ACCORDS EUROPÉENS AVEC LA LITUANIE,
LA LETTONIE ET L'ESTONIE
Adoption de trois projets de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion :
- du projet de loi (n° 392, 1996-1997) autorisant la ratification de l'accord
européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs
Etats membres, d'une part, et la République de Lituanie, d'autre part. [Rapport
n° 429 (1996-1997).]
- du projet de loi (n° 393, 1996-1997) autorisant la ratification de l'accord
européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs
Etats membres, d'une part, et la République de Lettonie, d'autre part. [Rapport
n° 429 (1996-1997).]
- du projet de loi (n° 394, 1996-1997) autorisant la ratification de l'accord
européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs
Etats membres, d'une part, et la République d'Estonie, d'autre part. [Rapport
n° 429 (1996-1997).]
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion
générale commune de ces trois projets de loi.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici,
ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des
affaires européennes.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur,
mesdames, messieurs les sénateurs, les projets de loi qui vous sont présentés
aujourd'hui ont pour objet d'autoriser la ratification des accords
d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une
part, les Républiques d'Estonie, de Lituanie et de Lettonie, d'autre part.
Cette ratification, accomplie dans treize des quinze Etats membres de l'Union,
est justifiée par les dispositions de compétence nationale qui figurent dans
ces accords, fondés sur l'article 238 du traité de Rome et sur l'article 98 du
traité CECA.
Ces accords transforment la nature des relations de ces pays avec l'Union
européenne, qui ont connu des développements considérables en l'espace de
quelques années seulement. Rappelons-nous : voilà quelque six ans, en août
1991, l'Union européenne reconnaissait l'indépendance des pays baltes puis
signait avec eux, en mai 1992, des accords de commerce et de coopération,
transformés en accords de libre-échange entrés en vigueur le 1er janvier
1995.
Et le chemin parcouru depuis la signature, le 12 juin 1995, des accords
d'association qui vous sont aujourd'hui présentés est tout aussi
impressionnant.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les
sénateurs, la mise en oeuvre de ces accords d'association revêt une importance
politique majeure.
Le renforcement de la stratégie de préparation à l'adhésion des pays
candidats, dont les accords d'association constituent l'un des piliers,
présente une acuité croissante, alors que se présentent à nous des échéances,
historiques pour l'Europe - en l'occurrence, le mot « historiques » n'est pas
trop fort. La réunification de notre continent et le renforcement de sa
stabilité sont devenus des perspectives concrètes.
Comme j'ai eu l'occasion de l'exposer voilà quelques instants lors de l'examen
du projet de loi sur l'accord d'association avec la Slovénie, le Gouvernement
estime que l'objectif premier du Conseil européen de Luxembourg sera de définir
les éléments essentiels du processus d'élargissement, qui inclut, selon nous,
tous les candidats. Il faut en effet éviter la création de nouvelles lignes de
fracture en Europe. Cette préoccupation est bien sûr particulièrement sensible
dans le cas des pays baltes : comme vous le savez, la Commission a recommandé
au Conseil l'ouverture des négociations d'adhésion avec l'Estonie, considérant
en revanche que les conditions n'étaient pas encore réunies pour la Lettonie et
la Lituanie.
Il est pourtant essentiel, comme l'a affirmé M. le Président de la République
à l'occasion de la visite en France du président lituanien, de ne laisser aucun
doute aux pays baltes sur la place qui est la leur au sein de la famille
européenne, dont ils ont été trop longtemps coupés, compte tenu de
circonstances historiques que chacun connaît. La France a, pour sa part, à
coeur d'y contribuer. Le développement et la qualité de nos relations
bilatérales en portent témoignage, même si des potentialités existent sans
doute pour développer encore les relations commerciales. La France a également
joué tout son rôle dans ce rapprochement progressif entre l'Union européenne et
les Etats baltes. Est-il nécessaire de rappeler que les accords d'association
ont été signés, là encore, sous présidence française ? Il est de notre
responsabilité de poursuivre cet engagement : il est grand temps que les
relations de l'Union européenne avec les trois Etats baltes soient mises au
même niveau que celles qui ont été nouées avec les pays d'Europe centrale et
orientale, lesquels sont désormais tous associés.
Permettez-moi de brosser à grands traits le contenu de ces accords
d'association, très proches des autres accords européens déjà en vigueur.
Ces accords visent d'abord à promouvoir le dialogue politique. Celui-ci est à
la fois fondamental et original, entre membres d'une future Europe élargie. En
effet, l'Union est d'abord un projet politique. Dans cet esprit, des procédures
de concertation sont instaurées dans le cadre multilatéral et selon les formes
et pratiques établies avec les pays associés d'Europe centrale.
Ces accords visent également à établir progressivement une zone de
libre-échange. Si les principales dispositions dans le domaine économique et
commercial sont couvertes par les accords de libre-échange entrés en vigueur au
1er janvier 1995, les accords d'association introduisent des dispositions
visant à faciliter la circulation des travailleurs et des capitaux, ainsi que
la liberté d'établissement en matière de prestations de services. Les accords
prévoient aussi l'application par les trois pays baltes des règles de
concurrence prévues par le traité.
Une vaste coopération est instituée. Elle porte sur de multiples domaines : la
normalisation, la science et la technologie, l'éducation et la formation,
l'agriculture, l'énergie, la sûreté nucléaire, l'environnement, les transports,
les télécommunications, les services financiers, la protection et la promotion
des investissements, la lutte contre le blanchiment de l'argent de la drogue,
le développement régional, le tourisme, la coopération sociale, la protection
des consommateurs, l'information, les petites et moyennes entreprises, les
douanes, les statistiques et la culture. Cette coopération doit aussi
promouvoir le rapprochement des législations, afin de faciliter à terme
l'adhésion des pays associés.
Enfin, les accords constituent une base pour l'assistance technique et
financière de la Communauté.
Ces accords visent donc tout particulièrement à préparer l'entrée des pays
baltes dans l'Union. Bien entendu, comme les autres Etats candidats, les pays
baltes devront être en mesure de remplir les obligations qui découlent de
l'adhésion, en remplissant les conditions économiques et politiques requises et
énumérées par le Conseil européen de Copenhague en juin 1993. Ils ont déjà
accompli des efforts considérables en ce sens, avec un soutien résolu de
l'Union, notamment par le biais d'une assistance technique et financière. La
mise en oeuvre des accords d'association concrétisera la poursuite de
l'engagement de l'Union dans cette démarche vers l'adhésion, dans le respect de
l'égalité de traitement entre tous les pays candidats.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent les trois
accords d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres,
d'une part, les républiques d'Estonie, de Lituanie et de Lettonie, d'autre
part, qui font l'objet des projets de loi aujourd'hui soumis à votre
approbation.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur plusieurs travées
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, nous sommes appelés à nous prononcer sur trois accords européens -
accords d'association - conclus le 12 juin 1995 entre chacun des trois pays
baltes - l'Estonie, la Lituanie et la Lettonie - d'une part, et l'Union
européenne, d'autre part.
Je formulerai une observation particulière à propos des territoires
d'outre-mer associés. En effet, une déclaration unilatérale du Gouvernement
français spécifie que l'accord européen que nous allons ratifier ne s'applique
pas aux territoires d'outre-mer associés à la Communauté européenne. Cette
remarque a été incluse dans l'acte final de ces accords d'association.
M. Daniel Millaud.
Très bien !
M. André Dulait,
rapporteur.
Ces accords comprennent, comme tous ceux qui ont été
précédemment signés par l'Union européenne avec les autres pays d'Europe
centrale et orientale, plusieurs volets. M. le ministre les ayant rappelés, je
les évoquerai très brièvement.
Il s'agit, d'abord, d'un volet commercial, dans lequel se trouvent reprises
les principales dispositions des accords de libre-échange. Il s'agit, ensuite,
d'un volet politique, qui est destiné à associer les trois pays aux activités
extérieures de l'Union. Il s'agit, en outre, d'un volet de coopération
économique, qui s'étend à de très nombreux domaines. Il s'agit, enfin, d'un
volet plus juridique, relatif au droit d'établissement, à la circulation des
travailleurs et des capitaux, aux règles de concurrence, ainsi que cela vient
d'être souligné.
Pour tenir compte de l'état d'avancement de chacun des trois pays dans leur
démarche vers une économie de marché adaptable au cadre communautaire, une
période de transition générale a été ménagée pour la Lettonie et la Lituanie,
mais pas pour l'Estonie, comme M. le ministre vient de le souligner. A cet
égard, il nous a donné un certain nombre d'assurances, en nous indiquant que la
négociation devait être continue et évolutive. Cela nous permettra
vraisemblablement, le moment venu, de pouvoir harmoniser cette situation qui
serait préjudiciable à une entrée cohérente de ces trois pays dans l'ensemble
de notre système.
Sur le plan économique, les pays baltes ont engagé de courageuses politiques
de stabilisation et des résultats encourageants sont aujourd'hui
perceptibles.
Parallèlement aux réformes économiques et politiques qui ont été engagées dès
le lendemain de l'indépendance, les pays baltes ont réorienté leur commerce
extérieur vers les pays d'économie libérale de marché de l'OCDE, et en
particulier vers ceux de l'Union européenne.
Ainsi, la Lituanie réalise 50 % de ses échanges avec les pays de l'OCDE, dont
40 % avec ceux de l'Union européenne. Ses deux premiers partenaires commerciaux
restent la Russie et l'Allemagne, qui réalise un niveau d'opérations
commerciales avec la Lituanie bien supérieur à celui qui est réalisé par la
France, laquelle n'est que son treizième fournisseur.
Par ailleurs, 45 % des exportations de la Lettonie et 50 % de ses importations
sont réalisées avec l'Union européenne. Les deux premiers partenaires sont, là
encore, la Russie et l'Allemagne. La France n'est que le quinzième partenaire
de la Lettonie.
L'Estonie, enfin, réalise 54 % de ses échanges avec l'Union européenne, dont
60 % avec les pays nordiques. Les parts de marché de la France ne s'élèvent, là
aussi, qu'à 2 %.
Ces informations démontrent, si besoin était, la regrettable faiblesse de la
position française dans les échanges commerciaux que nous réalisons avec les
pays baltes.
En termes d'investissements, notre situation n'est d'ailleurs guère plus
brillante. En Estonie, notre part dans les investissements étrangers cumulés
est de 0,3 %, en dépit d'un environnement juridique très favorable ; elle n'est
que de 0,1 % en Lettonie, et nous ne sommes que le vingtième investisseur en
Lituanie.
Mes chers collègues, je ne rappellerai pas ici les principales dispositions,
très voisines, des trois accords d'association. M. le ministre vient de nous
les résumer et elles figurent dans mon rapport écrit.
Par delà leur dispositif commercial, qui prévoit l'institution de zones de
libre-échange, les accords d'associations ont également une ambition
politique.
Le dialogue qu'ils instituent formellement, et qui pourra se prolonger dans le
cadre d'une « conférence européenne » suggérée par la France et réunissant les
pays candidats à l'adhésion, est conçu comme une pédagogie communautaire à
l'intention des futurs membres. Il prend en compte, en l'occurrence, les
préoccupations internationales des trois Etats baltes, que je souhaite à
présent rappeler.
D'abord, il existe une méfiance persistante à l'égard du voisin russe. En
effet, un climat de suspicion réciproque règne encore sur la question
importante des minorités russophones d'Estonie et de Lettonie, sur le sort
desquelles la Russie entend exercer une attention vigilante, ou encore sur
certains différends frontaliers.
Ensuite, les Etats baltes entendent conjuguer leurs politiques, et chacun des
trois Etats a pris conscience de la nécessité d'une coordination de ses efforts
avec ceux des deux autres dans les différents domaines économique, diplomatique
et sécuritaire. Sur le plan économique et commercial, les Etats baltes ont
d'ailleurs signé en 1993 un traité de libre-échange pour les marchandises
manufacturées, prolongé en 1996 par un accord de même nature pour les produits
agricoles.
Enfin, les Etats baltes ont une volonté d'ancrage à l'Ouest.
Comme les autres pays d'Europe centrale et orientale, les pays baltes ont,
comme souci prioritaire, la participation aux organisations ouest-européenne et
euro-atlantique.
A l'UEO, l'Union de l'Europe occidentale, les pays baltes ont le statut d'«
associés partenaires ». De même, depuis 1994, les Etats baltes sont parties,
dans le cadre de l'OTAN, au partenariat pour la paix. Le récent sommet de
Madrid n'a pas retenu les pays baltes parmi les pays appelés à faire partie de
la première vague d'adhésion à l'Alliance atlantique. En l'occurrence, une
telle inscription aurait probablement conduit la Russie, déjà plus que
réticente à toute idée d'élargissement de l'Alliance, à provoquer une crise
politique majeure avec les alliés. La mention dans le communiqué final de
l'importance de la zone baltique pour la sécurité du continent n'a pas
véritablement compensé, pour les pays baltes, qui s'estiment toujours menacés,
leur maintien en lisière de l'Alliance atlantique. Peut-être convient-il
d'étudier, dès à présent, l'élaboration d'une charte prévoyant des relations
spéciales entre l'OTAN et les trois Etats baltes.
Enfin, s'agissant de l'adhésion à l'Union européenne, la Commission, dans son
avis du 16 juillet 1997, n'a retenu que l'Estonie comme le seul des pays baltes
réunissant les critères requis. Quelle que soit la validité des appréciations
portées, objectivement, il reste que le choix d'accueillir dans l'Union un seul
des trois Etats baltes prête à débat. Mais, là aussi, M. le ministre nous a
rassurés sur l'évolution probable du dossier.
S'il semble acquis que l'Estonie a, sur le plan économique, une certaine
avance sur ses deux partenaires, le critère « politique » concernant les
questions du traitement des minorités russophones place l'Estonie et la
Lettonie sur le même plan.
Surtout, comment ces trois pays, qui ont commencé à réaliser entre eux une
zone de libre-échange, pourront-ils la faire fonctionner de façon cohérente si
l'un d'entre eux participe à une structure d'intégration économique et
commerciale plus poussée alors que les deux autres en seraient pour l'heure
exclus ?
Enfin, mes chers collègues, aussi souhaitables que puissent être les
élargissements à venir, il convient d'avoir présent à l'esprit le difficile
problème de la réforme institutionnelle de l'Union, que le traité d'Amsterdam
n'a pas résolu. Or les élargissements à venir ne prennent leur sens que dans
une Union réformée, condition de son efficacité. Ce sera l'objet d'un prochain
débat.
Sur ce point, M. le ministre nous a donné des assurances que nous saurons lui
rappeler le moment venu. En attendant, mes chers collègues, suivant en cela
l'avis de la commission des affaires étrangères, je vous propose d'adopter les
trois projets de loi qui nous sont soumis.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Je voudrais dire rapidement un mot d'une décision qui m'étonne. Vous en avez
parlé, monsieur le ministre, et M. le rapporteur, notre ami André Dulait, vient
d'en faire longuement état.
Pourquoi la Commission européenne a-t-elle choisi de privilégier l'Estonie,
pourquoi n'a-t-elle, dans un premier temps, retenu que sa candidature,
reportant à plus tard les accords avec la Lettonie et la Lituanie ? A mon avis,
il semblerait de toute évidence que, pour des raisons historiques, c'est la
solution inverse qui eût dû prévaloir.
La Lituanie a constamment été liée à l'histoire de la Pologne ; elle est donc
très proche de l'Europe. Quant à la Lettonie, elle a appartenu dès le xiiie
siècle aux Chevaliers teutoniques. Depuis le Moyen Age, elle a donc été
convertie au christianisme, puis, au xvie siècle, à la Réforme, et elle a été
rattachée longtemps à la Suède.
L'Estonie est différente. D'abord convertie au luthéranisme, mais trop proche
de la Russie et de sa capitale, Saint-Petersbourg, créée par Pierre le Grand,
elle fut conquise dès le début du xviiie siècle et se trouve, maintenant
encore, habitée par une population en grande partie russophone.
Quelle est la présence de la France dans ces trois pays ? Elle est faible.
Cependant, on compte aujourd'hui 250 Français immatriculés en Lettonie et un
lycée franco-lettonien existe à Riga. En Lituanie, on recense près de 200 de
nos compatriotes ; Vilnius possède une bonne Alliance française et plusieurs
sociétés françaises ont commencé à s'y établir.
Tel n'est pas le cas pour l'Estonie. A Tallin, on ne compte que 38
immatriculés et tout au plus une cinquantaine de Français, y compris les
personnels de l'ambassade. Notre influence culturelle et économique y est des
plus réduites.
Pour ce qui nous concerne, nous, Français, le choix fait par la Commission
européenne n'est absolument pas compréhensible. Il ne présente aucun intérêt
et, pourrait-on dire, va même à contresens.
La Lituanie, la Lettonie et l'Estonie, les trois « pays baltes », ont toujours
désiré manoeuvrer ensemble depuis qu'ils ont retrouvé leur indépendance en
1918, avant d'être annexés par l'URSS en 1940. Ils se sont unis dans leur
revendication pour la liberté et l'indépendance dès que l'ère Gorbatchev l'a
permis.
Dois-je rappeler l'action d'un homme comme Vytautas Landsbergis, qui, avec son
mouvement Sajudis, créé en 1988, a lutté courageusement contre l'occupation
soviétique en Lituanie ? Son exemple a été suivi par la Lettonie en 1990, puis,
plus tard, par l'Estonie, en 1991.
Dans ces conditions, comment expliquer cette décision de la Commission
européenne, privilégiant l'Estonie au détriment de la Lituanie et de la
Lettonie ?
J'ajoute - M. le ministre et M. le rapporteur l'ont souligné - qu'il existe un
traité de libre-échange et une entente économique entre ces trois Etats. De
toute évidence, il ne faut pas les dissocier, mais, au contraire, les traiter
sur un pied d'égalité.
J'espère, monsieur le ministre, qu'il en sera ainsi, et que, dans le processus
que vous avez défini comme progressif et évolutif, la Lituanie, la Lettonie et
l'Estonie pourront ensemble, comme elles le souhaitent, être accueillies au
sein de l'Europe.
M. André Maman.
Très bien !
M. Pierre Moscovici,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici,
ministre délégué.
Cette question est effectivement l'une des plus
sensibles et des plus délicates auxquelles le Conseil européen sera confronté
au mois de décembre. J'y suis très sensible pour avoir reçu la semaine
dernière, à Paris, le président de l'Assemblée lituanienne, M. Landsbergis, et
pour avoir rencontré, à l'occasion du sommet des chefs d'Etat du Conseil de
l'Europe, à Strasbourg, les 10 et 11 octobre, les présidents estonien et
letton.
Les travaux menés à Bruxelles montrent des différences d'appréciation entre
les Etats membres, même si, il faut le dire, une majorité d'entre eux souscrit
à l'analyse réalisée par la Commission.
Outre les mérites propres de chacune des candidatures, les Etats membres
souhaitent bien évidemment que l'élargissement contribue à la réunification et
à la stabilisation du continent, notamment par le développement de relations de
coopération et de bon voisinage entre les pays.
La Commission estime que le niveau de préparation respectif de ces trois pays
est de nature à justifier une différenciation dès le sommet de Luxembourg. Elle
souligne particulièrement l'avancée de l'Estonie dans le domaine de la
stabilisation macro-économique et des réformes structurelles menées - même si
elle connaît certains retards dans le domaine économique - ainsi que, dans une
moindre mesure, dans la capacité à faire face à la pression concurrentielle.
De l'avis de la Commission, il ressort également que les différences sont
moins tranchées en ce qui concerne, d'une part, la reprise de l'acquis
communautaire, où chaque pays à ses carences propres, et, d'autre part, la
capacité administrative et juridictionnelle à assurer l'application de cet
acquis, problème commun à l'ensemble des candidats.
Pour notre part, et sans avoir à ce jour de prise de position définitive - car
c'est une question qui, je le répète, reste à trancher - nous estimons qu'il y
a effectivement, dans les domaines cités par la Commission, une petite avance
de calendrier en faveur de l'Estonie. Pour autant, il convient, je l'ai dit, de
ne pas préjuger l'avenir et de prendre en compte la dynamique des réformes
menées dans les autres pays baltes.
Dans notre approche, nous faisons un lien entre la question de la liste des
pays avec lesquels les premières négociations pourront s'ouvrir et la suite du
processus.
A cet égard, j'insiste sur l'importance du projet de conférence européenne que
propose la France ainsi que sur celle des clauses de rendez-vous annuels. Ces
rendez-vous permettront une certaine flexibilité et, éventuellement, le
rattrapage ou l'arrivée au fur et à mesure dans les négociations
d'élargissement des autres pays baltes. Si ces derniers n'étaient pas retenus
par le Conseil à Luxembourg, il faudrait effectivement que se déroule le
processus continu et évolutif que j'évoquais plus tôt.
S'agissant, enfin, de la très forte insuffisance des échanges entre la France
et les pays baltes, même si je n'ai pas la prétention d'y remédier, je me
rendrai dans les trois Etats baltes dès le mois de décembre, ce qui me
permettra peut-être de me faire sur place une opinion encore plus précise,
avant le Conseil de Luxembourg.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
ACCORD EUROPÉEN AVEC LA LITUANIE