SOMMAIRE
présidence de m. rené monory
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Candidatures au sein de délégations parlementaires
(p.
1
).
3.
Candidature à un organisme extraparlementaire
(p.
2
).
4.
Dépôt d'un rapport du Gouvernement
(p.
3
).
5.
Organisme extraparlementaire
(p.
4
).
6.
Démissions de membres de commissions et candidatures
(p.
5
).
7.
Droit de vote des citoyens de l'Union européenne aux élections municipales.
- Discussion d'un projet de loi organique (p.
6
).
Discussion générale : MM. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur ;
Pierre Fauchon, rapporteur de la commission des lois.
présidence de m. jacques valade
MM. Hubert Durand-Chastel, Nicolas About, Denis Badré, Jean-Patrick Courtois,
Guy Allouche, Michel Duffour, Guy Cabanel, le ministre.
Clôture de la discussion générale.
8.
Nomination de membres de délégations parlementaires
(p.
7
).
9.
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
(p.
8
).
10.
Nomination de membres de commissions
(p.
9
).
11.
Droit de vote des citoyens de l'Union européenne aux élections municipales.
- Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi organique (p.
10
).
Intitulé du chapitre Ier (p. 11 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Article 1er (p.
12
)
Intitulé de la section I
bis
du code électoral
(p.
13
)
Amendement n° 2 de la commission. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé du code.
Article L.O. 227-1 du code électoral (p. 14 )
Amendement n° 3 de la commission et sous-amendement n° 31 de M. Habert. - MM.
le rapporteur, Jacques Habert, le ministre, Philippe Arnaud, Guy Cabanel,
Charles Ceccaldi-Raynaud, Philippe Richert, Michel Dreyfus-Schmidt, Guy
Allouche, Jacques Larché, président de la commission des lois. - Rejet du
sous-amendement ; adoption, par division, de l'amendement.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L.O. 227-2 du code électoral. - Adoption
(p.
15
)
Article L.O. 227-3 du code électoral
(p.
16
)
Amendement n° 4 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L.O. 227-4 du code électoral (p. 17 )
Amendement n° 5 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 26 de M. Durand-Chastel. - MM. Hubert Durand-Chastel, le
rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Guy
Allouche, Charles Ceccaldi-Raynaud, Michel Duffour, Guy Cabanel, Michel
Dreyfus-Schmidt. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L.O. 227-5 du code électoral (p. 18 )
Amendement n° 7 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article du code.
Article L.O. 227-6 du code électoral (p. 19 )
Amendement n° 8 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article du code.
Article L.O. 227-7 du code électoral (p. 20 )
Amendement n° 9 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant
l'article du code.
Adoption de l'article 1er modifié.
Intitulé du chapitre II (p. 21 )
Amendement n° 10 de la commission. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Article 2 (p. 22 )
Amendement n° 11 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 12 de la commission et sous-amendement n° 30 de M. Allouche. -
MM. le rapporteur, Guy Allouche, le ministre, le président de la commission,
Jean-Jacques Hyest, Michel Dreyfus-Schmidt. - Adoption du sous-amendement et de
l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 23 )
Amendement n° 13 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 24 )
Amendement n° 14 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 25 )
Amendement n° 16 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 5 (p. 26 )
Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption
de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 25 rectifié de M. Richert. - MM. Philippe Richert, le rapporteur,
le ministre, André Bohl. - Retrait.
Article 6. - Adoption (p.
27
)
Article additionnel après l'article 6 (p.
28
)
Amendement n° 28 rectifié de M. Allouche. - MM. Guy Allouche, le rapporteur, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt, Guy Cabanel. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 7 et 8. - Adoption (p.
29
)
Article 9 (p.
30
)
Amendement n° 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 9 (p. 31 )
Amendement n° 19 rectifié de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 10 (p. 32 )
Amendement n° 20 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 (p. 33 )
Amendement n° 21 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 12 (p. 34 )
Amendement n° 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Guy
Allouche, Michel Duffour. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 13 (p. 35 )
Amendement n° 23 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
Intitulé du projet de loi organique (p.
36
)
Amendement n° 24 de la commission et sous-amendement n° 29 de M. Dreyfus-Schmidt. - MM. le rapporteur, Guy Allouche, le ministre. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé modifié.
Vote sur l'ensemble (p. 37 )
MM. Pierre Fauchon, Emmanuel Hamel, Guy Allouche, Hubert Durand-Chastel,
Jacques Bimbenet, Michel Duffour, le président de la commission.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi organique.
12.
Vacance d'un siège de sénateur
(p.
38
).
13.
Transmission d'un projet de loi
(p.
39
).
14.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
40
).
15.
Dépôt d'une proposition d'acte communautaire
(p.
41
).
16.
Dépôt de rapports
(p.
42
).
17.
Dépôt d'un avis
(p.
43
).
18.
Ordre du jour
(p.
44
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURES
AU SEIN DE DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES
M. le président.
L'ordre du jour appelle la désignation :
- d'un membre titulaire et de deux membres suppléants représentant la France à
l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à l'Assemblée de l'Union de
l'Europe occidentale ;
- d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne ;
- d'un membre de la délégation parlementaire pour les problèmes démographiques
;
- et d'un membre de la délégation du Sénat à l'office parlementaire
d'évaluation de la législation.
La désignation d'un membre de la délégation du Sénat à l'office parlementaire
d'évaluation des politiques publiques interviendra ultérieurement.
Le groupe socialiste m'a fait connaître qu'il présentait les candidatures :
- de Mme Josette Durrieu comme membre titulaire et de M. Marcel Debarge comme
membre suppléant représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil
de l'Europe et à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale ;
- de M. Michel Dreyfus-Schmidt comme membre de la délégation du Sénat pour
l'Union européenne ;
- de Mme Maryse Bergé-Lavigne comme membre de la délégation du Sénat à
l'office parlementaire d'évaluation de la législation.
Le groupe des Républicains et Indépendants m'a fait savoir qu'il présentait la
candidature de M. James Bordas comme membre suppléant représentant la France
àl'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à l'Assemblée de l'Union
de l'Europe occidentale.
Enfin, le groupe communiste républicain et citoyen présente la candidature de
Mme Nicole Borvo comme membre de la délégation parlementaire pour les problèmes
démographiques.
Ces canddiatures ont été affichées. Elles seront ratifiées si la présidence ne
reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.
3
CANDIDATURE À UN ORGANISME
EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein d'un
organisme extraparlementaire.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose la
candidature de M. Gérard Roujas pour siéger, en qualité de suppléant, au sein
du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles et, en qualité de
titulaire, au sein de la section de l'assurance des salariés agricoles contre
les accidents du travail et les maladies professionnelles créée au sein du
Conseil supérieur.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9
du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
4
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le rapport établi en application de
l'article 22 de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la
langue française, sur l'application de la loi précitée.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
5
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre par laquelle il demande au
Sénat de bien vouloir désigner un représentant au sein d'un organisme
extraparlementaire.
En application de l'article 9 du règlement, j'invite la commission des lois à
présenter une candidature pour un suppléant appelé à siéger, en remplacement de
M. Claude Pradille, au sein du conseil d'administration du conservatoire de
l'espace littoral et des rivages lacustres.
6
DÉMISSIONS DE MEMBRES DE COMMISSIONS
ET CANDIDATURES
M. le président.
J'ai reçu avis des démissions de M. Marcel Charmant comme membre de la
commission des affaires culturelles, de M. Michel Charzat comme membre de la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale et de M. Claude Haut comme membre de
la commission des affaires économiques et du Plan.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats
proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
J'ai reçu avis de la démission de M. Jean-Pierre Lafond comme membre de la
commission des affaires culturelles.
J'informe le Sénat que la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur
la liste d'aucun groupe a fait connaître à la présidence le nom du candidat
qu'elle propose pour siéger à la commission des affaires sociales, à la place
laissée vacante depuis le 18 juin 1997.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
J'informe le Sénat que le groupe socialiste a fait connaître à la présidence
le nom des candidats qu'il propose pour siéger :
- à la commission des affaires sociales en remplacement de M. Jacques Bialski,
démissionnaire de son mandat sénatorial ;
- et à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation en remplacement de MM. Jean-Pierre Masseret et Alain
Richard, dont le mandat sénatorial a cessé.
Ces candidatures vont être affichées et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
7
DROIT DE VOTE DES CITOYENS
DE L'UNION EUROPÉENNE
AUX ÉLECTIONS MUNICIPALES
Discussion d'un projet de loi organique
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi organique (n° 381,
1996-1997) relatif à l'exercice par les citoyens de l'Union européenne résidant
en France, autres que les ressortissants français, du droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales et portant transposition de la
directive 94/80/CE du 19 décembre 1994. [Rapport n° 415 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, en application du traité sur l'Union européenne, et en particulier
de son article 8 B, le Conseil européen du 19 décembre 1994 a adopté une
directive relative aux élections municipales. C'est sa transposition dans notre
droit interne qui vous est aujourd'hui proposée.
Il s'agit d'organiser pour tout citoyen de l'Union européenne résidant dans un
Etat membre dont il n'est pas le ressortissant le droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales dans l'Etat membre où il se réside.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, on me permettra de faire un bref rappel
historique.
La directive du Conseil du 19 décembre 1994, relative aux élections
municipales, prévoit dans son dernier article que « les Etats membres mettent
en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives
nécessaires » pour se conformer à ladite directive « avant le 1er janvier 1996
».
C'est en application de cette disposition que le précédent Gouvernement a
procédé à l'élaboration d'un projet de loi organique, déposé sur le bureau de
l'Assemblée nationale le 2 août 1995.
Toutefois, pour des raisons qui lui sont propres, le Gouvernement de M. Alain
Juppé n'a pas fait inscrire le texte à l'ordre du jour de l'Assemblée
nationale. Il en est résulté que la France a pris un important retard dans la
mise en oeuvre de ses engagements internationaux en cette matière.
Par ailleurs, la dissolution de l'Assemblée nationale survenue le 21 avril
1997 a rendu ce texte caduc, si bien que le nouveau gouvernement a dû reprendre
la procédure
ab initio
. Soucieux de ne pas différer davantage
l'application du traité, le Gouvernement a déposé un nouveau projet de loi
organique sur le bureau du Sénat le 2 juillet dernier, et c'est le premier
texte qui vient à l'ordre du jour à l'ouverture de la présente session
extraordinaire.
J'en viens maintenant à l'analyse du dispositif que vous propose le
Gouvernement.
Afin de sérier les problèmes, je regrouperai les dispositions du texte en deux
grandes catégories.
Il s'agit, d'une part, des mesures homologues, pour les élections municipales,
de celles qui sont déjà contenues dans la loi du 5 février 1994 pour les
élections européennes. Elles sont déjà connues de vous et le rapporteur de la
commission des lois, M. Fauchon, avait également rapporté ce texte de loi en
1994. L'adaptation aux élections municipales ne devrait donc pas,
a
priori
, soulever de difficulté.
Il s'agit, d'autre part, des mesures qui s'écartent des dispositions
correspondantes de la loi sur les élections européennes et celles qui n'y ont
pas d'équivalent, qui devraient naturellement retenir davantage votre
attention.
J'aborderai en premier lieu les mesures homologues de celles de la loi du 5
février 1994.
La directive du 19 décembre 1994 pas plus que celle du 6 décembre 1993
relative à l'élection européenne ne touchent au système électoral de chaque
Etat membre. La Commission européenne et le Conseil se sont attachés à limiter
son contenu à ce qui est strictement nécessaire pour atteindre l'objectif du
traité. Le texte laisse donc en l'état les systèmes électoraux pour les
électeurs nationaux. Il vise essentiellement à supprimer la condition de
nationalité, actuellement requise par la plupart des Etats membres pour exercer
le droit de vote et se porter candidat aux élections municipales, permettant
ainsi à la loi électorale nationale de s'appliquer aux résidents communautaires
de la même façon qu'elle s'applique aux ressortissants nationaux.
L'affirmation du principe d'égalité et de non-discrimination pour les
résidents communautaires conduit à leur appliquer les mêmes conditions qu'aux
nationaux pour l'exercice du droit de vote et d'éligibilité. Ces conditions
portent sur l'âge, la capacité, le cumul des mandats, l'inscription sur la
liste électorale et la notion de résidence. La directive n'interfère pas dans
ces domaines qui doivent, à l'évidence, rester du ressort national.
La deuxième similitude a trait aux populations concernées. Il s'agit des
citoyens de l'Union non français mais résidant en France, condition nécessaire
pour participer au scrutin.
On retrouve donc là une question déjà rencontrée lors de la discussion de la
loi sur le vote des communautaires aux élections européennes : un étranger
communautaire peut-il voter dans la commune où il dispose d'une résidence
secondaire ? La réponse est « non » car, en droit français, la notion de
résidence, en matière électorale, s'entend de celle qui revêt à la fois un
caractère réel et continu, conformément à la jurisprudence de la Cour de
cassation, excluant par principe les séjours dans une résidence secondaire. Le
citoyen communautaire non français qui ne disposerait en France que d'une
résidence secondaire ne saurait donc exciper du fait qu'il paye des impôts
locaux depuis plus de cinq ans dans la commune où elle est située pour être
autorisé à y participer aux élections municipales.
En revanche, la réponse serait « oui » si l'intéressé est inscrit dans une
commune depuis cinq ans au moins sans interruption au rôle d'une des
contributions directes communales, mais à la condition expresse qu'il réside de
manière permanente en France, dans une autre commune. Ces conditions sont
posées, pour les Français, par l'article L. 11 du code électoral et, pour les
étrangers communautaires, par la directive elle-même.
Troisième point de similitude : pour exercer leur droit de vote en France lors
des élections municipales, les étrangers communautaires devront être inscrits
au préalable sur une « liste électorale complémentaire » valable pour les
seules élections municipales.
Deux précisions doivent être apportées à cet égard. D'une part, et alors que
l'inscription des citoyens français sur les listes électorales est obligatoire
aux termes de l'article L. 9 du code électoral, le système offert aux
ressortissants communautaires est facultatif, puisque le traité et la directive
laissent aux citoyens de l'Union le libre choix de participer ou non au scrutin
dans leur Etat de résidence. D'autre part, le droit de voter des intéressés est
subordonné à la double condition qu'ils ne soient privés de ce droit, par
l'effet d'une décision civile ou pénale, ni en France ni dans l'Etat dont ils
ont la nationalité.
Pour le reste, et afin d'assurer, conformément au traité, une exacte égalité
des droits entre les Français et les autres électeurs de l'Union, l'inscription
de ces derniers sur une liste électorale complémentaire est soumise aux mêmes
règles que celles qui sont édictées pour l'inscription des Français sur les
listes électorales.
L'établissement et la révision des listes électorales complémentaires sont
donc confiés aux mêmes autorités que celles qui sont compétentes pour
l'établissement et la révision des listes électorales, les citoyens «
communautaires » doivent remplir les mêmes conditions que celles qui sont
imposées aux Français et les règles relatives au contentieux des listes
électorales sont étendues au contentieux des listes électorales
complémentaires.
Quant au droit d'éligibilité, il est reconnu aux ressortissants des autres
Etats de l'Union résidant en France dans les mêmes conditions et sous les mêmes
réserves qu'il est reconnu aux électeurs français conformément au chapitre II
du projet de loi organique.
J'en viens maintenant aux mesures spécifiques au projet de loi présenté,
mesures qui, je le pense, retiendront davantage votre attention.
La spécificité du texte qui vous est soumis aujourd'hui, par rapport à celui
qui a transposé les dispositions de la directive relative à l'élection des
membres du Parlement européen, apparaît tout d'abord dans sa forme, puisqu'il
s'agit d'un projet de loi organique.
En effet, la transposition dans notre droit national des mesures contenues
dans la directive du Conseil du 19 décembre 1994 doit s'inscrire dans le cadre
de l'article 88-3 de la Constitution, lequel est ainsi rédigé : « Sous réserve
de réciprocité et selon les modalités prévues par le traité sur l'Union
européenne signé le 7 février 1992, le droit de vote et d'éligibilité aux
élections municipales peut être accordé aux seuls citoyens de l'Union résidant
en France. [...] Une loi organique votée dans les mêmes termes par les deux
assemblées détermine les conditions d'application du présent article. »
Ces modalités particulières de transposition s'expliquent évidemment par les
répercussions que pourrait avoir la participation d'électeurs communautaires à
la désignation des sénateurs, laquelle doit être réservée aux Français pour que
soit garanti le respect de l'article de la Constitution qui réserve au peuple
français l'exercice de la souveraineté nationale à laquelle participe sans
discussion possible le Sénat.
Sur le fond, le texte du projet de loi diverge encore de la loi du 5 février
1994 à propos du contrôle des doubles inscriptions.
La loi de 1994, dans le droit-fil de la directive du 6 décembre 1993, prévoit
divers contrôles et échanges d'informations entre les Etats membres de l'Union,
de telle sorte qu'un même électeur ne puisse simultanément être inscrit dans
son Etat d'origine et dans son Etat de résidence, pour interdire en pratique
toute possibilité de vote multiple à l'élection du Parlement européen,
conformément à l'article 8 de l'article 8 de l'Acte du 20 septembre 1976.
En revanche, s'agissant des élections municipales, nos partenaires, pour des
raisons qui leur appartiennent, n'ont pas exclu formellement les inscriptions
multiples.
Dans ces conditions, il n'était plus possible, même si on peut le déplorer,
d'organiser d'un commun accord des échanges d'informations de nature à prévenir
d'éventuelles inscriptions multiples.
Le Conseil d'Etat a néanmoins souligné, en se fondant sur la décision du
Conseil constitutionnel n° 92-308 DC du 9 avril 1992, qu'il importait d'éviter
qu'une même personne puisse exercer le droit de vote aux élections municipales
à la fois dans son Etat d'origine et dans l'Etat de l'Union où il réside. Aussi
lui est-il apparu nécessaire de transposer à sa situation un principe de base
de notre droit électroral : de la même façon qu'est prohibée l'inscription
simultanée d'un Français sur plusieurs listes électorales, il sera exigé que le
citoyen de l'Union qui demande son inscription sur une liste électorale
complémentaire s'engage à n'exercer son droit de vote aux élections municipales
qu'en France. Le fait pour lui de revenir sur cet engagement emporterait
corrélativement sa radiation d'office de la liste électorale complémentaire.
C'est l'objet des articles L.O. 227-4 et L.O. 227-6 dont l'insertion est
proposée dans le code électoral. Enfin, figurent dans le projet de loi
organique des règles qui n'ont pas de contrepartie dans la loi du 5 février
1994 sur la participation des étrangers communautaires à l'élection des
représentants de la France au Parlement européen.
D'une part, les articles 6 et 7 du projet de loi interdisent aux conseillers
municipaux n'ayant pas la nationalité française d'être membres du collège
électoral sénatorial ou de participer à la désignation de membres d'un tel
collège.
D'autre part, les mêmes élus municipaux ne peuvent être désignés en qualité de
maire ou d'adjoint ni même appelés à en exercer temporairement les
fonctions.
Ces dispositions se fondent sur les paragraphes 3 et 4 de l'article 5 de la
directive, qui autorisent les Etats membres à disposer que seuls leurs propres
ressortissants sont éligibles « aux fonctions de chef, d'adjoint ou de
suppléant ou de membre du collège directeur de l'exécutif d'une collectivité
locale de base » ou que les étrangers « ne peuvent participer à la désignation
des électeurs d'une assemblée parlementaire ni à l'élection des membres de
cette assemblée », sous réserve que les dispositions adoptées à cet effet
restent « appropriées, nécessaires et proportionnées aux objectifs visés ».
Le Gouvernement comme le Conseil d'Etat ont veillé à ce que les règles
dérogatoires élaborées dans le cadre de cette autorisation soient effectivement
rigoureusement proportionnées. C'est ainsi qu'a été écartée toute solution qui
aurait impliqué un « contingentement » des élus étrangers au sein des conseils
municipaux.
Enfin, je dirai un mot des mesures transitoires incluses dans l'article 13 du
projet de loi organique.
Pour respecter exactement les prescriptions de la directive, il convient que
les ressortissants de l'Union autres que les Français soient en mesure de
participer aux élections municipales partielles éventuellement organisées avant
le prochain renouvellement général des conseils municipaux de 2001, faute de
quoi ils feraient l'objet d'une mesure discriminatoire contraire au traité.
Or la date probable de publication de la loi organique sera trop tardive pour
que les citoyens de l'Union résidant en France disposent du même délai que les
Français pour demander leur inscription sur les listes électorales. La révision
annuelle des listes est en effet ouverte depuis le 1er septembre dernier, et
les demandes d'inscription ne sont recevables que jusqu'au 31 décembre
prochain, pour prendre effet à compter du 1er mars 1998.
C'est la raison pour laquelle l'article 13 du projet de loi permet aux
intéressés, à titre transitoire et jusqu'à la clôture de la révision 1998-1999,
de demander leur inscription dans les conditions prévues aux articles L. 31 à
L. 35 du code électoral. A l'approche d'une élection municipale partielle, il
leur sera donc loisible de déposer une demande d'inscription en mairie, même en
dehors des périodes normales d'inscription ; cette demande, recevable jusqu'au
dixième jour précédant le scrutin, sera transmise au juge du tribunal
d'instance et instruite par lui ; elle pourra donner lieu à l'inscription du
requérant avec effet immédiat.
Telles sont brièvement résumées, mesdames, messieurs les sénateurs, les
dispositions essentielles du projet du Gouvernement. Je vous invite maintenant
à en délibérer, de telle sorte que la France puisse se mettre en règle avec les
engagements qu'elle a précédemment souscrits à l'égard de nos partenaires de
l'Union européenne.
Dans mon esprit, cette possibilité offerte aux citoyens de l'Union d'être
associés étroitement à la gestion des affaires locales doit devenir un facteur
puissant incitant les étrangers communautaires installés dans notre pays à une
plus grande intégration. L'objectif que nous devons chercher à atteindre est
non pas de dissoudre le principe de citoyenneté, mais de le raffermir. Les
hôtes de la France, si du moins ils le désirent, doivent devenir demain les
nouveaux citoyens de la République. Ce projet de loi organique ouvre ainsi,
pour les ressortissants communautaires, une étape accueillante sur le chemin
qui les conduira à la pleine égalité en droit que la République confère à tous
ses citoyens, d'où qu'ils viennent.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai donc l'honneur de
rapporter devant vous ce projet de loi organique qui présente deux
caractéristiques, peut-être d'ailleurs un peu contradictoires.
En premier lieu, il vise à introduire dans notre vie publique une innovation
plus importante par sa signification que par ses effets pratiques, qui
resteront probablement tout à fait limités.
En second lieu, ce projet de loi témoigne d'une double continuité, je dirai
presque d'un double consensus.
Il existe tout d'abord une continuité du processus européen : nous avons ainsi
examiné le traité sur l'Union européenne, qui modifiait le traité de Rome en y
introduisant le dispositif qu'il s'agit maintenant de rendre applicable.
Ensuite, avant la ratification, nous avons dû adapter la Constitution aux
dispositions du traité sur l'Union. Un certain nombre d'entre vous se
souviennent sans doute d'ailleurs que cela avait donné lieu à un débat
important, particulièrement dans cette assemblée. Il en a résulté la révision
constitutionnelle créant l'article 88-3 nouveau de la Constitution, lequel
précise les conditions dans lesquelles il peut être procédé à cette innovation.
Je rappellerai d'ailleurs tout à l'heure que ces précisions constituent l'un
des cadres impérieux dont nous devons tenir compte.
Puis la ratification est intervenue le 20 septembre 1992, suivie des
délibérations sur la directive, des votes de résolution dans nos deux
assemblées et de l'adoption, le 19 décembre 1994, de cette directive à
l'unanimité - c'était prévu - MM. Balladur et Pasqua étant alors respectivement
Premier ministre et ministre de l'intérieur.
Mais, en plus de la continuité du processus européen, il existe une sorte de
continuité gouvernementale : en effet, le texte qui nous est aujourd'hui soumis
reprend purement et simplement le projet de loi organique préparé et présenté
par le gouvernement de M. Juppé, projet de loi qui, comme M. le ministre de
l'intérieur l'a rappelé tout à l'heure, n'avait pas été inscrit à l'ordre du
jour. Il y a donc, une fois n'est pas coutume, à moins qu'elle ne le devienne -
je ne peux pas préjuger !
(Sourires) -,
un consensus qu'il convient de saluer pour placer nos
délibérations sous le signe d'une certaine détente.
Il s'agit donc pour nous de transposer la directive. Monsieur le ministre,
vous venez de donner un exemple tout à fait remarquable du caractère
extrêmement scrupuleux de votre démarche par rapport aux dispositions du traité
sur l'Union puisque vous vous y êtes constamment référé. Voilà qui montre la
voie que nous devons suivre dans une démarche qui, dans mon esprit, est
essentiellement technique puisque le débat de fond est derrière nous depuis
plusieurs années.
Disons immédiatement, pour situer notre réflexion, que la transposition
signifie ici l'introduction dans les systèmes législatifs nationaux
naturellement différents les uns des autres, non pas d'un bloc législatif
autonome prévoyant dans les moindres détails la participation aux élections
municipales des ressortissants de l'un des Etats membres de l'Union européenne
autre que la France - je dirai désormais, pour simplifier, « les Européens » -
mais d'un principe, en tenant compte éventuellement des différences entre les
systèmes nationaux, après avoir défini un critère d'introduction commun imposé
par le traité : celui de la résidence.
Cette porte d'entrée étant franchie ou supposée telle, les législations
particulières s'appliqueront, et le texte ne permet pas de prévoir, à
l'intérieur de chaque système, des dérogations imposant pour les seuls «
Européens » des conditions particulières : c'est la règle de la
non-discrimination.
Il s'agit donc, je le répète, d'un texte technique, mais qui soulève un
certain nombre de difficultés sur lesquelles je m'expliquerai dans un
instant.
Notre démarche est assez étroitement inscrite dans un cadre qui comporte trois
côtés, et même un quatrième un peu virtuel, à savoir la résolution que nous
avons adoptée en 1994 et qui a constitué le fil conducteur de nos
réflexions.
L'un des éléments de ce cadre, c'est évidemment le traité sur l'Union. Un
autre est constitué par l'article 88-3 de la Constitution, qui précise la
manière dont nous devons procéder : nous aurons l'occasion de le rappeler tout
à l'heure, seuls les citoyens européens pourront, sous condition de résidence,
bénéficier de cet avantage, mais avec impossibilité pour eux d'exercer les
fonction de maire ou d'adjoint et de participer - retenons cette formule - aux
élections sénatoriales.
J'en viens à l'élément « virtuel », c'est-à-dire la résolution que nous avons
adoptée en 1994 pour éclairer la démarche du gouvernement français dans la
négociation sur la directive.
Cette résolution n'a pas, semble-t-il, été suivie, mais il convenait de la
rappeler parce que, encore une fois, elle a guidé nos interrogations, sinon
toujours nos décisions. Nous souhaitions, ainsi, que les listes, en cas de
scrutin de liste, et surtout les conseils municipaux élus ne comportent qu'une
proportion limitée d'étrangers, et en tout cas qu'il n'y ait pas de majorité
d'étrangers dans les conseils municipaux ; nous souhaitions également qu'une
condition de durée minimale de résidence en France puisse être imposée ; nous
souhaitions, en troisième lieu, que la date d'application du dispositif soit
reportée à 2001 - mais les retards auxquels vous avez fait allusion, monsieur
le ministre, sont tels que, mises à part les élections partielles qui auront
lieu d'ici à cette date, cela ne posera pas de problème - et nous souhaitions,
enfin, que les territoires associés ne soient pas inclus dans l'application du
nouveau texte. Certes, s'agissant d'une résolution, je reconnais que nous ne
sommes pas là dans le droit positif, lequel se limite aux éléments que j'ai
énumérés précédemment, mais il me semblait utile de rappeler sommairement le
contenu de ladite résolution.
Le projet de loi qui nous est soumis a été fort bien exposé par M. le
ministre, je ne vais pas y revenir. Je voudrais simplement, dans une démarche
encore une fois essentiellement technique, attirer votre attention sur les cinq
ou six points qui ont retenu, assez longuement quelquefois, l'attention de la
commission des lois et qui, je n'en doute pas, retiendront la vôtre, mes chers
collègues.
S'agissant, tout d'abord, de la notion de résidence en France, nous avions
estimé préférable, au moment de l'examen d'un précédent texte dont j'avais déjà
l'honneur d'être le rapporteur et qui permettait aux Européens de voter aux
élections européennes, d'apporter le maximum de précisions en la matière. Il
est en effet important, pour les élus locaux et les maires, de ne pas susciter
des contentieux ou des difficultés d'interprétation, même si la solution est
connue d'avance. Nous avions ainsi adopté une rédaction selon laquelle un
résident en France est quelqu'un qui y a son domicile réel ou dont la résidence
y a un caractère continu. Nous vous proposerons tout à l'heure un amendement
identique pour compléter le texte sur ce point.
Il est une deuxième difficulté, peut-être plus curieuse, sur laquelle M. le
ministre a exprimé un avis personnel qui m'a intéressé. Je veux parler du
double électorat : un Européen remplissant les conditions pour être électeur en
France lors d'une élection municipale, mais qui les remplit aussi pour être
électeur dans telle ou telle commune ou dans tel équivalent de commune de son
pays d'origine, doit-il, comme nous le propose le Gouvernement, « brûler ses
vaisseaux » s'il veut voter chez nous et couper le cordon ombilical avec sa
commune d'origine ? Cette proposition ne nous semble pas fondée : en effet,
actuellement, la directive est transposée dans presque tous les Etats membres
de l'Union, à l'exception de la Belgique, de la Grèce et de la France. Or les
autres Etats membres ne sont pas allés au-delà de la directive sur ce point et
ils n'ont pas interdit cette possibilité de double appartenance à un collège
électoral. Cela signifie qu'un Français résidant, par exemple, en Belgique ou
en Allemagne mais qui est imposable dans telle ou telle de nos communes où il a
sa famille, où il connaît tout le monde, pourra continuer à participer aux
élections municipales chez nous, même si, pour des raisons tenant à l'évolution
de sa vie, il a acquis une sorte de dimension nouvelle et différente, ce que
nous appellerons une dimension « européenne ». Ce citoyen pourra donc ainsi
accéder au droit de vote - je parle ici uniquement du droit de vote et non pas
de l'éligibilité, question bien distincte sur laquelle notre position est
différente - mais il pourra aussi s'inscrire à l'étranger.
Le citoyen français le peut donc, et nous avons pensé qu'
a priori
il
n'était ni souhaitable - ni même aimable - d'imposer des servitudes aux autres
alors qu'on ne nous les impose pas. Plus profondément - et ici, monsieur le
ministre, nos esprits pourront peut-être se rencontrer - nous avons considéré
que l'on peut devenir « citoyen européen » - je mets ces termes entre
guillemets, mais c'est bien à une amorce de citoyenneté européenne que nous
travaillons aujourd'hui - sans cesser d'être un citoyen national. Mais ne nous
demandez-vous pas, si j'ai bien compris vos propos tout à l'heure, monsieur le
ministre, de voter ce texte sous le signe d'une intégration à la République du
citoyen européen ?
Ma vision des choses est un peu différente. Il me semble, personnellement,
que, dans le processus de construction européenne où nous nous situons, on peut
être tout à la fois Européen et national de l'un des Etats membres. Il n'y a
pas de raison d'empêcher cette dualité, qui durera sinon des générations, en
tout cas un certain temps, sans même que l'on puisse imaginer sérieusement
l'époque où une sorte de supranationalité viendrait abolir les nationalités
originelles, car je n'imagine pas que ce soit ainsi que nous souhaitions, ni
les uns ni les autres, construire l'Europe.
M. Emmanuel Hamel.
Certainement pas !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Merci, monsieur Hamel !
Enfin, il nous a semblé qu'il n'y avait pas d'inconvénient à cette double
qualité d'électeur, d'autant que les élections ne se déroulent généralement ni
aux mêmes dates, ni dans le même contexte.
Dans ces conditions, nous proposerons, dans un amendement dont nous
reparlerons tout à l'heure, de supprimer ce dispositif et les contrôles qu'il
génère, d'autant que ces derniers ne seraient guère aisés à exercer.
En revanche, ainsi que je l'ai annoncé tout à l'heure, lorsqu'il s'agit de
l'éligibilité à un conseil municipal, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit d'assumer
une fonction qui demande une présence, une attention, une connaissance des
problèmes, il ne nous semble pas raisonnable de permettre un tel cumul. Je ne
sais si cette proposition relève de la réflexion générale sur les cumuls qui se
prépare actuellement, mais il nous est en tout cas apparu déraisonnable
d'autoriser quelqu'un à être conseiller municipal en Grèce ou en Ecosse, par
exemple, en même temps que conseiller municipal en France. Nous vous
proposerons donc un amendement - car ce point n'est pas prévu dans le texte du
Gouvernement - qui exclut la possibilité d'un tel cumul, avec comme sanction la
démission d'office, même si nous savons bien - mais ce n'est pas une raison
pour ne pas examiner un texte - qu'il sera difficile de vérifier dans les faits
de telles situations.
Une quatrième difficulté, plus formelle sans doute, tient à la clause de
réciprocité qui est expressément visée dans les textes auxquels j'ai fait
référence tout à l'heure. En effet, qu'entend-on par « réciprocité » ? Cette
question soulève un débat de juristes que je me contenterai d'évoquer ici pour
ne le développer, si nécessaire, que lors de la discussion des articles.
Pour les uns, dès lors que le traité dont est issue la directive d'application
est ratifié par tous les Etats, la condition de réciprocité est acquise, même
si la directive qui rend le traité applicable n'est pas, en réalité, transposée
dans tel ou tel Etat.
Il nous semble que cette vision tout à fait abstraite ne répond pas à notre
système constitutionnel - le président Larché l'a rappelé lors de la révision
constitutionnelle de manière excellente - car il n'est que deux fois question
de réciprocité dans notre Constitution : en premier lieu dans le préambule de
1946, en second lieu à l'article 55.
Une démarche plus concrète et de bon sens consisterait à dire : « Nous voulons
bien transposer, nous voulons bien que les Européens votent chez nous, à
condition qu'un Français puisse voter dans chacun des pays concernés. » Mais il
y a des pays qui n'ont pas transposé la directive, même s'ils ont ratifié le
traité : c'est le cas actuellement pour la Belgique et pour la Grèce. Nous vous
proposerons donc, par voie d'amendement, de décider que, tant que les Belges et
les Grecs n'auront pas transposé la directive, leurs ressortissants ne
bénéficieront pas de cette possibilité.
La cinquième de mes réflexions porte sur les élections sénatoriales. Il s'agit
là, évidemment, d'un sujet auquel nous sommes particulièrement sensibles ! Il a
en tout cas donné un peu de fil à retordre à la commission.
Il est facile de poser le principe selon lequel les Européens inscrits sur les
listes électorales municipales ne pourront pas voter aux élections sénatoriales
: ils ne pourront pas élire les délégués dans les petites communes et, dans les
communes de plus de 9 000 habitants, où tous les conseillers municipaux sont
automatiquement grands électeurs, ils ne pourront pas l'être ni participer -
c'est pourquoi je soulignais tout à l'heure l'importance du terme - à la
désignation des suppléants et des délégués supplémentaires. Ils ont donc, en
quelque sorte, comme on dit dans le domaine hippique, un handicap.
Il nous est apparu, à la réflexion - mais nous avons été beaucoup aidés en
cela à la lecture des amendements de certains de nos collègues, et je pense en
particulier à ceux de M. Allouche - qu'il allait tout de même en résulter des
inconvénients assez sérieux. Ainsi, là où tous les conseillers municipaux
peuvent voter, le conseil municipal se trouvera affaibli dans la mesure où
certains ne voteront pas. Une anomalie serait donc introduite dans le système
des élections sénatoriales, qui risquerait d'être d'autant plus fâcheuse que,
ainsi que cela s'est produit encore tout récemment, une élection peut se gagner
à une voix près.
Nous devions donc essayer de trouver une solution, et nous en avons imaginé
trois, monsieur le ministre.
S'agissant de la première, nous avons suivi une démarche quelque peu sommaire.
Ainsi, lorsqu'un député, un conseiller général ou un conseiller régional siège
au conseil municipal, il ne peut être délégué de la commune car il est déjà
membre de droit du collège électoral des sénateurs. Il demande donc au maire de
lui désigner un remplaçant. Mais l'élu européen ne peut pas faire cette
proposition, car il participerait ainsi - c'est toujours la même formule - à
l'élection sénatoriale. Cette solution n'est pas possible.
La deuxième solution, proposée par certains de nos collègues - en particulier
par M. Allouche - consistait à prévoir que le conseil municipal élirait les
personnes qui remplaceront celles qui ne peuvent pas voter. Mais, lors de cette
élection, la majorité qui s'exprimera sera peut-être toute différente de celle
à laquelle appartient celui qu'il s'agit de remplacer ! Certes, c'est une
élection à la proportionnelle, mais, même si seules une ou deux personnes
doivent être remplacées, si elles se trouvent dans l'opposition - surtout
compte tenu de notre système électoral qui fait que, avec 30 % ou 40 % des
voix, on peut se retrouver avec 60 % des conseillers - le risque serait grand
de voir la tendance représentée par l'électeur européen privée de la voix de ce
dernier, alors que serait valorisée la voix d'une autre tendance. Le remède
serait donc sans doute pire que le mal.
Nous en sommes finalement arrivés ce matin à une troisième proposition, que M.
Allouche a bien voulu adopter et faire sienne, de sorte que cela m'a dispensé
de déposer l'amendement que j'avais prévu dans ce sens. Puisque nous sommes
dans une hypotèse de scrutin de liste, il suffit de faire comme lorsque
quelqu'un décède : on prend le suivant sur la liste. C'est une idée simple,
même si la rédaction de cette disposition est un peu compliquée. De la sorte,
si tel Européen ne peut pas voter ou participer au vote, il sera remplacé dans
cet exercice par le suivant sur la liste, s'il est Français naturellement.
M. Allouche nous présentera donc un tel amendement tout à l'heure, et je lui
fais part d'avance de l'accord unanime de la commission.
Nous avons rencontré une difficulté du même type avec le conseil de Paris.
Comme vous le savez - mais nous l'oublions souvent parce que nous ne sommes pas
tous Parisiens - la capitale est aussi un département pourvu d'un conseil
général. Les conseillers municipaux de Paris peuvent-ils, dès lors, voter au
conseil général alors qu'ils seraient Européens, c'est-à-dire tout de même
étrangers ?
Une remarquable discussion de juristes s'est engagée sur le point de savoir si
- c'est pire que le sexe des anges ! - le conseiller municipal est aussi
conseiller général ou si, par une transmutation véritablement mystique, il
devient conseiller général tout soudain. S'il touche, c'est vrai, deux
indemnités - je m'en réjouis pour lui ! - il semble tout de même que sa nature
soit unique.
Là aussi, pour prévenir une éventuelle difficulté constitutionnelle - je vous
rappelle, mes chers collègues, qu'il s'agit d'une loi organique, qui doit donc
être votée dans les mêmes termes par les deux assemblées et qui sera de toute
façon examinée par le Conseil constitutionnel - il nous a paru préférable de
prévoir le même système que précédemment : les conseillers de Paris, qu'il
s'agisse de siéger comme conseiller général ou de procéder à l'élection des
sénateurs, seront remplacés par leur suivant français sur la liste sur laquelle
ils ont été candidats. Voilà la proposition qui fera l'objet de quelques
amendements tout à l'heure.
Enfin - j'arrive au terme de mon propos - se posait la question des
territoires d'outre-mer. Le Sénat, dans sa résolution, je l'ai dit tout à
l'heure, avait demandé que ce texte ne soit pas applicable aux territoires
d'outre-mer.
Je rappelle que les territoires d'outre-mer ne sont visés à la quatrième
partie du traité de Rome que pour une liste limitative d'hypothèses, qui
n'englobe pas celle dont nous parlons aujourd'hui. Le traité sur l'Union
européenne n'a pas modifié cette liste, non plus que le traité d'Amsterdam, qui
n'a fait allusion à ce problème que pour le reporter à une date incertaine,
comme pour beaucoup d'autres, d'ailleurs, puisque le traité d'Amsterdam a
surtout servi à reporter les problèmes !
Dans ces conditions, les ressortissants des territoires d'outre-mer sont
fondés à nous dire que, le traité de Rome ne leur étant applicable que de
manière limitée et puisque, en l'espèce, nous sommes en dehors de ces limites,
le texte ne peut leur être appliqué. Or, tel est pourtant bien le cas pour les
territoires d'outre-mer et Mayotte.
L'assemblée territoriale de Polynésie n'avait pas été consultée. Elle a été
saisie par notre excellent collègue M. Millaud, absent aujourd'hui pour des
raisons de santé, et qui m'a demandé de vous prier de l'excuser. Ayant
délibéré, pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure mais également
pour d'autres sur lesquelles je ne m'attarderai pas, tant ce point est quelque
peu particulier, elle a jugé que le nouveau texte ne pouvait pas être
applicable au territoire.
La commission des lois a considéré que cette position, qui ne faisait
d'ailleurs que reprendre celle de la résolution, était fondée. Par voie
d'amendement, elle propose donc d'écarter de l'application de ce texte les
territoires d'outre-mer.
La question des délais d'application n'a maintenant plus d'importance puisque
les prochaines élections municipales générales auront lieu en 2001. Par
conséquent, de ce point de vue, nous aurons obtenu satisfaction, sous réserve
de quelques élections partielles qui ne justifient cependant pas que l'on
complique le texte.
Telles sont les principales questions dont nous aurons à débattre.
C'est au bénéfice de ces réflexions que la commission des lois propose au
Sénat d'adopter le texte amendé, sur les différents points que je viens
d'évoquer.
(Applaudissements.)
(M. Jacques Valade remplace M. René Monory au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 30 minutes ;
Groupe socialiste : 25 minutes ;
Groupe de l'Union centriste : 21 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants : 17 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen : 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 9 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe :
7 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
l'instauration du droit de vote et d'éligibilité pour les citoyens de l'Union
résidant dans un Etat membre dont ils n'ont pas la nationalité a constitué un
progrès majeur dans la construction de l'Europe à un double titre.
D'abord, pour la première fois depuis la signature du traité de Rome, on
plaçait au centre du processus l'homme et non les marchés commerciaux ou
financiers.
M. Jacques Genton.
Très bien !
M. Hubert Durand-Chastel.
Ensuite, cette avancée prenait ses sources dans la tradition française des
Droits de l'homme et du citoyen, dont le message universel façonne le monde
depuis deux siècles et qui, demain, devrait permettre à l'Europe de trouver sa
véritable dimension humaine et politique.
Il faut voir là le signe d'une « victoire » française : l'homme européen,
citoyen de l'Union, devient enfin un individu responsable, doté de droits et de
devoirs civiques.
La règle du traitement national, ou l'interdiction des discriminations,
constitue ainsi l'une des dispositions juridiques fondamentales de la
Communauté.
Le droit de vote et d'éligibilité des citoyens européens a été mis en oeuvre
lors des élections au Parlement européen, le 12 juin 1994 ; l'objet du projet
de loi organique que nous examinons aujourd'hui est de permettre l'application
de ce droit pour les élections municipales.
L'économie générale du texte ne pose pas de problèmes cruciaux, comme l'a
souligné notre excellent rapporteur, puisqu'il respecte les dispositions et
l'esprit de l'article 88-3 de notre Constitution révisée, et puisque la France,
comme tous ses autres partenaires, avait adopté la directive européenne du 19
décembre 1994, elle-même prise en application du volet sur la citoyenneté
européenne du traité de Maastricht, ratifié par référendum le 20 septembre
1992.
Le gouvernement d'Alain Juppé avait, en son temps, déposé à l'Assemblée
nationale un texte similaire ; on peut regretter qu'il n'ait été alors inscrit
à l'ordre du jour, la France étant aujourd'hui, avec la Grèce et la Belgique,
le seul pays de l'Union à ne pas avoir encore transposé la directive de la
Communauté européenne dans son droit interne.
Certains éclaircissements proposés par la commission des lois conviennent
parfaitement au représentant des Français de l'étranger que je suis. Rappelons,
en effet, que le nombre de nos ressortissants établis dans un autre pays membre
de l'Union européenne est évalué à 700 000, soit près de la moitié de la
totalité des Français résidant hors de France ; ceux-ci sont très directement
concernés, certains d'entre eux pouvant déjà exercer leur droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales dans leur pays de résidence, d'autres
ne le pouvant pas, comme en Grèce et en Belgique.
Nous apprécions le souci de la commission de subordonner ainsi clairement
l'application du droit de vote et d'éligibilité à la réciprocité des autres
Etats membres. C'est un principe auquel nos compatriotes de l'étranger tiennent
énormément, car ils souffrent trop souvent, hors de l'Union européenne surtout,
d'une inégalité de traitement, dans leur pays de résidence, par rapport aux
nationaux de ces pays en France.
Cette juste mise en exergue de la réciprocité, la plupart de nos partenaires
ayant déjà transposé la directive européenne dans leur droit national, nous
commande
ipso facto
de conformer notre droit interne aux législations
déjà en oeuvre chez nos partenaires.
Ainsi, il paraît difficile d'interdire le double vote aux ressortissants
communautaires alors que celui-ci est octroyé aux Français résidant à
l'étranger ; en revanche, il est tout à fait judicieux de proscrire la double
éligibilité, qui serait incompatible avec le bon exercice d'un mandat municipal
tel que nous le concevons en France.
S'agissant de la notion de résidence en France ouvrant droit à l'inscription
sur les listes complémentaires de vote, la commission a adopté, là encore, une
position raisonnable ; il faut en effet savoir que certains de nos partenaires
- c'est le cas de la Grande-bretagne, notamment - adressent automatiquement une
carte d'électeur valable pour les scrutins municipaux à tout jeune Européen
majeur qui s'inscrit dans une université nationale. Les dispositions de
l'article L. 11 de notre code électoral, qui définit expressément la résidence
en France, devraient du reste suffire à nous prémunir contre les abus et les
tentatives de fraude à ce sujet.
Sur ce point précis, certains de mes collègues du groupe des non-inscrits qui
représentent les communes ont exprimé un avis différent ; ils souhaitent que
soit exigé des citoyens européens un temps de résidence significatif en France
avant qu'ils puissent voter aux élections municipales.
Pour ma part, avec mes deux autres collègues représentant les Français établis
hors de France, j'ai déposé un amendement tendant à coordonner la notion de
déchéance du droit de vote et à prendre en compte la situation de certains
Européens, comme les Allemands, les Britanniques ou les Néerlandais, qui
perdent le droit de vote aux élections municipales de leur pays d'origine
lorsqu'ils résident dans un autre pays ; cette situation n'étant pas
assimilable à une déchéance des droits civiques, il convient de clarifier la
rédaction de l'article L.O. 227-4 du projet de loi organique.
Monsieur le ministre, vous l'avez compris, nous voterons le texte tel que
modifié par la commission des lois, car il va dans le sens d'une meilleure et
d'une plus grande participation de chacun d'entre nous à la construction
européenne et, à terme, d'une amélioration de son efficacité sans pour autant
dissoudre les identités nationales.
Paul Valéry, qui a si bien pressenti les lignes de force de l'Europe et du
monde, a écrit en 1930, dans ses
Cahiers
: « Le système des rapports
humains change d'échelle... nous débattons beaucoup de l'identité et de la
souveraineté de la nation française... mais les nations périssent pour n'avoir
su changer leurs habitudes et réformer leurs moeurs ». Sachons nous référer à
nos grands penseurs pour renforcer notre détermination à poursuivre ce grand
dessein européen, avec et pour tous les citoyens de l'Union !
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et
des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Habert.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. About.
M. Nicolas About.
Permettez-moi d'abord, monsieur le ministre, de vous féliciter de votre hâte
et de votre ardeur à rattraper un retard dans la mise en oeuvre du traité de
Maastricht. Je sais l'intérêt que vous portez à ce traité !
Le projet de loi organique qui nous est soumis est un texte essentiel pour
l'édification d'une Europe des citoyens, après la construction de l'Europe des
marchands. Notre pays semble d'ailleurs avoir pris du retard dans ce domaine
puisque ce droit de vote et d'éligibilité pour les ressortissants européens
vivant en France est inscrit dans le traité de l'Union, adopté en 1992.
Cette lacune comblée, il s'agit pour moi de souligner l'aspect symbolique de
ce texte, qui, en réalité, modifiera peu l'électorat municipal.
Dans l'esprit des pères fondateurs, la Communauté européenne avait pour
objectif final l'unification de peuples si différents sur les plans culturel et
linguistique et qui se sont entretués pendant plusieurs siècles. La dimension
politique de la Communauté était donc présente dès sa naissance ; elle en
constituait l'essence même. L'Union économique qu'elle propose au début n'en
sera que le moteur. Cette Europe politique tarde toujours à se formaliser sur
le plan institutionnel ; le dernier sommet d'Amsterdam a d'ailleurs prouvé
combien les résistances nationales sont nombreuses.
M. Paul Loridant.
Heureusement !
M. Nicolas About.
Les années quatre-vingt-dix marquent pourtant un tournant crucial pour
l'Europe des citoyens, avec les accords de Schengen et la libre circulation des
individus, qui subit malheureusement les aléas de l'actualité : trafics de
drogue et terrorisme, notamment.
Les accords de Schengen, dont nous reparlerons d'ici à quelques jours à propos
de la Grèce et de l'Autriche, n'en constituent pas moins une réelle avancée
dans l'édification d'un espace communautaire où la liberté et la sécurité des
individus seraient garanties.
A cela, il faut évidemment ajouter le bon fonctionnement de l'Europe des
jeunes, qu'ils soient étudiants ou apprentis ; ils sont déjà plusieurs
centaines de milliers à faire une partie de leurs études dans un pays de
l'Union grâce aux nombreux programmes communautaires. La prise de conscience
par les jeunes d'appartenir à une communauté unie par le destin est
fondamentale pour l'avenir de l'Union. Elle est la mieux à même de nous
préserver de drames tels que ceux qu'a connus l'ex-Yougoslavie.
D'autres décisions, plus symboliques certes, participent également à cette
Europe des citoyens, telles la mise en place d'un passeport commun, les zones
réservées aux ressortissants de l'Union dans les aéroports ou encore la
possibilité pour tout Européen de se rendre, à l'étranger, dans une des
ambassades des Quinze, en cas de nécessité.
Enfin, je me dois d'évoquer en quelques mots le projet de la monnaie unique,
attendue pour le 1er janvier 2002, dont les aspects culturels et politiques
sont souvent négligés par les médias et les gouvernements européens. Plus qu'un
simple instrument d'échanges économiques, l'euro donnera également aux citoyens
européens un objet dans la vie quotidienne qui leur permettra de s'identifier
progressivement à cette communauté à laquelle ils appartiennent. L'identité
européenne ne sera alors plus un vain mot. Loin de nier notre identité
nationale, l'euro renforcera les liens qui se tissent chaque année entre
Européens. L'identité nationale ne se résume pas à la monnaie ; l'euro ne
remplacera pas notre langue, notre histoire, notre culture, nos vins, notre
cinéma, notre patrimoine... L'exemple récent de l'Ecosse montre bien que
l'affirmation d'une identité n'est pas affaire de monnaie !
Le droit de vote des ressortissants européens vivant en France aux élections
municipales et leur éligibilité au mandat municipal vont donc dans ce sens et
constituent une pierre supplémentaire à l'édifice européen. Le projet de loi
est assez clair sur les limites de l'expression de ces droits, notamment en ce
qui concerne la fonction de maire et d'adjoint et les élections sénatoriales.
En revanche, je suis favorable à l'amendement de mes collègues de la commission
des lois relatif à l'interdiction de ces droits à tout Européen qui n'aurait
qu'une résidence secondaire en France.
Certains protesteront contre ce texte en évoquant le risque d'extension de ce
droit de vote aux autres ressortissants étrangers présents en France. Une telle
extension est exclue puisqu'elle implique une révision de la Constitution et
qu'elle n'aurait aucun lien avec le projet européen.
Cette critique évacuée, il m'apparaît évident qu'un tel sujet recueillera le
consensus politique qu'il implique ; il y va de l'avenir de l'Europe et de
l'image de la France qui se doit de respecter ses engagements européens.
Monsieur le ministre, le groupe des Républicains et Indépendants votera dans
sa majorité le projet de loi organique que vous nous soumettez.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le traité de
Maastricht a explicitement reconnu aux citoyens des Etats de l'Union un rôle
d'acteur direct de la construction européenne.
En évoquant les droits des citoyens de l'Union - dont le droit de vote et
d'éligibilité aux élections locales - le traité affiche désormais une
conception politique de la citoyenneté européenne. Il s'agit d'une innovation
sans précédent historique : jusqu'à présent, en effet, les droits de vote et
d'éligibilité étaient inconcevables hors du cadre des Etats ; les citoyens
étaient exclusivement citoyens de ces Etats et l'Union s'adressait à eux à
travers les Etats.
Le projet de loi organique qui nous est présenté, vous le rappeliez, monsieur
le ministre, nous met en règle avec nos obligations, puisqu'il nous fait
transposer en droit national une directive européenne. Cette transposition
s'inscrit dans le cadre de l'article 88-3 de notre Constitution, lequel fixe
l'objet même de la révision provoquée par l'application du traité de
Maastricht. Maastricht, ce n'était vraiment pas uniquement des critères !
Au-delà de cette mise en conformité de notre droit, ce projet de loi organique
a donc bien une signification très forte. Presque vingt ans après la première
élection au suffrage universel direct des parlementaires européens, ce texte
consacre une nouvelle et nette avancée vers l'Europe politique.
Pour que celle-ci soit comprise et solide, il faut, cependant, éviter de faire
deux pas en arrière lorsque nous choisissons d'en faire un en avant. Toute
avancée comporte des risques. A nous de les identifier pour les éviter. Cette
nouvelle citoyenneté européenne, que vous évoquiez à l'instant, monsieur le
rapporteur, doit être comprise comme créant un lien politique de nature tout à
fait nouvelle. Elle n'est pas le simple décalque, à l'échelle européenne, de
nos modèles nationaux. Elle ne doit pas non plus être présentée comme
concurrente des citoyennetés nationales qu'elle viendrait affaiblir. Elle ne
les supprime pas, au contraire, elle les enrichit. Bien plus, comme attribut
essentiel de la citoyenneté, le droit de vote permet à chacun de s'approprier
le dessein de tous, en y participant. Il fait émerger une culture politique
commune, spécifiquement européenne, qui transcende les origines régionales ou
nationales, historiques, linguistiques ou ethniques.
Pour ne pas être dévoyée, cette nouvelle citoyenneté doit donc se fonder sur
une distinction claire entre l'affirmation des identités nationales et
l'émergence - complémentaire - d'une véritable conscience européenne.
Quelques exemples simples démontrent - je suppose qu'il n'est pas nécessaire
d'insister sur ce point - qu'il n'existe pas de contradiction entre le maintien
de citoyennetés nationales construites au cours des siècles et l'avènement
d'une nouvelle citoyenneté européenne, aujourd'hui entre nos mains : l'Irlande,
le Danemark et les Pays-Bas ont ainsi accordé depuis longtemps le droit de vote
aux élections locales à tous les ressortissants de l'Union, et le Royaume-Uni
reconnaît depuis 1949 le droit de vote et d'éligibilité aux nationaux de la
République d'Irlande. Bien plus, la Grande-Bretagne avait donné ce droit aux
ressortissants des pays membres du Commonwealth, sans craindre de voir entamer
sa souveraineté. Aujourd'hui, encore, un parlement aux pouvoirs propres
importants est institué en Ecosse, sans que l'engagement européen de Londres
soit affaibli. Il en faudrait plus ! Voilà au moins une question européenne sur
laquelle nos amis britanniques sont en avance et ont peut-être des leçons à
nous donner !
Bien sûr, nos traditions centralisatrices peuvent être un peu bousculées par
une telle approche, et nos partenaires, citoyens d'Etats fédéraux, abordent
plus spontanément que nous un tel débat. Mais si notre lecture habituelle de
Descartes semble nous vouer au jacobinisme, une analyse plus attentive de son
oeuvre devrait aussi nous inciter à progresser, enfin, vers la subsidiarité.
C'est bien aussi, en rappelant la subsidiarité, comme c'est le cas pour nombre
de questions européennes, que nous trouverons une clé pour ouvrir des voies
nouvelles et réduire nos blocages. Pour bien employer cette clé, une grande
clairvoyance et une réelle volonté politique seront nécessaires. Il faudra sans
doute aussi trouver un mot différent pour désigner ce que nous appelons «
subsidiarité ». Pour le moment, en effet, ce vocable fait tellement peur qu'il
est utilisé comme repoussoir, voire comme prétexte pour ne rien faire.
Mais revenons au terrain, ce terrain que tous les citoyens des Etats de
l'Union font vivre et que les sénateurs connaissent particulièrement bien : que
peut-on craindre de l'arrivée d'Européens non nationaux dans nos conseils
municipaux ? Nous savons que ceux-ci représentent au contraire le plus souvent
une vraie richesse par le regard neuf, le recul et l'ouverture qu'ils
apportent. Aujourd'hui, dans nos villes, pouvons-nous encore, sans la moindre
gêne, « consommer » les idées et le travail de nos concitoyens européens et,
dans le même temps, leur fermer la porte de nos conseils ?
Je me souviens de la perplexité des membres d'une association de parents
d'élèves à laquelle j'appartenais découvrant avec stupeur que celle qui était
disposée à assumer leur présidence, et qui avait toutes les capacités pour le
faire, ne pouvait exercer cette responsabilité, car elle était belge. Ils ne
savaient même pas qu'elle était belge car elle parlait le même français que
nous, et il leur semblait inconcevable que ce motif lui interdise de jouer un
rôle auquel tout la préparait : ses enfants vivaient bien avec les nôtres, dans
la même école et avec les mêmes enseignants, rencontraient les mêmes
difficultés et partageaient les mêmes aspirations !
Mes chers collègues, nous ne pouvons vouloir faire l'Europe dans nos villes et
dans nos villages sans les Européens. Une Europe réservée à l'usage exclusif
des Français n'irait pas loin et sa construction serait totalement vaine.
Pour reprendre une formule classique, nous voulons une France forte dans une
Europe forte. Et la France sera forte si les Français acceptent de travailler,
dans la vie quotidienne aussi, avec les autres Européens.
L'Europe se construit évidemment à Bruxelles, à Strasbourg, à Luxembourg, dans
nos quinze capitales, et maintenant dans les capitales des pays candidats à
l'adhésion. Désormais, l'Europe politique doit se bâtir avant tout sur le
terrain... avec les Européens.
Nous allons réussir l'Europe de l'euro. Et nous refuserions l'Europe des
Européens !
Un « citoyen européen » ne cesse d'être citoyen ni d'être européen lorsqu'il
pratique la « libre circulation », principe de base de l'Union. La cohérence
d'une construction politique de l'Europe doit être sans faille.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est pour toutes ces raisons et en
suivant les sages recommandations de notre excellent rapporteur que le groupe
de l'Union centriste votera ce projet de loi.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des
Républicains et Indépendants, du RPR, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous
abordons cet après-midi la dernière phase d'un long processus législatif visant
à permettre aux étrangers communautaires, dès lors qu'ils résident en France, à
voter et à être éligibles aux élections municipales.
Je ne reviendrai pas sur le débat très riche qui a entouré ce droit de vote et
d'éligibilité et qui a abouti à la révision constitutionnelle de 1992.
Le débat d'aujourd'hui consiste seulement à examiner les dispositions
législatives contenues dans la directive du 19 décembre 1994, compte tenu de
l'article 88-3 de la Constitution.
Vous me permettrez cependant de formuler un certain nombre de remarques.
Ma première remarque concerne tout d'abord la question de la réciprocité. Nous
devons, en effet, garder présent à l'esprit que le droit de vote et
d'éligibilité ne saurait être accordé aux ressortissants des pays qui
n'accordent pas aux Français des droits équivalents. Je sais que cela ne
concerne que la Belgique et la Grèce et que cette condition figure dans la
Constitution. Mais il me semble important de le rappeler dans la loi organique
pour assurer le respect de cette clause et faciliter l'application du présent
texte. Je me réjouis donc, monsieur le rapporteur, que la commission des lois
ait déposé un amendement dans ce sens.
Par ailleurs, et ce sera l'objet de ma deuxième remarque, dans son excellent
rapport sur la proposition de résolution présenté par M. Larché en 1994, notre
collègue M. Masson a mis en évidence la nécessité d'une durée de résidence en
France pour que les ressortissants communautaires puissent voter et se
présenter aux élections municipales.
M. Masson précisait d'ailleurs, dans le rapport précité, que, sur le plan des
principes, une condition de résidence était tout à fait justifiée. En effet,
l'élection municipale est non seulement l'acte de désignation d'administrateurs
locaux, mais également un acte de participation à la vie civique au sein de la
collectivité nationale.
La législation française n'impose, certes, aucune condition de résidence aux
citoyens français pour participer aux élections municipales. Mais ce régime est
fondé sur l'idée que la nationalité française est, à elle seule, le signe
incontestable de l'intégration dans la nation.
Tel n'est pas le cas des étrangers communautaires qui, dépourvus de cette
nationalité française, doivent donc justifier d'une intégration suffisante pour
pouvoir voter en France, cette intégration suffisante ne pouvant,
naturellement, s'opérer que dans la durée.
Cette analyse est tout à fait conforme aux indications réitérées du
gouvernement de l'époque, lors du débat sur la révision constitutionnelle
préalable à la ratification du traité de Maastricht.
C'est ainsi qu'à propos du droit de vote des ressortissants communautaires, le
Premier ministre de l'époque déclarait devant le Sénat, le 2 juin 1992 : « Je
rappelle également que ce droit est explicitement réservé aux citoyens
communautaires, résidents principaux sur notre sol depuis une durée
appréciable. »
De la même façon, M. Michel Vauzelle, alors garde des sceaux, faisait observer
que le traité de Maastricht « tend seulement à ce que les ressortissants d'un
Etat, qui vivent de façon stable dans un autre Etat membre, qui y ont des
intérêts professionnels et des attaches familiales, qui y sont intégrés,
puissent manifester leur intérêt pour la vie locale de leur commune de
résidence ».
Je regrette donc que le texte qui nous est soumis ne contienne pas cette
restriction. C'est la raison pour laquelle je voterai l'amendement de la
commission des lois qui précise que le ressortissant communautaire ne sera
considéré comme résidant en France que s'il y a son domicile réel ou si sa
résidence y présente un caractère continu.
Ce texte, même s'il ne va pas aussi loin que nous l'aurions souhaité,
interdira le vote des ressortissants qui n'auraient en France qu'une simple
résidence secondaire.
Par ailleurs, le texte qui nous est soumis n'empêche pas l'élection d'une
majorité d'étrangers communautaires au sein des conseils municipaux. Il prévoit
simplement que, si, au sein d'un conseil municipal, le nombre de conseillers
municipaux est insuffisant pour permettre l'élection du maire et d'un adjoint,
le conseil est dissous de plein droit.
Il eût été préférable que des dispositions plus précises figurent dans la loi
afin de garantir à toutes les communes de France le nombre de conseillers
municipaux français nécessaire pour pourvoir les postes qui leur sont réservés
par la Constitution.
En l'état actuel, l'article L. 122-2 du code des communes dispose que ces
postes, dont le nombre est déterminé librement par le conseil municipal,
représentent au maximum 30 % de son effectif légal. En pratique, la solution
aurait pu être celle que préconisait en son temps M. Masson. Elle aurait pour
effet d'interdire que le nombre des Français siégeant au conseil municipal soit
inférieur à 30 %.
Par ailleurs, en ce qui concerne l'application des dispositions de ce projet
de loi organique dans les territoires d'outre-mer, il me semble nécessaire de
rappeler que ces territoires ont une organisation particulière qui tient compte
de leurs intérêts propres dans l'ensemble des intérêts de la République, et,
comme le traité de Rome le stipule clairement, qu'ils ont un statut tout à fait
spécifique dans l'espace communautaire : ils sont simplement « territoires
associés ».
En conséquence, une formule laissant à ces territoires la possibilité
d'appliquer ou non le dispositif contenu dans ce texte aurait été
préférable.
Autre sujet de préoccupation : celui de la possibilité du double vote. En
effet, le texte, tel qu'il nous est présenté, permet, selon le moment ou
l'opportunité, à un citoyen communautaire de voter aux élections municipales à
son gré dans son pays d'origine ou en France, ce qui est choquant. Je regrette
que nous n'ayons pas trouvé de solution.
Enfin, je terminerai mon propos en évoquant le problème du Conseil de Paris.
Ce dernier est, depuis la Constituante de 1790, à la fois un conseil municipal
et un conseil général. En outre, depuis la réforme de 1982, les conseillers
d'arrondissement sont élus en même temps que les membres du Conseil de
Paris.
Les Parisiens élisent donc, en une seule fois, lors des élections municipales,
leurs édiles, qui cumulent la fonction de conseillers municipaux et celle de
conseillers généraux.
Loin de nous l'idée de soumettre la première ville de France, où résident de
nombreux étrangers communautaires, à un régime dérogatoire à la règle commune
de l'article 8 B, paragraphe 1, du traité de Maastricht, mais il nous semble
indispensable de veiller à la séparation nette des deux fonctions de conseiller
municipal et de conseiller général.
Je ne peux donc qu'approuver l'amendement présenté par notre commission des
lois à la suite des observations de nos collègues Maurice Ulrich et Lucien
Lanier, et visant à exclure les ressortissants communautaires élus membres du
Conseil de Paris lorsque celui-ci se réunit en conseil général.
Sous réserve de l'adoption de ces amendements, le groupe du Rassemblement pour
la République votera ce projet de loi organique.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Il souhaitait que l'Europe unisse les hommes bien plus qu'elle ne coalise les
Etats ; ce que Jean Monnet voulait monsieur le président, monsieur le ministre,
mes chers collègues, le traité de Maastricht l'a fait.
En accordant le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales et
européennes à tous les citoyens de l'Union européenne dans le pays où ils
résident, ce traité historique a donné l'indispensable dimension politique et
humaine à cette union des Etats, développant ainsi le sentiment d'appartenance
et d'intégration à cette communauté de destin, et ce grâce à cette conception
élargie de la citoyenneté.
Pour nouvelle qu'elle soit, cette idée d'Europe des citoyens était en germe
depuis 1985 puisque le préambule de l'Acte unique mentionnait que les douze
pays étaient décidés à promouvoir la démocratie.
J'ai plaisir à rappeler ce que notre excellent collègue le président Jacques
Genton écrivait dans son rapport n° 125 de décembre 1988, au nom de la
délégation parlementaire pour les Communautés européennes : « Au-delà de
l'habillage juridique, le vrai motif d'une participation des ressortissants des
Etats membres aux élections municipales de l'Etat membre de leur résidence est
la promotion de l'idée d'Europe de citoyens. On peut penser que le
parachèvement de la construction européenne est suspendu à l'apparition d'un
sentiment authentique, qui fait encore défaut, d'appartenance à une communauté
humaine aux contours de l'Europe des douze, c'est-à-dire d'un sentiment de
communauté de destin dont surgirait un jour une nation européenne. Dans cette
optique, l'octroi du droit de vote aux résidents originaires des autres Etats
membres lors des élections municipales apparaît comme l'élément limité mais
utile d'une entreprise de grande envergure. De ce point de vue, le projet ne
peut qu'être approuvé, mais encore faut-il prendre en compte certaines données
internes qui vont conditionner son aboutissement. »
En transposant dans notre droit interne la directive européenne du 19 décembre
1994, nous confirmons le choix politique contenu dans le traité de Maastricht,
adopté et ratifié par référendum en 1992. Irréversible, ce traité engage la
France, il nous engage, même s'il a été adopté à une courte majorité.
Regrettons le retard pris par la France pour la transposition de la directive
européenne. L'argument selon lequel les prochaines élections municipales
n'auront lieu qu'en 2001 ne saurait suffire. Fallait-il être menacé d'un
recours en manquement pour vite inscrire ce projet de loi à l'ordre du jour ?
Ce reproche ne s'adresse pas au Gouvernement actuel. Que notre enthousiasme
européen soit à la hauteur de l'ambition qu'a la France d'être l'une des
locomotives de cette Union européenne !
Nous sommes nombreux, dans cette enceinte parlementaire, à nous souvenir des
débats de 1992. Certes, il était utile de rappeler notre histoire, notre
culture politique, nos particularismes, nos spécificités juridiques ; mais il
fut vain de surenchérir inutilement. Rien n'était insurmontable pour qui
voulait réellement être acteur de cette construction de l'Europe. Tel un cours
d'eau, le cours de l'histoire peut être maîtrisé, peut être canalisé ; en aucun
cas, il ne peut être arrêté. Si des blocages persistent, ils se briseront les
uns après les autres contre le mur de la réalité.
Constatons avec satisfaction que le temps a fait son oeuvre, et bien plus vite
qu'on aurait pu l'imaginer. J'avais été frappé, au cours de ces débats âpres et
difficiles de 1992 et 1994, que des collègues semblaient découvrir, pour la
première fois, cette notion de citoyenneté européenne, alors que le traité de
Rome, signé en 1956, prévoyait la libre circulation des personnes, une
meilleure intégration, qu'il n'était pas de meilleure intégration que la
participation à la désignation des organes municipaux. Pour que l'Europe
existe, il faut que les Européens se sentent partout chez eux.
Ce projet de loi organique concrétise le passage de la formulation d'un
concept à la mise en place d'une Europe des citoyens, véritable entité
politique et humaine. Pour ce faire, il fut nécessaire de modifier notre loi
fondamentale pour adapter le plein exercice de souveraineté à cette nouvelle
donne politique européenne. Un nouvel article 88-3 a été introduit pour
autoriser la ratification du traité.
La rédaction de cet article nouveau porte la marque - mais je pourrais dire
aussi la méfiance et les craintes - du Sénat. La formulation de ce nouvel
article est révélatrice, au point qu'une grande partie de la majorité
sénatoriale, pourtant acquise à l'idée européenne, subordonnait l'évolution
historique de l'Europe à l'acceptation par le Gouvernement de M. Pierre
Bérégovoy de quelques précisions.
Craignant une subreptice introduction du droit de vote à tous les étrangers
aux élections locales, le terme « seuls » fut l'objet « d'une guerre de
tranchées » et finit par être ajouté pour marquer, s'il en était encore besoin,
que bien des personnes vivant sur notre sol étaient doublement étrangères,
d'abord à la France, puis à l'Europe en construction. Sur ce point, ma
conviction n'a pas changé, mes chers collègues. Je sais que la maturation des
esprits est lente. Mais l'inconcevable d'aujourd'hui sera le projet de demain
et la réalité d'après-demain.
La mention : « Ces citoyens ne peuvent exercer les fonctions de maire, ou
d'adjoint, ni participer à la désignation des sénateurs et des délégués
sénatoriaux » ne semblait pas suffire. Le Sénat a tenu à préciser « qu'une loi
organique votée dans les mêmes termes par les deux assemblées détermine les
conditions d'application du présent article ». C'était là la crainte qu'une
majorité absolue de l'Assemblée nationale n'impose ses conditions à la Haute
Assemblée et, d'une manière non moins déguisée, que le Sénat ne profite du
traité de Maastricht pour rééquilibrer quelque peu à son profit les
institutions.
Et que de déclarations solennelles, péremptoires, sur l'exercice de la
souveraineté, mise à mal, paraît-il, par l'élection de quelques centaines de
conseillers municipaux européens, non français ! La relecture de ces
déclarations, et surtout l'attitude, le comportement politique, les actes de
leurs auteurs, ne donnent pas l'impression que cela s'est passé il y a à peine
cinq années. A les entendre, la France allait se défaire !
Nous sommes tous attachés au plein exercice de cette autorité suprême qu'est
la souveraineté. Mais rien ne serait plus faux que de ne pas prendre en compte
le concept évolutif de souveraineté car, dans ce domaine aussi, rien n'est figé
pour l'éternité. C'est la loi de la vie des peuples, des nations, c'est la
respiration de l'Etat qui est une réalité vivante, qui doit se transformer,
évoluer, s'adapter avec le nécessaire consentement du peuple souverain.
L'union de l'Europe exige des apports, mais aussi des dévolutions. La France
est toujours souveraine pour décider de ce qu'elle peut faire seule, tout comme
elle est souveraine pour décider qu'elle accepte de déléguer tout ou partie de
sa souveraineté. La souveraineté européenne ne résulte que de l'addition des
parcelles de souveraineté consenties par chacun des pays membres.
Le Premier ministre, Lionel Jospin, ne disait-il pas dans sa déclaration de
politique générale : « Pour moi, l'Europe doit être un espace supplémentaire de
démocratie, doit ouvrir des perspectives nouvelles de citoyenneté. Elle ne
saurait se substituer à la nation, mais la prolonger et l'amplifier. »
M. Emmanuel Hamel.
Alors, il faut se libérer de Maastricht !
M. Guy Allouche.
Monsieur Hamel, je crains que vous n'ayez pas raison et je crains que vous ne
soyez un jour...
M. le président.
Monsieur Allouche, ne vous laissez pas distraire par des interruptions, si
intéressantes soient-elles.
M. Guy Allouche.
Je réponds courtoisement à M. Hamel.
Cette citoyenneté européenne nouvelle, loin de nous affaiblir, va bien au
contraire nous renforcer. C'est si vrai que de nombreux pays d'Europe frappent
à la porte de l'Union européenne, certes pour leur futur développement
économique et social, mais surtout pour être définitivement arrimés à la
démocratie, comme nous l'avons voulu pour l'Espagne, le Portugal et la
Grèce.
Qui n'a pas encore compris qu'une grande partie des problèmes que connaissent
les pays trouvent leurs solutions sinon à l'échelle planétaire, à tout le moins
à l'échelle d'un continent comme l'Europe ? La paix, la sécurité, la recherche
en tous domaines, le développement économique, social, culturel, la
communication et les communications, l'environnement, l'emploi, la protection
sociale, la monnaie ne se traitent plus uniquement à l'échelle réduite d'un
pays. Nous avons tous observé que les remarques et réserves faites au sujet de
la souveraineté, qui serait menacée, n'ont pas résisté longtemps à l'usure du
temps et des faits.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre de cette discussion
générale, je n'ai pas voulu aborder le détail du dispositif de ce projet de loi
organique, qui est un texte de transposition d'une directive européenne et, à
ce titre, de nature essentiellement technique, dirais-je. Les réserves
soulevées par le Parlement avant son adoption définitive ont été partiellement
levées, soit que le Gouvernement n'ait pas réussi à subordonner l'accord de la
France au respect de celles-ci, soit qu'elles aient été prises en considération
dans la directive elle-même, soit, enfin, qu'elles figurent dans le projet de
loi organique qui s'est inspiré, à cet égard, de la loi de 1994 relative à la
participation des ressortissants européens aux élections européennes.
Néanmoins quelques interrogations demeurent. Ainsi, monsieur le ministre,
votre projet écarte explicitement la possibilité du double vote ; aurez-vous
les moyens d'en assurer la vérification ?
Bien que Paris soit l'une des « collectivités territoriales de base » visées à
l'article 2 de la directive, la situation de Paris mérite d'être précisée,
selon que le Conseil de Paris siège en formation de conseil municipal ou en
formation de conseil général.
J'aurai l'occasion tout à l'heure, lors de la discussion des articles, de
défendre un amendement portant sur ce point et j'espère que la Haute Assemblée
voudra bien accorder ses suffrages à cette modification qui tient compte de la
spécificité de Paris.
A ce stade de la discussion, je voudrais remercier notre éminent rapporteur,
qui a fait état de la fructueuse discussion que nous avons eue ce matin en
commission sur cette question et qui a pris en considération des amendemens que
le groupe socialiste a déposés sur ce sujet.
Je tiens à le féliciter de la qualité du rapport qu'il nous a présenté sur ce
projet de loi organique et je pense qu'il est superflu de dire combien notre
collègue M. Fauchon a foi en l'Europe tant cette foi est tangible tout au long
de ce rapport.
En ce qui concerne le collège électoral sénatorial, le projet de loi organique
fait silence sur le non-remplacement des conseillers municipaux européens non
français.
Cette question intéresse particulièrement les communes de plus de 9 000
habitants, qui, aux termes de l'article L. 285 du code électoral, voient tous
leurs conseillers municipaux délégués de droit. Il paraît nécessaire
d'organiser les modalités de leur remplacement pour que la représentation de
ces communes ne soit pas diminuée au sein du collège électoral sénatorial. Afin
de résoudre ce problème, le groupe socialiste proposera, par amendement, de
faire application des règles de droit interne régissant la désignation des
grands électeurs supplémentaires, qui ne concerne actuellement que les communes
de plus de 30 000 habitants.
Autre question : en cas d'élections municipales partielles d'ici à 2001, les
citoyens de l'Union européenne résidant en France et inscrits sur la liste
électorale complémentaire pourront-ils voter et se faire élire ou faudra-t-il
attendre le renouvellement général de 2001 ?
Enfin, dernière interrogation : d'ici au 1er mars 1999, par quels moyens les
citoyens européens non français résidant principalement en France seront-ils
informés de leur possibilité de s'inscrire sur la liste électorale
complémentaire qui sera ainsi ouverte.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, ma conclusion sera brève. Le groupe
socialiste est favorable à l'adoption de ce projet de loi organique tel qu'il a
été déposé, tout comme il a été favorable à la ratification du traité de
Maastricht duquel ce projet découle. Nous sommes sensibles au fait que le
premier texte inscrit à l'ordre du jour des travaux du Sénat pour cette session
extraordinaire constitue un plus pour la démocratie en Europe. Nos convictions
européennes sont connues et reconnues. Depuis longtemps, nous appelions de nos
voeux la mise en place de cette citoyenneté européenne, élément fondamental
d'intégration et d'appartenance à cette communauté de destin. Et comment ne pas
rappeler en cet instant ce que le Président François Mitterrand disait : « Si
la France est notre patrie, l'Europe est notre avenir. » ?
Alors oui, ayons foi en cet avenir !
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du RDSE et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi organique dont nous débattons aujourd'hui doit permettre à une partie des
étrangers, citoyens des différents pays membres de l'Union européenne, de
participer aux élections municipales.
Nous n'avons pas une vision étriquée de la nation.
Notre conception est généreuse et ouverte, imprégnée d'un esprit de
coopération et inséparable d'une attitude de solidarité internationale.
Comme nous ne voyons dans cette proposition, liée à des élections locales,
aucune atteinte à la souveraineté du pays, notre vote sera positif.
M. Jean-Jacques Hyest.
Ah !
M. Michel Duffour.
Ne vous méprenez pas, toutefois, sur son sens.
Une divergence profonde nous sépare des rédacteurs du traité de Maastricht.
Nous n'oublions pas les arguments de certains de ses laudateurs et leur
complaisance pour des abandons de souveraineté nationale.
Si ce point de vue habite toujours certains de nos collègues qui verraient
dans ce vote une étape vers plus de fédéralisme, je leur précise que nous
trouvons, aujourd'hui comme hier, cette orientation dangereuse pour la
démocratie et archaïque au regard des aspirations citoyennes.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. Michel Duffour.
L'élargissement du vote aux élections locales est à nos yeux un rapprochement
des citoyens des centres de décisions.
Soyons clairs : nous ne dissocions pas la citoyenneté de la nationalité, mais
nous sommes bien décidés à travailler à l'émergence d'une citoyenneté
européenne complémentaire.
Certes, il faudra pour cela tout autre chose que les chemins jusqu'alors
empruntés.
Le texte en débat est d'ailleurs symptomatique de la minceur des ambitions
affichées.
Je ne vous fais pas grief, monsieur le ministre, de présenter un projet de loi
qui porte transposition de la directive communautaire du 29 décembre 1994. Je
constate seulement que nous examinons un texte qu'on ne saurait présenter comme
une très grande avancée de citoyenneté.
Des pans entiers et nouveaux sont à imaginer dans le respect de l'identité de
chaque nation. Toute la construction européenne imposée au cours de la dernière
décennie a fait fi des individus, de leurs besoins et de leurs aspirations. Ni
l'homme ni la démocratie ne sont au coeur de sa démarche. C'est l'organisation
du marché et lui seul qui constitue sa raison d'être.
Alors que les peuples d'Europe ont besoin de grandes complicités culturelles,
de complémentarités économiques dans la lutte contre le chômage, de réformes
sociales d'ampleur, de résistances à l'uniformisation et à la « marchandisation
» de la vie publique, de combats solidaires avec les peuples du Sud, nos
nations sont malades d'une conception restrictive de la citoyenneté.
Pourtant, que ce soit sur les lieux de travail, dans les quartiers, ou pour
des choix politiques plus fondamentaux, le développement de l'intervention
citoyenne et la participation de tous les acteurs devraient être largement
favorisés.
L'heure est à la promotion des valeurs auxquelles les démocrates de nos
nations tiennent, à la transparence dans les décisions, à l'élargissement des
pouvoirs et des possibilités pour les salariés d'intervenir dans la gestion et
les choix des grands groupes économiques. La fermeture de l'usine Renault à
Vilvorde a rappelé les immenses carences en ce domaine.
L'accès au vote aux élections locales n'est qu'un pas dans le grand chantier à
ouvrir. N'étant pas des partisans du tout ou rien, nous le voterons.
Mais ce pas en appelle d'autres. De plus grands brassages de citoyenneté, dans
le respect de chaque identité, s'imposent.
Comment justifier la discrimination de fait qui se fera entre étrangers
ressortissants de l'Union européenne et citoyens du reste du monde ?
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Michel Duffour.
Comment encourager les citoyens portugais de nos cités à se prononcer sur la
gestion de leur commune alors qu'on s'entêterait à en refuser la possibilité à
leurs voisins tunisiens, algériens ou marocains ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très bien !
M. Michel Duffour.
Le vote d'aujourd'hui est l'amorce d'un mouvement plus large.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen estiment que le
droit de vote aux élections municipales doit être accordé à l'ensemble des
étrangers ayant leur résidence en France.
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Michel Duffour.
Chacun sait que nous sommes favorables à l'extension du droit de vote aux
élections municipales à tous les étrangers et nous interviendrons en ce sens,
comme nous l'avons fait par le passé, à l'occasion des futurs débats
parlementaires sur la politique d'immigration.
Votre choix, mes chers collègues, créera, probablement au corps défendant de
certains d'entre vous - j'ai bien entendu les propos de M. About et je ne m'en
étonne pas - un mouvement irréversible pour le vote de tous les citoyens
étrangers résidant en France à ce type d'élection.
Je pense que l'opinion publique française va mûrir très vite sur ce sujet et
nous nous en réjouissons.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.
- Mme Bergé-Lavigne applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si je devais
résumer en un mot mon intervention, je dirais : enfin ! Enfin, ce texte arrive
devant nous,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Heureusement qu'il y a eu la dissolution !
M. Guy Cabanel.
... ce texte qui va marquer une étape décisive dans l'ouverture de notre pays
à la citoyenneté européenne. Il s'agit en effet du droit de vote et
d'éligibilité des citoyens européens aux élections municipales, base de notre
démocratie locale.
On parle beaucoup de l'Europe des citoyens, mais, malheureusement, les
dispositions concrètes sont rares.
En effet, les dispositions communautaires qui président aux droits du citoyen
européen sont fort peu nombreuses. Un examen rapide du
Répertoire de la
législation européenne
suffit pour le démontrer : une seule page sur plus
d'un millier concerne ce sujet proprement dit. Le constat est frappant et
d'autant plus édifiant que plusieurs de ces textes n'ont pas encore été mis en
oeuvre.
Les principales dispositions relatives à la citoyenneté européenne ont été
précisées dans le traité de l'Union européenne en son article G. Elles
comportent principalement quatre volets : droit de circulation - élément déjà
fondamental du traité de Rome - droit de vote aux élections européennes - cela
est acquis - droit de vote aux élections municipales - cela sera acquis après
le vote du texte que nous discutons - droit de protection diplomatique
indifférenciée, et enfin - cela est un point plus formel - droit de pétition
devant le Parlement européen.
A la veille de la signature prochaine du traité d'Amsterdam, et compte tenu du
degré d'avancement des politique européennes ainsi que des engagements pris par
les chefs d'Etat et de gouvernement lors de la Conférence intergouvernementale,
il est maintenant indispensable que le Parlement français prenne les décisions
qui permettront aux citoyens européens de jouir, sur le sol français, des
droits démocratiques élémentaires.
Les termes de la directive européenne 94/80/CE du 19 décembre 1994 relative à
l'exercice du droit de vote et d'éligibilité des citoyens de l'Union dans un
Etat membre dont ils n'ont pas la nationalité ont recueilli l'accord unanime du
Conseil européen. Ce texte n'est par conséquent plus amendable.
Le Parlement français garde cependant un pouvoir d'interprétation, au moyen du
projet de loi organique de transposition de cette directive, afin de préserver
les principes fondamentaux et les pratiques culturelles de la démocratie en
France. Les rédacteurs des textes européens ont bien perçu la difficulté de
cette transposition et ont laissé aux Etats membres la latitude nécessaire pour
mettre en oeuvre le principe de cette directive dans le respect des traditions
juridiques nationales.
Le texte aujourd'hui en discussion aura une incidence toute particulière dans
les communes d'Ile-de-France, de Paris et des régions frontalières, qui
comptent entre 5 % et 10 % de ressortissants communautaires par rapport à un
total de 1,3 million de citoyens non français de l'Union européenne vivant sur
le territoire national.
Une disposition constitutionnelle est de nature à faciliter la transposition
de la directive européenne dans le droit français : en effet, sur avis du
Conseil constitutionnel, le Parlement français a, dès 1992, voté les articles
88-2 et spécialement 88-3 du titre XV de la Constitution. Ils guident le
législateur dans la discussion des termes de la loi organique prévue pour
l'application du traité de l'Union européenne.
La loi organique prévoit l'application d'une clause de réciprocité dont nous
verrons les incidences perverses qu'elle peut avoir du fait d'une ratification
tardive. Elle impose la résidence sur le sol français à l'électeur
communautaire. Elle lui interdit l'exercice de la fonction de maire ou
d'adjoint et elle l'écarte de la participation à la désignation des électeurs
sénatoriaux et, plus généralement, de tout le processus des élections
sénatoriales.
Quant à la clause de réciprocité prévue dans la loi organique, elle
conditionne la mise en oeuvre du droit de vote pour les citoyens communautaires
résidant en France à l'obtention de ce même droit pour les citoyens français
résidant dans un autre Etat de l'Union.
La Belgique et la Grèce sont en retard comme l'était jusqu'à présent la France
: elles n'ont pas transposé la directive et l'on peut se demander quelle serait
la situation si ces deux pays n'introduisaient pas dans leur droit national les
dispositions en cause d'ici aux élections municipales de 2001. J'espère que ce
cas ne se présentera pas.
La loi organique interdit le double vote des citoyens communautaires résidant
en France. La commission des lois a retenu un amendement de suppression de
cette disposition du texte initial. On peut le regretter. Cependant, le
caractère tardif de la loi organique française fait que le double vote a été
admis par les pays européens ayant transposé la directive dans leur droit
électoral national. Le principe de réciprocité conduit donc à reconnaître une
situation de fait qui avantage les autres Européens par rapport aux
Français.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Très juste !
M. Guy Cabanel.
Je crains que nous ne puissions rien contre de telles dispositions.
En vertu du même article 88-3 de notre Constitution, la commission des lois a
prévu de restreindre, pour les ressortissants communautaires, la notion de
résidence sur le sol national « au domicile réel ou au caractère continu de la
résidence ».
Cette précision me paraît sage. Elle devrait permettre de limiter, mais en
partie seulement, le nombre des « doubles votes ».
Au demeurant, l'amendement de la commission visant à établir l'incompatibilité
pour les ressortissants communautaires résidant en France d'exercer
simultanément deux mandats municipaux en France et dans leurs pays d'origine,
semble aller de soi.
Cette proposition, qui corrobore la notion de « résidence » appliquée aux
citoyens communautaires, aura pour effet de renforcer la crédibilité politique,
d'éviter l'absentéisme dans les réunions municipales et d'affirmer l'engagement
démocratique actif des conseillers municipaux communautaires.
Le présent texte aura-t-il une incidence sur le projet de loi relatif à «
l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes
électorales », qui figure à notre ordre du jour de la semaine prochaine ?
Monsieur le ministre, comment ce projet s'articulera-t-il avec la loi organique
? Par exemple, qu'en sera-t-il des ressortissants communautaires âgés de
dix-huit ans résidant en France ? Seront-ils inscrits d'office ou devront-ils
s'inscrire d'eux-mêmes sur des listes complémentaires ?
Cela a été rappelé tout à l'heure, la Grande-Bretagne, qui n'est pourtant pas
toujours un exemple de vertu européenne, procède en quelque sorte à une
attribution immédiate de carte électorale aux étudiants ressortissants des
Etats de l'Union européenne qui se trouvent sur son sol.
L'article 6 du projet de loi organique prévoit l'impossibilité pour les
membres du Conseil de Paris et les conseillers municipaux d'origine
communautaire de participer au processus électoral sénatorial. On a ainsi
pallié certaines difficultés.
Cependant, je remarque que cette indispensable mesure ne manquera pas de
modifier l'équilibre de la pratique actuelle des élections sénatoriales dans
les communes de neuf mille habitants et plus. Dans ces communes, en effet,
l'ensemble des conseillers municipaux sont membres de droit du collège
électoral des sénateurs.
Le retrait des conseillers municipaux communautaires non français minorera la
représentation de certaines communes où l'ensemble des membres du conseil
municipal figurent parmi les électeurs sénatoriaux.
Ce problème pourrait être résolu grâce à un ultime amendement de notre
commission des lois, dont je remercie l'excellent rapporteur. Je participerai à
la discussion de cet amendement avec d'autant plus d'intérêt que j'en avais,
hier, évoqué la possibilité avec M. Fauchon.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte de
transposition qui nous est enfin présenté engage le Parlement. Cette loi
organique va marquer un tournant dans l'histoire de notre code électoral. Elle
reconnaît aux citoyens de l'Union européenne l'égalité dans la participation à
la vie communale.
L'exercice du droit de vote et d'éligibilité accordé au citoyen est la
condition fondamentale de toute démocratie. Son élargissement communautaire,
pour la désignation des conseils municipaux, mérite notre accord et notre
vigilance.
L'exercice de ce droit découle d'une association librement consentie d'Etats
souverains, qui décident même des conditions d'application de la directive. Je
vois là la marque d'un esprit confédéral, dont je me réjouis s'agissant de
l'Union européenne.
C'est donc au regard du respect des traditions électorales spécifiques de la
France que, à l'unanimité ou à la quasi-unanimité de ses membres, le groupe du
RDSE votera le projet de loi organique. Pour les sénateurs du Rassemblement
démocratique et social européen, il n'est que temps d'appliquer les
dispositions qu'avait prévues le traité d'Union européenne.
(Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, j'aurai peu de choses à ajouter à mon intervention initiale, qui, je
crois, répondait par avance à nombre des questions qui ont été soulevées.
La citoyenneté est, au fond, le vrai sujet de nos débats, même si nous
l'abordons par un biais relativement étroit : le droit de vote aux élections
municipales.
Je rappelle que la citoyenneté a été définie à la fin du xviiie siècle, avec
la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, comme étant l'avènement
d'un nouveau souverain : la citoyenneté, c'est la souveraineté en acte du
peuple succédant au droit divin des souverains de l'ancien régime.
Ce peuple souverain se doit d'être instruit pour pouvoir lui-même décider de
tout ce qui le regarde, car, comme l'a dit Jaurès, c'est un acte de confiance
extraordinaire en la capacité d'une vaste collectivité humaine - et la France
était, à l'époque, le pays le plus puissant et le plus peuplé d'Europe - de se
gouverner par lui-même.
Il me semble que cette conception de la souveraineté, qui était évidemment
présente dans vos interventions, mérite d'être rappelée. Le citoyen est
instruit et éclairé notamment par l'école ; c'est le sens des projets de
Condorcet, de Lakanal et des lois de Jules Ferry. Il y aurait peut-être lieu,
d'ailleurs, d'y revenir, parce que les fonctions que remplissait alors l'école
sont aujourd'hui aussi assumées, à bien des égards, par la télévision, dans la
mesure où celle-ci contribue à façonner la manière dont nos concitoyens se font
un jugement.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Très juste !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Le but de l'école est de former des citoyens
conscients, responsables, dotés d'esprit critique, car la République, c'est
aussi la laïcité, l'idée d'un espace commun soustrait à l'empire des dogmes, au
sein duquel nous pouvons débattre de l'intérêt commun, de la chose publique, de
la
res publica ;
que nous appartenions à telle ou telle confession ou à
telle ou telle école de pensée, il y a quand même cette idée d'un espace où
s'exerce la raison naturelle, indépendamment des révélations propres à chaque
religion, des présupposés ou des dogmes philosophiques.
La citoyenneté, c'est l'exercice de la souveraineté populaire, et la
République, c'est d'abord le suffrage universel, mais ce n'est pas que cela. La
citoyenneté, comme l'a rappelé le Premier ministre dans sa déclaration de
politique générale, c'est un ensemble indissociable de droits et de devoirs.
Le problème est de savoir jusqu'où l'on pourrait découper la souveraineté en
tranches ; voilà une vraie question. Comment articuler, d'une part, la
citoyenneté nationale, la souveraineté populaire en acte, et, d'autre part, la
citoyenneté européenne ? Nombre d'entre vous ont abordé cette question.
Le champ d'exercice de la citoyenneté est une vieille affaire. La Révolution
française avait admis comme citoyens Anacharsis Cloots, Thomas Paine et
quelques autres, mais ils n'étaient, si j'ose dire, que l'exception qui
confirme la règle.
D'ailleurs, quand la République a voulu s'étendre à la rive gauche du Rhin et
quelquefois plus loin encore, jusqu'aux bouches de l'Elbe ou du Tibre, sans
parler de l'expérience des républiques soeurs, tout cela nous est revenu à la
figure. On a fini par se rallier à l'idée selon laquelle les hommes se
reconnaissant politiquement dans une appartenance nationale, le champ
d'exercice naturel de la citoyenneté était la nation.
J'observerai que, au cours de notre histoire coloniale, nous avons fait de
semblables expériences, notamment en Algérie ; ai-je besoin d'y revenir ?
Sans exclure le moins du monde la perspective enthousiasmante d'une
citoyenneté qui dépasserait les frontières de notre nation, je tenais à
rappeler comment, jusqu'à présent, les choses se sont passées, afin d'éclairer
notre débat.
Comme le disait Jaurès, il faut aller à l'idéal...
M. Guy Allouche.
Et comprendre le réel !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Absolument ! C'est-à-dire garder les pieds sur
terre, pour parler familièrement.
Plusieurs orateurs se sont exprimés sur la question de la citoyenneté
européenne. M. Allouche, notamment, a dit qu'elle était surbordonnée à une
conscience commune, à un sentiment d'identité, à un sentiment de solidarité,
qui doit se marquer dans les décisions budgétaires, dans la politique de
défense, dans des choix de politique étrangère. Il est clair que nous avons
encore du chemin à parcourir sur cette voie et que, quant aux modalités de la
construction européenne, le débat est naturellement ouvert.
L'avancée que nous réalisons aujourd'hui est réelle, mais elle est modeste.
Elle peut s'interpréter comme une étape sur la voie d'une participation plus
étroite aux décisions locales et de l'intégration républicaine. C'est une
sensibilité que j'ai entendue s'exprimer, notamment par la voix de M.
Duffour.
D'autres peuvent envisager cette avancée dans une perspective plus lointaine,
qui est celle de la citoyenneté européenne, que je ne veux pas écarter dès
lors, bien entendu, que le sentiment d'identité aura progressé.
Ai-je besoin d'évoquer les discussions de marchands de tapis autour du budget
communautaire et de son financement ? Elles illustrent tout de même certaines
limites du sentiment de solidarité. Je pourrais aussi faire allusion à quelques
conflits qui montrent que les pays européens ne se trouvent pas toujours
spontanément sur la même longueur d'onde.
Monsieur Duffour, vous avez en particulier soulevé la question de la double
inscription.
Personnellement, je comprends mal comment le suffrage universel pourrait
tolérer la double inscription. En effet, permettre à un individu de voter deux,
voire trois fois, ce serait nécessairement, quelque part, fausser les
résultats.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Evidemment !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Nous sommes tout de même les gardiens de
quelques principes.
De toute façon, cela n'irait pas très loin : si, potentiellement, le nombre
d'étrangers communautaires pouvant voter en France est de 500 000, dans la
réalité, il est infiniment moindre. Vous savez que, pour les élections
européennes, le nombre d'étrangers inscrits a été relativement faible.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
45 000 !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Nous sommes donc encore loin du compte !
Mais il est évident que, surtout si l'on allait dans la logique dessinée par
M. Duffour, qui serait d'étendre le droit de vote aux étrangers non
communautaires, soit environ 60 % du total des étrangers en France, la
possibilité de modifier le résultat du vote serait considérable, notamment dans
certaines villes.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Elle serait énorme !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Il faut évidemment bien peser tout cela. Mais,
ayant exprimé mon sentiment personnel, je fais confiance à la sagesse de la
Haute Assemblée à cet égard.
Nous respectons les engagements internationaux de la France. Ce projet devait
être soumis à la représentation nationale. C'est chose faite.
Parmi les autres questions abordées, figure notamment celle de la réciprocité,
et je souhaite être tout à fait clair sur ce point.
Le rappel du principe de réciprocité ne soulève pas d'objection juridique. On
peut même dire qu'il est inutile dans la mesure où il ne fait que répéter ce
qui est déjà dit dans l'article 88-3 de la Constitution.
Mais il est sans effet pratique puisque la Cour européenne, saisie à plusieurs
reprises par la Commission, a sans ambiguïté et à plusieurs reprises affirmé
que ni la faute d'une institution communautaire ni le manquement d'un Etat
membre ne peuvent justifier la violation par un autre Etat membre de ses
obligations communautaires.
Le retard éventuel pris par d'autres Etats membres dans l'exécution des
obligations imposées par une règle communautaire ne saurait être invoqué par un
Etat membre pour justifier l'inexécution, même temporaire, des obligations qui
lui incombent. C'est l'objet des arrêtés de la Cour du 26 février 1976 -
Commission des Communautés européennes contre République italienne - et du 14
février 1984 - Commission des Communautés européennes contre République
fédérale d'Allemagne.
La France ne pourra donc exciper de la disposition introduite par le Sénat
pour refuser l'inscription sur une liste électorale complémentaire d'un citoyen
belge, par exemple, puisque M. Badré a cité le cas d'une citoyenne belge qui ne
comprenait pas pourquoi elle ne pouvait pas voter en France.
Je vous rappelle que l'Union européenne comprend aujourd'hui quinze Etats et
que plus elle s'élargit, plus, naturellement, la distance est grande. A
certains égards, nous nous sentons peut-être plus proches de l'Algérie, qui a
fait partie du même territoire national que nous, que de certains pays promis à
l'adhésion.
(Murmures sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
C'est une réalité ! Les pères de certains des ressortissants algériens présents
sur notre sol étaient des tirailleurs algériens. L'histoire est un processus
continu, nous ne devons jamais l'oublier !
Quoi qu'il en soit, loin de moi la volonté de vous entraîner sur des terrains
qui, au demeurant, seraient à explorer.
M. Cabanel a dit : « Enfin ! ». Et M. Dreyfus-Schmidt a même souligné : «
grâce à la dissolution ».
Je n'irai pas jusque-là. Ce projet de loi organique serait sans doute venu à
un moment ou à un autre en discussion devant le Parlement. Il vient maintenant
devant le Sénat et je pense que la discussion des articles confirmera le
souhait exprimé par tous les orateurs : celui de voir ce texte adopté sans
retard.
(Applaudisssements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
8
NOMINATION DE MEMBRES
DE DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES
M. le président.
J'informe le Sénat que les candidats présentés par les groupes socialiste, des
Républicains et Indépendants et communiste républicain et citoyen :
- à la représentation à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à
l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale ;
- à la délégation du Sénat pour l'Union européenne ;
- à la délégation parlementaire pour les problèmes démographiques ;
- et à la délégation du Sénat à l'office parlementaire d'évaluation de la
législation, ont été affichées et n'ont fait l'objet d'aucune opposition.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :
- Mme Josette Durrieu, membre titulaire, MM. James Bordas et Marcel Debarge,
membres suppléants, représentant la France à l'Assemblée parlementaire du
Conseil de l'Europe et à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale ;
- M. Michel Dreyfus-Schmidt, membre de la délégation du Sénat pour l'Union
européenne ;
- Mme Nicole Borvo, membre de la délégation parlementaire pour les problèmes
démographiques ;
- Mme Maryse Bergé-Lavigne, membre de la délégation du Sénat à l'office
parlementaire d'évaluation de la législation.
9
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature
pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Gérard Roujas
membre suppléant du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles et
membre titulaire de la section de l'assurance des salariés agricoles contre les
accidents du travail et les maladies professionnelles créée au sein du Conseil
supérieur.
10
NOMINATION DE MEMBRES
DE COMMISSIONS
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté des candidatures pour
la commission des affaires culturelles, la commission des affaires économiques
et du Plan, la commission des affaires sociales, la commission des finances, du
contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation et la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
- M. Roger Hesling, membre de la commission des affaires culturelles, en
remplacement de M. Marcel Charmant, démissionnaire ;
- M. Michel Charzat, membre de la commission des affaires économiques et du
Plan, en remplacement de M. Claude Haut, démissionnaire ;
- Mme Dinah Derycke, membre de la commission des affaires sociales, en
remplacement de M. Jacques Bialski, démissionnaire de son mandat de sénateur
;
- M. Bernard Angels, membre de la commission des finances, du contrôle
budgétaire et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Alain
Richard, dont le mandat sénatorial a cessé ;
- M. Claude Haut, membre de la commission des finances, du contrôle budgétaire
et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Jean-Pierre
Masseret, dont le mandat sénatorial a cessé ;
- M. Marcel Charmant, membre de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale,
en remplacement de M. Michel Charzat, démissionnaire.
Je rappelle au Sénat que la réunion administrative des sénateurs ne figurant
sur la liste d'aucun groupe a présenté une candidature pour la commission des
affaires sociales à la place laissée vacante depuis le 18 juin 1997.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M.
Jean-Pierre Lafond membre de la commission des affaires sociales, à la place
laissée vacante depuis le 18 juin 1997.
11
DROIT DE VOTE DES CITOYENS
DE L'UNION EUROPÉENNE
AUX ÉLECTIONS MUNICIPALES
Suite de la discussion
et adoption d'un projet de loi organique
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi organique relatif à l'exercice
par les citoyens de l'Union européenne résidant en France, autres que les
ressortissants français, du droit de vote et d'éligibilité aux élections
municipales et portant transposition de la directive 94/80/CE du 19 décembre
1994.
Nous passons à la discussion des articles.
Chapitre Ier
De l'exercice du droit de vote
aux élections municipales
par les ressortissants d'un Etat membre
de la Communauté européenne autre que la France
M. le président.
Par amendement n° 1, M. Fauchon, au nom de la commission, propose dans cet
intitulé de remplacer les mots : « d'un Etat membre de la Communauté européenne
» par les mots : « d'un Etat membre de l'Union européenne ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui tend à substituer
l'expression « Etats membres de l'Union européenne » aux mots « Etats membres
de la Communauté européenne », qui figurent, assez bizarrement, dans le projet
de loi organique. En effet, que l'on considère le traité, qui est un traité «
sur l'Union européenne » et ne traite que des citoyens de « l'Union », que l'on
reprenne le texte de l'article 88-3 de notre Constitution ou encore le texte
que nous avons voté relatif à la participation des Européens aux élections
européennes, il n'est fait mention que des Etats membres de « l'Union
européenne ». Il nous faut donc être cohérents dans cet article, ainsi que dans
plusieurs autres d'ailleurs, et ne mentionner que « l'Union européenne ».
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du chapitre Ier est ainsi modifié.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Il est inséré dans le chapitre Ier du titre IV du livre Ier du
code électoral une section 1
bis
ainsi rédigée :
« Section
1
bis
« Dispositions spéciales à l'exercice par les ressortissants d'un Etat membre
de la Communauté européenne autre que la France du droit de vote pour
l'élection des conseillers municipaux et des membres du Conseil de
Paris
«
Art. L.O. 227-1. -
Les ressortissants d'un Etat membre de la
Communauté européenne autre que la France résidant sur le territoire français
peuvent participer à l'élection des conseillers municipaux dans les mêmes
conditions que les électeurs français, sous réserve des modalités particulières
prévues, en ce qui les concerne, par la présente section.
« Pour l'application de la présente section, l'élection des membres du Conseil
de Paris est assimilée à celle des conseillers municipaux.
«
Art. L.O. 227-2. -
Pour exercer leur droit de vote, les personnes
visées à l'article L.O. 227-1 doivent être inscrites, à leur demande, sur une
liste électorale complémentaire.
« Elles peuvent demander leur inscription si elles jouissent de leur capacité
électorale dans leur Etat d'origine et si elles remplissent les conditions
légales autres que la nationalité française pour être électeurs et être
inscrites sur une liste électorale en France.
«
Art. L.O. 227-3. -
Pour chaque bureau de vote, la liste électorale
complémentaire est dressée et révisée par les autorités compétentes pour
dresser et réviser la liste électorale.
« Les dispositions des articles L. 10 et L. 11, L. 15 à L. 41 et L. 43 du
présent code, dans leur rédaction en vigueur à la date de publication de la loi
organique n° du , qui sont relatives à l'établissement des listes électorales
et au contrôle de leur régularité sont applicables à l'établissement des listes
électorales complémentaires et au contrôle de leur régularité. Les droits
conférés par ces articles aux nationaux français sont exercés par les personnes
mentionnées à l'article L.O. 227-1.
« En sus des indications prescrites par les articles L. 18 et L. 19, la liste
électorale complémentaire mentionne la nationalité des personnes qui y
figurent.
« Les recours prévus au deuxième alinéa de l'article L. 25 peuvent être
exercés par les électeurs français et par les personnes inscrites sur la liste
électorale complémentaire tant en ce qui concerne la liste électorale que la
liste électorale complémentaire.
«
Art. L.O. 227-4. -
Outre les justifications exigibles des
ressortissants français, le ressortissant d'un Etat de la Communauté européenne
autre que la France produit, à l'appui de sa demande d'inscription sur une
liste électorale complémentaire, un document d'identité en cours de validité et
une déclaration écrite précisant :
«
a)
Sa nationalité ;
«
b)
Son adresse sur le territoire de la République ;
«
c)
Qu'il n'est pas privé du droit de vote dans l'Etat dont il est
ressortissant ;
« d) qu'il n'exercera son droit de vote aux élections municipales qu'en France
aussi longtemps qu'il sera inscrit sur la liste complémentaire.
«
Art. L.O. 227-5. -
L'identité de leurs ressortissants inscrits sur
une liste électorale complémentaire est communiquée, sur leur demande, aux
autres Etats membres de la Communauté européenne.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent
article.
«
Art. L.O. 227-6. -
Est rayé d'office de la liste électorale
complémentaire tout ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne
autre que la France qui aura contrevenu à l'engagement pris par lui de
n'exercer son droit de vote aux élections municipales qu'en France.
« En outre, si l'intéressé est titulaire du mandat de conseiller municipal, il
sera déclaré démissionnaire d'office de ce dernier par le représentant de
l'Etat dans le département ou le territoire.
«
Art. L.O. 227-7. -
Est passible d'un emprisonnement d'un an et d'une
amende de 100 000 francs :
«
a)
Toute personne qui se sera fait inscrire sur la liste électorale
complémentaire sous de faux noms ou de fausses qualités ou aura, en se faisant
inscrire, dissimulé une incapacité, ou aura réclamé et obtenu une inscription
sur deux ou plusieurs listes ;
«
b)
Toute fraude dans la délivrance ou la production d'un certificat
d'inscription ou de radiation des listes électorales complémentaires ;
«
c)
Toute personne qui, à l'aide de déclarations frauduleuses ou de
faux certificats, se sera fait inscrire ou aura tenté de se faire inscrire sur
une liste électorale complémentaire, ou qui, à l'aide des mêmes moyens, aura
fait inscrire ou rayer, tenté de faire inscrire ou rayer indûment une autre
personne de cette liste. »
Sur l'article 1er, je suis saisi d'un certain nombre d'amendements.
INTITULÉ DE LA SECTION 1
bis
DU CHAPITRE Ier
M. le président.
Par amendement n° 2, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par l'article 1er pour l'intitulé de la section 1
bis
du
chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code électoral, de remplacer les mots
: « d'un Etat membre de la Communauté européenne » par les mots : « d'un Etat
membre de l'Union européenne ».
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé de la section 1
bis
est ainsi modifié.
ARTICLE L.O. 227-1 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de remplacer
le premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L.O. 227-1
du code électoral par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les citoyens de l'Union européenne résidant en France, autres que les
citoyens français, peuvent participer à l'élection des conseillers municipaux
dans les mêmes conditions que les électeurs français, sous réserve des
dispositions de la présente section.
« Ainsi qu'il est prévu à l'article 88-3 de la Constitution, ce droit leur est
ouvert sous réserve que l'Etat dont ils sont ressortissants accorde un droit
équivalent aux Français qui y résident, dans les conditions prévues par le
traité sur l'Union européenne et selon sa législation nationale propre.
« Les personnes mentionnées au premier alinéa sont considérées comme résidant
en France si elles y ont leur domicile réel ou si leur résidence y a un
caractère continu. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 31, présenté par MM. Habert
et Darniche, et tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 3 pour
l'article L.O. 227-1 du code électoral par les mots suivants : « depuis au
moins six mois ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Cet amendement a deux objets.
D'une part, il tend à réécrire le premier alinéa du texte proposé par
l'article 1er en y intégrant deux précisions.
En ce qui concerne la réciprocité, nous prévoyons que « ce droit leur est
ouvert sous réserve que l'Etat dont ils sont ressortissants accorde un droit
équivalent aux Français qui y résident, dans les conditions prévues par le
traité sur l'Union européenne et selon sa législation nationale propre ».
Nous savons bien - vous nous l'avez rappelé tout à l'heure, monsieur le
ministre - que, en droit communautaire, la réciprocité s'interprète comme
signifiant qu'un traité a été ratifié par tous. Si les directives ne sont pas
transposées, on se trouve alors dans les hypothèses de manquement, mais les
conditions de réciprocité sont acquises.
Or, ici, nous sommes dans un cas de transposition et nous entrons dans notre
droit à nous, qui n'est pas le droit communautaire, qui ne se situe pas dans la
même hiérarchie de normes et qui n'est pas justiciable des mêmes autorités. De
surcroît, la Constitution le prévoit formellement au terme de la révision que
nous avons votée, et il convient de garder à l'esprit que ce texte sera
obligatoirement soumis au Conseil constitutionnel. Dans ces conditions, cette
rédaction est préférable, normale et même conforme au bon sens.
Prenons un exemple concret, celui de la Belgique, pays éminemment sympathique
et que je considère, pour ma part, extrêmement proche de la France, monsieur le
ministre. Je vous rappelle d'ailleurs que la Belgique fut française à une
certaine époque, pour continuer dans les évocations historiques.
(Sourires.)
Or, malheureusement, nos amis belges, pour le moment, n'ont
pas procédé à la transposition. Il serait tout de même assez singulier qu'un
citoyen belge remplissant les conditions requises vote chez nous et qu'un
citoyen français ne puisse toujours pas voter en Belgique !
Je le rappelais, l'article 55 de la Constitution prévoit une réciprocité
appréciée texte par texte, Etat par Etat. Il est donc conforme à la
Constitution et conforme au bon sens de rappeler que la réciprocité signifie
que l'Etat concerné accorde un droit équivalent aux Français qui y résident.
Cela me paraît être conforme à notre ordre juridique à nous, dont je reconnais
sur ce point qu'il est différent. Au reste, cela n'a rien de surprenant : c'est
toute la démarche européenne que de tendre à concilier l'ordre juridique
européen avec des ordres juridiques nationaux qui continuent d'avoir leur
vitalité et leur logique propres.
Nous sommes aujourd'hui devant un cas de transposition. Il nous faut donc
intégrer une norme dans notre ordre juridique national et ce d'autant plus
facilement que la Constitution, en son article 88-3, prévoit expressément la
condition de réciprocité.
Le premier objet de cet amendement est donc, sur la question de la
réciprocité, d'inviter à une appréciation concrète et de bon sens, en vertu de
la Constitution française.
D'autre part, cet amendement tend à préciser les conditions requises en
matière de résidence. Nous avons purement et simplement repris les dispositions
qui figurent dans le texte que nous avons voté pour autoriser les Européens à
voter aux élections européennes.
Là encore, soyons cohérents et reprenons les mêmes termes.
Nous proposons donc que, pour être « résident », il faille avoir son domicile
réel en France - je rappelle que le domicile réel est le lieu du principal
établissement - ou avoir une résidence de caractère continu. Pour certains, six
mois de résidence suffiront à caractériser le caractère « continu ». Je ne sais
pas si c'est suffisant, mais il y a là une question de jurisprudence sur
laquelle je ne m'engagerai pas. Je préfère que nous en restions au texte qui a
été voté ici et qui a finalement été adopté, relatif à la participation aux
élections européennes.
M. le président.
La parole est à M. Habert, pour défendre le sous-amendement n° 31.
M. Jacques Habert.
Ce sous-amendement remplace, en fait, l'amendement n° 27, que j'avais déposé
avec M. Darniche.
M. le rapporteur vient d'exposer excellemment l'économie de son amendement et
les raisons pour lesquelles il propose une nouvelle rédaction de l'article L.O.
227-1 du code électoral.
Nous souhaitons, par notre sous-amendement, préciser ce qu'il faut entendre
par « résidence continue ». Qu'est-ce qu'une résidence continue ? Que faut-il
faire pour prouver la réalité du domicile ?
M. le rapporteur vient de faire allusion à une jurisprudence. J'aimerais qu'il
nous dise laquelle. Je pense, moi, qu'il faut préciser. Un délai de six mois
est généralement admis ; il est bon que cette précision figure dans le projet
de loi organique. Prenons un exemple : si quelqu'un s'installe dans la commune
et s'inscrit sur les listes électorales, est-il en résidence continue ?
J'ajoute que je vais exactement dans le sens de M. le ministre qui, dans son
propos liminaire, a demandé que les règles applicables aux Européens soient les
mêmes que celles qui s'appliquent aux Français. Or, un Français ne peut pas
s'inscrire du jour au lendemain sur les listes électorales. Il doit le faire
dans certains délais, généralement jusqu'au 31 décembre de l'année qui précède
les élections. Des vérifications sont alors prescrites, concernant l'identité
et le domicile. Tout cela prend un peu de temps mais, après cette enquête, on
sait du moins que la personne est bien celle qui s'est présentée et qu'elle
réside effectivement là où elle l'a indiqué. C'est cette précaution que je
voudrais ajouter dans le texte.
Cela va tout à fait dans le sens des déclarations de M. le ministre de
l'intérieur ainsi que de M. le rapporteur, qui a lui-même fait allusion à ce
délai de six mois dans son rapport. Pourquoi ne pas le faire figurer dans la
loi ? Ce sera plus clair et il n'y aura nulle ambiguïté sur ce sujet.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 31 ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Monsieur Habert, nous avons repris la rédaction déjà adoptée,
ce qui est la sagesse même, alors que la rédaction que vous proposez serait
contraire à la directive et au traité sur l'Union européenne.
Vous avez rappelé vous-même, monsieur Habert, en citant M. le ministre, les
termes du traité sur l'Union européenne : « Tout citoyen de l'Union résidant
dans un Etat membre dont il n'est pas ressortissant a le droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales dans l'Etat membre où il réside, dans
les mêmes conditions que les ressortissants de cet Etat. »
Or, avec ce sous-amendement, vous ajoutez une condition supplémentaire. En
effet, actuellement, pour être électeur ou éligible dans une commune de France,
il faut ou bien y avoir son domicile réel ou bien justifier d'une résidence de
six mois en France, ou bien encore - il faut prendre en compte toutes les
éventualités - être imposable en France depuis cinq ans.
Un étranger communautaire peut fort bien « résider » en France, en vertu d'une
résidence continue et non épisodique, comme le veut la jurisprudence, mais
remplir, dans la commune où il veut s'inscrire, l'une des deux autres
conditions, c'est-à-dire, par exemple, y acquitter l'impôt depuis plus de cinq
ans. Le cas se présentera d'ailleurs probablement.
Supposez qu'un homme d'affaires étranger communautaire travaille et réside à
Paris, mais possède depuis longtemps une résidence secondaire dans une commune
du Périgord ou ailleurs et y paie donc des impôts depuis plus de cinq ans. Il
souhaitera peut-être s'inscrire dans cette commune plutôt qu'à Paris. Il
acquitte en quelque sorte son « droit d'entrée », par le fait qu'il réside en
France d'une manière continue, ce qui s'apprécie au plan national, tandis que,
lorsqu'il en vient à exercer son droit d'inscription, à ce moment-là, il est
dans les mêmes conditions que le citoyen français et ces conditions ne
comportent pas la résidence de six mois ou, si elles la comportent, c'est de
manière alternative, avec les deux autres hypothèses que j'ai rappelées tout à
l'heure.
Aussi, monsieur Habert, avec votre rédaction, nous allons tout droit à des
difficultés majeures parce que vous introduisez une discrimination par rapport
au citoyen français.
M. Jacques Habert.
Je ne le pense absolument pas !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Mon cher collègue, avec tout le respect que je vous dois, il
n'est pas ici question de savoir ce que vous pensez, mais il s'agit de savoir
ce qui figure dans les textes !
Je vous rappelle, quelle que soit votre opinion sur ce point, que, pour
participer aux élections municipales françaises, il faut soit que vous ayez
votre domicile réel dans la commune, soit que vous ayez une résidence de six
mois, soit que vous soyez imposable dans cette commune depuis plus de cinq ans.
Donc, dès lors que vous autorisez ces électeurs européens à s'inscrire sur les
listes électorales d'une commune, vous ne pouvez pas leur imposer des
conditions différentes de celles qui sont imposées aux citoyens français, parce
que ce serait discriminatoire ; or, ce n'est pas possible.
Ce n'est pas une question d'opinion, c'est une question d'analyse, de lecture
pure et simple des textes.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3 et sur le
sous-amendement n° 31 ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Monsieur Habert, à partir du moment où l'on
n'impose pas à un Français le délai de six mois, il est difficile de l'imposer
à un étranger communautaire.
M. Jacques Habert.
On le requiert déjà dans les textes !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Mais nous tombons alors sous le coup de la
jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes.
Je suis donc opposé au sous-amendement n° 31.
J'en viens à l'amendement n° 3. En ce qui concerne le problème de la
réciprocité, j'ai déjà fait connaître mon point de vue. Je rappelle que cette
mention de la réciprocité est sans effet pratique. Par conséquent, je suis
contre le rappel de ce principe.
Par ailleurs, l'introduction dans la loi d'une définition de la notion de
résidence - définition qui fait l'objet du sous-amendement présenté par M.
Habert - ne se heurte à aucune difficulté. L'application de cette définition en
la circonstance, conformément au principe de subsidiarité, va de soi.
Toutefois, ce rappel ne peut qu'avoir une portée pédagogique. De toute façon,
la même disposition figure déjà dans la loi du 5 février 1994 transposant la
directive sur les élections européennes. Il est donc préférable de maintenir
cette disposition, en vertu de la règle du parallélisme des deux textes.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 31.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Monsieur le président, je demande un vote par division sur l'amendement n° 3,
dont le premier alinéa est rédactionnel...
M. le président.
Pour le moment, monsieur Allouche, nous en sommes au sous-amendement n° 31.
M. Guy Allouche.
Pardonnez-moi, monsieur le président, je souhaitais m'exprimer sur
l'amendement.
M. le président.
Je vais donc mettre aux voix le sous-amendement n° 31.
M. Jacques Habert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Je remercie M. Allouche de n'avoir pas d'objection à formuler contre mon
sous-amendement.
M. Guy Allouche.
Je n'ai pas dit cela !
(Sourires.)
M. Jacques Habert.
Surtout, je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir dit que ce
sous-amendement, qui vise à préciser la notion de résidence, « ne se heurte à
aucune difficulté ».
M. le rapporteur a défini trois conditions pour qu'il y ait une parfaite
égalité entre les ressortissants français et les autres citoyens de l'Union
européenne résidant en France. Pour ma part, j'avais avancé l'une d'elles, à
savoir la notion de six mois de résidence.
Les trois conditions sont les suivantes : en premier lieu, il faut avoir un
domicile réel, notion qu'il faudrait définir ; en deuxième lieu, il faut
résider en France depuis six mois au moins ; en troisième lieu, il faut avoir
payé des impôts depuis cinq ans.
Si vous souhaitez préciser ces trois conditions, qui sont celles qui sont
imposées aux citoyens français, je suis prêt à modifier mon sous-amendement en
ce sens. Ainsi, les Français et les ressortissants des autres pays de l'Union
européenne seront dans les mêmes conditions. C'est ce que nous cherchons à
faire. Dans la ligne de ce qui a été fait, nous voulons en effet que les
Français et les citoyens de l'Union européenne résidant en France soient à
égalité.
Le texte proposé par la commission est très vague. On a l'impression que, de
toute évidence, les étrangers sont favorisés par rapport aux citoyens français.
Il ne comporte aucune des précisions que je viens d'énoncer.
Je demande donc, pour satisfaire la commission, si elle le désire, que
figurent les trois conditions imposées aux citoyens français. Ainsi, ce sera
très clair et il y aura égalité parfaite entre les Français et les
étrangers.
En tout cas, je m'oppose à des dispositions qui, manifestement, tendraient à
donner aux étrangers en France plus de facilités que n'en ont les citoyens
français.
M. Emmanuel Hamel.
C'est normal !
M. Philippe Arnaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
J'approuve le sous-amendement n° 31. L'exercice de la souveraineté populaire,
même dans la gestion des affaires locales, reste une question extrêmement
importante. Aussi ai-je pris soin de consulter l'ensemble des maires de mon
département à ce sujet. Plus des deux tiers d'entre eux acceptent que les
citoyens européens soient électeurs et éligibles. Mais tous ont fixé une durée
minimale de résidence pour l'exercice de ce droit, qui est, dans leur esprit,
décomptée en année. Que ce soit possible ou non, je n'en sais rien. Comme M. le
rapporteur l'a excellemment dit, il semble effectivement que des problèmes de
nature technique ou constitutionnelle se posent.
Je me dois, après avoir consulté les maires de mon département, de rapporter
leur avis. Ils souhaitent tout simplement vérifier l'authenticité de l'intérêt
que peut porter un citoyen européen à la gestion des affaires locales. Une
durée minimale de résidence de trois ou cinq ans eût certes été souhaitable.
Cependant, même si votre sous-amendement est modeste, monsieur Habert, je le
soutiendrai.
M. Guy Cabanel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Je suis quelque peu perplexe. Une durée minimale de résidence de six mois me
paraissait raisonnable. Dans les faits, quand on demande aux personnes
concernées d'avoir payé des impôts, elles ont sans doute une résidence en
France depuis six mois au moins.
La proposition de MM. Darniche et Habert se justifierait sur le plan de la
pratique. Cependant, il s'agit d'une mise à jour dans notre droit de la
législation communautaire. Je le dis avec une grande franchise : il me paraît
plus évident et plus simple de retenir les termes employés dans le projet de
loi organique, à savoir : « Les ressortissants d'un Etat membre de la
Communauté européenne autre que la France résidant sur le territoire français
peuvent participer à l'élection des conseillers municipaux dans les mêmes
conditions que les électeurs français, sous réserve des modalités particulières
prévues, en ce qui les concerne, par la présente section. » Ces dernières
découlent des droits qu'ils auront ou non.
Comment, au moment où l'on construit cette espèce de citoyenneté, par accord
des Etats, peut-on distinguer en quelque sorte...
MM. Emmanuel Hamel et Jacques Habert.
On impose à chacun les mêmes règles !
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Dans un premier temps, j'ai été séduit par le sous-amendement de MM. Darniche
et Habert. Cependant, je ne peux vous suivre, monsieur Habert, car nous
soulèverions des difficultés sur le plan de l'Union européenne. Les précisions
proposées sont contestables. Tel est mon point de vue.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Ceccaldi-Raynaud.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
En l'occurrence, deux thèses peuvent être défendues. Ou bien on exige des
étrangers qu'ils remplissent les mêmes conditions que les Français. C'est le
cas.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
C'est ce que nous faisons.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Ou bien on exige d'autres conditions. Par exemple, on demande que les
ressortissants de la Communauté européenne vivent depuis cinq ans en France.
Prévoir une condition de résidence de six mois au moins, c'est revenir au texte
initial qui comporte cette obligation. Par conséquent, votre sous-amendement
n'ajoute rien.
(M. Habert fait un signe de dénégation.)
Nous ne pouvons
donc pas le voter.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Nous sommes tout simplement dans une situation
d'incompréhension du texte. Je vais essayer d'être aussi clair que possible et
je reprendrai ce que M. Cabanel a dit tout à l'heure. S'il s'agit, mon cher
collègue et ami Habert, de dire que les Européens qui remplissent la condition
de résidence - c'est le préalable - s'inscriront dans la commune dans les mêmes
conditions que les citoyens français, c'est dans notre texte, M.
Ceccaldi-Raynaud l'a rappelé à l'instant. Donc il n'y a pas lieu de l'ajouter.
Le premier alinéa du texte proposé par l'amendement dispose : « Les citoyens de
l'Union européenne résidant en France, autres que les citoyens français,
peuvent participer à l'élection des conseillers municipaux dans les mêmes
conditions que les électeurs français... » C'était déjà à l'origine dans le
traité sur l'Union ; c'est donc un principe fondamental.
Cependant, vous pensez - je vous demande instamment, monsieur Habert, de vous
replonger dans le texte - que les conditions que vous avez énumérées tout à
l'heure sont cumulatives. Or elles ne le sont pas. Il faut satisfaire à l'une
de ces trois conditions.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est alternatif, ce n'est pas continu !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Permettez-moi de rappeler les termes de l'article L. 11 du
code électoral :
« Sont inscrits sur la liste électorale, sur leur demande :
« 1° Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y
habitent depuis six mois au moins... ». Ils doivent remplir l'une ou l'autre
condition.
« 2° Le 2° se suffit à lui seul - "Ceux qui figurent pour la cinquième
fois sans interruption, l'année de la demande d'inscription, au rôle d'une des
contributions directes communales..." ».
« 3° Le 3° se suffit également à lui seul - "Ceux qui sont assujettis à
une résidence obligatoire dans la commune en qualité de fonctionnaires
publics." »
Il ne faut donc pas dire qu'ils doivent remplir les trois conditions. C'est
l'une de ces conditions. Il faut qu'ils soient exactement dans la même
situation que les nationaux. La meilleure façon, c'est non pas d'énumérer les
conditions, mais de dire qu'il s'agit de ceux qui répondent aux mêmes
conditions que les nationaux.
Si nous modifions un jour notre législation, si nous imposons à tous, d'une
manière nouvelle et différente, une condition de résidence de six mois, nous
verrons à ce moment-là. Pour l'instant, la France ne le fait pas. Cette idée,
qui était d'ailleurs contenue dans la résolution du Sénat, je le reconnais, est
justifiée dans l'esprit de chacun d'entre nous, mais elle ne peut pas passer
parce qu'elle ne figure pas dans notre législation. Nous ne pouvons donc pas
imposer à ces Européens autre chose que ce qui figure dans notre législation,
une fois qu'ils ont franchi la condition de la résidence. C'est pourquoi nous
avons voulu définir la résidence en précisant qu'elle devait avoir un caractère
continu, afin qu'il n'y ait pas de confusion avec les résidences
secondaires.
Aussi, je me permets, monsieur Habert, de vous suggérer de retirer votre
sous-amendement. En effet, si ce que vous souhaitez c'est que les Européens
accèdent dans les mêmes conditions que les citoyens nationaux, vous avez
satisfaction à travers notre texte. Il ne me semble donc pas nécessaire de
prolonger ce débat qui pose un problème de clarté mais qui peut se résoudre
lorsqu'on lit attentivement les textes.
M. Philippe Richert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Les arguments de M. le rapporteur sont très convaincants, mais ils me laissent
un peu perplexe. Si je comprends bien l'argumentation de M. le rapporteur, les
critères qui sont aujourd'hui avancés par les deux auteurs du sous-amendement
n° 31 sont repris dans le texte concernant l'ensemble des Français. Il n'y a
donc pas lieu de les répéter, d'autant qu'une évolution interviendra peut-être
par la suite à cet égard.
L'argumentation de M. le rapporteur me paraît se heurter à sa propre logique.
En effet, il déclare que le sous-amendement ne peut être retenu car celui-ci
créerait une discrimination entre les Français et les étrangers de l'Union
européenne. Or il introduit, par l'amendement n° 3, une discrimination puisque
la condition de résidence en continu qu'il prévoit n'est pas applicable au
citoyen français.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
L'auteur du sous-amendement et ceux qui le soutiennent font une confusion
entre les conditions pour être électeur et ce qu'est un résident.
Aux termes du traité et de la Constitution, les membres de l'Union européenne
non français ont le droit de vote aux élections municipales dans les mêmes
conditions que les Français. On sait ce que sont ces conditions : elles sont
alternatives et M. le rapporteur les a rappelées.
En outre, ce droit de vote et d'éligibilité dans les mêmes conditions n'est
accordé qu'aux citoyens de l'Union résidant en France. Le débat porte donc non
pas sur les conditions pour être électeur ou éligible, mais sur les conditions
pour être un résident.
Il est proposé de préciser que, pour être considéré comme un résident, la
résidence doit avoir eu lieu de manière continue, l'objectif étant simplement
d'exclure les résidences secondaires.
Mais en ajoutant une ancienneté quelconque, vous créez un ajout à la fois au
traité et à la Constitution. Or telle n'est pas votre intention !
Je pense donc qu'il serait raisonnable de retirer votre sous-amendement. A
défaut de quoi, nous serions navrés de voter contre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je rappellerai, pour éclairer tout à fait le
débat, que l'article 4 de la directive dispose que, « si les ressortissants de
l'Etat membre de résidence, pour être électeurs ou éligibles, doivent résider
depuis une période minimale sur le territoire national, les électeurs et
éligibles visés à l'article 3 sont réputés remplir cette condition lorsqu'ils
ont résidé pendant une durée de résidence équivalente dans d'autres Etats
membres. »
On ne peut donc pas poser la condition des six mois dans la mesure où
l'article 4 de la directive communauaire constitue un argument de droit.
J'entendais M. Arnaud évoquer le sentiment des maires de son département, et
je le comprends tout à fait : si les maires sont interrogés, ils répondent
ainsi.
On peut penser comme vous, mais il y a la directive communautaire, et il faut
l'appliquer.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je souhaite achever de clarifier les choses dans l'esprit de
notre collègue et ami M. Richert, et je le ferai pratiquement comme M.
Dreyfus-Schmidt tout à l'heure.
C'est une affaire dans laquelle il y a deux niveaux : un premier niveau pour
accéder à la possibilité d'être inscrit sur les listes électorales municipales
- c'est ce que j'appelle la clef d'entrée - et un second niveau pour s'inscrire
parce qu'on en a le droit. A ce second niveau, l'inscription est soumise aux
conditions générales qui s'appliquent à tous les Français, comme je l'ai dit
tout à l'heure. Encore une fois, plusieurs d'entre elles ne sont pas
cumulatives.
En revanche, au premier niveau, le texte fait référence aux résidents. Mais
nous avons parfaitement le droit de définir la notion de résident. En effet, si
un Français, dès lors qu'il remplit l'une des conditions dont nous parlions,
n'est pas obligé d'être résident en France, un Européen, lui, doit résider en
France ; c'est une disposition qui lui est spécifique.
Nous avons donc raison de ne pas donner la clef, en quelque sorte, du vote en
France à quelqu'un qui n'y a qu'une résidence secondaire. Voilà pourquoi nous
définissons cette clef comme nous l'avions fait voilà quelques années.
(M.
Richert fait un signe d'assentiment.)
Je constate que M. Richert est maintenant convaincu. Si la cause est entendue,
comme l'on dit au tribunal, la plaidoirie doit alors cesser !
M. le président.
Monsieur Habert, le sous-amendement n° 31 est-il maintenu ?
M. Jacques Habert.
Il l'est, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 31, repoussé par la commission et par
le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir excuser mon intervention
précédente, résultant d'une confusion.
Nous voterons contre l'amendement n° 3 en raison de son alinéa qui traite de
la réciprocité et qui vise à introduire une définition très restrictive de la
réciprocité en tentant de n'accorder le droit de vote qu'aux ressortissants des
Etats qui l'accordent effectivement aux Français.
Il ne nous paraît pas possible de souscrire à cet amendement dont je doute de
l'efficience dans la mesure où un arrêt de la Cour de justice des Communautés
européennes du 26 février 1976 a décidé qu'un Etat n'adoptant pas dans le délai
prévu l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires pour se
conformer à une directive a manqué à une obligation qui lui incombe en vertu du
traité. Cet arrêt stipule : « Attendu par ailleurs que les retards éventuels
pris par d'autres Etats membres dans l'exécution des obligations imposées par
une directive ne sauraient être invoqués par un Etat membre pour justifier
l'inexécution même temporaire des obligations qui lui incombent ; qu'en effet
le traité ne s'est pas borné à créer des obligations réciproques entre les
différents sujets auxquels il s'applique, mais à établir un ordre juridique
nouveau qui règle les pouvoirs, droits et obligations desdits sujets, ainsi que
les procédures nécessaires pour faire constater et sanctionner toute violation.
»
En outre, une telle conception de la réciprocité conduirait dans certains cas
à retirer purement et simplement le droit de vote à certains ressortissants
communautaires résidant en France. En effet, seuls quatre pays laissent le
libre choix à leurs nationaux de voter dans leur pays d'origine ou dans leur
pays de résidence. Dans tous les autres Etats, dès lors que les nationaux
résident dans un autre pays, ils perdent leur droit de vote dans leur pays
d'origine. Ainsi, ces derniers, compte tenu de l'amendement de la commission
des lois, ne pourraient voter ni en France ni dans leur pays d'origine qui n'a
pas transcrit la directive.
En outre, dans notre ordre juridique interne, la signature d'une convention
internationale prime sur la Constitution. Nous savons tous que les conventions
internationales prennent le pas sur notre loi fondamentale. Or le traité a été
signé, et notre excellent rapporteur ne fait référence, pour soutenir son
argumentation, qu'à la Constitution.
Puisque la souveraineté européenne est ainsi remise en cause, nous ne pourrons
voter le deuxième alinéa de cet amendement. C'est pourquoi je vous invite à le
modifier, monsieur le rapporteur. S'il n'en allait pas ainsi, je vous
demanderai de procéder à un vote par division, monsieur le président. En effet,
nous acceptons le premier et le troisième alinéas, mais nous sommes contre le
deuxième.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je suis quelque peu surpris, et même interloqué, par ce que
je viens d'entendre, monsieur Allouche !
Je me permets de vous indiquer, mon cher collègue, que les traités ne sont pas
supérieurs à la Constitution. Ils sont supérieurs aux lois ordinaires sous
réserve de réciprocité, ainsi que cela est rappelé tant dans le préambule que
dans l'article 55 de la Constitution. La situation n'est donc pas celle que
vous évoquez.
J'en reviens à notre texte. Je suis surpris, disais-je, par cette résistance à
ce qui n'est que le respect de la révision de la Constitution que vous avez
votée !
J'ajoute, monsieur le ministre, que, contrairement à ce que vous paraissez
croire, la mesure que je propose sera efficace. Elle est donc à la fois
nécessaire et efficace.
Elle est nécessaire du fait de la réforme de la Constitution que vous avez
votée. Le nouvel article 88-3 reprend en effet une disposition déjà prévue dans
l'article 55 de la Constitution, à savoir que les traités s'appliquent sous
réserve de réciprocité : « Sous réserve de réciprocité et selon les modalités
prévues par le traité de l'Union européenne signé le 7 février 1992, le droit
de vote et d'éligibilité aux élections municipales peut être accordé aux seuls
citoyens de l'Union résidant en France. »
Sans une réforme de la Constitution, le traité aurait été anticonstitutionnel.
Et vous savez quels ont été les débats sur ce traité ! C'est donc cette
modification de la Constitution qui a permis la ratification du traité avec une
majorité dont on rappelle encore souvent aujourd'hui qu'elle a été un peu
juste.
Alors, vous n'allez pas demander au rapporteur et à la commission des lois de
renoncer soudain à ce dispositif qui prévoit, en plus de la réserve de
réciprocité générale, une sorte de réserve de réciprocité spéciale pour
l'inscription des Européens aux élections municipales et qui sera soumis de
nouveau au Conseil constitutionnel. Ce n'est pas possible ! Dès lors qu'une
réserve de réciprocité spéciale, distincte de la réciprocité générale, figure
dans notre constitution, laquelle prévaut en dépit des traités, nous devons
absolument la respecter !
J'ajoute que ce respect me paraît utile et de bon sens, comme je l'ai indiqué
tout à l'heure. Il serait en effet choquant que les Belges et les Grecs
puissent participer aux élections municipales en France, alors que nos
compatriotes ne peuvent faire de même en Belgique et en Grèce ! C'est une
question de bon sens. Monsieur Allouche, cela ne vous choque-t-il pas un peu,
vous, qui habitez à côté de la Belgique ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, je me permets de dire que cette
disposition sera efficace ; en effet, grâce à cette dernière, les Belges et les
Grecs, tant que leurs pays n'auront pas transposé la directive, ne pourront pas
s'inscrire sur nos listes électorales complémentaires, ce qui me paraît tout
simplement normal.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le rapporteur, vous avez beaucoup de
talent et - cela se sent - vous avez étudié le dossier. J'ai néanmoins le
regret de vous dire que je ne suis pas d'accord avec vous !
Bien sûr, votre système pourrait être efficace ; mais vous connaissez le fait
fondamental selon lequel nous nous situons désormais dans le cadre du droit
communautaire. Je ne parle pas de la réciprocité exigée pour que les traités
entrent en vigueur, car c'est un autre sujet, qui est réglé.
Nous nous situons à un autre niveau, qui est celui de l'application d'une
directive communautaire. Or la jurisprudence est tout à fait claire, et il n'y
a pas la moindre contestation sur ce sujet : même si la réciprocité avec les
autres pays n'est pas acquise, nous ne pouvons pas introduire, comme vous le
souhaitez, une clause de réciprocité spéciale.
Il me semble qu'il existe une propension à considérer que l'on peut encore
fixer des règles qui instaureraient une égalité entre les étrangers
communautaires et les Français. C'est un peu la logique dans laquelle s'est
placé M. Habert.
Mais la logique dans laquelle s'inscrivent nos travaux d'aujourd'hui est tout
à fait différente, et il est quand même curieux que je sois obligé de le
rappeler : c'est la logique du droit communautaire. Ce droit est le même pour
tous les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, et, si
certains Etats ont du retard par rapport aux autres dans la transposition en
droit interne de la directive, les pays ayant déjà transposé la directive ne
peuvent plus exciper du fait que telle ou telle disposition n'est pas entrée en
vigueur chez leurs voisins pour refuser qu'elle s'applique sur leur
territoire.
Je crois que c'est assez clair : le dispositif que nous étudions aujourd'hui
relève du droit communautaire, et non plus d'un système d'engagements
internationaux imposant la réciprocité.
Tout cela est terminé, dépassé !
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Nous ne sommes plus souverains !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je ne mets personnellement aucune passion dans cette affaire.
Nous nous battons un peu à fronts renversés, monsieur le ministre, et, soit dit
au passage, cela m'amuse. Cependant, si les Belges peuvent voter en France sans
que la Belgique ait transposé la directive en droit interne, je n'en ferai pas
une maladie !
Je me place sur un terrain strictement juridique et j'essaie d'être cohérent
avec un système que vous avez créé - pour mon malheur, je n'étais pas alors des
vôtres ! - et avec l'article 88-3 de la Constitution qui dispose : « sous
réserve de réciprocité ». Comment faut-il comprendre ce membre de phrase qui
figure dans notre Constitution, monsieur le ministre ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Le principe de réciprocité intervient à propos
de la ratification : il est évident que le traité n'entre en vigueur que
lorsque tous les contractants l'ont ratifié.
Je sais bien que certains excipent du fait que le Danemark ne l'a pas ratifié
exactement sous la même forme. Mais, jusqu'à présent, personne n'a soulevé
cette exception ! On a considéré que le traité avait été ratifié et qu'il était
entré en vigueur. Par conséquent, il s'applique et, dès lors, la commission est
habilitée à prendre des directives.
Nous ne nous battons pas à fronts renversés, monsieur le rapporteur ! Nous
sommes dans un système juridique, et je dis aux juristes que vous êtes, au
Sénat, ce qu'il en est sur le plan juridique ! Nous nous situons désormais dans
ce cadre. Je vous ai lu l'article 4 de la directive, et c'est ce dernier qui
s'impose !
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Monsieur le ministre, autant que je m'en
souvienne, j'avais bien dit, à l'occasion de la réforme constitutionnelle, que
la réciprocité devait viser la mise en application, et non pas simplement le
traité.
Bien sûr, le traité est ratifié. Mais supposez - on peut toujours raisonner
par l'absurde - que le traité soit ratifié par tous - il l'est ! - et que cinq
pays dont les ressortissants en France sont les plus nombreux décident de ne
pas appliquer la directive ou se mettent en contradiction avec le droit
communautaire. Tant qu'ils n'auront pas appliqué le droit communautaire, nous
nous trouverons dans une situation qui n'est pas tolérable !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Ils seraient alors condamnés par la Cour de
justice des Communautés européennes de Luxembourg !
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Oh, vous savez, être condamné par les
tribunaux, après tout, cela nous est tous arrivé !
(Murmures ironiques sur
de nombreuses travées.)
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Il y a là un certain relativisme dans lequel je
vous invite à ne pas sombrer !
M. Emmanuel Hamel.
Il est pourtant bien nécessaire, monsieur le ministre !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Je remercie tout d'abord M. le rapporteur d'avoir corrigé une erreur : je
voulais dire que le traité était supérieur à la loi, et non à la Constitution.
Je vous sais gré, mon cher collègue, de cette précision.
S'agissant de l'article 88-3 de la Constitution, permettez-moi de revenir un
instant en arrière. Le projet de traité de Maastricht contenait bien cette
condition d'éligibilité, mais notre loi fondamentale ne l'autorisait pas et,
pour ratifier le traité, il a été nécessaire de modifier la Constitution. Nous
l'avons fait en juin 1992, avec l'introduction du membre de phrase que
rappelait M. le rapporteur - « sous réserve de réciprocité » - mais c'était
avant la ratification ! Depuis, tous les pays de l'Union ont ratifié le
traité.
A partir de là, que prévoit la directive européenne ? Nous devons la
transposer et l'appliquer, sans même attendre que tous les pays l'aient
transposée dans leur droit interne. Voilà donc une explication que je livre à
la réflexion de M. le rapporteur : nous avons prévu la réciprocité avant la
ratification pour obliger les autres Etats à respecter eux aussi ladite
réciprocité, mais, maintenant que la réciprocité est admise, il n'est pas
nécessaire d'attendre que la Grèce et la Belgique aient eux-mêmes transposé la
directive pour l'appliquer aux Belges et aux Grecs.
Voilà pourquoi je juge cet amendement superflu. Quoi qu'il en soit, d'ici peu,
j'espère que l'ensemble des pays de l'Union auront transposé la directive et
que la question ne se posera plus.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
En attendant, cela reste scandaleux !
M. Guy Cabanel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Je suis assez perplexe devant le tour que prend cette discussion ! Je me
souviens de ce qui s'est passé en 1992 : l'article 88-3 a alors été voté, mais
l'article 88-2, déjà, prévoyait le droit de réciprocité ! L'article 88-3 n'est
qu'explicatif, il a pour objet d'appliquer, précisément, ce droit de
réciprocité.
Nous serions-nous réunis à Versailles pour rien ? Je suis très inquiet ! Au
demeurant, l'article 4 de la directive n'est pas aussi exigeant en la matière
!
Je souhaiterais donc que la réflexion soit approfondie, car les arguments
échangés ne me paraissent pas décisifs.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Si nous ne nous étions pas réunis à Versailles pour modifier la Constitution,
il serait impossible aujourd'hui d'accorder le droit de vote et d'éligibilité
aux ressortissants de l'Union européenne autres que les ressortissants
français, c'est évident ! N'ayez donc pas de regret.
Pour le reste, il est normal que la Constitution dispose que ce droit est
ouvert « sous réserve de réciprocité » ; mais, précisément, puisque le traité a
été approuvé par tout le monde, la réciprocité est acquise. Voilà, je crois, ce
qu'il faut comprendre : c'est très simple !
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
En fait, nous nous sommes trompés !
M. Guy Allouche.
Mais non !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
En outre, il est tout de même curieux de rappeler dans une loi organique ce
que dit la Constitution, surtout si c'est pour lui faire dire autre chose que
ce qu'elle dit !
Quoi qu'il en soit, la Constitution reste ce qu'elle est et la loi organique
est élaborée en application de la Constitution. Il est donc tout à fait inutile
de le préciser. Ne prenez pas le risque de faire un contresens !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
M. Dreyfus-Schmidt vient de faire, me
semble-t-il, un rappel utile.
On peut regretter la situation présente et vous connaissez mon vote personnel,
je ne vais donc pas épiloguer ; mais, à partir du moment où le vote est acquis
dans tous les pays signataires et où le traité entre en vigueur, il ne peut
plus y avoir de clause de réciprocité !
De plus, monsieur Cabanel, ce n'est pas l'article 4 de la directive qui
définit des conditions extrêmement souples pour l'interprétation de la notion
de résidence, mais la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés
européennes. Ainsi, le 26 février 1976 - Commission contre République italienne
- et le 14 février 1984 - Commission contre République fédérale d'Allemagne -
la Cour a été tout à fait claire : « Ni la faute d'une institution
communautaire ni le manquement d'un Etat membre ne peuvent justifier la
violation par un autre Etat membre de ses obligations communautaires. Le retard
éventuel pris par d'autres Etats membres dans l'exécution des obligations
imposées par une règle communautaire ne saurait être invoqué par un Etat membre
pour justifier l'inexécution, même temporaire, des obligations qui lui
incombent. »
Tel est donc, me semble-t-il, le système dans lequel vous devez vous placer.
Certains semblent découvrir les effets juridiques du traité de Maastricht. Mais
le vin est tiré...
M. Guy Allouche.
Il faut le boire !
M. Emmanuel Hamel.
Nous ne le buvons pas !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
C'est la jurisprudence antérieure !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je ne reviendrai pas sur un débat juridique qui est quelque
peu byzantin et dans lequel chacun peut développer son point de vue à l'infini,
mais il faut quand même voir les choses avec bon sens et concrètement.
Le bon sens - nos concitoyens ont besoin de comprendre les lois ! - veut que,
dans la mesure où nous ouvrons cette faculté à des Européens, les Etats
d'origine de ces derniers nous l'ouvrent réciproquement et réellement, et non à
travers des explications de texte raffinées. Ainsi, pour les Belges - le cas
est moins vrai pour les Grecs - la situation va très vite se présenter ! Il
nous faut donc légiférer aussi concrètement que possible, et il ne faut pas
s'embarrasser indéfiniment de considérations juridiques. C'est un ancien élève
de la faculté de droit qui le dit, le droit doit rester plein de bon sens.
Votons donc des dispositions compréhensibles et acceptables !
Sans doute avez-vous eu raison, monsieur le ministre, de nous rappeler la
jurisprudence et, même si je ne souscris pas à vos propos, j'admets très
volontiers que votre thèse se défend. Mais que risquons-nous ? Un recours en
manquement qui va durer trois ou quatre ans ? D'ici là, la transposition aura
eu lieu en Belgique et en Grèce et, alors, le problème ne se posera plus !
En tout cas, pour ce qui concerne nos amis belges, si nous leur faisons sentir
que nous sommes tout prêts à leur ouvrir ce droit - et nous en serions heureux
car Dieu sait qu'ils jouent un rôle dans certaines régions de France - il faut
qu'ils fassent de même de leur côté. Voilà qui ne pourra que les inciter à
accélérer la transposition dans leur pays ! Incitons-les et, pour cela, posons
ce principe de réciprocité qui, encore une fois, est un principe de bon
sens.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je rappelle que j'ai été saisi d'une demande de vote par division sur
l'amendent n° 3.
Je mets aux voix les premier et troisième alinéas de cet amendement.
(Ces textes sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le deuxième alinéa de l'amendement n° 3.
(Ce texte est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'amendement n° 3.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L.O. 227-1 du
code électoral.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L.O. 227-2 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Sur le texte proposé pour l'article L.O. 227-2 du code électoral, je ne suis
saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L.O. 227-2 du code
électoral.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L.O. 227-3 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Par amendement n° 4, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L.O. 227-3
du code électoral, de remplacer les mots : « , L. 15 à L. 41 et L. 43 du
présent code » par les mots : « , L. 15 à L. 17, L. 18 à L. 41 et L. 43 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L.O. 227-3 du
code électoral.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L.O. 227-4 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L.O. 227-4 du
code électoral, de remplacer les mots : « d'un Etat de la Communauté européenne
», par les mots : « d'un Etat de l'Union européenne. »
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 26, MM. Durand-Chastel, Habert et Maman proposent, dans le
quatrième alinéa
c
du texte présenté par l'article 1er pour l'article
L.O. 227-4 du code électoral, de remplacer le mot : « privé » par le mot : «
déchu ».
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel.
Les auteurs du projet de loi organique, en employant le terme « privé de leur
droit », ne tiennent pas compte du fait que les Allemands, les Anglais, les
Hollandais, etc., perdent leur droit de vote aux élections municipales de leur
pays d'origine lorsqu'ils résident dans un autre pays. Ils sont privés de leur
droit de vote sans en être déchus.
Nous proposons donc de substituer à cette rédaction le texte même de la
directive 94/80/CE, en utilisant la formule « qu'il n'est pas déchu du droit de
vote dans l'Etat dont il est ressortissant », le mot déchu étant d'ailleurs
retenu à juste titre à l'article 5, alinéa
a
de l'article L.O. 265-1, en
ce qui concerne le droit d'éligibilité.
La clarté appelle une coordination des définitions. Soyons cohérents !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
La commission s'est déclarée favorable à cet amendement, qui
améliore la rédaction du projet de loi organique.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de supprimer
le dernier alinéa
d
du texte présenté par l'article 1er pour l'article
L.O. 227-4 du code électoral.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit là d'une question qui présente un véritable intérêt
intellectuel, à savoir le double droit de vote : le texte qui nous est proposé
n'autorise pas celui qui s'inscrit pour voter lors de nos élections municipales
à rester inscrit sur une liste municipale dans son pays d'origine.
Permettez-moi d'évoquer les différents arguments aux termes desquels cette
disposition me paraît à la fois malvenue et inutile, tout en procédant d'une
conception de l'Europe qui peut surprendre.
Tout d'abord, cette disposition est malvenue tout simplement parce que, si
l'on se réfère aux transpositions qui ont été maintenant réalisées dans presque
tous les Etats membres, à l'exception de la Belgique et de la Grèce, on ne
trouve nulle part cette interdiction.
Ainsi, un Français qui va pouvoir s'inscrire en Allemagne, en Angleterre, en
Italie, etc., conservera, s'il continue naturellement à remplir les conditions
prévues par la loi française, la possibilité de voter en France. Pourquoi pas ?
On ne lui demande pas de brûler ses vaisseaux ou de couper ses racines ! Il
aura acquis, certes, une dimension supplémentaire parce qu'il aura sa résidence
permanente ou ses affaires dans un autre pays, mais cette dimension
supplémentaire ne le privera pas de sa dimension d'origine ! Les Français vont
donc avoir cette possibilité dans presque tous les pays, il n'y a de doute que
pour la Belgique et la Grèce. Pourquoi, dès lors, nous montrerions-nous plus
restrictifs pour les étrangers qui souhaitent voter chez nous ?
J'ajoute que l'on nous propose, en fait, d'interdire à des gens de s'inscrire
dans leur pays. Mais cela ne nous regarde pas ! Nous n'avons pas qualité pour
légiférer pour les pays voisins ! Seule une directive, une disposition commune
qui le stipulerait pourrait être reprise et transposée dans le droit interne.
Nous ne pouvons nous permettre de frapper d'interdit un étranger au nom de
notre propre loi nationale : notre loi nationale s'applique en France, pas à
l'étranger ! C'est donc une démarche tout à fait singulière que celle en vertu
de laquelle nous prétendrions légiférer sur la situation des étrangers. Il
faudrait en réalité disposer d'un texte européen, et nous n'en avons aucun sur
ce point.
J'ajoute, enfin, que je me demande quel est l'intérêt d'une telle disposition,
monsieur le ministre. Je m'adresse à vous : vous avez dit tout à l'heure, et
cela m'a frappé, que cela risquait « de fausser ». Fausser quoi ? Pas les
élections chez nous ! Le fait que quelqu'un vote aux élections municipales chez
nous et que, un an avant ou un an après, il vote, par exemple, à une élection
municipale dans le Bade-Wurtemberg ne fausse rien dans la vie politique
française ; simplement, on lui laisse une capacité plus grande. Et de quel
droit pourrions-nous la lui retirer ?
Enfin, au fond, c'est presque la question de la conception de l'Europe qui se
pose. Dire qu'un Européen qui opte pour cette citoyenneté européenne en
s'inscrivant chez nous doit absolument renoncer à sa citoyenneté nationale,
c'est pousser loin la supranationalité. C'est couper le citoyen de sa base.
C'est plus ou moins avancer l'idée que l'Europe abolirait complètement les
appartenances nationales.
Or, moi qui, vous le savez bien, suis très favorable à la construction
européenne, je suis cependant convaincu que la construction européenne se fait
à partir des nations, qu'elle n'a pas vocation à abolir nos racines, à abolir
nos systèmes nationaux, et encore moins nos systèmes communaux. Encore une
fois, elle donne une dimension supplémentaire, qui s'exprime à travers cette
faculté de vote ; pour autant, elle ne doit pas être privative de droit.
J'y vois un peu - si j'ose le dire à quelqu'un dont je crois savoir qu'il est
ministre des cultes - une sorte d'intégrisme européen qui me surprend.
En résumé, nous n'avons ni qualité, ni raison, ni intérêt pour imposer cette
interdiction, qui nécessiterait un texte européen.
Ne légiférons pas au-delà de nos frontières. Donc, mon dieu ! faisons ce
qu'ont fait les autres, respectons les droits de chacun ! Et puis, si les
Allemands, par exemple, veulent prendre des dispositions pour que ceux qui
s'inscrivent en France ne puissent plus voter en Allemagne, qu'ils le fassent !
Cela les regarde, c'est leur législation interne, ce n'est pas notre
affaire.
Nous dépasserions, sans aucune raison, le champ de notre pouvoir en adoptant
le texte qui nous est proposé. C'est pourquoi nous proposons de le
supprimer.
M. le président.
Monsieur le ministre, avant de vous demander l'avis du Gouvernement, puis-je
vous adresser une prière ? Celle de ne pas engager le débat sur cette
compétence à laquelle a fait allusion M. le rapporteur, car cela nous
entraînerait sans doute un peu loin !
(Sourires.)
Vous avez la parole, monsieur le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je ne pense pas être suspect d'intégrisme,
fût-il européen.
(Sourires.)
Véritablement, ce point m'avait échappé,
monsieur le rapporteur.
A titre personnel, il me paraît assez aberrant et contraire au principe
d'égalité que l'on donne à telle ou telle personne la possibilité de voter en
différents lieux ; c'est la négation du principe du suffrage universel.
C'est la loi nationale, et nous ne pouvons donc pas l'imposer aux autres,
dites-vous. Mais vers quelle identité européenne nous acheminons-nous ?
Voulons-nous une Europe républicaine, fondée sur quelques principes de base,
dont le principe d'égalité, - je ne parle pas de la laïcité, bien que j'y
tienne particulièrement - me paraît faire partie ?
On vote une fois, et non pas deux ou trois. On voit d'ailleurs très bien qui
pourrait voter deux ou trois fois ; tout le monde n'a pas une résidence dans
plusieurs communes !
Selon vous, cela ne faussera pas le résultat. Si, tout vote peut fausser une
élection.
Je me souviens qu'à une époque où Valéry Giscard d'Estaing était président de
la République, on avait demandé à François Mitterrand, qui était encore premier
secrétaire du parti socialiste, combien, selon lui, il fallait de voix pour
gouverner en France. Valéry Giscard d'Estaing disait alors qu'il fallait deux
voix sur trois. François Mitterrand, prenant un air songeur, avait dit qu'il
fallait 50 % des voix plus une. C'est cette voix, cette unique voix qui peut
fausser le résultat d'une élection.
M. Jacques Larché,
président de la commission,
et M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Pas en France !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Pourquoi pas en France ? Si un électeur du
Wurtemberg, avez-vous dit - ce peut être aussi un Finlandais, un Irlandais, un
Grec, etc. - fait pencher la balance, d'une certaine manière, il fausse le
vote. Et si ce n'est pas ici, c'est à Leonberg, ville jumelle de Belfort, à
Thessalonique ou ailleurs.
Le principe d'égalité est un principe auquel nous devrions rester attachés.
Cela étant, je vous ai fait part de mon point de vue, monsieur le rapporteur,
mais il est vrai - vous l'avez fort bien dit - que, si ce débat a un grand
intérêt intellectuel, son intérêt pratique est somme toute assez modeste.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Cet amendement tend à autoriser le double vote.
S'il est vrai que la présente directive est moins explicite que la directive «
élections européennes », le projet de loi du Gouvernement actuel, tout comme le
projet de loi du Gouvernement précédent, tend, lui, à l'interdire.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est le même !
M. Guy Allouche.
Il est vrai que le précédent gouvernement avait indiqué à l'Assemblée
nationale, lors de l'examen de la proposition de résolution de M. Fanton, qu'il
ne plaidait pas pour l'interdiction du double vote, car un contrôle serait trop
lourd à mettre en oeuvre pour les élections municipales, tout en aujoutant que
les législations nationales exigeaient un lien réel entre la collectivité
locale et le citoyen pour autoriser le vote, et qu'ainsi les risques de double
vote seraient limités.
Il n'y a donc aucune raison valable pour l'autoriser. C'est un principe de
base du droit électoral que d'interdire le double vote : un homme, une voix.
D'autant que le libre choix pour voter aux municipales n'est possible que dans
quatre Etats sur les quinze : la France, l'Italie, la Grèce et l'Espagne.
En outre, la décision du Conseil constitutionnel en date du 9 avril 1992,
saisi par le Président de la République, François Mitterrand, sur la base de
l'article 54 de la Constitution, précise dans son vingt-deuxième considérant -
décision publiée au
Journal officiel de la République française
du 11
avril 1992, page 5356 : « Considérant que les modalités à arrêter auront pour
objet de fixer les règles applicables à l'exercice du droit de vote et
d'éligibilité ; qu'au nombre de celles-ci figurent notamment la preuve de la
jouissance des droits civiques dans l'Etat d'origine, la durée de résidence
dans l'Etat dont l'intéressé n'est pas le ressortissant ainsi que la
prohibition des doubles inscriptions ».
Par conséquent, dans son considérant, le Conseil constitutionnel avait déjà
prévu que le double vote n'était pas autorisé.
C'est la raison pour laquelle nous voterons contre, et nous appelons la Haute
Assemblée à respecter ce principe de droit républicain électoral.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Ceccaldi-Raynaud.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Je ne suis pas non plus un dévot de Maastricht ; mais ce n'est pas cette
considération qui m'anime.
Des arguments juridiques ont été donnés, qui sont excellents, mais il faut y
ajouter des arguments d'ordre moral. Il n'est pas moral qu'une même personne
puisse voter deux fois. Cela ne peut pas être accepté, et je ne fais pas mien
le raisonnement de M. le rapporteur s'agissant des conséquences de ce refus sur
la conception de l'Europe. A partir du moment où quelqu'un pourrait voter deux
ou trois fois dans des pays différents, il n'y aurait plus de pays et, bien au
contraire, c'est à ce moment-là que l'Europe aurait effacé les nations.
Par conséquent, je ne peux pas souscrire à un système qui, à défaut d'être
pire, ressemblerait en tout cas au système qui s'applique en Corse, où l'on
fait voter les morts !
(Sourires.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est lui qui le dit !
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Bien que sensible à l'argument de nos collègues socialistes et aux propos de
M. le ministre sur les citoyens qui voteront deux fois, je voterai néanmoins
l'amendement de la commission, car l'argumentation que j'ai développée tout à
l'heure sur la complémentarité que je recherchais entre l'enracinement national
et l'émergence d'une citoyenneté européenne m'incite à aller dans le sens de M.
le rapporteur.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Tout à l'heure, j'ai fait connaître mon
sentiment personnel. Au nom du Gouvernement, je m'en remets à la sagesse de la
Haute Assemblée.
M. Guy Cabanel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Je voterai l'amendement de la commission.
Il faut bien se persuader d'une chose : la construction européenne, je le
disais tout à l'heure à la tribune, est une association librement consentie de
nations souveraines.
Il est vrai que ce texte, qui existe déjà depuis un certain temps, en
introduisant l'alinéa
d,
tend à faire prédominer une disposition
française qui n'est pas retenue dans certaines transpositions de la directive
par d'autres pays de l'Union. Nous sommes donc en train, nous Français, de
faire une loi supranationale.
Bien que je sois, moi aussi, choqué par le fait que quelqu'un puisse voter
deux fois, force est de constater que, si l'Allemagne, le Bade-Wurtemberg ou
l'Italie, par exemple, ne veulent pas sanctionner cette pratique, nous sommes
mal placés pour demander à un citoyen d'un autre pays de l'Union de fournir une
déclaration écrite telle que prévue au paragraphe
d
du texte proposé
pour l'article L.O. 227-4. Nous nous engagerions alors dans la voie de la
supranationalité, et nous ferions preuve d'une certaine audace de
supranationalité française.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je comprends très bien qu'un citoyen européen résidant en France et non
français veuille voter en France là où il a sa résidence continue et que, par
ailleurs, il vote également là où il a ses racines.
Seulement, il faut qu'il y ait une égalité de traitement entre tous les
citoyens de l'Union européenne. Or, nombreux sont les Français qui sont obligés
de voter là où ils habitent, rayés qu'ils ont été des listes du village où ils
ont leurs racines parce qu'ils n'y ont pas leur résidence, alors qu'ils
auraient aimé continuer à y voter.
Il faut donc qu'il y ait égalité de traitement, et puisqu'un Français ne peut
pas voter là où il a sa résidence principale et ses intérêts professionnels, et
dans la commune de son origine, il faut également refuser ce droit aux
résidents non nationaux membres de l'Union européenne.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Pour conclure, je voudrais indiquer à M. Allouche qu'il faut
se méfier des citations de considérants de décisions de justice ou d'autorités
quelles qu'elles soient : ce qui compte c'est le dispositif. Un considérant
peut être clair mais il peut donner lieu à des divergences d'interprétation.
Pour ma part, j'interprète le considérant que vous avez cité comme signifiant
qu'il ne doit pas y avoir de double inscription en France, ce qui correspond à
notre culture, un point c'est tout. Je ne pense pas que l'on se soit soucié de
savoir s'il existait une double inscription en dehors des frontières de notre
pays.
En ce qui concerne l'idée d'égalité, je reviens, monsieur le ministre, sur
notre débat un peu philosophique, car j'ai aimé vous entendre parler de
l'égalité des citoyens européens. En effet, la citoyenneté européenne est un
but, mais elle n'est pas une réalité. Certes, nous la construisons pas à pas,
mais elle est encore vagissante, il faut bien le reconnaître, et je ne suis pas
certain que vous soyez de ceux qui souhaitent accélérer outre mesure le
processus !
Mais, en l'occurrence, vous franchissez le pas. En effet quand vous parlez de
l'égalité entre les citoyens européens, vous posez un principe qui ne figure
dans aucun traité. Il y a égalité entre les citoyens d'une même nation, mais il
n'est écrit nulle part qu'il doit y avoir égalité entre les citoyens de l'Union
européenne. C'est un idéal, auquel je souscris personnellement, mais il est
loin d'être atteint. Lorsqu'il le sera, la supranationalité aura triomphé -
j'espère que M. Hamel m'écoute,...
M. Emmanuel Hamel.
Je vous écoute toujours, monsieur le rapporteur !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
... car cela ne correspond pas vraiment à ses souhaits - et
notre amendement tient justement compte du fait que nous en sommes encore très
loin.
Je ne crois d'ailleurs pas, pour ma part, qu'il soit souhaitable que la
construction européenne se fasse sur les ruines de nos appartenances
nationales. Telle est ma conception ; ne parlons donc pas de cette égalité
entre citoyens de l'Union européenne.
Quant à l'égalité dont a parlé M. Dreyfus-Schmidt, j'avoue que je ne comprends
pas très bien. En effet, ce qui serait inégal, ce serait justement de refuser
aux ressortissants des autres pays de l'Union européenne ce qui est accordé
chez eux, puisque presque tous les Etats membres ont transcrit la directive en
droit interne, aux citoyens français. Il s'agirait alors vraiment d'une
inégalité, car les Français bénéficieraient de cette faculté de double
inscription, tandis que les autres ressortissants de l'Union européenne se
verraient interdire cette possibilité chez nous, en vertu encore une fois d'un
texte purement national qui prétendrait faire la loi au-delà de nos frontières,
ce qui serait singulier.
D'ailleurs l'article L. 12 du code électoral dispose : « Les Français et les
Françaises établis hors de France et immatriculés au consulat de France
peuvent, sur leur demande, être inscrits sur la liste électorale de l'une des
communes suivantes :
« Commune de naissance ;
« Commune de leur dernier domicile... »
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Mais seulement de l'une de ces communes !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Vous n'en savez rien !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ah si !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Les législations d'autres Etats de l'Union ne l'interdisent
pas ! Encore une fois, ne légiférons pas pour les autres, et puisque les autres
n'y ont pas vu d'inconvénient et nous accordent ces possibilités, de quel droit
allons-nous les leur refuser ?
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
C'est différent pour nous !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Je m'étonne de vous entendre dire, monsieur le rapporteur, que vous attachez
une importance toute relative à des considérants d'une décision du Conseil
constitutionnel.
Il m'étonnerait que le Conseil, dans sa décision, n'ait évoqué que la double
inscription en France, car, pour s'inscrire, il faut avoir une résidence
principale et, sans revenir sur le débat antérieur, quel est le Français qui
pourrait s'inscrire dans deux communes ? Je ne crois donc pas que le Conseil
ait visé une double inscription pour les Français.
Sincèrement, monsieur le rapporteur, votre argument me paraît spécieux,
pardonnez-moi de vous le dire.
Le texte en question vise les citoyens de l'Union européenne. Il est
d'ailleurs précisé, juste avant, que l'intéressé doit jouir de ses droits
civiques dans son pays d'origine en prohibant les doubles inscriptions dans son
pays d'origine et dans le pays où il réside.
C'est ainsi qu'il faut comprendre ce considérant. Un Français résidant en
France ne peut être inscrit sur deux listes électorales, pour des élections
municipales notamment, tout le monde le sait !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Il est adopté contre l'avis de quelques élus du RPR !
M. Emmanuel Hamel.
Malheureusement minoritaires !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L.O. 227-4 du
code électoral.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L.O. 227-5 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de supprimer
le texte présenté par cet article pour l'article L.O. 227-5 du code
électoral.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, le texte proposé pour l'article L.O. 227-5 du code électoral
est supprimé.
ARTICLE L.O. 227-6 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de supprimer
le texte présenté par cet article pour l'article L.O. 227-6 du code
électoral.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit également d'un amendement de conséquence.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, le texte proposé pour l'article L.O. 227-6 du code électoral
est supprimé.
ARTICLE L.O. 227-7 DU CODE ÉLECTORAL
M. le président.
Par amendement n° 9, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le texte présenté par cet article pour l'article L.O. 227-7 du code
électoral :
«
Art. L.O. 227-7. -
Est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000
francs d'amende :
«
a)
Le fait de s'être fait inscrire sur la liste électorale
complémentaire sous une fausse résidence, sous de faux noms ou de fausses
qualités, ou d'avoir dissimulé, en se faisant inscrire, une incapacité
électorale dans l'Etat dont on est ressortissant ;
«
b)
Le fait d'avoir demandé et obtenu son inscription sur plusieurs
listes électorales complémentaires ;
«
c)
Toute fraude dans la délivrance ou la production d'un certificat
d'inscription ou de radiation des listes électorales complémentaires ;
«
d)
Le fait de s'être fait inscrire sur une liste électorale
complémentaire ou d'avoir tenté de le faire, à l'aide de déclarations
frauduleuses ou de faux certificats, et de faire indûment inscrire ou radier ou
de tenter de le faire, à l'aide des mêmes moyens, une autre personne. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement d'ordre rédactionnel prenant en
compte la nouvelle rédaction du code pénal.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, le texte proposé pour l'article L.O. 222-7 du code électoral
est ainsi rédigé.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Chapitre II
Des règles spécifiques d'éligibilité
des ressortissants d'un Etat membre
de la Communauté européenne autre que la France
M. le président.
Par amendement n° 10, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans cet
intitulé, de remplacer les mots : « d'un Etat membre de la Communauté
européenne » par les mots : « d'un Etat membre de l'Union européenne ».
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du chapitre II est ainsi modifié.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 228-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L. O. 228-1. -
Sont en outre éligibles au conseil municipal ou
au Conseil de Paris les ressortissants des Etats membres de la Communauté
européenne autres que la France qui :
«
a)
Soit sont inscrits sur la liste électorale complémentaire de la
commune ;
«
b)
Soit remplissent les conditions légales autres que la nationalité
française pour être électeurs et être inscrits sur une liste électorale
complémentaire en France et sont inscrits au rôle d'une des contributions
directes de la commune ou justifient qu'ils devaient y être inscrits au 1er
janvier de l'année de l'élection. »
Par amendement n° 11, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article
L.O. 228-1 du code électoral :
« Sont en outre éligibles au conseil municipal ou au Conseil de Paris les
ressortissants des Etats membres de l'Union européenne autres que la France
dont l'Etat d'origine accorde aux Français qui y résident un droit
d'éligibilité équivalent dans les conditions prévues par le traité sur l'Union
européenne et selon sa législation nationale propre, et qui : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement, n° 12, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de
compléter le texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 228-1 du code
électoral par un alinéa ainsi rédigé :
« Les membres du Conseil de Paris qui n'ont pas la nationalité française ne
peuvent pas siéger à ce conseil lorsqu'il se réunit en qualité de conseil
général. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 30, présenté par M.
Allouche et les membres du groupe socialiste et apparentés, et visant à
compléter le texte proposé par l'amendement n° 12 pour le dernier alinéa de
l'article L.O. 228-1 du code électoral par une phrase ainsi rédigée : « Dans ce
cas, ils sont remplacés par le candidat français venant immédiatement après le
dernier candidat élu de la liste sur laquelle ils se sont présentés à
l'élection au Conseil de Paris. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 12.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Cet amendement a trait au cas particulier des membres du
Conseil de Paris qui n'auraient pas la nationalité française et qui ne
pourraient pas siéger à ce conseil lorsqu'il se réunit en qualité de conseil
général.
Il s'agit donc du statut très particulier de la ville de Paris, ainsi que nos
collègues l'ont fait observer. Il convient effectivement de tenir compte de la
particularité de ce statut.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Allouche, pour défendre le sous-amendement n° 30.
M. Guy Allouche.
Il s'agit d'un sous-amendement de conséquence à l'amendement n° 12.
Nous avons pensé qu'il fallait assurer la permanence de l'effectif au Conseil
de Paris siégeant en qualité de conseil général. Etant donné qu'il y aura
peut-être un jour des conséquences d'ordre politique quant à l'équilibre des
forces en présence au Conseil de Paris, il nous a paru nécessaire de faire en
sorte que les conseillers de Paris européens non français qui y siègent soient
remplacés par des conseillers français lorsque le Conseil de Paris siège en
qualité de conseil général.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 30 ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je l'ai rappelé tout à l'heure ; je crois être, avec la
permission de M. Allouche, le père naturel de cet enfant dont il est le père
légitime et je ne puis donc, dans ces conditions, que l'aimer encore plus !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
On ne s'en vante pas, en général !
(Sourires.)
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Certes, mais dans ce domaine il y a des exceptions ! Vous
savez, les moeurs évoluent rapidement !
Quoi qu'il en soit, la commission accepte le sous-amendement n° 30.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Le Gouvernement est favorable au sous-amendement
n° 30.
En revanche, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 12. En effet,
cet amendement, qui tend à interdire aux élus non français de participer aux
délibérations du Conseil de Paris quand il se réunit en qualité de conseil
général du département de Paris, se heurte à deux objections de fond et à une
objection de forme.
Sur le fond, le législateur intervient dans un texte qui s'intègre dans
l'article 88-3 de la Constitution. La loi organique règle les conditions dans
lesquelles le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales peut
être accordé aux citoyens de l'Union résidant en France, aux termes de la
Constitution. Si le législateur intervenait en cette matière qui touche à
l'organisation des collectivités territoriales - et à l'organisation de deux
d'entre elles au moins, la ville de Paris et le département de Paris - qui
relève de la loi simple, il excèderait sa compétence.
On pourrait dire aussi, à certains égards, que l'équilibre des forces au sein
du Conseil de Paris se trouverait modifié par l'exclusion des élus qui n'ont
pas la nationalité française. Il est vrai que leur remplacement par des
conseillers français est une réponse à cet argument de fond.
S'agissant de la forme, ce sujet étant étranger au droit électoral, la
disposition en cause aurait sa place non pas dans le code électoral, mais dans
le code général des collectivités territoriales aux articles relatifs au
fonctionnement du Conseil de Paris siégant en qualité de conseil général.
Telles sont les raisons pour lesquelles je ne peux que donner un avis
défavorable à l'amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 30.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Je demande la parole pour explication de
vote.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
On ne peut pas accepter le sous-amendement
sans être favorable à l'amendement.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Les deux sont liés !
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Nous avons longuement discuté ce point ce
matin en commission.
Dans un premier temps, nous nous sommes fondés sur un arrêt du Conseil d'Etat
qui ne semblait pas faire de différence : il concernait un ancien maire de
Paris qui était en même temps conseiller général de Corrèze, autant que je me
souvienne, et qui, de ce fait, avait vu sa situation de maire de Paris et de
conseiller général de Paris contestée. Le Conseil d'Etat avait trouvé une
formule selon laquelle les conseillers généraux de Paris n'étaient pas de vrais
conseillers généraux.
M. Jean-Jacques Hyest.
Oh !
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Eh bien oui ! Cela a été dit.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
C'était un peu cela.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Le conseil général de Paris n'est pas un conseil général !
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Je résume sommairement un arrêt du Conseil
d'Etat qui, évidemment, ne se permettrait pas de dire des choses de ce genre,
vous vous en doutez ! Il n'était donc pas un vrai conseiller général et le
problème ne se posait donc pas.
Un de nos collègues nous a fait remarquer - c'est pour cela que nous avons
modifié notre position - que la loi de 1982 réformant le statut de Paris est
venue modifier la situation juridique, tout au moins apporter des précisions,
en opérant très nettement la distinction et en indiquant bien qu'il y a, dans
la personne élue au Conseil de Paris, une double personnalité, une double
fonction : elle est à la fois conseiller municipal et conseiller général. La
Constitution nous permet de donner la qualité de conseiller municipal à des
ressortissants communautaires. La loi de 1982 dispose : « Outre la commune de
Paris, le territoire de la ville de Paris recouvre une seconde collectivité
territoriale, le département de Paris. Les affaires de ces collectivités sont
réglées par les délibérations d'une même assemblée ».
Le problème se pose donc de savoir, pour éviter des contentieux éventuels, si
le conseiller municipal d'origine communautaire peut siéger au Conseil de Paris
lorsqu'il se réunit en qualité de conseil général.
Après avoir beaucoup réfléchi, nous avons estimé qu'il ne le pouvait pas. Nous
n'avons pas, je dois le dire très honnêtement, de certitude absolue, mais cette
solution nous paraissait, du point de vue juridique, la plus correcte. Par voie
de conséquence, nous en avons déduit que, pour des raisons d'équilibre, il
fallait prévoir le remplacement de ce conseiller dans un certain nombre de cas.
Tel est l'objet du sous-amendement n° 30 de M. Allouche.
Il existe donc bien un lien intellectuel entre l'amendement et le
sous-amendement.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il est vrai que, là encore, nous nous sommes heurtés à une
querelle quelque peu byzantine. C'est comme Dieu en trois personnes ! Il s'agit
d'un élu qui est non seulement conseiller municipal, mais aussi conseiller
général. Il est très difficile de démêler ce genre de querelle...
M. Guy Cabanel.
Ce n'est pas très républicain !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Pas très républicain, peut-être, encore que la
République...
Il faut adopter des dispositions claires. Il nous paraît tout de même qu'être
membre du Conseil de Paris quand celui-ci statue comme conseil municipal n'est
pas la même chose qu'en être membre quand il statue comme conseil général. Nous
avons donc pensé, à la demande des élus parisiens de la commission, qu'il
fallait proposer un texte spécial.
Ce dernier, qui excluait les Européens de la possibilité de participer au vote
lorsque le Conseil de Paris statue en tant que conseil général, risquait de
créer des vides, voire de renverser une majorité, dans l'hypothèse où celle-ci
n'aurait été acquise qu'à une ou deux voix, la majorité du conseil général
devenant différente de celle du conseil municipal, conséquence fâcheuse et
contestable !
Ainsi que nous le verrons tout à l'heure à propos des membres des conseils
municipaux qui participent aux élections sénatoriales, nous avons trouvé la
solution que j'exposais dans mon introduction et qui consiste à faire voter le
candidat français venant immédiatement après sur la même liste. Le système est
donc cohérent : c'est le sous-amendement n° 30 de M. Allouche.
Tout se tient et signifie clairement que le Conseil de Paris, quand il se
réunira en qualité de conseil général, sera composé un peu différemment
s'agissant de ses membres étrangers.
M. Philippe Richert.
C'est logique !
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 30.
M. Jean-Jacques Hyest.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Je considère que le Conseil de Paris est élu au cours d'élections municipales.
Il se trouve que l'on a confié à ce conseil municipal des fonctions qui sont
attribuées aux conseils généraux ; mais les élections se font au même
moment.
Est-il imaginable d'interdire à certains candidats, parce qu'ils sont
européens, d'intervenir sur le programme relatif au département ? Il me paraît
extrêmement difficile de faire une telle distinction !
De plus, l'argument selon lequel la loi de 1982 aurait rendu caduc l'arrêt du
Conseil d'Etat ne me paraît pas pertinent dans la mesure où cette loi de 1982 a
repris des dispositions qui existaient pour la ville de Paris dans le statut
antérieur et qui prévoyaient des fonctions différentes. Or il y avait toujours
un seul conseil municipal de Paris !
Je rappelle d'ailleurs à certains que la ville-département n'a pas existé
depuis la Constituante puisque le département de la Seine n'a été découpée
qu'en 1964.
Je considère que les élus du Conseil de Paris qui seraient membres de l'Union
européenne pourraient participer à toutes les délibérations. Mais, en même
temps, comme il se pose véritablement un problème constitutionnel, si
l'amendement est voté, il est évident que le Conseil constitutionnel aura à se
prononcer. C'est une précaution nécessaire parce qu'il pourrait en effet y
avoir des contentieux si l'on ne soulevait pas ce point de vue.
En ce qui me concerne, je suis défavorable à l'amendement n° 12 et au
sous-amendement n° 30, mais je m'abstiendrai lors du vote de ces textes pour
permettre au Conseil constitutionnel de nous départager.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je suis intéressé par le raisonnement que je viens d'entendre, à l'exception
de sa conclusion, parce que si tout le monde s'abstient, le Conseil
constitutionnel n'aura pas à nous départager !
M. Jean-Jacques Hyest.
Tout le monde ne s'abstiendra pas !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je ne comprends pas l'argument du Gouvernement.
M. le ministre nous dit, alors que nous sommes en train de discuter d'un
projet de loi organique, que le Conseil de Paris relève d'une loi simple. Or
c'est dans le texte même qui nous est proposé par le Gouvernement que l'on
parle du Conseil de Paris. Nous ne faisons donc, par le sous-amendement n° 30
et l'amendement n° 12 qui sont liés, que suivre le Gouvernement sur le terrain
qu'il nous a tracé ! C'est ma première observation.
Ensuite, le Gouvernement a bien fait d'évoquer le cas du Conseil de Paris,
compte tenu du statut hybride de celui-ci, qui est à la fois conseil municipal
et conseil général.
Personnellement, je ne vois aucun inconvénient à ce que des ressortissants de
l'Union européenne siègent au Conseil de Paris, même lorsqu'il statue en tant
que conseil général.
Je ne verrais même aucun inconvénient à ce que des étrangers ayant une
ancienneté certaine siègent dans les conseils municipaux ainsi qu'au conseil
municipal de Paris, mais nous risquons de voir les décisions du Conseil de
Paris statuant comme conseil général annulées parce que la Constitution ne
permet pas que des ressortissants de l'Union européenne non français siègent
autre part que dans un conseil municipal. Or il est évident que le Conseil de
Paris est, dans certains cas, autre chose qu'un conseil municipal !
Voilà pourquoi nous voterons, bien entendu, le sous-amendement n° 30 et
également l'amendement n° 12.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 30, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 12, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 230-2 ainsi
rédigé :
«
Art. L.O. 230-2. -
Ne peuvent être conseillers municipaux ni membres
du conseil de Paris les ressortissants des Etats membres de la Communauté
européenne autres que la France déchus du droit d'éligibilité dans leur Etat
d'origine. »
Par amendement n° 13, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par cet article pour l'article L.O. 230-2 du code électoral, de
remplacer les mots : « des Etats membres de la Communauté européenne » par les
mots : « des Etats membres de l'Union européenne ».
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 236-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L.O. 236-1.
- Tout conseiller municipal ou membre du conseil de
Paris ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne autre que la
France, qui pour une cause survenue postérieurement à son élection se trouve
dans le cas d'inéligibilité prévu par l'article L.O. 230-2, est déclaré
démissionnaire d'office par le représentant de l'Etat dans le département ou le
territoire. »
Par amendement n° 14, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par cet article pour l'article L.O. 236-1 du code électoral, de
remplacer les mots : « d'un Etat membre de la Communauté européenne » par les
mots : « d'un Etat membre de l'Union européenne ».
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 15, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, à la fin
du texte présenté par l'article 4 pour l'article L.O. 236-1 du code électoral,
de supprimer les mots : « ou le territoire ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
D'une manière en quelque sorte incidente, et avant même
d'aborder l'article du projet de loi organique qui prévoit l'applicabilité de
ce texte aux territoires d'outre-mer, nous sommes confrontés à ce problème.
Nous devons donc le traiter à ce moment de notre parcours.
J'ai indiqué tout à l'heure - j'évoque brièvement mon argumentation - qu'en
fait l'Assemblée de Polynésie française n'a pas été consultée. Elle s'est
saisie du problème et elle a émis un avis défavorable à cette applicabilité
automatique en faisant observer que le traité de Rome n'était applicable à la
Polynésie que sur quelques points expressément visés dans la IVe partie.
D'ailleurs, ce traité de Rome ne mentionne évidemment pas le sujet que nous
évoquons ce soir. En outre, la IVe partie n'a pas été modifiée par le traité
sur l'Union européenne, lequel n'est au demeurant pas modifié sur ce point par
le traité d'Amsterdam, qui reporte expressément aux calendes grecques - si
j'ose dire - les délibérations sur ces questions du statut et des relations
avec les territoires d'outre-mer.
Pour toutes ces raisons, on ne peut pas déclarer d'emblée que le texte est
applicable aux territoires d'outre-mer.
Notre collègue et ami M. Millaud, qui ne peut pas être ici parce qu'il est
actuellement souffrant, a beaucoup insisté pour que nous prenions ce point en
considération. Il a paru légitime à la commission de le faire.
Nous avons donc déjà adopté cet amendement n° 15 à l'article 4. Nous
retrouverons ultérieurement ce point de vue d'une manière plus officielle sur
l'ensemble du texte : il s'agit d'exclure les territoires d'outre-mer de
l'applicabilité de ce texte de transposition.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
L'ensemble du code électoral n'est pas
applicable de plein droit aux territoires d'outre-mer. Il ne traite que des
départements, qu'ils soient métropolitains ou d'outre-mer, et de la
collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Il n'est donc jamais fait mention des territoires d'outre-mer dans le code
électoral. La mention du « chef de territoire » à l'article en cause est donc
une erreur de plume.
Le Gouvernement est favorable, mais pour une autre raison que celle de M. le
rapporteur, à la suppression de ladite mention.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 265-1 ainsi rédigé :
«
Art. L.O. 265-1. -
Chaque fois qu'une liste comporte la candidature
d'un ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne autre que la
France, la nationalité de celui-ci est portée sur la liste en regard de
l'indication de ses nom, prénoms, date et lieu de naissance.
« En outre, est exigée de l'intéressé la production :
«
a)
D'une déclaration certifiant qu'il n'est pas déchu du droit
d'éligibilité dans l'Etat dont il a la nationalité ;
«
b)
Des documents officiels qui justifient qu'il satisfait aux
conditions d'éligibilité posées par l'article L.O. 228-1.
« En cas de doute sur le contenu de la déclaration visée au
a
ci-dessus, est exigée, avant ou après le scrutin, la présentation d'une
attestation des autorités compétentes de l'Etat dont l'intéressé a la
nationalité, certifiant qu'il n'est pas déchu du droit d'éligibilité dans cet
Etat ou qu'une telle déchéance n'est pas connue desdites autorités. »
Par amendement n° 16, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L.O. 265-1 du
code électoral, de remplacer les mots : « d'un Etat membre de la Communauté
européenne » par les mots : « d'un Etat membre de l'Union européenne ».
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
M. le président.
Par amendement n° 17, M. Fauchon, au nom de la commission, propose d'insérer,
après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 256-1 ainsi rédigé :
«
Art. L.O. 256-1. -
Dans les communes visées à l'article L. 256,
chaque fois qu'une liste comporte la candidature d'un ressortissant d'un Etat
membre de l'Union européenne autre que la France, les dispositions de l'article
L.O. 265-1 sont applicables. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit de la disposition selon laquelle, lorsqu'ils
figurent sur des listes dans des communes au-delà de 3 500 habitants - où les
listes sont obligatoires -, les candidats européens doivent indiquer leur
nationalité.
Nous approuvons cette disposition.
Je dois dire au passage qu'il nous a été fait observer que ce serait une
discrimination. Nous répondrons que non. En effet, quand on voit une liste
électorale, on suppose que tout le monde est français. Si quelqu'un n'est pas
français, il faut donc l'indiquer : c'est le minimum d'information que l'on
doit aux électeurs. Cette mesure nous paraît donc bonne.
Nous pensons cependant qu'il faut l'étendre aux communes de 2 500 habitants et
au-delà, dans lesquelles il y a aussi présentation de listes, parce que cela
n'a pas été prévu et qu'il est bon que, sur ces listes-là comme sur celles des
communes de plus de 3 500 habitants, on indique la nationalité d'un candidat
qui ne serait pas français afin qu'il ne soit pas présumé français par les
électeurs, lesquels ne sont pas obligés de savoir de quelle nationalité est le
candidat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet
amendement.
En effet, dans les communes de plus de 3 500 habitants, en raison du mode de
scrutin, qui est applicable pour la désignation des conseillers municipaux, les
listes de candidats sont astreintes au dépôt d'une déclaration de candidature à
la préfecture ou à la sous-préfecture.
En revanche, dans les communes qui ont moins de 3 500 habitants, il n'existe
pas de dépôt de candidature puisque ces communes relèvent du chapitre II -
dispositions spéciales aux communes de moins de 3 500 habitants - du titre IV
du livre Ier du code électoral. Vouloir leur appliquer l'article L.O. 265-1
nouveau est donc peu cohérent, puisque aucune autorité n'est compétente pour
recevoir une déclaration de candidature et les pièces qui doivent
l'accompagner, parmi lesquelles celles qui sont mentionnées par votre
amendement. Ce serait donc une formalité impossible.
Au surplus, on notera que les documents relatifs au dépôt des cadidatures dans
les communes de plus de 3 500 habitants ne sont pas publics. Ils ont uniquement
pour objet de permettre à l'administration de s'assurer de la régularité de
chaque candidature figurant sur les listes de candidats et - comme il a été dit
à M. Cabanel - ce serait évidemment très discriminatoire. Pas plus que pour les
élections européennes, il n'est exigé que les bulletins de vote mentionnent la
nationalité des candidats dans les communes de plus de 3 500 habitants, pas
plus pour les élections municipales et dans ces types de communes, on ne peut
manifester de telles exigences.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi organique, après l'article 5.
Par amendement n° 25 rectifié, MM. Richert, Grignon, Hoeffel et Ostermann
proposent d'insérer, toujours après l'article 5, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Après l'article L.O. 265-1 du code électoral, il est inséré un article ainsi
rédigé :
«
Art. L.O. ... -
Dans l'hypothèse où la composition de la liste est
mixte, elle doit être proportionnellement représentative aux nombres de votants
inscrits sur les listes électorales ordinaires et complémentaires.
« Dans les communes où le nombre d'inscrits sur la liste électorale
complémentaire est égal ou supérieur à 30 % du nombre total de votants
inscrits, la représentativité des ressortissants de l'Union européenne sur une
liste ne peut excéder 30 % des sièges à pourvoir. Cette représentativité doit
également être respectée, après élection, pour le nombre de sièges pourvus.
»
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Tout à l'heure, M. le ministre disait que, somme toute, l'influence du vote
des étrangers de l'Union européenne résidant en France aux élections
municipales ne serait pas très importante puisque leur nombre était
relativement limité eu égard à l'ensemble des étrangers qui résident dans notre
pays.
Cela est certainement vrai dans les grandes agglomérations. Toutefois,
certaines régions de France - je pense en particulier à l'Alsace - connaissent
des situations un peu particulières.
En effet, depuis quelques années, en Allemagne, l'immobilier est nettement
plus cher qu'en France : il y est deux fois, presque trois fois plus cher.
Mais, dans le même temps, en raison de la proximité immédiate de ces deux pays
- il suffit de passer le Rhin -, parce que l'immobilier est rare en Allemagne
et parce que les moyens financiers dont disposent les ressortissants allemands
sont nettement plus importants que ceux dont bénéficient les Français, dans
certaines communes riveraines du Rhin, toutes les nouvelles résidences sont
construites par des Allemands. Il n'y a plus aucune transaction immobilière qui
ne soit le fait d'un Allemand. Les Français ne sont plus concurrentiels.
Monsieur le ministre, cela ne joue pas à la marge ; il ne s'agit pas que d'un
quelconque pourcentage. Aujourd'hui, dans certaines communes, les résidents
allemands représentent environ 30 %, voire plus, de la population. C'est la
raison pour laquelle j'ai proposé cet amendement aux termes duquel, dans ces
communes où le pourcentage de résidents allemands dépasserait un certain seuil,
que j'ai fixé à 30 %, on garantirait une présence minimum de Français dans les
conseils municipaux de façon que ceux-ci ne soient pas totalement dépourvus de
représentants nationaux pour gérer les affaires de la commune.
Certes, on va m'opposer - et la commission ne manquera pas de le faire -
l'argument selon lequel la directive ne prévoit pas cette dérogation et
qu'aujourd'hui n'est prévue qu'une dérogation sur le plan national. En effet,
il est prévu dans cette directive que, lorsque la proportion de citoyens de
l'Union qui résident dans un pays sans en avoir la nationalité dépasse un quota
de 20 %, des mesures sont prises pour réserver une représentation minimum aux
ressortissants du pays.
Certes, cela arrange bien le Luxembourg, qui est pour ainsi dire une
ville-pays, mais on ne pensait pas que le problème pourrait se poser aussi
rapidement pour un certain nombre de communes riveraines, peut-être un peu en
marge. Il ne faudrait pas donner à ces communes le sentiment que l'on ne prend
pas en compte la volonté de démontrer leur appartenance nationale manifestée
par les personnes qui y habitent.
L'amendement que je défends est soutenu par l'ensemble des parlementaires
alsaciens, MM. Grignon, Hoeffel et Ostermann, qui l'ont cosigné, mais aussi MM.
Eckenspieller et Lorrain.
Je souhaite que cette spécificité de notre région soit prise en compte,
d'autant que l'Alsace, vous le savez, n'a pas rechigné pour apporter largement
sa contribution à la ratification du traité de Maastricht. Nous sommes des
Européens convaincus. Nous sommes plus que d'autres attachés à la construction
européenne, mais nous souhaitons aussi, dans les affaires de nos communes,
pouvoir continuer à dire notre mot.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
La commission ne peut malheureusement pas vous suivre,
monsieur Richert.
Vous avez fait allusion aux traditions de l'Alsace, à la place de cette
province dans notre histoire, à ce qu'elle a été, à ce qu'elle est et à ce
qu'elle continuera d'être, au rôle, certainement éminent, qu'elle jouera dans
la construction européenne. Je suis un peu Alsacien de coeur.
M. Philippe Richert.
Largement !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il nous arrive d'ailleurs de débattre des traditions et du
folklore alsaciens, sur lesquels j'en sais aussi long que vous, mon cher
collègue, et même certaines fois...
Malheureusement, quelle que soit notre sympathie pour cette province qui nous
est très chère, nous ne pouvons pas entrer dans la voie tracée par cet
amendement pour deux raisons.
Tout d'abord, ce serait créer une dérogation qui n'existe pas dans la
directive. Ensuite, cette mesure n'est pas nécessaire. Cette seconde raison
serait d'ailleurs suffisante à elle seule et c'est peut-être la meilleure. Mais
je vais malgré tout expliciter la première.
Le chapitre III de la directive prévoit des dispositions dérogatoires et
transitoires. Son article 12 dispose que, « si dans un Etat membre, à la date
du 1er janvier 1996, la proportion de citoyens de l'Union qui y résident - dans
l'Etat et non pas dans la commune - sans en avoir la nationalité et qui ont
atteint l'âge de vote dépasse 20 % de l'ensemble des citoyens de l'Union en âge
de voter et qui y résident, cet Etat membre peut par dérogation à la présente
directive... ». Suit une série de dispositions particulières.
Dès lors que la directive a envisagé le dépassement d'un certain quota
national pour autoriser des mesures particulières alors qu'elle n'a pas
envisagé le dépassement d'un quota communal, si nous, nous prévoyons ce
dépassement d'un quota communal, nous allons créer une mesure discriminatoire
non conforme à la directive. Je ne crois pas que, juridiquement, nous puissions
le faire.
Par ailleurs, j'estime que cette mesure n'est pas nécessaire.
Nous rejoignons ici un problème sur lequel j'ai moi-même « buté » dans mon
travail préparatoire de rapporteur :
quid
des conseils municipaux dans lesquels il y aurait tant d'éléments
étrangers que leur fonctionnement serait dénaturé ? On se situe, bien entendu,
dans l'hypothèse où ils ne seraient pas acceptés, parce que nous sommes en
démocratie et que, si des conseillers étrangers sont élus, il faut croire que
les électeurs de la commune qui les connaissent bien n'y ont pas vu pas
d'inconvénient. On pourrait se contenter de dire : respectons la démocratie
!
Mais il arrive que la démocratie erre ou crée des situations difficiles à
gérer. Dans le cas présent, il existe un dispositif classique qui s'applique à
toutes les communes : la dissolution d'un conseil municipal peut avoir lieu par
décret lorsqu'il n'est plus en état de fonctionner.
La jurisprudence interprète cette disposition en visant en particulier deux
hypothèses : d'une part, l'existence d'une cause qui empêche d'une manière
rédhibitoire l'élection de l'exécutif ; d'autre part, l'existence d'une cause
qui empêche irrémédiablement le fonctionnement normal du conseil municipal.
Eliminons d'emblée l'hypothèse selon laquelle un conseil municipal ne
compterait que des étrangers. En effet, ce conseil municipal serait
ipso facto
paralysé, car un étranger ne peut être maire ni adjoint au
maire.
En revanche, s'il se trouve qu'une minorité ou un certain nombre de Français
membres d'un conseil municipal estiment - il leur revient d'en juger - que la
situation est insupportable, ils ont le choix entre différentes façons
d'entraver le fonctionnement de leur conseil municipal. Ils peuvent tout
simplement refuser d'accepter les fonctions de maire, ou alors, si le maire a
déjà été élu, ils peuvent démissionner en masse. D'autres possibilités peuvent
être imaginées, mais tout cela fait que le préfet saisi engage la procédure
normale et que l'on aboutit à la prise en Conseil d'Etat d'un décret de
dissolution du conseil municipal.
Par conséquent, le problème évoqué par M. Richert, qu'il se présente
concrètement ou non, ne sera pas sans solution. Or, lorsqu'il existe déjà une
solution à un certain type de problèmes, il est toujours dangereux d'essayer
d'en trouver une autre, car, dès lors, on risque de créer des distorsions
rédactionnelles ou de procédure.
A partir du moment où il existe une solution d'application générale répondant
à votre inquiétude, monsieur Richert, je pense qu'il faut s'en contenter et ne
pas prendre une disposition particulière qui serait par ailleurs, comme je le
disais au début de mon propos, en contradiction avec la directive qu'il s'agit
de transposer en droit interne.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
J'ai écouté avec intérêt M. Richert, pour toutes
les raisons qu'il devine.
En effet, en tant qu'habitant de Belfort, ville qui fait historiquement partie
de l'Alsace, je suis de près les mouvements de l'identité alsacienne, dont je
n'oublie pas qu'elle fut une identité républicaine en terre rhénane ; c'est là
peut-être son plus beau titre de gloire et de rayonnement.
J'ai donc bien écouté votre propos, monsieur Richert, mais je crois, très
franchement, que le proverbe « donner et retenir ne vaut » trouve en
l'occurrence matière à s'appliquer, et ce en raison de l'existence de deux
obstacles juridiques sur lesquels je voudrais attirer votre attention.
Tout d'abord, ni la directive ni le traité n'autorisent une formule telle que
celle que vous préconisez. Les étrangers communautaires doivent jouir dans leur
Etat de résidence des droits de vote et d'éligibilité dans les mêmes conditions
que les électeurs de cet Etat.
Bien naturellement, certaines dispositions prévoient que des mesures
dérogatoires peuvent être prises, à condition d'être appropriées, nécessaires
et proportionnées à l'objectif. Or il n'est ni approprié, ni nécessaire, ni
proportionné à l'objectif de limiter le nombre des candidats communautaires au
mandat de conseiller municipal puisque, d'ores et déjà, on a précisé que le
maire, de même d'ailleurs que l'adjoint, ne pouvait être un étranger
communautaire.
Pour les élections municipales, il faut considérer le corps électoral comme un
tout, même s'il est élargi à des ressortissants d'autres Etats. La
jurisprudence du Conseil constitutionnel est claire : dans sa décision du 18
novembre 1982, il s'est opposé à la division par catégorie des électeurs et des
éligibles en sanctionnant les dispositions d'une loi instaurant un quota en
faveur des femmes, au nom précisément de l'unité du collège électoral.
Juridiquement, je crois donc que l'amendement n° 25 rectifié n'est recevable
ni au regard du droit communautaire ni au regard de notre droit interne.
Je vois bien le problème que vous posez. Mais je pense qu'il faut se placer
dans la perspective que j'indiquais tout à l'heure. L'Alsace ne manque pas
d'atouts, elle sait séduire et elle saura retenir. Comme je le disais tout à
l'heure, le vin est tiré, monsieur le sénateur, il faut le boire !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25 rectifié.
M. André Bohl.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bohl.
M. André Bohl.
M. le ministre a rappelé qu'à côté de l'Alsace il y a Belfort, mais il y a
aussi la Moselle, et, à côté de la Moselle, il y a la Meuse.
Le problème posé est un problème de structure communale.
Permettez-moi de citer un exemple. La Moselle compte 1 million d'habitants, le
Land de Sarre compte également 1 million d'habitants. Ce Land comprend 52
communes, la Moselle 718.
La commune que j'ai l'honneur de représenter compte 15 000 habitants, et 7 800
électeurs. A la suite de l'adoption du dispositif proposé, s'y ajouteront 900
électeurs potentiels supplémentaires, des adultes de plus de dix-huit ans, qui
pourront s'inscrire sur les listes électorales, ce qui représentera une
incidence de 11 % ; ce n'est pas terrible !
En revanche, je pourrais donner l'exemple de villages qui comptent 85
électeurs. Il est possible d'imaginer qu'à la suite du vote de la loi il y ait
une grande majorité d'électeurs étrangers dans ces villages. Que se
passera-t-il dans ces cas particuliers ?
Je souhaiterais que le ministère de l'intérieur examine toutes ces situations
car il ne faut tout de même pas oublier que nous sommes dans un domaine
extrêmement sensible. D'ailleurs, le résultat des dernières élections devrait,
me semble-t-il, inciter à quelques réflexions.
M. Philippe Richert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
J'ai bien entendu les deux arguments développés à la fois par M. le rapporteur
et par M. le ministre, mais ni l'un ni l'autre ne m'ont tout à fait
convaincu.
S'agissant du premier argument, à savoir que nous ne pouvons introduire de
discrimination, vous avez rappelé, monsieur le ministre, que le droit de vote
et d'éligibilité devait être le même pour les étrangers communautaires que pour
les ressortissants du pays, en l'occurrence les Français.
Mais en prévoyant que les étrangers ne pourront être ni maire ni adjoint, nous
introduisons bien des différences ! Nous établissons déjà une discrimination
et, lorsque nous expliquons aux Allemands qu'ils ne pourront être ni maires ni
adjoints, ils nous reprochent d'être racistes puisque nous n'acceptons pas
qu'ils assument les mêmes fonctions que nous !
Ainsi, on ne veut pas qu'il y ait de différence mais, dans la pratique, on en
institue déjà !
J'en viens au second argument, selon lequel nous devons rester en conformité
avec la directive. Certes, la directive ne prévoit pas de dispositif
dérogatoire lorsque le nombre d'étrangers dans nos communes dépassent un
certain seuil. Le cas est prévu sur le plan national mais pas à l'échelon des
communes.
Mais, tout à l'heure, M. le rapporteur disait que, de temps en temps, nous,
législateurs, devions être pragmatiques. Je reprends les propos que vous avez
tenus tout à l'heure, monsieur le rapporteur, dans la discussion pointue que
vous avez eue avec M. le ministre.
Donc, si la directive ne prévoit pas expressément ce dispositif, je me demande
s'il ne serait pas possible de l'envisager afin que, dans les communes
concernées, une représentation de Français puisse être assurée dans les
conseils municipaux en France.
Aujourd'hui, dans certaines communes d'Alsace, 30 à 40 % des habitants, sont
allemands. Dès lors, demain, on risque de voir siéger des conseils municipaux
où il n'y aura plus de Français. Cela pourrait faire resurgir, ici ou là, des
sentiments difficilement maîtrisables ; j'aimerais que nous gardions aussi cet
aspect des choses à l'esprit.
J'ai compris votre appel et je veux bien l'entrendre, mais il nous faut
prendre en compte cette situation d'une façon ou d'une autre. Tel est le
message que j'ai tenté de faire passer en déposant cet amendement.
Ainsi que mon ami M. Bohl l'a rappelé tout à l'heure, nous devons aussi, en
légiférant, songer à ce que l'avenir peut nous réserver.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Robert Schuman, où es-tu ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Monsieur Richert, vous avez bien voulu rappeler que j'avais
souhaité que l'on soit pragmatique. Mais j'évoquais alors des hypothèses où la
solution juridique n'était pas claire. J'ai même parlé par deux fois de « débat
juridique byzantin », où deux thèses juridiques peuvent être soutenues à
l'infini. C'est face à de telles situations que le pragmatisme me semble
requis.
Mais ici, notre première obligation est de respecter le cadre juridique qui
s'impose à nous : la Constitution, le traité et la directive. Or la directive
n'a pas ignoré ce problème des « quotas » : nous ne pouvons donc pas le traiter
d'une manière différente et créer une exception qu'elle n'a pas prévue.
Autrement dit, il n'y a pas ici, sur le plan juridique, matière à débat confus
ou byzantin : les choses sont parfaitement claires.
Cela étant, monsieur Richert, je suis sensible à ce que vous avez dit quant
aux difficultés que peuvent susciter certaines situations.
Cependant, il est caricatural d'évoquer des conseils où il n'y aurait que des
étrangers. A supposer que cela arrive, un tel conseil ne pourrait à l'évidence
pas fonctionner puisque le maire et les adjoints doivent être français. Dans un
tel cas, on irait tout droit à la dissolution !
Et même dans le cas d'une proportion sensible d'étrangers, il est probable
que, dans les faits, tout se passera très bien : si ces étrangers sont là,
c'est tout de même qu'ils auront été désignés par le suffrage universel ! Cela
ne relèvera certainement pas d'une opération du Saint-Esprit ! S'ils sont élus,
c'est probablement parce qu'ils participent à la vitalité de la commune, qu'ils
y jouent un rôle important, que les électeurs approuvent.
En tout état de cause, les ressortissants français, comme je l'ai dit tout à
l'heure, disposent de plusieurs armes, qu'il leur suffit d'employer : ils
peuvent refuser le siège de maire ; s'ils l'ont accepté, ils peuvent
démissionner. Par conséquent, pour créer une situation débouchant sur la
dissolution du conseil, mille moyens leur sont offerts.
Il faut laisser jouer la souplesse qui caractérise ce mécanisme parce qu'elle
comporte des effets de dissuasion. De ce fait, monsieur Richert, les étrangers
dont vous parlez éviteront de se comporter avec l'arrogance que vous paraissez
craindre, sachant que la menace de la dissolution existe.
En conclusion, il ne me semble pas nécessaire ni correct du point de vue de la
directive d'ajouter un moyen à ceux dont les ressortissants français disposent
déjà pour aboutir à la dissolution du conseil municipal.
M. le président.
Monsieur Richert, l'amendement n° 25 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Richert.
Je le retire, monsieur le président. Je remercie M. le rapporteur des
explications qu'il vient de me donner. J'ai été très sensible à la qualité
d'écoute dont il a fait preuve, de même que M. le ministre.
Il ne s'agit en aucune façon de mettre en doute la volonté de participation de
nos voisins et amis allemands, que je rencontre régulièrement. Il reste que,
sur le terrain, l'augmentation très sensible de leur présence fait naître, de
temps en temps, chez certains, un sentiment de « ne plus être chez soi ». On ne
peut pas le négliger.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants, du RPR et du RDSE.)
M. le président.
L'amendement n° 25 rectifié est retiré.
Chapitre III
Du collège électoral sénatorial
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - Il est inséré dans le code électoral un article L. O. 286-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L. O. 286-1. -
Les conseillers municipaux et les membres du
Conseil de Paris qui n'ont pas la nationalité française ne peuvent ni être
membres à un titre quelconque du collège électoral sénatorial ni participer à
l'élection à ce collège de délégués, de délégués supplémentaires et de
suppléants. »
- (Adopté.)
Article additionnel après l'article 6
M. le président.
Par amendement n° 28 rectifié, M. Allouche et les membres du groupe socialiste
et apparentés proposent d'insérer, après l'article 6, un article additionnel
ainsi rédigé :
« Après l'article L. O. 286-1, il est inséré dans le code électoral un article
ainsi rédigé :
«
Art. L.O. ... -
Dans les communes dont tous les conseillers
municipaux sont délégués de droit, les conseillers municipaux qui n'ont pas la
nationalité française sont remplacés au collège électoral des sénateurs et lors
de la désignation des délégués supplémentaires et suppléants par les candidats
français venant immédiatement après le dernier candidat élu de la liste sur
laquelle ils se sont présentés à l'élection municipale. »
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Cet amendement reprend en fait l'argumentation développée par M. le rapporteur
lors de la discussion générale.
Nous pensons qu'il ne faut pas amputer le collège électoral sénatorial d'un
département d'un nombre quelconque de voix, d'autant que le vote est
obligatoire s'agissant des élections sénatoriales.
Un exemple récent nous conforte dans cette idée : l'un de nos collègues, M.
Claude Haut, a été réélu récemment, à la suite d'une invalidation, à une seule
voix. C'est dire que chaque voix compte !
N'oublions pas que nous légiférons pour l'avenir. Or il est souhaitable que de
plus en plus de ressortissants d'autres Etats de l'Union européenne figurent
sur nos listes. Si l'on devait pénaliser la liste ou la formation politique qui
inclut des Européens non français, nous irions à l'encontre du but
recherché.
Pour que soit maintenue la totalité du collège électoral sénatorial, nous
proposons cet amendement, qui permet de respecter tant l'équilibre politique de
la liste que l'ensemble du collège électoral du département concerné.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Pour des raisons que j'ai déjà eu l'honneur d'invoquer,
monsieur le président, en manipulant des termes de filiation qui n'étaient
peut-être pas à propos,...
M. le président.
Audacieux, tout au moins !
(Sourires.)
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
... nous sommes favorables à cet amendement, auquel nous ne
sommes pas non plus tout à fait étrangers.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 28 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. le rapporteur nous a dit à deux reprises qu'il n'était pas tout à fait
étranger à une proposition. Mais, à l'occasion de ce débat, nous ne faisons que
parler de personnes qui sont étrangères sans l'être tout à fait !
(Sourires.)
Cela dit, je voudrais faire une suggestion. Je pense que les précautions
qui sont prises là où il y a des listes devraient également l'être là où il n'y
en a pas. Le seul moyen d'éviter que soient éventuellement faussées les
élections sénatoriales, parce que des conseillers municipaux étrangers ne
voteraient pas pour la désignation des électeurs sénatoriaux, consiste à
prévoir, chaque fois qu'est élu un ressortissant de l'Union européenne non
français, quelle que soit la taille de la commune, la désignation à cette fin
d'un suppléant.
Cette solution n'a pas été retenue ici, mais elle pourrait l'être à
l'Assemblée nationale. C'est pourquoi je me permets de l'évoquer.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Nous avons écarté ce dispositif qui nous a paru
discriminatoire et, en vérité, assez surprenant. Il donnerait en effet aux
candidats étrangers la possibilité de se doter d'une sorte de caution
supplémentaire en présentant, en qualité de « suppléant », une personnalité qui
jouit éventuellement d'une considération particulière. Nous risquerions ainsi
de renforcer la candidature de cet étranger dans la mesure où les autres
candidats seraient privés de cette possibilité. Parfois, les suppléants ne vous
apportent pas de voix ou même vous en font perdre, c'est vrai. Mais il arrive
aussi qu'ils en apportent.
A vous suivre, monsieur Dreyfus-Schmidt, on introduirait une véritable
distorsion.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Mais, dans l'amendement, le suivant sur la liste est bien le suppléant !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Avec une liste, c'est tout à fait différent ! C'est la liste
tout entière qui se présente ! Là, vous donnez une sorte d'avantage à un
candidat étranger en lui permettant de dire aux électeurs : « Il y a moi et
puis, derrière moi, il y a M. Untel. » Cela ne pourrait que fausser l'égalité
entre les membres du collège électoral des sénateurs.
M. Guy Cabanel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Je suis très favorable à cet amendement n° 28 rectifié en ce qu'il vise les
communes de plus de 3 500 habitants, où le scrutin de liste permet en effet,
pour les opérations électorales sénatoriales, d'appeler, à la place de
l'étranger élu, un membre français de la liste figurant le plus près possible
de la personne écartée.
En revanche, je ne partage pas le point de vue de mon excellent collègue M.
Dreyfus-Schmidt. A l'écouter, on risquerait de majorer en quelque sorte la
position des membres étrangers. Peut-être n'est-il pas inutile de rappeler que,
dans les conseils municipaux où il n'y a pas de scrutin de liste, le fait
d'écarter les membres étrangers donnera peut-être un peu plus de poids aux
membres français ou, tout au moins, les incitera à venir remplir leur
mission.
En tout cas, je suis tout à fait favorable à cet amendement. J'avais
d'ailleurs moi-même insisté auprès de M. le rapporteur sur la nécessité de
trouver une solution. Ayant été pendant douze ans maire d'une commune où
résidaient beaucoup d'étrangers et alors que j'aurais eu plaisir à en
accueillir certains dans mon conseil municipal, j'aurais mal compris que la
présence d'élus étrangers constitue un obstacle au moment de désigner les
membres du collège électoral sénatorial. Surtout si je devais être candidat !
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié, accepté par la commission et le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi organique, après l'article 6.
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - Il est inséré dans le code électoral un article L.O 287-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L.O. 287-1.
- Lors de l'élection des délégués, des délégués
supplémentaires et des suppléants au collège électoral sénatorial, le choix des
conseillers municipaux ou des membres du Conseil de Paris ne peut porter sur
une personne qui n'a pas la nationalité française. » -
(Adopté.)
Chapitre IV
Des fonctions de maire et d'adjoint
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - Il est inséré dans le code général des collectivités territoriales
un article L.O. 2122-4-1 ainsi rédigé :
«
Art. L.O. 2122-4-1.
- Le conseiller municipal qui n'a pas la
nationalité française ne peut être élu maire ou adjoint, ni en exercer même
temporairement les fonctions. » -
(Adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - La section 3 du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la
deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complétée
par un article L.O. 2121-6-1 ainsi rédigé :
«
Art. L.O. 2121-6-1.
- Si, au sein d'un conseil municipal ou du
Conseil de Paris, le nombre de conseillers de nationalité française est
insuffisant pour permettre l'élection du maire et d'un adjoint, le conseil est
dissous de plein droit. »
Par amendement n° 18, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Cette disposition rejoint le débat que nous avons eu tout à
l'heure avec M. Richert, ce qui me permettra d'être bref.
Le texte prévoit assez bizarrement que « si, au sein d'un conseil municipal ou
du Conseil de Paris, le nombre de conseillers de nationalité française est
insuffisant pour permettre l'élection du maire et d'un adjoint, le conseil est
dissous de plein droit ».
Ce n'est pas la peine de le préciser puisque cela résulte de notre législation
générale. Dans un tel cas, on va nécessairement vers une dissolution. Il est
donc inutile d'ajouter une disposition qui a en outre une connotation un peu
désagréable, alors que le problème est résolu par le droit commun qui régit la
vie de nos municipalités.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec M. le
rapporteur.
L'article 9 vise à préciser qu'il doit y avoir une majorité de conseillers
ayant la nationalité française pour que le maire puisse être élu.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Il n'a jamais été question de cela !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
La dissolution « de plein droit » est une
procédure plus rapide que celle que nous connaissons tous et qui est assez
longue avant d'aboutir à la dissolution d'un conseil municipal.
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est vrai !
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Il m'arrive de présenter au conseil des
ministres des dissolutions de conseils municipaux. Celles-ci interviennent
généralement après deux ans de difficultés.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais je ne crois pas que
les choses puissent se passer comme vous le dites. Et je suis d'autant plus à
l'aise pour faire cette remarque que ce texte avait été élaboré sous un ancien
gouvernement.
Tout d'abord, que faut-il entendre par « insuffisant » ? Faut-il comprendre
qu'il n'y a pas de majorité ou que celle-ci existe mais n'est pas acceptée ?
L'interprétation du terme « insuffisant » provoquera à elle seule un
contentieux égal à celui que vous paraissez craindre.
Si c'est physiquement que le nombre de personne est insuffisant, alors,
l'issue est évidente puisque les étrangers ne peuvent pas être maires ni
adjoints. Dans ce cas, autant le dire clairement.
Je reviens à ce que je disais tout à l'heure à M. Richert : si l'insuffisance
provient de l'impossibilité de dégager une majorité, on se retrouve dans la
situation de tous les conseils municipaux qui ne réussissent pas à élire un
maire. Cela arrive régulièrement, et je ne vois rien là de nouveau. La
difficulté sera surmontée par la procédure habituelle.
Cet article ne doit donc absolument pas être adopté, surtout avec une telle
rédaction.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 9 est supprimé.
Article additionnel après l'article 9
M. le président.
Par amendement n° 19 rectifié, M. Fauchon, au nom de la commission, propose
d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé.
« Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 238-1, ainsi rédigé.
«
Art. L.O. 238-1. -
Le ressortissant d'un Etat de l'Union européenne
autre que la France ne peut être membre d'un conseil municipal en France et
membre dans un autre Etat de l'Union de l'organe délibérant d'une collectivité
territoriale de base au sens de la directive prise pour l'application de
l'article 8 B, paragraphe I, du Traité instituant la Communauté européenne.
« Si le ressortissant n'a pas démissionné d'un de ses deux mandats
incompatibles dans un délai de dix jours à compter du jour où l'incompatibilité
est connue, il est immédiatement déclaré démissionnaire par le préfet, sauf les
recours prévus à l'article L. 239. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit ici de poser le principe de non-cumul. Autant je ne
vois pas d'inconvénient à ce que l'on puisse être électeur dans différents
pays, autant je vois beaucoup d'inconvénients à ce que l'on puisse être en même
temps membre de conseils municipaux situés dans des pays différents. Etre
conseiller municipal, c'est assurer une fonction, c'est partager la vie de la
commune dans sa continuité. Il faut choisir : si l'on est conseiller municipal
ici, on ne l'est pas ailleurs.
Le principe a ici son importance, avec pour sanction la démission d'office.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je pense au professeur Duverger qui, en d'autres
temps, était député européen, élu en Italie, et qui aurait pu être maire en
France. Mais, pour revenir aux mandats municipaux, le Gouvernement n'émet
aucune objection sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi organique, après l'article 9.
Chapitre V
Dispositions diverses et finales
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - Il est inséré dans le code électoral un article L.O. 271-1 ainsi
rédigé :
« Art. L.O. 271-1. -
Lorsqu'ils sont inscrits sur la liste électorale
complémentaire de la commune établie en application de l'article L.O. 227-2,
les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne autre que la
France participent à l'élection des conseillers d'arrondissement dans les mêmes
conditions que les électeurs français. »
Par amendement n° 20, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par cet article pour l'article L.O. 271-1 du code électoral, de
remplacer les mots : « d'un Etat membre de la Communauté européenne » par les
mots : « d'un Etat membre de l'Union européenne ».
Il s'agit d'un amendement de coordination, accepté par le Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, ainsi modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
Art. 11. - Il est inséré dans le code des communes un article L.O. 151-3-1
ainsi rédigé :
« Art. L.O. 151-3-1. -
Lorsqu'ils sont inscrits sur la liste électorale
complémentaire de la commune établie en application de l'article L.O. 227-2 du
code électoral, les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne
autre que la France participent à l'élection de l'organe délibérant d'une
section de commune dans les mêmes conditions que les électeurs français. »
Par amendement n° 21, M. Fauchon, au nom de la commission, propose :
I. - De rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« Il est inséré dans le code général des collectivités territoriales un
article L.O. 2411-3-1 ainsi rédigé : »
II. - En conséquence, au début du second alinéa de cet article, de remplacer
la référence : « Art. L.O. 51-3-1. - » (du code des communes) par la référence
: « Art. L.O. 2411-3-1. - » (du code général des collectivités
territoriales).
III. - Dans le second alinéa de cet article, de remplacer les mots : « d'un
Etat membre de la Communauté européenne » par les mots : « d'un Etat membre de
l'Union européenne ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, ainsi modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - Les dispositions de la présente loi organique sont applicables
dans les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte.
»
Par amendement n° 22, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de
supprimer dans cet article les mots : « les territoires d'outre-mer et ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Nous revenons ici aux territoires d'outre-mer, question que
nous avons traitée tout à l'heure d'une manière incidente, je n'ai donc pas à y
revenir.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Le Gouvernement est défavorable à cet
amendement, et au terme d'un raisonnement assez simple.
Le Conseil d'Etat, saisi de ce texte, a fait connaître sans ambiguïté que la
présente loi organique rentrait dans la catégorie des lois de souveraineté,
lesquelles doivent s'appliquer sur tout le territoire de la République.
Au demeurant, l'article 88-3 de la Constitution indique formellement que les
dispositions de la loi organique prises pour l'application du traité de
Maastricht ont pour objet l'exercice du droit de vote et d'éligibilité aux
élections municipales des citoyens de l'Union « résidant en France ».
Si la Constitution n'exclut pas
a priori
des mesures propres - à
conditions qu'elles ne soient pas discriminatoires - aux territoires
d'outre-mer, il découle de l'article 88-3 que les étrangers communautaires
doivent pouvoir participer aux élections municipales et être éventuellement
élus partout « en France » - je souligne ces deux termes - où des élections
municipales peuvent être organisées. Donc, y compris dans les départements et
territoires d'outre-mer à Nouméa, à Cayenne et même, à
Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est une collectivité territoriale à statut
particulier, sous réserve qu'il y existe des communes, ce qui est le cas.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je suis un peu surpris de la résistance du Gouvernement, mais
je me souviens en effet qu'il avait recouru à une argumentation différente de
la mienne, que je rappelle maintenant à nos collègues.
Le traité de Rome n'est pas applicable
ipso jure
aux territoires
d'outre-mer. Il l'est en vertu d'une IVe partie qui énumère certains points
d'applicabilité. Or cette IVe partie ne comporte pas le sujet dont nous
traitons aujourd'hui. Le traité de Rome n'a pas été modifié par le traité sur
l'Union européenne ni d'ailleurs par le traité d'Amsterdam, non encore ratifié
mais qui a expressément renvoyé à plus tard ce genre de débat.
Comme nous l'a fait observer notre collègue M. Millaud s'agissant de
l'assemblée polynésienne, il n'y a pas lieu d'étendre aveuglément une telle
disposition, qui susciterait probablement bien plus de perturbations dans ces
terres lointaines et par ailleurs enchanteresses que le texte que nous
proposons.
Par conséquent, mes chers collègues, je vous demande de confirmer le vote que
vous avez émis tout à l'heure et de ne pas rendre ce texte applicable aux
territoires d'outre-mer.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le rapporteur, le traité de Rome a pour
objet de créer un marché commun ; il traite de questions économiques et
commerciales mais pas de la souveraineté politique ou du droit de vote.
Le traité de Maastricht a trait, précisément, au droit de vote et les textes
sont tout à fait formels, je vous les ai rappelés tout à l'heure, ils font
référence au droit de vote en France. Or, la France comprend aussi les
territoires d'outre-mer !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Je souhaite simplement rappeler que l'article 8 B, qui ouvre
ce droit d'éligibilité, a été intégré dans le traité de Rome. Par conséquent,
les dispositions du traité de Rome, dans son ensemble, doivent être respectées,
du moins nous semble-t-il.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Je suis en total désaccord avec ce point de vue.
Le traité de Rome a instauré une dérogation pour des raisons évidentes qui
tiennent, notamment, aux différences de niveaux de développement économique
entre les territoires d'outre-mer et la France métropolitaine.
Toutefois, s'agissant des droits de vote et d'éligibilité, il est évident que
les dispositions qui seront adoptées par le Parlement doivent s'appliquer sur
l'ensemble du territoire de la République. Sinon, ce serait très grave.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 22.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Lors de nos travaux en commission, j'ai indiqué les raisons pour lesquelles je
n'étais pas favorable à cet amendement. Je considère, en effet, que les
territoires d'outre-mer sont partie intégrante de la République française.
J'ai eu l'honneur de participer, au nom de la commission des lois, à une
mission en Polynésie française en compagnie de notre collègue M. Lanier.
Pendant près de deux semaines, nous avons entendu les principaux responsables
politiques et économiques de ce territoire. Or, ils n'ont eu de cesse de nous
dire avec beaucoup d'insistance qu'ils étaient fiers d'être Français, qu'ils
voulaient le rester et qu'ils étaient très attachés à la République
française.
Des dispositions économiques particulières évoquées par M. le ministre sont
prévues effectivement par les traités européens. Mais, en la circonstance, il
s'agit d'un exercice de souveraineté. La Polynésie française et les territoires
d'outre-mer font partie de la République française, et j'ai la faiblesse de
penser que ce texte s'applique à ces territoires.
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Monsieur le président, mon argumentation ne sera pas juridique et je ne vais
pas entrer dans le débat ouvert par M. le ministre. Pour avoir entendu, en
commission, l'un de nos collègues parler des territoires d'outre-mer, je pense
que l'on ne peut tout de même pas nier les appréhensions qui se font jour dans
ces territoires. Un des collègues de mon groupe, élu de la Réunion, qui est non
pas un territoire mais un département d'outre-mer, m'a demandé de ne pas
prendre part au vote et je n'ai pas pu le convaincre. Cela étant, je suis
enclin à suivre la commission sur ce point.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 12, ainsi modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - A titre transitoire et jusqu'au 1er mars 1999, les personnes
mentionnées à l'article L.O. 227-1 du code électoral peuvent demander leur
inscription sur une liste électorale complémentaire dans les conditions prévues
par les articles L. 31 à L. 35 dudit code. »
Par amendement n° 23, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de
compléter cet article par les mots : « dans leur rédaction en vigueur à la date
de publication de la présente loi organique ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Il nous a paru préférable de rappeler une règle générale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, ainsi modifié.
(L'article 13 est adopté.)
(M. Michel Dreyfus-Schmidt remplace M. Jacques Valade au fauteuil de la
présidence.)
PRÉSIDENCE
DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président
Intitulé du projet de loi organique
M. le président.
Par amendement n° 24, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit l'intitulé du projet de loi organique :
« Projet de loi organique déterminant les conditions d'application de
l'article 88-3 de la Constitution relatif à l'exercice par les seuls citoyens
de l'Union européenne résidant en France, autres que les ressortissants
français, du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales, et
portant transposition de la directive 94/80/CE du 19 décembre 1994. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 29, présenté par MM.
Dreyfus-Schmidt, Allouche et les membres du groupe socialiste et apparentés, et
tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 24 pour l'intitulé du projet
de loi organique, à supprimer le mot : « seuls ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 24.
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
Nous avons cru bon de revenir sur l'intitulé du projet de loi
organique pour ramasser les éléments essentiels qu'il convient d'indiquer par
avance au lecteur.
Au passage, je m'en explique dès maintenant, on nous invitera tout à l'heure,
dans un amendement déposé par MM. Dreyfus-Schmidt et Allouche, à supprimer le
mot : « seuls ». J'ai moi-même proposé de le supprimer partout où il figurait
dans le corps du projet de loi organique, mais ici, comme nous rappelons le
texte de la Constitution, je crois qu'il n'est pas inutile d'employer cette
expression.
M. le président.
La parole est à M. Allouche, pour défendre le sous-amendement n° 29.
M. Guy Allouche.
L'intitulé de ce projet de loi organique est certes conforme aux dispositions
de traité de Maastricht, mais je ne vous cacherai pas que M. Michel
Dreyfus-Schmidt et moi-même avons pensé que le terme « seuls » était redondant,
car la Constitution le prévoit déjà ainsi que la directive. Au reste, M. le
rapporteur vient d'indiquer qu'il avait proposé lui-même la suppression de ce
terme dans l'ensemble du texte, mais qu'il le maintenait pour l'intitulé. Or,
non seulement il est redondant, mais il est désagréable et je ne souhaite pas
que l'on introduise un terme discriminant dans l'intitulé d'un projet de loi.
Nos lois sont certes nationales, mais elles dépassent aussi nos frontières et,
compte tenu de tous les débats que nous avons eus depuis 1992, il serait
fâcheux d'insister sur cet aspect.
C'est la raison pour laquelle, sans reprendre toute l'argumentation ô combien
judicieuse ! de mon collègue et ami Michel-Dreyfus-Schmidt, je demande à la
Haute Assemblée de ne pas retenir le terme « seuls », car le reste de
l'intitulé suffit.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon,
rapporteur.
La commission est défavorable à ce sous-amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24 et sur le
sous-amendement n° 29 ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 29, repoussé par la commission et
accepté par le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 24.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Compte tenu du rejet de notre sous-amendement par la Haute Assemblée,
j'indique que nous voterons contre l'amendement de la commission.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du projet de loi organique est ainsi rédigé.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique, je donne la
parole à M. Fauchon, pour explication de vote.
M. Pierre Fauchon.
A l'issue d'un débat dont je me réjouis, après M. le ministre, qu'il ait été à
la fois, dense, sérieux et court, et auquel chacun a apporté sa contribution de
manière très utile, je veux dire à titre personnel que, si j'ai préféré
jusqu'ici, comme c'était d'ailleurs mon devoir de rapporteur, présenter notre
démarche en des termes purement techniques, je n'en suis pas moins heureux,
comme d'autres membres de mon groupe, M. Badré l'a dit tout à l'heure, d'avoir
pu contribuer au vote de ce texte par notre assemblée, d'autant qu'il me semble
avoir fait l'objet d'un certain consensus, ce qui est très satisfaisant.
J'en suis très heureux pour deux raisons, l'une européenne, l'autre
municipale, et, dirai-je, « franco-française ».
La raison européenne tient évidemment, comme beaucoup, et notamment notre
collègue du groupe communiste républicain et citoyen, l'ont dit, au fait qu'il
semble de moins en moins supportable que la construction européenne soit une
affaire que je qualifierai de « technocratique » sans vouloir abuser du terme -
il faut bien des technocrates car sinon rien ne se ferait - de trop
intergouvernementale.
J'ai été amené, dans d'autres domaines, à prôner la reconnaissance, enfin, du
rôle du Parlement et la démocratisation du système. Aussi, tout ce qui
contribue à développer un tissu démocratique européen me paraît bon.
De ce point de vue, ouvrir nos conseils municipaux à des étrangers est un acte
de fraternité, de sympathie, de considération, même s'il est symbolique et ne
jouera probablement pas un grand rôle, sauf peut-être dans certaines régions
dont on nous a parlé et où, je l'espère, cela ne posera pas beaucoup de
problèmes. Je pense que le suffrage universel jouera son rôle et ne retiendra
que les bons, ceux dont on attend réellement une contribution.
Nous allons voter un très bon texte. Nous donnons enfin à la construction
européenne un peu de cette chair humaine qui lui fait si fâcheusement
défaut.
Si j'en juge par mon expérience, en tout cas dans mon département, par ce que
je peux savoir des conseils municipaux, notre vie publique est à un stade où
l'apport d'éléments étrangers constituera un enrichissement. En effet, ils
porteront sur nos problèmes un autre regard, ils les examineront avec des
critères différents, avec une expérience différente, un
background
comme
disent les Britanniques, avec une culture différente tout en étant proche. Je
crois que cette approche nous enrichira.
J'ai d'ailleurs souvent eu l'occasion de constater que les règles de la
démocratie, notamment sur le plan local, sont parfois observées avec beaucoup
plus de vigilance dans des pays voisins. Je pense à la Grande-Bretagne, à
l'Allemagne et aux Pays-Bas. Les ressortissants de ces Etats sont très
vigilants sur le fonctionnement de la démocratie locale, ils sont très actifs
lorsqu'ils participent à des délibérations. En revanche, dans notre pays, la
démocratie est tellement acquise qu'on la laisse quelquefois un peu ronronner.
L'intervention de ces éléments étrangers constituera un apport. Elle sera
peut-être l'occasion d'un renouveau dans les débats au sein des conseils
municipaux concernés. Pour ces conseils municipaux, ce sera aussi une bonne
chose. En conséquence, je serai très heureux de voter ce projet de loi.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
La participation aux élections municipales de nos communes françaises des
étrangers citoyens de l'un des Etats de l'Union européenne résidant en France
peut être un progrès humain pour nos villes, nos villages, et aussi un
témoignage de reconnaissance pour les Européens qui y vivent et, souvent, y
apportent générosité, solidarité, sympathie et dynamisme. Je voterai donc ce
texte.
En votant ce projet de loi organique, d'une portée réduite aux étrangers
européens et à eux seuls, je prouve que l'on peut en même temps avoir été et
être encore fondamentalement hostile au traité de Maastricht mais aussi
accepter, sur la voie de la solidarité européenne, des progrès humains et
civiques qui ne mettent pas en cause notre souveraineté nationale et les
intérêts fondamentaux de la France.
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Après ce que nous venons d'entendre à l'instant dans la bouche de notre
collègue M. Hamel, il n'y a rien de plus merveilleux, oserais-je dire !
Effectivement, un pas supplémentaire est fait en direction de cette Union
européenne, de cette intégration, de cette appartenance à cette communauté de
destins que nous sommes nombreux à appeler de nos voeux depuis longtemps et de
la mise en place d'une citoyenneté européenne.
Je ne reprendrai pas tous les arguments qui ont été développés, je fais miens
nombre d'entre eux.
Le groupe socialiste, au nom duquel je m'exprime, votera ce projet de loi même
s'il peut regretter que tel ou tel amendement ou sous-amendement, notamment
celui qui visait à supprimer l'adjectif « seuls » n'ait pas été retenu.
Cependant, nous sommes en première lecture. Ce texte va maintenant être
examiné par l'Assemblée nationale. Il serait surprenant que celle-ci l'adopte
dans les mêmes termes en première lecture.
Plusieurs sénateurs de l'Union centriste.
Pourquoi pas ?
M. Guy Allouche.
Si c'est le cas, tant mieux, je m'en réjouirai. Mais l'Assemblée nationale
fera sans doute valoir des arguments allant à l'encontre de quelques
dispositions introduites par le Sénat. Convaincus que ce texte reviendra devant
la Haute Assemblée, nous l'approuvons aujourd'hui. Nous nous enrichirons des
réflexions de nos collègues députés, et peut-être les esprits évolueront-ils de
part et d'autre. Le groupe socialiste votera donc ce projet de loi
organique.
M. le président.
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel.
Les non-inscrits voteront ce projet de loi, car il constitue une avancée
considérable pour l'unité de l'Union européenne.
Ce texte est important pour les Français de l'étranger que je représente. En
effet, depuis longtemps, les Français votent à l'étranger et il était
souhaitable qu'il y ait une réciprocité pour les étrangers en France. Jusqu'à
présent, la France était en retard, comme la Belgique et la Grèce. Ce projet de
loi nous permet d'être à l'unisson des autres pays de l'Union européenne.
(Très bien ! sur les travées de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel.
Unissons-nous !
M. le président.
La parole est à M. Bimbenet.
M. Jacques Bimbenet.
Le groupe du Rassemblement démocratique et social européen votera à
l'unanimité ce projet de loi.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
J'ai donné les raisons du vote de notre groupe. Je veux simplement préciser
que deux de nos collègues ne nous suivront pas dans ce vote positif, l'un, M.
Vergès, ne participera pas au vote, et l'autre, M. Loridant, s'abstiendra.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Mes chers collègues, nous pouvons nous
montrer satisfaits de ce débat et remercier M. le rapporteur des précisions
qu'il a apportées au cours de l'examen de ce projet de loi organique. Nous
avons abouti à un texte cohérent. La possibilité nous a été offerte de résoudre
un certain nombre de problèmes et les modifications qui résultent de nos
travaux constituent de véritables progrès.
J'ai très modestement participé à la rédaction - il y a bien longtemps déjà,
hélas ! - du traité de Rome - j'étais « porte-plume », sans plus. Les
améliorations qui ont été apportées progressivement à la construction
européenne contre vents et marées montrent que cette idée à laquelle nous avons
cru et nous continuons de croire est bien une création de tous les jours. Ce
qui vient d'être fait, comme cela a été très justement souligné par
quelques-uns de nos collègues, apporte en quelque sorte une note humaine à des
dispositions dont l'efficacité n'est pas toujours ressentie parce qu'elles se
cantonnent dans le domaine commercial, économique ou financier.
Mais demain, que va-t-il se passer ? L'euro sera instauré - nous l'espérons -
l'interpénétration des citoyens sera accrue et nous assisterons sans doute peu
à peu à la naissance d'une conscience européenne sans laquelle l'Europe
n'existera pas véritablement. Aujourd'hui, nous avons, peut-être modestement
mais de manière certaine, contribué à la naissance de cette conscience. Le
débat se poursuivra. Je rappellerai simplement que, sans le vote conforme du
Sénat, rien ne pourra être fait.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de
droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
120:
Nombre de votants | 314 |
Nombre de suffrages exprimés | 312157 |
Pour l'adoption | 312 |
12
VACANCE D'UN SIÈGE DE SÉNATEUR
M. le président. M. le président du Sénat a été informé, par lettre en date du 17 septembre 1997 de M. le ministre de l'intérieur, qu'à la suite de la déchéance de plein droit de M. Claude Pradille, sénateur du Gard, le siège détenu par ce dernier est devenu vacant et sera pourvu selon les termes de l'article L.O. 322 du code électoral lors du prochain renouvellement partiel du Sénat.
13
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au développement
d'activités pour l'emploi des jeunes.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 423, distribué et renvoyé à la
commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
14
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. Michel Charasse une proposition de loi relative à
l'organisation de la chasse en France.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 424, distribuée et renvoyée
à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
15
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION D'ACTE
COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la
directive 93/74/CEE du Conseil concernant les aliments pour animaux visant des
objectifs nutritionnels particuliers et modifiant les directives 74/63/CEE et
82/471/CEE.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-923 et
distribuée.
16
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Michel Alloncle un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi
autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République
française et le Gouvernement de la République de Croatie sur l'encouragement et
la protection réciproques des investissements (n° 342, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 419 et distribué.
J'ai reçu de M. Michel Alloncle un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi
autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention cadre
européenne sur la coopération transfontalière des collectivités ou autorités
territoriales (ensemble trois déclarations) (n° 371, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 420 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Habert un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi
autorisant la ratification de la convention pour la protection du milieu marin
de l'Atlantique du Nord-Est (ensemble quatre annexes et deux appendices) (n°
386, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 421 et distribué.
J'ai reçu de Michel Alloncle un rapport fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi
autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association
entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, agissant dans le
cadre de l'Union européenne, d'une part, et la République de Slovénie, d'autre
part (n° 388, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 422 et distribué.
17
DÉPÔT D'UN AVIS
M. le président.
J'ai reçu de M. Gérard César un avis présenté au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur les conclusions de la commission des
affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Charles Descours, Claude
Huriet, Maurice Blin, Guy Cabanel, Henri de Raincourt, Josselin de Rohan,
Jacques Bimbenet et Paul Blanc, Mme Annick Bocandé, MM. Louis Boyer, Dominique
Leclerc, Bernard Seillier et Jean-Pierre Fourcade, relative au renforcement de
la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits
destinés à l'homme (n° 413, 1996-1997).
L'avis sera imprimé sous le numéro 418 et distribué.
18
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, fixée au
jeudi 18 septembre 1997, à quinze heures :
Discussion du projet de loi (n° 62, 1995-1996) relatif à la partie législative
du livre VI (nouveau) du code rural.
Rapport (n° 414, 1996-1997) de M. Alain Pluchet, fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan.
Aucun amendement n'est plus recevable.
Délais limites pour les inscriptions de parole
dans la discussion générale
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi relatif à l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit
ans sur les listes électorales (n° 408, 1996-1997) (urgence déclarée).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 22 septembre 1997, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 septembre 1997, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi
relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité
sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 413, 1996-1997).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 23 septembre 1997, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 septembre 1997, à douze
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
Lors de sa séance du 17 septembre 1997, le Sénat a désigné M. Gérard Roujas pour siéger en qualité de suppléant,au sein du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles, en qualité de titulaire, au sein de la section de l'assurance des salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles créée au sein du Conseil supérieur.
INSTITUT DES HAUTES ÉTUDES
DE DÉFENSE NATIONALE
En application de l'article 9 du décret n° 97-817 du 5 septembre 1997, M. le Président du Sénat a désigné, le 17 septembre 1997, M. Denis Badré en qualité de membre du conseil d'administration de l'institut des hautes études de défense nationale.
AVIS DE VACANCE
D'UN SIÈGE DE SÉNATEUR
M. le Président du Sénat a été informé, par lettre en date du 17 septembre 1997 de M. le ministre de l'intérieur, qu'à la suite de la déchéance de plein droit de M. Claude Pradille, sénateur du Gard, le siège détenu par ce dernier est devenu vacant et sera pourvu selon les termes de l'article L.O. 322 du code électoral lors du prochain renouvellement partiel du Sénat.
NOMINATION DES MEMBRES
DE COMMISSIONS PERMANENTES
Dans sa séance du mercredi 17 septembre 1997, le Sénat a nommé :
- M. Roger Hesling membre de la commission des affaires culturelles en
remplacement de M. Marcel Charmant, démissionnaire ;
- M. Michel Charzat membre de la commission des affaires économiques et du
plan en remplacement de M. Claude Haut, démissionnaire ;
- Mme Dinah Derycke membre de la commission des affaires sociales en
remplacement de M. Bialski, démissionnaire de son mandat de sénateur ;
- M. Jean-Pierre Lafond membre de la commission des affaires sociales à la
place laissée vacante depuis le 18 juin 1997 ;
- M. Bernard Angels membre de la commission des finances, du contrôle
budgétaire et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Alain
Richard dont le mandat sénatorial a cessé ;
- M. Claude Haut membre de la commission des finances, du contrôle budgétaire
et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Jean-Pierre
Masseret dont le mandat sénatorial a cessé ;
- M. Marcel Charmant membre de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale
en remplacement de M. Michel Charzat, démissionnaire.
ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DU CONSEIL
DE L'EUROPE ET ASSEMBLÉE
DE L'UNION DE L'EUROPE OCCIDENTALE
Au cours de sa séance du mercredi 17 septembre 1997, le Sénat a désigné pour représenter la France au sein de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et de l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale, Mme Josette Durrieu, comme membre titulaire, en remplacement de M. Jean-Pierre Masseret, ainsi que MM. James Bordas et Marcel Debarge, comme membres suppléants, en remplacement respectivement de M. Charles-Henri de Cossé-Brissac et de Mme Josette Durrieu.
DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES
DÉLÉGATION DU SÉNAT POUR L'UNION EUROPÉENNE
(en application de l'ordonnance n° 58-1100
du 17 novembre 1958
relative au fonctionnement des assemblées parlementaires)
Dans sa séance du mercredi 17 septembre 1997, le Sénat a nommé M. Michel Dreyfus-Schmidt, membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, en remplacement de M. Alain Richard, nommé membre du Gouvernement.
DÉLÉGATION DU SÉNAT
POUR LES PROBLÈMES DÉMOGRAPHIQUES
(Loi n° 79-1204 du 31 décembre 1979
relative à l'interruption volontaire de grossesse)
Lors de sa séance du mercredi 17 septembre 1997, le Sénat a nommé Mme Nicole Borvo pour siéger au sein de la délégation parlementaire pour les problèmes démographiques, en remplacement de Mme Michelle Demessine, nommée membre du Gouvernement.
DÉLÉGATION DU SÉNAT
À L'OFFICE PARLEMENTAIRE
D'ÉVALUATION DE LA LÉGISLATION
(En application de la loi n° 96-516 du 14 juin 1996
tendant à créer un office parlementaire d'évaluation
de la législation)
Lors de sa séance du mercredi 17 septembre 1997, le Sénat a nommé Mme Maryse
Bergé-Lavigne pour siéger au sein de la délégation du Sénat à l'Office
parlementaire d'évaluation de la législation, en remplacement de M. Alain
Richard, nommé membre du Gouvernement.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Renforcement des services publics
en milieu rural
29.
- 17 septembre 1997. -
M. Michel Sergent
souhaiterait attirer l'attention de
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
sur le maintien, voire le renforcement, des services publics en milieu rural.
L'aménagement du territoire et le développement du monde rural doivent
composer, depuis les années quatre-vingt, et aujourd'hui plus que jamais, avec
la complexité. Déconcentrations des normes et des moyens (nouvelles politiques
de la ruralité, politiques d'insertion, fonds de péréquation, services publics
locaux d'aménagement, etc.), décentralisation des compétences et des moyens
autour de collectivités locales regalvanisées et ouvertes à la coopération,
sont deux impératifs, sans lesquels il ne peut y avoir de changement durable et
novateur. Les populations rurales - au nom du principe de l'égalité devant le
service public - ont droit au même titre que les urbains à des services publics
de qualité. Et malgré de nombreuses initiatives, une inquiétude diffuse
continue à s'exprimer face à la diminution de la population et au resserrement
des services traditionnels (poste, gendarmerie, équipement, écoles...). Par
ailleurs, la population rurale vit très mal la perte de son secteur marchand.
La fermeture de la boulangerie, du tabac, de l'épicier... C'est à chaque fois
un peu de vie en moins. Certes, tous ces problèmes ne sont malheureusement pas
nouveaux, ils sont bien connus de tous. Aussi, étant donné la politique de
priorité que s'est fixée le Gouvernement au réencadrement social et
territorial, il lui demande quelles mesures concrètes seront prises pour
réajuster le déficit en matière de service public en milieu rural.
Conséquences de la non-privatisation d'Air France
30.
- 17 septembre 1997. -
M. François Gerbaud
appelle l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur les conséquences de la non-privatisation du groupe Air France sur l'avenir
du pavillon français. Il lui rappelle que, par cette décision, trois points
fondamentaux pour l'avenir du transport aérien français restent en suspens :
l'avenir du groupe Air France tout d'abord (qui doit répondre à quatre
objectifs principaux qui sont : l'affrontement d'une nouvelle concurrence, la
dynamisation de l'offre commerciale, la poursuite du redressement financier et
la création d'alliances internationales) ; le développement de Roissy ensuite
(qui ne peut assurer pleinement son rôle de plate-forme européenne sans ses
deux pistes supplémentaires) ; la mise en oeuvre du schéma aéroportuaire enfin
(qui a été acté dans la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire, notamment par l'utilisation
plus rationnelle des aéroports existants). Il lui demande de bien vouloir lui
préciser quelle politique il entend mener pour le transport aérien français.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 17 septembre 1997
SCRUTIN (n° 120)
sur l'ensemble du projet de loi organique déterminant les conditions
d'application de l'article 88-3 de la Constitution relatif à l'exercice par les
seuls citoyens de l'Union européenne résidant en France, autres que les
ressortissants français, du droit de vote et d'éligibilité aux élections
municipales et portant transposition de la directive 94/80/CE du 19 décembre
1994 .
Nombre de votants : | 313 |
Nombre de suffrages exprimés : | 311 |
Pour : | 311 |
Contre : | 0 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
Groupe communiste républicain et citoyen (16) :
Pour :
14.
Abstention :
1. _ M. Paul Loridant.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Paul Vergès.
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen (22) :
Pour :
22.
Groupe du Rassemblement pour la République (93) :
Pour :
92.
Abstention :
1. _ M. Robert Calmejane.
Groupe socialiste (75) :
Pour :
73.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui
présidait la séance et M. René Rouquet (député).
Groupe de l'Union centriste (58) :
Pour :
57.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
Groupe des Républicains et Indépendants (44) :
Pour :
44.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :
Pour :
9.
Ont voté pour
François Abadie
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Guy Allouche
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Alphonse Arzel
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis
Cavalier-Benezet
Auguste Cazalet
Charles
Ceccaldi-Raynaud
Monique
Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
William Chervy
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Yvon Collin
Charles-Henri
de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Bertrand Delanoë
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Jacques Delong
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Jean Derian
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Michel Duffour
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Aubert Garcia
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian
de La Malène
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Dominique Larifla
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François
Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
Guy Lèguevaques
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Claude Lise
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Jean Madelain
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
Michel Manet
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette
Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Minetti
Gérard Miquel
Louis Moinard
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Robert Pagès
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Jean-Marc Pastor
Michel Pelchat
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Alain Peyrefitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Roger Quilliot
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
René Régnault
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Michel Rocard
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand
de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Fernand Tardy
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Henri Weber
Abstentions
MM. Robert Calmejane et Paul Loridant.
N'a pas pris part au vote
M. Paul Vergès.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait
la séance.
Ne peut participer aux travaux du Sénat
(En application de l'article L.O. 137 du code électoral)
M. René Rouquet.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 314 |
Nombre de suffrages exprimés : | 312 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 157 |
Pour l'adoption : | 312 |
Contre : | 0 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.