M. le président. M. Dominique Leclerc attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale sur les inquiétudes des pharmaciens à l'égard du projet de décret relatif aux pharmacies à usage intérieur.
Ce décret, qui tend à modifier le code de la santé publique, risque d'être préjudiciable aux officines libérales.
Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui apporter des garanties de nature à le rassurer. (N° 567.)
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention ce matin sur un avant-projet de décret relatif aux pharmacies à usage intérieur, qui est actuellement préparé en application de l'article L. 595-11 du code de la santé publique.
Il apparaît que les conditions de gérance des pharmacies à usage intérieur et les structures d'hospitalisation à domicile susceptibles d'être dotées d'une ou de plusieurs pharmacies à usage intérieur sont remises en question.
En outre, ce document prévoit l'impossibilité, pour un pharmacien libéral, d'assurer la gérance d'un petit établissement proche de son officine.
Par ailleurs, la définition des critères concernant l'implantation d'une pharmacie à usage intérieur est très vague, si l'on en juge par les termes employés, à savoir : « lorsque l'importance de l'activité de la pharmacie à usage intérieur l'exige ».
En assimilant de surcroît les structures d'hospitalisation à domicile à des établissements de santé, les conditions d'ouverture prévues amènent la multiplication des pharmacies à usage intérieur et la création de véritables antennes pharmaceutiques préjudiciables à l'officine libérale.
De plus, dans l'environnement ainsi créé, d'autres services peuvent également apparaître en fonction de telle ou telle pathologie, notamment chronique.
Actuellement, vous le savez, le réseau des officines est menacé dans la qualité du service qu'il rend et dans l'accomplissement de sa mission de santé publique. La marge dégressive lissée, instaurée dans l'optique d'une maîtrise des dépenses de santé, a déstabilisé l'économie de l'officine et menace une répartition géographique jusqu'à présent équilibrée sur l'ensemble du territoire national.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans le même temps, on cherche à transférer dans les pharmacies de villes le service de dispensation des médicaments de la réserve hospitalière, et ce dans l'intérêt des malades, et l'on crée des pharmacies hospitalières hors les murs. Ces mesures sont déstabilisantes et, vous en conviendrez, difficilement compréhensibles pour la profession.
En réalité, monsieur le secrétaire d'Etat, seuls les médicaments restant encore sous le régime de la réserve hospitalière devraient être dispensés par les pharmacies à usage intérieur.
Si de telles mesures, qui nous semblent contradictoires, devaient se multiplier, elles ne manqueraient pas de rendre illisible la politique du Gouvernement vis-à-vis de l'officine. Or la profession ne demande qu'à contractualiser des objectifs bien définis. Cependant, elle ne pourra le faire et n'acceptera de le faire qu'en connaissance de cause. Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, est-il urgent de l'éclairer sur la volonté du Gouvernement à son égard.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Monsieur le sénateur, vous avez, à l'occasion de cette question, évoqué le problème général de l'officine en France. Je puis vous dire que ce gouvernement est le premier à avoir mis sur la table, de manière globale, cohérente et exhaustive, le dossier de l'économie de l'officine.
J'en ai dit quelques mots en répondant tout à l'heure à M. Mouly. Des Ateliers de l'officine travaillent sur le sujet depuis maintenant dix mois. Nous en sommes, en quelque sorte, à la phase définitive de négociation. Avec M. Jacques Barrot, nous avons bon espoir de pouvoir annoncer, dans les prochaines semaines, les mesures qui seront prises à l'issue de cette très large concertation.
Nous sommes bien conscients de l'ensemble des problèmes qui se posent en matière économique comme en matière de santé publique, d'organisation et d'implantation territoriale. A l'issue de cette longue et large concertation, les décisions qui doivent être prises le seront.
Il faut concilier à la fois la liberté d'exploitation économique et la responsabilité de tous les acteurs de santé dans le contexte que nous connaissons. Tel est le cadre général dans lequel doit être considérée l'économie d'officine.
Par ailleurs, le projet de décret relatif aux pharmacies à usage intérieur, qui doit fixer les modalités d'octroi des autorisations accordées pour la création de pharmacies à usage intérieur dans les différentes structures habilitées par la loi, s'appliquera, notamment, aux établissements de santé, y compris les structures de soins alternatifs à l'hospitalisation, et aux établissements médico-sociaux dans lesquels sont traités les malades.
Ce texte est actuellement en phase initiale de concertation avec les professionnels intéressés, notamment les pharmaciens hospitaliers ; il a pour objet de mieux encadrer l'activité pharmaceutique des établissement en question de manière à assurer le meilleur service aux malades ainsi qu'une sécurité sanitaire optimale.
Ce décret ne s'appliquera pas aux officines libérales. Il a cependant été soumis pour avis aux représentants des pharmaciens d'officines libérales afin de lever les éventuelles ambiguïtés qui pourraient résulter de sa rédaction et pour tenir compte de la bonne articulation à préserver entre les différents modes de dispensation du médicament.
Ce texte n'a absolument pas pour objet d'organiser une concurrence déloyale, anarchique, au détriment des officines de villes. On ne peut certainement pas adresser un tel reproche à ce gouvernement, qui aura été celui qui aura fait sortir le plus de médicaments de la réserve hospitalière. Le décret vise uniquement à assurer des conditions optimales de sécurité sanitaire : là où l'on fabrique des médicaments, toutes les garanties doivent être prises. Je ne reviendrai pas sur les errements et les scandales que l'on a pu connaître dans le passé, tout le monde a en mémoire ces douloureux moments.
M. Charles Descours. Très bien !
M. Dominique Leclerc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, qui complète celle que vous avez faite à mon collègue M. Mouly.
Si je vous ai posé cette question ce matin, c'est que, dans les avant-projets de décrets, des contradictions ont été décelées par la profession, contradictions qui ne sont pas supportables dans l'optique d'une politique de dispensation des médicaments par des professionnels qualifiés et, pour cela, bien rémunérés, dans le cadre d'une bonne répartition des officines sur l'ensemble du territoire national. Tout cela est essentiel pour permettre aux pharmaciens de remplir la mission de santé publique qui est la leur. Ceux-ci d'ailleurs ne demandent qu'à participer à cette nouvelle politique « dépensons mieux », définie dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale.
Vous le savez, monsieur le ministre, une bonne pratique médicale implique une relation de confiance entre un patient et un professionnel de santé ; la médecine n'est pas une science exacte.
Aujourd'hui, après avoir redéfini pour nos concitoyens, grâce au Gouvernement, que nous soutenons, de nouveaux objectifs en matière de santé, il nous incombe de déterminer une politique d'avenir lisible pour les différents professionnels. Vous le savez, leur adhésion est indispensable pour répondre à l'ambition que nous avons pour la santé publique de notre pays.
M. Paul Blanc. Très bien !
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