M. le président. M. Jean-Paul Delevoye appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur les conditions de mise en oeuvre des articles L. 47 et L. 48 du code des postes et télécommunications par le décret n° 97-683 du 30 mai 1997 en ce qui concerne les droits de passage sur le domaine public routier. Se posent, en particulier, le problème du montant de la redevance maximale annuelle que les communes seront autorisées à demander aux différents opérateurs à partir du 1er janvier 1998 et celui des éléments techniques qui ont conduit à la fixation de ce montant, soit 15 centimes par mètre linéaire.
En effet, ce montant très faible a été fortement minoré par rapport aux estimations initiales, de l'ordre de 1 franc par mètre linéaire, et cela sans qu'aucune explication ait été donnée aux communes. Dans le même temps, le montant des redevances pour l'occupation des autoroutes est resté identique aux estimations initiales, soit 10 francs et 20 francs par mètre linéaire. D'autre part, la notion d'« artère » introduite par le décret en droit français, en matière de calcul de cette redevance, reste insuffisamment précise et sujette à interprétation. Elle mérite donc d'être une fois pour toutes précisée.
Enfin, l'instauration d'une autorisation tacite d'occupation du domaine public en l'absence d'une réponse de la collectivité territoriale concernée dans le délai de deux mois, quelle que soit la taille de celle-ci, pose avec acuité le problème de la préservation de l'intégrité du domaine public.
Il lui demande donc de bien vouloir lui répondre avec précision sur les deux premiers points et de lui indiquer les perspectives de son action sur le troisième point, ainsi que sur la nécessaire concertation avec les collectivités locales. (N° 35.)
La parole est à M. Delevoye.
M. Jean-Paul Delevoye. Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question porte sur les conditions de mise en oeuvre des articles L. 47 et L. 48 du code des postes et télécommunications par le décret du 30 mai 1997, en ce qui concerne les droits de passage sur le domaine public routier. Compte tenu de l'explosion des industries de télécommunication et de leur importance stratégique en matière d'aménagement du territoire, elle me paraît fondamentale.
Ledit décret pose plusieurs problèmes, monsieur le secrétaire d'Etat.
Tout d'abord, il a eu pour effet d'abaisser de façon très importante - de un franc à quinze centimes le mètre linéaire - la redevance maximale annuelle que pouvaient demander aux opérateurs les collectivités locales, alors que, dans le même temps, le montant de la redevance pour l'occupation des autoroutes est passée de dix francs à vingt francs le mètre linéaire.
Il serait intéressant que le Gouvernement explique les conditions techniques ou économiques qui ont justifié une telle baisse, car, au-delà, se pose tout le problème de la tarification de l'usage du sous-sol.
Ensuite, le décret a introduit la notion d'artère dans le droit français. Nous avons consulté différents services juridiques. Il en ressort que cette notion d'artère est, à l'évidence, insuffisamment précise, qu'elle permettra plusieurs interprétations et, partant, dans le contexte actuel, plusieurs contentieux. En effet, une canalisation ou un fourreau, est-ce une seule et unique artère ou plusieurs artères ?
Enfin, dernier problème, dans un souci de préservation de l'intégrité du domaine public, il est regrettable que les opérateurs de télécommunications puissent bénéficier d'une autorisation tacite d'occupation du domaine public en l'absence d'une réponse de l'autorité compétente dans le délai de deux mois.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce sujet ne saurait vous laisser indifférent, d'autant que je connais votre passion pour les stratégies de télécommunication. Je sais aussi les réflexions qui sont menées dans différents pays européens sur le droit d'usage du sol par les collectivités territoriales.
Le décret est susceptible de faire l'objet de diverses interprétations. Il ouvre la voie à des contentieux qui mettraient à mal les relations entre les collectivités locales et les opérateurs.
J'attends donc des éclaircissements ou des précisions de votre part. Pour ce qui me concerne, je reste à votre disposition pour prolonger la réflexion.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Je suis en effet très sensible à sa problématique non seulement en tant que membre du Gouvernement mais aussi en tant qu'élu local. J'ai d'ailleurs reconnu, au travers de votre intervention, l'une des préoccupations de l'Association des maires de France, dont vous êtes le président.
S'agissant de la redevance maximale annuelle relative à l'occupation du domaine public routier - routes nationales, départementales et communales - versée au gestionnaire ou au concessionnaire du domaine occupé, le montant de 1 franc par mètre, envisagé lors de l'élaboration du projet de décret relatif aux droits de passage sur le domaine public routier et aux servitudes prévus par les articles L. 47 et L. 48 du code des postes et télécommunications, avait été retenu de manière à correspondre, pour le réseau existant de télécommunications, à un montant global de l'ordre de 150 millions de francs, chiffre qui avait d'ailleurs été avancé devant le Parlement lors de la discussion du projet de loi de réglementation des télécommunications en juillet 1996.
Compte tenu d'une erreur d'évaluation dans les données fournies par France Télécom, en 1996, sur la longueur totale du réseau, une révision du montant par mètre a été nécessaire, en mars 1997, pour ne pas dépasser dans des proportions considérables le montant global que le Gouvernement avait initialement annoncé.
Ce montant a donc finalement été ramené à 150 francs par kilomètre linéaire, permettant d'atteindre toutefois un montant global supérieur à 150 millions de francs - de l'ordre de 250 millions de francs.
Dans le même temps, par rapport à la première version du projet de décret, il a été introduit une disposition selon laquelle les redevances maximales relatives à l'occupation du domaine public routier évoluent, au 1er janvier de chaque année, proportionnellement à l'évolution de l'indice du coût de la construction - c'est une indexation classique - mesuré au cours des douze mois précédant la dernière publication de l'indice connu au 1er janvier.
Quant à la notion d'« artère », elle a été préférée à celle de « canalisation », employée dans le premier projet de décret.
L'article R. 20-52 du code des postes et télécommunications précise désormais ce qu'on entend précisément par « artère ». Il y a deux cas de figure : dans le cas d'une utilisation du sous-sol, c'est un tube de protection contenant ou non des câbles, ou un câble en pleine terre ; dans les autres cas, il s'agit de l'ensemble des câbles tirés entre deux supports.
Le tube de protection, dans les termes du texte que je viens de citer, recouvre ce que le langage courant des télécommunications désigne par les termes « fourreau » ou « alvéole ».
S'agissant de l'instauration tacite d'autorisation d'occupation du domaine public routier, prévue à l'article R. 20-47 (6°) du code des postes et télécommunications, elle se justifie pour les raisons suivantes : les opérateurs sont soumis, au titre de leur licence, à des obligations de délai de déploiement, de couverture géographique et de qualité de service dont le non-respect pourra être sanctionné. Les délais de délivrance des permissions de voirie conditionnement en partie le respect de ces obligations. La procédure d'approbation tacite pourrait être la mieux à même de concilier les responsabilités incombant aux gestionnaires du domaine public et les contraintes opérationnelles et réglementaires pesant sur les opérateurs de télécommunications.
Cette disposition spécifique du code des postes et télécommunications ne dispense pas le pétitionnaire du respect des règles habituelles prévues par le code de l'urbanisme en matière d'ouverture de chantier.
Le secrétariat d'Etat à l'industrie prépare un guide à destination des responsables locaux. Ce dernier permettra d'améliorer l'information des gestionnaires du domaine public, de les aider à exercer leurs responsabilités et de vous donner satisfaction, monsieur le sénateur, quant au caractère transparent, clair et indubitable de l'application du texte que nous évoquons ce matin.
M. Jean-Paul Delevoye. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delevoye.
M. Jean-Paul Delevoye. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'attention que vous portez aux problèmes rencontrés par les élus locaux.
La question que j'ai posée préoccupe beaucoup l'Association des maires de France, dont je me suis fait le porte-parole.
Je vous remercie pour les précisions importantes que vous avez apportées sur le plan juridique. Elles permettront d'éliminer un certain nombre de contentieux.
Toutefois, comme je l'avais indiqué à votre collègue M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, je crois que le Gouvernement devrait engager une réflexion sur l'élaboration d'un code de l'urbanisme du sous-sol. En effet, il est évident qu'un grand nombre d'industriels des télécommunications utiliseront demain les sous-sols des collectivités territoriales.
Dans un monde livré à la concurrence, la réflexion sur des codifications européennes, voire des normalisations internationales, devrait éviter que, d'une collectivité à une autre, les conditions ne soient différentes.
Par ailleurs, chacun sait que, désormais, le sous-sol sera de plus en plus traversé pour les transports urbains, les télécommunications, voire pour d'autres raisons encore. La codification sur la surface étant relativement restreinte, avec des planifications permettant des projets d'amélioration, un code de l'urbanisme du sous-sol mériterait sans doute d'être considéré. En tout cas, l'Association des maires de France est, sur ce sujet, tout à fait prête à travailler avec le Gouvernement.
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