M. le président. Par amendement n° 191, MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 2 pour l'article 231-82 du code de procédure pénale :
« Art. 231-82. - Le ministère public prend, au nom de la loi, toutes les réquisitions qu'il juge utiles : le tribunal d'assises est tenu de lui en donner acte et d'en délibérer.
« Les réquisitions du ministère public prises dans le cours des débats sont mentionnées par le greffier sur son procès-verbal. Toutes les décisions auxquelles elles ont donné lieu sont signées par le président et le greffier. »
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je disais tout à l'heure en plaisantant que nous étions conservateurs. M. Fauchon me rétorquait : « Vous l'êtes toujours ! » ; après quoi il rappelait qu'il n'est pas bon de changer un texte qui n'a suscité aucune critique et qui n'en suscite aucune ! (Sourires.) Nous serons d'accord, bien entendu, avec Montesquieu pour affirmer qu'il ne faut toucher aux lois que d'une main tremblante !
M. Pierre Fauchon. C'est Portalis !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non ! C'est Montesquieu, dans les Lettres persanes. Je tiens à le rappeler !
M. Pierre Fauchon. Les Lettres persanes, c'est fripon ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. La statue vibre !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. En la cherchant, je me demande pourquoi le pauvre Michel de L'Hospital est gris alors que les autres ont leur blancheur.
M. le président. C'est un problème de lumière !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je sais que la statue de Portalis est là, mais je ne la vois pas car elle m'est cachée. Ce n'est pas grave, puisque ma citation était bien de Montesquieu !
Revenons à l'article 231-82 du projet de loi. Le texte de référence, l'article 313 initial, est tout à fait satisfaisant. Fallait-il en changer les termes ? Il précisait : « Le ministère public prend, au nom de la loi, toutes les réquisitions qu'il juge utiles : la cour est tenue de lui en donner acte et d'en délibérer. » Elle n'est donc pas obligée de rendre un arrêt ; elle en délibère simplement.
Je poursuis : « Les réquisitions du ministère public prises dans le cours des débats sont mentionnées par le greffier sur son procès-verbal. Toutes les décisions auxquelles elles ont donné lieu sont signées par le président et par le greffier. » Y a-t-il quelque chose à changer à cela ? Si oui, pourquoi ? Qu'on nous le dise !
Nous avons lu avec beaucoup d'attention le rapport de M. Clément ainsi que le compte rendu des débats de l'Assemblée nationale. Nous n'avons pas trouvé la moindre justification aux modifications qui sont proposées à l'article 231-82, selon lesquelles : « Le ministère public prend, au nom de la loi, toutes les réquisitions qu'il juge utiles et sur lesquelles le tribunal est tenu de statuer. »
Pourquoi ne pas se contenter d'écrire que le tribunal serait tenu de lui donner acte et d'en délibérer ? Pourquoi supprimer la mention au procès-verbal des réquisitions ? Pourquoi supprimer la signature par le président et par le greffier des décisions auxquelles ces réquisitions ont donné lieu ?
Nous n'avons pas de réponse.
M. Pierre Fauchon. Cela va de soi !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous proposons donc de conserver le texte de l'article 313 du code de procédure pénale, en l'adaptant évidemment au tribunal et en remplaçant les mots « la cour » par les mots « le tribunal ». Tel est l'objet de notre amendement n° 191.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Marie Girault, rapporteur. Sagesse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. Je suis défavorable à l'amendement n° 191, car le texte proposé par le Gouvernement dit exactement la même chose, notamment parce que le greffier établit un procès-verbal, ce qui signifie que le tribunal statue.
De plus, notre texte est beaucoup plus simple, ce qui me paraît être un progrès par rapport au texte actuel.
Je souhaite que l'on maintienne le texte du Gouvernement et que l'on n'adopte donc pas l'amendement du groupe socialiste.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 191, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 231-82 du code de procédure pénale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE 231-83 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE