SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Saisine du Conseil constitutionnel
(p.
1
).
3.
Amélioration des relations entre les administrations et le public.
- Discussion d'un projet de loi (p.
2
).
Discussion générale : MM. Dominique Perben, ministre de la fonction publique,
de la réforme de l'Etat et de la décentralisation ; Jean-Paul Amoudry,
rapporteur de la commission des lois ; Guy Cabanel, James Bordas, Jean-Patrick
Courtois, Jacques Mahéas, Robert Pagès.
4.
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire du Mexique
(p.
3
).
5.
Amélioration des relations entre les administrations et le public.
- Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (p.
4
).
Discussion générale
(suite)
: MM. René Régnault, Pierre Laffitte.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre.
Intitulé du titre Ier (p. 5 )
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Article 1er (p. 6 )
Amendement n° 37 de M. Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le
ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 1er (p. 7 )
Amendement n° 33 rectifié de M. Laffitte. - MM. Pierre Laffitte, le rapporteur,
le ministre. - Retrait.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption
de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 2 (p. 8 )
Amendements n°s 4 et 5 de la commission. - Adoption des deux amendements.
Amendement n° 38 de M. Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Amendements n°s 6 de la commission et 29 de M. Vasselle. - MM. le rapporteur,
Alain Vasselle, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 29 ; adoption de
l'amendement n° 6.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 9 )
M. Jacques Mahéas.
Amendements n°s 7 à 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 10 )
Amendement n° 10 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 11 )
Amendement n° 30 de M. Vasselle. - M. Alain Vasselle. - Retrait.
Amendements n°s 11 à 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption des quatre amendements.
Amendement n° 39 de M. Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
M. Jacques Mahéas.
Adoption de l'article modifié.
Article 6 (p. 12 )
Amendements n°s 40 de M. Mahéas et 15 de la commission. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le ministre, Alain Vasselle. - Rejet de l'amendement n° 40 ; adoption de l'amendement n° 15 rédigeant l'article.
Article 7 (p. 13 )
Amendements n°s 16 et 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 7 (p. 14 )
Amendement n° 34 de M. Laffitte. - M. Guy Cabanel. - Retrait.
Amendement n° 31 de M. Vasselle. - MM. Alain Vasselle, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Article 8 (p. 15 )
Amendements identiques n°s 18 de la commission et 41 de M. Mahéas. - MM. le
rapporteur, Jacques Mahéas, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Amendements n°s 19 et 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 (p. 16 )
MM. Jacques Mahéas, le ministre.
Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Amendement n° 42 de M. Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le
ministre. - Rejet.
Amendement n° 32 de M. Vasselle - MM. Alain Vasselle, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Amendement n° 43 de M. Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le
ministre. - Rejet.
Amendements n°s 27 et 28 de M. Pagès. - MM. Robert Pagès, le rapporteur, le
ministre. - Rejet de l'amendement n° 27 et, par scrutin public, de l'amendement
n° 28.
Amendement n° 35 de M. Laffitte. - MM. Guy Cabanel, le rapporteur, le ministre.
- Retrait.
MM. Jacques Mahéas, Philippe de Bourgoing, Michel Rufin, Guy Cabanel, le
ministre.
Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.
Article additionnel avant l'article 10 A (p. 17 )
Amendement n° 1 du Gouvernement et sous-amendement n° 44 de la commission. - MM. le ministre, le rapporteur, Jacques Mahéas. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement, modifié, insérant un article additionnel.
Article 10 A. - Adoption (p.
18
)
Article 10 B (p.
19
)
Amendement n° 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 10 B (p. 20 )
Amendement n° 23 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption
de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 24 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption
de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 10 (p. 21 )
Amendement n° 25 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 11. - Adoption (p.
22
)
Intitulé du projet de loi (p.
23
)
Amendement n° 26 de M. Cabanel. - MM. Guy Cabanel, le rapporteur, le ministre, Emmanuel Hamel. - Rejet.
Vote sur l'ensemble (p. 24 )
MM. Jacques Machet, Robert Pagès, Jacques Mahéas, Jean-Patrick Courtois, Guy
Cabanel.
Adoption du projet de loi.
6.
Dépôt de rapports
(p.
25
).
7.
Ordre du jour
(p.
26
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)
1
PROCE`S-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une
lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été
saisi le 25 février 1997, en application de l'article 61, alinéa 2, de la
Constitution, par plus de soixante sénateurs, d'une demande d'examen de la
conformité à la constitution de la loi créant les plans d'épargne retraite.
Acte est donné de cette communication.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de
la distribution.
3
AMÉLIORATION DES RELATIONS ENTRE
LES ADMINISTRATIONS ET LE PUBLIC
Discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 181, 1996-1997),
adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'amélioration des relations entre
les administrations et le public [Rapport n° 218 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, la réforme de l'Etat constitue l'un des grands chantiers de ce
septennat et l'une des deux principales priorités fixées par le Président de la
République pour l'année 1997. J'ai pu en évoquer les principes devant vous à
l'occasion du débat budgétaire ; mais vous n'avez pas eu encore à vous
prononcer sur un texte. En effet, l'organisation de l'Etat et son
fonctionnement relevant principalement du domaine réglementaire, les premières
réformes engagées par le Gouvernement n'avaient pas à se traduire par des
mesures législatives immédiates.
Le projet de loi qui vous est soumis constitue donc le premier support
législatif de la réforme de l'Etat.
Depuis plus de vingt ans, un certain nombre de réformes importantes ont été
mises en oeuvre pour faciliter le contact entre l'administration et le public,
pour rendre l'administration plus transparente et plus ouverte aux
préoccupations du citoyen. La création du Médiateur et l'extension de ses
pouvoirs, les dispositions prises pour conduire l'administration à communiquer
ses décisions et à mieux les motiver, la protection des individus contre les
déviations possibles des nouvelles technologies, notamment l'informatique, ou
encore l'amélioration des conditions d'accès au juge, toutes ces mesures et
d'autres encore, comme la décentralisation, ont modifié la relation
traditionnelle d'autorité et ont contribué à faire évoluer les esprits.
Mais, parallèlement, pour répondre à la demande de nos concitoyens,
l'intervention de l'Etat et des collectivités publiques s'est considérablement
développée. Alors que le rythme des évolutions technologiques s'amplifie, que
le monde, la France et les Français évoluent, l'Etat doit pourvoir aux besoins
de plus en plus variés des citoyens sur l'ensemble du territoire :
l'enseignement primaire, secondaire et supérieur, la protection sociale, le
logement, la sécurité, etc. A l'évidence, il est l'un des principaux recours
dans une société qui se cherche des repères.
Dans ce contexte, il faut bien reconnaître que trop peu a été entrepris ces
dix dernières années pour faire progresser les droits des citoyens dans leur
rapports avec l'administration. Or, l'Etat doit non seulement suivre, mais
également anticiper les évolutions sociales. Dans une société et une économie
de plus en plus complexes, les pouvoirs doivent être plus répartis, plus
équilibrés. Les partenaires sociaux, les associations, les entreprises aspirent
légitimement à participer davantage et plus librement à la vie de la nation.
Les forces d'initiative sont formidables sur le terrain. Pourtant,
l'impression qui prévaut est celle d'un blocage, tout au moins d'une série
d'entraves qui viendraient de l'Etat. L'image de ce dernier s'est quelque peu
brouillée et, de fait, on lui impute toutes les difficultés traversées par la
société française.
Sans doute faut-il mieux tirer parti de la compétence remarquable de notre
fonction publique. Il est de la responsabilité de l'Etat de donner aux
fonctionnaires des instructions claires et efficaces, de mobiliser leurs
énergies sur les enjeux essentiels.
La réforme de l'Etat vise précisément à libérer la capacité créatrice de
l'administration pour la mettre à disposition des forces vives de notre pays.
Elle concourt ainsi à la grande ambition de modernisation et d'adaptation de la
France aux défis de notre temps, en rendant à l'administration sa vocation
première : placer le citoyen au coeur du service public.
Avant de vous indiquer l'économie et la portée du projet de loi, sur lequel la
commission des lois et M. le rapporteur ont effectué un travail remarquable, je
souhaite tracer la perspective de la réforme de l'Etat dont ce texte sera la
première pièce législative.
La réforme de l'Etat a été lancée par une circulaire du Premier ministre en
date du 26 juillet 1995, fixant les grands axes de cette réforme et une
méthodologie. Puis, ont été mis en place le comité interministériel pour la
réforme de l'Etat et le commissariat à la réforme de l'Etat, créé par le décret
du 13 septembre 1995.
Un intense travail interministériel a ensuite été conduit dès le dernier
trimestre 1995, avec l'appui technique du commissariat à la réforme de l'Etat.
Il a permis l'élaboration d'un document de travail esquissant des pistes de
réforme, document qui a été soumis à une très large concertation au début de
l'année 1996.
L'ensemble des partenaires de l'Etat a ainsi été associé durant plusieurs mois
à sa réforme, et les organisations représentant les personnels, les usagers des
services publics, les organisations patronales, les institutions consulaires,
les associations d'élus et plusieurs centaines de personnalités qualifiées nous
ont apporté leur point de vue. J'ai moi-même conduit le plus souvent ces
discussions qui, à Paris comme en province, ont été enrichissantes et
passionnantes. Chaque membre du Gouvernement y a impliqué l'administration dont
il a la responsabilité, et les préfets ont effectué à ma demande un travail
considérable. Plus de 10 000 personnes ont été associées à ce travail.
Ainsi, le comité interministériel du 29 mai 1996 a pu, à partir de l'ensemble
des propositions, arrêter le programme de réforme de l'Etat. Depuis, nous
travaillons activement à sa mise en oeuvre.
Quels sont les principes et les objectifs de la réforme ?
Je tiens à rappeler, en premier lieu, que la réforme de l'Etat n'a ni pour
objet ni pour effet de toucher au statut de la fonction publique ou de porter
atteinte aux principes fondamentaux qui constituent le socle de la conception
française du service public et auxquels le Président de la République a, encore
récemment, rappelé notre attachement.
En France, c'est autour de l'Etat que s'est construite l'unité nationale.
Depuis plus de cent vingt ans, le régime républicain est le garant de la
cohésion sociale, de l'accès de tous aux grands services publics, du respect du
droit et de la défense des intérêts de la France dans le monde.
Pour défendre ce modèle, auquel nos concitoyens sont attachés, il faut faire
en sorte que l'Etat s'adapte pour être toujours plus performant. C'est un
impératif majeur face aux fléaux qui, tels le chômage et l'exclusion, nous
frappent durement, menacent la cohésion sociale et font le lit des extrémismes
que, dans leur immense majorité, les Français repoussent.
Cette régénération est le sens profond de la réforme de l'Etat. Les mesures
engagées à cette fin peuvent être regroupées autour de trois objectifs
prioritaires : un Etat plus simple et plus rapide, un Etat plus proche, un Etat
plus moderne et plus responsable.
En ce qui concerne l'objectif de simplicité et de rapidité, je tiens à
souligner le fait que nos concitoyens sont trop souvent rebutés par l'extrême
complexité des structures et des procédures publiques.
Simplifier l'Etat, c'est, d'abord, lutter contre l'inflation des textes et la
complexité des procédures.
Un programme général de codification a été adopté voilà près d'un an, afin de
codifier d'ici au 31 décembre 2000 la totalité des textes applicables.
Plusieurs codes sont parus ou en voie de parution. L'année dernière, le code
général des collectivités territoriales est entré en vigueur.
Dans la même perspective de simplification, une étude d'impact des formalités
nouvelles et des coûts accompagne depuis le 1er janvier 1996 chaque projet de
loi transmis au Parlement. Un bilan de cette procédure est en cours afin d'en
renforcer l'efficacité.
Par ailleurs, après un considérable travail de recensement, qui a permis de
dénombrer plus de 4 200 régimes d'autorisations administratives préalables, la
simplification a démarré : les textes permettant la suppression ou la
simplification de 300 procédures, avec le passage au régime déclaratif ou à la
règle de l'accord tacite, sont prêts. Un projet de loi portant diverses mesures
de simplification administrative sera présenté au Sénat dans les prochaines
semaines : il vient d'être soumis au Conseil d'Etat.
Avec le concours des ministres responsables, d'autres mesures de
simplification seront réalisées ou expérimentées au cours de l'année 1997, en
matière de formalités d'état civil ou de permis de construire, par exemple.
Simplifier l'Etat, c'est, en second lieu, accélérer les décisions et le
fonctionnement de l'administration.
J'évoquerai, à cet égard, quelques mesures effectives depuis le 1er janvier
1997.
Tout d'abord, toute entreprise ayant une créance non contestée sur l'Etat et
non payée dans le délai normal de quarante-cinq jours peut, sur simple
réclamation auprès du préfet ou du ministre, être payée dans les quinze
jours.
Ensuite, dans une vingtaine de préfectures, des passeports et des cartes
grises sont délivrés immédiatement : c'est le service « titre-express ». Cette
procédure rapide devrait être étendue à toutes les préfectures d'ici à la fin
de l'année.
Enfin, dans une centaine de sites administratifs - préfectures,
sous-préfectures, services fiscaux et perceptions - il est possible de payer
une somme due à l'Etat par carte bancaire. Un millier de sites seront équipés
avant la fin de cette année.
Le deuxième objectif prioritaire de la réforme de l'Etat est l'instauration
d'un Etat plus proche des citoyens.
La décentralisation a conféré des responsabilités éminentes aux collectivités
locales. L'Etat a cependant maintenu une procédure excessivement centralisée à
laquelle se heurtent à la fois le citoyen et l'élu local. Elle ralentit les
décisions et empêche parfois leur adaptation fine aux situations concrètes.
Aussi la déconcentration est-elle une exigence impérieuse. Il importe que les
décisions soient prises au plus près des personnes concernées.
Plusieurs décisions majeures ont déjà été arrêtées pour rapprocher l'Etat des
Français.
Tout d'abord, en application du décret du 15 janvier 1997, à compter du 1er
janvier 1998, la totalité des décisions administratives individuelles seront
prises par les autorités locales de l'Etat, en principe le préfet. Les
ministres et les administrations centrales pourront ainsi se concentrer sur
leur rôle : fixer la stratégie et les orientations des politiques publiques,
les évaluer, élaborer les textes législatifs et réglementaires nécessaires à
leur mise en oeuvre. Cette évolution radicale du service public viendra
utilement compléter, je crois, les dispositions du projet de loi, notamment de
son titre Ier, que je vous présenterai dans un instant.
En deuxième lieu, toujours en matière de déconcentration, les autorités
locales de l'Etat disposeront de crédits plus importants, d'utilisation plus
souple et délégués plus rapidement. Elles pourront ainsi s'engager plus vite
vis-à-vis des entreprises ou des associations.
En troisième lieu, la gestion des ressources humaines de l'Etat et le dialogue
social vont être largement déconcentrés.
Les décrets permettant cette déconcentration devraient être applicables avant
la fin du premier trimestre 1997. Ainsi, la mobilité territoriale pour les
membres des corps issus de l'ENA s'appliquera dès la promotion sortant le 1er
avril prochain. Enfin, la mise en place d'un congé « formation-mobilité »
permettra de donner satisfaction aux fonctionnaires qui souhaitent changer de
métier, au sein de la fonction publique.
Nous entendons - c'est notre troisième objectif - créer un Etat plus moderne
et plus responsable.
Pour mieux mettre l'Etat en adéquation avec la société, il faut alléger ses
structures et donner à ses fonctionnaires plus de responsabilités, leur faire
en quelque sorte davantage confiance. Ainsi, la réforme deviendra à la fois une
réalité et un état d'esprit.
Plusieurs grands chantiers sont engagés à cette fin, et tout d'abord la
réforme des services centraux et des services régionaux et départementaux.
Afin de mieux répondre aux besoins là où ils existent, il convient de modifier
la structure et le fonctionnement de ces services, qui regroupent environ 400
000 des 2 100 000 agents de l'Etat. En effet, la majorité des fonctionnaires
travaillent dans des services de proximité, en contact direct avec le public :
établissements d'enseignement, commissariats, tribunaux, perceptions.
A cette fin, je vous confirme que la mise en oeuvre effective de la
réorganisation des administrations centrales s'effectuera d'ici à l'été 1997.
Elle se traduira par une baisse sensible des effectifs grâce, d'une part, au
transfert des fonctions opérationnelles aux services déconcentrés et aux
services à compétence nationale et, d'autre part, grâce à des gains de
productivité.
Par ailleurs, nous mettrons en place une nouvelle organisation des services
départementaux et régionaux de l'Etat. Sur la base d'un décret
d'expérimentation en cours de préparation, celle-ci pourrait commencer au
printemps, dans une dizaine de départements et de régions, avec quelques
priorités : l'aménagement de l'espace, la sécurité de l'alimentation, la lutte
contre l'exclusion, le développement économique.
La réforme de la gestion publique passera d'abord par la poursuite de la
modernisation de la procédure de préparation du budget de la nation, entamée en
mai 1996 avec le débat d'orientation budgétaire au Parlement.
J'ajouterai que plusieurs orientations ont été prises pour la préparation du
budget de 1998. Les crédits gérés de façon déconcentrée seront inscrits sur des
chapitres spécifiques, ce qui les « protégera » plus efficacement. Le taux de
déconcentration des crédits de chaque ministère sera ainsi indiqué au
Parlement, et il devra augmenter significativement de 1997 à 1998.
Nous moderniserons également les modalités d'exécution du budget en allégeant
le contrôle financier central et en expérimentant les contrats de service. Ces
contrats conféreront un budget global à un service déconcentré et pourront
prévoir un mécanisme d'intéressement du service et de ses agents aux économies
réalisées : une dizaine de services départementaux ou régionaux seront bientôt
concernés, notamment au ministère de l'équipement, à l'éducation nationale et
au ministère de l'industrie.
Nous instaurerons, par ailleurs, une véritable gestion du patrimoine de
l'Etat, grâce à la création d'une comptabilité patrimoniale. Des
expérimentations portant sur la gestion du patrimoine immobilier vont être
lancées avant la fin de l'année dans quelques départements.
Enfin, les nouvelles technologies de l'information s'introduisent chaque jour
davantage dans le fonctionnement des administrations : elles y facilitent le
travail des fonctionnaires et améliorent les services rendus aux usagers. Les
formations seront développées dans ce domaine pour aider les fonctionnaires à
s'adapter à ces nouvelles technologies.
Ainsi, le premier semestre 1997 verra la réalisation ou l'engagement décisif
de la totalité des réformes prévues, qu'il s'agisse de changements simples et
concrets intéressant la vie quotidienne de nos concitoyens ou de chantiers de
réformes de structures de plus longue haleine.
D'ici au printemps prochain, une charte des citoyens et des services publics
rappellera les droits traditionnels ou nouveaux des citoyens vis-à-vis des
administrations et des services publics.
Mesdames, messieurs les sénateurs, venons-en maintenant à l'économie et à la
portée de ce projet de loi, qui correspond, je le disais tout à l'heure, à
l'une des toutes premières préoccupations du Gouvernement, à savoir la
situation des usagers des différents services publics administratifs.
En effet, lorsqu'on interroge aujourd'hui nos concitoyens sur leur perception
de l'Etat, on s'aperçoit que, globalement, les administrations leur paraissent
lointaines et souvent indifférentes. Il leur est reproché de ne pas répondre
aux demandes ou de le faire très lentement, d'être trop cloisonnées, enfin de
ne pas être suffisamment à l'écoute de leurs usagers.
Aussi l'idée majeure inspirant le projet de loi qui vous est soumis est-elle
de rapprocher les administrations du citoyen, de rendre celles-là à celui-ci en
réformant les procédures, en développant la médiation et en aménageant les
services.
Cette volonté sous-tend les trois volets du texte, qu'il s'agisse des
dispositions du titre Ier sur le régime des décisions administratives, de
celles du titre suivant relatives au Médiateur de la République, ou enfin de
celles du titre III concernant les « maisons des services publics ».
Les dispositions du titre Ier prévoient un régime des décisions
administratives largement amélioré par rapport à l'état du droit existant.
En effet, à l'heure actuelle, ce régime n'est pas satisfaisant,
essentiellement de deux points de vue. D'une part, le droit n'est pas unifié ;
il est donc une source de complexité supplémentaire. D'autre part, un certain
nombre de principes et de délais sont désuets.
Aussi le régime des décisions administratives doit-il être simplifié par une
harmonisation des règles applicables.
Le projet de loi prévoit de le faire par trois dispositions simples.
En premier lieu, il s'agit d'étendre à tous les cas où elle n'existe pas
l'obligation pour les autorités administratives d'accuser réception des
demandes ou des réclamations qu'elles reçoivent. L'objectif est de garantir le
citoyen contre l'inertie administrative, la complexité des procédures ou
l'insuffisance des moyens, et d'exiger de l'administration qu'elle fasse son
affaire de ses propres difficultés d'organisation et de fonctionnement.
Actuellement, l'obligation d'accuser réception ne s'impose qu'aux services de
l'Etat et à ses établissements publics, par l'effet du décret du 28 novembre
1983, ou lorsqu'un texte spécial l'a prévue dans un domaine particulier, comme
c'est le cas en matière de permis de construire.
Dans tous les autres cas, et pour les autorités administratives autres que
celles qui relèvent de l'Etat, l'accusé de réception n'est pas obligatoire. Or
cette formalité présente un intérêt évident pour le demandeur, car il sait
ainsi que sa demande est bien parvenue au service compétent. Grâce aux mentions
qui figurent dans l'accusé de réception, il obtiendra très rapidement un
certain nombre d'informations qu'il est légitimement en droit d'attendre : quel
service traite le dossier, quel est le régime applicable en cas de non-réponse,
quels sont les délais de recours.
Si vous suivez le Gouvernement, il n'y aura plus de demande ou de réclamation
adressée à une autorité administrative qui ne soit suivie de la délivrance d'un
accusé de réception.
Le projet de loi prévoit, ensuite, que, lorsqu'une autorité administrative est
saisie à tort d'une demande ou réclamation, elle doit la transmettre à
l'autorité compétente et en aviser l'intéressé. Cette règle élémentaire de bon
fonctionnement n'est pas exigée par les textes pour l'ensemble des décisions
des autorités administratives, ce qui revient à faire peser sur nos concitoyens
la responsabilité de la complexité administrative.
Enfin, troisième mesure d'harmonisation et d'amélioration du droit applicable
aux décisions administratives, le projet de loi instaure l'obligation pour les
autorités administratives de respecter une procédure contradictoire avant que
puissent être prises certaines décisions administratives. Il s'agit des
décisions défavorables qui doivent être motivées et qui sont prises
unilatéralement par les autorités administratives, sans que la personne
intéressée ait formulé une demande.
L'autorité administrative aura l'obligation, sauf exceptions énumérées dans le
projet de loi, de recueillir les observations écrites de la personne intéressée
et, si cette dernière le demande, ses observations orales. Cette obligation
n'existe, pour l'instant, que très ponctuellement. Sur ce point aussi, le
projet de loi contribuera donc à harmoniser et à simplifier le droit.
L'effort d'adaptation sera concentré sur deux axes prioritaires : d'une part,
développer le nombre de cas dans lesquels le silence de l'autorité
administrative vaut acceptation de la demande et, d'autre part, raccourcir le
délai imparti à l'administration pour répondre.
Sur le premier point, le droit commun actuel repose sur le principe selon
lequel le silence de l'administration vaut, sauf exceptions prévues par les
textes, décision de rejet. Ce principe est vieux de plus d'un siècle. Certes,
depuis une trentaine d'années, un certain nombre d'exceptions ont été
instaurées dans des domaines comportant souvent des enjeux importants, comme le
permis de construire. Mais ces exceptions restent en nombre limité, - environ
200 - eu égard aux 4 200 régimes d'autorisation administrative existants.
Désormais, chaque fois que cela sera possible, le silence gardé par
l'administration sur une demande vaudra acceptation.
Soucieux de réalisme et afin d'éviter tout effet pervers de la réforme, le
Gouvernement ne souhaite toutefois pas renverser le principe traditionnel du
silence valant rejet de la demande. Pour de multiples motifs légitimes, il
faudrait, aussitôt, assortir ce nouveau principe de plusieurs centaines
d'exceptions difficiles à recenser. Cela différerait l'entrée en vigueur de la
loi et créerait une situation ambigüe. La démarche que je vous propose est à la
fois plus pragmatique, plus sûre et plus efficace.
Il s'agit de prévoir que les cas dans lesquels le silence de l'administration
vaudra acceptation de la demande seront instaurés par le décret proposé à
l'article 5 du projet.
De cette manière, seront conciliées les exigences résultant de la
jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle le principe
général du silence valant rejet a valeur législative et la position du Conseil
d'Etat qui admet que le pouvoir réglementaire instaure des régimes d'accord
implicite.
Cette démarche est opérationnelle immédiatement, puisqu'il résulte des travaux
déjà réalisés que, très rapidement après la publication de la loi, un premier
train de plus d'une centaine de nouveaux régimes d'autorisation relèvera de
l'accord implicite. Les textes sont prêts pour cette première série et d'autres
mesures seront arrêtées très rapidement.
L'Assemblée nationale a accepté cette démarche pragmatique en inversant
seulement les articles 4 et 7 du projet initial du Gouvernement, afin de bien
afficher le principe avant ses exceptions.
Le Gouvernement souhaite également une adaptation significative de l'état du
droit en ce qui concerne les délais de réponse de l'administration.
Il existe actuellement une grande diversité de situations, du délai de quatre
mois valant rejet implicite à l'acceptation implicite dans des délais variables
selon les cas.
A l'heure de la communication en temps réel, il est nécessaire que le délai au
terme duquel le silence gardé sur une demande vaudra rejet soit ramené de
quatre à deux mois. C'est ce que prévoit le projet. Le traitement des demandes
ne pourra que s'en trouver accéléré, dans l'intérêt de nos concitoyens.
Ce même délai de deux mois est prévu pour les hypothèses dans lesquelles des
décrets en Conseil d'Etat instaureront un régime d'accord implicite.
Ainsi, sauf exceptions limitées dues à l'urgence ou à la complexité de la
procédure, nos concitoyens sauront qu'au terme d'un délai de deux mois leur
demande sera acceptée ou rejetée. Il en résultera inéluctablement une
transformation profonde des méthodes de travail et de l'organisation
administrative.
Le titre II du projet de loi concourt au même objectif. Il s'agit de
rapprocher les services publics des citoyens et de conduire l'administration à
prendre davantage en considération ses usagers.
La concertation conduite en la matière a démontré que les Français sont très
attachés aux mécanismes de médiation, qui permettent d'éviter toute situation
de blocage dans leur relation avec les administrations.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose de modifier la loi du 3 janvier
1973 relative au Médiateur.
Le succès de l'institution est incontestable et vous y avez largement
contribué, comme parlementaires, en lui transmettant les réclamations de nos
concitoyens.
Mais, afin que le Médiateur de la République soit mieux connu des Français et
que ceux-ci puissent le saisir plus facilement, le projet de loi prévoit
d'élargir sa saisine à de nouvelles catégories d'élus : les parlementaires
européens, les présidents des conseils régionaux et généraux.
Après des débats approfondis, l'Assemblée nationale a préféré écarter la
saisine du Médiateur par les parlementaires européens. Par ailleurs, elle n'a
pas retenu l'amendement de son rapporteur tendant à prévoir une faculté de
saisine du Médiateur par l'ensemble des maires.
M. Pierre Fauchon.
C'est dommage !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Votre commission des lois se situe plus en retrait par
rapport aux dispositions du projet puisqu'elle propose de maintenir, sur ce
point, l'état du droit existant, à savoir la saisine par les seuls députés et
sénateurs. Nous reviendrons sans doute sur ce point dans le cours de la
discussion.
Quoi qu'il en soit, si l'on veut que l'administration prenne davantage en
compte les préoccupations des usagers, il est utile de renforcer les pouvoirs
du Médiateur, observateur privilégié de ses dysfonctionnements.
A ce titre, il vous est proposé de reconnaître au Médiateur de la République
le pouvoir de se saisir lui-même des sujets sur lesquels il pourra proposer des
réformes et de déclencher lui-même, vis-à-vis d'un service public défaillant,
les procédures d'inspection et de contrôle.
L'Assemblée nationale a souhaité également que le Médiateur puisse s'exprimer
publiquement devant les assemblées à l'occasion de la remise de son rapport
annuel.
Ces pouvoirs nouveaux conférés au Médiateur de la République ne pourront
qu'aider l'administration à se réformer.
Le titre III du projet de loi vise à faciliter la mise en place de structures
plus proches des citoyens et prenant davantage en compte la polyvalence
aujourd'hui indispensable à toute politique de service public.
Depuis plusieurs années, des structures polyvalentes ont été expérimentées.
Des « points publics » ont été créés en milieu rural depuis 1994 et, dans le
cadre de la politique de la ville, des « plates-formes de services publics »
ont été mises en place, ces derniers mois, dans les quartiers urbains en
difficulté.
Pour développer et consolider ces expériences, le Gouvernement a décidé
d'encourager la création de « maisons des services publics ». Elles
regrouperont des services publics de nature différente, auxquels les usagers
auront ainsi plus facilement accès. Ils y trouveront un service allant au-delà
de l'accueil et de l'information et assurant une prise en charge globale et
personnalisée de leurs démarches.
Des maisons des services publics ont d'ores et déjà été créées, ou sont en
voie de l'être, dans une vingtaine de départements. Le projet de loi vise à les
doter du cadre juridique nécessaire à leur développement et, si ces expériences
s'avèrent positives, à leur extension progressive sur le territoire.
Sont ainsi prévues la conclusion de conventions entre les personnes publiques
concernées et les règles permettant au responsable d'une maison des services
publics de prendre certaines décisions simples par délégation des autorités
compétentes.
Par ailleurs, pour le cas où il apparaîtrait utile de disposer de structures
plus importantes, le texte prévoit que les groupements d'intérêt public
pourront créer ou gérer des maisons des services publics, selon le régime de la
loi du 15 juillet 1982 ayant institué la catégorie des groupements d'intérêt
public.
Ensuite, le titre IV du projet prévoit, outre des dispositions de procédure
relatives à l'entrée en vigueur et à l'applicabilité de la loi dans les
territoires d'outre-mer, deux dispositions introduites par la commission des
lois de l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement.
Elles concernent l'article 1er de la loi du 16 juillet 1980, qui fixe les
délais d'ordonnancement des sommes d'argent que les personnes morales de droit
public ont été condamnées à payer par décision juridictionnelle.
En premier lieu, l'article 10 A du texte vise à réduire de quatre à deux mois
ce délai d'ordonnancement. Il est tout à fait conforme aux objectifs généraux
du projet du Gouvernement, à savoir réduire les délais opposés aux citoyens. De
plus, l'exécution rapide des décisions de justice comportant des conséquences
pécuniaires est un élément essentiel du respect de l'état de droit.
En second lieu, l'article 10 B du texte a pour objet d'étendre les
dispositions de l'article 1er de la loi du 16 juillet 1980 aux décisions de
justice prises en forme de référé-provision.
Cette disposition nouvelle permettra aux bénéficiaires d'un référé-provision,
c'est-à-dire d'une décision de justice, condamnant une personne publique à leur
verser une provision, d'utiliser la procédure d'exécution des décisions de
justice prévue à l'article 1er de la loi du 16 juillet 1980, alors que ce
n'était pas le cas auparavant.
En effet, lorsque le juge des référés accorde une provision, il est important
que celle-ci soit effectivement et rapidement versée à son bénéficiaire, comme
l'avait d'ailleurs signalé le Médiateur de la République dans une proposition
transmise au Gouvernement.
Enfin, le Gouvernement souhaite amender son propre texte pour l'enrichir d'une
disposition supplémentaire importante et significative pour nos concitoyens ;
il s'agit d'offrir aux particuliers, lorsqu'ils déménagent, une formalité
unique de déclaration de changement d'adresse auprès de la poste. Cette
simplification leur évitera les multiples démarches qu'ils sont actuellement
tenus d'effectuer auprès des différentes administrations avec lesquelles ils
sont en relation.
Cette mesure a été accueillie favorablement par la commission des lois, qui a
proposé d'en améliorer l'encadrement juridique. Je n'insiste pas davantage sur
ce point ; nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion des
amendements.
Voilà, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'ensemble
des raisons qui ont conduit le Gouvernement à présenter au Parlement ce projet
de loi, qui a reçu l'accueil favorable de l'Assemblée nationale.
Encore une fois, il ne constitue que l'un des aspects de la réforme de l'Etat,
dont le Président de la République a récemment rappelé qu'elle est la pierre
angulaire de l'oeuvre de redressement et de modernisation du pays.
Cette réforme, que j'ai l'honneur de conduire sous l'autorité de M. le Premier
ministre et avec le concours de chacun des membres du Gouvernement, est
attendue avec impatience par tous les Français, y compris - et peut-être
surtout - par les fonctionnaires.
Je ne doute pas que, dans son souci d'approfondissement des principes
démocratiques et républicains, le Sénat aura à coeur de développer les droits
que le citoyen peut légitimement attendre de l'Etat à l'aube du XXIe siècle.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. la président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du réglement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, adapter les règles qui
régissent les relations entre le corps social et ses représentants, d'une part,
et le citoyen, d'autre part, est, en démocratie, une exigence posée par
l'évolution naturelle de la société.
En d'autres termes, réformer nos méthodes d'administration s'impose aux
pouvoirs publics comme une nécessité et constitue pour eux un chantier quasi
permanent.
Cette relation entre l'évolution de la société et l'adaptation du droit est
soumise aujourd'hui à des contraintes très spécifiques.
En effet, l'évolution rapide et en profondeur de nos modes de vie, l'élévation
du niveau d'exigence des citoyens dans leurs rapports avec l'administration, le
contexte de mutations accélérées dans lequel vivent la plupart de nos
entreprises nous conduisent à un effort particulier d'imagination, de
conception et de méthode afin d'adapter aussi rapidement que possible nos
institutions publiques pour ce qui est de leur relation avec le citoyen.
Nous sommes loin du temps où l'homme acceptait sa condition de sujet d'une
administration centralisée et toute puissante ; la personne, physique ou
morale, revendique aujourd'hui d'être considérée comme citoyenne et partenaire
d'une vaste entreprise collective.
Pour autant, cette nécessaire amélioration du sort de l'usager, et plus
largement du public, dans son rapport avec l'administration ne doit affecter ni
nos collectivités publiques, en charge de l'intérêt général, ni la légitimité
de l'Etat, elle-même garante des libertés fondamentales de la personne.
Jean-Jacques Rousseau ne disait-il pas qu'« il n'y a pas de libertés sans loi »
?
Ainsi se présentent les raisons et les objectifs de la « réforme de l'Etat »,
voulue par le Président de la République et mise en oeuvre par le Gouvernement,
en même temps que le cadre qui doit lui servir d'équilibre.
Cette réforme, qui doit en permanence maintenir le cap entre la satisfaction
des deux objectifs précités, a, dans un premier temps, à répondre très
concrètement aux deux questions suivantes : comment rendre l'administration
plus accessible aux citoyens, plus proche et plus efficace ? Comment préserver
simultanément les droits de l'administration, ceux de ses interlocuteurs et
ceux des tiers ?
C'est à ces deux questions que s'efforce de répondre le projet de loi dont
nous débattons, qui réalise, dans son titre Ier consacré au régime des
décisions des autorités administratives, un juste et difficile équilibre entre
les deux niveaux d'interrogation.
En effet, les articles du titre Ier ouvrent des obligations nouvelles à la
charge de l'administration, destinées à simplifier et à alléger les relations
avec le public ; parallèlement, ces articles prévoient des mesures de
sauvegarde afin de faire prévaloir, quand cela est nécessaire, l'intérêt
général comme la défense des libertés publiques.
Ainsi, après avoir défini, à l'article 1er, les autorités administratives dont
les décisions seront soumises au nouveau régime juridique, on crée, à l'article
2, pour l'ensemble de ces autorités, une obligation d'accuser réception au
demandeur, en prévoyant les cas dérogatoires dans lesquels l'administration
peut être exonérée de l'obligation de se plier à cette exigence, ces cas
relevant du bon sens ou de l'excès dans lequel pourrait tomber le demandeur.
De la même manière, l'article 3, qui instaure l'obligation de transmission à
l'autorité compétente d'une demande initialement « mal aiguillée », prévoit,
pour les décisions implicites d'acceptation, une garantie de délai suffisant
pour que l'administration puisse assurer l'instruction du dossier.
Permettez-moi, à ce sujet, monsieur le ministre, de me faire ici le
porte-parole des maires pour vous demander confirmation de votre intention de
confier aux services déconcentrés de l'Etat, préfectures et sous-préfectures,
le soin d'assister dans leur obligation de transmission les maires des plus
petites communes qui ne disposeraient pas de services suffisamment étoffés.
M. René-Georges Laurin,
vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation,
du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Très
bien !
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
L'article 4 est également très éclairant : il instaure une
des grandes innovations de ce texte en réduisant, comme vous l'avez dit,
monsieur le ministre, de quatre à deux mois le délai imparti à l'administration
pour se prononcer. Il constitue donc une réelle avancée en faveur des droits
des administrés.
Pour autant, il rappelle et précise deux garanties fondamentales pour la
puissance publique : d'une part, le droit commun qui demeure la règle selon
laquelle le silence gardé par l'administration vaut décision de rejet d'autre
part, la possibilité de délais plus longs ou plus courts reconnus à
l'administration par décret en Conseil d'Etat lorsque « la complexité ou
l'urgence de la procédure le justifie ».
L'article 5 ouvre en faveur du demandeur la perspective de décisions
implicites d'acceptation de plus en plus fréquentes, sous condition, bien sûr,
qu'elles soient prévues par décret en Conseil d'Etat. A cet égard, la Haute
Assemblée apprécierait, monsieur le ministre, que vous précisiez vos intentions
sur les mesures réglementaires qui pourraient intervenir prochainement sur la
base de cette disposition nouvelle.
Il me paraît essentiel de souligner qu'en élevant au niveau de la loi la règle
de l'autorisation implicite, dont les domaines d'application devraient
s'élargir progressivement ce projet de loi porte le germe d'une ère nouvelle
dans notre droit et notre pratique administratifs.
Mais cette règle du silence valant acceptation se voit imposer par le même
article 5 l'impossibilité d'envisager un accord implicite sur des sujets où
l'intérêt général comme les libertés fondamentales doivent prévaloir : l'ordre
public, les engagements internationaux de la France, les principes à valeur
constitutionnelle, les dettes et créances de l'administration.
L'article 6 offre un exemple subtil de cet équilibre, en même temps qu'il
organise une évolution dans notre droit.
Revenant sur la jurisprudence « Eve », qui interdisait à l'administration de
retirer une décision implicite d'acceptation dans les cas où des mesures de
publicité ne sont pas exigées, l'article 6 donne à l'administration un droit de
« repentir ».
Cette mesure est voulue pour tenir compte de la perspective d'accroissement
des cas d'autorisation implicite, et donc de l'utilité qu'il y aura à retirer
pour illégalité telle ou telle décision.
Toutefois, pour éviter que cette prérogative de la puissance publique ne
puisse s'exercer indéfiniment et, ainsi, créer une instabilité juridique et
nuire aux administrés, notamment aux bénéficiaires des mesures, la commission
des lois propose d'encadrer cette prérogative en limitant à deux mois le délai
pendant lequel l'administration pourra retirer, de sa propre initiative, une
décision implicite d'acceptation illégale n'ayant pas fait l'objet des mesures
d'information requises, étant précisé que, sur requête d'un tiers, cette
faculté est ouverte à l'administration sans limitation de délai.
Ainsi, la proposition de la commission des lois constitue une voie moyenne
entre la position antérieure, issue de la jurisprudence « Eve », et le texte du
projet de loi.
Enfin, l'article 7, qui instaure une procédure contradictoire en faveur de
l'usager dans tous les cas de décision individuelle devant être motivée, non
consécutive à une demande, assortit cette amélioration de diverses dispositions
dispensant l'administration de se plier à cette exigence dans certains cas,
telle l'urgence ou la sauvegarde des intérêts supérieurs de la puissance
publique.
Comme les précédents, cet article illustre la volonté d'améliorer les droits
du citoyen, tout en veillant à défendre l'intérêt général.
J'en viens aux titres II, III et IV du projet.
Ceux-ci ne sont pas soumis à la dialectique des dispositions du titre Ier et
constituent purement et simplement autant de mesures en faveur des administrés.
Ils instaurent, en effet, un certain nombre de dispositions pour renforcer les
pouvoirs du Médiateur de la République et, par là même, améliorer le
fonctionnement de l'administration, pour rapprocher les services publics des
citoyens avec les « maisons des services publics », pour réduire la durée des
délais pendant lesquels l'administration doit s'acquitter d'un certain nombre
d'obligations pécuniaires et, enfin, sur proposition de la commission des lois
pour simplifier la procédure du permis de démolir dans les communes de plus de
10 000 habitants et dans celles qui sont situées à l'intérieur d'un rayon de
cinquante kilomètres par rapport aux anciennes fortifications de Paris.
J'en arrive au Médiateur de la République.
Lors de son audition par la commission des lois, le 28 janvier 1997, le
Médiateur a dressé un bilan de l'activité de ses services. Il a indiqué que, en
1996, 43 000 réclamations lui avaient été adressées. Il a précisé que, sur les
quelque 60 % de celles qui avaient été déclarées recevables, son intervention
avait abouti dans 85 % des cas et qu'au cours des deux dernières années le
délai de réponse moyen avait été ramené de six à quatre mois.
Reconnaissant l'efficacité de cette institution qui, à l'écoute des citoyens
et grâce à sa bonne connaissance des rouages administratifs, a acquis une
autorité morale incontestable et a contribué activement à l'amélioration des
relations entre les administrations et les usagers, la commission se félicite
du renforcement proposé des pouvoirs du Médiateur de la République.
Toutefois, elle vous propose de ne pas modifier les modalités de saisine en
vigueur, celles-ci demeurant une faculté ouverte aux députés et aux
sénateurs.
Elle considère en effet que ces modalités ont été éprouvées et ont permis le
développement de l'action du Médiateur : le nombre de réclamations qui lui sont
annuellement adressées, est, en effet, passé de 3 500 en 1973 à 43 000 en 1996.
De surcroît, la commission pense que toute extension des possibilités de
saisine à d'autres catégories d'élus pourrait créer entre eux d'inévitables et
regrettables disparités.
En ce qui concerne les maisons des services publics, les quelques expériences
de regroupements de services, lancées sur la base d'une circulaire d'août 1996
de M. le ministre Perben, prouvent, s'il en était besoin, que ces initiatives
répondent à un besoin réel de rapprochement entre l'usager et les services
publics, en particulier dans certaines zones rurales et dans certains quartiers
urbains périphériques.
La commission des lois du Sénat a admis l'utilité de tracer un cadre légal à
ce type nouveau de regroupements.
Les échanges que nous avons eus sur ce sujet ont cependant permis de recenser
un certain nombre d'interrogations.
En conséquence, la commission vous proposera un amendement tendant à
distinguer clairement le niveau de l'accueil et de la préparation de la
décision, d'une part, et celui de la prise de décision, d'autre part, qui ne
saurait relever, sur délégation, que du responsable de la maison.
En tout état de cause, les délégations ne pourront concerner dans le cadre
limité de l'objet restreint et précis des maisons des services publics que des
actes de simple exécution qui seront définis par la convention et feront
l'objet d'un acte spécifique de délégation.
S'agissant du contenu de la convention qui pourra servir de base au
fonctionnement de la future maison des services publics, l'Assemblée nationale
a précisé que la convention répartit les responsabilités à l'égard des tiers et
des usagers.
Ces diverses dispositions nous paraissent de nature à répondre aux soucis
exprimés en particulier par les maires quant au contenu des délégations et au
dégré des responsabilités qui pourraient être déléguées.
D'autres préoccupations nous ont été exprimées sur le risque que les maisons
des services publics puissent, dans certains cas, conduire à des distorsions de
concurrence favorisant de manière irrégulière certains services exerçant une
partie de leurs activités dans le domaine concurrentiel.
Il convient à ce sujet de rappeler que l'approbation par le préfet de la
convention s'exercera à l'égard des modalités conventionnelles et permettra la
mise en oeuvre des mesures de publicité. Le cadre et la transparence ainsi
établis par la loi sont de nature à assurer l'information des tiers sur les
modalités de fonctionnement et de financement des maisons des services
publics.
Ce dispositif permettra notamment de vérifier que cette structure est neutre
au regard des règles de la concurrence que doivent respecter les services
publics qui exercent en outre des activités dans le secteur concurrentiel.
Enfin, d'aucuns peuvent s'interroger sur le risque de désertification de
services que pourrait induire le regroupement de ceux-ci en un même lieu.
Il convient de rappeler ici que les maisons des services publics ne sont
qu'une faculté et non pas une obligation, et qu'à nos yeux personne mieux que
les responsables locaux - autorités décentralisées et déconcentrées - ne
pourra, dans l'avenir, apprécier l'opportunité de regrouper ou de ne pas
regrouper tel ou tel service.
Permettez-moi enfin de souligner que la simplification proposée au titre IV
dans la procédure d'instruction du permis de démolir est une mesure de
simplification tout à fait opportune et en parfaite cohérence avec l'esprit et
les objectifs du texte qui nous est proposé.
Pour conclure, je tiens, monsieur le ministre, à saluer la qualité et la
pertinence de vos initiatives.
M. René-Georges Laurin,
vice-président de la commission.
Très bien !
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Je voudrais en particulier souligner que la concertation que
vous avez instaurée depuis environ un an au sein des services de l'Etat - des
services déconcentrés en particulier - est à nos yeux une voie courageuse et,
en même temps, la seule garante d'une réforme fondée sur le « possible », tant
il est vrai que la capacité de l'administration - comme de la société française
du reste - à porter des réformes n'est pas illimitée.
Nul doute en effet que ce sont bien les résultats de cette concertation qui
ont permis de fixer le niveau adéquat des mesures, c'est-à-dire d'une ambition
réaliste.
Il ne fait aucun doute non plus que cette concertation a fait évoluer les
esprits et qu'elle permet aux administrations d'afficher aujourd'hui une plus
grande capacité d'accepter et de faire leur ce mouvement de réformes, au point
même que de nombreux responsables sur le terrain - nous en sommes témoins -
attendent ces mesures nouvelles comme parfois autant de défis à relever et
autant de marques de confiance dans leur capacité à assumer les nécessaires
mutations.
Je voudrais également, monsieur le ministre, saluer votre action de relance de
la déconcentration : elle est présente dans l'esprit de ce texte et elle est,
en même temps, une condition de réussite de la réforme que porte ce projet de
loi. Je ne prendrai qu'un exemple : la réduction du délai de réponse de droit
commun de quatre à deux mois ne pourra, nous en avons bien conscience, entrer
dans la pratique qu'à la condition de déconcentrer très largement le pouvoir de
décision auprès des responsables et des représentants locaux de la puissance
publique.
La déconcentration apparaît ainsi véritablement essentielle pour concilier le
principe d'unité nationale et l'aspiration du citoyen à pouvoir traiter
localement avec l'Etat. Loin d'être un quelconque obstacle à la
décentralisation, comme on pourrait le craindre, la déconcentration se révèle,
de toute évidence, comme un moyen moderne d'administration avant tout au
service du citoyen.
Telles sont, brièvement résumées, monsieur le ministre, les réflexions qui ont
conduit la commission des lois à approuver le projet de loi que vous nous avez
soumis et qui a le mérite à nos yeux de constituer, d'une part, une nouvelle
étape significative dans l'amélioration des relations entre les administrations
et le public, et, d'autre part, le premier acte législatif de la nécessaire
réforme de l'Etat.
(« Très bien ! » et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du
RPR et de Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 44 minutes ;
Groupe socialiste, 37 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 31 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 26 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 18 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 15 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
réforme qui est soumis au Sénat aujourd'hui a pour objet de rendre
l'administration plus efficace, plus accessible à l'usager et plus apte à
répondre à ses attentes, donc plus moderne, en replaçant le citoyen au coeur du
service public.
Chacun reconnaîtra qu'il était indispensable de redéfinir ses missions, en
recherchant plus spécialement une amélioration des relations avec les usagers.
Certes, par le passé, cette préoccupation s'était déjà manifestée.
Je rappellerai très brièvement, à cet égard, la création, dès 1973, de la
fonction de Médiateur de la République, le vote, en 1978, de la loi sur la
liberté d'accès aux documents administratifs et, l'année suivante, de celle sur
le droit à motivation de ces mêmes actes. L'on se souvient également qu'une
circulaire du Premier ministre en date du 23 février 1989 tendait à associer
les fonctionnaires à l'amélioration du fonctionnement de leur
administration.
Mais, aujourd'hui, il s'agit de simplifier réellement les relations, de
faciliter les démarches, de clarifier et d'accroître la polyvalence des
services au contact des usagers. A l'évidence, c'est un véritable changement
des mentalités qui est ainsi proposé, et je m'en rejouis.
A cet égard, il m'a semblé que l'esprit du projet de loi n'était
qu'insuffisamment reflété par son intitulé, « loi relative à l'amélioration des
relations entre les administrations et le public », qui a une connotation
passéiste. Ce titre paraît presque en contradiction avec le contenu du texte.
Peut-on en effet parler encore de « public », s'agissant d'une loi tendant à
moderniser l'administration ? La société concurrentielle à laquelle le service
public doit aujourd'hui s'adapter impose une modification subtile des relations
avec les administrés. Sans aller jusqu'à souhaiter que soit retenue
l'appellation de « clients », je proposerai donc à notre assemblée un
amendement visant à remplacer le terme de « public » par celui, plus approprié
me semble-t-il, d'« usagers ».
M. François Lesein.
Très bien !
M. Guy Cabanel.
Ce détail n'a d'autre intérêt que celui de rester fidèle à l'esprit de
changement insufflé par le texte en discussion.
Pour résumer ma pensée en abordant l'examen de votre projet de loi, monsieur
le ministre, je dirai qu'il faut essentiellement, d'abord simplifier l'Etat,
ensuite le réorganiser encore et, surtout, le moderniser.
Il convient de simplifier, car l'inflation des textes législatifs et
réglementaires, la multiplication des procédures administratives préalables, en
un mot la complexité, pèsent sur l'ensemble des interlocuteurs de l'Etat. Il
faut rompre ce cycle décourageant et paralysant. Votre projet de loi, s'y
emploie, monsieur le ministre. Il s'agit d'une oeuvre de longue haleine, mais
l'application du principe de simplicité est impérative.
Il faut aussi réorganiser encore l'Etat, car les administrations de l'Etat et
des collectivités territoriales sont souvent trop nombreuses et, parfois,
concurrentes. Comment, dès lors, rendre cohérente la conduite des politiques
publiques et préserver la capacité d'arbitrage de l'Etat ? Cette réforme des
administrations centrales et déconcentrées devrait permettre de réelles
améliorations, qui sont très attendues.
Enfin, moderniser l'Etat, c'est mieux gérer ses moyens financiers, humains et
patrimoniaux et, surtout, utiliser les possibilités offertes par le
développement des nouvelles technologies de l'information et de la
communication, pour accroître son efficacité et améliorer la qualité des
services rendus. Je reviendrais ultérieurement sur ce point.
J'en viens maintenant au fond du projet de loi. Pour mettre en oeuvre
l'amélioration de l'administration, le titre Ier, en son article 2, prévoit
tout d'abord l'obligation d'accuser réception des demandes déposées par les
usagers. Cela n'est que l'extension d'une disposition figurant dans le décret
du 28 novembre 1983. Si son principe paraît louable, il m'apparaît que les
exceptions prévues par cet article sont insuffisamment caractérisées.
Le texte est complexe. Nous attendons le décret en Conseil d'Etat qui
permettra, certes, de le préciser, mais il eût été souhaitable que les termes
de cette disposition fussent mieux cernés dans la loi.
L'article 3, relatif au dépôt d'une demande auprès d'une administration
incompétente, oblige cette dernière à transmettre ladite demande à l'autorité
administrative compétente et prévoit les conséquences de ce dispositif en
termes de délais.
Cette disposition a le mérite d'être pragmatique : en rendant à
l'administration son efficacité, elle respecte la démarche entreprise par
l'usager. Nous ne pouvons donc que l'approuver. Il était temps et important
d'unifier le droit en cette matière. Le poids de la complexité administrative
ne doit plus peser sur l'usager.
Le principe de décision implicite de rejet de l'administration est conservé -
il figure à l'article 4 - mais ses modalités et exceptions sont remaniées.
En premier lieu, le délai opposable est réduit et passe de quatre à deux mois,
ce qui va dans le sens d'une meilleure efficacité de l'administration et ne
peut qu'être favorable aux usagers.
En second lieu, les exceptions tendraient à être généralisées par voie de
décrets en Conseil d'Etat, dans les limites prévues à l'alinéa 2 de l'article
5. En conséquence, à terme, pour un nombre non négligeable de domaines, le
silence de l'administration vaudrait désormais acceptation tacite. On ne peut
que se féliciter d'une telle avancée.
Toutefois, le risque d'illégalité de certaines décisions obtenues du seul fait
d'une négligence ou d'un retard paraît accru. Il entraînerait alors une
incertitude juridique pour tous les administrés dont la demande a été accordée
dans de telles conditions.
Avec l'article 6 se pose donc la question de savoir si une décision délivrée
tacitement par l'administration est juridiquement fondée et si elle ne risque
pas d'être retirée. Toutefois, les conséquences fâcheuses de cette disposition
semblent un mal nécessaire, les avantages à retirer de l'acceptation implicite
paraissant plus importants que les inconvénients.
Efficacité, rapidité, le projet de loi, en son article 7, fait également appel
à des exigences de justice. Il prévoit que l'administration doit entendre
l'usager ou lire ses observations préalablement à toute motivation de décision
individuelle le concernant. On doit se réjouir de cette procédure, tout en
reconnaissant les lourdeurs qu'elle risque d'engendrer.
Le titre II de projet de loi est consacré aux dispositions relatives au
Médiateur de la République. Il vise à compléter utilement les attributions qui
lui sont actuellement dévolues.
L'alinéa relatif à la faculté de provoquer une inspection ou un contrôle au
sein d'une administration défaillante paraît assez novateur pour être souligné.
Il en va de même du principe, introduit par l'Assemblée nationale, de la
communication devant le Parlement du rapport annuel de la Médiature, qui
permettra d'informer publiquement les députés et les sénateurs des actions
menées par le Médiateur et, plus généralement, des problèmes rencontrés par les
usagers de l'administration.
Dans le titre III, la création officielle des maisons des services publics, à
la suite de certaines expérimentations sur le terrain, paraît constituer un
élément de simplification et d'efficacité globalement favorable aux usagers. Le
projet de loi fournit le cadre juridique qui leur fait encore défaut.
Il faut souhaiter que ces moyens nouveaux permettent de conserver, voire
d'assurer une présence coordonnée et donc de développer l'implantation de
l'administration, comme l'a très justement souligné M. le rapporteur, dans les
secteurs difficiles urbains comme dans les secteurs les moins peuplés du monde
rural.
Toutefois, le mode de financement de ces maisons des services publics
mériterait d'être éclaici en ce qui concerne tant leurs installations que leur
fonctionnement sous le régime de la convention ou du groupement d'intérêt
public. Il serait souhaitable, autant que faire se peut, d'utiliser des locaux
qui sont déjà propriété de l'Etat ou des collectivités territoriales, et ce
dans un souci d'économie.
Après avoir ainsi fait connaître mon approbation des différents articles du
présent projet de loi, je voudrais maintenant vous faire part de ma perplexité
à l'égard d'une lacune fort surprenante de ce texte. Nulle part en effet n'y
sont mentionnés les nouveaux outils de communication dont notre société
dispose. L'informatique ne pourrait-elle pas participer à l'amélioration des
relations avec les administrations ? Ne représente-t-elle pas aujourd'hui le
moyen le plus performant de transmission des données ?
L'exemple en la matière vient de nous être fourni par les Etats-Unis qui ont
tout récemment décrété, par la voix du vice-président Al Gore, que désormais
tous les actes administratifs courants pourraient être réalisés par voie
informatique, et notamment par Internet.
Nous n'irons pas jusque-là, mais mon collègue M. Pierre Laffitte et moi-même
vous proposerons un certain nombre d'amendements pour tenter de combler
l'absence d'un véritable grand chapitre consacré aux technologies nouvelles qui
seraient un élément efficace de modernisation de l'administration.
M. René-Georges Laurin,
vice-président de la commission.
Avec quel argent ?
M. Guy Cabanel.
Avec celui que nous tirerons des économies que l'utilisation de l'informatique
nous permettra de réaliser en matière de papier. L'informatique ne coûte pas
plus cher que les autres moyens.
Je ne conteste pas que le Gouvernement ait facilité la mise en place
d'équipements informatiques qui ont induit d'incontestables gains de
productivité. Cependant, cette modernisation est souvent caractérisée par une
centralisation et une complexité excessives. Il convient de fournir un effort
supplémentaire ; nous en débattrons à l'occasion de la discussion des
amendements.
En conclusion, l'intérêt de ce projet de loi est indiscutable. Toutefois, me
vient à l'esprit le problème des difficiles rapports des contribuables avec les
services fiscaux. Seront-ils améliorés par l'application de ce texte ? Les
Français cesseront-ils de se plaindre d'une fiscalité qu'ils considéraient
jusqu'ici comme confiscatoire ?
Certes, la nouvelle politique budgétaire de limitation des dépenses, de
réduction du déficit et de baisse de l'imposition sur les revenus amènera
peut-être nos concitoyens à formuler un jugement différent, mais ce qui les
gêne le plus, c'est le caractère aléatoire de cette fiscalité compte tenu des
modifications réglementaires trop fréquentes et délicates à interpréter. Je
n'ai pas noté d'éléments de nature à donner un éclairage nouveau en ce
domaine.
Au-delà de cette objection, monsieur le ministre, avec la majorité du groupe
du Rassemblement démocratique et social européen, je voterai le projet de loi
que vous nous présentez opportunément aujourd'hui.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Bordas.
M. James Bordas.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi qui nous est aujourd'hui soumis est la première traduction législative de
la réforme de l'Etat engagée par le Gouvernement. Réformer l'Etat, c'est-à-dire
l'ensemble de l'administration de notre pays, est un défi très ambitieux.
Depuis trente-cinq ans, divers textes législatifs et réglementaires ont
contribué à l'effritement du modèle bureaucratique que l'administration avait
hérité du XIXe siècle et au développement des droits des usagers. De
considérables progrès ont été réalisés. Néanmoins, il faut aller beaucoup plus
loin.
L'administration est une structure lourde, ce qui rend son évolution et sa
modernisation malaisées. C'est pourquoi je tiens à saluer la volonté et la
détermination du Gouvernement dans son actuelle action de réforme.
Améliorer les relations entre les administrations et le public est l'un des
objets essentiels de cette réforme, et je suis particulièrement favorable à ce
chantier tant dans son impact humain et relationnel que dans sa dimension
technique.
Concernant, tout d'abord, l'impact humain, je rappellerai l'adage formulé
voilà quelques années : « A usager satisfait, fonctionnaire heureux. » Il me
semble que cette formule est toujours d'actualité et montre combien le
fonctionnaire joue un rôle fondamental dans la relation entre l'administration
et le public.
Cette affirmation semble une évidence et, pourtant, on a trop tendance à
sous-estimer l'importance des qualités d'accueil, d'amabilité, de patience et
de disponibilité dans les services administratifs. L'attitude du fonctionnaire
en contact avec le public est primordiale. Il doit savoir écouter et montrer à
son interlocuteur l'intérêt qu'il lui témoigne.
On ne saurait trop rappeler que le fonctionnaire sert l'Etat, c'est-à-dire
qu'il est « au service » des citoyens. Il faut donc le sensibiliser plus et le
responsabiliser en conséquence.
La première action à engager, afin d'améliorer les relations entre
l'administration et le public, est de combattre l'absence de sens de l'accueil
au sein de l'administration. Mais aucun texte législatif ne peut intervenir en
ce domaine.
Parallèlement à cette démarche, il faut souligner l'importance de la formation
des personnels. Les administrés se comportent de plus en plus en consommateurs
exigeants et la « paperasse » administrative - pardonnez-moi le terme, monsieur
le ministre - est de plus en plus complexe.
Il faut donc non seulement simplifier les procédures administratives, mais
aussi assurer une formation, une qualification des agents plus adéquates et
polyvalentes.
S'agissant de l'impact relationnel, je tiens aussi à souligner l'enjeu que
peuvent constituer les « maisons des services publics », objet du titre III du
projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Telles qu'elles sont définies, ces maisons seront un point de rencontre
privilégié pour le citoyen avec différents services administratifs. Elles
seront des carrefours de services qui faciliteront l'information du public
ainsi que ses démarches.
De telles structures seront fonctionnelles et particulièrement utiles pour les
administrés en situation difficile. Je pense notamment aux chômeurs et aux «
exclus ».
Les maisons des services publics auront un rôle social d'autant plus marqué
qu'elles seront situées en zone rurale ou en zone urbaine en difficulté. Elles
développeront donc une administration de proximité, polyvalente, et
participeront activement à la politique d'aménagement du territoire.
Cependant, je veux insister sur le fait qu'en aucun cas la mise en place de
ces regroupements de services ne doit aboutir à un retrait des administrations
existantes dans le monde rural. Une telle évolution serait désastreuse.
M. Robert Pagès.
Exact !
M. James Bordas.
Pour conclure ces remarques sur l'enjeu social que constitue l'amélioration
des relations entre l'administration et le public, je dirai que c'est tout un
état d'esprit qui doit être changé et un véritable dialogue qui doit être
instauré.
S'agissant maintenant de la dimension technique et pratique du projet de loi,
il est peut-être bon de garder à l'esprit l'article XV de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui dispose : « La Société a le droit
de demander compte à tout Agent public de son administration ». Que de progrès
sont à accomplir ! Mais je crois que le texte proposé par le Gouvernement va
vraiment dans ce sens.
La réduction des délais au terme desquels interviennent des décisions
implicites, l'obligation d'accuser réception de toute demande ou réclamation
adressée à une autorité administrative, l'instauration du principe de
transmission des demandes au service compétent et l'élargissement des cas dans
lesquels le silence de l'administration pendant deux mois vaudra acceptation
sont des mesures qui engendreront une certaine révolution au sein même de
l'administration et dans ses rapports avec le public.
Ces dispositions ouvrent de nouvelles perspectives pour les administrés, qui
auront moins à subir les conséquences de la lenteur ou des insuffisances des
services administratifs.
D'un autre côté, la vigilance de la hiérarchie et la célérité des
fonctionnaires devront s'en trouver accrues. Tous deux devront être encore plus
attentifs aux effets et aux implications de ces nouvelles règles.
Dans le même temps, la simplification des régimes d'autorisation a été
engagée. Il est indispensable que, parallèlement à cette politique, qui doit
être poursuivie et amplifiée, on veille à ce que les textes législatifs et
réglementaires soient eux-mêmes rédigés en des termes abordables et
compréhensibles par tous.
Nul n'est censé ignorer la loi, mais encore faut-il la comprendre !
(MM. Pierre Fauchon et Jacques Machet acquiescent.)
Or, à la complexité
des textes s'ajoute celle de la juxtaposition de toutes les réglementations. Il
est donc de notre devoir, à nous élus, de s'assurer de la lisibilité de la
législation.
Le second enjeu technique du projet de loi que je souhaite aborder est celui
que constituent les « maisons des services publics ». Comme je l'ai mentionné
tout à l'heure, ces structures seront fonctionnelles et donc bien pratiques
pour le public.
Toutefois, du point de vue de l'administration, ces maisons pourraient être
l'occasion de développer une mobilité intra-administrative des personnels. On a
souligné la polyvalence de ces groupements. Il me paraît donc pertinent
d'offrir aux personnels une chance, une opportunité supplémentaire dans leur
carrière, tout en permettant une meilleure organisation de l'administration,
par une gestion plus souple des agents.
L'idée de constituer des corps interministériels devrait donc être
approfondie. En outre, afin de permettre une meilleure adéquation entre les
besoins locaux et les potentialités humaines, la gestion de ces personnels
devrait être déconcentrée.
Avant d'achever mon intervention, je souhaite aussi souligner le rôle
technique du Médiateur de la République dans les relations entre
l'administration et le public.
D'autres orateurs l'ont certes indiqué avant moi, mais je tiens à le rappeler,
le Médiateur a été saisi de 3 500 réclamations en 1973 et de 43 000 en 1996.
Ces chiffres parlent d'eux-mêmes. Ils montrent à quel point le Médiateur a su
s'imposer comme un véritable et efficace intermédiaire. Je m'en félicite tout
en émettant des réserves quant à l'extension de la possibilité de saisine à
différents élus, dont les parlementaires européens.
Pour finir, j'ajouterai simplement que l'économie générale du projet de loi
relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public
me semble bonne. Mais c'est surtout la volonté et le mouvement plus général de
réforme de l'Etat qui sont positifs.
Cet élan est nécessaire pour tous les acteurs de notre pays. Dynamiser,
simplifier l'administration dans son ensemble est un pari audacieux mais il ne
tient qu'à chacun de s'y atteler et de contribuer à sa réussite.
C'est ce que les sénateurs du groupe des Républicains et Indépendants feront
en soutenant votre action, monsieur le ministre, et en votant le présent projet
de loi.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la réforme
de l'Etat, voulue ardemment par le Président de la République, trouve, dans le
projet de loi que nous examinons aujourd'hui, sa première consécration
législative et vise à améliorer les relations entre les administrations et le
public.
Les objectifs sont multiples : l'Etat doit être plus simple, plus proche, plus
efficace et plus moderne si l'on veut éviter que l'administration ne soit une
entrave à l'initiative privée et ne décourage ceux qui ont besoin d'y
recourir.
Initiée en juillet 1995 par M. le Premier ministre, la réforme de l'Etat a
déjà fait l'objet de nombreux textes réglementaires.
Ainsi, un comité interministériel pour la réforme de l'Etat a été mis en place
et, dans les départements, cette démarche est complétée par celle des préfets,
qui consultent les élus locaux dans le cadre de l'élaboration de schémas
départementaux d'organisation et d'amélioration des services publics.
Sans revenir en détail sur l'excellente analyse de notre rapporteur, je
rappellerai simplement que les relations entre les administrations et les
usagers sont devenues extrêmement complexes. Les citoyens demandent toujours
plus à l'Etat ; pourtant, leur administration, souvent, ne les satisfait
pas.
Cela tient à plusieurs raisons : la complexité des procédures en est une,
l'éparpillement des services en est une autre ; l'inflation législative et
réglementaire, comme la multiplication des circulaires toujours plus longues et
plus complexes, n'y est pas étrangère non plus.
Le projet de loi qui nous est soumis prévoit une série de mesures qui
faciliteront les relations entre les usagers et l'administration et rendront
cette dernière plus humaine.
Ainsi, l'article 2 du projet de loi impose à l'ensemble des autorités
administratives énumérées à l'article 1er la délivrance d'un accusé de
réception aux auteurs des demandes ou des réclamations qui leur sont adressées
dans des limites, bien entendu, fixées par décret en Conseil d'Etat, afin de ne
pas substituer aux procédures existantes un régime uniforme qui se révélerait
inadapté.
De plus, afin de compléter le décret du 28 novembre 1983, qui prévoit déjà que
l'autorité administrative destinataire d'une demande qui n'est pas de sa
compétence doit la retransmettre vers l'administration compétente, l'article 3
prévoit que l'autorité saisie à tort doit aviser le demandeur de la
réorientation de son dossier.
Enfin, et cela est important pour la simplification des rapports entre
l'usager et l'administration, lorsque cette dernière entend prendre une
décision défavorable, le délai pendant lequel elle doit se prononcer sera
réduit de quatre à deux mois et, dans un certain nombre de cas, le silence
vaudra non plus rejet - ce qui est une règle ancienne du droit - mais au
contraire acceptation.
Cependant, il n'est nullement question que cette règle du «
silence-consentement » s'applique sans nuance. Elle devra tenir compte de la
position du Conseil constitutionnel, qui a érigé en principe général du droit
la règle selon laquelle le silence gardé par l'administration vaut rejet.
L'article 5 donne d'ailleurs un cadre législatif à l'intervention des décrets
en Conseil d'Etat qui prévoiront les cas dans lesquels le silence gardé par
l'administration vaudra acceptation. Nous ne pouvons qu'approuver ces
dispositions pleines de bons sens.
Les articles 4 et 5 vont vers une simplification administrative. Ils seront
complétés par voie réglementaire au cours de l'année 1997 puisqu'un décret en
Conseil d'Etat permettra, dans des cas d'ailleurs souvent très techniques, de
substituer au régime de l'autorisation administrative préalable un régime
déclaratif. M. le rapporteur a rappelé le nombre d'autorisations préalables
nécessaires, qui s'élève à quelque 4 200. Un Etat moderne ne peut fonctionner
efficacement dans ces conditions.
Vous me permettrez d'évoquer également l'article 6, qui concerne le retrait
pour illégalité d'une décision implicite d'acceptation. Je partage tout à fait
le souci de la commission de limiter dans le temps - deux mois - cette
possibilité de repentir ouverte à l'administration.
Toutefois, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez nous
indiquer quelles procédures pourront dans l'avenir être soumises à ce
régime.
Par ailleurs, toujours dans un esprit de simplification, ce dont je me
réjouis, les pouvoirs du Médiateur, ainsi que l'a fort bien expliqué M. le
rapporteur, sont renforcés.
L'Etat doit être plus simple, mais il doit être également plus proche.
Plusieurs décisions importantes relatives à la déconcentration sont déjà
intervenues : les autorités locales vont notamment disposer de crédits plus
importants et leur utilisation deviendra plus souple.
La gestion des ressources humaines de l'Etat et le dialogue social vont être
largement déconcentrés. Une formation mieux assurée, une mobilité plus grande
sont les gages d'un meilleur fonctionnement de l'administration.
Enfin, le rapprochement de l'Etat se traduira également par la création de «
maisons des services publics » regroupant sur un même lieu les différents
services de l'Etat. Mises en place à l'heure actuelle à titre expérimental, ces
maisons des services publics éviteront à l'usager des démarches inutiles et
permettront de rationaliser l'action administrative.
Au demeurant, monsieur le ministre, je crois qu'il sera nécessaire de veiller
très précisément aux conséquences des décisions d'implantation de ces maisons
des services publics, qui ne doivent en aucun cas aboutir à accélérer la
désertification de nos cantons, je sais que vous y êtes sensible.
De même, les maisons des services publics devront fonctionner dans le respect
des règles de la concurrence sans porter tort aux services proposés par les
acteurs économiques du monde rural. Je sais que ce point suscite une certaine
inquiétude.
En effet, en milieu rural, tout le monde comprend et souhaite que les maisons
des services publics permettent le maintien des services publics. Mais,
s'agissant de leurs éventuelles activités commerciales, il conviendra de
veiller à ce qu'elles soient permises lorsqu'elles seront en quelque sorte le
complément naturel et nécessaire des missions de service public.
L'administration deviendra plus efficace si les décisions peuvent être prises
au bon échelon. Cette évidence a peut-être été oubliée pendant de trop
nombreuses années. Les administrations centrales doivent se consacrer
pleinement à la définition des grandes stratégies et des orientations
politiques, alors que les administrations déconcentrées sont plus à même de
prendre des décisions rapides et d'être proches des citoyens. Je sais que c'est
dans ce sens que s'oriente toute votre action.
L'administration française a toujours été un modèle pour l'étranger et les
agents publics montrent chaque jour leur dévouement au service public et aux
citoyens. Mais l'administration doit évoluer et s'adapter.
Ce projet de loi, dont nous débutons l'examen cet après-midi, contribuera à la
modernisation de l'administration. Nous vous en savons gré, monsieur le
ministre. C'est pourquoi le groupe du RPR le votera.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi qui nous est proposé est présenté comme la première traduction législative
de la réforme de l'Etat. Cette réforme de l'Etat doit constituer l'un des
chantiers majeurs du septennat présidentiel.
Avec elle, se joue l'avenir de la fonction publique et des services publics.
Or, force est de constater que ce projet de loi s'inscrit dans un contexte de
tensions et de rupture du dialogue social sur fond de restrictions
budgétaires.
Tous les fonctionnaires expriment leur profond mécontentement, que ce soit
dans la fonction publique d'Etat, dans la fonction publique hospitalière ou
dans la fonction publique territoriale.
Dire que cette fameuse réforme doit être nécessairement et prioritairement
conduite avec les fonctionnaires est une évidence à laquelle ne semble pas
souscrire le Gouvernement. A cet égard, votre politique, monsieur le ministre,
est en parfaite contradiction avec vos discours et vos promesses.
Pour réussir, la réforme de l'Etat devrait commencer par s'appuyer sur les
fonctionnaires, leur faire confiance et, de surcroît, les encourager à
s'adapter au changement. Ils constituent la première richesse de l'Etat. C'est
de leur compétence, de leur mobilisation que dépend la capacité des services
publics à répondre aux besoins du pays. Or, la qualification de « mauvaise
graisse » utilisée par le Premier ministre reste présente à l'esprit.
Le Gouvernement ne cesse effectivement d'appeler de ses voeux la réduction du
nombre de fonctionnaires, et les négociations salariales viennent d'être
rompues. Il réclame une administration plus moderne et plus responsable, mais
impose des coupes claires dans les budgets publics, supprime des emplois, fait
du fonctionnaire un bouc-émissaire et décide, unilatéralement, d'accorder une
augmentation des salaires de 2,8 % sur deux ans pour 1997-1998, soit 1 % en
1997 appliqué en deux étapes - un demi-point au 1er mars, puis un demi point au
1er octobre - sans aucun rattrapage pour compenser le gel de 1996. La
négociation salariale attendue depuis le mois de juin 1995 n'a pas eu lieu.
Repoussée dans un premier temps au printemps 1996 par Jean Puech, votre
prédecesseur, puis par vous-même, à la fin de l'année 1996, cette négociation
est mort-née en ce début de mois de février 1997.
Chacun connaissait la faible marge de manoeuvre budgétaire dont disposait le
Gouvernement. La provision de 1,5 milliard de francs constituée dans le cadre
du budget pour 1997 présageait une négociation sans grain à moudre. Le
dénouement est encore plus expéditif qu'on aurait pu l'imaginer. Les
fonctionnaires se voient donc sacrifiés. La revalorisation dérisoire de leurs
traitements, inférieure à l'inflation prévisionnelle pour 1997, se traduira par
une nouvelle amputation de leur pouvoir d'achat.
En ne donnant aucune indication sur le calendrier des augmentations en 1998,
mais en reportant celles-ci à la fin de l'année prochaine, le Gouvernement
pourra sans encombre réussir l'examen de passage des comptes de la France pour
1998 et, en cas d'alternance, laisser à d'autres le soin de résoudre cette
question. N'est-ce pas, monsieur le ministre ?
Merci pour vos successeurs, vous leur laissez une situation très explosive
!
M. Michel Rufin.
On en a trouvé une bien pire !
M. James Bordas.
Il ne faut pas croire au père Noël !
M. Jacques Mahéas.
C'est tout à fait bien joué.
Votre politique se résumerait donc ainsi : moins de fonctionnaires, moins
payés, plus compétents et plus disponibles.
Comment demander aux agents publics de se mobiliser davantage quand on gèle
leurs salaires, qu'on coupe dans le budget de leurs services et dans leurs
effectifs et qu'on leur fait si peu confiance ?
Le service hospitalier ne fait-il pas également les frais de votre incapacité
à équilibrer le budget de la sécurité sociale, avec un déficit de 35,2
milliards de francs au lieu des 30,4 milliards de francs versés pour 1997 ? Les
compressions budgétaires, les menaces de licenciement et les restructurations
sont bien les trois piliers de la contestation sociale des centres hospitaliers
universitaires de Strasbourg, de Lyon, de Nice, de Béziers et de Caen, sans
oublier la région parisienne et l'hôpital psychiatrique de Maison-Blanche à
Neuilly-sur-Marne, en Seine-Saint-Denis. En tant que maire de
Neuilly-sur-Marne, je puis vous assurer que l'ensemble du personnel de cet
hôpital a bien compris la manoeuvre gouvernementale : sous prétexte de
restructuration, mille emplois sur les deux mille que compte cet établissement
devraient être supprimés en cinq ans. Voilà cinq semaines que le personnel est
en grève et demande le maintien des emplois !
Les mouvements de protestations se multiplient et les assurés sociaux
s'inquiètent.
La fonction publique territoriale n'est pas non plus épargnée. En particulier,
les agents recrutés après le 26 janvier 1984 ont de quoi être mécontents :
inutile de vous dire combien ils apprécient le « cadeau » de fin d'année qui
leur est réservé au travers de l'article 70 de la loi relative à l'emploi dans
la fonction publique du 16 décembre 1996, lequel prévoit pour eux la
suppression des compléments de rémunération, puisque le bénéfice des avantages
collectivement acquis se limitent aux seuls fonctionnaires recrutés au moment
de l'entrée en vigueur de la loi de 1984.
Je vous demande, monsieur le ministre, de nous donner rapidement des
explications sur ce sujet, et je suis persuadé que vous nous en fournirez à
l'occasion de votre réponse.
La volonté de réformer l'Etat n'est pas nouvelle : elle s'inscrit en
particulier dans la continuité du renouveau du service public mis en oeuvre le
23 février 1989 par Michel Rocard, alors Premier ministre, et confirmé, en mars
1992, par l'adoption de la charte des services publics, qui a été conçue comme
un instrument permettant la modernisation de l'administration.
Toutefois, au-delà des objectifs que vous affichez, monsieur le ministre,
votre démarche et surtout la philosophie qui régit ce vaste chantier sont aux
antipodes de notre conception de l'Etat et du service public. Votre démarche
s'inscrit davantage dans une logique de désengagement de l'Etat et de remise en
cause de la décentralisation.
Trois grands chantiers de cette réforme suscitent notamment l'inquiétude des
fonctionnaires et de leurs syndicats.
Il semble, par exemple, indispensable d'associer étroitement les intéressés à
la mise en oeuvre, puis à l'évaluation des contrats de service dans leurs
différents stades d'expérimentation.
Je prendrai un autre exemple, celui du redéploiement des administrations
centrales. Il soulève, à juste titre, des craintes si votre politique se
contente de fixer mécaniquement un objectif de réduction des effectifs de 10 %
et de diminution des services de 30 %. Chacun comprend, sans qu'il soit besoin
d'explication supplémentaire !
Qu'en est-il, enfin, de la réorganisation des services déconcentrés, dont les
expériences débuteront prochainement, à la fin du mois de mars ou au début du
mois d'avril ? Ne répond-elle pas aussi à l'objectif inavoué d'intégrer à
certaines directions départementales des services qui gênent ? Il suffit de
penser à la protection judiciaire de la jeunesse, à la jeunesse et aux sports,
destinées à être agrégées à une direction départementale de la santé, de la
population et de la solidarité ou à la direction départementale des affaires
sanitaires et sociales, la DDASS.
Le peu de considération pour les fonctionnaires et la pénurie de moyens vous
conduisent à nous faire débattre aujourd'hui sur ce « petit » projet de loi
relatif à l'amélioration des relations public-administration.
Si son objet est assez pragmatique, il masque en vérité bien mal la réelle
pénurie de l'accueil au guichet.
Si, d'autre part, il s'inscrit dans le cadre d'une administration modernisée,
il ne se situe pas au centre de l'action gouvernementale comme on aurait pu
l'espérer eu égard au battage médiatique dont il a été l'objet.
Vous aviez annoncé, monsieur le ministre, une « petite révolution »
administrative. En fait, ce texte ne comporte aucune innovation marquante. Ce
n'est, à bien des égards, qu'un texte d'ajustement qui relève plus de la
circulaire ministérielle que de la loi. Il est avant tout réglementaire et très
peu législatif.
Il s'articule autour de trois grands principes, qui appellent un certain
nombre d'observations.
Le titre Ier a pour objet essentiel d'élargir aux collectivités territoriales
la portée du décret du 28 novembre 1983 et de généraliser le principe de
décision implicite d'acceptation.
On peut difficilement s'opposer à des propositions qui visent à simplifier la
vie des administrés et à assurer une meilleure transparence en matière de
traitement des dossiers. Encore faut-il connaître les attentes des usagers et
reconnaître les risques de confusion et d'incertitude concernant la règle du
silence de l'administration. Le simple citoyen aura du mal à s'y retrouver,
tandis que les services seront confrontés à des contraintes accrues, notamment
du fait de l'insuffisance de leurs effectifs.
Vous comprendrez, en outre, la crainte d'un surcroît de travail et d'un
surcoût financier pour les collectivités territoriales. Certains élus
s'interrogent sur les conséquences que pourraient avoir ces nouvelles
obligations : accusé de réception, transmission à l'autorité compétente. La
mairie étant l'administration de proximité par excellence, certains redoutent
d'être envahis par les dossiers et craignent des dépenses supplémentaires ;
elles seront d'autant plus mal venues que la franchise postale a été
supprimée.
En conséquence, si nous approuvons l'effort d'amélioration de la vie
quotidienne des administrés, nous nous interrogeons sur les moyens humains,
matériels et financiers qui devraient l'accompagner, ainsi que sur les critères
de gestion et de contrôle qu'impliquent ces dispositions mais qui ne sont
jamais mentionnés dans ce texte. On parle d'une première vague de 280 décrets
soumis au Conseil d'Etat. Pouvez-vous nous informer à ce sujet, monsieur le
ministre ?
Le Médiateur lui-même, lors de son audition par la commission des lois, le 28
janvier dernier, a mis en garde sur le risque de voir une idée intéressante
détournée au détriment des administrés. L'extension du régime de décision
implicite d'acceptation, combinée à la réduction des délais de réponse, lui a
paru être de nature à inciter les services à rejeter des demandes faute d'avoir
les moyens et le temps de les examiner correctement. Cette pratique pourrait
d'ailleurs engendrer une insatisfaction des usagers, qui demandent une réponse
rapide.
L'objet du titre II est d'élargir la saisine du Médiateur de la République à
de nouvelles catégories d'élus, d'étendre ses compétences et de renforcer son
rôle.
Autant il paraît fondé d'étendre les compétences du Médiateur, autant le choix
des nouveaux élus qui pourraient le saisir prête à discussion.
Le président du conseil général a des prérogatives exécutives, par exemple en
matière d'aide sociale ou d'agrément d'établissement, qui lui confèrent une
responsabilité importante. Il est peu probable qu'il s'empresse de transmettre
au Médiateur une réclamation d'un citoyen qui s'estime lésé par une décision
qu'il a prise en ces domaines.
Le même problème se pose pour un président de conseil régional, en matière de
bourses, de formation professionnelle, ou pour le maire de Paris, qui est amené
à prendre des décisions en matière de logement. Par ailleurs, pourquoi le
président du conseil exécutif de Corse aurait-il plus de poids que les élus des
grandes villes ? Vous établissez là une discrimination entre les élus.
Si l'on veut améliorer les relations entre les institutions et le public, ne
vaudrait-il pas mieux élargir la saisine directe du Médiateur à tous les
citoyens ? Certes le filtrage effectué actuellement par les parlementaires,
indépendants à l'égard de l'administration, évite que le Médiateur ne soit
saisi de trop nombreuses réclamations irrecevables. Nous y reviendrons lors de
la discussion des articles.
Enfin, le titre III de votre projet, qui définit le cadre juridique des
maisons des services publics, suscite de multiples réflexions.
On est d'ailleurs en droit de se demander si le projet que vous nous soumettez
n'est pas un simple prétexte pour poser les fondements législatifs d'une autre
administration, constituée de services polyvalents, relevant d'ailleurs du
public ou du privé, dotés de personnels dont les garanties statutaires ne sont
pas évoquées.
Je me contenterai, dans l'immédiat, de formuler quelques questions qui
alimenteront éventuellement le débat.
S'agira-t-il simplement de transferts de services ou de la création de
nouveaux services avec création de postes ?
Quels établissements publics et organismes chargés d'une mission de service
public s'associeront ?
N'y a-t-il pas contradiction entre la mise en place de maisons des services
publics et les projets de suppression et de regroupement de services ou la
fermeture, dans de nombreuses régions et localités, de services publics de
proximité ? La création des maisons des services publics est-elle conçue pour
mieux faire accepter la suppression de services publics en certains points du
territoire ?
M. René Régnault.
Très bonne question !
M. Jacques Mahéas.
Les « maisons » proposées se réduiront-elles à quelques agents derrière des
guichets, renvoyant ailleurs le traitement effectif du dossier ? Quelles
garanties l'usager aura-t-il en ce domaine ? Comment pourra-t-il être assuré de
la compétence du fonctionnaire auquel il aura affaire ? S'agira-t-il d'un
service public minimal ?
Comment les agents de ces « maisons » pourront-ils être informés de toutes les
réglementations en vigueur ? Or ils devront l'être pour assumer les missions
polyvalentes qui leur sont dévolues.
Quel est l'intérêt du groupement d'intérêt public ?
L'Etat n'organise-t-il pas un transfert de charges vers les collectivités
territoriales, auxquelles reviendra une part importante du financement ? Cette
crainte est d'autant plus légitime que le fonds pour la réforme de l'Etat
n'apporte qu'un complément dérisoire dans le financement du démarrage des
expériences.
La formule de la maison des services publics peut être séduisante, mais elle
risque de nuire à la lisibilité, pour les citoyens, des responsabilités de
chacun et elle ne répond pas à l'attente des usagers.
Les usagers attendent des services publics de proximité qu'ils soient capables
de traiter pleinement leurs demandes, avec des agents formés et compétents.
Encore faudrait-il disposer d'un personnel assez nombreux et formé à la
polyvalence, et octroyer les crédits nécessaires aux ministères concernés.
Votre projet de loi, monsieur le ministre, a certes pour objet d'améliorer les
relations entre l'administration et le public. Mais comment prétendre
rapprocher l'administration de ses usagers quand les effectifs sont en baisse
et quand on ne se donne pas les moyens financiers d'une véritable réforme ?
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi qui nous est soumis aujourd'hui est le premier volet législatif de la
réforme de l'Etat. Cependant, comme nous l'a d'ailleurs rappelé à juste titre
M. le ministre, il ne concerne qu'une partie de celle-ci.
J'ajouterai qu'il s'agit d'une partie bien modeste. Non que l'amélioration des
relations entre l'administration et les usagers soit un objectif mineur, bien
au contraire, mais les mesures contenues dans ce texte ne sont vraiment pas à
la hauteur de l'objectif ; j'y reviendrai.
Pourtant, M. Chirac, lors de sa campagne présidentielle, puis M. Juppé nous
ont successivement annoncé leur intention de mener une réforme de l'Etat
ambitieuse et de grande ampleur pour répondre aux changements de la société
française, et ils n'ont cessé d'insister sur la nécessité de faciliter les
démarches administratives en simplifiant les procédures et en les rendant plus
rapides.
Or, aujourd'hui, que voyons-nous ?
Les dispositions concernant les rapports entre l'administration et les usagers
sont plus que décevantes. Quant aux autres mesures tendant à la réforme de
l'Etat, dont certaines sont véritablement déterminantes pour l'avenir de notre
société, elles sont ou seront prises en dehors du Parlement.
Vous me répondrez, monsieur le ministre, que vous n'y êtes pour rien, et il
est vrai que, si l'organisation de l'Etat et son fonctionnement relèvent du
domaine réglementaire, c'est en vertu de la Constitution.
Cependant, je ne suis pas sûr que, face à l'enjeu de cette réforme, l'argument
constitutionnel explique à lui seul la situation.
Derrière les intentions du Gouvernement, qui sont résumées dans le triptypque
sans cesse rappelé : « Un Etat plus proche, plus simple et plus moderne », une
formule dans laquelle on peut mettre tout et son contraire, c'est en fait un
véritable effacement de l'Etat qui est programmé.
Les différents documents de travail élaborés par vos services, monsieur le
ministre, sont à cet égard fort clairs : l'idée directrice qui sous-tend toute
cette réforme est celle d'un Etat minimal, adapté aux exigences de Maastricht,
c'est-à-dire d'un Etat qui se soucie peu de répondre aux besoins de la
population pourvu que ses comptes ne soient pas dans le « rouge ».
Ce n'est certainement pas ainsi que la France sortira de la crise.
Il faut, au contraire, selon nous, un Etat volontariste, qui impulse une
dynamique nouvelle, et non un Etat amenuisé, qui laisse à la dérive un nombre
croissant d'individus. Il faut une fonction publique correctement rémunérée,
formée et respectée. Vous n'avez pas, je le crains, choisi cette politique.
Compte tenu de l'importance du sujet au regard du devenir de notre société, il
aurait été utile d'organiser un vrai débat, large et contradictoire, au
Parlement. Rien ne vous en empêchait, monsieur le ministre.
Il me semble que cette mise hors jeu du Parlement n'est pas sans vous convenir
: les mesures délicates restent ainsi dans une semi-confidentialité, tandis que
le volet
a priori
le plus consensuel, celui qui touche directement les
citoyens, nécessite le vote d'une loi.
Cela est d'autant plus choquant que le présent projet de loi est lui-même une
sorte d'artifice : non seulement il n'innove guère, mais il renvoie
systématiquement chaque mesure à des décrets pris en Conseil d'Etat.
Ne serions-nous là que pour vous donner carte blanche ?
Examinons maintenant les différentes mesures qui nous sont proposées.
Le titre Ier du projet a pour objet d'accélérer le processus de décision des
administrations.
Je constate tout d'abord que nombre de ces dispositions ne sont ni plus ni
moins que la reprise du décret du 28 novembre 1983 relatif aux relations entre
l'administration et les usagers.
Il en est ainsi de l'obligation pour les autorités administratives d'accuser
réception des demandes des usagers, de leur obligation de transmettre au
service compétent les demandes dont elles sont saisies à tort et de la
possibilité, pour tout citoyen, de présenter des observations écrites ou orales
sur les décisions individuelles les concernant.
Le seul apport du texte consiste en fait dans l'extension du champ
d'application de ces obligations aux collectivités territoriales, aux
organismes de sécurité sociale et aux organismes chargés de la gestion d'un
service public administratif. Cette extension est, certes, une bonne chose
mais, de grâce, que l'on ne nous parle pas de nouveaux droits fondamentaux !
Quant aux deux autres mesures du titre Ier, celle qui vise à réduire de quatre
à deux mois le délai de réponse de l'administration et celle qui tend à ce que
le silence de l'administration vaille acceptation tacite, on nous dit qu'il
s'agit des plus innovantes. Permettez-moi quelques remarques à ce sujet.
Le principe selon lequel le silence de l'administration vaut rejet demeure le
droit commun puisque les décisions individuelles échappant au principe seront
établies au cas par cas dans une liste prise par décret en Conseil d'Etat. Il
est donc pour le moins difficile d'évaluer la portée de cette mesure.
Quant au délai de deux mois, la rapidité est certes un élément appréciable,
mais j'ai bien peur que l'application de ce principe ne pose un sérieux
problème aux administrations : comment être plus rapide quand aucun moyen
supplémentaire n'est prévu et que, chaque année, les budgets publics sont
réduits, des postes de fonctionnaires supprimés ?
Si l'administration souffre de lenteur, ce n'est pas parce que ses agents ne
font pas leur travail ; c'est parce que, faute de moyens et d'effectifs
suffisants, ils manquent de temps.
Ils sont les premiers à souhaiter pouvoir rendre un meilleur service à
l'usager, et certains propos gouvernementaux tendant à les rendre responsables
de l'inefficacité et des lourdeurs de l'administration sont pour le moins
déplacés.
S'agissant du Médiateur de la République, dont je veux saluer l'efficacité et
la compétence, vous proposez deux changements qui vont dans le sens d'un
renforcement de cette institution. Nous ne nous y opposerons pas, mais je doute
fort que cela change en profondeur les relations des usagers avec
l'administration.
Avec les dispositions du titre III, relatif aux maisons des services publics,
le projet de loi vise à donner un cadre législatif à diverses expériences
menées depuis plusieurs années ou en cours de mise en place.
Ces expériences pourraient, dans une certaine mesure, être positives si les
emplois et les services étaient systématiquement au moins maintenus.
L'objectif visé est en apparence fort louable puisqu'il s'agit de réunir en un
seul lieu différents services publics afin de faciliter les démarches des
usagers. Cependant, aucun moyen supplémentaire sérieux n'est prévu. Or de tels
regroupements nécessitent des locaux, du personnel et des moyens de
fonctionnement.
J'ai bien peur que, en fait, cette mesure ne soit qu'un paravent, destiné à
dissimuler des suppressions de services publics, notamment dans les zones
rurales, où la présence administrative est déjà bien ténue.
Je crains encore que les mairies de nos villages ne se trouvent surchagées,
voire obligées de servir des organismes privés, du type Compagnie générale des
eaux.
L'urgence aujourd'hui porte moins sur les regroupements de services publics
que sur le renforcement de la présence de l'Etat et des services publics dans
les zones rurales et dans les zones urbaines dites sensibles.
Or, toute la politique du Gouvernement vise, au contraire, au désengagement de
l'Etat et au démantèlement de la fonction publique.
La nouvelle carte scolaire, approuvée dans le cadre du budget de 1997,
supprime près de 3 000 postes d'instituteur, et entraînera donc autant de
fermetures de classe.
Autre exemple, encore plus concret, la poste des Minguettes a été récemment
rénovée et modernisée. Eh bien, contrairement aux engagements qui avait été
pris, cela s'est traduit par la suppression de deux emplois, ensuite remplacés
par des postes attribués à des titulaires de contrats emploi-solidarité !
Cet exemple vous paraît peut-être dérisoire, mais, hélas ! il est loin d'être
isolé.
La volonté du Gouvernement de développer les maisons des services publics
semble surtout destinée à opérer des regroupements supracantonaux. Elle
s'inscrit dans le prolongement direct de la politique d'aménagement du
territoire où le « pays » doit devenir l'espace d'organisation des services
publics.
Il s'agit donc moins de rapprocher l'administration des usagers, comme
l'affirme le Gouvernement, que d'imposer des rationnements et de faire accepter
un partage de la pénurie conduisant à une offre de service public minimale.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Voilà la vérité !
M. Robert Pagès.
Nombreux ont été les gouvernements qui ont voulu simplifier les procédures,
rapprocher les citoyens des administrations, et, plus largement, réformer
l'Etat. Loin de moi, l'idée de leur en faire grief, bien au contraire.
Toutefois, ce que le Gouvernement entreprend aujourd'hui est non pas une
réforme de l'Etat, mais une réforme contre l'Etat.
Aussi le groupe communiste républicain et citoyen ne votera-t-il pas ce
texte.
(Applaudissements sur les travées du groupe communistes républicain et
citoyen.)
4
SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
DU MEXIQUE
M. le président.
Mes chers collègues, il m'est particulièrement agréable de saluer la présence,
dans notre tribune officielle, d'une délégation de sénateurs de la République
du Mexique, conduite par le président du groupe d'amitié Mexique-France, M.
Gustavo Carvajal Moreno.
Nos collègues effectuent un séjour à Paris, à l'invitation du groupe
sénatorial d'amitié France-Mexique que préside M. Charles Descours, à
l'occasion d'un colloque qui s'est tenu ce jour salle Médicis sous le haut
patronage de M. le président René Monory, sur le développement des relations
économiques entre le Mexique et la France.
Au nom du Sénat de la République, je souhaite la bienvenue à nos collègues
mexicains, et je forme des voeux pour que leur visite conforte l'amitié entre
nos deux assemblées et, à travers elles, entre nos deux nations.
(Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
5
AMÉLIORATION DES RELATIONS
ENTRE LES ADMINISTRATIONS ET LE PUBLIC
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et
le public.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Régnault.
M. René Régnault.
Ce projet de loi, monsieur le ministre, est très attendu.
D'une part, il est censé répondre à l'obligation de déconcentration de l'Etat
prévue par la loi de décentralisation du 2 mars 1982. La déconcentration doit
se poursuivre : le mouvement de rapprochement des services de l'Etat vers le
citoyen-administré est le pendant indispensable de la décentralisation des
services vers des élus territoriaux reconnus responsables.
D'autre part, ce projet de loi doit aussi traduire une des orientations de la
loi du 4 février 1995 sur l'aménagement et le développement du territoire.
En écho à son annonce, avec force et solennité, par la plus haute autorité de
l'Etat - le Président de la République - dès 1995, le Gouvernement exprime dans
ce projet de loi ses intentions.
Vous aviez soumis à la concertation des élus, entre autres choses, une sorte
de mémorandum qui nous avait autorisés à croire à un projet de loi fort,
exhaustif, adapté aux nécessités de la décentralisation et répondant mieux aux
exigences de sa réussite, monsieur le ministre.
Force est tout de même de constater que le projet de loi que vous nous
soumettez a perdu de ses ambitions ! Sa portée est limitée, et c'est parfois
d'ailleurs significatif, notamment sur le plan législatif, puisque, pour les
quatre cinquièmes, il s'agit de dispositions de caractère réglementaire plus
que de dispositions de nature nécessairement législative. Une fois encore,
monsieur le ministre, le décalage entre les promesses et les propositions est
important. Il en est même inquiétant.
Autant je crois à la nécessité de se plier aux obligations nées des deux lois
essentielles que j'ai rappelées, autant je déplore l'insuffisance des solutions
proposées. La volonté de l'Etat ne s'exprime pas avec force et, s'il y a un
objectif affirmé, celui-ci manque de clarté ; il y a aussi matière à lire entre
les lignes !
J'ajoute que le Gouvernement aborde ce débat sous des auspices peu rassurants
: les services publics ont besoin de moyens humains - les fonctionnaires -
suffisants et adaptés pour assurer leur présence et leur pérennité. Mais, les
fonctionnaires, c'est la feuille d'impôt, selon le chef de l'Etat. M. Alain
Madelin, lui, dénonçait leurs salaires. Quant au Premier ministre, il parlait
il y a peu encore de « mauvaise graisse » !
Les négociations salariales que vous aviez entamées voilà quelques semaines
ont d'ailleurs tourné court, le Gouvernement ayant fait des propositions dont
je ne veux pas croire qu'il ignorait qu'elles étaient inacceptables.
J'indique, pour que les choses soient claires, que la France, avec 5,73 agents
publics pour 100 habitants, n'est qu'en neuvième position dans l'Union
européenne. Il faut donc cesser de répéter à tout va que la France est d'abord
et avant tout constituée d'une armée de fonctionnaires !
Mon collègue Jacques Mahéas a analysé les dispositions relatives au régime des
décisions administratives. Je n'y reviens pas.
Il a aussi, fort remarquablement, argumenté notre position en ce qui concerne
la saisine du Médiateur. Je veux à mon tour insister sur le fait que cette
saisine est bien aujourd'hui ouverte à tous nos concitoyens. Ils doivent,
certes, faire transiter leurs demandes par des parlementaires nationaux, mais
le système n'en est pas moins satisfaisant et doit en conséquence demeurer en
l'état. Vous avez eu la sagesse, monsieur le rapporteur, de proposer et de
faire adopter en commission un amendement allant dans ce sens.
Plus importantes, plus novatrices et plus intéressantes sont les dispositions
relatives aux maisons des services publics.
Les services de l'Etat sont parfois difficilement accessibles, voire
inaccessibles à certains de nos concitoyens vivant dans les secteurs ruraux ou
les périphéries urbaines. D'ordre administratif, ils ont parfois un caractère
commercial, comme La Poste, la SNCF, EDF, GDF, ou encore sont des institutions
sous tutelle de l'Etat, comme la sécurité sociale, les caisses d'allocations
familiales, etc. Ils doivent donc être offerts, sans discrimination, à tous nos
compatriotes. Je crois pouvoir dire que c'est un devoir constitutionnel, nos
compatriotes étant eux-mêmes en droit d'en demander l'égal accès sans que les
distances et les délais pour s'y rendre ne dépassent les limites que la loi du
4 février 1995 a posées.
On ne peut considérer la gestion d'un service public, c'est-à-dire d'un
service d'intérêt général, à la seule aune de son coût, sous son seul aspect
financier.
M. Robert Pagès.
Très juste !
M. René Régnault.
La cohésion sociale dépend de la réduction des fractures sociales et, des
inégalités de traitement entre nos concitoyens par les services de l'Etat. La
cohérence territoriale dépend, elle aussi, de la garantie d'offre de services
publics, services, je le répète, d'intérêt général.
La seule arithmétique des normes est inacceptable et ne peut répondre aux
exigences des milieux ruraux ou des périphéries en mal d'insertion et
d'intégration.
Je veux encore préciser que ce ne sont pas, ou bien rarement, les services des
collectivités territoriales qui font le plus défaut. Les maires veillent et
s'organisent pour répondre aux nécessités des populations. Il eût d'ailleurs
été intéressant pour les maires que vous indiquiez, monsieur le ministre,
comment s'établira la carte des pays et, surtout, ce que recouvriront ces
entités. Les maisons des services publics, sur lesquelles tout le monde
s'interroge, préfigureraient-elles une nouvelle organisation administrative
?
En revanche, ce sont les services publics de l'Etat, les services publics à
caractère commercial ainsi que certaines institutions sociales ou
professionnelles qui font défaut ; au fil des années, ils se sont éloignés du
public.
Pour répondre aux attentes nées de l'adoption de la loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire, je peux croire à l'utilité des
maisons des services publics, mais à quelques conditions fortes, simples et
essentielles que je présenterai maintenant sous forme de questions. Vos
réponses, monsieur le ministre, seront déterminantes et orienteront le vote du
groupe socialiste.
En premier lieu, ces maisons des services publics ont-elles pour objet de
maintenir, voire de rétablir le service public de l'Etat, ou le service public
institutionnel, afin de porter remède à la désertification des territoires
ruraux et aux difficultés rencontrées par les populations déracinées des
banlieues ?
En second lieu, ces services publics, relevant essentiellement de l'Etat ou
placés sous sa tutelle, doivent, au nom de la solidarité nationale découlant de
son pouvoir régalien, être placés sous sa responsabilité. L'Etat devrait donc
doter les maisons des services publics de fonctionnaires d'Etat, préparés à
assumer des missions et des responsabilités spécifiques. Cette proposition,
monsieur le ministre, est fondamentale, et votre réponse sera ici
essentielle.
S'il est permis de ne pas écarter l'idée de transfert de quelques services
territoriaux sous convention, il est clair qu'il ne saurait être question de
déstabiliser nos mairies ou nos services municipaux en les affaiblissant.
Les collectivités territoriales, par la voix notamment de l'Association des
maires de France qui a formulé un avis en ce sens, mettent en garde l'Etat
contre toute nouvelle tentative de transferts de charges et de responsabilités
de lui incombant.
Etablir ou rétablir des services publics de l'Etat, ou sous le contrôle de
l'Etat, reçoit mon adhésion. Que l'Etat assure sa charge et sa responsabilité
est indispensable. Celles-ci doivent être clairement exprimées pour être
durablement assurées et garanties.
La suite du débat, vos réponses, l'examen des articles et des amendements
retiendront notre attention et conditionneront notre vote final qui, d'une
abstention bienveillante, pourrait devenir un refus catégorique si j'en juge
par le sort qui a été réservé à quelques-uns de nos amendements lors de leur
examen par la commission, il y a quelques heures.
(Applaudissements sur les
travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques vient de
diffuser un rapport :
La France et la société de l'information, un cri
d'alarme et une croisade nécessaire.
Un cri d'alarme, pourquoi ? Parce que la France prend du retard en ce domaine.
Le Président de la République en est bien conscient et le Premier ministre a
lui-même affirmé récemment la nécessité de la présence de l'Etat sur le Net.
A deux pas de l'hémicycle, monsieur le ministre, une démonstration est
d'ailleurs en cours, exposant tout ce qui est disponible non seulement sur
l'Intranet, mais aussi sur le site Internet du Sénat.
Les résultats de nos missions d'information, au-delà des cercles
traditionnels, sont désormais consultés par le public et rencontrent un large
succès. Un constat toutefois : ni les départements ministériels, ni les
collectivités locales ne participent à ces consultations, ce qui est
préoccupant, surtout eu égard au rôle du Sénat par rapport aux collectivités
locales.
Les autorités administratives, en la matière, ne donnent pas l'exemple de la
modernité, d'où, à mon sens, la nécessité de les y inciter. Je ne doute pas,
monsieur le ministre, que, dans le cadre de la réforme de l'Etat, vous vous y
prépariez.
Vous avez vous-même évoqué à cette tribune, il y a quelques instants, la
communication en temps réel. Toutefois, je crains, monsieur le ministre, que,
aux yeux du public, le texte que les services vous ont préparé et que
l'Assemblée nationale a modifié légèrement ne fasse penser que le Gouvernement
ignore les progrès de la société de l'information et à quel point celle-ci
bouleversr les habitudes, les structures, les hiérarchies et les comportements,
et permet à chacun d'avoir accès à toutes les sources d'information. Je sais
qu'il n'en est rien et je pense que vous avez à coeur de placer dans la réforme
de l'Etat les nouvelles possibilités d'information et de communication, moyens
d'une démocratie moderne.
Mais ce serait une erreur de ne pas le dire dans une loi. La plus grande
puissance du monde, lors d'une élection présidentielle datant de quelque cinq
ans et au cours de laquelle MM. Clinton et Al Gore ont fait campagne en grande
partie sur les autoroutes de l'information, n'a pas craint de le dire. Depuis
lors, toutes les autorités administratives de l'Amérique du Nord
s'informatisent ; les citoyens en bénéficient et cela diminue notablement les
frais de fonctionnement des administrations.
A l'intérieur d'une administration, un système de réseau interne, par exemple
de type Intranet, permet d'activer la communication et d'annihiler les délais
prohibitifs.
A l'extérieur, un Extranet interministériel, protégé et fermé, donc
confidentiel, permet de gagner un temps considérable.
L'accord de douze directeurs peut être obtenu en un quart d'heure et la
négociation des points délicats peut s'effectuer en quelques heures. Par la
voie dite « normale », cela nécessite des semaines ou des mois. Bien sûr, cela
change la nature du travail et nécessite le reformatage des fonctions de chacun
- ce qui prend du temps - mais, au total, l'administration s'en trouve bien, et
les usagers de l'administration et le public également.
Je prendrai plusieurs exemples.
Le premier concerne le domaine de la justice. La population française admet
très difficilement que plusieurs mois s'écoulent avant qu'une décision de
justice soit transmise par les greffiers. En effet, une informatisation
systématique permettrait de le faire le jour même de la décision, puisque la
plupart des attendus correspondent non pas à des innovations, mais à des
références assez classiques et des coupés-collés informatisés permettent en
quelques minutes de rédiger une conclusion. La relecture et la signature ne
durent pas des semaines. J'évoque la justice parce que c'est tout de même une
priorité pour nos compatriotes, qui sont très sensibles à la durée des
délais.
Le deuxième exemple concerne la comptabilité M 14, que mes collègues sénateurs
connaissent bien et que la plupart des collectivités locales implantent, mais à
quel coût ! Sur Internet, il existe un site, émanant d'une entreprise privée,
qui propose un forum traitant de la manière d'implanter cette comptabilité. Il
est relativement peu actif parce que les collectivités n'ont pas acheté, pour
quelque mille francs, un modem et ne sont pas connectées. Elles dépensent
beaucoup plus d'argent pour obtenir les formations et les informations qu'elles
pourraient avoir en se connectant sur Wanadoo ou tout autre fournisseur
d'accès. Cette absence de modernité coûte cher.
De la même manière, la préparation des réunions intersyndicales et même leur
tenue peuvent très bien se faire sous forme de forum Intranet ou Internet. Je
prends volontiers des exemples qui ne concernent pas directement l'Etat, parce
que le présent projet de loi traite de l'Etat et de ses services, mais aussi
des administrations en général.
Le troisième exemple concerne l'Association des maires de France. Je suis
convaincu que cette association serait encore plus active, plus utile et plus
dynamique si elle privilégiait une action par le biais d'Internet. Encore
faut-il que les mairies soient connectées, donc qu'elles y soient incitées.
Un message que je viens de recevoir sur Internet par l'intermédiaire du
serveur du Sénat me cite de nombreux exemples du cercle vicieux que représente
le fait que les choses ne se font pas parce que les mairies ne sont pas
suffisamment connectées. Dans notre groupe, nous avons la possibilité de faire
des visio-conférences sur Numéris.
Nous l'utilisons avec la Guyane, mais relativement peu avec nos collègues de la
métropole, parce qu'ils ne sont pas connectés, n'ont pas de système
visio-conférence sur Numéris. Pourtant, cela ne coûte pratiquement rien :
l'investissement est tout à fait négligeable et le prix de l'abonnement vient
encore de baisser.
Autre exemple : je viens de déposer une proposition de loi qui sera présentée
par notre collègue M. Othily. Elle vise à permettre aux parents de déclarer la
naissance d'un enfant à la mairie de leur lieu de résidence, et non pas à celle
du lieu de naissance. Apparemment, cela était impossible jusqu'à présent, faute
d'une centralisation des fichiers de l'état civil par le ministère compétent.
Désormais, grâce aux transmissions de données, cela est possible. On peut même
maintenant effectuer une centralisation virtuelle, sans qu'il soit nécessaire
d'y procéder matériellement.
Le problème est majeur. Le développement informatique des administrations
reste, selon moi, limité. C'est pourquoi nous proposons, par amendement, la
création de cellules au sein de chacune des autorités administratives et d'un
observatoire chargé de suivre la mise en réseau de ces cellules. En effet, pour
le moment, les différents ministères ne sont pas connectés et règne un certain
flou. Une connexion entre ces cellules, avec un observatoire qui en rendrait
compte et qui viserait la connexion, serait très utile.
Un deuxième amendement tend à ce que les services décentralisés de l'Etat
puissent veiller à ce que les réclamations adressées par voie électronique
soient traitées de la même façon et dans les mêmes conditions. Si vous
considérez, monsieur le ministre, que cette disposition relève du domaine
réglementaire et si vous nous indiquez que cela pourrait être mis en place par
cette voie, nous pourrons retirer cet amendement.
M. le président.
Mon cher collègue, je vous prie de conclure.
M. Pierre Laffitte.
Je conclus, monsieur le président.
Un autre de nos amendements vise les maisons des services publics. Il
persuadera peut-être nos collègues de la gauche que les quelques craintes
qu'ils peuvent ressentir en ce qui concerne ces maisons sont injustifiées.
Les usagers devraient pouvoir être aidés dans leur utilisation des guichets
électroniques installés dans ces maisons.
Monsieur le ministre, nous voterons votre projet de loi parce qu'il va dans le
bon sens, surtout si vous acceptez nos amendements. En effet, aux termes de ce
texte, les usagers sont considérés un peu moins comme des assujettis et un peu
plus comme des partenaires au coeur des services publics.
(Applaudissements
sur les travées du RDSE et de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je souhaiterais apporter un certain nombre de précisions
à la suite des réflexions et des interrogations qui viennent d'être
exprimées.
J'ai d'abord entendu la confirmation de ce que nous disions, les uns et les
autres, c'est-à-dire une attente forte vis-à-vis de la réforme de l'Etat dans
ses différents objectifs, qu'il s'agise de la simplification, comme l'a dit M.
Cabanel, de la déconcentration, comme l'ont souligné M. le rapporteur et M.
Courtois, ou de la nécessité de s'appuyer sur les ressources humaines et
peut-être de mieux développer la déconcentation de la gestion des personnels.
M. Bordas a insisté sur ce point et je voudrais lui dire que nous avançons dans
ce domaine.
En effet, j'ai présenté au Conseil supérieur de la fonction publique de
l'Etat, au mois de décembre, un certain nombre de projets de textes qui ont été
adoptés depuis et qui vont dans ce sens : ils vont permettre à la fois de
déconcentrer la gestion des personnels et de nouer le dialogue social, car on
ne peut pas faire l'un sans l'autre. Cela constituera, selon moi, un élément de
cette mobilité que vous avez appelée de vos voeux. A cet égard, je citerai un
seul exemple : la mise à disposition, d'une administration à une autre, d'un
agent dans les services déconcentrés sera dorénavant décidée par les préfets.
Cela pourra donner à certains agents, qui, bien souvent, le souhaitent, des
possibilités pour diversifier leur carrière et, donc, leur expérience
professionnelle.
S'agissant de la nécessité d'améliorer les relations entre les administrations
et le public, tous les orateurs sont d'accord, notamment sur le
raccourcissement des délais de réponse, sur la question des accusés de
réception ou encore sur l'obligation de transmettre la demande d'un usager si
celui-ci se trompe car, au fond, c'est à l'administration d'assumer sa propre
complexité.
Cela étant, un certain nombre de craintes ou d'interrogations ont été
exprimées, et je voudrais y revenir.
Plusieurs d'entre vous, en particulier M. le rapporteur, ont évoqué la
capacité des petites communes à faire face, ce qui provoque quelques craintes,
à la transmission de dossiers qui leur auraient été adressés par erreur.
J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur ce point à l'Assemblée nationale.
C'est une question que nous devrions régler de manière pragmatique, en
particulier en utilisant les bonnes relations qui existent entre les petites
communes et les sous-préfectures. Le plus simple sera effectivement que nous
veillions à ce que les sous-préfets, d'une manière très claire, reçoivent la
demande qui serait arrivée dans une petite commune par erreur et se fassent
fort de l'acheminer dans la bonne direction. Cela évitera ainsi au maire d'une
petite commune de rechercher quel peut bien être le service destinataire de la
demande. Les sous-préfets, qui ont l'habitude des relations avec les maires des
petites communes, pourront assumer cette tâche, afin qu'elle ne constitue pas
un surcroît de travail pour les maires de ces communes.
J'en viens aux décrets d'application. J'ai évoqué à plusieurs reprises leur
nécessité. C'est notre Constitution elle-même, en ses articles 34 et 37,
monsieur Pagès, qui prévoit les choses ainsi. Cela étant, il est bien normal
que vous souhaitiez savoir ce qui va se passer après le vote du projet de
loi.
D'abord, seront pris deux décrets généraux d'application : l'un concernera les
modalités de mise en oeuvre de l'obligation d'accuser réception des demandes,
avec les mentions obligatoires, les exceptions et un certain nombre d'éléments
précis ; l'autre sera relatif aux maisons des services publics.
Par ailleurs, comme je l'ai indiqué à propos des articles 4 et 5, des décrets
interviendront pour la mise en oeuvre de ces articles.
Pour les articles 4 et 5, il s'agira en premier lieu de prévoir, par décret en
Conseil d'Etat, les délais de refus ou d'accord implicite dérogatoires au droit
commun de deux mois, pour un motif tiré de l'urgence ou de la complexité de la
procédure. Les administrations procèdent en ce moment même au balayage des
différentes situations et, dans le délai d'entrée en vigueur de la loi, je
pense que les textes concernés pourront être pris.
Pour l'article 5 du projet de loi, des décrets seront pris afin de développer
les cas dans lesquels le silence vaut acceptation. J'ai eu l'occasion de le
dire tout à l'heure. Tout cela étant très théorique et un peu abstrait, je
citerai quelques exemples. Ce sera un peu un inventaire à la Prévert, et je
vous prie de m'en excuser à l'avance.
Les accords implicites pourraient concerner des sujets relatifs aux
professions, comme l'autorisation de poursuite d'activité pour les agriculteurs
retraités, ou encore l'autorisation de commercialisation de certains gibiers,
le visa du contrat d'engagement maritime, la licence annuelle d'agent
artistique, l'approbation des programmes d'exploitation des services aériens
intracommunautaires, l'autorisation des concours de pêche et l'agrément des
associations intermédiaires traitant des publics en difficulté.
Il s'agit de situations variées, mais elles reflètent la vie de tous les
jours. Pour revêtir un aspect insolite ici, à cette tribune, cette énumération
n'en correspond pas moins à la vie concrète. Cela procurera donc en fait autant
de simplifications dans la vie quotidienne des citoyens et dans le travail des
fonctionnaires.
Je vais donner quelques exemples de simplification administrative par
suppression pure et simple des régimes d'autorisation administrative. Certains
concernent les domaines de la vie économique et sociale. C'est le cas de la
suppression de la carte professionnelle de coiffeur ou de VRP, ou de la
déclaration de colportage. C'est aussi le cas de la transformation de
l'autorisation des manifestations commerciales en régime déclaratif, de la
suppression de l'autorisation de télétransmission des factures, de la
suppression de l'obligation de déclaration des services privés de transport, de
la simplification des procédures de gestion des espèces piscicoles ou des
régimes de la pisciculture. Il s'agit là encore d'une multitude d'éléments.
Les suppressions énumérées visent des procédures qui encombrent très
franchement à la fois l'esprit de nos concitoyens et les services
administratifs. Ces derniers seront ainsi libérés de tâches pour lesquelles ils
n'apportent pas une valeur ajoutée considérable. Cela se traduira par un gain
de temps.
Je voudrais revenir maintenant sur les maisons des services publics, point
évoqué par tous les orateurs.
Si nous avons souhaité prévoir un cadre juridique pour ces maisons des
services publics dans un texte de loi, c'est bien parce que l'autorisation du
législateur était nécessaire. En effet, la loi permettra de prévoir les
conditions dans lesquelles les différentes autorités administratives concernées
pourront déléguer leur signature au responsable d'une maison des services
publics, alors que ce ne serait pas possible sans texte de loi.
De plus, grâce à ce support législatif, un groupement d'intérêt public pourra
être mis en place dans tous les cas où cela paraîtra souhaitable.
Enfin, il est également normal que la création de maisons des services publics
impliquant les collectivités locales passe par une habilitation législative.
Je voudrais revenir sur la problématique maisons des services publics/maintien
des services publics en zones rurales, soulignée en particulier par M.
Régnault.
Bien évidemment, la mise en place de maisons des services publics doit
s'inscrire dans la politique globale de maintien des services publics en milieu
rural ; sinon, en effet, la situation confinerait à l'absurde.
Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, et comme l'a d'ailleurs très
justement rappelé M. le rapporteur, il y a, au fond, deux types de zones
géographiques où il nous paraît intéressant de développer des maisons des
services publics, et c'est d'ailleurs dans ces sites qu'ont été menées les
expériences : d'une part, le secteur rural menacé de désertification et,
d'autre part, les quartiers difficiles, où le type de population résidente
implique une simplification de l'accès à l'administration. Il y a, notamment
dans l'Est lyonnais, des exemples tout à fait intéressants à cet égard.
Il s'agit donc non pas de créer un échelon supplémentaire d'administration,
mais d'ouvrir en quelque sorte des guichets polyvalents et plus proches des
gens.
Pour faire référence à la politique définie par la loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire, je dirai qu'il est bien
évident que la mise en place des maisons des services publics devra s'insérer
dans le cadre des schémas départementaux des services publics sur lesquels les
élus locaux sont consultés ; ces derniers pourront donc donner leur avis sur
ces perspectives.
Le problème de la relation entre l'Etat et les collectivités locales a été
abordé de manière indirecte, mais il me paraît néanmoins intéressant d'y
revenir : bien que cela figure dans le texte, je tiens à réaffirmer très
clairement que, s'il doit y avoir implication à la fois de l'Etat et des
collectivités locales, ce sera sur une base contractuelle. S'il y a
participation des collectivités locales, c'est parce qu'il en sera ainsi décidé
par elles et qu'il apparaîtra donc qu'une maison des services publics présente
un intérêt dans le département considéré. Par ailleurs, il est bien clair que
contrat et tutelle sont tout à fait antinomiques.
La contribution de chacun des services prendra bien sûr une forme financière,
qui sera définie par la convention ; c'est d'ailleurs l'un des intérêts de
cette dernière de permettre d'établir clairement les choses dès le départ et de
prévoir qui finance et dans quelle proportion. Bien entendu, l'Etat apportera
sa part et, comme il ne sera pas seul, il faudra bien définir la contribution
de chacun.
L'Etat apportera dans les années qui viennent une aide particulière à la mise
en place de ces structures dans le cadre du fonds pour la réforme de l'Etat
évoqué par un certain nombre d'orateurs.
M. Courtois a craint, m'a-t-il semblé, que la concurrence ne soit perturbée si
La Poste participait à une maison des services publics en y développant ses
services financiers.
Que les choses soient claires ! Le dispositif concernant les maisons des
services publics est neutre par rapport à la problématique de la concurrence
entre les services financiers de La Poste et les autres structures bancaires ;
cette dernière préexiste d'ailleurs aux maisons des services publics,
lesquelles n'apportent pas d'élément nouveau à cet égard.
Il faudra donc bien entendu veiller à ne pas introduire dans le cadre de la
convention de distorsion de concurrence du fait de la mise en place de cette
structure. Les choses devraient, me semble-t-il, se clarifier dans la pratique
encore plus facilement que sur un plan théorique.
J'ajoute que ces règles du droit de la concurrence, s'agissant de La Poste,
sont toujours soumises au contrôle du juge. Il en sera de même, bien entendu,
dans le cadre des maisons des services publics.
J'en viens maintenant à la question des statuts des personnels, qui a
effectivement suscité quelques interrogations.
Sur ce sujet, les choses sont maintenant parfaitement claires. Nous en avons
d'ailleurs beaucoup discuté avec les organisations syndicales. J'aurai
probablement encore l'occasion dans les prochaines semaines de le faire dans le
cadre des différents rendez-vous que j'ai avec ces dernières, en particulier
sur ces sujets.
Le Gouvernement prévoit de conserver intégralement aux agents qui
travailleront dans les maisons des services publics le statut qui était le leur
dans leur administration d'origine. Lorsque la structure fonctionnera sur la
base d'une convention, ces agents continueront d'appartenir à leur
administration. Dans le cadre d'un groupement d'intérêt public, s'il est créé,
le projet de décret que nous préparons prévoit que les agents du groupement
seront soit mis à disposition par leur administration d'origine - c'est une
position bien connue - soit en position de détachement ; mais ce sont là deux
positions statutaires prévues par le statut général du fonctionnaire. Par
conséquent, aucun risque n'est à craindre s'agissant de la position des
fonctionnaires.
S'il est vrai, par ailleurs, que des organismes de droit privé pourront
participer à une maison des services publics, ce sera uniquement dans les cas
où de tels organismes seront chargés d'une mission de service public. Chacun
sait que, dans le droit français, l'une des façons d'exercer une mission de
service public est de le faire à travers une structure de droit privé.
Mais, dans la plupart des cas, ce sont l'Etat et les collectivités locales qui
auront un rôle majeur dans le fonctionnement de ces structures. C'est pourquoi
nous avons demandé que les préfets soient pilotes de la création des maisons
des services publics. Il n'est pas question, bien entendu, de confier la
responsabilité d'une telle maison des services publics à des agents qui ne
relèveraient pas de l'une de ces personnes morales de droit public. Il faut que
les choses soient claires à cet égard.
Telles sont les quelques mises au point qu'il me paraissait nécessaire de
faire.
Je voudrais maintenant indiquer à M. Mahéas qu'il n'y a pas de rupture du
dialogue social ; simplement, certains sujets sont plus faciles à traiter que
d'autres, monsieur le sénateur. Depuis que j'ai la responsabilité du ministère
de la fonction publique, j'ai signé trois accords avec six organisations
syndicales sur sept, ce qui ne s'était jamais vu au cours des dix ou quinze
dernières années. Nous battons donc aussi des records en matière de dialogue
social !
S'agissant des questions salariales, le fait que le Gouvernement ne soit pas
revenu sur le gel de l'indice décidé pour 1996 n'a étonné personne, en tout cas
pas mes interlocuteurs : voilà au moins un an, en effet, que j'en avais prévenu
ces derniers. Il ne faut pas demander au Gouvernement de faire un jour une
politique et le lendemain son contraire ! J'avais informé les organisations
syndicales voilà bien longtemps, et je regrette que nous n'ayons pas pu aller
plus loin.
M. Jacques Mahéas.
Elles ne sont pas satisfaites pour autant !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Sans doute, mais, en tout cas, l'information n'a pas été
une surprise !
Les mesures nouvelles en matière de masse salariale s'élèvent, pour 1997, à 15
milliards de francs, chiffre significatif, comme chacun le sait bien : 3,5
milliards de francs au titre de l'évolution de l'indice et le reste au titre
des évolutions catégorielles.
Monsieur Mahéas, vous m'avez reproché, quasiment dans la même phrase, de
mettre à mal la décentralisation et d'affaiblir l'Etat. Il serait tout à fait
étonnant que je parvienne à faire les deux à la fois !
Ces deux reproches sont en vérité contradictoires. Je souhaite, monsieur le
sénateur - je vous le dis avec franchise - un Etat plus efficace et plus proche
de nos concitoyens. Ma conviction, que je tire de mon expérience tant au
service de l'administration de l'Etat que comme élu local, c'est que les deux
vont de pair : nous n'aurons une décentralisation sereine et efficace que si,
de son côté, l'Etat se déconcentre.
Il faut que les collectivités territoriales puissent avoir avec les
représentants de l'Etat dans les départements un partenariat efficace ; pour
qu'il le soit, les représentants de l'Etat dans le département doivent avoir
une marge de liberté, une autonomie financière, une autonomie de décision. Les
décisions doivent être prises sur le terrain, et vous verrez que cela ne fera
que renforcer la décentralisation.
M. Laffitte a évoqué un certain nombre de questions liées aux nouvelles
technologies.
Je suis tout à fait convaincu que l'administration doit utiliser ces nouvelles
technologies. Toutefois, le projet de loi qui vous est soumis et qui vise à
établir des normes législatives ne traite pas des moyens. Les règles nouvelles
que nous établissons en termes de délais, d'accusés de réception, de
déclarations se substituant à des autorisations sont indépendantes du support
tant de la demande que de la réponse. D'ailleurs, comme vous le savez bien, des
choses se sont produites depuis un certain nombre d'années dans ce domaine sans
que les textes dont nous parlons aujourd'hui aient été modifiés. Ainsi, la
jurisprudence accepte maintenant, dans certaines conditions, l'utilisation du
fax pour accomplir des démarches administratives ou juridiques, et cette
évolution n'est pas due à l'adoption d'un projet de loi relatif aux procédures
administratives.
Je pense qu'il en ira de même, s'agissant des nouvelles technologies. C'est
par l'acceptation de celles-ci en matière juridique que nous avancerons, mais
non pas au travers d'un texte sur les relations entre l'administration et les
usagers.
Cela étant, nous devons effectivement encourager les administrations à
s'équiper de ces nouveaux outils. A cet égard, je vous indique que nous avons
inauguré, voilà quelques semaines, un site Internet de la direction générale de
l'administration et de la fonction publique, et que nous avons en particulier
ouvert à nos concitoyens la possibilité d'adresser du courrier électronique :
ils peuvent ainsi saisir le ministre chargé de la réforme de l'Etat. Je crois
donc que vous avez eu raison, monsieur Laffitte, de dire que l'Etat doit être
attentif à son niveau d'investissement en matière de nouvelles technologies.
Voilà les éléments de réponse que je voudrais apporter aux interrogations
soulevées par les différents orateurs. Je voudrais souligner à nouveau, en
conclusion, la qualité du travail qui a été accompli par la commission des lois
du Sénat, laquelle a sensiblement amélioré le texte que nous lui avions
transmis.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AU RÉGIME
DES DÉCISIONS ADMINISTRATIVES
M. le président.
Par amendement n° 2, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit l'intitulé du titre Ier :
« Dispositions relatives au régime des décisions prises par les autorités
administratives. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Cet amendement vise à mettre en cohérence l'intitulé du titre
Ier avec le contenu de celui-ci.
En effet, le régime juridique résultant des dispositions du titre Ier n'a pas
vocation à s'appliquer aux seules décisions administratives. Certains
organismes de sécurité sociale visés à l'article 1er comme entrant dans le
champ d'application organique du titre Ier prennent des décisions de droit
privé ; c'est en particulier le cas des caisses primaires de sécurité
sociale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Jacques Mahéas.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Je voudrais demander quelques précisions au Gouvernement.
Les offices d'HLM, qui sont des établissements publics administratifs gérant
des services publics administratifs mais qui, avec les usagers, c'est-à-dire
avec les locataires, ont des rapports relevant du droit privé, entrent-ils dans
le champ du dispositif du titre Ier ? Sont-ils soumis à l'exigence d'un accusé
de réception et à la règle des décisions implicites, ou, au contraire,
relèvent-ils des dérogations prévues au dernier alinéa de l'article 2 ?
Celui-ci prévoit, en effet, des dérogations à l'exigence d'un accusé de
réception des demandes ou réclamations adressées à l'administration dès lors
que des modalités spécifiques sont prévues par des dispositions spéciales.
C'est le cas des demandes de logement adressées par un candidat à un organisme
d'HLM, qui sont régies par des dispositions spéciales prévues par le code de la
construction et de l'habitation.
Nous aimerions vous entendre, monsieur le ministre, nous confirmer que les
organismes d'HLM seront bien exclus, d'autant que, dans le projet de loi dit «
de cohésion sociale », il serait prévu que chaque demande de logement ferait
l'objet d'un numéro d'enregistrement au moment de son dépôt. Ces dispositions
sont beaucoup plus protectrices des droits des intéressés !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Il n'y aura en tout cas pas, monsieur Mahéas, accord
tacite, et une réponse explicite de la part des administrations sera
nécessaire. C'est la meilleure des protections que l'on pourra accorder aux
demandeurs de logement !
Quant au projet de loi contre l'exclusion sociale, il est tout à fait cohérent
avec le présent texte : le fait de bénéficier d'un numéro d'enregistrement est
une forme particulière d'accusé de réception !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du titre Ier est ainsi rédigé.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Sont considérés comme autorités administratives au sens du
présent titre les administrations de l'État, les collectivités territoriales,
les établissements publics à caractère administratif, les organismes de
sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service
public administratif.
« A l'exception de celles de l'article 4, les dispositions des articles 2 à 7
ne s'appliquent pas aux relations entre les autorités administratives et leurs
agents. »
Par amendement n° 37, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent, à la fin du premier alinéa de cet article, de
remplacer les mots : « chargés de la gestion d'un service public administratif
» par les mots : « chargés d'une mission de service public administratif ».
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Il s'agit d'obtenir une clarification et des précisions sur ce que recouvre
l'expression « organismes chargés de la gestion d'un service public
administratif ».
Le rapport de notre commission des lois, ainsi que celui de l'Assemblée
nationale, procèdent par la négative : on sait ce qu'ils ne sont pas, mais on
ignore ce qu'ils sont ! En effet, en sont écartés les services publics
industriels et commerciaux et les personnes de droit privé, telles que les
associations comme l'ARRCO ou l'AGIRC. En revanche, aucun exemple concret n'est
donné pour illustrer les services en question.
Quelle limite y a-t-il, au demeurant, entre les services publics industriels
et commerciaux et les services publics administratifs ? Dans quelle catégorie
entre La Poste, par exemple ?
Par ailleurs, il me semble que le terme de « mission » est préférable à celui
de « gestion », puisque la mission recouvre notamment la gestion du service.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Défavorable : la modification rédactionnelle proposée ne
change pas substantiellement le champ d'application du titre Ier. Celui-ci
repose sur un critère organique et il paraît préférable de se référer à la
notion de « gestion » plutôt qu'à celle de « mission », qui est un critère
matériel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
La rédaction du projet de loi me semble plus protectrice : en effet, certains
organismes peuvent exercer temporairement une mission de service public sans
pour autant se voir confier la gestion d'un service public. Vous élargissez les
exceptions au lieu de les restreindre, monsieur Mahéas, ce qui me paraît aller
à l'encontre de votre souhait.
M. Jacques Mahéas.
Avez-vous des exemples ?
M. Pierre Laffitte.
Une société de distribution d'eau !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 37.
M. Jacques Mahéas.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Monsieur le ministre, je souhaiterais que vous me citiez quelques exemples
d'organismes exerçant une mission de service public sans en assurer la gestion.
Cela me permettrait d'éclairer mon vote.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Les ordres professionnels, les fédérations de chasse,
les fédérations sportives, ou encore les sociétés d'HLM, que vous évoquiez tout
à l'heure, se voient confier la gestion d'un service public.
Il ne me vient pas à l'esprit d'exemples de mission,...
M. Pierre Laffitte.
La Générale des eaux !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
... mais la notion ne peut être que plus large.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président.
Par amendement n° 33 rectifié, MM. Laffitte, Cabanel, Joly, Demilly,
Vigouroux, Lesein et Vallet proposent d'insérer, après l'article 1er, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le citoyen étant au coeur du service public, les autorités administratives
doivent utiliser les moyens les plus efficaces en termes de coûts et de délais
pour aller au devant des usagers.
« Compte tenu des progrès des nouvelles techniques d'information et de
communication, une cellule chargée de préparer des modifications réglementaires
nécessaires afin de faciliter l'utilisation effective de ces nouvelles
technologies est mise en place au sein de certaines autorités administratives.
Un observatoire comportant notamment des représentants du Parlement est créé.
Il suivra l'évolution des différentes cellules, leur mise en réseau et
présentera au Parlement un rapport annuel.
« Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions de cette mise en place.
»
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Cet amendement s'inscrit dans la logique que j'ai développée au cours de la
discussion générale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Sur le fond, la commission estime que la préoccupation de
modernisation des méthodes de travail de l'administration est au coeur de la
réforme de l'Etat. L'informatisation est d'ailleurs généralement en cours,
ainsi que M. le ministre l'a rappelé voilà quelques instants.
Sur la forme, elle considère que le premier alinéa de l'amendement proposé est
purement déclaratif et non normatif. Quant au deuxième alinéa, il paraît être
partiellement de nature réglementaire. Or il n'appartient pas au législateur de
s'immiscer dans l'organisation administrative.
Pour ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur Laffitte, effectivement, ce que vous proposez
ne relève pas du domaine de la loi. Pas plus que le Gouvernement, le Parlement
ne doit faire de la « fausse législation », car ce n'est pas ainsi, en
principe, que l'on établit des normes.
Cela étant, chaque administration est actuellement dotée d'un service
informatique, qui est également chargé du développement des nouvelles
technologies.
Par ailleurs, par le biais de la réforme de l'Etat, nous avons l'intention de
mettre au point un schéma directeur des téléprocédures pour définir les
modalités de dématérialisation des procédures administratives. Il s'agit d'une
question dont nous pourrions débattre avec les parlementaires que cela
intéresse, afin de recueillir leur avis dans le cadre de l'élaboration de ce
schéma.
En revanche, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de constituer une nouvelle
structure, qui viendrait alourdir nos procédures. Nous avons beaucoup parlé de
simplification cet après-midi, il faut rester sur cette ligne.
M. le président.
Monsieur Laffitte, l'amendement est-il maintenu ?
M. Pierre Laffitte.
Monsieur le ministre, je vous remercie de l'information que vous venez de me
donner, mais je tiens à préciser que je visais aussi les collectivités locales.
Comment peut-on, en la matière, agir sans légiférer ?
Dans la mesure où l'on pourrait inciter par d'autres voies les collectivités
locales à ces techniques, je serais prêt à retirer mon amendement, mais je
souhaite être éclairé sur ce point.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Il me paraît difficile d'aller dans votre sens, monsieur
Laffitte. En effet, vous me reprocheriez - en particulier dans cette enceinte -
de vouloir expliquer aux collectivités locales comment elles doivent
s'organiser.
Autant je crois de mon devoir, en tant que ministre chargé de la réforme de
l'Etat, d'être un aiguillon auprès de mes collègues et auprès de l'ensemble des
administrations pour qu'elles s'engagent résolument dans la mise en place de
nouveaux moyens de communication, autant, la Constitution ayant établi une fois
pour toutes le principe de l'autonomie de gestion des collectivités locales, je
considère que c'est à celles-ci qu'il appartient de décider de leur gestion. Au
demeurant, j'ai la faiblesse de penser qu'un certain nombre d'entre elles sont
plutôt en avance dans ce domaine. Je crois que c'est par l'émulation, la
concurrence et la comparaison des initiatives que tout cela va se mettre en
place.
Cela étant, nous serons, bien sûr, à la disposition des collectivités locales.
Je peux ainsi étudier avec la direction générale des collectivités locales un
éventuel transfert, sinon de technologie, du moins de savoir-faire, pour mettre
à la disposition de ces collectivités les réflexions que nous allons mener au
sein de l'administration de l'Etat.
M. Pierre Laffitte.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Compte tenu des explications que vient de me donner M. le ministre, notamment
de l'information très importante selon laquelle la direction générale des
collectivités locales pourra jouer un rôle d'incitation, je retire mon
amendement.
M. le président.
L'amendement n° 33 rectifié est retiré.
Par amendement n° 3, M. Amoudry propose, au nom de la commission, d'insérer,
après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Sont considérées comme des demandes au sens du présent titre les demandes et
les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées
aux autorités administratives. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Pour une meilleure lisibilité des dispositions du titre Ier,
nous proposons l'utilisation du vocable générique de « demande », figurant dans
le décret du 28 novembre 1983, en en explicitant la définition pour indiquer
qu'il s'agit aussi bien des demandes initiales et des réclamations que des
recours gracieux ou hiérarchiques.
Dans son arrêt « SA Laboratoire L. Lafon » du 29 mars 1991, le Conseil d'Etat
avait en effet donné une interprétation stricte de la notion de demande
adressée à l'administration au sens du décret du 28 novembre 1993, en excluant
les recours gracieux et hiérarchiques.
La définition que nous proposons permettra sans doute d'éviter que des erreurs
liées à la multiplicité des termes utilisés ne se glissent dans la rédaction
des textes d'application et ne suscitent des interprétations débouchant sur des
contentieux inutiles.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 1er.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - Toute demande ou réclamation adressée à une autorité
administrative doit faire l'objet d'un accusé de réception délivré dans des
conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine les cas
dans lesquels il n'est pas accusé réception des demandes ou réclamations en
raison de la brièveté du délai imparti à l'autorité pour répondre ou lorsque la
demande ou réclamation n'appelle pas d'autre réponse que le service d'une
prestation ou la délivrance d'un document prévus par les lois et les
règlements.
« Les délais opposables à l'auteur d'une demande ou réclamation ne courent
qu'à compter de la transmission à celui-ci d'un accusé de réception dans les
cas et selon les modalités fixés par la présente loi et par le décret prévu à
l'alinéa premier.
« L'autorité administrative n'est pas tenue d'accuser réception des demandes
ou réclamations abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif
ou systématique.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux demandes ou
réclamations dont l'accusé de réception est régi par des dispositions
spéciales. »
Par amendement n° 4, M. Amoudry, au nom de la commission, propose :
I. - Dans la première et la seconde phrases du premier alinéa et dans le
deuxième alinéa de cet article, de supprimer les mots : « ou réclamation ».
II. - Dans la seconde phrase du premier alinéa et dans les troisième et
quatrième alinéas de cet article, de supprimer les mots : « ou réclamations
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination,
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du premier alinéa de l'article 2, de remplacer les mots : «
doit faire » par le mot : « fait ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
C'est un amendement d'ordre rédactionnel : dans les textes
juridiques, le présent de l'indicatif vaut obligation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 38, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent :
I. - Après la première phrase du premier alinéa de l'article 2, d'insérer une
phrase ainsi rédigée : « Celui-ci précise notamment les mentions devant figurer
sur l'accusé de réception et parmi lesquelles le service chargé du dossier ou
l'agent à qui l'instruction du dossier a été confiée, le délai à l'expiration
duquel à défaut d'une décision expresse la demande sera réputée acceptée ou
rejetée, s'il y a lieu les délais et les voies de recours contre la décision
implicite de rejet, l'indication de la date de réception par l'autorité
compétente, le délai dans lequel l'accusé de réception est émis, et le cas
échéant les pièces manquantes. »
II. - En conséquence, de rédiger ainsi le début de la seconde phrase du
premier alinéa de cet article : « Ce décret détermine en outre les cas... ».
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Il s'agit de préciser dans la loi les principaux points que devra mentionner
l'accusé de réception, afin d'avoir l'assurance qu'il y aura réellement
information suffisante et simplification pour l'usager.
Je sais bien que cet amendement est d'ordre réglementaire, mais il ne l'est
pas plus, en tout cas, que bon nombre des dispositions de ce texte.
En particulier, il paraît utile de mentionner que l'accusé de réception
précisera notamment le délai à l'expiration duquel, à défaut d'une décision
expresse, la demande sera réputée acceptée ou rejetée.
C'est un moyen parmi d'autres de faire apparaître dans la loi que
l'administration peut, bien évidemment, prendre une décision expresse avant que
naisse une décision implicite.
Comme le souligne le rapport de la commission des lois, à la page 7, il faut «
éviter de pénaliser une administration qui s'attacherait à répondre rapidement
et explicitement à une demande et assurer la sécurité des situations
juridiques. »
En outre, en ce qui concerne le troisième alinéa de l'article 2, qui prévoit
des dérogations à l'exigence d'accusé de réception, je tiens à souligner que
l'application aux collectivités locales du dispositif prévu par le décret du 28
novembre 1983 risque d'entraîner la multiplication des recours lorsque les
accusés de réception n'auront pas été émis sur la base de cet alinéa.
Pourriez-vous, enfin, nous éclairer, monsieur le ministre, sur ce qu'il faut
entendre par « demandes ou réclamations abusives, notamment par leur nombre,
leur caractère répétitif ou systématique ». En effet, on remplace la formule
que les collectivités locales et l'Etat se contentaient d'utiliser, à savoir :
« Je ne peux que vous confirmer mon courrier du... », ce qui était tout de même
une forme de réponse, par une non-réponse.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable, au motif essentiel
que les mentions visées dans cet amendement étant de nature réglementaire,
elles relèvent du décret et non pas du texte de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable, pour
la même raison que la commission.
J'ajoute simplement que le projet de décret, sous réserve de vérification, car
je ne l'ai pas sous les yeux, est rédigé, pour l'essentiel, d'une manière qui
devrait vous donner satisfaction, monsieur Mahéas.
Quand au caractère « abusif » de la demande, c'est une affaire d'appréciation.
Nous connaissons tous, dans les collectivités dont nous dirigeons l'exécutif,
des « maniaques » du courrier qui écrivent mille fois sur le même sujet. Quand
il y a manifestement abus, dont acte ! la jurisprudence appréciera. Ce sont ces
cas limites qui sont visés et, bien sûr, rien d'autre.
M. Jacques Mahéas.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Puisque M. le ministre m'assure que les mentions en cause figureront dans le
décret, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 38 est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 6, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le deuxième alinéa de l'article 2 :
« Les délais de recours contre une décision implicite ne sont pas opposables à
l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception prévu au premier alinéa ne
lui a pas été transmis. »
Par amendement n° 29, M. Vasselle propose, dans le deuxième alinéa de
l'article 2, après les mots : « accusé de réception », d'insérer les mots : «
dès lors que la demande ou réclamation comporte toutes les pièces nécessaires à
son instruction ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Cet amendement tend, tout d'abord, à clarifier la portée du
deuxième alinéa de l'article 2. En effet, le point de départ du délai de
recours contentieux est bien la date de notification à l'intéressé de la
décision, et non la date de transmission de l'accusé de réception, comme
pourrait le laisser supposer la rédaction initiale.
Par ailleurs, l'amendement prévoit que, lorsque l'administration aura fait
diligence et aura pris une décision expresse en réponse à la demande dans le
délai au terme duquel, à défaut de décision explicite, une décision implicite
intervient, la possibilité d'attaquer la décision sera limitée au délai de
recours contentieux, même si aucun accusé de réception n'a été délivré.
Le dispositif du projet de loi permet, au contraire, de contester la décision
à tout moment, dès lors que l'accusé de réception n'a pas été délivré, ce qui
est préjudiciable à la stabilité des situations juridiques.
La modification proposée, qui n'a pas vocation à dispenser l'administration de
délivrer l'accusé de réception, tend simplement à éviter que, lorsque celle-ci
a fait diligence et s'est efforcée de répondre rapidement sur le fond de la
demande, cette réponse puisse être attaquée à toute époque du simple fait que
la formalité requise n'aurait pas été accomplie.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 29.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement est tout à fait dans l'esprit du projet.
Il tend à faire en sorte qu'un administré n'ait pas à souffrir de
l'opposabilité dans les délais dans la mesure où le dossier qui fait l'objet de
l'instruction par l'administration compétente n'est pas complet. Autrement dit,
le délai ne court qu'à partir du moment où l'administration a bien reçu la
totalité des pièces qui permettent d'établir le dossier.
De deux choses l'une : ou bien le texte ne le prévoit pas parce que le décret
d'application ne pourra pas le prendre en considération ou bien, monsieur le
ministre, vous considérez - il suffit que vous m'apportiez toutes assurances
sur ce point - que la rédaction du texte permettra d'insérer dans le décret les
dispositions qui permettront à l'administré de ne pas souffrir de l'application
du texte tel qu'il est rédigé aujourd'hui.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 29 ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission tient à bien souligner la distinction qu'il y a
lieu d'effectuer entre les délais qui font naître une décision éventuelle de
rejet ou d'acceptation et le délai de recours.
Les pièces du dossier doivent, bien entendu, être rassemblées par
l'administration avant que ne coure le délai de deux mois qui fera naître une
décision de rejet ou d'acceptation.
De ce point de vue, toutes assurances sont apportées par la rédaction que
propose la commission.
En revanche, le délai de recours ne débute qu'à partir du moment où la
notification de la décision est intervenue.
L'amendement n'ayant pas d'utilité, compte tenu des garanties qui sont ainsi
apportées, la commission émet un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 6 et 29 ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur Vasselle, l'exigence que vous avez formulée, à
juste titre, correspond effectivement à la jurisprudence actuelle du Conseil
d'Etat. C'est également notre point de vue, et c'est ce qui sera clairement
explicité dans le décret d'application du titre Ier du projet de loi, auquel
j'ai fait allusion tout à l'heure.
Sur le second point, je partage tout à fait l'analyse de la commission des
lois, qui a très bien explicité la distinction à opérer entre le délai de
constitution d'une décision implicite ou explicite et le délai de recours.
Les choses étant tout à fait claires, j'émets un avis défavorable sur
l'amendement n° 29, tout en étant persuadé d'avoir répondu à la question posée
par M. Vasselle.
En revanche, j'accepte l'amendement n° 6, qui améliore la rédaction du
texte.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, mon amendement devenant sans objet au cas où
l'amendement n° 6 serait adopté, je veux prendre acte des précisions qui m'ont
été apportées à la fois par M. le rapporteur et par M. le ministre.
Je souhaite également attirer l'attention de M. le ministre sur un point. Il
m'était apparu, à la lecture de l'article 2, que la référence au décret, au
premier alinéa, était restrictive. C'est la raison pour laquelle j'avais pensé
que, dans le cadre de la préparation du décret, s'il s'en tenait à la lettre du
texte du premier alinéa de l'article 2, les dispositions que je souhaitais voir
apparaître pouvaient ne pas êtres prises en considération.
Mais puisque M. le ministre m'affirme que tel ne sera pas le cas, je retire
l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 29 est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - Lorsqu'une demande ou réclamation est adressée à une autorité
administrative incompétente, cette dernière doit la transmettre à l'autorité
administrative compétente et en aviser l'intéressé.
« Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite
de rejet court à compter de la date de réception de la demande ou réclamation
par l'autorité initialement saisie.
« Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite
d'acceptation ne court qu'à compter de la date de réception de la demande par
l'autorité compétente. Cette dernière délivre l'accusé de réception prévu à
l'article 2 et ce document mentionne cette date. »
Sur l'article, la parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Monsieur le ministre, à propos de cet article, je m'interroge sur le surcroît
de travail et le surcoût financier que la transmission à l'autorité compétente
pourra entraîner pour les collectivités locales, notamment pour les petites
communes, même s'il est vrai que, pour ces dernières, vous nous avez
rassurés.
Ce qui risque de se produrie sur le terrain, c'est que des administrés voient
dans leur mairie une boîte à lettres, qui, effectivement, « dispatchera » le
courrier à telle ou telle administration. Il faudra ainsi accuser réception de
quasiment tous les courriers.
S'il y a un tel dévoiement, je ne vois pas comment ces collectivités pourront
répondre à la demande, même si l'on considère qu'ainsi l'administration sera
plus proche du citoyen, étant entendu que ceux qui sont les plus proches des
citoyens sont les fonctionnaires territoriaux.
De plus, je me permets de vous rappeler, monsieur le ministre, que ce surcroît
de travail, est, hélas ! entaché par l'existence de l'article 70 de la loi du
16 décembre 1996, qui supprime l'avantage que l'on appelait le treizième mois
aux fonctionnaires territoriaux qui n'ont pas été employés par les
collectivités locales avant 1984.
Vous ne m'avez pas répondu sur ce point précédemment, malgré ma demande
instante. S'il vous était possible de le faire, je vous en saurais gré.
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans les
premier et deuxième alinéas de l'article 3, de supprimer les mots : « ou
réclamation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
C'est un amendement de conséquence.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa de l'article 3, de remplacer les mots : « doit la transmettre »
par les mots : « la transmet » et le mot : « aviser » par le mot : « avise
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel. L'indicatif présent
valant obligation, c'est, là encore, une simplification.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Avant de donner l'avis du Gouvernement sur cet
amendement, permettez-moi, monsieur le président, de répondre à l'observation
et à la question de M. Mahéas sur l'article.
Monsieur le sénateur, il faut savoir ce que nous voulons. Nous avons tous eu
l'expérience du guichet dit incompétent qui nous envoie à un deuxième, lequel
nous dirige vers un troisième, et ainsi de suite.
Voulons-nous mettre un terme à cet état de choses, oui ou non ? La réponse du
Gouvernement est « oui ». Nous voulons que cela cesse et que la complexité de
l'administration soit assumée par elle-même et non par les citoyens.
M. Alain Vasselle.
Très bien !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Si l'administration est compliquée, si elle est
incompréhensible, c'est à elle de corriger ce défaut et non au citoyen de
courir d'un guichet à l'autre, éventuellement d'un quartier à l'autre, voire
d'une cité administrative à l'autre. C'est la raison pour laquelle je suis très
attaché à cet article du projet de loi ; c'est le seul moyen d'en sortir.
Par ailleurs, il ne faut pas croire les Français moins intelligents qu'ils ne
le sont. S'ils sont demandeurs auprès de l'administration, par exemple, d'un
remboursement d'assurance maladie ou d'une autorisation quelconque,
a
priori,
parce qu'ils ont envie d'obtenir ce qu'ils souhaitent, ils
s'adresseront au service qui est susceptible de leur donner satisfaction. Il
peut y avoir des erreurs de bonne foi, mais, pour l'essentiel, nos concitoyens
iront là où ils ont le plus de chances d'avoir une réponse, et une réponse
rapide.
Donc, je ne m'inquiète pas trop, à cet égard, sous réserve, je l'ai dit tout à
l'heure à la tribune, du cas, notamment en milieu rural, des personnes âgées ou
de faible mobilité. Mais si la mairie joue effectivement son rôle en liaison
avec la sous-préfecture, je suis convaincu que nous trouverons des dispositifs
pratiques satisfaisants.
Enfin, il est vrai que, du fait d'une rédaction imprécise du texte de loi de
décembre 1996, le problème des fonctionnaires territoriaux engagés après 1984
n'a pas été réglé.
C'est la raison pour laquelle, m'en étant aperçu, j'ai donné des instructions
aux centres de gestion pour qu'ils adoptent une interprétation large.
Par ailleurs, nous proposerons, probablement, dans le prochain projet de loi
portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, en avril, une
rédaction sans ambiguïté qui permettra de régler définitivement le problème.
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. Jacques Mahéas.
Il faut donner des instructions d'interprétation aux préfets !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Cela a été fait voilà seulement quelques jours.
En conclusion, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n°
8.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 9, M. Amoudry, au nom de la commission, propose :
I. - De supprimer la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 3.
II. - De compléter l'article 3 par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans tous les cas, l'accusé de réception est délivré par l'autorité
compétente. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Cet amendement apporte une clarification rédactionnelle
destinée à éviter que, par un raisonnement
a contrario,
on puisse penser
qu'il revient à l'autorité incompétente initialement saisie, dans l'hypothèse
d'une décision implicite de rejet, de délivrer l'accusé de réception.
L'amendement prévoit donc de supprimer la dernière phrase de l'article 3 et
précise que l'accusé de réception est délivré par l'autorité compétente.
Lorsqu'une autorité administrative a été saisie à tort et doit transmettre,
l'accusé de réception est dans tous les cas, que la décision implicite soit de
rejet ou d'acceptation, délivré par l'autorité compétente, seule à même de
remplir toutes les mentions qui doivent y figurer.
La commission des lois souhaite enfin attirer votre attention, monsieur le
ministre, sur la nécessité de prévoir par voie réglementaire que soit
mentionnée, sur l'avis de transmission de la demande, la date à laquelle
l'autorité saisie par erreur a reçu celle-ci, afin que, en cas de silence
prolongé de l'administration qui aboutirait à l'intervention d'une décision
implicite de rejet, le demandeur puisse connaître le délai pendant lequel il
lui sera possible de former un recours contentieux.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 9, qui
permet, lui aussi, d'améliorer le texte.
En réponse à M. le rapporteur, je dirai que nous veillerons à ce que le
décret d'application soit suffisamment précis pour qu'il n'y ait pas
d'ambiguïté dans ce type de circonstances.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation
est institué dans les conditions prévues à l'article 5, le silence gardé
pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut
décision de rejet.
« Il en est de même pour les recours gracieux ou hiérarchiques.
« Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, des décrets
en Conseil d'État prévoient un délai différent. »
Par amendement n° 10, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de
supprimer le deuxième alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit, là encore, d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - Le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative
sur une demande fait naître une décision implicite d'acceptation dans les cas
prévus par décrets en Conseil d'État. Lorsque la complexité ou l'urgence de la
procédure le justifie, ces décrets peuvent fixer une durée différente au terme
de laquelle la décision implicite intervient. Ils définissent, lorsque cela est
nécessaire, les mesures destinées à assurer l'information des tiers.
« Toutefois, ces décrets ne peuvent instituer un régime de décision implicite
d'acceptation dans les domaines où les engagements internationaux de la France,
l'ordre public, la protection des libertés ou la sauvegarde des principes de
valeur constitutionnelle s'y opposent, ou lorsque la demande porte directement
sur une dette ou une créance de l'autorité administrative à qui elle est
adressée. »
Par amendement n° 30, M. Vasselle propose d'insérer, dans la première phrase
du premier alinéa de l'article 5, après les mots : « l'autorité administrative
», le mot : « compétente ».
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je retire cet amendement, qui est satisfaisant en raison de l'adoption de
l'amendement n° 9 de la commission, à l'article 3.
M. le président.
L'amendement n° 30 est retiré.
Par amendement n° 11, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du premier alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : «
fait naître une décision implicite d'acceptation » par les mots : « vaut
décision d'acceptation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
C'est un amendement d'harmonisation rédactionnelle avec
l'article 4.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 12, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans la
deuxième phrase du premier alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : «
peuvent fixer une durée différente au terme de laquelle la décision implicite
intervient », par les mots : « prévoient un délai différent ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit également d'une harmonisation rédactionnelle avec
l'article 4.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 13, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans le
second alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : « dans les domaines où »
par le mot : « lorsque ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'une simplification rédactionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 14, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer
dans le second alinéa de l'article 5, après les mots : « ou la sauvegarde des
», le mot : « autres ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Cet amendement tend à apporter une précision.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adoptée.)
M. le président.
Par amendement n° 36, M. Cabanel et les membres du groupe du Rassemblement
démocratique et social européen proposent, à la fin du second alinéa de
l'article 5, de supprimer les mots : « ou lorsque la demande porte directement
sur une dette ou une créance de l'autorité administrative à qui elle est
adressée ».
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 39, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent de compléter
in fine
le second alinéa de
l'article 5 par les mots : « ou encore lorsqu'elle porte sur des domaines
pouvant nuire à la sécurité ou à la santé. »
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Le dernier alinéa de l'article 5 prévoit que l'acceptation tacite ne peut être
établie par décret lorsque « les engagements internationaux de la France,
l'ordre public, la protection des libertés ou la sauvegarde des principes de
valeur constitutionnelle s'y opposent ». Il l'exclut également pour les
demandes portant sur une dette ou une créance de l'autorité administrative. Le
champ du règlement reste très large malgré tout, même s'il existe par ailleurs
de nombreuses dispositions législatives ; je pense ici aux installations
classées. Néanmoins, il me semble que le pouvoir réglementaire devrait être
mieux encadré.
En effet, il est d'autres domaines, qui ne sont pas énumérés dans le projet de
loi, pour lesquels le pouvoir réglementaire ne doit pas pouvoir instituer de
décision implicite d'acceptation.
Une demande émanant, par exemple, d'une société ou d'une industrie polluante
doit être dans tous les cas exclue de cette réglementation. Toutes les demandes
relevant du domaine de l'environnement et pouvant avoir des conséquences
nuisibles sur la sécurité et la santé des consommateurs doivent être
exclues.
Nous proposons de mentionner explicitement cette précision dans le projet de
loi. Nous voulons être tout à fait sûrs que des secteurs aussi importants ne
seront pas soumis à cette règle, d'autant qu'en matière d'environnement le
dispositif juridique repose certes sur la loi, mais aussi sur le règlement.
C'est un domaine où l'on ne peut courir le risque d'une décision implicite de
l'administration parce qu'une demande n'aurait pas pu être examinée à fond dans
le délai qui, je le rappelle, passe de quatre à deux mois, ce qui est, en soi,
une bonne chose.
Je me demande également, monsieur le ministre, si l'autorisation implicite
d'acceptation ne devrait pas être exclue explicitement pour les interventions
portant atteinte à l'intégrité du domaine public routier.
Enfin, s'agissant des limites aux décisions implicites d'acceptations,
j'aimerais connaître votre avis sur l'extension de cette règle aux relations
entre l'Etat et les collectivités territoriales.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission rappelle que la protection de la santé et de la
sécurité des personnes et des biens est, suivant la jurisprudence du Conseil
constitutionnel, un principe de valeur constitutionnelle que devra respecter le
décret, sous le contrôle du Conseil d'Etat, compte tenu de la rédaction de
l'article 5. En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur
l'amendement n° 39, puisque toutes les garanties qu'il souhaite sont déjà
prévues.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement, non pas
pour des raisons de fond, monsieur le sénateur, mais parce qu'une énumération
fait courir le risque de l'ambiguïté. Or, la rédaction très juridique qui a été
proposée par la commission des lois nous protège complètement, compte tenu des
jurisprudences tant du Conseil constitutionnel que du Conseil d'Etat. Il est
donc préférable de s'en tenir à cette rédaction.
M. Jacques Mahéas.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Compte tenu des explications de M. le ministre, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 39 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'article 5.
M. Jacques Mahéas.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
La plupart des demandes des usagers étant acceptées par l'administration -
l'étude d'impact sur le présent projet de loi indique en effet que, sur 1000
régimes d'autorisations, 5 % à 15 % seulement des demandes sont rejetées - on
comprend tout à fait la logique qui pousse à vouloir accroître le nombre des
décisions d'acceptation tacites en l'absence de réponse de l'administration
dans un délai de deux mois.
Il est cependant regrettable qu'à aucun moment l'étude d'impact dont je viens
de parler - cela figurait pourtant au menu de la réforme de l'Etat - ne fasse
mention des délais moyens de réponse de l'administration par grandes catégories
de problèmes. Cela nous aurait permis d'apprécier au mieux la portée de ce
projet de loi, notamment à l'égard des usagers. J'espère, monsieur le ministre,
que vous pourrez éclairer le Parlement sur ce point, car cette étude d'impact
ne va guère au-delà de l'exposé des motifs. Ce n'est d'ailleurs pas la première
fois que je fais ce constat.
Sans méconnaître la portée positive de la disposition en cause, il convient de
souligner les inconvénients qu'elle risque d'engendrer.
La plupart des demandes sont acceptées car, généralement, l'usager remplit
toutes les conditions requises. Néanmoins, avec la généralisation de la
déclaration d'aliéner, par exemple, il y a de fortes chances pour que l'usager
doive, dans la majorité des cas, attendre deux mois pour jouir de ses droits,
ce qui ne va pas obligatoirement dans le sens de ce que devrait être
l'amélioration des relations de l'administration avec les usagers. Ainsi, comme
mes collègues je pense, lorsque je reçois, en qualité de maire de
Neuilly-sur-Marne, une déclaration d'intention d'aliéner et qu'aucun problème
n'est manifeste, je réponds, bien évidemment, dans les quarante-huit heures ;
désormais, du fait de l'acceptation tacite, ce délai sera porté à deux mois !
En outre, les dispositions prévues exigent de l'administré une meilleure
connaissance des lois et des règlements ; celui-ci doit prendre ses
précautions. Même si nul n'est censé ignorer la loi, chacun sait à quoi s'en
tenir sur cet adage... d'autant que les textes sont multiples et trop souvent
inaccessibles au citoyen lambda de par leur formulation.
En l'occurrence on nous annonce déjà plus de 280 décrets d'application.
Bonjour la simplification !
A priori,
l'usager ne saura pas si la
réponse à sa demande fera l'objet d'une réponse explicite ou si elle entrera
dans le régime d'une décision implicite de rejet ou d'acceptation. Pour le
savoir, il devra attendre d'avoir reçu l'accusé de réception, dont les formules
vont être multiples.
Un autre problème est posé du fait du développement des décisions
implicites.
Il y a une forte probabilité pour que l'administration se contente de lui
adresser un accusé de réception et ne lui réponde pas formellement pour les
demandes classées comme relevant du régime de décision implicite d'acceptation,
notamment.
L'administration examinera-t-elle, même de manière sommaire, le dossier ? Si
elle ne le fait pas, ce sera non par mauvaise volonté, mais faute de temps.
Elle est sommée de faire plus et mieux, de s'adapter. Avec des effectifs
réduits, des salaires en baisse, on exige plus des fonctionnaires. En cas de
recours contentieux, ne risquent-ils pas de voir leur responsabilité engagée ?
Comment pourront-ils justifier qu'ils n'ont pas eu le temps d'examiner à fond
la demande dont la réponse est mise en cause ?
Autre point négatif : si cette proposition peut être globalement et
statistiquement satisfaisante, puisque un plus grand nombre de demandes seront
satisfaites, et ce plus rapidement, nous dit-on, il n'en demeure pas moins que
le développement du système de la non-réponse, qu'elle vaille acceptation ou
rejet, n'est pas de bonne méthode. Une non-réponse induit toujours un doute,
suscite une interprétation. La non-réponse « généralisée » n'est pas la bonne
façon de procéder avec les usagers ; elle n'incite pas au respect des lois et
des règlements elle ne constitue pas, me semble-t-il, le meilleur moyen de
rapprocher l'administration de l'usager.
Je crains qu'il ne s'agisse, sous couvert de simplification, de justifier la
baisse des effectifs et de pallier l'insuffisance des moyens donnés à
l'administration.
Les usagers vont être mieux et plus rapidement satisfaits alors que, dans le
même temps, les services qui disposeront de moins de moyens, verront leurs
tâches substantiellement allégés. Je ne crois pas que l'amélioration de
relations entre l'administration et les usagers puisse se faire au détriment
des fonctionnaires, qui sont d'ailleurs eux-mêmes, des usagers des services
publics. L'amélioration ne peut avoir lieu que grâce à une administration de
qualité.
Malgré ces réserves, on ne peut néanmoins qu'être d'accord avec l'objectif de
ces dispositions. Elles vont dans le bons sens, mais leur mise en forme me
paraît extrêmement délicate.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - Pendant le délai de recours contentieux, l'autorité administrative
peut retirer, pour illégalité, toute décision implicite d'acceptation née du
silence par elle gardé.
« Au cas où un recours contentieux a été formé, le retrait peut s'exercer
pendant la durée de l'instance. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 40, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 15, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit cet article :
« Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par
l'autorité administrative :
« 1° Pendant le délai du recours contentieux ouvert aux tiers, lorsque les
mesures prévues pour assurer leur information ont été mises en oeuvre ;
« 2° Pendant un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est
intervenue la décision ou, sans délai, à la demande d'un tiers intéressé,
lorsque les mesures d'information prévues n'ont pas été mises en oeuvre ;
« 3° Pendant un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est
intervenue la décison, lorsqu'aucune mesure d'information n'est prévue ;
« 4° Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été
formé.
La parole est à M. Mahéas pour défendre l'amendement n° 40.
M. Jacques Mahéas.
Je propose de supprimer l'article 6. Actuellement, l'administration ne peut
reprendre une décision implicite d'acceptation illégale que si celle-ci a fait
l'objet d'une publicité, et pendant le délai de recours contentieux.
Dans l'hypothèse où la décision n'a pas fait l'objet d'une mesure
d'information des tiers et qu'elle ne peut plus être retirée - en effet, la
jurisprudence exclut toute possibilité de retrait, même pendant le délai de
recours contentieux - le texte qui a été adopté par l'Assemblée nationale fait
naître une insécurité juridique pour le bénéficiaire d'une décision dans la
mesure où il autorise l'administration à retirer pour illégalité des décisions
implicites d'acceptation dans le délai de recours contentieux ou pendant la
durée de l'instance en cas de recours, que ces dispositions aient fait ou non
l'objet de mesures de publicité.
Le droit et la jurisprudence actuels nous paraissent plus protecteurs des
droits des usagers et plus responsabilisants pour l'administration. Telles sont
les raisons qui motivent notre amendement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur
l'amendement n° 40 et pour présenter l'amendement n° 15.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 40, car il
est contraire à la position qu'elle a adoptée à travers l'amendement n° 15,
dont je vais exposer l'objet.
L'article 6 définit le régime applicable au retrait d'une décision implicite
d'acceptation entachée d'illégalité.
Lorsqu'une décision implicite d'acceptation illégale n'a pas fait l'objet des
mesures d'information requises, la commission propose que la possibilité de
repentir ouverte à l'administration soit limitée dans le temps.
En effet, dans le projet de loi initial, comme dans le texte adopté par
l'Assemblée nationale, le retrait de la décision reste, dans ce cas, possible à
tout moment. Or un tel dispositif est préjudiciable à la stabilité de la
situation juridique du bénéficiaire de la décision et permettrait à
l'administration de s'exonérer de la mise en oeuvre des mesures d'information
pour se ménager la possibilité de retirer, à tout moment, une décision entachée
d'illégalité.
L'amendement n° 15 prévoit ainsi la possibilité pour l'administration de
retirer spontanément la décision pendant un délai de deux mois à compter de la
date à laquelle elle est intervenue. Au-delà de cette date, le retrait ne
serait possible sans délai qu'à la seule demande d'un tiers intéressé qui
estimerait ses intérêts lésés.
Cette solution permet de concilier trois impératifs. Il s'agit, tout d'abord,
d'assurer le respect de l'ordre public en offrant à l'administration la
possibilité de retirer de sa propre initiative une décision entachée
d'illégalité pendant un certain laps de temps seulement.
Il s'agit, ensuite, de préserver les droits des tiers. Ceux-ci disposent d'une
possibilité de recours illimité dans le temps et ils conservent la faculté de
demander le retrait de la décision à tout moment pour éviter une procédure
contentieuse.
Il s'agit, enfin, de garantir la stabilité de la situation juridique du
bénéficiaire de la décision, sous réserve du respect des droits des tiers.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 40 et 15 ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 15.
En effet, l'Assemblée nationale avait préféré une rédaction synthétique qui
posait le principe du retrait des décisions implicites d'acceptation entachées
d'illégalité alors que le projet de loi visait à expliciter un domaine qui est,
d'un point de vue juridique, assez complexe.
A cet égard, l'amendement n° 15 pousse cette logique d'explicitation jusqu'au
bout et envisage les différentes hypothèses qui peuvent survenir.
En outre, sur le fond, cet amendement tend à limiter dans le temps la faculté
de retrait offerte à l'administration lorsqu'elle n'a pas mis en oeuvre les
mesures d'information des tiers prévues par les textes. Il s'agit ainsi
d'éviter que l'administration ne se ménage un droit de repentir illimité dans
le temps au détriment de la sécurité juridique. Tel est l'objet du troisième
alinéa de l'amendement n° 15. A cet égard, le projet de loi ne prévoyait pas
cette limitation, qui est légitime. Telle est la raison pour laquelle le
Gouvernement est favorable à l'amendement n° 15 de la commission.
En conséquence, il émet un avis défavorable sur l'amendement n° 40 dans la
mesure où il est indispensable de rééquilibrer le droit existant en faveur du
respect de la légalité. Il faut aussi préserver celle-ci en donnant à
l'administration la possibilité, pendant une période limitée, de revenir sur
des décisions implicites d'acceptation illégales qu'elle aurait pu laisser
naître à tort.
Ainsi, l'amendement n° 15 de la commission me semble finalement répondre au
souci exprimé par M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Il s'agit effectivement d'une amélioration.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 15.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je me félicite de l'amendement n° 15 de la commission. Je me demande toutefois
s'il résoudra tous les problèmes auxquels peuvent être confrontés certains de
nos concitoyens.
J'ai personnellement vécu dans mon département une situation un peu similaire,
qui a eu des conséquences dramatiques pour le chef d'une entreprise de
transport. La préfecture lui ayant indiqué que le renouvellement de son permis
de conduire « super-lourds » ne posait pas de problème, il a aussitôt investi
afin de développer son activité. Or, quelques mois plus tard, l'administration
préfectorale l'a informé par écrit qu'il ne pouvait pas bénéficier de ce
renouvellement. Certes, ce cas de figure est peut-être marginal, mais il montre
bien que le comportement de l'administration peut parfois avoir des
conséquences dramatiques pour certaines entreprises.
Qu'est-il advenu ? En dépit de nos interventions, le préfet, dont le rôle est
de faire appliquer la loi, n'a pas pu donner satisfaction à ce transporteur.
Les dispositions proposées par la commission permettront de résoudre des
situations de ce type, mais peut-être pas toutes. Je voulais donc attirer votre
attention sur ce point, monsieur le ministre, en vous citant cet exemple que
j'ai vécu. Il faudra être vigilant, notamment en ce qui concerne l'attitude des
différentes administrations à l'égard de nos administrés.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé.
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - Exception faite du cas où il est statué sur une demande présentée
par l'intéressé lui-même, les décisions individuelles qui doivent être motivées
ne peuvent légalement intervenir qu'après que la personne intéressée a été mise
à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa
demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister ou
représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas
tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur
nombre, leur caractère répétitif ou systématique.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables :
« 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ;
« 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre
public ou la conduite des relations internationales ;
« 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives spéciales ont
instauré une procédure contradictoire particulière et aux décisions régies par
l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées en tant que de
besoin par décret en Conseil d'État. »
Par amendement n° 16, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le début de la première phrase du premier alinéa de cet article :
« Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions
individuelles qui doivent être motivées n'interviennent qu'après que la
personne... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Cet amendement tend à simplifier la rédaction de l'article
7.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 17, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans le
cinquième alinéa (3°) de l'article 7, de supprimer le mot : « spéciales ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Cet amendement tend à supprimer une précision inutile : une
procédure contradictoire particulière ne peut résulter que d'une disposition
législative spéciale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 7
M. le président.
Par amendement n° 34, MM. Laffitte, Cabanel, Vallet, Joly et Demilly proposent
d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les services décentralisés de l'Etat veilleront à ce que toute demande ou
réclamation adressée sous forme de courrier électronique soit relevée et
traitée dans les mêmes conditions que le courrier traditionnel.
« Le décret visé à l'article 2 précise les modalités d'application du présent
article. »
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Cet amendement est relativement satisfait par les propos qui ont été tenus
tout à l'heure par M. le ministre et que M. Laffitte m'a consciencieusement
rapportés. Une démarche ayant donc été engagée dans le sens souhaité par les
signataires de cet amendement, je la retire.
MM. Jean-Jacques Hyest et Pierre Fauchon.
Très bien !
M. le président.
L'amendement n° 34 est retiré.
Par amendement n° 31, M. Vasselle propose d'insérer, après l'article 7, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les charges nouvelles que représentent les dispositions précédentes
pour les communes de moins de deux mille habitants peuvent être compensées par
l'Etat après avis du comité des finances locales visé à l'article L. 1211-1 du
code général des collectivités territoriales.
« II. - Les pertes de recettes éventuelles entraînées par l'application des
dispositions du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par
l'augmentation des droits sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement tend à prévoir une compensation par l'Etat des charges
nouvelles qui résulteront, notamment, des dispositions de l'article 33. Notre
collègue socialiste est déjà intervenu sur ce sujet.
En réponse aux orateurs qui se sont exprimés dans la discussion générale, vous
avez, monsieur le ministre, apaisé les inquiétudes qui s'étaient manifestées.
Si j'ai bien compris ce qui m'a été rapporté, vous vous proposez de faire jouer
un rôle aux sous-préfets en la matière. Ainsi, lorsqu'un administré de l'une de
nos communes déposera à la mairie un dossier qui relève d'une autre
administration, le maire transmettra celui-ci à la sous-préfecture, laquelle
l'enverra à l'administration compétente. Cette disposition limite fortement la
charge qu'aura à supporter la collectivité locale, dans son rôle de service de
proximité.
Le coût ne sera toutefois pas complètement nul. En effet, vous le savez,
monsieur le ministre, la franchise postale a été supprimée pour nos
collectivités et la compensation de l'Etat à cet égard n'est pas complète.
Certaines communes doivent aujourd'hui supporter des frais postaux non
négligeables, notamment pour les envois en recommandé des cartes d'identité.
J'ose espérer que certaines administrations n'exigeront pas de nos
collectivités des envois en recommandé, car le coût ne serait pas négligeable
pour les petites collectivités.
Je me pose cependant une question. Si, par hypothèse, un courrier envoyé par
une mairie ne parvenait pas, pour telle ou telle raison, à son destinataire, en
l'occurrence la sous-préfecture, que se passerait-il ? N'assisterions-nous pas
à des contentieux entre l'administré et la collectivité locale qui aura reçu le
document ? Quelle attitude devrons-nous adopter dans une telle situation ?
Sous réserve des compléments d'information que vous pourrez m'apporter,
monsieur le ministre, je suis prêt à retirer cet amendement, tout en
reconnaissant que les informations que vous nous avez déjà fournies constituent
un pas en avant important.
En tout état de cause, monsieur le ministre, un point devra être fait après la
première année d'application de la loi afin de mesurer les conséquences qui
pourraient en résulter pour nos collectivités territoriales.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission a, tout d'abord, pris en compte les assurances
apportées par M. le ministre, en particulier en faveur des petites communes
qui, de fait, pourraient se voir soumises à de nouvelles charges. Ce n'est
toutefois pas l'existence du présent texte qui doit,
a priori,
comme M.
le ministre le soulignait tout à l'heure, rendre les Français moins capables
devant les procédures administratives.
Le terme « peuvent » ouvre, en outre, une simple faculté, source d'inégalités
qui, faute de définition de critères légaux, serait inconstitutionnelle.
Par ailleurs, il n'y a pas, à proprement parler, de transfert de compétences.
En conséquence, la notion de compensation paraît ici inappropriée.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement est également défavorable à cet
amendement, mais je tiens à rappeler les propos que j'ai tenus tout à
l'heure.
A l'évidence, pour les toutes petites communes, la question peut se poser.
C'est la raison pour laquelle j'ai indiqué tout à l'heure que les sous-préfets
d'arrondissement devaient, à cet égard, pouvoir jouer un rôle. En effet, ils
sont très fréquemment en contact avec les maires des petites communes. Si l'un
d'entre eux reçoit un dossier dont il ne sait que faire, il le remettra à la
sous-préfecture qui se chargera de l'acheminer vers le service compétent.
Vous avez également soulevé un problème de responsabilité, monsieur le
sénateur. En fait, c'est la règle générale qui s'imposera. Si un courrier
ordinaire se perd, il n'y a pas de responsable. S'il s'agit d'un courrier
recommandé, c'est La Poste qui est responsable. La mairie ne peut donc en aucun
cas être mise en cause à la suite de la disparition d'un dossier.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 31.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je vais retirer cet amendement, monsieur le président. D'ici à l'examen de ce
texte en deuxième lecture, je pourrais réfléchir sur cette question et
peut-être m'en entretenir avec vous, monsieur le ministre. Il faudra songer au
cas où une personne vient déposer elle-même un document à la mairie et pas
uniquement à celui où l'administré envoie un courrier à la mairie. A cet égard,
les propos que vous avez tenus me paraissent justifiés.
Compte tenu des remarques formulées par M. le rapporteur, la rédaction de ce
texte pourrait sans doute être améliorée puisqu'un problème constitutionnel a
été évoqué. Toutefois, il n'est pas dans mon rôle de compliquer la vie à la
fois du rapporteur et celle du Gouvernement. J'attire simplement l'attention
sur les difficultés auxquelles pourraient être confrontés les maires des
petites communes.
La mairie, nous le savons, assure un service de proximité. Nos administrés
seront tentés d'en user sans en abuser. Il est plus facile pour un administré
de déposer un document à la mairie de sa commune sachant qu'il pourra être
transmis à l'administration compétente plutôt que de se rendre au chef-lieu du
département qui est parfois situé à plusieurs dizaines de kilomètres de son
domicile.
Cela dit, je retire cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 31 est retiré.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES
AU MÉDIATEUR DE LA RÉPUBLIQUE
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - La loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur de la
République est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa de l'article 6 est ainsi rédigé :
« La réclamation est adressée à un député, un sénateur, un président de
conseil régional, au président du conseil exécutif de Corse, à un président de
conseil général ou au maire de Paris, président du Conseil de Paris. Celui-ci
la transmet au Médiateur de la République après avoir vérifié qu'elle relève de
sa compétence et qu'elle mérite son intervention. » ;
« 2° Le premier alinéa de l'article 9 est remplacé par deux alinéas ainsi
rédigés :
« Lorsqu'une réclamation lui paraît justifiée, le Médiateur de la République
fait toutes les recommandations qui lui paraissent de nature à régler les
difficultés dont il est saisi et notamment recommande à l'organisme mis en
cause toute solution permettant de régler en équité la situation de l'auteur de
la réclamation.
« Lorsqu'il apparaît au Médiateur de la République qu'un organisme mentionné à
l'article premier n'a pas fonctionné conformément à la mission de service
public qu'il doit assurer ou que l'application de dispositions législatives ou
réglementaires aboutit à des situations inéquitables, il peut proposer à
l'autorité compétente toutes mesures qu'il estime de nature à y remédier et
suggérer les modifications qu'il lui paraît opportun d'apporter aux textes
législatifs ou réglementaires. » ;
« 3° L'article 9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le Médiateur de la République constate le mauvais fonctionnement
d'un service public, il peut provoquer une inspection ou un contrôle de ce
service par les autorités compétentes. » ;
« 4° La seconde phrase de l'article 14 est complétée par les mots : "et
fait l'objet d'une communication du Médiateur de la République devant chacune
des deux assemblées". »
Sur cet article, je suis d'abord saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 18 est déposé par M. Amoudry, au nom de la commission.
L'amendement n° 41 est présenté par MM. Mahéas et Régnault, les membres du
groupe socialiste et apparentés.
Tous deux visent à supprimer les deuxième et troisième alinéas de l'article
8.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 18.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Par cet amendement, la commission a souhaité maintenir le
dispositif actuel de saisine du Médiateur de la République. Elle estime en
effet que la saisine par les seuls députés et sénateurs n'a pas constitué un
frein au développement de l'activité du Médiateur. Rappelons que le nombre de
réclamations qui lui sont annuellement soumises est passé d'environ 4 000 à
l'origine à 43 000 en 1996.
Elle considère, en outre, qu'il existe un lien naturel de confiance entre le
citoyen et le parlementaire. Dans les cas où la réclamation porterait sur une
décision prise par un exécutif local ou mettrait en cause le fonctionnement
d'un service public local, il serait délicat, comme certains l'ont souligné
tout à l'heure, pour le président du conseil général ou le président du conseil
régional de saisir le médiateur, car l'autorité investie du pouvoir de saisine
serait alors juge et partie.
Enfin, la logique du système proposé par le projet de loi voudrait que la
faculté de saisine soit étendue à l'ensemble des exécutifs locaux. Pourquoi,
dès lors, exclure en particulier les maires des grandes villes ?
M. Jacques Mahéas.
Tout à fait !
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Or il paraît difficile de fixer une limite.
La commission n'est pas favorable à une extension à l'ensemble des maires,
cette solution présentant le double inconvénient d'imposer aux maires de trop
lourdes sujétions et de modifier la nature même de l'institution du Médiateur,
lequel se verrait alors, à l'évidence, submergé de réclamations. Cet avis est
d'ailleurs partagé par la quasi-unanimité des maires.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas, pour défendre l'amendement n° 41.
M. Jacques Mahéas.
En ce qui concerne la saisine, le texte adopté par l'Assemblée nationale nous
paraît un peu « bancal », et ce pour deux raisons essentielles : d'une part, il
introduit une discrimination entre les exécutifs locaux ; d'autre part, il
dénaturerait l'institution du Médiateur, car il est peu probable que les
exécutifs locaux s'empressent de transmettre la réclamation d'un citoyen qui
s'estime lésé par une décision qu'ils ont prise.
En revanche, nous ne sommes pas aussi affirmatifs que la commission pour dire
que la saisine du Médiateur doit demeurer de la seule responsabilité des
parlementaires. Nous pensons que, dans le cadre du présent texte, mieux vaut
s'en tenir au
statu quo
; sinon, on risquerait de bloquer
l'institution.
Cependant, pour l'avenir, il convient de réfléchir à l'élargissement de la
saisine à tout citoyen, comme cela se pratique dans de nombreux pays européens.
Dans cette perspective, il faut préalablement repenser le statut de cette
institution et lui donner les moyens de son fonctionnement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 18 et 41
?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 18 et 41, pour lesquels le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Par amendement n° 19, M. Amoudry, au nom de la commission, propose :
I. - De remplacer le second alinéa du texte présenté par le 2° de l'article 8
pour remplacer le premier alinéa de l'article 9 de la loi n° 73-6 du 3 janvier
1973 par trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'il apparaît au Médiateur de la République qu'un organisme mentionné à
l'article 1er n'a pas fonctionné conformément à la mission de service public
qu'il doit assurer, il peut proposer à l'autorité compétente toutes mesures
qu'il estime de nature à y remédier.
« Lorsqu'il constate que le fonctionnement d'un service public est défaillant,
il peut provoquer une inspection ou un contrôle de ce service par les autorités
compétentes.
« Lorsqu'il lui apparaît que l'application de dispositions législatives ou
réglementaires aboutit à des situations inéquitables, il peut suggérer les
modifications qui lui paraissent opportunes. »
II. - En conséquence, dans le premier alinéa du 2° de l'article 8, de
remplacer le mot : « deux » par le mot : « quatre ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de clarification, qui tend à
distinguer les pouvoirs du Médiateur relatifs au fonctionnement des services
publics du rôle qui lui est imparti en matière de modification des textes
législatifs et réglementaires.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 20, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le 3° de l'article 8 :
« 3° La deuxième phrase du second alinéa de l'article 9 est complétée par les
mots : "et ses propositions". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de cohérence.
Dans tous les cas visés précédemment, le Médiateur doit être tenu informé des
suites données à ses interventions, et non pas seulement lorsqu'il formule des
recommandations consécutives à une réclamation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES
AUX MAISONS DES SERVICES PUBLICS
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - I. - Une maison des services publics réunit des services publics
relevant de l'État et de ses établissements publics, des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics, des organismes de sécurité
sociale ou d'autres organismes chargés d'une mission de service public, afin de
faciliter les démarches des usagers et d'améliorer la présence de ces services
publics sur le territoire.
« Elle peut, pour le compte des services publics qui y participent, recevoir
les demandes des usagers, en accuser réception, les transmettre à l'autorité
compétente, en faciliter ou en assurer l'instruction et, par délégation de
l'autorité compétente, prendre les décisions ou délivrer les prestations
correspondantes.
« II. - Les maisons des services publics peuvent être créées par convention
entre les services publics mentionnés au I.
« Cette convention définit les missions dévolues à la maison des services
publics, les modalités de désignation de son responsable, les prestations
qu'elle peut délivrer et les décisions que son responsable peut prendre ou
signer ainsi que le cadre géographique dans lequel elle exerce son activité.
Cette convention prévoit également les conditions dans lesquelles les
personnels relevant des services publics qui y participent exercent leurs
fonctions. Elle définit la répartition des responsabilités tant à l'égard des
usagers que des tiers. Elle règle les modalités financières et matérielles de
fonctionnement de la maison des services publics. Elle est approuvée par le
représentant de l'État dans le département.
« III. - Des groupements d'intérêt public dotés de la personnalité morale et
de l'autonomie financière peuvent être constitués entre deux ou plusieurs
personnes morales de droit public ou de droit privé, dont au moins une personne
morale de droit public, pour créer des maisons des services publics et exercer
ensemble, pendant une durée déterminée, les activités mentionnées au I,
conformément aux dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet
1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement
technologique de la France. La convention constitutive comporte les éléments
mentionnés au second alinéa du II du présent article.
« IV. - Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret
en Conseil d'État. »
Sur l'article, la parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Cet article, qui traite des maisons des services publics,...
M. Pierre Fauchon.
Des maisons ouvertes !
(Sourires.)
M. Jacques Mahéas.
... nous paraît constituer le coeur du présent projet de loi.
Ce terme de « maisons » semble se prêter à certains jeux de mots. Il est vrai
que l'on pourrait préférer l'expression « antennes de services publics », ce
qui permettrait d'inclure l'idée d'un déplacement possible d'une commune à une
autre, par exemple dans un autocar aménagé à cette fin. Il y a là, me
semble-t-il, une idée à creuser.
Quoi qu'il en soit, les maisons des services publics suscitent, je l'ai déjà
indiqué, beaucoup d'interrogations de notre part. Je voudrais revenir plus en
détail sur quelques aspects afin que vous puissiez mieux éclairer le Parlement,
monsieur le ministre.
Je souhaite tout d'abord soulever la question de l'articulation entre les
présentes dispositions et la loi d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire du 5 février 1995, dont l'article 22 a créé les
pays et préconisé, en son dernier alinéa, la réorganisation des services de
l'Etat.
Se pose également le problème de l'articulation avec la commission
départementale d'organisation et de modernisation des services publics, prévue
par la loi du 9 janvier 1985 et chargée par l'article 28 de la loi du 5 février
1995 de faire des propositions au préfet et au président du conseil général
pour améliorer l'organisation et la présence sur le territoire des services
publics qui relèvent de la compétence respective de l'Etat et du département,
ainsi que de donner son avis sur le schéma départemental d'organisation des
services publics.
Nous faisons nôtre l'argument selon lequel les maisons des services publics
sont conçues pour répondre aux besoins des citoyens désireux de bénéficier
d'une présence plus proche. Nous sommes donc favorables à une implantation de
proximité des services publics.
Toutefois, si le groupement des services a lieu à l'échelon des pays, nous
craignons qu'il n'accentue la désertification rurale, qu'il ne serve à
justifier l'absence de moyens et la réduction des effectifs, ce qui irait
totalement à l'encontre de l'objectif affiché.
Les services de proximité pourraient être les vecteurs d'une redéfinition
économique et sociale, mais il ne faudrait pas, par le biais des maisons des
services publics, vouer des régions entières au déclin. Il ne faudrait pas non
plus que vous encouragiez le développement de ces maisons - vous en prévoyez
150 d'ici à la fin de l'année - pour mieux faire accepter la suppression de
services publics en de nombreux points du territoire.
Bien sûr, les maisons des services publics ne sont pas totalement nouvelles.
Sous des appellations différentes, de nombreuses expériences de même nature ont
été lancées : points d'information multiservices, guichets uniques, points
publics.
Cela étant, je crains que ces maisons des services publics ne servent à
justifier le regroupement des services là où ils existent encore, ce qui se
traduirait finalement par un éloignement dont nos concitoyens feraient les
frais.
Ne conviendrait-il pas plutôt, pour véritablement rapprocher l'administration
de ses usagers, de favoriser la mobilité du service public, en particulier dans
les zones rurales ? Je m'explique : chaque service représenté dans une maison
des services publics peut disposer d'un correspondant chargé d'aller au-devant
des usagers en fonction de leurs besoins et de leurs demandes. C'est pourquoi
le terme « antenne » me paraît plus approprié, plus judicieux que celui de «
maison », qui évoque trop une structure figée. Les notions de mobilité et
d'adaptabilité aux usagers me semblent plus conformes à l'objet même de votre
projet de loi, monsieur le ministre.
Dans l'immédiat, il faudrait avant tout se donner les moyens de conserver ce
qui existe.
En tant que maire de Neuilly-sur-Marne, je ne peux qu'être effrayé par le
désengagement des services publics, notamment dans les quartiers difficiles.
Dernièrement, sans crier gare, en tout cas sans me prévenir, on a supprimé
brutalement la PAIO, la permanence d'accueil, d'information et d'orientation.
Je dois aussi me battre avec l'administration de la justice pour garder un
fonctionnaire chargé de s'occuper des personnes qui sortent de prison, par
exemple. Voilà mon expérience, vécue quotidiennement sur le terrain.
Ne serait-il pas plus simple d'attribuer les crédits et moyens nécessaires au
bon fonctionnement des services de l'Etat dans les départements, pour les
inciter à se moderniser ?
Dans chaque mairie, des permanences assurent déjà ces services de proximité.
Est-ce à dire qu'elles ne remplissent pas correctement leur rôle ? Est-il
envisagé de les insérer à ces pôles administratifs et de les transférer, sous
forme de mairie annexe, vers les sites qui abriteront ces regroupements ?
Qu'adviendra-t-il des permanents qui assument ces missions de conseil,
d'information et d'orientation, qui sont à l'écoute des administrés et leur
apportent des réponses individualisées en vue de faciliter leurs
démarches...
M. le président.
Je dois vous demander de conclure, mon cher collègue.
M. Jacques Mahéas.
... et de rendre compréhensibles les multiples réglementations auxquelles tous
nos concitoyens sont soumis ?
Par ailleurs, la création des maisons des services publics va se traduire par
un nouveau transfert de charges vers les collectivités locales. J'aurai
l'occasion d'y revenir dans la suite de la discussion, n'ayant pu développer
ici tous mes arguments.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je souhaite répondre à M. Mahéas, car je ne veux pas que
subsistent des incompréhensions sur nos objectifs.
Je résumerai ma pensée en une formule : faisons confiance aux hommes.
M. Emmanuel Hamel.
« Et par ce terme d'hommes, j'embrasse toutes les femmes », disait un célèbre
prédicateur à Notre-Dame de Paris !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Nous mettons en place un dispositif législatif qui
permettra de développer des initiatives à l'échelon local. Il ne s'agira pas
d'une politique mise en place depuis Paris. Ce sont les élus locaux et le
préfet - c'est déjà ainsi que cela se passe pour la mise au point des schémas
directeurs des services publics - qui vont proposer de créer ensemble une
structure dans un site déterminé.
Le dispositif législatif que nous proposons vise seulement à permettre de
prendre, au niveau départemental, des initiatives de ce type. Il ne s'agit
aucunement de proposer une formule toute faite qui serait la même pour
l'ensemble du territoire. Ce sont au contraire les idées de souplesse et
d'adaptation au terrain qui nous guident. Cela va donc tout à fait dans le sens
de ce qu'avaient souhaité l'ensemble de ceux qui ont participé à l'élaboration
de la loi sur l'aménagement du territoire.
M. Alain Vasselle.
Très bien !
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Soutenons les initiatives locales en leur donnant un
support législatif et quelque moyens. Il ne s'agit que de cela, mais c'est déjà
beaucoup.
C'est dans cet esprit que nous devons aider à l'aménagement du territoire et à
une bonne adéquation entre les moyens publics et les besoins de la
population.
M. le président.
Par amendement n° 21, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le second alinéa du I de l'article 9 :
« Pour le compte des services publics qui y participent, la maison des
services publics peut recevoir les demandes des usagers, en accuser réception,
les transmettre à l'autorité compétente, en faciliter ou en assurer
l'instruction. Son responsable ne peut prendre les décisions ou délivrer les
prestations répondant à ces demandes que sur délégation de l'autorité
compétente. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de clarification rédactionnelle.
En effet, les décisions ne peuvent être prises et les prestations délivrées
que par le responsable de la maison des services publics et non par la maison
elle-même, car, lorsque celle-ci est constituée par une convention simple, elle
n'a pas la personnalité morale.
Au demeurant, le responsable ne peut prendre les décisions que sur
délégation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 42, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent, dans la première phrase du second alinéa du paragraphe
II de l'article 9, après le mot : « responsable », d'insérer les mots : «
obligatoirement choisi parmi les agents de la fonction publique ».
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Les maisons des services publics ayant pour objet de réunir des services
publics, il paraît utile de préciser dans la loi que leur responsable doit
émaner de la fonction publique. Tel est l'objet de notre amendement.
En effet, si l'amendement n° 21, qui vient d'être adopté, contribue à établir
une utile distinction entre les différentes tâches qui incomberont aux
personnels des maisons des services publics et précise que la prise de décision
ou la délivrance de prestations ne pourra être déléguée qu'au seul responsable
de la « maison », il ne résout absolument pas les questions fondamentales qui
se posent à ce sujet.
On s'en remet à la convention pour définir les modalités de désignation de ce
responsable ainsi que les missions dévolues à la maison des services publics.
Or aucun garde-fou n'est mis aux délégations que peut consentir
l'administration-mère, et nous n'avons aucune garantie certifiant que le
responsable ne sera pas un agent relevant du droit privé ; le texte laisse
même, me semble-t-il, cette possibilité tout à fait ouverte.
Cela me gêne quelque peu, même si la tendance est de plus en plus au
développement de la gestion de services publics par des organismes privés.
Compte tenu de la diversité des services publics et privés et des organismes
pouvant s'associer au sein des maisons des services publics, il est
parfaitement possible que le responsable soit un agent privé. Nous y sommes
fermement opposés.
Dans cette éventualité, quel sera son rôle, son autorité, son pouvoir
hiérarchique sur les personnels fonctionnaires, détachés ou mis à disposition
?
S'agissant des personnels, précisément, nous avons aussi de multiples
questions à vous poser, monsieur le ministre.
Qui seront ces personnels relevant des services publics participant à ces «
maisons » ? Dans quelle position statutaire seront-ils placés : en détachement
ou en mise à disposition ? Seront-ils choisis sur la base du volontariat ou
selon d'autres critères, qu'il conviendrait de déterminer ? S'agira-t-il, par
exemple, en priorité de personnels « en mal d'affectation » ?
L'expérience des « points publics » n'est, à cet égard, pas toujours
convaincante. Les personnels qui y travaillant sont des contractuels, souvent
des CES. Quelles garanties l'usager peut-il avoir quant à la compétence de ces
agents ?
Si l'on suppose que les maisons des services publics ont un personnel
suffisant mis à leur disposition, comment vont-ils pouvoir, compte tenu de la
diversité de leurs statuts, s'organiser collectivement pour défendre leurs
droits ?
Pour accueillir, aider, conseiller et orienter les usagers, il faut du temps,
des effectifs et des moyens financiers. Quelles seront les conditions de
travail des personnels concernés ?
Ces services de proximité doivent être dotés de personnels formés aux
compétences polyvalentes, capables de traiter rapidement les demandes. Le
projet de loi n'aborde nullement ce problème.
Comment un fonctionnaire peut-il être ne serait-ce qu'informé des multiples
réglementations en vigueur ? Comment imaginer des fonctionnaires à la fois
compétents et polyvalents, susceptibles d'intervenir dans de nombreux domaines
du service public ?
Quant aux maisons des services publics constituées sous la forme de groupement
d'intérêt public, quelle garantie avons-nous qu'elles ne recruteront pas
directement du personnel privé ? J'y reviendrai.
Bien d'autres interrogations subsistent mais, dans l'immédiat, monsieur le
ministre, je vous serais fort reconnaissant de nous apporter des précisions sur
tous les points que je viens d'évoquer.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission tient à souligner que les maisons des services
publics pourront n'avoir à regrouper, dans certains cas, sans doute limités
mais concevables, que des organismes privés chargés de missions de service
public. Par conséquent, leurs agents ne relèveraient pas de la fonction
publique. Une caisse primaire de sécurité sociale, une URSSAF, une caisse
d'allocations familiales pourraient ainsi se regrouper. Cette hypothèse,
certes, ne se rencontrera pas fréquemment, mais pourquoi l'exclure aujourd'hui
?
Il faut donc, selon la commission, conserver au dispositif toute sa souplesse
et rappeler en outre que le préfet chargé d'approuver la convention veillera à
ce que le responsable désigné ait les compétences requises.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à l'amendement n° 42.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement est également défavorable à cet
amendement, pour les raisons évoquées par M. le rapporteur.
Au-delà, je veux répondre aux interrogations de M. Mahéas, ce que j'ai
d'ailleurs déjà fait en partie au terme de la discussion générale, mais je
tiens à ce que les choses soient claires.
Les personnels des services publics seront, soit en position de mise à
disposition, soit en position de détachement. Ces positions sont prévues dans
le statut général des fonctionnaires et ne soulèvent donc pas de difficulté
particulière.
Les délégations de signatures, elles, peuvent en effet susciter une
interrogation, et je l'ai d'ailleurs déjà dit moi-même. Cependant, lorsque
l'Etat, les collectivités territoriales, de manière générale les représentants
de l'exécutif délégueront leur signature, ils le feront bien sûr à des
personnels de la fonction publique. Sur ce point, les choses sont donc tout à
fait claires.
Pour le reste, je renvoie aux explications de M. le rapporteur : il ne faut
pas en effet écarter l'hypothèse d'un regroupement d'organismes de droit privé
gérant des missions de service public.
C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 42 me semble inopportun.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 32, M. Vasselle propose de rédiger ainsi la quatrième phrase
du second alinéa du paragraphe II de l'article 9 :
« Elle détermine les modalités financières en précisant le niveau de
contribution de chacun des services mentionnés au I, et règle les modalités
matérielles de fonctionnement de la maison des services publics. »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement repose sur la modeste expérience que j'ai pu acquérir à travers
la polyvalence des services publics que, pendant un certain nombre d'années,
certains départements ruraux ont tenté d'organiser à partir de l'administration
publique, en particulier de La Poste, qui a souvent servi de point d'appui.
La région dont je suis l'élu a elle-même tenté l'expérience pendant plusieurs
années, conjointement avec les sous-préfets qui s'y sont succédé. La tentative
s'est soldée par un constat d'échec, certaines administrations n'ayant pas,
pour des raisons purement financières, voulu jouer le jeu.
Mettre en place des maisons des services publics me paraît une excellente
idée, mais encore faudra-t-il s'assurer que les administrations auxquelles nous
souhaitons faire appel leur consentiront les moyens d'offrir un véritable
service de proximité aux populations.
Certes, l'article 9 prévoit qu'une convention réglera les modalités
financières, mais je souhaite, monsieur le ministre, que vous m'apportiez des
assurances quant au niveau des contributions des administrations publiques de
l'Etat.
Lorsque nous avons voulu instaurer la polyvalence des services publics, La
Poste était prête à remplir les missions d'autres administrations, par exemple
l'ANPE ou l'administration fiscale, mais si ces administrations acceptaient de
se décharger de leurs tâches sur La Poste, elles se refusaient à dédommager
cette dernière du surcroît de charges ainsi occasionné.
C'est la raison de l'échec de la polyvalence, et je ne voudrais pas que les
maisons des services publics soient confrontées à cette même difficulté.
A l'époque, les préfets eux-mêmes n'avaient pas le pouvoir d'arbitrer entre
les différentes administrations et d'imposer à l'une d'elles d'apporter sa
contribution financière, ce qui aurait permis à des services de proximité
d'exister et de fonctionner.
Cette faiblesse a motivé le dépôt de l'amendement n° 32. Puisque les modalités
d'application de l'article 9 devront être prévues par décret, vous pourrez sans
doute y porter remède par la voie réglementaire, monsieur le ministre. Si j'en
recevais l'assurance, je retirerais cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission souhaiterait d'abord entendre le
Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le souci exprimé par M. Vasselle est tout à fait
légitime.
Le texte de la loi prévoit cependant lui-même la mise en place de dispositions
financières.
Quant au décret en préparation, il reprend pratiquement le texte de votre
amendement, monsieur Vasselle, car il faut en effet, pour nous préserver des
difficultés d'application, doter les préfets d'un outil réglementaire qui évite
les discussions interminables, dont nous avons tous pu être témoins : on veut
bien confier le travail à d'autres, mais, ensuite, on discute indéfiniment, par
exemple du nombre d'heures supposé, pour retarder ou même éviter le
paiement.
Il faut donc, et j'y veillerai, que le décret soit suffisamment précis pour
donner au préfet le moyen de couper court aux discussions de « marchands de
tapis », qui porteront d'ailleurs probablement sur des sommes assez
modestes.
M. le président.
Monsieur Vasselle, l'amendement n° 32 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 32 est retiré.
Par amendement n° 43, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent de supprimer la paragraphe III de l'article 9.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Le GIP est souvent présenté comme une formule de souplesse donnant toutes les
garanties de transparence pour exercer des activités ou gérer des équipements,
des personnes morales de droit public et de droit privé.
Néanmoins, dans le cas présent, nous sommes très perplexes quant aux
conséquences qu'impliquerait la constitution de maisons des services publics
sous cette forme.
Nous craignons que cette formule ne tire toute la gestion vers une gestion
privée - le GIP a une comptabilité privée - et que cet organisme, à terme,
recrute directement des personnels de droit privé. Je ne reviens pas sur les
problèmes qui en résulteraient.
Le GIP ne nous paraît donc pas adapté aux missions qui seront confiées aux
maisons des services publics. Comment pourrait-il être compatible avec la
continuité du service public, puisqu'il est indiqué dans cet article 9 que des
personnes publiques et des personnes privées pourront se regrouper dans le
cadre de maisons des services publics, « pendant une durée déterminée » -
c'est-à-dire, en réalité, indéterminée ?
Permettez-moi par ailleurs d'insister sur le problème de la désignation et de
la qualité du responsable d'une maison des services publics constituée sous
forme de GIP.
Voilà quelque temps on faisait du vin sans vin ; on va bientôt faire du
service public sans fonctionnaires ! Pourquoi avoir prévu cette formule,
puisqu'on nous dit qu'elle sera rarement utilisée ? Pouvez-vous nous indiquer
dans quels cas précis il pourrait être indispensable d'y recourir ?
En fait, on devrait s'en tenir à la formule de la convention, qui nous paraît
présenter moins de dangers malgré le peu de garanties apportées par le
texte.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement,
estimant que la constitution sous forme de GIP est une simple faculté mais
qu'elle doit être prévue par la loi, qui seule peut créer cette nouvelle forme
de groupement d'intérêt public.
M. Jacques Mahéas.
Quelle utilité ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
De plus, des maisons des services publics pourraient
souhaiter la personnalité morale. A la différence de la formule proposée par la
convention, le GIP offre cette faculté, qui, j'y insiste après M. le ministre,
n'est bien qu'une faculté.
Enfin, cette disposition est cohérente avec l'ensemble du dispositif prévu
pour les maisons des services publics.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
L'avis du Gouvernement est également défavorable.
Je le répète aussi, il s'agit seulement d'une faculté. Le GIP apporte
l'autonomie juridique et financière ainsi que la personnalité morale, et
j'imagine que cette formule pourra davantage convenir aux partenaires locaux,
plus probablement en milieu urbain difficile qu'en milieu rural, où les
structures seront relativement légères. Si les responsables locaux envisagent
des structures assez lourdes de rapprochement des services et de mise en commun
des moyens, ils pourront être conduits à choisir une formule un peu plus
élaborée qu'une simple convention de moyens.
Cette formule juridique est, certes, un peu lourde. Je suis d'ailleurs
conscient de sa complexité puisqu'il m'est arrivé, en tant que maire, de mettre
en place un GIP. C'est la raison pour laquelle le recours à cette formule ne
vaut la peine que si l'enjeu est de taille et le support purement conventionnel
insuffisant.
A mon avis, elle restera assez marginale mais il serait dommage de se priver
de cette possibilité.
M. Jacques Mahéas.
Qu'au moins le responsable du GIP soit un fonctionnaire !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 43, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune et qui sont présentés par M. Pagès, Mme Borvo et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen.
Le premier, n° 27, vise à insérer, après le paragraphe III de l'article 9, un
paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Au sein du périmètre géographique concernant une maison des services
publics, aucun emploi public existant au 1er janvier 1997 n'est supprimé. »
Le second, n° 28, tend à insérer, après le paragraphe III de cet article, un
paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Au sein du périmètre géographique concernant une maison des services
publics, aucune structure administrative ou établissement exerçant, au 1er
janvier 1997, une ou plusieurs activités de service public, ne peut être
supprimé.
« Il peut être dérogé à cette disposition lorsqu'il s'agit d'un regroupement
au sein d'une commune. »
La parole est à M. Pagès, pour défendre ces deux amendements.
M. Robert Pagès.
L'amendement n° 27 a pour objet de poser une condition essentielle au
développement des maisons des services publics en évitant qu'elles ne soient un
trompe-l'oeil dissimulant en fait une réduction du nombre des agents des
services publics.
Pour cela, il est indispensable que la loi pose comme principe qu'au sein du
périmètre géographique d'une maison des services publics aucun emploi public
existant au 1er janvier 1997 ne sera supprimé.
Réunir en un seul lieu différents services publics et organiser une prise en
charge personnalisée de chaque usager pour les aider dans leurs démarches est
un objectif que l'on ne saurait contester. Toutefois, la rapidité,
l'efficacité, la disponibilité, la proximité demandent du personnel.
Le regroupement de services ne doit donc en aucun cas se traduire par une
diminution des emplois publics, si l'on veut atteindre ces objectifs. Or,
l'absence de toute précision concernant les conditions dans lesquelles
s'opèrent les regroupements de services publics nous fait sérieusement craindre
le pire, d'autant plus que toute la politique du Gouvernement vise à réduire
chaque année un peu plus les budgets publics et le nombre de fonctionnaires.
Nous vous demandons donc, monsieur le ministre, de clarifier vos
intentions.
Ne va-t-on pas regrouper plusieurs services en confiant les missions à un
nombre plus réduit d'agents publics ?
Pour que soit écarté tout malentendu, nous vous demandons, mes chers
collègues, d'adopter cet amendement n° 27, garantie fondamentale d'un
développement harmonieux des maisons des services publics.
L'amendement n° 28, lui, a pour objet d'empêcher toute suppression de
structure administrative ou d'établissement exerçant au 1er janvier 1997 une ou
plusieurs missions de service public dans le périmètre géographique d'une
maison des services publics, sauf dans le cas où il s'agit d'un regroupement au
sein d'une commune.
Comme vous l'aurez compris, cet amendement est sous-tendu par le même état
d'esprit que le précédent et il est tout aussi essentiel.
Le Gouvernement nous dit que les maisons des services publics permettront de
rapprocher l'administration des usagers, et M. le rapporteur, dont je dois
d'ailleurs saluer l'excellent travail, affirme qu'elles sont destinées « tant à
assurer l'implantation auprès des usagers qu'à faciliter leurs démarches et à
rationaliser l'action administrative ».
Dans l'état actuel du dispositif, je ne vois pas en quoi ces maisons seront un
élément de proximité, bien au contraire.
J'ai bien peur en effet qu'elles ne visent surtout à opérer des regroupements,
par exemple cantonaux, c'est-à-dire à réunir au chef-lieu de canton plusieurs
services publics et à supprimer ceux de même nature qui existaient à l'échelon
communal.
Des communes risquent ainsi de se trouver privées de toute présence de l'Etat,
si ce n'est leur mairie, à laquelle on demandera de remplir des fonctions de
plus en plus importantes et hétérogènes.
Est-ce à la mairie de pallier toutes les carences de l'Etat ? Je ne le pense
pas.
L'important aujourd'hui est moins le regroupement de services publics que leur
développement et leur présence au plus près des usagers.
Pour éviter que la création des maisons des services publics n'aille à
l'encontre de l'intérêt des administrés, nous vous prions, mes chers collègues,
d'adopter l'amendement n° 28. Compte tenu de son importance, nous demandons
qu'il soit mis aux voix par scrutin public.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 27 et 28 ?
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Je voudrais tout d'abord vous remercier, monsieur Pagès, du
compliment que vous avez bien voulu adresser à la commission des lois pour son
rapport.
Il ne paraît pas possible d'imposer dans la loi l'interdiction de toute
restructuration et de toute réorganisation, qu'elle concerne les structures ou
les ressources humaines. Aussi, la commission émet-elle un avis défavorable sur
les amendements n°s 27 et 28, même si le souci que vous exprimez, monsieur
Pagès, est, je crois pouvoir l'affirmer, très largement partagé par ses
membres.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable, et
pour la même raison.
Monsieur Pagès, il s'agit de deux problèmes différents : d'une part, la mise
en place de maisons des services publics et, d'autre part, la nécessité
constante de tenir compte, au fil du temps, des évolutions géographiques,
démographiques et techniques dans le fonctionnement des services, ce qui
aboutit nécessairement à des restructurations, dans un sens ou dans un autre,
d'ailleurs, car on parle toujours des diminutions d'effectifs mais jamais des
augmentations et il y en a aussi, notamment en milieu urbain. Figer les choses
serait le plus mauvais service à rendre à l'administration.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
109:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 94 |
Contre | 223 |
Par amendement n° 35, MM. Laffitte, Cabanel, Demilly, Lesein, Othily et Vigouroux proposent de rédiger ainsi le paragraphe IV de l'article 9 :
« IV. - Les maisons des services publics encouragent l'usage par les particuliers et les services publics eux-mêmes des outils et ressources offerts par les nouvelles technologies de l'information et de communication.
« A cette fin, elles sont dotées de guichets électroniques et de tout nouveau moyen de communication.
« Des agents spécialisés facilitent en tant que de besoin l'utilisation par les usagers des informations administratives en ligne et des réseaux interactifs avec les diverses administrations.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. Avant de quitter le Sénat, notre collègue Pierre Laffitte m'a donné pour consigne, compte tenu des déclarations de M. le ministre sur les nouvelles technologies, de faire preuve de souplesse et donc de retirer les amendements qui seraient satisfaits par les mesures réglementaires que M. le ministre est susceptible de prendre dans l'organisation de l'administration.
En l'occurrence, le cas est un peu différent. Cet amendement vise à faire en sorte que, dès leur création, les maisons des services publics soient dotées des nouvelles technologies, afin de ne pas avoir à combler ensuite un retard. Sur ce point, j'aimerais connaître l'avis de M. le ministre.
Si cet effort peut être accompli en ce domaine lors de la création des maisons des services publics, je ferai peut-être, moi aussi, un effort, pour simplifier le débat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Elle souhaiterait également entendre M. le ministre.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur Cabanel, je ne prendrai pas d'engagement pour l'avenir, je vous rendrai compte de la circulaire que j'ai adressée aux préfets le 13 février dernier sur ce sujet et dans laquelle je leur ai demandé de faire une place importante au développement des nouvelles technologies dans les maisons des services publics, en particulier dans les relations entre les services, partenaires, et le public, et entre les différents services.
C'est ainsi que nous incitons à la mise en place de messageries interservices, de bornes interactives, de visio-stations et de systèmes de délivrance d'informations ou de titres à distance. Tout cela est inscrit dans la circulaire qui a d'ores et déjà été diffusée. Sans le savoir, nous avons eu la même pensée.
M. le président. Monsieur Cabanel, l'amendement n° 35 est-il maintenu ?
M. Guy Cabanel. Compte tenu des propos de M. le ministre, je retire bien volontiers cet amendement.
J'ajouterai simplement que, s'agissant des nouvelles technologies de l'information et de la communication, monsieur le ministre, nous n'avons pas trouvé entre nous la bonne communication. En effet, si M. Laffitte et moi-même avions eu connaissance de cette circulaire, nous ne vous aurions pas posé la question, nous vous aurions félicité lors de notre intervention dans la discussion générale.
M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'article 9.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Nous craignons un nouveau transfert de charges vers les collectivités locales. En effet, l'Etat participe à la mise en place des maisons des services publics, mais qu'adviendra-t-il ensuite ?
Nous redoutons d'autant plus ces nouveaux transferts de financement, sous prétexte de proximité, que déjà, pour leur simple lancement, la contribution du Fonds pour la réforme de l'Etat et les autres subventions de l'Etat ne constituent qu'un complément dérisoire de financement.
Certes, la convention devra prévoir les modalités financières et matérielles de fonctionnement de la maison des services publics, mais rien n'empêchera l'Etat de fermer ces services publics. On le voit très bien avec les agences postales.
Enfin, il n'est guère évident que ces « maisons » concourent au rapprochement de l'administration et de l'usager, ni qu'elles soient un facteur d'amélioration du fonctionnement de celle-ci.
Je crains aussi que la formule des maisons des services publics, qui présente en elle-même des aspects positifs, ne nuise à la lisibilité des responsabilités de chacun. Les usagers risquent de ne plus être en mesure de faire la distinction entre les différents services. Il est fort probable que ces « maisons » soient une source supplémentaire de confusion.
Si elles se résument à un service public minimal, elles n'ont pas grand intérêt. Si elles se substituent aux services existants, elles vont à l'encontre de l'attente des usagers et masquent la grande pénurie de l'accueil au guichet.
De plus, la porte est ouverte à une gestion privée des services publics. C'est inadmissible. La responsabilité de maisons de ce type doit bien évidemment appartenir à un fonctionnaire de la fonction publique, qu'elle soit d'Etat, territoriale ou hospitalière. Nous voterons donc contre cet article et nous demandons au Sénat de se prononcer par scrutin public.
M. Philippe de Bourgoing. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Bourgoing.
M. Philippe de Bourgoing. A l'origine, je m'interrogeais un peu sur ces maisons des services publics. Or, je me suis aperçu, au cours de l'examen en commission et en séance publique, que j'en connais une qui fonctionne très bien. Dans une petite commune que M. Ambroise Dupont connaît, une agence postale allait être supprimée. Le maire a passé une convention avec La Poste. Désormais, cette agence est gérée par le secrétariat de la mairie. Ainsi, le service postal est maintenu et le service de mairie est prolongé.
Je voterai donc en faveur de ces maisons des services publics puisqu'un exemple que je connais bien fonctionne convenablement à petite échelle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Michel Rufin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Rufin.
M. Michel Rufin. Faciliter les démarches des usagers et maintenir des services publics de proximité sur l'ensemble du territoire, ce sont indubitablement les objectifs des maisons des services publics, et nous les partageons pleinement.
Il faut faire une différence fondamentale, à travers les amendements qui ont été exposés, entre, d'une part, les maisons des services publics situées en milieu urbain, surtout en banlieue, et celles qui se trouvent dans un département comme le mien, lequel compte 6 300 kilomètres carrés, 180 000 habitants et 498 communes, dont certaines ont moins de 50 habitants, et où elles ont indéniablement une utilité.
D'ailleurs, une maison de ce type a été implantée à Souilly et elle fonctionne très bien. Souilly est le centre du département. Je rappelle que c'était là que le général Pétain avait installé son poste de commandement pendant la guerre de 1914-1918. Le maire, qui est d'ailleurs un général, a développé cette maison des services publics dans des conditions particulièrement intéressantes et à la satisfaction des usagers. C'est pourquoi je voulais vous dire, monsieur le ministre, combien ces maisons sont utiles.
Toutefois, je voudrais appeler votre attention sur un point qui concerne particulièrement les petites communes rurales. Il faudrait veiller à ce que les maisons des services publics, si on admet qu'elles peuvent assumer certaines activités commerciales, fonctionnent sans créer des distorsions de concurrence. En effet, si tel n'était pas le cas, les communes seraient exposées à un risque juridique et elles pourraient être entraînées dans des contentieux que nous ne souhaitons pas. Je parle de la rivalité ou des problèmes commerciaux qui pourraient survenir entre des activités privées et les maisons des services publics.
Les choses qui vont sans dire vont souvent mieux en les disant, surtout lorsqu'elles suscitent des interrogations ou des inquiétudes. Il est donc important de dire, même si cela peut paraître évident, que le rôle des maisons des services publics n'est pas de concurrencer les activités privées existantes. Les élus locaux que nous sommes devront par conséquent être attentifs à la nature des activités commerciales ou de service public qui seront exercées par les maisons des services publics.
Mais nous apprécierions aussi, monsieur le ministre, que vous puissiez vous engager à donner aux préfets toutes les instructions nécessaires pour que le contrôle qu'ils seront chargés d'exercer sur les conventions établies porte tout spécialement sur ce point. Ainsi, la sécurité juridique du dispositif sera parfaitement assurée.
M. Guy Cabanel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. Soucieux d'aller au fond des choses, je voudrais évoquer une inquiétude qui se fait jour.
Je suis très favorable aux maisons des services publics partout où elles sont nécessaires ; disant cela, je pense en particulier aux zones urbaines denses et difficiles, où le service public, même s'il n'est pas très éloigné à vol d'oiseau, est néanmoins d'accès complexe pour la population ; je pense également aux zones rurales, où l'accès au service public, compte tenu du maillage du territoire, nécessite des déplacements longs et d'autant plus difficiles que les personnes prennent de l'âge.
Monsieur le ministre, j'ai entendu des bruits circulant ici ou là, et je crois préférable de les évoquer au cours de ce débat : à en croire certains, les maisons des services publics combinées avec les pays, pourraient déboucher sur une organisation territoriale légèrement différente de celle que nous connaissons actuellement, avec les arrondissements et les cantons, et constituer ainsi une source d'aménagement du territoire.
Pour ma part, sans éprouver réellement de craintes à cet égard, je vous avoue m'interroger : les maisons des services publics sont-elles faites selon un plan d'organisation territoriale ou seront-elles en quelque sorte laissées à l'initiative des élus locaux, assistés par les services préfectoraux, en vue de combler des lacunes du maillage administratif français ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je voudrais répondre aux deux derniers orateurs.
S'agissant de la concurrence entre La Poste et le Crédit agricole, vous me permettrez de dire les choses clairement.
J'ai rencontré les dirigeants du Crédit agricole pour lever un certain nombre d'ambiguïtés : je savais qu'ils prenaient beaucoup de contacts, et j'ai donc pensé qu'il était tout aussi simple que je prenne l'initiative de discuter avec eux. Nous avons à mon avis clarifié les choses à cette occasion.
La maison des services publics n'ajoute et n'enlève rien au débat. S'il y a, effectivement, un risque de concurrence déloyale entre les services financiers de La Poste et le réseau bancaire, ce risque est néanmoins préexistant aux maisons des services publics. C'est à chacun de faire la part des choses.
Comme je l'ai indiqué aux dirigeants du Crédit agricole, le risque de concurrence déloyale est d'ailleurs beaucoup plus réel dans les arrangements discrets et parfois très anciens existant, comme nous le savons, entre certaines mairies et La Poste qu'il ne le sera avec les maisons des services publics, où, grâce à la convention, un document sera porté à la connaissance des tiers et où la clarté et la transparence régneront.
En effet, certaines communes financent les bureaux de poste, sur le plan immobilier, voire parfois sur le plan des personnels, alors même que ceux-ci réalisent dans l'agence postale des opérations financières. C'est d'ailleurs, je pense, très marginal en parts de marché ; mais c'est leur affaire, et pas la mienne !
Les maisons des services publics présenteront l'avantage de la transparence ; il y aura un règlement explicite, et chacun pourra venir regarder comment les choses se mettent en place.
S'agissant de ce qui se tramerait autour de la notion de pays, débat qui revient sans cesse, je voudrais vous rassurer tout à fait, monsieur le sénateur : comme je l'ai déjà dit, la maison des services publics sera d'initiative locale. Elle s'intégrera, sur l'initiative des préfets et des élus locaux, dans les schémas directeurs des services publics départementaux. Il n'y a donc aucune stratégie de mise en place de structures nouvelles pour un nouveau découpage territorial.
J'ai d'ailleurs eu l'occasion d'indiquer au Sénat que la démarche institutionnelle en matière de collectivités territoriales, démarche sur laquelle nous avons beaucoup travaillé avec nombre d'entre vous, est celle de l'intercommunalité, du volontariat et de la réponse aux initiatives locales. La réflexion sur les pays a un caractère d'aménagement du territoire et n'a pas nécessairement de correspondance sur le plan institutionnel.
Par conséquent, je crois pouvoir vous rassurer tout à fait sur la signification de ces maisons des services publics.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 110:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 223 |
Contre | 94 |
TITRE IV
DISPOSITIONS DIVERSES
Article additionnel avant l'article 10 A
M. le président.
Par amendement n° 1, le Gouvernement propose d'insérer, avant l'article 10 A,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Lorsqu'une personne physique doit communiquer à l'une des autorités
administratives mentionnées à l'article 1er sa nouvelle adresse en application
d'une des dispositions législatives et réglementaires en vigueur lui faisant
obligation de signaler un changement d'adresse, de résidence ou de domicile,
cette formalité est réputée accomplie par la déclaration du changement à
l'établissement La Poste, selon des modalités définies par une convention,
approuvée par décret, entre La Poste et l'autorité administrative concernée.
»
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 44, présenté par M.
Amoudry, au nom de la commission, et tendant :
I. - Dans le texte proposé par l'amendement n° 1, à remplacer les mots : «
d'une des dispositions législatives et réglementaires en vigueur », par les
mots : « des dispositions législatives et réglementaires », et, après les mots
: « la déclaration du changement à », à supprimer les mots : « l'établissement
».
II. - A compléter le texte proposé par l'amendement n° 1 par un alinéa ainsi
rédigé :
« Toutefois, cette déclaration ne dispense pas l'intéressé d'indiquer son
adresse lorsque celle-ci lui est demandée dans le cadre d'une procédure
administrative prévue par une disposition législative ou réglementaire. »
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Cet amendement a pour objet le changement d'adresse,
point que j'ai évoqué tout à l'heure dans mon propos liminaire. Le dispositif
n'était pas prêt lors de l'élaboration du projet de loi. Il l'est maintenant,
compte tenu du travail effectué par les différentes administrations, et il me
paraît donc intéressant de l'inclure dans le texte : il est en effet tout à
fait dans son esprit, et il facilitera la vie de millions de Français, dans la
mesure où, du fait de l'évolution non seulement de la vie administrative, mais
aussi de la vie des entreprises, le changement de domicile n'est plus
aujourd'hui un phénomène marginal.
Le but est donc de permettre aux personnes qui changent de domicile
d'effectuer une seule démarche auprès de La Poste, laquelle transmettra
l'information aux différentes administrations ayant besoin de connaître ce
changement d'adresse.
Je voudrais également apporter deux précisions suite aux discussions que nous
avons eues très légitimement avec M. le rapporteur.
La première, c'est que le dispositif proposé ne modifie en rien les garanties
et les procédures prévues par la loi du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Il était à mon avis très
important que cela soit bien clair. Le fichier des adresses constitué par La
Poste pour mettre en oeuvre les déclarations de changement d'adresse devra
faire l'objet des procédures définies par la loi, qui exige que le traitement
de ces données soit décidé par un acte réglementaire pris après avis motivé de
la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL.
La seconde précision tient au fait que la déclaration unique ne sera pas
applicable lorsque l'obligation faite à une personne de déclarer son changement
d'adresse résulte non seulement d'un texte de portée générale, mais aussi de
l'application d'une décision individuelle, comme c'est le cas pour certaines
mesures de contrôle ou de suivi prises en application de décisions de justice
pénale. Si cela va peut-être sans dire, cela va encore mieux en le disant.
Voilà les deux éléments d'information que je souhaitais apporter pour la
clarté du débat.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 44 et
pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 1.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Ce sous-amendement prévoit deux modifications rédactionnelles
et apporte surtout une précision nécessaire.
Si l'amendement n° 1 offre aux administrés une commodité, cette dernière ne
doit cepenant pas avoir pour effet d'exonérer les administrés des déclarations
exigées par des dispositions législatives ou réglementaires, telles que le
renouvellement d'une carte grise ou une déclaration annuelle de revenu.
Il s'agit, par cette précision, de prévenir les tentatives de fraude et les
comportements de mauvaise foi.
Pour répondre au voeu exprimé ce matin par la commission des lois, j'aimerais,
monsieur le ministre, que vous vouliez bien nous préciser les cas dans lesquels
un changement d'adresse doit être obligatoirement signalé par un citoyen, en
vertu d'une disposition législative ou réglementaire. D'avance, je vous en
remercie, monsieur le ministre.
Sous cette réserve, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n°
1.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 44 ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Le Gouvernement est favorable à ce sous-amendement, qui
précise bien les choses.
J'en viens à la question posée par M. le rapporteur.
Un certain nombre de démarches sont obligatoires, et l'absence de déclaration
du changement d'adresse comporte une sanction dans certains cas : il en est
ainsi en matière de carte grise - une sanction pour défaut de déclaration est
même prévue dans le code de la route - et de détention d'armes ; de plus, les
hommes soumis aux obligations du service national doivent également déclarer
leur changement d'adresse.
D'autres démarches sont, en pratique, nécessaires sans être obligatoires. Dans
ces cas, le particulier pourra demander à La Poste de les faire. Il faut ainsi
déclarer son changement d'adresse aux organismes qui versent les prestations
familiales, et c'est important. Les personnes voulant s'inscrire sur la liste
électorale de leur nouveau domicile doivent également faire connaître leur
nouvelle adresse.
Voilà ce qui, en pratique, sera à mon avis très utile pour les
particuliers.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 44, accepté par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Jacques Mahéas.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Cette idée nous paraît bonne, mais nous souhaitons que les choses soient
établies très précisément.
Vous évoquiez, monsieur le ministre, la possibilité offerte à l'administré de
dire ou de ne pas dire si, changeant de domicile, il voulait s'inscrire sur la
liste électorale de sa nouvelle commune.
C'est une question importante parce que, contribuable dans la ville, il peut
très bien ne pas y résider et souhaiter y voter. Nous allons donc rencontrer
des difficultés. C'est pourquoi je demande que cette question soit étudiée de
façon très précise.
Par ailleurs, je voudrais que vous nous précisiez dans quelles conditions vous
allez négocier cette disposition avec La Poste. En effet, vous êtes le
spécialiste des économies, et vous en avez réalisé d'importantes lorsque les
collectivités locales se sont vu supprimer la franchise postale dont elles
bénéficiaient autrefois grâce à une redevance importante versée par l'Etat : en
échange de la suppression de la franchise postale, vous avez donné une obole
aux collectivités locales. Je ne voudrais pas que vous soyez le spécialiste du
fait et que La Poste se retrouve en difficulté pour qu'elle devrait supporter
des charges supplémentaires !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 1, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, avant l'article 10 A.
Article 10 A
M. le président.
« Art. 10 A. - I. - A la fin du premier alinéa du I de l'article 1er de la loi
n° 80-539 du 16 juillet 1980 relative aux astreintes prononcées en matière
administrative et à l'exécution des jugements par les personnes morales de
droit public, le mot : "quatre" est remplacé par le mot :
"deux" ».
« II. - Dans la dernière phrase du deuxième alinéa du I de cet article, le mot
: "six» est remplacé par le mot : "quatre" ».
« III. - Dans la première phrase du premier alinéa du II de cet article, le
mot : "quatre" est remplacé par le mot : "deux". » -
(
Adopté.
)
Article 10 B
M. le président.
« Art. 10 B. - Il est inséré, après l'article 1er de la loi n° 80-539 du 16
juillet 1980 précitée, un article 1er-1 ainsi rédigé :
«
Art. 1er-1
. - Les dispositions de l'article 1er sont applicables aux
décisions du juge des référés accordant une provision dans des conditions
fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 22, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, à la fin
du texte proposé par cet article pour l'article 1er de la loi n° 80-539 du 16
juillet 1980, de supprimer les mots : « dans les conditions fixées par décret
en Conseil d'Etat ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Nous vous proposons de supprimer une précision inutile. En
effet, l'application des modalités d'ordonnancement prévues par l'article 1er
de la loi du 16 janvier 1980 ne nécessite pas l'intervention d'un décret en
Conseil d'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10 B, ainsi modifié.
(L'article 10 B est adopté.)
Articles additionnels après l'article 10 B
M. le président.
Par amendement n° 23, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer,
après l'article 10 B, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa
a)
de l'article L. 430-1 du code de l'urbanisme
est abrogé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
L'article L. 430-1 du code de l'urbanisme prévoit les cas
dans lesquels un permis de démolir est exigé.
Outre les cas liés à la nature des bâtiments concernés ou à la zone dans
laquelle ils sont situés, le
a)
de cet article prévoit cette obligation
pour les bâtiments dans les communes situées dans un rayon de 50 kilomètres de
l'emplacement des anciennes fortifications de Paris, ou dans les communes de
plus de 10 000 habitants.
Dans les communes dotées d'un POS approuvé, le maire est compétent pour
prendre, au nom de la commune, la décision de délivrer le permis de démolir
selon les règles de droit commun prévues pour la délivrance du permis de
constuire. La décision du maire ne devient exécutoire que quinze jours après
qu'il a été procédé à sa notification et à sa transmission au représentant de
l'Etat.
En outre, l'absence de notification de la décision de l'administration dans le
délai de quatre mois à compter de la réception de la demande équivaut à
l'octroi du permis de démolir.
Pour les communes mentionnées au
a
de l'article L. 430-1, le code de
l'urbanisme impose une transmission de la demande au représentant de l'Etat
dans les quinze jours suivant sa réception. Le représentant de l'Etat dispose
de deux mois pour faire connaître son avis, celui-ci étant reputé favorable
passé ce délai. Le représentant de l'Etat agit, en l'espèce, par délégation du
ministre chargé du logement.
Une telle procédure se traduit inévitablement par un allongement des délais de
réponse pour les demandes de permis de démolir, sans justification par la
protection de la qualité du bâtiment ou de la zone.
Le présent amendement a donc pour objet de supprimer la mention de ces
communes à l'article L. 430-1 précité. Elles seraient désormais concernées par
le régime du permis de démolir dans les autres cas visés par le même article,
c'est-à-dire pour les secteurs sauvegardées, les monuments historiques, les
périmètres sensibles, le patrimoine architectural. Les règles de droit commun
fixées par l'article L. 430-4 leurs seraient applicables.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 10 B.
Par amendement n° 24, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer,
après l'article 10 B, un article additionnel ainsi rédigé :
« La première phrase du premier alinéa de l'article L. 430-5 du code de
l'urbanisme est ainsi rédigée :
« Lorsque le permis de démolir tient lieu, en application de l'article L.
430-7, de l'autorisation prévue à l'article 11 de la loi n° 48-1360 du 1er
septembre 1948, il peut être refusé si, dans un intérêt social, il est
nécessaire de sauvegarder le patrimoine immobilier bâti. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement
précédent, dont l'objet est de maintenir les dispositions de l'article L. 430-5
du code de l'urbanisme qui permettent de refuser le permis de démolir lorsqu'il
est nécessaire, dans un intérêt social, de sauvegarder le patrimoine immobilier
bâti.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 10 B.
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - Les dispositions du titre Ier entreront en vigueur le premier
jour du sixième mois suivant celui de la publication de la présente loi. »
Par amendement n° 25, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans cet
article, de remplacer le mot : « publication » par le mot : « promulgation
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
Il paraît préférable de choisir la date de promulgation de la
loi et non celle de sa publication au
Journal officiel
comme point de
départ pour l'application des dispositions du titre Ier.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, ainsi modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - Les articles 1er à 7 et 10 de la présente loi sont applicables
dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de
Mayotte aux administrations de l'Etat et à ses établissements publics
administratifs.
« L'article 9 de la présente loi est applicable à la collectivité territoriale
de Mayotte. » -
(Adopté.)
Intitulé du projet de loi
M. le président.
Par amendement n° 26, M. Cabanel propose, à la fin de l'intitulé du projet de
loi, de remplacer les mots : « le public » par les mots : « leurs usagers ».
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Comme je l'ai indiqué dans la discussion générale, l'intitulé qui nous est
proposé souffre, selon moi, d'une certaine faiblesse et ne donne peut-être pas
tout l'élan qu'elle mérite à cette réforme de l'administration.
Je vois à cela des arguments de forme, avec la symbolique du mot « public »,
et des arguments de fond, avec l'évolution de la société. Enfin, je m'interroge
sur le risque juridique éventuel de l'utilisation du terme « usager ».
Avec l'intitulé du projet tel qu'il nous est proposé, nous sommes dans une
symbolique quelque peu passéiste : après les sujets et les assujettis, le
public connut son heure de gloire dans les années 1900 : les administrations
étaient « ouvertes au public », « fermées au public », « interdites au public
». Aujourd'hui, la société est très différente : les citoyens sont conscients,
organisés, ils veulent bénéficier de tous les avantages que l'Etat peut leur
offrir et effectuer leurs démarches dans les meilleures conditions possible.
J'avais imaginé introduire dans cet intitulé le terme « citoyens », mais les
administrations n'ont pas en face d'elles que des citoyens. J'ai donc préféré
viser les usagers, qui, pour moi, jouent un grand rôle dans ce que devrait être
la transformation de l'administration et des services publics à la française.
Les administrations vivent en effet un peu leur vie propre, et le service
public à la française, si nous n'y prenions garde, risquerait de préserver son
efficacité alors même qu'il n'aurait pas à s'occuper des usagers. Si nos
services publics sont moins fréquentés, c'est souvent parce qu'ils n'ont pas su
s'organiser autour de leurs usagers, dialoguer avec eux.
C'est la raison pour laquelle l'expression « usagers » me semble préférable à
l'expression passive de « public ».
Reste la grande question : existe-t-il un risque juridique à l'utilisation de
ce terme ? Je vous interroge, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, et
j'aviserai sur la conduite à tenir - maintien ou retrait de cet amendement - en
fonction de votre réponse.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Mahéas.
Voyons si nous allons être bon public !
(Sourires.)
M. Jean-Paul Amoudry,
rapporteur.
La commission estime que le terme « public » paraît plus
large et mieux adapté que le terme « usagers ».
Par ailleurs, je rappelle que le terme « public » figurait et dans l'intitulé
de la loi du 17 juillet 1978 concernant - déjà ! - les relations entre
l'administration et le public et dans celui de la loi du 11 juillet 1979
relative à la motivation des actes administratifs.
Toutefois, le décret du 28 novembre 1983, auquel nous avons beaucoup fait
référence aujourd'hui, retient le terme d'« usagers ».
Dans ces conditions, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur Cabanel, le terme « usager » ne couvre pas
l'ensemble du problème. En effet, certaines personnes peuvent être concernées
par des décisions de l'administration sans pour autant être des usagers. Les
tiers intéressés ne sont pas nécessairement des usagers de ces services !
C'est la première raison pour laquelle je ne suis franchement pas favorable à
ce changement d'intitulé, tout en comprenant très bien votre volonté, monsieur
Cabanel, de trouver un mot qui symbolise davantage la relation positive qui
doit exister entre l'administration et les administrés.
Par ailleurs - et cela me gêne davantage - les deux lois fondamentales en
matière de relations entre l'administration et les administrés, la loi du 17
juillet 1978 et celle du 11 juillet 1979, visent bien - et c'est la raison pour
laquelle nous avons repris cet intitulé - l'amélioration des relations entre
l'administration et le public.
Telles sont les deux raisons qui me conduisent à donner un avis défavorable
sur cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 26.
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Je partage l'avis de M. le ministre. Je trouve que le terme « public » sonne
mieux : ce mot a une résonnance qui nous ressource dans un passé qu'il ne nous
faut pas oublier.
Avec le mot « usager » la suggestion qui nous est faite est intéressante -
comme le sont toutes celles de M. Cabanel - mais, personnellement et
viscéralement, je reste attaché au mot « public », comme à celui de «
République ».
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Machet, pour explication de vote.
M. Jacques Machet.
Monsieur le ministre, l'intitulé du présent projet de loi contient, et je
tiens à vous en remercier, un mot très important, le mot « relations ». Ce mot
a une portée très large. Vous l'avez souligné à plusieurs reprises cet
après-midi, il ne signifie pas simplement avoir une personne en face de soi, il
suppose un contact de personne à personne.
Le groupe de l'Union centriste votera ce texte parce qu'il permet une avancée
importante dans les relations entre les administrations et le public. Nous
avons tous des efforts à faire, tant le personnel des services publics que les
usagers qui se rendent dans un service public pour se renseigner ou demander
des services, mais je crois qu'il était important de ne pas perdre de vue qu'il
s'agit toujours de problèmes humains.
Certes, avec notre collègues M. Laffitte, nous n'avons pas oublié les avancées
technologiques qui font progresser la rapidité des communications dans le
monde, et les maisons des services publics nous permettront d'intégrer les
secteurs ruraux et de rester proche des gens.
En tout état de cause, il faut préserver la valeur de l'homme. Il importe de
savoir écouter lorsqu'on se trouve derrière un guichet, il importe de savoir se
parler, de savoir accueillir, de reconnaître l'autre, de se respecter. Ce sont
là des qualités qui font beaucoup défaut en ce moment dans notre pays. Si
l'ensemble de nos concitoyens se respectaient davantage, cela irait beaucoup
mieux !
Dans cet esprit, notre groupe, je le confirme, votera le présent texte,
monsieur le ministre.
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
discussion de ce projet de loi tire à sa fin, et, hélas ! celle-ci n'a fait que
confirmer les différentes craintes que j'avais émises dans mon intervention
générale au nom du groupe communiste républicain et citoyen.
Je le regrette d'autant plus que ce projet de loi aurait pu, malgré sa
modestie, apporter certaines réponses aux attentes des administrés.
Mais, alors que la plupart des mesures contenues dans ce projet de loi créent
de nouvelles obligations pour les administrations, il n'est prévu de mettre à
leur disposition aucun moyen humain ou matériel supplémentaire.
Comment voulez-vous, dans ces conditions, que les administrations soient en
mesure de respecter, par exemple, le délai de réponse de deux mois qui leur est
imposé ?
Qu'il s'agisse d'une décision implicite de rejet ou d'acceptation ne change
rien : les agents publics doivent traiter l'ensemble des demandes et examiner
l'ensemble des dossiers.
Quant aux maisons des services publics, le rejet des amendements que nous
avions déposés confirme l'ambiguïté de ce dispositif.
Cette ambiguïté est d'autant plus préjudiciable que la philosophie d'un Etat
amenuisé qui sous-tend l'ensemble de la réforme de l'Etat ne peut que renforcer
encore un peu plus nos inquiétudes quant à l'utilisation qui serait faite de
ces maisons des services publics.
Derrière les bonnes intentions affichées par le Gouvernement, c'est, en fait,
toujours le même leitmotiv qui prévaut : celui d'un désengagement de l'Etat.
Face au désarroi d'une partie croissante de nos concitoyens devant la crise
économique dans laquelle le pays s'enfonce, il serait temps que le Gouvernement
cesse d'en appeler à la logique de marché et à la déréglementation comme
solution miracle.
Le nombre des chômeurs et des RMIstes prouve que cette voie est une
impasse.
La population elle-même n'est plus dupe, et les manifestations se
multiplient.
L'Etat doit plus que jamais assumer ses responsabilités. Or, la réforme de
l'Etat va dans le sens inverse, et ce projet en est une illustration. Aussi le
groupe communiste républicain et citoyen votera-t-il contre.
M. le président.
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien
évidemment, nous avons été tentés d'apporter notre contribution aux titres Ier
et II, sur ce récépissé, qui est une avancée, sur ces décisions implicites
d'acceptation, même si nous nous interrogeons sur le contenu des centaines et
des centaines de décrets à venir pour la mise en forme effective de la loi.
Toutefois, pour le service public, nous conservons toujours la même
philosophie : mieux vaut répondre dès que possible au public et ne pas laisser,
faute de décision, les dossiers s'empiler jusqu'à aboutir à des décisions
implicites d'acceptation. Cela étant, nous aurions, à la limite, je le répète,
considéré qu'il y avait une certaine avancée.
En revanche, le titre III nous inquiète. Nous ne voyons pas ce qu'il ajoute,
d'autant qu'il existe déjà des points d'information multiservices, des guichets
uniques, des points publics et même des mairies ou des mairies annexes où un
certain nombre de fonctionnaires d'Etat, d'associations, d'acteurs qui
participent au service public tiennent permanence.
Voilà pourquoi il ne nous paraît pas bienvenu de créer ces « maisons » - le
terme, je le redis, prêtera à sourire - et, surtout, de faire en sorte qu'elles
soient éventuellement soumises à une autorité privée. Nous avons très peur de
cette dérive, car vous savez combien nous sommes attachés, nous socialistes, au
service public.
Si vous aviez modifié un tant soit peu votre projet, monsieur le ministre, en
donnant la responsabilité de ces maisons des services publics à un
fonctionnaire, à défaut de le voter, nous l'aurions regardé de façon
bienveillante et nous nous serions abstenus.
Malheureusement, vous vous y êtes refusé. C'est donc parce que nous craignons
que ce texte ne définisse une autre philosophie du service public, et seulement
pour cela, que nous voterons contre.
M. le président.
La parole est à M. Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte
dont nous venons de terminer l'examen est la première consécration législative
de la réforme de l'Etat voulue par le Président de la République.
Il permettra, par une série de dispositions, de faciliter les relations entre
les usagers et l'administration. En un mot, il rendra cette dernière plus
humaine.
Comme vous nous l'avez rappelé, monsieur le ministre, l'Etat doit être plus
simple ; mais il doit également être plus proche du citoyen.
Cette proximité se traduit notamment dans votre texte par la création des
maisons des services publics, qui permettront - nous ne pouvons que nous en
réjouir - le maintien, en milieu rural, des services publics nécessaires à la
survie de ce milieu.
Pour ces raisons, le groupe du Rassemblement pour la République vous
apportera, monsieur le ministre, son entier soutien dans l'action que vous
menez pour que notre administration reste un modèle pour les autres pays. Il
votera donc ce projet de loi.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste
et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question
de l'intitulé a été tranchée ; je n'y reviens donc pas. Je m'incline devant le
choix des mots « le public », non sans regret, mais très volontiers, me pliant
à la loi de la démocratie.
Avec la majorité des membres de mon groupe, je voterai ce texte parce qu'il
comporte indiscutablement des avancées.
D'abord, il s'agit, c'est vrai, d'une tâche importante à laquelle M. le
Président de la République nous a conviés. Cette tâche s'impose. En effet, à un
contexte économique difficile, peut-être à un manque d'ambition ou de volonté
des Français, s'ajoute leur lassitude face à un système administratif sans
doute trop contraignant, trop compliqué, trop inaccessible.
Vous essayez d'y remédier, monsieur le ministre, et nous vous suivons. Le
titre Ier, je l'ai dit, nous convient. Le titre II, en ce qu'il étend -
prudemment ! - les possibilités d'action du Médiateur, m'apparaît raisonnable
et utile. Il en va de même du titre III, qui porte création des maisons des
services publics.
Il faut, indiscutablement, prendre en compte cette France qui change,
notamment dans l'organisation de son espace. Les concentrations urbaines
exigent que l'on réponde aux défis d'une administration qui doit se rapprocher
des citoyens.
Le fait que le tissu rural soit plus lâche et moins bien irrigué qu'autrefois,
le fait que nos communes rurales perdent leur population, le fait que l'on ne
puisse maintenir partout les services publics - il est des réalités devant
lesquelles il faut bien s'incliner ! - amènent à penser que les maisons des
services publics seront utiles, elles aussi, dans l'espace rural pour maintenir
l'activité à laquelle ont droit tous les citoyens français, pour faciliter
leurs contacts avec les administrations ou, au moins, un organisme polyvalent
d'administration.
Donc, sur ce point encore, nous vous suivrons, et ce d'autant plus, monsieur
le ministre, que le débat a éclairé les membres de mon groupe qui
s'inquiétaient au sujet de la pénétration des nouvelles technologies de
l'information et de la communication dans l'administration.
Les éléments objectifs que vous nous avez apportés nous ont rassurés. Ils nous
ont permis de retirer nos amendements. Le seul que je n'ai pas retiré m'a
conduit à l'échec. Mais peut-être, un jour, serons-nous amenés à y réfléchir de
nouveau, mes chers collègues, car les citoyens français ont vraiment envie
d'être de vrais usagers et d'être traités comme tels par l'administration !
(Sourires.)
C'est une étape. Peut-être faut-il aller plus loin. En l'instant, je vous
apporte les voix de la majorité de mon groupe, monsieur le ministre.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et
des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Robert Pagès.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Jacques Mahéas.
Le groupe socialiste également.
(Le projet de loi est adopté.)
6
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Jean-Jacques Hyest un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi, modifié par l'Assemblée
nationale, portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du
régime de la publicité foncière (n° 189, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 230 et distribué.
J'ai reçu de M. Serge Vinçon un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme du service national (n° 205,
1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 231 et distribué.
J'ai reçu de M. Louis Souvet, un rapport fait au nom de la commission des
affaires sociales sur le projet de loi, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif au renforcement de la lutte
contre le travail illégal (n° 228, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 232 et distribué.
J'ai reçu de M. Emmanuel Hamel un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 9
janvier 1976 entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République des Philippines tendant à éviter les doubles
impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu
(n° 492, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 233 et distribué.
J'ai reçu de M. Emmanuel Hamel un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement
de la République française et le Gouvernement de la Jamaïque en vue d'éviter
les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en
matière d'impôts sur le revenu (n° 171, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 234 et distribué.
J'ai reçu de M. Emmanuel Hamel un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de
la convention entre la République française et le Royaume d'Espagne en vue
d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales
en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) (n°
203, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 235 et distribué.
7
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 27 février 1997, à quinze heures :
Discussion du projet de loi (n° 501, 1995-1996) portant extension partielle et
adaptation du code minier aux départements d'outre-mer.
Rapport (n° 216, 1996-1997) de M. Jean Huchon, fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan.
Aucun amendement n'est plus recevable.
Délais limites
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, relatif au renforcement de la lutte contre le travail illégal (n° 228,
1996-1997) ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 3 mars 1997, à dix-sept
heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme du service
national (n° 205, 1996-1997) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 3 mars 1997, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 3 mars 1997, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
M. Marcel Deneux a été nommé rapporteur du projet de loi n° 224 (1996-1997)
relatif à la qualité sanitaire des denrées destinées à l'alimentation humaine
ou animale.
M. Jean-Marc Pastor a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 210 de
M. Jean-Marc Pastor relative à la traçabilité de la viande bovine.
M. Henri Revol a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 211
de M. Jacques Oudin sur la proposition de directive du Conseil concernant les
règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel (n° E-211).
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Jean-Louis Lorrain a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 194 (1996-1997) de M. Louis Souvet tendant à diminuer les risques de lésions auditives lors de l'écoute de baladeurs et de la fréquentation des discothèques.
COMMISSION DES FINANCES
Mme Marie-Claude Beaudeau a été nommée rapporteur de la proposition de loi n°
40 (1996-1997) de M. Franck Sérusclat modifiant le plafond institué à l'article
754-A du code général des impôts et relative à l'acquisition des biens en
clause de tontine.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Modalités de transport des malades
en véhicules sanitaires légers
574.
- 20 février 1997. -
M. René-Pierre Signé
rappelle à
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale
que les responsables de l'assurance maladie ont engagé une série de réformes
dans le but louable de parvenir à des économies et qu'en particulier, ils ont
décidé d'exiger que tout transport de malade assis soit effectué en véhicule
sanitaire léger (VSL) et non en taxi. Il souhaite faire quelques remarques :
tout d'abord, les chauffeurs de taxi qui pratiquent ce transport ont une
obligation de formation de secouriste qui équivaut à celle des conducteurs de
VSL. Ensuite, les malades transportés assis ne sont pas des malades en phase
aiguë de maladie mais sont véhiculés, la plupart du temps, pour subir des
examens prévus depuis longtemps. Le risque généré par le transport est donc
très atténué, voire nul. Enfin, les taxis ruraux, qui exercent dans les régions
les plus désertifiées oû depuis longtemps tout service de transport public a
disparu, se voient privés d'une grosse part de leur clientèle, amputation qui
peut se révéler catastrophique et mettre en péril leur modeste entreprise. Par
ailleurs, le service par taxi est moins onéreux que le service par VSL.
D'ailleurs, pourquoi ne pas appliquer la tarification la moins élevée ? Il
comprend mal cette mesure injustifiée sur le plan médical et pénalisante sur le
plan économique pour des régions défavorisées qui peuvent perdre un service de
transport indispensable. Il considère qu'il serait souhaitable, dans l'intérêt
de beaucoup, que cette mesure soit revue et rapportée.
Manque de cadres dans l'enseignement catholique
du ressort de l'académie de Strasbourg
586.
- 26 février 1997. -
M. Francis Grignon
attire l'attention de
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche
sur la situation déficitaire en encadrement que connaît l'enseignement
catholique en Alsace et en particulier dans l'académie de Strasbourg. Il
souhaite, en effet, souligner que le ministre, dans sa réponse à la question
écrite n° 19064 du 28 novembre 1996 relative à ce sujet, ne s'est référé qu'à
l'enseignement privé dans sa globalité qui souffrirait d'une situation, selon
lui « légèrement déficitaire dans l'académie de Strasbourg ». Or, l'objet de la
question était d'attirer son attention sur l'enseignement catholique en
particulier qui, lui, souffre d'une situation véritablement déficitaire. Il
souhaite lui préciser que parmi les quatre postes supplémentaires accordés pour
l'année scolaire 1996/1997 à l'ensemble de l'enseignement privé alsacien, un
poste et demi était déjà réservé avant les négociations académiques, réduisant
d'autant le nombre de postes à attribuer. Il lui fait ainsi remarquer que
puisqu'une des composantes de l'enseignement privé avait préalablement fait
connaître les besoins d'un de ses établissements, il aurait été souhaitable
d'ajouter cette dotation particulière à la dotation générale, évitant ainsi son
amputation. Il lui demande par conséquent si cette méthode ne lui semblerait
pas envisageable pour les années à venir.
Réorganisation de La Poste dans le département de la Somme
587.
- 26 février 1997. -
M. Pierre Martin
interroge
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications
sur la réorganisation que la poste envisage pour son réseau de l'ouest du
département de la Somme, et sur l'inquiétude des élus du département sur les
conséquences qui en découleraient pour les petites communes rurales.
Situation des maîtres auxiliaires
588.
- 26 février 1997. -
M. Pierre Martin
interroge
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche
sur les mesures qu'il envisage de prendre pour régler la situation précaire
dans laquelle se trouvent les maîtres auxiliaires.
Politique de l'école
589.
- 26 février 1997. -
M. Pierre Martin
interroge
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche
d'une part, sur les mesures qu'il envisage à terme de prendre pour remplacer le
moratoire, qui ne constitue qu'une solution transitoire, pour pallier la
fermeture des classes en milieu rural et, d'autre part, sur les réponses qu'il
pense pouvoir fournir pour mettre fin à l'inégalité des communes en matière
d'accueil scolaire des élèves, scolarisés par dérogation dans une commune
différente de leur commune de résidence.
Plafonnement de la taxe professionnelle
590.
- 26 février 1997. -
M. Michel Mercier
attire l'attention de
M. le ministre de l'économie et des finances
sur le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée
pour l'année 1996. En effet, depuis 1996, la cotisation à retenir pour
déterminer le montant du plafonnement pour les entreprises dont le siège se
situe dans une communauté de communes créée en 1996 n'est pas la cotisation due
au titre de l'année 1996, mais une cotisation de référence calculée avec les
bases de 1996 et les taux d'imposition de 1995 ou de 1996 s'ils sont
inférieurs. L'article 34 de la loi de finances rectificative qui supprime cet
effet pervers ne paraît applicable qu'à compter de 1997, alors qu'il avait
précisément pour objet de supprimer cette conséquence de la loi de finances
pour 1996. Aussi il lui demande s'il n'estime pas opportun que soit remédié à
cette situation afin que le texte voté atteigne totalement son objectif.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance du mercredi 26 février 1997
SCRUTIN (n° 109)
sur l'amendement n° 28, présenté par M. Robert Pagès et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen, à l'article 9 du projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, relatif à l'amélioration des relations entre les
administrations et le public (coexistence des structures administratives avec
les maisons de services publics).
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 316 |
Pour : | 94 |
Contre : | 222 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre :
17.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Girod, qui présidait la
séance.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :
Contre :
93.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Emmanuel Hamel.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Pour :
74.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (60) :
Contre :
59.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Contre :
44.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (10) :
Contre :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Claude Haut
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
MM. Emmanuel Hamel, Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Paul Girod, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 317 |
Nombre de suffrages exprimés : | 317 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 158 |
Pour l'adoption : | 94 |
Contre : | 223 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 110)
sur l'article 9 du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre
les administrations et le public (maisons de services publics).
Nombre de votants : | 317 |
Nombre de suffrages exprimés : | 317 |
Pour : | 223 |
Contre : | 94 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Contre :
15.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
17.
Contre :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer,
Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Girod, qui présidait la
séance.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :
Pour :
94.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Contre :
74.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Claude Pradille.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (60) :
Pour :
59.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Pour :
44.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (10) :
Pour :
9.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Ont voté contre
François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Claude Haut
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
N'ont pas pris part au vote
MM. Claude Pradille et Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Paul Girod, qui présidait la séance.
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