affichée conformément
à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Christian Poncelet, Philippe Marini, Guy Cabanel, Alain
Lambert, Roland du Luart, Marc Massion et Paul Loridant.
Suppléants : MM. Denis Badré, Henri Collard, Jacques-Richard Delong, Emmanuel
Hamel, Jean-Philippe Lachenaud, Gérard Miquel et Alain Richard.
10
NOMINATION DE MEMBRES
DE COMMISSIONS
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour
la commission des affaires économiques et du Plan et une candidature pour la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
M. Bernard Piras membre de la commission des affaires économiques et du Plan,
en remplacement de M. Michel Charzat, démissionnaire ;
M. Michel Charzat membre de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale,
en remplacement de M. Bernard Piras, démissionnaire.
11
TRANSMISSION DE PROJETS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le
Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne
concernant la construction et l'exploitation de la section internationale d'une
ligne ferroviaire à grande vitesse entre la France et l'Espagne (façade
méditerranéenne).
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 201, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, autorisant la ratification d'un traité d'entente,
d'amitié et de coopération entre la République française et la République
d'Albanie.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 202, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention entre la
République française et le Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles
impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts
sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 203, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.12
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de MM. Gérard Braun, Philippe François, Jean-Paul Emin et Rémi
Herment, une proposition de loi tendant à prévenir certaines plantations
forestières.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 197, distribuée et renvoyée
à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
13
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTES COMMUNAUTAIRES
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Projet de règlement financier applicable à la coopération pour le financement
du développement en vertu de la quatrième convention ACP-CEE modifiée par
l'accord du 4 novembre 1995.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-776 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement CE n° 1172/95 du
Conseil, relatif aux statistiques des échanges de biens de la Communauté et de
ses Etats membres avec les pays tiers, en ce qui concerne le territoire
statistique.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-777 et
distribuée.
14
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. André Dulait un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur :
- le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord concernant la
protection de l'Escaut (n° 168, 1996-1997) ;
- le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord concernant la
protection de la Meuse (n° 169, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 198 et distribué.
J'ai reçu de M. André Dulait un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi
autorisant l'approbation de la convention sur la protection et l'utilisation
des cours d'eau transfrontières et des lacs internationaux (n° 170,
1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 199 et distribué.
J'ai reçu de M. Paul Masson un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur :
- le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale portant diverses
dispositions relatives à l'immigration (n° 165, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Serge Mathieu relative à la polygamie (n° 86,
1995-1996) ;
- la proposition de loi de M. Serge Mathieu relative au certificat
d'hébergement (n° 451, 1995-1996) ;
- la proposition de loi de M. Christian Demuynck tendant à modifier
l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, relative aux conditions d'entrée et
de séjour des étrangers en France (n° 29, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Serger Mathieu relative au délai de rétention
administrative (n° 41, 1996-1997) ;
- et la proposition de loi de MM. Bernard Plasait, Henri de Raincourt, Jacques
Dominati, Jean-Paul Emin, James Bordas, François Gerbaud, Marcel-Pierre Cleach,
Ambroise Dupont, Mme Nelly Olin, MM. Serge Franchis, Michel Doublet, Roger
Besse, Rémi Herment, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean Clouet, Jean-Pierre
Schosteck, André Égu, Nicolas About, Alain Gournac, Michel Pelchat, Bernard
Barbier, Jacques Delong, Jean-Claude Carle, Charles-Henri de Cossé-Brissac,
François Trucy, Michel Caldaguès, Emmanuel Hamel, François Mathieu, Edmond
Lauret, Roger Husson, Martial Taugourdeau, Jean Bernard, Charles Ginésy, Jean
Pourchet, Alain Gérard, Robert Calmejane, Philippe de Gaulle, Christian
Demuynck, Alain Vasselle et Hubert Haenel, tendant à renforcer les moyens de
contrôle des certificats d'hébergement (n° 96, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 200 et distribué.
15
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Claude Huriet un rapport d'information fait au nom de la
commission des affaires sociales à la suite de la mission d'information sur les
conditions du renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité
sanitaire des produits destinés à l'homme en France.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 196 et distribué.
16
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mardi 4 février 1997 :
A neuf heures trente :
1. Questions orales sans débat suivantes :
I. - M. Daniel Hoeffel attire l'attention de M. le ministre délégué à la
jeunesse et aux sports sur l'utilisation des crédits accordés à l'office
franco-allemand pour la jeunesse au titre de l'année 1996.
A la suite de l'annonce, il y a un an, de la diminution de 5 % du budget de
cet organisme, la commission des finances de l'Assemblée nationale lui avait
accordé une subvention d'un million de francs au titre de la réserve
parlementaire, aussitôt suivie par le Bundestag allemand qui avait accordé une
somme équivalente.
Or il semble que cette subvention ait été finalement utilisée à d'autres fins
par le ministre de la jeunesse et des sports.
Cette situation appelle plusieurs questions :
Comment est-il possible que cette subvention parlementaire ait pu être
réaffectée sur décision du Gouvernement et quelle en a été l'utilisation ?
Comment le ministre compte-t-il compenser le manque à gagner d'une valeur de 2
millions de francs qui en résulte pour l'office franco-allemand pour la
jeunesse, dont le rôle essentiel dans la concrétisation de la construction
européenne et dans la coopération franco-allemande n'est plus à démontrer et
devrait au contraire être soutenu ? (N° 507.)
II. - M. Gérard Larcher attire l'attention de M. le ministre de l'équipement,
du logement, des transports et du tourisme sur les difficultés rencontrées par
certaines communes suite à la décision de l'Etat de geler les autorisations de
programme d'investissement à hauteur de 80 milliards de francs en 1996. A titre
d'exemple, sur la commune de Jouars-Pontchartrain, dans les Yvelines, traversée
par la RN 12, l'Etat a engagé un important chantier pour permettre
l'indispensable déviation de la commune. Ce dossier a mis des années à
aboutir.
Or le gel des autorisations de programme risque d'entraîner des conséquences
néfastes sur l'avancement du chantier et l'Etat risque de payer des pénalités
lourdes en cas de retard, notamment de paiement.
En conséquence, il lui demande quelles dispositions il compte prendre afin que
les chantiers engagés ne se prolongent pas dans le temps avec les conséquences
économiques et sociales sur la vie même des communes concernées et que les
délais soient respectés. (N° 517.)
III. - M. Jean Boyer attire l'attention de M. le ministre du travail et des
affaires sociales sur le statut des bénévoles, qui, par définition, exercent
une activité à titre gracieux soit de manière occasionnelle, soit de manière
continue.
Il cite, à titre d'exemple, le cas précis de l'association culturelle du
festival Berlioz, dont il est le président. Cette association, qui est régie
par la loi de 1901, organise, dans le cadre de ses activités statutaires, une
semaine de concerts par an. Pour l'organisation matérielle de cette
manifestation, elle fait appel à cent cinquante bénévoles, membres de
l'association, non rémunérés pour les tâches qu'ils accomplissent. Ils
attestent de leur bénévolat par écrit.
Dans le cas où un accident surviendrait à l'une de ces personnes,
l'association peut-elle être considérée comme employeur de fait ? Ces bénévoles
sont-ils assujettis ou non assujettis à la législation du travail ?
De nombreuses associations culturelles étant confrontées à d'identiques
problèmes, il lui demande de bien vouloir lui apporter des éclaircissements
indispensables, afin que le statut des bénévoles soit clairement défini. (N°
525.)
IV. - M. Jean Boyer attire l'attention de M. le ministre de la culture sur le
taux de TVA applicable à la mise à disposition de matériel d'orchestre. Il
semblerait qu'une incertitude existe conduisant tantôt à appliquer le taux de
20,6 %, tantôt à retenir celui de 5,5 %, dans la mesure où la mise à
disposition de matériel d'orchestre est une location de livres de musique -
livrets ou partitions d'oeuvres musicales. La différence de coût résultant de
l'application de l'un ou de l'autre taux est assez substantielle, notamment
pour les budgets étudiés au mieux des associations organisatrices de festivals
musicaux, pour justifier l'édiction de règles fiscales dépourvues d'ambiguïté.
(N° 526.)
V. - M. Gérard Delfau demande à M. le ministre du travail et des affaires
sociales quelles dispositions ont été prises pour la mise en place des
médicaments génériques, dans le cadre de la maîtrise des dépenses de santé.
D'autre part, il lui demande dans quelle mesure les pouvoirs publics se sont
appuyés sur les expériences et les actions menées par le secteur associatif et
mutualiste dans ce domaine. Enfin, il voudrait savoir s'il a l'intention de
développer fortement cette politique avant le lancement de l'Agence du
médicament. (N° 531.)
VI. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre délégué au
budget sur les modalités de prélèvement de la contribution de quinze communes
de l'Essonne au fonds de solidarité des communes de la région
d'Ile-de-France.
La notification de cette contribution leur est parvenue au moment où ces
communes ont déjà voté leur budget primitif.
Dès 1995, afin de compléter l'imprimé fiscal 1259, ces communes se sont
renseignées auprès de leur centre départemental d'assiette et ont eu
confirmation d'un prélèvement devant intervenir à la source, c'est-à-dire en
amont du calcul du produit fiscal attendu pour l'équilibre de leur budget.
Les communes ont eu la désagréable surprise de constater un déficit sur leur
compte 777 - produits des impôts - d'un montant correspondant à la somme
annoncée au bénéfice du fonds de solidarité.
Ainsi, il s'avère que, contrairement aux instructions reçues, ce prélèvement a
été effectué sur le produit attendu, ce qui a eu pour effet de mettre leur
compte administratif en déséquilibre.
De plus, les notifications pour 1996 ont donné lieu à une première information
en février, avec une prévision de répartition des bénéficiaires dont les
communes ont tenu compte lors de l'élaboration de leur budget primitif, et à
une seconde, en avril, qui a majoré le premier montant, alors même que les
recettes des impôts étaient déjà votées.
Il semble donc que cette contribution, déduite des recettes des communes, soit
considérée comme une dépense obligatoire. En tant que telle, elle ne devrait
pas figurer sur l'état 1259, mais faire l'objet d'une inscription budgétaire, à
une ligne à définir dans le cadre comptable, le produit fiscal communal attendu
incluant cette dépense.
C'est pourquoi il lui demande s'il ne pourrait pas être envisagé une
présentation comptable différente de cette contribution, libellée en tant que
dépense obligatoire dans le compte administratif ; cela faciliterait une
meilleure compréhension du budget par les habitants de ces communes et
éviterait tout risque de déséquilibre financier du budget communal. (N°
532.)
VII. - M. Léon Fatous interpelle M. le garde des sceaux, ministre de la
justice, sur la situation des juridictions d'Arras.
Celles-ci - tribunal de grande instance d'Arras, tribunaux d'instance d'Arras
et de Saint-Pol-sur-Ternoise - ont dix-neuf postes budgétaires de magistrat,
soit quinze magistrats du siège et quatre magistrats du parquet.
Or 20 % des postes sont vacants et aucune nomination n'a été envisagée dans
les dernières propositions de nominations faites par le ministère en 1996.
De plus, le nombre des affaires nouvelles pour le contentieux civil du
tribunal de grande instance est passé de 1 856 en 1992 à 2 663 en 1996.
Les magistrats du siège rencontrent de plus en plus de difficultés pour
répondre aux demandes légitimes des justiciables.
Quelles mesures compte prendre le ministère ? (N° 533.)
VIII. - Mme Marie-Claude Beaudeau demande à M. le ministre des petites et
moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat quelles mesures il envisage
de prendre pour faire respecter l'article 13 de la loi n° 96-603 du 5 juillet
1996, relative au développement et à la promotion du commerce et de
l'artisanat, prévoyant des mesures dérogatoires dans les centres urbains dotés
d'une ZAC, zone d'aménagement concerté, dans les communes de plus de 40 000
habitants, dans le dossier de la ZAC du centre d'Argenteuil - Val-d'Oise -
ainsi que dans toutes les villes concernées par l'application de l'article 13.
(N° 534.)
IX. - M. André Vallet attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, du
logement, des transports et du tourisme sur la situation de la ville de
Salon-de-Provence au regard des grands axes de circulation.
Il lui rappelle que, voilà près de trente ans, la première tranche de la
déviation Nord-Sud de la ville de Salon-de-Provence a été achevée. Depuis lors,
la ville attend la réalisation de la deuxième tranche, qui permettrait de
désengorger les quartiers les plus peuplés de Salon par lesquels transite ce
trafic.
Il lui indique que la construction de cette deuxième tranche de la déviation
de la ville constitue la priorité absolue de la ville, qui est étouffée par
cette circulation de transit.
Dès lors, il lui demande si la réalisation de ce projet doit être, dans les
prochains mois, prise en compte par le ministère de l'équipement. (N° 535.)
X. - M. André Vezinhet souhaite obtenir de M. le ministre de l'équipement, du
logement, des transports et du tourisme des informations concernant un projet
de réforme en préparation dans ses services qui s'inscrirait dans le cadre de
la réforme de l'Etat, viserait à la simplification des documents d'urbanisme et
aboutirait à un projet de loi portant réforme du permis de construire.
Il fait part au ministre de l'émotion qu'a suscitée auprès des architectes et
de leur ordre cette nouvelle, qu'ils ont apprise avec stupéfaction par voie de
presse, en l'absence de toute consultation préalable de leur profession par le
ministère de l'équipement.
En outre, il indique au ministre que, à l'occasion du changement de tutelle,
l'ordre des architectes a repris le dialogue avec le ministre de la culture et
que, depuis l'automne 1996, se sont régulièrement tenues des réunions
bipartites entre la direction de l'architecture et la profession, en vue de
modifier la loi du 3 janvier 1977 et, en particulier, de supprimer les seuils
de recours obligatoire à l'architecte.
Or il apparaît que l'avant-projet de loi du ministère de l'équipement, sous
couvert d'une simplification des rapports du citoyen avec l'administration,
prévoit notamment d'exclure du champ d'application du permis de construire les
constructions neuves inférieures à 250 mètres carrés ainsi que les travaux de
rénovation.
Une telle orientation irait donc totalement à l'encontre de ce que souhaitent
les architectes qui ont manifesté leur totale désapprobation sur le fond et sur
la méthode utilisée, exprimée par le Conseil national de l'ordre des
architectes et les conseils régionaux, dont celui de Languedoc-Roussillon.
Il demande donc au ministre de bien vouloir lui apporter tous les
éclaircissements nécessaires qui soient de nature à répondre aux doutes et au
mécontentement de la profession des architectes. (N° 536.)
XI. - M. René Rouquet appelle l'attention de Mme le ministre de
l'environnement sur les conséquences de l'alerte à la pollution de niveau 2
déclenchée par Airparif le 13 janvier dernier, qui a mis directement en cause
la centrale à combustion EDF de Vitry-sur-Seine, celle-ci se voyant
immédiatement contrainte de réduire sa production de moitié.
Incriminée, comme lors d'une précédente alerte au dioxyde de soufre intervenue
en novembre 1995, cette centrale est située dans le périmètre direct d'une zone
fortement urbanisée, sur un secteur où sont déjà concentrées de nombreuses
industries polluantes, et qui est voué à accueillir prochainement, outre une
turbine à combustion, une usine d'incinération dont le principe vient d'être
voté par l'assemblée départementale.
Face à une telle concentration de nuisances atmosphériques qui portent une
atteinte grave à la santé de milliers d'habitants de ce secteur, et plus
particulièrement des communes d'Alfortville, de Choisy-le-Roi, de
Maisons-Alfort et de Vitry, il lui demande en conséquence si elle est
déterminée à mener le combat, avec les élus et les populations concernées, pour
s'opposer à la construction de cette usine d'incinération. (N° 537.)
XII. - M. Philippe Richert attire l'attention de M. le ministre des petites et
moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat sur la loi du 5 juillet
1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat,
portant sur la réforme de l'urbanisme commercial - dont les décrets
d'application ont été publiés en décembre 1996 - et plus particulièrement sur
la question des demandes déposées devant les commissions départementales
d'équipement commercial.
Il lui rappelle que la loi précise que c'est l'emploi qui est pris comme un
des critères majeurs d'attribution. Ainsi, il paraît important, avant
d'attribuer les autorisations à des grandes surfaces notamment, de considérer
la rentabilité globale du centre commercial dans lequel elles désirent
s'installer.
L'exemple du centre Parinor, situé dans la Seine-Saint-Denis, mérite d'être
signalé. Celui-ci, opérationnel depuis 1974, a eu une rentabilité croissante
jusqu'en 1991, mais celle-ci s'est infléchie par la suite. De nouveaux
investissements ont eu lieu, créant de nouveaux emplois et, aujourd'hui, tous
les secteurs commerciaux confondus semblent satisfaits, et l'installation
d'autres grandes surfaces sur ce site pourrait infléchir davantage la
rentabilité du centre Parinor. Moins de rentabilité est synonyme à terme de
moins d'emplois.
Aussi il lui demande quelle recommandation le ministre des petites et moyennes
entreprises, du commerce et de l'artisanat donnerait aux autorités locales
chargées d'instruire les dossiers et d'attribuer les autorisations, pour
qu'elles harmonisent rentabilité et emploi, dans la perspective
d'installations, peut-être hasardeuses, de grandes surfaces, sachant qu'il n'y
a aucune vertu à ajouter une concurrence lorsque l'offre est remplie. (N°
538.)
XIII. - M. Bernard Barraux appelle l'attention de M. le ministre des petites
et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat sur la loi du 5 juillet
1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat,
portant sur la réforme de l'urbanisme commercial, qui a prévu l'établissement
d'un programme national de développement et de modernisation des activités
commerciales et artisanales par le Gouvernement, qui est, en fait, un plan
d'occupation des sols au niveau des centres commerciaux urbains.
Il lui précise que cette mesure traduit la volonté du Parlement d'équilibrer
le paysage commercial français, de régler les questions de concurrence et
d'harmoniser la liberté d'entreprendre et que ces réformes, engagées au
printemps dernier, ne doivent pas se borner à accroître la rente de situation
des grandes chaînes de magasins déjà installées.
Il lui demande, en conséquence, s'il ne serait pas judicieux de demander aux
autorités compétentes en matière d'urbanisme commercial et de concurrence - à
savoir les préfectures, la direction générale de la consommation, de la
concurrence et de la répression des fraudes, la DGCCRF, les commissions
départementales d'équipements commerciaux - d'endiguer les excès de la grande
distribution et ses pratiques souvent déloyales, notamment en excluant
de
facto
le dossier d'implantation d'une enseigne de très grande distribution
qui tenterait de s'installer, en toute déloyauté, devant une enseigne plus
modeste, mais dont les efforts et les investissements sont avérés.
Il lui indique que cette situation se produit souvent, trop souvent, et ruine
non seulement l'emploi local mais aussi l'esprit d'entreprise. (N° 539.)
XIV. - Un nombre de plus en plus élevé de structures culturelles, fonctionnant
sous forme d'associations régies par la loi 1901, sont soumises à des contrôles
et à des redressements fiscaux. Les activités culturelles sont ainsi
assimilées, par les services du fisc, à des activités commerciales. De fait,
les associations doivent être assujetties à l'impôt sur les sociétés, à la taxe
professionnelle et à la taxe d'apprentissage.
Cette vision erronée et à courte vue des activités culturelles, uniquement
fondée sur la recherche de nouveaux « gisements » fiscaux, menace l'existence
même de très nombreuses structures culturelles. Elle constitue également une
remise en cause du système français de financement de la culture, des arts, que
l'on caractérise par l'expression « exceptionnalité française ».
En conséquence, M. Ivan Renar demande à M. le ministre de la culture les
mesures qu'il compte prendre pour s'opposer à de telles pratiques et protéger
les structures menacées. (N° 540.)
XV. - M. Yann Gaillard attire l'attention de M. le ministre du travail et des
affaires sociales sur les difficultés que représente la recherche d'un premier
emploi pour les jeunes diplômés. Le maître mot des recruteurs est l'expérience.
Mais comment, au sortir de l'université, justifier de deux ou trois années
passées en entreprise, comme l'exigent les employeurs ? On pourrait penser que
les stages effectués tout au long de l'enseignement supérieur ou, tout au
moins, le stage de fin d'études permettent de pallier en partie ce manque
d'expérience professionnelle. Or ceux-ci ne sont que très peu reconnus et par
conséquent ne facilitent pas systématiquement l'accès à l'emploi, ce qui est
regrettable.
Les organismes comme l'Agence nationale pour l'emploi ou l'Association pour
l'emploi des cadres, qui font l'interface entre les entreprises et les
demandeurs d'emploi et qui sont confrontés aux exigences de plus en plus
pointues des entreprises, notamment en matière d'expérience, observent
scrupuleusement ces demandes et ont tendance à ne transmettre que les
curriculum vitae
en tout point identiques aux voeux des employeurs.
L'absence d'expérience à proprement parler est alors un barrage insurmontable
qui ne permet même pas aux jeunes de postuler et d'acquérir, peut-être, cette
expérience tant recherchée. Conscient que c'est aux employeurs qu'il appartient
de donner leur chance aux jeunes, il lui demande ce qu'il entend faire pour
sensibiliser les entreprises sur la nécessité d'embaucher de jeunes diplômés et
pour revaloriser les stages aux yeux des recruteurs. (N° 542.)
XVI. - Mme Hélène Luc tient à attirer l'attention de M. le ministre de
l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les
conditions prévisibles de la prochaine rentrée scolaire. La restriction
drastique des moyens inscrits dans le budget de 1997, avec notamment la
suppression de 5 094 emplois d'enseignant et de 196 postes de personnels
administratifs, techniciens, ouvriers et de service - ATOS - ne permettra pas
d'assurer la rentrée autrement que dans des conditions profondément dégradées.
Les mesures de carte scolaire annoncées dans chaque département - par exemple
dans le Val-de-Marne 105 fermetures de classes - confirment les graves carences
du budget qu'au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen
elle avait dénoncées en décembre dernier.
Les nombreuses fermetures de classes et la suppression d'heures d'enseignement
vont affaibir gravement le service public d'éducation, de recherche et de
culture. Aucune des missions importantes de celui-ci, notamment la lutte contre
l'exclusion, contre l'inégalité pour l'accès à une formation et une insertion
de qualité pour chaque enfant, ne pourra être menée sans l'engagement de moyens
nouveaux et conséquents passant par la création de postes d'enseignants et de
non-enseignants.
C'est pourquoi elle lui demande, comme l'ensemble des partenaires de la
communauté éducative, de prévoir dans les plus brefs délais un collectif
budgétaire pour l'éducation nationale afin d'assurer une rentrée scolaire
satisfaisante. (N° 543.)
XVII. - M. Jean-Pierre Demerliat rappelle à M. le ministre de l'aménagement du
territoire, de la ville et de l'intégration qu'au cours de cette année 1997 la
base aérienne 274 de Limoges-Romanet va fermer ses portes. Seulement une
soixantaine d'agents, sur les 140 personnels civils employés sur le site, ont
bénéficié d'un reclassement à Limoges ou dans le département, ce qui veut dire
que les autres devront très certainement chercher un emploi ailleurs.
Les militaires, cadres et appelés, ainsi que leur famille, vont eux aussi
quitter Limoges et la Haute-Vienne.
D'une part, des menaces semblent peser sur la circonscription militaire de
défense, ou CMD, de Limoges.
Créée en 1991, dans le cadre du plan Armée 2000 lancé par M. Pierre Joxe,
alors ministre de la défense, l'installation de la CMD s'était traduite par
l'arrivée d'environ 450 familles - de militaires et de civils - et également
par d'importants travaux, notamment sur le site de Beaublanc et de la
Visitation, travaux représentant plus de 40 millions de francs.
Si la CMD de Limoges disparaît, cela se traduira bien évidemment par le départ
de familles à revenus, disons convenables, dont pâtira bien évidemment
l'économie locale.
Si l'on ajoute à cela les réticences nouvelles du Centre national
d'aménagement des structures des exploitations agricoles - CNASEA - à quitter
Issy-les-Moulineaux pour Limoges, comme cela avait été décidé par le comité
interministériel d'aménagement du territoire du 26 janvier 1992 et confirmé par
le conseil d'administration dudit CNASEA le 28 juin 1994, si l'on ajoute
également les difficultés que rencontrent certaines entreprises du secteur
privé - porcelaine, habillement, etc. - on constate que, depuis deux ou trois
ans, Limoges et la Haute-Vienne voient leur potentiel économique s'affaiblir de
manière importante et inquiétante.
En tant que responsable de l'aménagement du territoire, il lui serait
reconnaissant de bien vouloir tout mettre en oeuvre pour pallier les graves
conséquences de ces nombreuses disparitions d'emplois qui frappent durement le
département de la Haute-Vienne. (N° 544.)
XVIII. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de la culture
sur les conséquences néfastes qu'aurait la construction d'un multiplex
cinématographique à Paris sur le pluralisme culturel de la capitale. Celle-ci
mettrait en péril nombre de salles à Paris et en banlieue.
Ces mégacomplexes induisent une structuration de la ville : de vastes zones,
des quartiers entiers, voire des arrondissements, déserts le soir et des
quartiers dits « spécialisés ».
De plus, il semble que le préfet, qui préside la commission d'équipement
cinématographique de Paris, auprès de laquelle la société Gaumont a déposé une
demande d'autorisation, n'ait pas pris, comme le prévoit la loi, un arrêté
fixant la composition de ladite commission.
Ce serait extrêmement grave puisque, pour se prononcer sur un tel projet,
cette commission présidée par le préfet doit se voir remettre par la société
qui demande l'autorisation une étude permettant d'apprécier l'impact prévisible
du projet.
Le délai pour que la commission donne son avis a donc toutes les chances
d'être forclos.
En effet, le décret d'application du 20 décembre 1996, dans son article 16,
prévoit que si aucune décision n'a été adressée au demandeur avant la date
fixée l'autorisation est réputée accordée.
Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce qu'il compte faire afin d'entamer
sans délai une large concertation avec les professionnels du cinéma et faire en
sorte que la commission d'équipement cinématographique soit réunie à ce
sujet.
Elle lui demande également si ses services ont eu connaissance de cette
demande d'autorisation et, si c'est le cas, comment elle a été instruite. (N°
545.)
A seize heures et le soir :
2. Discussion du projet de loi (n° 165, 1996-1997), adopté par l'Assemblée
nationale, portant diverses dispositions relatives à l'immigration.
Rapport (n° 200, 1996-1997) de M. Paul Masson, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 3 février 1997, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 4 février 1997, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
commission des affaires économiques
166 de M. Georges Gruillot et plusieurs de ses collègues complétant la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990 relative au contrat de construction d'une maison individuelle.
commission des affaires sociales
193 (1996-1997) relative aux conditions d'éligibilité pour les élections aux caisses d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales.
commission des finances
171 (1996-1997) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement
de la République française et le Gouvernement de la Jamaïque en vue d'éviter
les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en
matière d'impôts sur le revenu.
M. Emmanuel Hamel a été nommé rapporteur du projet de loi n° 172 (1996-1997)
autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement du Canada tendant à éviter les
doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le
revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975 et modifiée par l'avenant du 16
janvier 1987.
M. Bernard Barbier a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 167
(1996-1997) de M. Bernard Barbier tendant à appliquer progressivement sur cinq
ans le taux réduit de TVA à l'ensemble des produits de chocolaterie.
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale
M. Jean-Marie Girault, pour le projet de loi n° 2938 (Assemblée nationale),
adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, portant réforme de la
procédure criminelle ;
M. Paul Girod, pour la proposition de loi n° 180 (1996-1997), adoptée par
l'Assemblée nationale, facilitant la création d'établissements publics locaux
;
M. Daniel Hoeffel, pour la proposition de loi n° 151 (1996-1997) de M. Nicolas
About tendant à modifier les dispositions du code civil relatives à la
prestation compensatoire en cas de divorce ;
M. José Balarello, pour la proposition de loi n° 164 (1996-1997) de MM. Serge
Mathieu, Henri Revol et Jean Boyer visant à interdire le port du voile
islamique à l'intérieur des établissements de l'enseignement public ;
M. Lucien Lanier, pour la proposition de loi n° 182 (1996-1997) de M.
Christian Demuynck tendant à interdire l'importation, l'élevage, le trafic et
la détention d'animaux susceptibles de présenter un danger aux personnes sur le
territoire français ;
M. Charles de Cuttoli, pour la proposition de loi n° 183 (1996-1997) de M.
Jean-Pierre Cantegrit tendant à reporter temporairement le renouvellement de
quatre membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger élus dans la
circonscription d'Algérie.
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
Jean Faure, Bernard Hugo, André Jourdain et Germain Authié pour siéger au sein du Conseil national de la montagne.
NOMINATIONS DE MEMBRES
DE COMMISSIONS PERMANENTES
Michel Charzat, démissionnaire ;
Bernard Piras, démissionnaire.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Contrôles sur le financement des activités culturelles
540.
- 21 janvier 1997. - Un nombre de plus en plus élevé de structures
culturelles, fonctionnant sous forme d'associations régies par la loi 1901,
sont soumises à des contrôles et à des redressements fiscaux. Les activités
culturelles sont ainsi assimilées, par les services du fisc, à des activités
commerciales. De fait les associations doivent être assujetties à l'impôt sur
les sociétés, à la taxe professionnelle et à la taxe d'apprentissage. Cette
vision erronée et à courte vue des activités culturelles, uniquement fondée sur
la recherche de nouveaux « gisements » fiscaux menace l'existence même de très
nombreuses structures culturelles. Elle constitue également une remise en cause
du système français de financement de la culture, des arts, que l'on
caractérise par l'expression « exceptionnalité française ». En conséquence,
M. Ivan Renar
demande à
M. le ministre de la culture
les mesures qu'il compte prendre pour s'opposer à de telles pratiques et
protéger les structures menacées.
Procédure de répartition des dépenses de fonctionnement
des écoles primaires entre communes d'accueil
et communes de résidence
546.
- 29 janvier 1997. -
M. Jean-Paul Delevoye
attire l'attention de
sur l'article 23 de la loi du 22 juillet 1983, modifié en 1985 et 1986, qui a
permis, pour l'essentiel, de régler le problème de la répartition des dépenses
de fonctionnement pour les écoles primaires entre la commune d'accueil et la
commune de résidence de l'enfant, en tenant compte des intérêts des familles.
Le dispositif repose sur une contribution obligatoire de la commune de
résidence lorsque la capacité d'accueil de ses établissements scolaires ne lui
permet pas la scolarisation des enfants concernés ou en cas d'accord du maire
de celle-ci, ou encore lorsque l'on se trouve dans un des cas de dérogation
prévus par la loi. Ce dispositif, basé sur la concertation et l'accord entre
communes, constitue une solution viable et globalement satisfaisante, même si
de nombreuses difficultés locales subsistent. Néanmoins, les procédures de
conciliation ne sont pas toujours correctement appliquées par les communes
d'accueil dont certaines peuvent avoir tendance à adresser aux communes de
résidence la facture, avec quelques mois de décalage, sans qu'aucun autre
contact n'ait été pris et sans que les représentants de l'Etat s'en émeuvent.
Il semble également que nombre de cas de dérogation reconnus par les communes
d'accueil ne soient pas fondés et que les formalités de saisine du préfet ne
soient pas respectées. En conséquence, il lui suggère de rappeler aux préfets,
et à travers eux aux maires, le contenu et l'esprit de la loi, en particulier
la nécessité d'une véritable concertation. Il souhaite également qu'une
circulaire puisse rapidement systématiser l'information de la commune de
résidence par la commune d'accueil préalablement à l'inscription. Enfin, il lui
apparaît nécessaire qu'à l'avenir les préfets puisssent demander
systématiquement chaque année au Conseil de l'éducation nationale de faire une
recommandation s'agissant du montant de la contribution par élève. Cette
procédure est déjà mise en oeuvre avec succès dans certains départements tels
que l'Aisne.
Régime de retraite des personnels pénitentiaires de surveillance
547.
- 29 janvier 1997. -
M. Jean-Paul Delevoye
interroge
M. le garde des sceaux, ministre de la justice,
sur les conditions de mise en oeuvre de l'article 24 de la loi n° 96-542 du 28
mai 1996, relatif au régime particulier de retraite en faveur des
fonctionnaires appartenant aux corps du personnel de surveillance, dit
bonification du cinquième. Les modalités d'application sont fixées par une
circulaire du directeur de l'administration pénitentiaire en date du 29
novembre 1996 et celle-ci précise que les dispositions législatives précitées «
sont applicables aux fonctionnaires rayés des cadres à compter du 31 mai 1996
». Cela peut sembler logique mais cela va à l'encontre d'un engagement pris par
l'administration pénitentiaire à l'égard des personnels intéressés. Dès le mois
d'octobre 1995, la lettre d'information de cette administration, dénommée «
Etapes » précisait : «les dispositions transistoires s'appliqueront du 1er
janvier 1996 au 31 décembre 1999 ». A ce moment, le Parlement n'avait pas
encore été saisi du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre
sanitaire et statuaire. Cet engagement était donc pris en toute connaissance de
cause. D'ailleurs, dans une lettre en date du 15 mai, alors que ce projet de
loi venait d'être adopté par l'Assemblée nationale et que le Sénat n'en avait
pas encore débatu, le directeur de l'administration pénitentiaire confirmait :
«le texte n'a pas été encore promulgué et n'est donc pas applicable en l'état.
Toutefois, dès sa promulgation, ce texte législatif sera d'application au 1er
janvier 1996 ». Le respect de cet engagement concernerait environ une centaine
d'agents qui ont cru, de bonne foi, pouvoir profiter du cinquième. Il demande à
M. le Garde des Sceaux de veiller au respect de la parole donnée en ce
domaine.
Réglementation en matière d'attribution des licences IV
définies par le code des débits de boisson
548.
- 29 janvier 1997. -
M. Jean-Paul Delevoye
souhaite alerter
M. le ministre délégué à la ville et à l'intégration
sur un grave effet pervers de la réglementation actuellement en vigueur en
matière d'attribution de licences IV dans les communes rurales. Actuellement,
l'article 41 du code des débits de boisson interdit le transfert hors commune
de la dernière licence IV attribuée dans une commune donnée, lorsque le dernier
café ferme. Cela semble favorable à l'aménagement du territoire et protecteur
des communes rurales frappées par la désertification. Mais, en réalité, si le
dernier détenteur de la licence IV ne trouve pas repreneur sur place, compte
tenu qu'il ne peut non plus la vendre à l'extérieur, celle-ci devient caduque
après trois ans d'inexploitation, et elle est perdue pour tout le monde. Quant
à la commune elle-même, elle peut naturellement acquérir la licence, mais elle
n'en aura souvent ni le désir ni la possibilité financière, étant frappée par
la désertification et n'ayant aucune certitude de trouver elle-même un
repreneur. Au bout de trois années d'inexploitation, même si la commune
manifeste alors une volonté de renouveau, il est trop tard ; il est devenu
presque impossible de recheter une licence pour deux raisons : le coût,
l'existence d'une licence disponible et surtout transférable, compte tenu des
stricts critères d'éloignement et d'attrait touristique en vigueur. La solution
techniquement simple consisterait à modifier le code des débits de boisson,
afin que les communes ayant perdu leur dernière licence IV depuis plus de trois
ans puissent bénéficier de la création d'une nouvelle licence incessible
qu'elles devraient gérer soit directement, dans un cadre communal, soit
indirectement. Il demande au ministre de lui indiquer l'état de ses réflexions
sur cette question délicate mais très importante pour le développement du monde
rural.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance du jeudi 30 janvier 1997
SCRUTIN (n° 94)
sur l'amendement n° 49, présenté par M. Paul Loridant et les membres du groupe
communiste, républicain et citoyen, à l'article 6 de la proposition de loi,
adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'épargne retraite (suppression
de la possibilité pour les accords collectifs instituant les plans d'épargne
retraite de déroger à l'article L. 132 du code du travail).
Nombre de votants : | 317 |
Nombre de suffrages exprimés : | 316 |
Pour : | 94 |
Contre : | 222 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE, RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre :
17.
Abstention :
M. Robert-Paul Vigouroux.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :
Contre :
94.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Pour :
74.
N'a pas pris part au vote :
M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (60) :
Contre :
59.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :
Contre :
43.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Jean Delaneau, qui présidait la
séance.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Jolle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Claude Haut
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Leguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe Francois
Jean Francois-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Abstention
M. Robert-Paul Vigouroux.
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Delaneau, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 317 |
Nombre de suffrages exprimés : | 317 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 159 |
Pour l'adoption : | 94 |
Contre : | 222 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.