DISPOSITIONS INSTITUANT
LE TRIBUNAL D'ASSISES

M. le président. Par amendement n° 173, MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
I. - Dans l'intitulé du titre Ier, avant l'article 1er, de remplacer les mots : « tribunal d'assises » par les mots : « tribunal criminel » ;
II. - En conséquence, dans la suite du projet de loi, de procéder à la même substitution chaque fois que nécessaire.
La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Ce projet de loi vise à la naissance d'une nouvelle juridiction.
Voilà deux siècles qu'existe en France une juridiction criminelle, qui, depuis le code d'instruction criminelle de 1808, est dénommée « cour d'assises » : jugeant, dans l'esprit de nos concitoyens, les grandes affaires criminelles, elle fait partie de notre culture judiciaire, et il serait donc exclu de proposer une autre appellation.
En revanche, la question peut être posée, s'agissant du premier degré de juridiction : le Gouvernement propose la dénomination « tribunal d'assises », dont l'adoption n'aboutirait qu'à jeter la confusion dans les esprits.
Il y a, en droit pénal, des incriminations de divers types : des incriminations de police, des incriminations correctionnelles et des incriminations criminelles ; il existe un tribunal de police, un tribunal correctionnel, et la logique comme la simplicité commandent donc que nous dénommions ce nouveau degré de juridiction : « tribunal criminel ».
Cette appellation serait meilleure que « tribunal d'assises », car elle éviterait toute confusion avec la cour d'assises, qui garderait sa solennité et à laquelle on conserverait donc sa représentation dans l'esprit du public.
On dénomme une juridiction en fonction de ce qu'elle a à juger : dans le cas présent, il s'agit de crimes, et les accusés, s'ils sont condamnés, sont des criminels. C'est la raison pour laquelle nous proposons de remplacer « tribunal d'assises » par « tribunal criminel ».
Je rappelle d'ailleurs que c'est l'appellation « tribunal criminel départemental » qui avait été adoptée en 1791, lorsque, pour la première fois, on est passé au stade de la nouvelle procédure.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Marie Girault, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Toubon, garde des sceaux, ministre de la justice. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 173.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je me permettrai d'insister : tout le monde sait ce qu'est la cour d'assises. Parler également de tribunal d'assises risque de jeter la confusion dans les esprits. Il est donc important de distinguer l'un de l'autre.
Par ailleurs, en matière de police, on est jugé par le tribunal de police et l'on fait appel devant la cour d'appel. En matière de délit, on est jugé par le tribunal correctionnel et l'on fait appel devant la cour d'appel. Il est donc normal que, en matière criminelle, on soit jugé devant un tribunal criminel et que l'on fasse appel devant la cour d'assises.
C'est la raison pour laquelle « tribunal criminel » me paraît une meilleure dénomination que « tribunal d'assises ».
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 173, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du titre Ier est ainsi rédigé et il sera procédé à la coordination nécessaire.

Article 1er